En cours au Siège de l'ONU

ENV/DEV/2038

​​​​​​​La session technique du Forum sur les forêts (FNUF-16) débute avec le vœu de « reconstruire en mieux et protéger contre de nouvelles pandémies »

La protection, la restauration et l’utilisation durable des forêts sont essentielles pour « reconstruire en mieux et nous protéger contre de nouvelles pandémies », a lancé la Secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique ce matin à l’ouverture de la seizième session du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF).  Mme Elizabeth Maruma Mrema, qui intervenait au cours d’une séance virtuelle mais non moins dense, a estimé que pour aider à réduire le risque de futures pandémies et pour agir contre la perte de la biodiversité, les changements climatiques et les problèmes de santé, nous devons « reconstruire en mieux avec la biodiversité ».

Dans un monde postpandémie, il faut trouver des solutions basées sur les forêts pour le relèvement, a proposé la Présidente de la FNUF-16, Mme Kitty Sweeb (Suriname).  En effet, « reconstruire en mieux » furent les maîtres mots de cette première journée des travaux du Forum dont toutes les séances -quatre heures chaque matinée pendant quatre jours- seront virtuelles jusqu’à la fin des travaux le 29 avril.  Cette commission technique du Conseil économique et social (ECOSOC) a pour principal objectif le suivi de la mise en œuvre du Plan stratégique sur les forêts en cours (2017-2030), adopté en avril 2017 par l’Assemblée générale et qui repose sur six objectifs et 26 cibles directement liés à ceux du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Les forêts couvrent actuellement plus de 30% de la surface terrestre, et on estime qu’environ 1,6 milliard de personnes -soit 25% de la population mondiale- dépendent des forêts, qui constituent un moyen de subsistance, un bassin d’emplois et une source de revenus.  En plus d’abriter environ 80% de toutes les espèces terrestres, les forêts offrent également des services écosystémiques essentiels, tels que le bois, l’alimentation, le carburant, les combustibles, les produits non ligneux et les logements, et ils contribuent à assurer la conservation des sols, la protection des eaux et la qualité de l’air. 

À une époque de crises climatiques, sanitaires et économiques sans précédent, les forêts offrent donc aujourd’hui l’espoir de guérir les gens, l’environnement et l’économie, a indiqué le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  M. Qu Dongyu a souhaité que notre génération soit celle qui aura arrêté la déforestation, la perte de biodiversité et les changements climatiques.  Il s’exprimait au cours de la première partie de la matinée consacrée à une « table ronde de haut niveau sur les principaux développements liés aux forêts », y compris les impacts de la pandémie de COVID-19 sur les forêts et le secteur forestier, qui a précédé le lancement du premier rapport sur les objectifs forestiers mondiaux.

Le Président de l’ECOSOC, M. Munir Akram (Pakistan), a constaté que la nécessité de restaurer l’équité entre les humains et l’harmonie avec la nature n’a jamais été aussi urgente et pressante.  En d’autres mots, a-t-il dit, la priorité mondiale doit être de mettre fin à la pauvreté et à la faim tout en préservant notre planète.  Arrêter et inverser la déforestation peut également réduire les risques et les conditions qui conduisent à la propagation des maladies zoonotiques, a-t-il dit, tandis que le Président de l’Assemblée générale a confirmé le fait que la COVID-19 étant une maladie zoonotique, elle a fait ressortir les risques associés à notre empiétement sur le monde naturel. 

Selon M. Volkan Bozkır, notre monde nous dit qu’il y a un problème dans notre relation avec la nature.  « Malheureusement, nous avons ignoré les messages de la terre pendant trop longtemps. »  En tant que Président de l’Assemblée générale, il a dit soutenir les solutions qui créent une dynamique politique grâce à une série de réunions et d’événements de haut niveau, comme ce dialogue de haut niveau sur la désertification, la dégradation des terres et la sécheresse, prévu le 20 mai.  « Alors que nous passons de la Décennie de la lutte contre la désertification à une nouvelle Décennie de restauration des écosystèmes, saisissons cette occasion pour renouveler notre engagement à créer un avenir plus équitable, où tous les peuples bénéficient d’une vie en harmonie avec la nature », a proposé le Président de l’Assemblée générale.

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, a pour sa part exhorté la communauté internationale à préparer un relèvement transformateur et qui englobe des secteurs interdépendants tels que l’eau, l’énergie, les transports, l’agriculture, l’exploitation minière, le tourisme, les technologies de l’information et les soins de santé.  Pour elle, les forêts peuvent jouer un rôle essentiel dans cette transformation.  La restauration des forêts et la gestion durable des forêts peuvent nous y aider, a acquiescé la Secrétaire exécutive adjointe de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification.  Mme Tina Birmpili a rappelé que des études estiment que chaque dollar investi dans la restauration des forêts dégradées peut produire entre 7 et 30 dollars de bénéfices économiques.  « En investissant dans nos forêts, nous investissons dans un avenir postpandémique plus vert et plus brillant », a-t-elle tranché. 

Des forêts protégées peuvent continuer à offrir de multiples avantages, y compris en matière d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques, a aussi fait observer le Directeur de la division Transparence de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC).  M. Don Cooper a expliqué que des forêts correctement gérées peuvent avoir le potentiel d’éliminer entre 2,8 et 26,9 gigatonnes de dioxyde de carbone provenant de l’atmosphère chaque année.  C’est fort de ce constat que le Ministre de l’environnement et de l’action climatique du Portugal, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE), a demandé que les forêts soient pleinement intégrées dans les stratégies de relèvement postpandémie. 

La Directrice exécutive de la « South African Pulp and Paper » a recommandé de promouvoir l’utilisation de bois certifié et de rendre la certification plus accessible aux petits producteurs.  Pour sa part, la République tchèque a initié le versement de subventions aux populations afin de compenser les forêts endommagées.  Pour le Honduras également, la gestion durable des forêts passe par une participation active des communautés locales, ainsi que par le respect des droits humains des peuples autochtones et afro-honduriens. 

Il est important que nos États –et en particulier ceux qui ont la charge de la gestion durable et responsable des forêts- soient attentifs aux travaux de la communauté scientifique, a plaidé la France qui a invité les délégations à rejoindre l’Alliance pour la préservation des forêts tropicales et humides.  L’Indonésie s’est enorgueillie de voir que ses politiques forestières ont permis une baisse drastique de la déforestation jamais vue au cours des décennies passées. 

L’Allemagne croit également fermement à l’énorme potentiel des solutions basées sur la forêt pour relever les défis mondiaux et atteindre les objectifs de développement durable (ODD).  Pendant la pandémie, 90% du public allemand a visité les forêts pour découvrir la nature, a-t-il salué.  Les visiteurs des forêts nationales américaines -environ 300 millions par an– contribuent pour 11 milliards de dollars à l’économie des États-Unis chaque année, s’est enorgueillie la délégation américaine en soulignant que cela permet de maintenir plus de 148 000 emplois dans le secteur forestier. 

Étant donné que 52% de son territoire est couvert de forêts, la Colombie a insisté sur leur gestion durable, tandis la République de Corée s’est fixée comme objectif de parvenir à la neutralité carbone.  Il en va de même pour les Philippines qui plantent beaucoup de bambou pour lutter contre la déforestation et améliorer les capacités nationales de séquestration du carbone, permettant ainsi d’atténuer les changements climatiques.  Pour l’Organisation asiatique pour la coopération forestière (AFoCO), il est important d’accroître la communication entre les régions pour mieux reconstruire après la pandémie.  C’est dans cette optique que l’Union internationale des instituts de recherche forestière (IUFRO) partage avec les décideurs les résultats de ses travaux qui fournissent des informations et connaissances scientifiques sur les forêts.

Nous avons besoin d’une meilleure interface science-politique et d’une gouvernance plus efficace dans notre réponse à la pandémie et notre relèvement, a reconnu, en fin de table ronde, le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales.  M. Liu Zhenmin a constaté qu’étant donné que nous vivons tous sur « une seule planète » et partageons « un avenir », toute action qui perturbe l’équilibre délicat entre la nature et la vie humaine aura des conséquences néfastes pour tous.  Selon lui, l’élimination de la pauvreté et de la faim doit être la priorité absolue des efforts de relèvement postpandémiques.  De ce fait, le secteur forestier, y compris l’agroforesterie, pourrait jouer un rôle important pour lutter contre le chômage et l’insécurité alimentaire.

Lancement du rapport sur les objectifs forestiers mondiaux 2021

La Directrice générale adjointe de la FAO, Mme Maria Helena Semedo, a lancé le « Rapport sur les objectifs forestiers mondiaux 2021 », qui offre à son avis un excellent exemple de collaboration réussie.  Présentant des données sur 75% des forêts du monde, le rapport s’appuie sur des données nationales et des informations provenant de plus de 70 rapports et contributions nationales volontaires. 

L’Administrateur chargé du FNUF, M. Alexander Trepelkov, a par la suite présenté les différents documents* préparés par le Secrétariat du FNUF pour la présente session, après avoir fait un résumé succinct des principaux enseignements de ce premier rapport du FNUF.  On peut retenir que l’Asie, l’Europe et l’Océanie semblent être en voie d’augmenter leur superficie forestière de 3% entre 2015 et 2030, si l’on s’appuie sur les gains nets de superficie forestière constatés dans ces régions au cours de la période 2010-2020.  En revanche, l’Afrique et l’Amérique du Sud ont subi une perte de superficie forestière, quoique à un rythme plus lent qu’auparavant.  De même, l’action sur le carbone forestier a été intégrée dans une action climatique plus large, et le monde dans son ensemble est en voie de maintenir ses stocks de carbone forestier.  Cependant, le stock de carbone a diminué en Afrique et en Amérique du Sud en raison de la déforestation.

En outre, de nombreuses actions sont entreprises pour réduire la pauvreté des populations tributaires des forêts, mais il reste beaucoup à faire pour mesurer efficacement leurs effets.  En 2020, près de 18% des forêts étaient légalement protégées et la plupart des régions étaient sur la bonne voie pour augmenter considérablement la superficie des forêts protégées.

Plusieurs délégations ont réagi à ce rapport en présentant les mesures nationales prises pour collecter les données liées à la gestion forestière.  C’est dans ce contexte que la Chine a dit qu’au cours des 40 dernières années, la superficie forestière du pays a augmenté de 105 millions d’hectares.  Le pays espère atteindre la neutralité carbone d’ici à 2060.  Même s’il a l’ambition de renforcer ses données forestières, le Kenya a relevé que la collecte de données socioéconomiques spécifiques aux forêts au niveau national est très coûteuse.  Le Canada, la Jamaïque, l’Australie, la Malaisie, le Ghana, le Guatemala et la Slovaquie ont également expliqué comment ils ont contribué à ce premier rapport du FNUF, alors que le Saint-Siège a rappelé l’initiative du pape François qui avait convoqué un synode en 2019 avec les experts de la forêt de l’Amazone pour trouver des solutions à ses principaux problèmes. 

En début de séance, le FNUF a adopté son ordre du jour provisoire** et élu son bureau pour les seizième et dix-septième sessions.  En plus de la Présidente, le Bureau aura à la vice-présidence MM. Tomasz Markiewicz (Pologne), Musah Abu-Juam (Ghana), Jesse Mahoney (Australie) et Javad Momeni (République islamique d’Iran), ce dernier jouant également le rôle de rapporteur.

Le Forum des Nations Unies sur les forêts poursuivra ses travaux demain, mardi 27 avril, à partir de 9 heures. 

* (E/CN.18/2021/2), (E/CN.18/2021/3), (E/CN.18/2021/4), (E/CN.18/2021/5), (E/CN.18/2021/6), (E/CN.18/2021/7)

** (E/CN.18/2021/1)

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