En cours au Siège de l'ONU

Session de 2021,
Forum politique de haut niveau – matin & après-midi
ECOSOC/7053

Lancement du forum politique: pour le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, les ODD restent à portée de main malgré la COVID-19

Au premier jour des travaux du forum politique de haut niveau pour le développement durable, placé pour la neuvième fois sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales a affirmé que malgré la pandémie, « les objectifs de développement durable restent toujours à portée de main », à condition que nous fassions ce qu’il faut.  « Notre succès dépendra en grande partie de notre réponse collective au cours des 18 prochains mois », a ainsi estimé M. Liu Zhenmin qui a vu cette crise comme le signal d’alarme qui pousse à transformer le monde, à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et à tenir notre promesse envers les générations actuelles et futures.

Le Président de l’ECOSOC, M. Munir Akram, a rappelé que le forum politique est l’occasion de démontrer « l’engagement sans faille de la communauté internationale » en faveur de la réalisation du Programme 2030.  Le débat de haut niveau de cette session, notamment la réunion ministérielle de trois jours du forum politique organisé sous les auspices du Conseil, se tiendra du 13 au 16 juillet 2021, clôturant ainsi deux semaines de débats autour du thème suivant: « une reprise durable et résiliente après la pandémie de COVID-19, qui favorise les dimensions économique, sociale et environnementale du développement durable: ouvrir une voie inclusive et efficace vers la réalisation du Programme 2030 dans le contexte de la décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable ».

Les travaux prévoient des tables rondes thématiques et la présentation de 43 examens nationaux volontaires qui seront focalisés sur les ODD à l’examen de cette session: Objectif 1 sur la pauvreté; 2 sur la faim zéro; 3 sur la bonne santé et le bien-être; 8 sur le travail décent et la croissance économique; 10 sur la réduction des inégalités; 12 sur la consommation et la production responsables; 13 sur l’action climatique; 16 sur la paix, la justice et des institutions fortes; et l’objectif 17 sur les partenariats.

Pour M. Liu qui a présenté ce matin le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la mise en œuvre des ODD, la communauté mondiale se trouve à un moment critique dans sa poursuite du Programme 2030.  Il lui revient de prendre des mesures idoines, notamment agir sur les carences systémiques révélées par la pandémie.  Il faut aussi tirer parti de « notre sagesse politique durement acquise lors des crises précédentes » et, enfin, exploiter les progrès continus de la science et de la technologie, a—t-il préconisé.  Le rapport montre que la pandémie de COVID-19 a eu un impact très important sur certains domaines de mise en œuvre des ODD, sapant ainsi des décennies d’efforts de développement.  Le ralentissement économique lié à la pandémie a poussé entre 119 et 124 millions de personnes dans l’extrême pauvreté en 2020, et on dénombre déjà près de quatre millions de morts.

L’innovation est cruciale pour atteindre les ODD, a pour sa part expliqué M. Michael Kremer, professeur d’économie et prix Nobel de la discipline en 2019.  Il a souligné que l’innovation est le principal moteur de la croissance économique et de la prospérité, un domaine qu’il faut donc financer en conséquence, comme ce fut le cas avec les vaccins contre la COVID-19.  Il a considéré l’innovation comme un bien public qui peut se répandre à moindre coût et facilement.  Cela n’est pas le cas malheureusement pour les vaccins contre la COVID-19, ont déploré plusieurs intervenants du jour qui ont rappelé qu’un accès équitable et accéléré aux vaccins et traitements contre la COVID-19 est la première étape pour venir à bout de la pandémie et relancer les économies exsangues.  Le Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a même réclamé une hausse de la production locale de vaccins et appelé à renoncer aux droits de propriété intellectuelle. 

Autre vecteur de croissance, le commerce est indispensable pour accélérer la production de vaccins contre la COVID-19, a soutenu la Directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Elle a en effet souligné que le vaccin de Johnson & Johnson utilise des intrants et des composants de 12 pays, et ce nombre passe à plus de 15 pour le vaccin Oxford/AstraZeneca et à 19 pour les vaccins Pfizer/BioNTech et Moderna.  Pour aider le système commercial à contribuer aux augmentations de production, elle a donc exhorté les membres de l’OMC à libérer les chaînes d’approvisionnement en vaccins en abaissant les restrictions à l’exportation.  Elle leur a aussi demandé de travailler avec les fabricants pour identifier les goulots d’étranglement et d’augmenter les investissements, en particulier dans les pays en développement.

Au sujet du financement, la Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) a indiqué que le FMI prend toute sa part dans la réponse mondiale en débloquant dans quelques jours 650 milliards de dollars de nouveaux droits de tirage spéciaux (DTS).  Mais seulement 33 milliards iront à l’Afrique, a regretté le Président du Sénégal.  Rappelant à cet égard que le FMI estime à 285 milliards de dollars d’ici à 2025 le besoin de financement additionnel des pays africains, M. Macky Sall a exhorté les pays du G20 qui recevront plus des deux tiers des nouvelles allocations des DTS à réallouer au moins 100 milliards de dollars en appui aux efforts de relance des pays à faible revenu, sous forme de dons et de prêts concessionnels et semi-concessionnels.  En attendant, de nombreux pays en développement notamment ont mis aujourd’hui l’accent sur le renforcement des systèmes de protection sociale.  C’est le cas du Pakistan, pays qui a créé des subventions en espèces couvrant 100 millions d’individus et 3 millions de petites et moyennes entreprises (PME).  

Par ailleurs, les enfants et les jeunes ont parlé ce matin pour annoncer, dans une vidéo de l’UNICEF, qu’ils passent déjà à l’action.  Des jeunes qui sont des victimes méconnues de la pandémie, alors qu’elle a eu sur eux des effets à la fois économiques, psychologiques et éducatifs, a relevé la Belgique.  C’est pour cela que la Directrice exécutive de l’UNICEF a exhorté les États à investir davantage dans les services de santé mentale.  Des appels ont été également entendus en faveur de la prise en compte, dans les plans de relance, des handicapés et surtout des femmes, afin d’atteindre non seulement l’ODD 5, mais aussi les autres ODD, a plaidé la Secrétaire générale de « Care International ».

Le forum politique de haut niveau poursuivra ses débats thématiques demain, mercredi 7 juillet, à partir de 9 heures.

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU SUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Déclarations liminaires

M. MOUNIR AKRAM, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé les conséquences dévastatrices de la pandémie de COVID-19, en particulier pour les plus pauvres.  La pandémie a balayé des décennies de progrès et des millions de personnes sont retombées dans la pauvreté, a-t-il déploré.  Il a expliqué que les pays en voie de développement ont vu leurs recettes disparaître et le service de leur dette exploser.  Le Président de l’ECOSOC a rappelé que le forum politique de haut niveau pour le développement durable est l’occasion de démontrer l’engagement sans faille de la communauté internationale en faveur de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  « Nous réfléchirons aux politiques qui nous permettront de relancer l’économie et d’ouvrir une voie inclusive vers le développement durable. »  Le Président a enfin indiqué que ce forum permettra de faire un bilan approfondi de l’action des pays en vue de la réalisation de la « vision stratégique » qu’est le Programme 2030.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA, Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a rendu compte du récent Débat sur l’intégration, organisé par l’ECOSOC en vue de recueillir des idées novatrices pour une relance post-COVID-19 inclusive et transformatrice.  Parmi les messages principaux des dialogues qui ont émaillé ce segment, il a tout d’abord cité la nécessité de rétablir la confiance dans les institutions et de renforcer le contrat social, l’objectif étant de décloisonner en prenant notamment en compte la problématique hommes-femmes.  Il faut en outre renforcer la coopération internationale et les partenariats multipartites pour ne laisser personne au bord du chemin et surtout sans vaccin, a poursuivi M. Sandoval, jugeant inacceptable que les pays les moins avancé (PMA) n’aient vacciné à cette heure que 2% de leur population.  Il importe aussi de mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et son objectif 1, alors que la crise actuelle va pousser entre 119 et 124 millions de personnes dans la pauvreté extrême, a ajouté le Vice-Président de l’ECOSOC, avant d’en appeler à une relance qui protège à la fois les populations et la planète, via des plans de financement plus verts et plus intégrés.  À cette fin, le Débat sur l’intégration a mis l’accent sur le besoin d’un modèle de développement plus équitable, prévoyant des stratégies économiques circulaires et des investissements dans les énergies vertes et les transports « propres ».  

Les participants aux dialogues se sont par ailleurs prononcés pour un élargissement des mesures de protection sociale, qui favorisent la reprise et contribuent à l’élimination des inégalités, et pour une connectivité universelle.  Ils ont également souligné que ces efforts ne seront possibles que grâce à la collecte de données fiables, ventilées et de qualité pour prendre des décisions en pleine connaissance de cause et n’oublier aucun groupe vulnérable.  De même, a-t-il souligné, il convient de ne laisser pour compte aucun pays, notamment les PMA, les petits États insulaires en développement et les pays en développement sans littoral, qui, tous, doivent pouvoir avoir accès au vaccin et bénéficier d’un allègement du service de leur dette.  Enfin, a noté M. Sandoval, les participants ont souhaité que l’ECOSOC soit plus efficace en matière de coordination, afin de favoriser une relance plus inclusive.  Selon lui, le Débat sur l’intégration, qui deviendra le Débat sur la coordination en 2022, a prouvé que l’ECOSOC pouvait lancer une action transformatrice favorisant les objectifs de développement durable.

M. MACKY SALL, Président du Sénégal, a évoqué d’emblée le contexte de la pandémie de COVID-19, qui continue d’éprouver durement les pays. Pour la première fois depuis plus de 20 ans, a-t-il relevé, l’Afrique, dont les taux de croissance étaient régulièrement trois fois supérieurs à la moyenne mondiale, est en récession.  Le Sénégal fait figure d’exception avec un taux de croissance passé de plus de 6% à 1,5%, s’est enorgueilli le Chef d’État, indiquant que, face à cette crise, son pays a adopté une démarche évolutive en trois phases.  Le Sénégal, a-t-il précisé, a d’abord mené une riposte sanitaire immédiate, avec l’achat massif de médicaments et équipements médicaux, la construction et la réhabilitation de structures sanitaires, la gratuité du dépistage et du traitement des malades, et l’achat de vaccins, en plus de l’initiative COVAX, qui reste limitée.  Le pays a ensuite engagé un plan de résilience économique et sociale, financé par l’État à hauteur de 1,64 milliard de dollars, avec l’appui de partenaires au développement et de donations volontaires.  Enfin, le Sénégal a lancé en septembre 2020 un programme d’actions prioritaires, dont les urgences portent sur la souveraineté alimentaire, sanitaire et pharmaceutique.  Dans le même temps, a indiqué M. Sall, nous poursuivons les politiques publiques sur les infrastructures, l’énergie propre, l’industrialisation, l’économie numérique et le tourisme, avec l’appui de partenaires bilatéraux et multilatéraux, dont la « Team Europe », la Chine, les États-Unis, le FMI, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et le G20, via son initiative de suspension du service de la dette. 

Face à cette crise dont nul ne peut encore prédire la durée, nous devons renforcer les mesures de résilience et de relance, a insisté le Président du Sénégal, appelant la communauté internationale à travailler pour l’accès de tous aux vaccins contre la COVID-19.  Avec l’Institut Pasteur de Dakar, le Sénégal reste engagé dans le processus de production de vaccins pour contribuer à la lutte contre la pandémie, a-t-il assuré, avant de plaider pour plus de solidarité et plus d’inclusivité dans les efforts de reconstruction économique.  C’est l’objectif des conclusions du Sommet de Paris de mai dernier sur le financement des économies africaines, c’est aussi le sens de l’allocation prochaine de nouveaux droits de tirage spéciaux (DTS) à hauteur de 650 milliards de dollars, dont 33 milliards destinés à l’Afrique.  Rappelant à cet égard que le FMI estime à 285 milliards de dollars d’ici à 2025 le besoin de financement additionnel des pays africains, M. Sall a exhorté les pays du G20, qui recevront plus des deux tiers des nouvelles allocations de DTS, à réallouer au moins 100 milliards de dollars en appui aux efforts de relance des pays à faible revenu, sous forme de dons et de prêts concessionnels et semi-concessionnels. 

Au-delà des solutions conjoncturelles, a-t-il poursuivi, les pays en développement réclament surtout une réforme en profondeur de la gouvernance économique et financière mondiale, afin de créer des conditions plus propices de financement du développement, non par l’aide, mais par l’accès aux marchés de capitaux à des coûts soutenables.  Dans cet esprit, le Président du Sénégal a appelé de ses vœux une réforme urgente des règles de l’OCDE sur les conditions d’octroi des crédits export.  Il a également réclamé un assouplissement des règles de plafonnement de l’endettement et du déficit budgétaire, ainsi qu’une correction des critères de perception et d’évaluation du risque d’investissement, pour une notation plus transparente et plus juste des pays en développement.  Autre demande des pays en développement; une lutte plus ferme contre les paradis fiscaux et les flux financiers illicites, y compris l’évasion fiscale.  Selon la CNUCED, a noté M. Sall, ces flux coûtent à l’Afrique au moins 89 milliards de dollars par an, « soit la moitié de nos besoins annuels en investissement ».  Enfin, a-t-il dit, nous appelons à l’améliorations des règles du système fiscal international, dans le cadre du projet de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfice, piloté par l’OCDE sous l’égide du G20.  Il a salué à ce propos la proposition américaine pour l’instauration d’un taux minimal d’imposition sur l’ensemble des entreprises à l’échelle mondiale.  Ensemble, a-t-il conclu, « œuvrons pour un New Deal où les intérêts de tous les pays seront pris en compte, pour un ordre mondial plus juste et plus inclusif ». 

M. TEDROS ADHANOM, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a indiqué que la pandémie est à une phase critique et appelé à utiliser tous les instruments de lutte à disposition, dont l’accès équitable aux vaccins.  Jusqu’à présent, 90 millions de doses ont été livrées à 135 pays grâce au mécanisme COVAX, ce qui est négligeable par rapport aux trois milliards de doses qui ont été fabriquées, a-t-il dit, en pointant les disparités vaccinales entre pays pauvres et riches.  Si les fabricants donnent la priorité au mécanisme COVAX, 10% de la population des pays développés pourrait être vaccinée d’ici à septembre et 40% en décembre.  Le Directeur général a réclamé une hausse de la production locale et appelé à renoncer aux droits de propriété intellectuelle.  Estimant que la pandémie a révélé « un déficit de solidarité », il a plaidé pour un renforcement des systèmes de santé, en ajoutant que le monde devait d’ores et déjà se préparer à la prochaine pandémie.  En conclusion, il a appelé à une meilleure redistribution des vaccins grâce au mécanisme COVAX et à soutenir un traité sur les pandémies envisagé au sein de l’OMS.  Ce traité jetterait les bases d’une réponse mondiale aux pandémies et permettrait de dépasser la négligence et la panique qui ont caractérisé la réponse aux pandémies jusqu’à présent, a-t-il conclu.

Mme KRISTALINA GEORGIEVA, Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), a indiqué que la « lumière est au bout du tunnel » et que l’économie mondiale est en train de se relever de la pandémie.  Les prévisions de croissance sont de 6% en 2021 et de 4% en 2022, a-t-elle dit.  Elle a rappelé que sans la riposte budgétaire exceptionnelle des pays face à la pandémie, la récession économique aurait été trois fois plus importante.  Cette croissance globale masque néanmoins des disparités entre les pays ayant des capacités de relance et des taux de vaccination élevés et les autres.  Elle a rappelé que pour la première fois en 20 ans la pauvreté a augmenté dans le monde.  « C’est une calamité économique et une tragédie humaine. »  Elle a déclaré que la voie du relèvement est bien connue et passe par la vaccination d’au moins 60% de la population dans tous les pays.  Le coût des actions pour accélérer la relève après la pandémie est estimé à 50 milliards de dollars, a-t-elle dit, en indiquant qu’il s’agirait du « meilleur investissement public de nos vies ».

La Directrice générale a ensuite invité à garder le cap des ODD, dont la réalisation sera encore plus difficile en raison de la pandémie.  Celle-ci a en effet accru les besoins de financement pour réaliser les ODD d’une moyenne annuelle d’environ 2,5% du PIB mondial, soit 60 milliards de dollars par an pour les pays développés à bas revenu.  « Les défis sont considérables. »  En raison de la pandémie, le Nigéria accuse un retard de six ans pour réaliser lesdits objectifs, le Rwanda de cinq ans, a-t-elle cité en exemple.

Elle a invité les pays à se concentrer sur les réformes de croissance structurelle, en s’appuyant sur une meilleure mobilisation des ressources nationales.  « La croissance génère un cercle vertueux. »  Elle a rappelé que les impôts collectés dans les pays d’Afrique subsaharienne ne représentent que 12,5% de leur PIB.  La Directrice générale a appelé à un meilleur engagement du secteur privé et plaidé pour une augmentation de l’aide publique au développement (APD): augmenter cette aide pour qu’elle atteigne la cible de 0,7% du revenu mondial brut permettrait de générer 200 milliards de dollars par an pour le financement du développement.  « Cela ferait une énorme différence. »  Enfin, elle a indiqué que le FMI prend toute sa part dans la riposte mondiale en débloquant dans quelques jours 650 milliards de dollars de nouveaux droits de tirage spéciaux.  « Il y a la lumière seulement si nous sommes suffisamment courageux pour la voir, seulement si nous sommes suffisamment courageux pour être cette lumière », a -t-elle conclu, en citant ces mots de la poétesse Amanda Gorman.

Mme NGOZI OKONJO-IWEALA, Directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a assuré à l’entame de son propos que le commerce sera au centre des efforts pour mettre fin à la pandémie de COVID-19.  C’est un ingrédient nécessaire pour reconstruire un monde plus fort et plus inclusif et pour relancer les progrès vers le développement durable, a-t-elle souligné, avant de déplorer les coups sévères portés par cette crise à la réalisation du Programme 2030, à commencer par l’augmentation de la pauvreté, de la faim et de l’insécurité alimentaire.  Dans ce contexte mondial marqué par l’aggravation des inégalités, des signes se font jour d’une reprise économique « en forme de K », a relevé la Chef de l’OMC, expliquant que les perspectives économiques des pays bifurquent en fonction de leur accès aux vaccins et de leur capacité fiscale et monétaire à fournir un soulagement et une stimulation économiques. 

De fait, la plupart des économies avancées vont de l’avant, tandis que les marchés émergents et les économies en développement sont à la traîne, a-t-elle constaté, notant qu’une illustration frappante de cette divergence provient des statistiques de vaccination contre la COVID-19.  Bien que l’on assiste à une accélération du déploiement mondial des vaccins, avec 1,1 milliard de doses administrées dans le monde en juin, soit 44% de plus qu’en mai, l’injustice vaccinale est patente.  En effet, sur ces 1,1 milliard de doses, seulement 15 millions, soit moins de 1,4%, ont été administrées en Afrique.  Mesuré en doses administrées par habitant, le taux de vaccination en Afrique a augmenté de seulement 11% entre mai et juin, soit bien moins que la moyenne mondiale, a regretté Mme Okonjo-Iweala, ajoutant que, dans les pays à faible revenu, le taux de vaccination a en fait chuté, en raison notamment de la disponibilité insuffisante des vaccins.

Ces écarts se reflètent dans l’économie, a observé la Directrice générale de l’OMC.  Selon la Banque mondiale, seulement un tiers des marchés émergents et économies en développement sont en passe de retrouver les niveaux de revenu par habitant d’avant la pandémie, contre 90% des économies avancées.  De plus, a-t-elle indiqué, le FMI prévoit que l’économie mondiale connaîtra une croissance de 6% cette année, mais seulement de 3,4% en Afrique subsaharienne.  D’après elle, cette divergence économique est également visible dans les données commerciales.  Alors que les économistes de l’OMC prévoient que le volume du commerce mondial des marchandises augmentera de 8% cette année, il apparaît que l’Asie, l’Amérique du Nord et l’Europe sont sur la voie d’une reprise commerciale beaucoup plus soutenue qu’en Afrique et en Amérique latine.

Pour Mme Okonjo-Iweala, le Programme 2030 reste la bonne feuille de route pour notre époque alors que nous affrontons les changements climatiques et la COVID-19.  Mais si nous n’agissons pas, a-t-elle averti, les objectifs de développement durable resteront hors de portée et de nombreux pays en développement pourraient faire face à une « spirale descendante » marquée par une croissance lente, des troubles sociaux, un surendettement, une réduction des investissements et de la production, et un commerce diminué, autant de facteurs susceptibles d’alimenter le déclin économique et la colère politique.  À ses yeux, une action rapide de l’OMC dans deux domaines clefs, les vaccins et les subventions à la pêche, pourrait contribuer à remettre les ODD sur la bonne voie.  

Soulignant que le déploiement rapide et équitable des vaccins est une condition préalable à une croissance économique inclusive, la Chef de l’OMC a rappelé qu’elle s’était jointe à ses homologues de l’OMS, du FMI et de la Banque mondiale pour appeler à un investissement initial de 50 milliards de dollars pour vacciner au moins 40% de la population mondiale d’ici la fin de cette année et 60% d’ici le milieu de 2022.  Le commerce est en effet indispensable pour accélérer la production de vaccins contre la COVID-19, a-t-elle soutenu, saluant le fait qu’en 2020, la valeur des échanges de fournitures médicales a augmenté de 16%, alors même que la valeur du commerce mondial global des marchandises reculait de plus de 7%.  Le commerce a également été une « bouée de sauvetage » pour l’accès à la nourriture, grâce à la restriction de l’utilisation des mesures protectionnistes, a fait valoir Mme Okonjo-Iweala, avant de souligner la dépendance des vaccins au commerce et aux chaînes d’approvisionnement.  Ainsi, a-t-elle expliqué, le vaccin de Johnson & Johnson utilise des intrants et des composants de 12 pays, et ce nombre passe à plus de 15 pour le vaccin Oxford/AstraZeneca et à 19 pour les vaccins Pfizer/BioNTech et Moderna.  Pour aider le système commercial à contribuer aux augmentations de production, elle a donc exhorté les membres de l’OMC à libérer les chaînes d’approvisionnement en vaccins en abaissant les restrictions à l’exportation; à travailler avec les fabricants pour identifier les goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement et augmenter les investissements, en particulier dans les pays en développement; et à trouver des solutions aux problèmes de transfert de technologie, de savoir-faire et de propriété intellectuelle, afin d’assurer aux pays en développement une quasi-automaticité d’accès. 

Parallèlement aux efforts de relance de la croissance, nous devons aussi nous attaquer aux problèmes urgents des « biens communs mondiaux », a poursuivi Mme Okonjo-Iweala, évoquant la prochaine COP26 sur les changements climatiques et la réunion de la semaine prochaine sur la santé des océans.  Depuis 2001, a-t-elle rappelé, les membres de l’OMC négocient pour lutter contre les subventions aux pêcheries nuisibles.  Si certains dirigeants souhaitent parvenir à un accord cette année, cette volonté politique ne s’est pas encore traduite par une « volonté suffisante de compromis », a-t-elle déploré.  C’est pourquoi, a-t-elle précisé, j’ai convoqué les ministres pour une réunion virtuelle le 15 juillet, dans l’espoir de finaliser un accord à temps pour la douzième Conférence ministérielle, prévue début décembre.  Selon elle, un accord de pêche de l’OMC cette année ferait une différence importante pour les stocks de poissons mondiaux, dont un tiers n’est plus à des niveaux biologiquement durables.  Un tel accord permettrait d’atteindre la cible 14.6 des ODD et montrerait que les membres de l’OMC sont « encore capables de négocier des accords multilatéraux et de répondre aux défis mondiaux ».

« Plus l’OMC est en mesure d’obtenir des résultats, mieux elle saura fournir de la prévisibilité et de la certitude aux marchés internationaux », a souligné Mme Okonjo-Iweala, estimant en conclusion que des avancées sur ces questions contribueraient à une reprise économique plus large, car « l’ouverture des échanges permet aux économies à croissance lente de profiter de reprises plus rapides ailleurs ». 

Le forum politique a ensuite entendu M. MICHAEL KREMER, professeur d’économie et de politiques publiques à l’Université de Chicago, Directeur fondateur du laboratoire d’innovation du développement au « Becker Friedman Institute for Economics » et lauréat du prix Nobel d’économie 2019.  M. Kremer a dit axer son intervention sur le développement et l’innovation.  Selon lui, parfois, les gens associent l’innovation aux gadgets alors que c’est bien plus que cela.  Il a affirmé que l’innovation est cruciale pour atteindre les ODD.  En effet, l’innovation pourrait permettre de trouver de nouvelles et meilleures façons de faire les choses, et l’innovation est le principal moteur de la croissance économique et de la prospérité.  Il a justifié ses propos en faisant remarquer que nous ne pouvons pas augmenter les revenus toujours plus en utilisant plus de ressources, appelant dès lors à trouver de nouvelles et meilleures façons de faire les choses.  

Le professeur d’économie a souligné que la pandémie de COVID-19 a mis en évidence l’importance de l’innovation médicale, comme le démontre ces 13 vaccins développés dans le monde en un temps record.  Il faut donc, a-t-il suggéré, tirer les leçons de cette expérience de la COVID-19 pour financer et développer des vaccins et des traitements nécessaires pour d’autres maladies qui causent de nombreux décès dans le monde chaque année.  De même, les innovations en matière de politique et de technologie peuvent améliorer l’éducation et le bien-être, a-t-il ajouté en notant également que les interruptions de scolarité cette année ont mis en évidence l’importance de pouvoir trouver rapidement de nouvelles façons de fournir des services, en particulier pendant une crise.  Pour M. Kremer, l’innovation est un bien public: les nouvelles idées développées en un seul endroit peuvent se répandre à moindre coût et facilement, ce qui signifie qu’elles sont un bien public mondial, mais cela a aussi pour conséquence que les pays ont tendance à sous-investir dans l’innovation.  Pourtant, nous avons besoin de plus d’investissements dans l’innovation, et en particulier dans les innovations qui répondent aux besoins des personnes vivant dans la pauvreté, a-t-il plaidé.  

Le prix Nobel d’économie a ensuite expliqué que la méthode expérimentale est un bon outil en matière d’innovation, car elle permet de développer et de tester de nouvelles idées.  C’est pourquoi il a créé, cette année, le laboratoire d’innovation du développement à l’Université de Chicago, afin d’établir des relations étroites et durables avec les gouvernements, les ONG et entreprises dans les pays à revenu faible et intermédiaire pour identifier, développer et tester des innovations susceptibles de bénéficier à des millions de personnes dans ces pays.  Trouver des moyens rentables de fournir de l’eau potable à grande échelle sera l’une des priorités du laboratoire.  Au-delà des projets individuels, M. Kremer a relevé que plusieurs fonds ont été mis en place pour identifier et vulgariser à grande échelle des innovations prometteuses.  Il a donné l’exemple de « Development Innovation Ventures » de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) dont il fut Directeur scientifique.  Cette initiative est ouverte à tous les secteurs et zones géographiques et elle fait de petits investissements pour piloter et tester des idées prometteuses, et des plus grands pour aider les innovations qui sont soutenues par des preuves empiriques et rigoureuses à grande échelle.  Il a conclu en soulignant le potentiel de ce type de fonds d’innovation à générer des rendements élevés pour la société.  

Examen thématique: Présentation du Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales et débat

Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. LIU ZHENMIN, a présenté le rapport du Secrétaire général faisant le point sur les objectifs de développement durable (ODD) (E/2021/58).  Le rapport montre que la pandémie de COVID-19 a eu un impact très important sur certains domaines de mise en œuvre des ODD, sapant ainsi des décennies d’efforts de développement.  La communauté mondiale se trouve donc à un moment critique dans sa poursuite du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

À ce jour, a souligné M. Liu, la pandémie de COVID-19 a fait près de quatre millions de morts, a dévasté l’économie mondiale et bouleversé toutes les sphères de la vie humaine.  Avant la pandémie, des progrès avaient été faits dans certains domaines importants comme la réduction de la pauvreté, l’amélioration de la santé maternelle et infantile, l’amélioration de l’accès à l’électricité, et l’égalité des sexes.  Il a noté toutefois qu’avant la pandémie, au début de 2020, nous n’étions pas en voie de réaliser les ODD.  En 2020, le ralentissement économique lié à la pandémie a poussé entre 119 et 124 millions de personnes dans l’extrême pauvreté, a-t-il dit, signalant aussi que l’équivalent de 255 millions d’emplois à temps plein ont été perdus et que le nombre de personnes souffrant de la faim, déjà croissant avant la pandémie, aurait augmenté de 83 à 132 millions.  De même, 101 millions d’enfants et de jeunes supplémentaires sont tombés en deçà du niveau minimal de compétence en lecture, anéantissant les gains d’éducation des deux dernières décennies.  La crise exacerbe également les inégalités, menaçant les moyens de subsistance de 1,6 milliard de travailleurs dans l’économie informelle, et on note une forte augmentation de l’indice de Gini sur les inégalités de revenus dans de nombreux pays.  Dans le même temps, les femmes et les enfants ont été confrontés à une augmentation de la violence domestique et jusqu’à 10 millions de filles supplémentaires sont menacées de mariage précoce au cours de la prochaine décennie, une autre conséquence de la pandémie.

Pendant ce temps, le ralentissement économique associé à la COVID-19 n’a pas vraiment eu d’effet sur la crise climatique, puisque les données préliminaires montrent que les concentrations des principaux gaz à effet de serre mondiaux ont augmenté en 2020.  La température moyenne mondiale en 2020 était d’environ 1,2 °C au-dessus du niveau préindustriel, ce qui est dangereusement proche de la limite de 1,5 °C prévue par l’Accord de Paris.  De plus, le monde n’a pas atteint les objectifs de 2020 pour stopper la perte de la biodiversité, note encore le rapport.  Dix millions d’hectares de forêt ont été perdus chaque année entre 2015 et 2020.  

Le rapport montre également que certains des moyens de mise en œuvre nécessaires pour soutenir la transformation des ODD ont été affectés négativement par la crise de la COVID-19.  Ainsi, les flux mondiaux d’investissements étrangers directs ont diminué de 40% en 2020 par rapport à 2019.  La valeur du commerce mondial des marchandises devrait chuter de 5,6%, alors que l’aide publique au développement (APD) nette a augmenté en 2020 pour atteindre un total de 161 milliards de dollars, même si cela reste bien en deçà de ce qui est nécessaire pour répondre à la COVID-19 et atteindre l’objectif fixé de longue date de 0,7% du revenu national brut (RNB).  De plus, les nombreux impacts fiscaux de la pandémie conduisent à l’endettement dans de nombreux pays.

Dans l’ensemble, a relevé le Secrétaire général adjoint, ce rapport dresse un tableau inquiétant de l’état des ODD, six ans après l’adoption du Programme 2030.  « Pourtant, les ODD restent toujours à portée de main, à condition que nous fassions ce qu’il faut. »  Et parmi les mesures à prendre, il a demandé d’agir sur les carences systémiques révélées par la pandémie.  Il faut aussi tirer parti de notre sagesse politique durement acquise lors des crises précédentes, et enfin, exploiter les progrès continus de la science et de la technologie, a recommandé M. Liu pour qui nos actions doivent aussi nous orienter délibérément vers une voie de développement plus inclusive et durable que notre trajectoire d’avant 2020.  Il a proposé trois éléments pour guider ces efforts.  

Premièrement, il a recommandé d’établir des conditions équitables pour que tous les pays se rétablissent, car les disparités de gestion de la pandémie auront des coûts pour le monde entier, y compris pour ceux qui sont sur la voie du relèvement.  Un accès équitable et accéléré aux vaccins et traitements contre la COVID-19 est la première étape pour réduire ces inégalités, a-t-il dit.  Mais comme cela ne suffira pas, il faut aussi un plan de relance mondial contre la dévastation économique.  Parmi les mesures évoquées ici, il a souligné les engagements en matière d’APD, l’allègement du fardeau de la dette et l’augmentation des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI pour soutenir la reprise dans les pays en développement.

Deuxièmement, il a invité les pays à veiller à ce que les pertes d’ODD dues à la pandémie ne se traduisent pas par une érosion à long terme des capacités.  Par exemple, des mesures peuvent être prises pour rouvrir les écoles en toute sécurité et pour renforcer l’apprentissage à distance, si nécessaire.  Selon M. Liu, permettre l’accès universel à la protection sociale, aux soins de santé et à l’éducation sont des mesures pouvant arrêter le revers dans la mise en œuvre des ODD et faire qu’ils ne soient pas des pertes à long terme. 

Troisièmement, nous devons tous agir intelligemment pour tirer parti des connaissances scientifiques et des nouvelles technologies, a également préconisé le Secrétaire général adjoint.  Il a rappelé que l’accès universel à une énergie propre, des systèmes alimentaires durables, l’éradication de la fracture numérique, et les transformations vers des transports durables et des villes durables sont autant de domaines où une action intelligente et multipartite peut conduire à des avantages en cascade à travers les ODD.  Il a donc invité les gouvernements, les villes, les entreprises et les industries à profiter de la reprise pour adopter des voies de développement résilientes et inclusives afin de réduire les émissions de carbone, conserver la nature, créer de meilleurs emplois, faire progresser l’égalité des sexes, et lutter contre les inégalités croissantes.  

M. Liu a affirmé que « notre succès dépendra en grande partie de notre réponse collective au cours des 18 prochains mois ».  Et il a ajouté que cette crise peut être le signal d’alarme qui nous pousse à transformer notre monde, mettre en œuvre le Programme 2030 et tenir notre promesse envers les générations actuelles et futures.

Au cours du débat qui a suivi, lequel fut animé par l’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), M. ACHIM STEINER, le Ministre d’État au Bureau des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement du Royaume-Uni, Lord AHMAD de Wimbledon, a dit que son pays s’est servi de sa présidence du G7 pour promouvoir la production de vaccins à l’échelle mondiale.  Il a également mis l’accent sur l’éducation en période de pandémie, notamment en faveur des filles.  Mme SANIA NISHTAR, Ministre fédérale et Assistante spéciale du Premier Ministre du Pakistan pour la réduction de la pauvreté et la sécurité sociale, a expliqué que son pays a apporté un soutien prioritaire aux personnes vulnérables.  Des subventions en espèces couvrant 100 millions d’individus et 3 millions de petites et moyennes entreprises (PME) ont été faites.  Pour le Pakistan, il est important de protéger le capital humain, et malgré les perturbations liées à la COVID-19, le pays est sur la bonne voie pour mettre sur pied un nouveau système national de santé et de nutrition, utilisant notamment des financements innovants pour lutter contre la faim, grâce à des partenariats avec des philanthropes qui fournissent des repas à grande échelle.

Le capital humain que représentent les enfants a été au cœur de l’intervention de la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Mme HENRIETTA H. FORE, qui a donné une estimation alarmante pour 2020: plus de 140 millions d’enfants ont basculé dans la pauvreté, ce qui porte le nombre total d’enfants vivant dans la pauvreté à plus de 725 millions.  Elle a expliqué que le stress lié à la lutte contre la pandémie entraîne des risques majeurs pour la santé mentale et la sécurité physique des enfants.  C’est pourquoi l’UNICEF a demandé un investissement accru dans tous les systèmes dont les enfants ont besoin.  Par exemple, du fait de la fermeture des écoles, on a constaté que 400 millions d’enfants n’avaient pas d’Internet.  De plus, les enfants se sont parfois retrouvés enfermés à la maison avec leurs agresseurs, en étant également coupés de leurs amis et des services d’aide à la protection de l’enfance qui étaient fermés.  Alors que les pays cherchent à renforcer leurs systèmes de santé après la pandémie, l’UNICEF les a exhortés à faire des investissements accrus dans les services de santé mentale, y compris le counseling pour les enfants, les jeunes et leurs parents et soutiens.

C’est pour la « planète entière » qu’a ensuite plaidé Mme SIGRID KAAG, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, qui a appelé à un changement systémique en ces temps de relèvement.  Évoquant la crise climatique, elle a demandé d’intensifier les efforts pour atteindre les objectifs convenus à Paris en 2015.  De plus, sans un accent clair sur l’autonomisation des femmes, des filles, des jeunes et d’autres groupes qui ont été disproportionnellement touchés par la pandémie, les ODD ne seront pas atteints, a-t-elle prévenu.  

Attirant l’attention sur les petits États insulaires en développement (PEID), la Ministre des affaires économiques et des investissements de la Barbade, Mme MARSHA CADDLE, a dit qu’en plus des ouragans qui frappent ces pays, dont le sien, les confinements leur ont fait perdre les revenus tirés du tourisme, qui sont à la base de leurs économies.  Son gouvernement a tout de même mis sur pied des programmes de compensation des pertes de revenus pour les acteurs du secteur du tourisme.  Le Directeur du Bureau de la planification et du budget de l’Uruguay, M. ISAAC ALFIE, a de son côté rappelé que son pays a une longue histoire d’assistance sociale depuis la Première Guerre mondiale.  Depuis le début de la pandémie, le pays a établi un plan de relance de l’économie en mettant l’accent sur l’emploi.  Une membre du Gouvernement du Rwanda a expliqué comment son pays avait créé des structures, allant du niveau communautaire jusqu’au niveau national, afin de répondre à la pandémie.  Il est vrai que le pays a tiré profit de son expérience de la gestion de l’Ebola, a-t-elle noté.   

Présentant l’approche régionale, Mme ROLA DASHTI, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a dit que le message des cinq régions est clair: il faut repenser l’architecture mondiale de financement et introduire des financements innovants; investir dans des systèmes de santé et de protection sociale centrés sur les personnes et sensibles au genre; investir et innover dans les données pour atteindre les ODD, pour les efforts de redressement et la réponse aux crises; renforcer l’engagement en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes; et tirer parti de la numérisation à l’appui des ODD.  Aux États Membres, elle a demandé d’aller de l’avant, avec la résilience, l’inclusion, la durabilité et la solidarité comme boussoles.

« Les réformes » sont le moyen qu’a préconisé M. JOMO KWAME SUNDARAM, professeur associé à Columbia University (New York), afin de reconstruire en mieux et de réaliser les ODD.  Dans ce contexte, il faut éviter les difficultés qu’entraînerait une nouvelle guerre froide, a-t-il plaidé, demandant aux États d’œuvrer « main dans la main ».  C’est sur « le long terme » qu’il faut mettre l’accent, a insisté M. DOMINIC WAUGHRAY, Directeur général de « Centre for Global Public Goods » et membre du Conseil d’administration du Forum économique mondial.  Il a dès lors recommandé de nouer et renforcer des partenariats à l’échelle internationale, puisqu’il y a « tant de choses à faire, mais l’argent manque ».  

Pour Mme SOFIA SPRECHMANN SINEIRO, Secrétaire générale de « Care International », la première chose à faire justement est de résoudre ces inégalités entre les genres que la COVID-19 a approfondies.  Sans résoudre ce problème, nous ne parviendrons pas à atteindre non seulement l’ODD 5, mais aussi les autres ODD, a-t-elle mis en garde, expliquant que « nous ne pouvons pas reconstruire alors que la moitié de l’humanité est mise à l’écart ».  Elle a en outre rappelé que chaque année, le travail de soins non rémunéré fait par les femmes notamment est évalué à environ 10 800 milliards de dollars.  C’est pourquoi lors du Forum sur l’égalité des genres à Paris, la semaine dernière, la société civile a recommandé que 10% des revenus nationaux soient dépensés pour des services abordables de soins aux enfants, aux personnes âgées et aux personnes handicapées.

Alors que les femmes ont été en première ligne de la lutte contre la COVID-19, nous devons remettre les droits des femmes et des filles au cœur de l’agenda international, a réagi à son tour la France.  Elle a justement souligné que la première priorité pour mettre fin à la pandémie est d’assurer un accès universel à la vaccination.  Elle a plaidé pour un soutien aux pays en développement dans leurs efforts vers une relance durable de leur économie, et pour rendre nos sociétés plus résilientes, tout en luttant contre les inégalités mondiales.  Des systèmes de protection sociale agiles et durables sont ainsi nécessaires, a relevé la Finlande en soulignant les besoins mis en évidence par la pandémie.  De même, en temps de crise et au-delà, il est important de donner aux gens les moyens de prendre soin de leurs santé mentale, a-t-elle recommandé.  Les Philippines ont également dit avoir mis l’accent sur le renforcement du secteur de la santé, tandis que la Suisse a mis en garde sur le risque de voir le monde se diviser encore davantage entre les pays qui pourront se redresser grâce à des mesures de relance et à la digitalisation et d’autres qui ne parviendront pas à sortir du cycle de la pauvreté et de la dette. 

L’Indonésie a dit avoir mis en place un centre de financement des ODD pour pallier le manque des fonds pour financer les initiatives novatrices.  La Chine a appelé à un plus grand soutien aux pays en développement à qui elle a déjà offert plus de 100 millions de doses de vaccins contre la COVID-19.  Le Népal a relevé que la crise de la COVID-19 peut être le prétexte pour transformer notre monde en un endroit meilleur, à condition que le vaccin contre cette pandémie devienne un bien public mondial.  Même son de cloche du côté de la République de Corée, pour qui c’est le moment de transformer cette crise mondiale en opportunité pour réaliser les ODD, alors que l’Afrique du Sud a également dénoncé les inégalités dans la prise en charge de la pandémie.

Revenant aux enfants, leur porte-parole, le représentant du Grand Groupe des enfants et des jeunes, a appelé à lutter contre le travail des enfants qui a pris de l’importance avec la pandémie, avant que le représentant du Grand Groupe des handicapés n’insiste pour que ces derniers soient intégrés dans les plans de relance, afin de garantir un recouvrement complet.

Veiller à ce que personne ne soit laissé pour compte: comment protégeons-nous les plus pauvres et les plus vulnérables de la crise et leur donnons-nous les moyens de réaliser les objectifs de développement durable?

Présidée par Mme Pascale Baeriswyl (Suisse), Vice-Présidente de l’ECOSOC, la deuxième table ronde du jour avait pour thème: « Veiller à ce que personne ne soit laissé pour compte: comment protégeons-nous les plus pauvres et les plus vulnérables de la crise et leur donnons-nous les moyens de réaliser les objectifs de développement durable? »  Une question très large à laquelle les participants ont tenté de répondre en mettant en avant l’importance d’une protection sociale élargie, d’une connexion universelle et de partenariats entre les gouvernements à tous les niveaux, la société civile et le secteur privé, dans le cadre de politiques axées sur les droits humains. 

À la suite de Mme Jane Barratt, Secrétaire générale de la Fédération internationale du vieillissement (IFA) et modératrice de cette discussion, qui a mis l’accent sur l’exacerbation des inégalités au cours de la période pandémique, la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a plaidé pour des actions véritablement transformatrices afin de construire des sociétés plus égales et plus durables.  « Une reprise économique à deux vitesses est une reprise qui n’est pas durable et qui finira par provoquer de nouvelles catastrophes », a averti Mme Michelle Bachelet, estimant que les approches de développement fondées sur les droits humains sont « le meilleur moyen de réduire les inégalités et de reprendre notre chemin vers la réalisation du Programme 2030 ».

Pour atteindre ce double objectif, Mme Bachelet a plaidé pour une augmentation des investissements dans les services essentiels.  Même dans un contexte de réduction de l’espace budgétaire, il importe de réaffecter les moyens et de repenser la fiscalité pour dégager de nouvelles ressources et promouvoir une économie qui donne accès aux soins de santé, à la protection sociale, à l’éducation de qualité, à l’eau potable, au logement et à d’autres droits fondamentaux, a-t-elle souligné, avant de rappeler l’importance des données ventilées pour élaborer des politiques efficaces.  « Nous ne pouvons pas résoudre ce que nous ne voyons pas », a-t-elle fait remarquer, rejointe dans cette analyse par le Directeur général adjoint de l’Agence suisse pour le développement et la coopération, selon lequel « seuls ceux qui sont comptés comptent dans les décisions politiques ». 

Pour la Haute-Commissaire, une approche de reprise fondée sur les droits humains exige également une plus grande coopération et une solidarité accrue, notamment pour garantir un accès équitable et universel aux vaccins contre la COVID-19.  Dans ce contexte, le financement du développement et ses conditionnalités devraient, selon elle, soutenir, et non saper, les capacités de chaque État à financer les objectifs des droits de l’homme qui assurent la sécurité et le bien-être des populations.

« Les derniers doivent être les premiers dans les efforts de reconstruction », a abondé Mme Jane Coffin, Vice-Présidente principale de l’Internet Society, pour qui la connectivité est non seulement un moyen de développement essentiel mais aussi un levier de croissance pour les économies.  Reste que la moitié de l’humanité n’a pas accès à l’Internet, ce qui implique de prendre des décisions politiques et réglementaires pour éviter de laisser ces milliards de personnes de côté.  « Si nous n’agissons pas maintenant les écarts vont se creuser », a-t-elle prévenu en préconisant des approches multipartenaires et des efforts de formation aux compétences numériques.  

Partisan lui aussi de partenariats avec les gouvernements, l’industrie et la société civile, « à l’image de ce qui a été fait pour développer les vaccins contre la COVID-19 », M. Joshua Phoho Setipa, Directeur général de la Banque de technologie pour les pays les moins avancés, a mis l’accent sur les besoins immenses des économies émergentes, qui souffraient déjà avant le choc de la pandémie.  Cette crise est un défi sans précédent mais aussi l’occasion d’harmoniser les plans avec les besoins effectifs en matière de développement, a relevé à cet égard M. Saad Alfarargi, Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit au développement.  Il faut donc, à ses yeux, des budgets de développement orientés vers les pays les plus fragiles et un soutien immédiat, agrémenté de liquidités à court terme et de subventions sans condition pour protéger l’emploi et relancer l’activité économique.   

C’est également l’avis de M. Fabio Veras, Coordonnateur des communications, des publications et de la recherche du Centre international de politiques pour une croissance inclusive (IPC-IG), selon lequel l’aide aux pays en développement doit permettre de combler les lacunes en matière de protection sociale, particulièrement marquées dans les pays à faible revenu.  Si ces pays ont le plus souvent aidé les travailleurs à faire face au confinement et à la perte d’emploi, ils ont « oublié » dans leur riposte les acteurs du secteur informel et d’autres laissés pour compte tels que les femmes et les migrants.  Or les migrants sont aussi en première ligne dans les systèmes de santé et les services à domicile, a fait valoir M. Antonio Vitorino, Directeur général de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), non sans appeler à inclure ces populations dans les plans de reprise et les campagnes vaccinales.  « Ces personnes font partie intégrante de la relève », a-t-il insisté, appuyé par le Mécanisme de participation de la société civile en Asie du Sud, qui a mis en garde contre les risques d’exploitation des plus vulnérables.  

Les migrants, mais aussi les femmes, les LGBTI, les enfants, les travailleurs du sexe et les exploitants agricoles figurent parmi les personnes les plus touchées par la crise, a confirmé Mme Beena Pallical, Directrice exécutive du Asia Dalit Rights Forum, en charge des communautés discriminées par le travail et l’ascendance.  La reprise exige, selon elle, de soutenir les communautés des groupes les plus marginalisés, ce qui implique de cartographier ces populations et de leur proposer des solutions adaptées pour en faire des parties prenantes des efforts de redressement. 

Le développement inclusif oblige de prêter l’oreille aux besoins des groupes vulnérables et de différencier les démarches en fonction des contextes, a acquiescé le Mexique, tandis que la Ministre du genre, des enfants et de la protection sociale du Ghana faisait état d’un plan d’action national pour éliminer les formes de travail des enfants et lutter contre les mariages précoces.  Il convient aussi d’agir au niveau local, singulièrement pour remédier aux lacunes en matière de protection sociale, a pour sa part estimé le Directeur de l’Agence de santé publique de la Suède, soulignant à son tour l’importance d’un ciblage des besoins pour réduire les écarts entre les groupes de population.  

« Ces groupes sont détenteurs de droits et doivent participer aux décisions », a renchéri la Norvège, imitée par l’Indonésie qui a mis en avant ses efforts pour venir en aide aux plus pauvres, via des transferts de fonds et des filets de sécurité sociale.  Sur cette même ligne, la Finlande a dit donner la priorité à la protection sociale universelle et l’éducation de qualité, tout en reconnaissant que lutter contre l’exclusion et garantir un emploi pour tous restent problématiques pour les personnes appartenant à des minorités, en situation de handicap ou âgées, ce qui réclame d’impliquer davantage la société civile. 

Pour la Belgique, les jeunes sont des victimes méconnues de la pandémie, qui a eu sur eux des effets à la fois économiques, psychologiques et éducatifs.  En Europe, a-t-elle relevé, deux tiers des jeunes pensent que cette crise a affecté leur santé mentale et la même proportion d’écoliers et d’étudiants estiment avoir moins appris pendant cette période, un phénomène encore aggravé par la fracture numérique.  De fait, a pointé l’ONG World Vision, qui promeut les initiatives de société civile en faveur des ODD, les jeunes sont des laissés pour compte et il est urgent de les entendre davantage pour qu’ils aient « voix au chapitre » dans le cadre de la reprise. 

Renforcer la résilience face aux chocs futurs par des changements structurels et des investissements dans des infrastructures durables

Cette table ronde résolument « tournée vers l’avenir », selon l’expression du Président de l’ECOSOC, a été l’occasion pour les nombreux intervenants de souligner la nécessité absolue d’un relèvement post-pandémie donnant la priorité à des investissements dans des infrastructures résilientes et des systèmes de protection sociale robustes pour faire face aux chocs futurs.  Le consensus de Washington et sa politique d’austérité, critiqué aujourd’hui même par le FMI, doit être abandonné si nous voulons une transformation structurelle de nos économies, a notamment affirmé l’une des oratrices. 

Première intervenante, Mme ISABELLE DURANT, Secrétaire générale par intérim de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a indiqué que les investissements mondiaux ont été durement touchés par la pandémie, diminuant d’un tiers en 2020 par rapport aux niveaux de 2019.  Elle a rappelé que, dans le monde entier, les pays élaborent des plans de relance.  « Nous en sommes en moyenne à un montant de quelque 3 500 milliards de dollars pour la reprise des investissements à divers termes, et d’autres plans sont en préparation. »  Elle s’est félicité que ces plans soient largement orientés vers les infrastructures physiques, numériques et vertes.  Il s’agit de priorités judicieuses car elles sont alignées sur les besoins d’investissement des objectifs de développement durable et ont un effet multiplicateur économique élevé, ce qui est important pour la stimulation de la demande, a-t-elle expliqué.  Cependant, les pays en développement ne représentent qu’environ 10% du total des dépenses de relance à ce jour.  Mme Durant a donc plaidé pour un soutien accru de la part des prêteurs bilatéraux et multilatéraux et des agences de garantie pour contrer les risques et la pression à la hausse sur les coûts de financement des projets dans les pays en développement à faible revenu.  Enfin, elle a estimé que les infrastructures, dont les ports de mer, ont un impact sur la réalisation de 92% de l’ensemble des objectifs de développement durable.

Mme VERA SONGWE, Secrétaire exécutive de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique, a noté les trajectoires économiques divergentes.  « Nous sommes entrés dans la crise ensemble mais nous la vivons de manière très différente. »  Elle a réclamé davantage de fonds pour remédier à ces divergences.  Elle a salué l’approbation des droits de tirage spéciaux et demandé maintenant leur décaissement pour accroître les liquidités à disposition des pays en développement.  Elle a plaidé pour un accès équitable aux vaccins, en rappelant que l’Afrique n’a pour l’instant vacciné que 2% de sa population.  Enfin, Mme Songwe a appelé à baisser les coûts d’accès aux marchés.

Chaque dollar des sommes engagées au titre de la réponse mondiale à la pandémie doit être employé au mieux, a enchaîné Mme MAMI MIZUTORI, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe et Chef du Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes.  Elle a jugé essentiels les investissements dans les infrastructures, en rappelant qu’ils sont dans la majorité financés par le secteur privé.

À son tour, M. FRANCESCO LA CAMERA, Directeur général d’IRENA, a appelé de ses vœux des investissements ciblés dans le secteur des infrastructures et des énergies renouvelables.  Les institutions publiques peuvent jouer un rôle crucial dans l’atténuation des risques d’investissement et l’encouragement des flux de financement privés, qui sont cruciaux pour reconstruire en mieux, a-t-il dit.  « Nous pouvons assurer un accès universel à l’énergie, à l’éducation et à la santé, tout en générant des opportunités économiques stables pour des millions de personnes. »

Face à la multiplicité et à la gravité des crises environnementales, M. EAMON RYAN, Ministre des transports de l’Irlande, a appelé à régler ces crises de manière socialement juste, en citant les instruments internationaux adoptés à ce jour pour ce faire.  Il a aussi appelé à une coopération internationale dans le cadre de l’ONU, les pays développés devant en faire davantage pour aider les pays en développement.  Le Ministre a précisé que la priorité de son pays est la réduction des émissions à gaz à effet de serre.  Il a espéré que l’esprit d’union dont le monde a fait preuve face à la pandémie prévaudra également pour faire face à l’urgence climatique.

Pour sa part, M. YANNICK GLEMAREC, Directeur exécutif du Fonds vert pour le climat, a noté l’importance d’infrastructures résilientes face aux changements climatiques, ajoutant que c’est là l’un des axes d’intervention majeurs de son Fonds.  Le Fonds est aussi un catalyseur d’innovations en vue d’élaborer des solutions respectueuses de la nature, a-t-il dit.  Le Fonds a fourni 158 millions de dollars pour le financement de telles infrastructures, au profit notamment des pays les moins avancés.

M. GAVIN POWER, Vice-Président exécutif de PIMCO, a, lui, fait part du point de vue des investisseurs, PIMCO étant l’un des 30 investisseurs internationaux de l’Alliance pour le développement durable du Secrétaire général.  Il a estimé que le financement des ODD par le secteur privé comme public est un impératif.  PIMCO gère ainsi environ 617 milliards de dollars d’avoirs à dimension développement durable.  Afin de remédier à l’échec des marchés en ce qui concerne le financement du développement, M. Power a plaidé pour l’élaboration de feuilles de routes plus rigoureuses, avec une attention accrue portée aux investisseurs.  « L’appariement des besoins du secteur public et des capacités de financement privées revêt une importance accrue. »  Il a mentionné l’émergence d’un marché des obligations aligné sur les ODD qui pourrait à terme devenir plus important que le marché des obligations climatiques.  Nous travaillons avec la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique à la réalisation de la proposition d’une Facilité de liquidité et de durabilité pour augmenter les investissements en Afrique et aider à une diminution du coût de l’emprunt au titre de la dette souveraine, a conclu M. Power.

Une autre façon de lutter contre les effets néfastes des changements climatiques est d’anticiper les chocs, a développé M. JIM HALL, professeur en risques climatiques et environnementaux de l’Université d’Oxford, qui a plaidé pour un renforcement des capacités d’anticipation des chocs, via notamment une consolidation des infrastructures, des chaînes d’approvisionnement et des systèmes de protection sociale.  Il a aussi réclamé des exercices en grandeur nature pour se préparer aux menaces sanitaires, comme le plan grippe du Royaume-Uni.

Revenant au consensus de Washington, Mme ISABEL ORTIZ, Global Social Justice Program Initiative for Policy Dialogue (IPD), a indiqué que ce consensus, critiqué aujourd’hui même par le FMI, a laissé derrière lui un héritage d’investissements réduits à leur strict minimum dans les secteurs sociaux.  « Il doit être abandonné si nous voulons une transformation structurelle. »  Elle a demandé des investissements pour une santé publique universelle.  Le modèle antérieur de soins de santé basiques pour les pauvres et de soins de santé privés pour les riches n’est plus tenable, a-t-elle prévenu, en estimant qu’il sape le contrat social.  « Il en va de même pour le secteur de l’éducation. »  Elle a souligné la nécessité de mettre en place des systèmes protection universels dans les pays afin d’aboutir à une transformation structurelle.  Elle a aussi mentionné les tentatives de « déprivatisation » du marché de l’eau.  La « remunicipalisation » de l’approvisionnement en eau de la ville de Paris a permis de baisser les prix et un meilleur service.  À son avis, il est faux de penser qu’il n’y a pas de ressources financières suffisantes, comme certains le disent.  Il s’agit là encore d’une relique du Consensus de Washington et de sa politique d’austérité, a-t-elle dit.

Les infrastructures, au cœur de ce débat, ont aussi été abordées par M. STEPHEN DEVEREUX, Institut en études de développement, qui a explicité la notion de « soft infrastructures » ou « infrastructures immatérielles », c’est-à-dire toutes les mesures qui garantissent la protection sociale des populations.  Il a demandé le renforcement des systèmes de protection sociale pour faire face à des chocs futurs, après celui de la pandémie.  Il y a en effet un fossé grandissant entre les pays s’agissant de cette protection sociale, a-t-il dit, en pointant notamment l’absence de protection pour les travailleurs du secteur informel. 

De son côté, M. JIANCHONG ZHU, Pinduoduo Chine, a dit que Pinduoduo est la plus grande plateforme de mise en contact entre agriculteurs et acheteurs en Chine.  Elle a vu son rôle s’accroître lors de la pandémie, a-t-il dit, en citant les nombreux emplois créés.  « Nous devons mieux cultiver et mieux consommer. »

M. REFAT SABBAH, Président de la Campagne mondiale pour l’éducation, a, lui, indiqué que la vraie crise est une crise de solidarité, qui touche notamment le secteur de l’éducation.  La solidarité doit être de mise au quotidien, a-t-il dit.  Il a dénoncé la faiblesse des partenariats, mise à nu par la pandémie, et appelé à investir dans tous les acteurs qui tissent la confiance, dont les professeurs.  Selon cette même logique de solidarité, il a demandé l’annulation de la dette des pays les plus pauvres.

Enfin, M. SURAN MAHARJAN, Grand groupe des volontaires, a insisté sur le rôle essentiel des bénévoles pour l’inclusion sociale, le développement durable et la réponse aux changements climatiques.  « Il est urgent de renforcer les infrastructures sociales en tirant le meilleur profit des volontaires. »

Dans la discussion qui a suivi, le Guyana a appelé à éliminer les inégalités et demandé un meilleur accès aux financements concessionnels afin d’encourager les investissements dans des infrastructures résilientes.  La France investit dans les infrastructures pour accroître la résilience face aux changements climatiques, dans le respect des droits de l’homme, des principes de bonne gouvernance et en préservant la soutenabilité de la dette publique des pays récipiendaires, a-t-elle déclaré.  La Thaïlande a demandé des investissements dans les systèmes de santé et les systèmes de gestion des catastrophes, en insistant sur le rôle des investisseurs privés.  Les pays en développement ont besoin d’un soutien et de ressources, a dit le délégué thaïlandais, en demandant aux institutions financières internationales l’apport de telles ressources.  Même son de cloche du côté de la Chine qui a demandé l’apport d’une telle aide, ainsi que le renforcement de la coopération dans le domaine des infrastructures.  Le délégué chinois a mentionné l’initiative de la nouvelle route de la soie de son pays qui a permis de construire un réseau ferroviaire dans la région.  La Fédération mondiale des organisations d’ingénieurs a enfin exhorté la communauté internationale à donner la priorité à des solutions respectant la nature.  

Le Président de l’ECOSOC a conclu les débats en indiquant qu’il convient de forger un nouveau consensus pour se relever et reconstruire en mieux.  Ce ne sera pas le consensus de Washington, a-t-il conclu, en insistant sur le rôle de l’ONU pour parvenir à ce nouveau consensus.

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