8797e séance – matin
CS/14552

Conseil de sécurité: seul un règlement politique négocié peut « renverser la vapeur » au Yémen, réaffirme l’Envoyé spécial au terme de son mandat

Appelé à exercer les fonctions de Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et de Coordonnateur des secours d’urgence, l’Envoyé spécial pour le Yémen a dressé ce matin, devant le Conseil de sécurité, le bilan de ses trois années à ce poste, jugeant que seul un règlement politique négocié peut véritablement « renverser la vapeur » dans ce pays en guerre depuis près de sept ans.  Il a souhaité que les parties yéménites soient assez « courageuses » pour choisir cette voie plutôt que la poursuite du conflit.

Évoquant une succession d’« opportunités manquées puis perdues » ces dernières années, M. Martin Griffiths a surtout regretté qu’en dépit des navettes diplomatiques, les parties n’aient pas réussi à surmonter leurs divergences.  Face à Ansar Allah, bras politique des houthistes, qui insiste sur un accord autonome pour le port d’Hodeïda et l’aéroport de Sanaa comme condition préalable au cessez-le-feu et au lancement du processus politique, le Gouvernement yéménite veut que ces questions soient mises en œuvre « comme un tout », a-t-il résumé, déplorant qu’aucune des solutions proposées pour rapprocher ces positions n’ait été acceptée par les deux camps.

Pour l’Envoyé spécial, un cessez-le-feu à l’échelle nationale doit rester la priorité.  Il permettrait non seulement de faire taire les armes mais aussi d’ouvrir des routes vitales, notamment à Mareb et à Taëz, et ramènerait un sentiment de sécurité chez les civils vivant près des lignes de front.  M. Griffiths a également appelé à la réouverture de l’aéroport de Sanaa et à la levée des restrictions sur le carburant dans les ports d’Hodeïda, non sans rappeler que l’Accord de Stockholm, conclu fin 2018, comprenait l’Accord « historique » sur Hodeïda, lequel a établi un cessez-le-feu dans la province côtière et permis la distribution d’une aide humanitaire, tout en entraînant une réduction « spectaculaire » du nombre de morts et de blessés parmi les civils. 

Selon le haut fonctionnaire, le seul moyen de sortir de ce « bourbier » est que les dirigeants s’engagent à dialoguer pour résoudre leurs différends à long terme.  À ses yeux, le Yémen a besoin d’un processus politique inclusif pour parvenir à un règlement qui reflète les intérêts des diverses parties et des personnes plus touchées.  Reste que, tout au long du conflit, les acteurs armés et politiques se sont multipliés et l’ingérence étrangère s’est accrue.  De fait, « ce qui était possible en termes de résolution de conflit il y a des années n’est plus possible aujourd’hui », a-t-il noté en se disant inquiet pour l’avenir. 

Convaincu que le processus politique facilité par l’ONU peut ouvrir la voie à un « avenir pluraliste » au Yémen, M. Griffiths a averti que chaque jour de cette guerre menace davantage une telle perspective.  Un avis partagé par l’actuel Coordonnateur des secours d’urgence, qui a indiqué qu’il n’y a pas de « pénurie d’options » pour mettre un terme à la guerre.  « Mais c’est aux parties de faire en sorte que cela devienne réalité et, jusqu’à présent, cela n’est pas encore le cas », a souligné M. Mark Lowcock. 

Sur le plan humanitaire, M. Lowcock a indiqué que la famine devrait pouvoir être évitée cette année encore, même s’il est encore trop tôt pour en avoir la certitude.  Réclamant d’autre part un accès sans entraves pour les travailleurs humanitaires au Yémen, il a exhorté les parties, à commencer par Ansar Allah, à faciliter leur travail qui bénéficie à plus de 10 millions de personnes chaque mois dans le pays.  Cela permettra d’achever de convaincre les donateurs de pérenniser le financement des opérations pour l’année en cours, a-t-il relevé. 

Le Coordonnateur des secours d’urgence a par ailleurs plaidé pour une meilleure protection des civils en rappelant qu’en moyenne cinq civils sont tués ou blessés lors d’hostilités chaque jour au Yémen.  L’offensive contre Mareb, apparemment conduite par Ansar Allah, continue de faire peser une menace directe sur des millions de personnes, a-t-il alerté, avant de réclamer un établissement des responsabilités pour les violations commises. 

Cet appel a fait écho au témoignage de Mme Najiba Al Naggar, fondatrice et Chef de programme de l’ONG « SOS Center for Youth Capabilities Development », qui a fait part des souffrances endurées par des millions de femmes yéménites victimes du conflit.  Le déclin alarmant de l’économie et de la monnaie depuis le début de la guerre, combiné à l’impact dévastateur de la COVID-19, a rendu la vie de millions de Yéménites ordinaires insupportable, surtout les femmes qui sont affectées de manière disproportionnée, a-t-elle expliqué, parlant d’une résilience « proche du point de rupture ».

Malgré le rôle essentiel que les femmes yéménites ont joué dans l’action humanitaire, où elles représentent 80% des secouristes, ainsi que pour négocier des cessez-le-feu locaux, elles restent exclues de rôles significatifs dans le processus de paix dirigé par l’ONU, a déploré l’activiste, notant qu’elles sont aussi complètement écartées du nouveau gouvernement, une première en deux décennies.  « Nous avons besoin de votre aide, et nous en avons besoin maintenant », a-t-elle lancé aux membres du Conseil, dont plusieurs ont salué sa supplique poignante.

Prenant à son tour la parole, le représentant du Yémen a imputé aux houthistes le blocage de la situation et des efforts de paix.  Les attaques brutales contre Mareb reflètent, selon lui, les « tendances terroristes et criminelles » de ces milices soutenues par le « régime iranien » qui entend semer le « chaos » dans la région.  Par leur faute, a-t-il ajouté, les conditions sécuritaires se sont gravement détériorées à Hodeïda, ville où converge 80% de l’aide humanitaire pour le pays.  Les houthistes continuent en outre de recruter des milliers d’enfants dans leurs zones de contrôle, tout en utilisant le pétrolier en perdition SAFER comme « objet de marchandage et de chantage ».

Exhortant le Conseil de sécurité à exercer une « pression maximale » sur les houthistes afin d’éviter une catastrophe qui détruirait les écosystèmes de la mer Rouge, frapperait le secteur régional de la pêche, polluerait les puits d’eau et affecterait la navigation internationale et l’économie mondiale, il a conclu son propos en invitant, au nom de son gouvernement, Ansar Allah à s’asseoir à la « table du dialogue » afin de faire avancer les intérêts du peuple yéménite et de mettre fin à ce conflit. 

LA SITUATION AU YÉMEN

Déclarations

M.  MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial pour le Yémen, a commencé par indiquer que cet exposé serait son dernier à ce titre devant le Conseil de sécurité.  Il a ensuite constaté que des hommes, des femmes et des enfants yéménites souffrent chaque jour parce que les personnes au pouvoir ont « raté les opportunités » qui s’offraient à elles de faire les concessions nécessaires pour mettre fin à la guerre.  En conséquence, a-t-il noté, « les Yéménites sont obligés de vivre dans la violence, l’insécurité et la peur, avec des limites à leur liberté de mouvement, de religion et d’expression ».  Jugeant que seul un règlement politique négocié peut véritablement « renverser la vapeur » au Yémen, il a souhaité que les parties soient assez courageuses pour choisir cette voie plutôt que la poursuite du conflit.  Au cours des trois dernières années, « nous leur avons offert de nombreuses opportunités, mais en vain », a-t-il déploré, avant de remercier les membres du Conseil, en particulier les États-Unis, ainsi que l’Arabie saoudite et le Sultanat d’Oman, pour leur soutien diplomatique inlassable aux efforts de l’ONU dans le dernier cycle de médiation.

Évoquant les négociations en cours, M. Griffiths a regretté qu’en dépit des navettes diplomatiques, les parties n’aient pas surmonté leurs divergences.  Il a indiqué que Ansar Allah, bras politique des houthistes, insiste sur un accord autonome pour les ports d’Hodeïda et l’aéroport de Sanaa comme condition préalable au cessez-le-feu et au lancement du processus politique.  De son côté, a-t-il ajouté, le Gouvernement yéménite veut que ces questions soient acceptées et mises en œuvre « comme un tout », y compris le début du cessez-le-feu.  « Nous avons proposé différentes solutions pour rapprocher ces positions.  Malheureusement, aucune n’a été acceptée par les parties », a-t-il reconnu, espérant que les efforts entrepris par Oman et d’autres porteront leurs fruits.  Pour l’Envoyé spécial, un cessez-le-feu à l’échelle nationale permettrait de faire taire les armes, d’ouvrir des routes vitales, notamment à Mareb et à Taëz, et ramènerait un sentiment de sécurité chez les civils vivant à proximité des lignes de front.  Il a donc jugé que la fermeture de l’aéroport de Sanaa ainsi que les restrictions sur le carburant dans les ports d’Hodeïda sont « injustifiables » et doivent être corrigées.

Á cet égard, M. Griffiths a rappelé que l’Accord de Stockholm comprenait l’Accord « historique » sur Hodeïda, lequel a établi un cessez-le-feu dans la province côtière et permis la distribution de biens vitaux arrivant par les trois ports de la mer Rouge auparavant perturbés par des lignes de front instables. L’Accord sur Hodeïda a également entraîné une réduction spectaculaire du nombre de morts et de blessés parmi les civils, mais les violations du cessez-le-feu restent quotidiennes, a-t-il observé.  En outre, des progrès insuffisants ont été réalisés pour réactiver le Comité de coordination du redéploiement, qui est pourtant un élément essentiel pour garantir le cessez-le-feu, depuis sa suspension en mars 2020.  Relevant que la guerre a aussi exacerbé les divisions dans les provinces du Sud, le haut fonctionnaire a aussi plaidé en faveur d’une poursuite du partenariat établi entre le Gouvernement yéménite et le Conseil de transition du Sud grâce aux « efforts exceptionnels » de l’Arabie saoudite.  Selon lui, le seul moyen de sortir de ce « bourbier » est que les dirigeants s’engagent dans le dialogue pour résoudre leurs différends à long terme.

Au-delà de ce « tableau sombre », M. Griffiths a tenu à souligner les réalisations des Yéménites qui travaillent à ouvrir des routes et à libérer des prisonniers, indépendamment de la médiation diplomatique entre leurs dirigeants. Ils ont formé des alliances et mené des initiatives qui vont des plateformes médiatiques non partisanes à l’organisation de la société civile et des réseaux de sécurité communautaire.  « Ces efforts courageux sont l’espoir et l’avenir du pays, il est de notre devoir de les soutenir », a souligné le responsable onusien, avant de revenir sur ce qu’il a appris ces trois dernières années.  A ses yeux, le Yémen est « une histoire d’opportunités manquées puis perdues ».  Parfois, les dirigeants ont « failli faire le choix », qu’il s’agisse d’un échange de prisonniers ou d’une désescalade, mais lorsqu’un côté était prêt à faire des concessions, l’autre ne l’était pas, a-t-il relaté, dénonçant les polémiques qui s’en suivaient sur les médias sociaux.  « Ce qui a été le plus frustrant pendant mon mandat d’Envoyé spécial a été l’absence de pourparlers de paix globaux », a-t-il ajouté, non sans relever que la dernière fois que les parties se sont réunies pour discuter des questions politiques et de sécurité essentielle pour mettre fin à la guerre, « c'était au Koweït, en 2016 ».  Un constat « choquant », selon lui.  

De l’avis de M. Griffiths, le Yémen a besoin d’un processus politique inclusif, « voire d’un règlement, s’il veut sortir des cycles de violence et de conflit ».  Pour cela, le dialogue sera long et complexe, même si les principes directeurs de cette vision sont déjà clairs: partenariat politique, gouvernance responsable, souveraineté, justice économique et sociale et citoyenneté égale.  De fait, a poursuivi l’Envoyé spécial, un règlement politique devra refléter les intérêts des diverses parties au conflit, tout en garantissant les intérêts et les droits de ceux qui sont les plus touchés.  « Ces acteurs doivent faire partie intégrante de la définition de la feuille de route vers la paix au Yémen », a-t-il insisté, reconnaissant toutefois que « le temps n’est pas du côté du Yémen ».  En effet, au cours du conflit, les acteurs armés et politiques se sont multipliés et l’ingérence étrangère s’est accrue.  « Ce qui était possible en termes de résolution de conflits il y a des années n’est plus possible aujourd’hui », a noté le haut fonctionnaire. 

Indiquant avoir passé son mandat à demander aux parties de pourvoir aux besoins humanitaires de leur peuple, M. Griffiths a cependant estimé qu’un véritable leadership va au-delà de la recherche du bien-être immédiat des personnes pour garantir leurs droits et leur avenir.  « Mon inquiétude ne porte pas tant sur le cessez-le-feu que sur l’avenir », a-t-il souligné, réaffirmant que le Yémen a besoin d’un avenir politique pluraliste et que le processus politique facilité par l’ONU doit leur ouvrir la voie pour y parvenir.  Or, chaque jour de cette guerre menace davantage cet avenir, a-t-il averti.  « Mettons fin, pour le bien du Yémen, à cette guerre sans tarder afin que nous puissions commencer la bataille réelle et finale, la bataille pour la paix ».

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré que le monde peut améliorer la situation au Yémen comme il l’a fait en 2018-2019, lorsqu’il a stoppé une grave famine.  Certains signes laissent à penser que nous pourrons éviter la famine cette année encore, même s’il est encore trop tôt pour en avoir la certitude, a dit M. Lowcock.  Il a indiqué qu’il existe une entente sur ce qu’il convient de faire au Yémen, y compris au sein de ce Conseil, ajoutant que l’enjeu désormais est de traduire cette entente dans les faits.  Il a ainsi plaidé pour une meilleure protection des civils en rappelant qu’en moyenne cinq civils sont tués ou blessés lors d’hostilités chaque jour au Yémen.  Le mois de mai a été le plus meurtrier, plus de 60 personnes ayant été tuées.  Il a déclaré que l’offensive contre Mareb, apparemment conduite par Ansar Allah, continue de faire peser une menace directe à l’encontre de millions de personnes, y compris le million de personnes qui ont fui leurs foyers.  Les parties doivent toujours protéger les civils et les biens civils lors de leurs opérations militaires, a-t-il dit, en demandant un établissement des responsabilités pour les violations commises. 

Le Coordonnateur des secours d’urgence a souligné la nécessité d’un cessez-le-feu à l’échelle nationale, avant d’attirer l’attention du Conseil sur le sort des migrants et réfugiés au Yémen.  Hier, un bateau transportant plus de 150 migrants a sombré au large des côtés yéménites.  Selon les informations locales, 25 corps ont été rendus par les eaux, tandis que des dizaines de personnes sont portées disparues.  M. Lowcock a réclamé un accès sans entraves pour les travailleurs humanitaires au Yémen, rappelant que les agences humanitaires aident plus de 10 millions de personnes chaque mois dans le pays.  « La plupart des difficultés, mais pas toutes, sont localisées dans les zones contrôlées par Ansar Allah ».  Il a donc appelé à la levée des restrictions injustifiées qui entravent les déplacements des travailleurs humanitaires, en exhortant les parties, en particulier Ansar Allah, à faciliter leur travail.  Cela permettra d’achever de convaincre les donateurs de pérenniser le financement des opérations pour l’année, a déclaré M. Lowcock. 

Sur ce plan financier, le Secrétaire général adjoint a indiqué que la réponse humanitaire est financée à hauteur de 43% alors qu’elle l’était à hauteur seulement de 15% avant la conférence d’annonce des contributions le 1er mars dernier.  « Il s’agit là de progrès substantiels. »  Le Programme alimentaire mondial a repris sa distribution de rations à six millions de personnes, alors qu’elle avait été interrompue.  Mais l’argent pourrait rapidement venir à manquer, a averti M. Lowcock, en demandant que les promesses d’apporter plus de 200 millions de dollars soient honorées.

Le Coordonnateur des secours d’urgence a indiqué que les deux moyens de remettre sur pied l’économie yéménite sont la libéralisation des importations et un taux de change plus solide.  Il a rappelé que le Conseil a, pendant des années, donné son accord pour que les importations puissent entrer en quantité adéquate par tous les ports du pays.  « Mais cela n’est toujours pas la réalité. »  Les importations de carburant transitant par Hodeïda de janvier à mai dernier ne sont qu’à un cinquième de leur niveau de l’année dernière.  La levée des restrictions pour toutes les importations aiderait des millions de personnes, a assuré M. Lowcock.

Enfin, le Coordonnateur des secours d’urgence a indiqué qu’il n’y a pas une pénurie d’options pour mettre un terme à la guerre.  « Mais c’est aux parties de faire en sorte que cela devienne réalité et jusqu’à présent cela n’est pas encore le cas. »

Mme NAJIBA AL NAGGAR, fondatrice et Chef de programme de « SOS Center for Youth Capabilities Development », une ONG qui travaille sur la gouvernance, la consolidation de la paix, le développement et les droits humains, a indiqué qu’elle fait partie des millions de femmes yéménites qui ont subi le fléau de la guerre, racontant ses pérégrinations d’Aden à Sanaa en passant par Taëz pour échapper à la guerre.  Sur le plan économique, elle a rappelé que même avant le déclenchement de la guerre, le Yémen était le pays le plus pauvre de la région et à ce jour, le pays a perdu 90 milliards de dollars de production économique.  Le déclin alarmant de l’économie et de la monnaie depuis le début de la guerre, combiné à l’impact dévastateur de la COVID-19, a rendu la vie de millions de Yéménites ordinaires insupportable, surtout les femmes qui sont affectées de manière disproportionnée.  Pour survivre, beaucoup parmi elles réduisent leur alimentation pour donner plus de nourriture à leurs enfants, limitent le nombre de repas ou doivent emprunter de la nourriture à des amis ou à des parents.  Les familles qui s’endettent pour subvenir à leurs besoins les plus élémentaires deviennent la norme et les femmes subissent de plus en plus de pression à mesure que le nombre de ménages dirigés par une femme augmente. 

Notre résilience est proche du point de rupture, a témoigné Mme Al Naggar. Elle a également indiqué que les violences basées sur le genre sévissent et sont souvent non signalées en raison de la peur des survivants d’être tués, détenus ou exposés à de nouvelles violences, ainsi que la stigmatisation et la faiblesse de l’état de droit.  Malgré ce contexte extrêmement difficile, 80% des secouristes sont des femmes.  En effet, les femmes yéménites ont fourni une aide humanitaire vitale, même lorsque la communauté internationale n’a pas été en mesure d’atteindre les communautés qui en avaient désespérément besoin.  Lorsque les villes sont assiégées ou que les routes deviennent dangereuses pour l’acheminement de l’aide humanitaire, les femmes yéménites sont intervenues pour négocier des cessez-le-feu locaux et ont appelé avec succès les parties belligérantes à ouvrir des couloirs humanitaires, a-t-elle affirmé.  Les femmes ont aussi joué un rôle important dans la lutte contre les tensions tribales et les conflits communautaires parce qu’elles connaissent leurs propres communautés, elles comprennent mieux leurs besoins ainsi que les facteurs qui déclenchent les tensions et les conflits.  Les femmes font tout cela contre vents et marées, remettant en cause les normes de genre et avec bien trop peu de soutien et de ressources de la part des acteurs nationaux et internationaux, a déploré Mme Al Naggar.  Malheureusement, de plus en plus au cours de la dernière année, les femmes du nord du Yémen sont confrontées à un obstacle supplémentaire dans leurs efforts car les autorités imposent le « mahram », la pratique selon laquelle les femmes doivent être accompagnées d’un parent de sexe masculin lorsqu’elles voyagent. 

Malgré le rôle essentiel que les femmes yéménites ont joué dans l’action humanitaire ainsi que dans la consolidation de la paix, elles ont été exclues de rôles formels et significatifs dans le processus de paix dirigé par l’ONU, a encore déploré l’activiste, notant qu’elles sont complètement exclues du nouveau gouvernement, une première en deux décennies.  De ce fait, l’ONU et les autorités yéménites doivent faire davantage pour garantir la participation formelle et directe des femmes, la norme consacrée dans la résolution 1325 (2000).  En outre, pour garantir que les femmes yéménites puissent continuer à jouer un rôle actif dans la vie publique, il est essentiel qu’elles puissent le faire sans crainte de représailles. 

Le peuple yéménite se sent abandonné par la communauté internationale et perd espoir.  Nous avons besoin de votre aide, et nous en avons besoin maintenant, a-t-elle dit.  Elle a plaidé pour un cessez-le-feu durable et a voulu que soit assurée la participation pleine, égale et significative des femmes, des jeunes et de la société civile de tous horizons politiques et de toutes les régions du Yémen, y compris le Sud, dans toutes les voies diplomatiques et étapes du processus de paix, en garantissant d’urgence un quota minimum de 30% de femmes.  De même, Mme Al Naggar a appelé à accroître considérablement le soutien aux organisations locales et nationales dirigées par des femmes et aux organisations de défense des droits des femmes, en particulier un financement de base, flexible et à long terme.  Elle a aussi souhaité que les efforts cruciaux et légitimes des femmes artisanes de la paix et humanitaires soient reconnus publiquement.  

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a salué le déplacement de l’Envoyé spécial à Sanaa, tout en notant que les houthistes ont attendu les derniers jours de son mandat pour l’inviter à Sanaa pour la première fois depuis plus d’un an. Les houthistes ont de nouveau ciblé des civils à Mareb, faisant 10 morts, a-t-elle déploré, en dénonçant également l’attaque houthiste contre une école saoudienne dimanche.  Les houthistes continuent également de saper les libertés et les droits des femmes yéménites et des minorités ethniques.  Elle a souhaité que le processus au Yémen soit plus inclusif, avec une participation renforcée des femmes et des jeunes.  Devant les graves pénuries en carburant, elle a appelé à une solution pérenne s’agissant des importations et demandé une distribution égale dans tout le pays desdites importations de carburant.  Enfin, s’agissant du pétrolier SAFER, la déléguée a exhorté les houthistes à agir afin d’éviter une catastrophe.

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a fermement condamné les deux attaques de missiles lancées contre Mareb au cours des 10 derniers jours et qui ont fait des victimes civiles.  Aucun effort ne doit être épargné pour traduire en justice les auteurs de ces attaques odieuses contre les civils et les infrastructures civiles, a-t-elle dit.  Elle a invité à prendre des mesures préventives afin que le Yémen ne devienne pas un exportateur de terrorisme et d’extrémisme violent dans la région, à travers le golfe d’Aden jusqu’à la Corne de l’Afrique et au-delà.  Elle a aussi exhorté toutes les parties à faire preuve d’un engagement politique sincère et véritable en mettant en œuvre « au minimum » la cessation de la violence.

Le Kenya a recommandé fortement que le processus de résolution et de relèvement de la paix intègre le processus de « désarmement, démobilisation et réintégration plus » qui, a souligné la représentante, doit être mené de manière à garantir que les anciens combattants ne rechutent pas dans un conflit armé et ne tombent pas dans la radicalisation par des groupes terroristes.  De même, la communauté internationale doit délibérément investir dans les jeunes pour les doter de compétences qui leur permettraient de gagner décemment leur vie et de contribuer au développement national.  La représentante s’est ensuite félicitée des mesures prises par les donateurs pour accroître leur financement des efforts de secours humanitaire.  Mme Toroitich a par ailleurs espéré que les pourparlers entre l’ONU et les houthistes conduiront au déploiement rapide de l’équipe d’inspection du pétrolier SAFER pour éviter une catastrophe environnementale imminente qui aurait un impact dévastateur sur le Yémen et la région environnante.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a exhorté les parties au conflit à cesser les violences et à s’engager dans un processus de paix.  Il a appuyé les efforts de l’ONU en ce sens, en reconnaissant la tâche complexe de l’Envoyé spécial.  Il a mentionné la réunion qui s’est tenue le 26 mai en Russie entre le Ministre des affaires étrangères russe et son homologue yéménite, avant d’insister sur le rôle constructif joué par les pays de la région pour le règlement de la crise.  La cessation des hostilités doit s’accompagner d’une série de mesures de confiance, a-t-il dit, en demandant notamment un accroissement de l’aide humanitaire.  Le délégué a demandé la levée du blocus aérien et maritime contre le Yémen, ainsi qu’un acheminement sans entraves des biens de première nécessité.  L’aide humanitaire doit être acheminée en toute impartialité, a-t-il affirmé.  Enfin, le délégué a demandé au Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS) à jouer un rôle constructif en ce qui concerne le dossier du pétrolier SAFER.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a salué l’intervention de Mme Najiba Al Naggar, soulignant qu’une participation, équitable et significative des femmes peut ouvrir de nouvelles voies vers la paix.  La représentation directe des femmes n’est pas facultative, c’est leur droit, a-t-elle souligné, notant en outre que les jeunes méritent eux aussi d’occuper leur place à la table.  Elle s’est déclarée encouragée par la visite qu’a pu effectuer l’Envoyé spécial à Sanaa pour la première fois depuis plus d’un an, pour ensuite appeler les parties au conflit à faire preuve de volonté politique pour progresser sur la voie d’un dialogue politique inclusif.  Elle a également appelé les houthistes à mettre fin à leur offensive sur Mareb. 

Mme Byrne Nason a relevé que l’impact économique du conflit continue d’avoir des conséquences humanitaires désastreuses.  Le prix de la nourriture grimpe en flèche et les denrées de base sont hors de portée pour des millions de personnes qui souffrent d’une faim chronique, s’est-elle inquiétée.  La représentante a également appelé les houthistes et l’ONU à conclure rapidement un accord au sujet de l’accès au pétrolier SAFER.

M.  DINH QUY DANG (Viet Nam) a constaté d’emblée qu’aucun changement significatif n’a été enregistré dans le processus de paix au Yémen malgré les efforts de l’Envoyé spécial.  Au contraire, a-t-il dit, on a continué d’assister à une escalade militaire dans de nombreuses régions, avec de nombreuses victimes civiles.  Dans ce contexte, le représentant a réaffirmé qu’il n'y a pas de solution militaire à ce conflit qui dure depuis près de sept ans.  Selon lui, toutes les parties doivent cesser les hostilités et n’épargner aucun effort pour parvenir à l’acceptation de la proposition de paix dirigée par les Nations Unies. De plus, a-t-il ajouté, l’inclusion des femmes dans le processus politique devrait également être garantie et encouragée. 

Sur le plan humanitaire, le délégué s’est félicité que les récents financements de donateurs aient permis au Programme alimentaire mondial (PAM) de reprendre ses distributions mensuelles à six millions de Yéménites dans les zones où le taux d’insécurité alimentaire est le plus élevé.  Cependant, il a estimé que des progrès supplémentaires sont nécessaires pour assurer la stabilité de l’aide au cours des mois restants de cette année.  Compte tenu du conflit, de la crise économique, de la pénurie de carburant, du risque de famine et de la propagation de la pandémie de COVID-19, il a réitéré son appel à un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave.  Il a également jugé urgent de lever davantage le blocus maritime pour assurer un approvisionnement prévisible en nourriture et en carburant.  Enfin, après avoir souhaité une nouvelle fois que l’équipe technique de l’ONU puisse accéder sans délai au pétrolier SAFER au large du Yémen, il a remercié M. Martin Griffiths pour ses efforts inlassables en tant qu’Envoyé spécial. 

Mme INGA RHONDA KING, Saint-Vincent-et-les Grenadines, a condamné la poursuite des affrontements en mai, qui a été l’un des mois les plus meurtriers du conflit cette année.  Elle a dénoncé les attaques contre les écoles, qui violent le droit international, et demandé aux parties d’élaborer un plan pour prévenir les graves violations contre les enfants.  Elle a plaidé pour un cessez-le-feu à l’échelle nationale et pour la reprise des pourparlers politiques, les civils continuant de payer le prix fort du conflit.  Qualifiant la situation humanitaire de critique, elle a demandé un redoublement des efforts humanitaires, avant de s’inquiéter de la situation des migrants et réfugiés dans le pays.  Les négociations politiques doivent être inclusives pour réussir, a dit la déléguée, en demandant qu’elles associent la pluralité des voix dans le pays.  Le processus devra être dirigé et contrôlé par les Yéménites.  Enfin, elle a plaidé pour une solution adéquate s’agissant du pétrolier SAFER, afin d’éviter une catastrophe.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a plaidé pour que cessent les attaques contre les civils au Yémen, et que les responsables soient traduits en justice.  Elle a aussi demandé que cessent les transferts d’armes vers le Yémen.  Pour faire face à la crise sanitaire de la COVID-19 qui affecte également le Yémen, elle a indiqué que le Mexique va débourser 50 000 dollars d’aide à ce pays et a invité les bailleurs de fonds à apporter leur appui.  La déléguée a ensuite appelé Ansar Allah et le Gouvernement yéménite à faciliter les activités humanitaires dans le pays, notant que la cessation de la violence et la liberté de circuler sont cruciales pour apporter l’assistance nécessaire aux populations dans le besoin.   

Sur le plan politique, Mme Buenrostro Massieu a souhaité que se poursuivent les pourparlers entre les diverses parties, tout en insistant pour l’engagement d’Ansar Allah dans ce processus piloté par l’ONU.  Elle a également plaidé pour la pleine participation des femmes dont le rôle fut marquant pour la récente libération de prisonniers.  Elle a en outre invité Ansar Allah à collaborer avec l’ONU pour faciliter l’inspection du pétrolier SAFER.  

M. TAREK LADEB (Tunisie) a estimé qu’il n’existe pas d’alternative à une solution négociée inclusive qui tienne compte des intérêts de tous les Yéménites sans exception.  La poursuite du conflit a prouvé que les options militaires consistant à « privilégier la logique de la force » n’ont fait qu’entraîner davantage de victimes, de destructions et de déplacements, compromettant les chances de paix, a-t-il constaté, jugeant inacceptable que cette situation perdure, surtout à la lumière de la détérioration de la situation humanitaire.  Dans ce contexte, il a appelé les parties au conflit à s’engager sur la voie d’un règlement politique, à déclarer un cessez-le-feu global et à placer l’intérêt suprême du Yémen et de son peuple « au-dessus de toute considération ».  Condamnant la poursuite des assauts contre Mareb, qui contribue à compliquer davantage la situation, le représentant s’est également élevé contre les attaques répétées sur le territoire de l’Arabie saoudite et la prise pour cible des civils.  Il a appelé les houthistes à mettre un terme à de tels actes.

Soulignant que le Yémen connaît « la plus grande crise humanitaire, sociale et économique au monde », le représentant a rappelé que cette situation est exacerbée par la poursuite des opérations militaires et la perturbation des opérations de secours, en plus des effets de la pandémie de COVID-19.  Il a donc réitéré son appel à faciliter l’accès sans entrave de l’aide humanitaire et médicale, à lever les restrictions sur les ports et les aéroports, et à fournir un financement approprié pour répondre aux besoins urgents du peuple yéménite.  Quant au pétrolier SAFER, qui menace de provoquer une catastrophe environnementale, économique et humanitaire sans précédent dans la région, il a une nouvelle fois souhaité que des experts internationaux puissent effectuer les inspections techniques et les réparations nécessaires dans les meilleurs délais.

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a relevé qu’en l’espace d’un an, l’Envoyé spécial a négocié une proposition pour alléger les restrictions autour du port d’Hodeïda et l’aéroport de Sanaa, établir un cessez-le-feu et lancer des pourparlers inclusifs. Les Gouvernements saoudien et yéménite ont fait part de leur volonté à adhérer à cette proposition, mais les houthistes ont refusé de dialoguer et de discuter du cessez le feu, préférant poursuivre leur offensive dévastatrice contre Mareb.  Il a condamné les actes terribles provoqués par les houthistes qui continuent de bafouer les appels du Conseil de sécurité, déplorant notamment l’attaque du 6 juin contre une station essence qui a fait 21 morts, dont une fillette brûlée au point d’être méconnaissable.

Poursuivant, le représentant a appelé le Gouvernement du Yémen et le Conseil de transition du Sud à accorder la priorité aux intérêts du peuple yéménite qui, a-t-il souligné, a besoin d’un gouvernement uni capable de fournir les services et de mettre un terme à la crise.  Il a espéré que les négociations sur la mise en œuvre de l’Accord de Riyad porteront leurs fruits.  Notant que 66% de la population a besoin d’une aide, il souligné que la mise en place d’un cessez-le-feu durable et l’identification d’une solution politique inclusive représentent le seul moyen de mettre un terme à la crise humanitaire.  Il a appelé à assurer la libre circulation des articles humanitaires par les ports de la mer Rouge pour éviter toute détérioration des conditions de vie dans les zones contrôlées par le houthistes. 

S’agissant du pétrolier SAFER, M. DeLaurentis a déploré l’absence de progrès depuis la réunion consacrée à ce sujet par le Conseil de sécurité il y a un an.  Il a appelé les houthistes à garantir un accès sans entraves et sans conditions à l’équipe de l’ONU pour qu’elle puisse inspecter et effectuer des réparations dans plus tarder.  Toute catastrophe écologique incomberait aux houthistes et à eux seuls, a-t-il prévenu.  Le représentant s’est par ailleurs félicité du renouvèlement prochain du mandat de la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH).

Mme MONA JUUL (Norvège) a noté que selon le Programme alimentaire mondial (PAM), 400 000 enfants yéménites de moins de cinq ans mourront probablement de faim en 2021.  « Une tragédie impensable ».  Les houthistes porteront une très lourde responsabilité s’ils continuent d’ignorer les parties prêtes à la paix et de rejeter un accord de cessez-le-feu à l’échelle nationale, a déclaré Mme Juul en appelant toutes les parties à s’engager dans des pourparlers inconditionnels pour mettre fin aux souffrances du peuple yéménite.  Elle a plaidé pour la participation des femmes et les groupes de la société civile au processus de paix, étant donné qu’ils ont une expérience considérable dans la négociation de trêves locales, la réouverture de routes et la libération de prisonniers.  « Nous devons donner aux personnes les plus touchées par le conflit les moyens d’être au centre de l’élaboration de solutions », a plaidé la représentante, arguant que la participation ne devrait pas être limitée à ceux qui recourent à la violence.  Elle a rappelé qu’il existe d’autres groupes ayant une influence importante au Yémen, notamment les partis politiques, les tribus et les autorités locales.  De même, les négociations devront également s’attaquer aux causes profondes du conflit.

Concernant le pétrolier SAFER et les demandes croissantes des houthistes, elle a noté qu’il est manifestement irréaliste de réparer le navire et de le rendre à nouveau opérationnel en raison de son état de vétusté.  Même si l’ONU devait réparer le navire, il faudrait d’abord l’inspecter pour évaluer les besoins, a-t-elle expliqué.  Elle a invité les membres du Conseil de sécurité à appeler les dirigeants houthistes à agir de manière responsable et à parvenir à un accord.  En outre, la Norvège s’est inquiétée de la situation humanitaire qui continue de se détériorer dans le contexte de la COVID-19, avant de demander une analyse détaillée sur le Yémen dans le rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a constaté que les combats en cours dans plusieurs régions du Yémen, notamment à Mareb, sapent les perspectives de paix.  Malgré d’intenses efforts diplomatiques régionaux et internationaux, y compris de la part de l’ONU, une percée pour mettre fin aux hostilités n’est malheureusement pas encore à l’ordre du jour, a-t-il indiqué, avant d’appeler toutes les parties au conflit à prendre des mesures concrètes vers la désescalade.  Affirmant qu’il ne peut y avoir de solution militaire à ce conflit, il a averti que « la prolongation des hostilités ne profitera à personne, à l’exception des groupes terroristes comme Al-Qaida, qui exploiteront la situation à leur profit, aggravant ainsi encore la situation humanitaire et sécuritaire ».

Le délégué s’est ensuite déclaré préoccupé par la reprise des attaques menées depuis le Yémen contre des navires commerciaux naviguant en mer Rouge et dans le golfe d’Aden, condamnant également les attaques transfrontalières contre des infrastructures civiles et énergétiques critiques en Arabie saoudite.  Selon lui, une application stricte de l’embargo sur les armes prévu dans la résolution 2216 (2015) et une surveillance efficace sont nécessaires pour éliminer de telles menaces à l’avenir.

S’agissant de la crise humanitaire, M. Raguttahalli a soutenu qu’aucune amélioration ne pourra être enregistrée sans mettre fin au conflit, ce qui passe par un cessez-le-feu à l’échelle nationale.  Saluant les récentes autorisations délivrées par le Gouvernement yéménite pour ravitailler les navires entrant dans le port d’Hodeïda, il a jugé qu’une solution durable à ce problème, qui traite aussi de la gestion appropriée des revenus liés au pétrole, est une « exigence urgente ».  Il a d’autre part estimé qu’un financement plus soutenu des donateurs est nécessaire pour permettre la poursuite des opérations humanitaires.  Enfin, après avoir exhorté Ansar Allah à fournir un accès rapide à l’ONU pour inspecter le pétrolier SAFER et effectuer les réparations essentielles sans plus tarder, il a souligné que les pays de la région ont un rôle majeur à jouer pour inciter les parties yéménites à cesser les combats et à poursuivre les initiatives de paix et de réconciliation.  « Ce Conseil devrait envoyer un signal fort et clair sur la nécessité de mettre fin à la violence et d’entamer des négociations politiques », a-t-il conclu.

« Si la main tendue de la coalition, ainsi que la forte mobilisation diplomatique au plan régional et international, constituent un réel motif de continuer à croire à une revitalisation des pourparlers de paix, les récentes attaques, au moyen de missiles balistiques et de drones piégés, ayant pris pour cible une station d’essence à Mareb sont, quant à elles, très regrettables », a déclaré M. ABDOU ABARRY (Niger).  Il a appelé les houthistes à mettre fin à leur offensive sur Mareb, à donner suite aux propositions de cessez-le-feu de la Coalition, ainsi qu’aux propositions de l’Envoyé Spécial.  La situation humanitaire continue de se dégrader en atteignant, aujourd’hui, des proportions insoutenables pour les populations, en raison de la pandémie de la COVID-19, le déficit de financement des programmes d’assistance, la poursuite des combats dans le pays, ainsi que l’insécurité alimentaire, s’est-il inquiété.

M. Abarry a jugé cruciale la levée des obstructions liées à l’acheminement de l’aide humanitaire dans le pays, notamment à travers le port d’Hodeïda et l’aéroport de Sanaa.  Enfin, s’agissant de la situation du pétrolier SAFER, le délégué a regretté que les équipes de l’ONU n’aient toujours pas obtenu les garanties de sécurité nécessaires pour l’accès au pétrolier.  Il a appelé les houthistes à faire preuve de responsabilité et à honorer leurs engagements, en délivrant toutes les autorisations ainsi que les garanties nécessaires permettant à l’équipe des Nations-Unies d’accéder au SAFER et d’entamer, en toute sécurité, l’inspection du pétrolier. 

M. SHUANG GENG (Chine) a demandé la cessation des hostilités, y compris les attaques comme celles de ces derniers jours à Mareb.  Selon la Chine, la situation sur le terrain montre clairement qu’aucune partie ne peut vraiment l’emporter.  Il serait donc de bon aloi qu’elles discutent et que la communauté internationale joue de son influence pour les y encourager.  Insistant sur la protection des civils, M. Geng a salué les efforts de l’Envoyé spécial en faveur des pourparlers de paix.  La Chine s’est félicitée à cet égard de la volonté politique affichée par le Gouvernement yéménite et a notamment salué son approbation de l’accès au port d’Hodeïda de navires, dont des pétroliers.  Au sujet du pétrolier SAFER, le représentant a demandé aux houthistes de permettre enfin aux experts onusiens d’inspecter le navire afin d’éviter une catastrophe écologique.  La Chine a terminé en saluant le travail des deux hauts fonctionnaires onusiens ayant fait des exposés à cette séance et qui quittent leur fonction. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a demandé la pleine mise en œuvre des conclusions du groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants dans les conflits armés, notant que les enfants yéménites subissent depuis des années les six violations graves définies par le Conseil.  Elle a condamné les recrutements et utilisations massifs d’enfants par les houthistes à Mareb et a demandé à ces derniers d’y mettre fin.  La représentante a également demandé aux houthistes de donner à l’ONU immédiatement et sans préconditions l’accès au pétrolier SAFER, qui, a-t-elle alerté, représente un risque écologique, économique et humanitaire majeur pour le pays et l’ensemble de la région. 

Nous demandons aux houthistes de choisir la voie de la négociation, a poursuivi Mme Broadhurst, sans quoi ce Conseil devra envisager les mesures qui s’imposent.  Elle les a notamment appelés à poursuivre leurs échanges avec Oman et s’engager dans un dialogue constructif avec l’Envoyé spécial en vue d’un accord sur la conclusion et le respect dans la durée d’un cessez-le-feu à l’échelle du pays. 

Mme Broadhurst a ensuite appelé à tout faire pour alléger les souffrances de la population yéménite, notamment des plus de quatre millions de personnes déplacées, ainsi que pour accélérer la campagne de vaccination contre la COVID-19 et permettre un accès équitable à ce vaccin.  Dans ce contexte, il est plus que jamais indispensable de garantir un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave à l’ensemble des personnes dans le besoin, particulièrement dans les zones contrôlées par les houthistes. 

M. GERT AUVÄÄRT (Estonie) a déploré la poursuite des hostilités, en dépit de tous les efforts régionaux et internationaux en vue de parvenir à un cessez-le-feu.  Il a exhorté les parties à mettre fin aux hostilités, y compris l’attaque des houthistes contre Mareb et les attaques transfrontalières contre l’Arabie saoudite.  Les parties doivent faire montre de volonté en vue de conclure un cessez-le-feu et de parvenir à un processus politique inclusif, a-t-il dit, en réclamant une participation des femmes aux efforts de paix.  Le délégué a exhorté les parties à se conformer à leurs obligations en vertu du droit international.  Il a également appelé le Gouvernement yéménite et les houthistes à permettre au groupe d’experts de se rendre au Yémen.  Enfin, le délégué a réclamé un accès humanitaire sans entrave et souligné la nécessité de parvenir à un accord de long terme s’agissant des importations commerciales depuis Hodeïda.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a souligné que le Gouvernement yéménite réitère son plein soutien à l’initiative actuelle pour mettre fin au conflit et aux efforts déployés par les Nations Unies à travers son Envoyé spécial pour le Yémen, M. Martin Griffiths, ainsi que ceux de l’Administration américaine, de l’Arabie saoudite ou encore d’Oman.  Alors que le Gouvernement yéménite a exprimé son implication positive face aux propositions et à tous ces efforts diplomatiques et politiques, faisant preuve de flexibilité et démontrant sa volonté de parvenir à une paix globale et à une réconciliation nationale qui n’exclut personne, les milices houthistes en revanche sont opposées à ces attitudes positives.   

Pour le représentant, les attaques brutales contre Mareb, visant notamment des civils et leurs biens, reflètent les tendances terroristes et criminelles du comportement et des positions de ces milices, et leur dépendance envers le régime iranien qui, a-t-il affirmé, entend déclencher le chaos et les guerres et provoquer des crises.  Même si le Gouvernement yéménite tient la milice des houthistes entièrement responsable d’avoir entravé les efforts de paix, il continuera à tendre la main pour la paix, car il estime que le grand peuple yéménite mérite de vivre dans la sécurité, la paix et la prospérité. 

M. Al-Saadi a ensuite montré au Conseil de sécurité la photo d’une fillette de 5 ans, victime d’un tir de missiles balistiques lancé par les houthistes contre une station de carburant à Mareb, alors que des dizaines de voitures faisaient la queue pour s’approvisionner en essence.  « Je ne vous montrerai pas la photo de son corps calciné », a-t-il dit.  Il a expliqué que cette attaque fut suivie d’autres à Mareb contre des quartiers, des biens civils et des camps de réfugiés, dans le but de provoquer le plus grand nombre de victimes parmi les civils et contrecarrer tous les efforts et tentatives de mettre fin à cette guerre.  Il a aussi rappelé les attaques contre Hodeïda ou Taëz qui est sous le siège des houthistes depuis six ans déjà. 

Le représentant a affirmé qu’à Hodeïda, ville dont le port reçoit environ 80% de l’aide humanitaire, la situation humanitaire y est pire qu’avant l’Accord de Stockholm, et que les conditions sécuritaires et militaires s’y sont dramatiquement détériorées.  Il a appelé la communauté internationale à poursuivre son soutien généreux pour faire face aux défis humanitaires et économiques au Yémen, en appuyant les plans et programmes gouvernementaux visant à fournir des services de base aux citoyens et mettre en œuvre des projets de développement.  M. Al-Saadi a insisté sur la nécessité d’établir un mécanisme de décaissement des fonds des donateurs par l’intermédiaire de la Banque centrale du Yémen, ce qui contribuera à stabiliser la valeur de la monnaie nationale et à soutenir l’économie nationale. 

Le représentant a en outre affirmé que les houthistes continuent de recruter des milliers d’enfants dans leurs zones de contrôle et de les expulser de force des maisons et des écoles vers des « camps de la mort » sur divers fronts, les nourrissant d’une « culture de haine et de terrorisme ».  Il a appelé la communauté internationale à sortir de son silence et à agir pour mettre fin à cette violation flagrante et sans précédent de toutes les lois et chartes internationales relatives au droit de l’enfance.  Il a également expliqué au Conseil de sécurité que les houthistes utilisent le dossier du pétrolier SAFER comme objet de marchandage et chantage.  Le rôle et la responsabilité du Conseil de sécurité sont importants et nécessaires pour empêcher la catastrophe imminente qui détruirait les écosystèmes de la mer Rouge, frapperait le secteur de la pêche dans la région, polluerait les puits d’eau et affecterait la navigation internationale et l’économie mondiale, a-t-il averti.  Il a donc invité le Conseil à exercer une nouvelle fois une pression maximale sur les houthistes pour éviter cette catastrophe.  Pour terminer, le délégué a invité les houthistes à s’asseoir à la table du dialogue afin de faire avancer les intérêts du peuple yéménite et de mettre fin à ce conflit.

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