L’Assemblée achève sa Réunion de haut niveau sur la lutte contre la traite des personnes et entend des pays s’accuser d’instrumentaliser la migration
Après avoir adopté, hier, une Déclaration politique dans laquelle ils ont « manifesté leur ferme volonté politique d’agir résolument et de concert pour mettre fin au crime odieux » de la traite des personnes, les délégations ont, aujourd’hui, décrit les différentes facettes de ce fléau, y compris comme l’a dit la Pologne, « l’instrumentalisation de la migration » par le Bélarus.
La Réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur l’évaluation du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes a donc pris fin, après que pas moins de 130 délégations ont saisi le micro pour dénoncer un phénomène que le Vice-Ministre italien des affaires étrangères a taxé d’« esclavage des temps modernes ».
Pour M. Benedetto Della Vedova, ce qui se passe à la frontière entre la Pologne et le Bélarus est « le dernier exemple en date de la manière dont les migrants peuvent être utilisés par les États de manière cynique et manipulatrice ». La Pologne, qui s’exprimait également au nom de l’Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie, a appelé la communauté internationale à condamner cette « instrumentalisation de la migration », accusant le Bélarus de recourir à des ruses pour faire miroiter aux migrants l’entrée dans l’Union européenne. Le Bélarus, a dénoncé la Pologne, fait venir les migrants par charters pour ensuite les amasser le long de la frontière, après qu’ils ont payé des sommes importantes. À ce jour, la Pologne a dit avoir recensé environ 17 000 cas de franchissement illégal de sa frontière et a prié le Bélarus de cesser d’utiliser des personnes innocentes à des « fins politiques cyniques ».
Ce dernier a rejeté cette déformation de la réalité et ces attaques. Le Bélarus a préféré s’étendre sur les « faits » confirmant l’utilisation par la Pologne et la Lituanie de canons à eau infestés de produits chimiques et de pesticides contre les migrants, en plein hiver. Nous continuerons, a-t-il promis, d’informer les États Membres sur des violations du droit international à la frontière avec la Pologne et la Lituanie, ainsi que sur nos efforts pour résoudre le problème de manière transparente et ouverte. Inquiète, la Ligue des États arabes a appelé l’Assemblée générale à se saisir de la question.
Toujours sur la question des migrations, la Ministre du bien-être social de la Sierra Leone s’est alarmée du fait que la pandémie de COVID-19 ait encore exacerbé « les facteurs qui poussent nos jeunes à entreprendre le périlleux voyage à la recherche de verts pâturages. Nous sommes tous coupables, a-t-elle dit, en pointant le doigt sur les pays d’origine, de transit et de destination », car même avec des ressources limitées, face à ce virus monstrueux, nous pouvons toujours nous montrer plus innovants et plus créatifs dans nos approches contre la traite des personnes.
Plusieurs pays ont décrit les mesures qu’ils ont prises. Le Mexique, comme beaucoup d’autres États, a promulgué des lois visant à prévenir, punir et éliminer les délits liés à la traite et à garantir une protection et une assistance aux victimes. L’Espagne, en tant que pays de destination, a dit contribuer au Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour les victimes et tissé des liens bilatéraux avec plusieurs pays. La Suède a mis en avant son approche sexospécifique et son statut de premier pays au monde à pénaliser les clients mais pas les prostituées.
Le Royaume-Uni s’est souvenu que sous sa présidence, le G7 s’est engagé à lutter contre le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Nous sommes, s’est-il enorgueilli, le premier pays à exiger des entreprises qu’elles fassent rapport sur leur lutte contre l’esclavage moderne. Même son de cloche du côté de la Nouvelle-Zélande qui a dit veiller à ce que les entreprises et les consommateurs ne contribuent pas par inadvertance à l’exploitation d’autres personnes dans le monde. Israël s’est dit attaché à exploiter la technologie, détournée par les criminels, pour améliorer l’identification des victimes et la collecte des données. En Iraq, par exemple, les Yézidis sont toujours victimes de la traite, tandis qu’en Syrie, depuis 2010, 1 122 cas ont été recensés, ainsi qu’une centaine de cas liées à la prostitution. El Salvador a préconisé l’assouplissement des règles liées au permis de travail.
Dans son message de clôture, le Président de l’Assemblée générale, M. Abdulla Shahid, appelle à la vigilance et à la mobilisation contre la traite des personnes, surtout dans le contexte de la pandémie de COVID-19 qui l’a exacerbée. Il faut, ajoute-t-il, écouter les survivants et veiller à ce que leurs points de vue servent de base aux politiques. Les modérateurs des deux tables rondes organisées hier ont également présenté le résumé de leurs délibérations.
Demain, 24 novembre, à partir de 10 heures, l’Assemblée générale a prévu une séance publique pour examiner le rapport du Conseil économique et social (ECOSOC) et achever son débat sur la réforme du Conseil de sécurité et sur le rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).
RÉUNION DE HAUT NIVEAU DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE SUR L’ÉVALUATION DU PLAN D’ACTION MONDIAL DES NATIONS UNIES POUR LA LUTTE CONTRE LA TRAITE DES PERSONNES ORGANISÉE EN APPLICATION DE LA RÉSOLUTION A/RES/75/283 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU 7 JUIN 2021
Suite et fin du débat
Mme BAINDU DASSAMA-KAMARA, Ministre du bien-être social de la Sierra Leone, s’est alarmée de « l’impact de la pandémie de COVID-19 sur nos économies qui a encore exacerbé les facteurs qui poussent nos jeunes à entreprendre le périlleux voyage à la recherche de pâturages plus verts ». Sans minimiser les efforts collectifs entrepris au niveau mondial, elle a exhorté à faire plus, en gardant à l’esprit qu’aucun pays n’est immunisé contre cette menace mondiale bien ancrée. « Nous sommes tous coupables, que ce soit en tant que pays d’origine, de transit ou de destination », a-t-elle tranché, car même avec des ressources limitées, et face à ce virus monstrueux, nous pouvons toujours être plus innovants et créatifs dans nos approches collectives et nationales. Pour sa part, la Sierra Leone a adopté une approche basée sur la tolérance zéro à l’égard de toutes les formes de traite des êtres humains, par le biais de la prévention, de la poursuite et de la protection des survivants. Détaillant les mesures mises en œuvre dans son pays, Mme Dassama-Kamara a cité un projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains et le trafic de migrants (2021) qui, s’il est adopté, permettra de punir plus sévèrement les auteurs de tels actes et d’améliorer les services de protection des survivants et des témoins. De même, son gouvernement a procédé à la révision du plan d’action national contre la traite des êtres humains (2021-2023) afin de mieux protéger les femmes et les enfants et réfléchit à une législation sur l’emploi des migrants. Pour finir, la Ministre a annoncé la prochaine organisation d’une conférence nationale avec pour objectif de lancer une plateforme pilote de collecte de données sur les victimes de la traite auprès des agences gouvernementales et de ses partenaires, afin d’assurer un système de soutien plus coordonné et centré sur les victimes.
Pour M. JOHN JEFFERY, Vice-Ministre de la justice de l’Afrique du Sud, la traite des personnes est un crime grave et une violation « gravissime » des droits de l’homme qui n’épargne pas son pays lequel est à la fois pays d’origine, de transit et de destination. Il a parlé d’une situation où pendant le confinement imposé par la pandémie de COVID-19, moins de plaintes pour violences sexuelles ont été signalées alors même que l’on sait que les cas ont augmenté. En collaboration avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, a-t-il indiqué, mon pays a mis au point un manuel de formation sur la traite des êtres humains et un système de collecte des données. L’Afrique du Sud reconnaît la nécessité d’une approche axée sur les victimes et les droits de l’homme, a souligné le Vice-Ministre, expliquant que le nombre croissant de cas a permis d’obtenir des informations claires sur le mode opératoire des trafiquants et donc d’affiner la lutte contre eux.
Lorsque les nouvelles estimations mondiales sur l’esclavage moderne seront publiées, la lecture en sera difficile, a prédit dans une déclaration préenregistrée, M. TARIQ AHMAD, Ministre d’État pour l’Asie du Sud et le Commonwealth du Royaume-Uni. Il s’agit, plus que jamais, de réaliser des progrès immédiats et durables pour atteindre l’objectif de développement durable 8.7, qui consiste à éradiquer ce fléau d’ici à 2030, a-t-il insisté.
C’est pourquoi, a-t-il poursuivi, le Royaume-Uni a pris la tête de l’appel à l’action pour mettre fin au travail forcé, à l’esclavage moderne et à la traite des êtres humains. M. Ahmad a notamment rappelé que « sous notre présidence », les dirigeants du G7 se sont engagés à lutter contre le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. À cet égard, le Royaume-Uni a fait preuve de leadership dans ce domaine, étant le premier pays à exiger des entreprises qu’elles fassent rapport sur la lutte contre l’esclavage moderne dans leurs activités et leurs chaînes d’approvisionnement mondiales.
Parmi les autres dispositions importantes, M. Ahmad a cité l’extension de l’obligation de rapport faites aux organismes publics dont le chiffre d’affaires est supérieur à 36 millions de livres sterling, ainsi que l’obligation pour les organisations de publier leurs déclarations sur le registre du gouvernement. Des pénalités financières seront également imposées en cas de non-respect de la loi contre l’esclavage moderne. Le Ministre d’État a aussi annoncé le lancement, au printemps 2022, d’une nouvelle stratégie de lutte contre l’esclavage moderne. Il a ensuite invité à se rassembler aux niveaux régional et international pour faire en sorte que cette génération de victimes soit la dernière.
M. JUAN FRANCISO GALLI, Sous-Secrétaire d’État de l’intérieur du Chili, a déclaré que le Gouvernement de son pays, qui participe au Plan d’action mondial des Nations de lutte contre la traite des personnes, dispose depuis 2008 d’un plan, révisé cette année, qui coordonne plus de 22 institutions pour faire face à ce fléau. Ce plan, a-t-il indiqué, est axé sur la prévention et la protection des personnes parmi les plus vulnérables pour qu’elles ne deviennent pas les victimes des réseaux de trafic et de traite des personnes, et éviter qu’elles subissent une exploitation sexuelle sur le lieu de travail d’entités privées.
Les défis et menaces contemporains, en particulier la lutte contre la traite des personnes, exigent la mobilisation d’un large éventail de ressources de la part de chaque État, a souligné Mme OLGA REVUK, Ministre adjointe de la politique sociale de l’Ukraine pour l’intégration européenne. Malheureusement, a-t-elle déploré, le conflit militaire causé par l’agression russe permanente sur le territoire de l’Ukraine, a été l’un des premiers défis sérieux pour l’Ukraine en matière de lutte contre la traite des êtres humains. Le déplacement massif de personnes des régions occupées et déchirées par la guerre, la recherche d’un nouveau lieu de vie et de travail, la concurrence sur le marché du travail, la recherche et le placement d’enfants dans des établissements d’enseignement ont accru la vulnérabilité des citoyens, a-t-elle indiqué.
Par ailleurs, la Ministre a souligné que la pandémie de COVID-19 est devenue un défi sérieux dans le domaine de la lutte contre la traite dans le monde entier. Citant le problème de la fermeture des frontières ou encore la perte de revenus, elle a constaté que les enfants qui sont contraints de rester à la maison passent davantage de temps sur Internet où ils sont confrontés à des dangers. Indiquant que la politique de l’État vise à protéger l’enfant de l’environnement numérique, Mme Revuk a rappelé que le 1er juin 2020, à l’occasion de la Journée internationale des enfants, le Gouvernement a nommé le Coordonnateur chargé de mettre fin à l’exploitation sexuelle et à la violence contre les enfants sur Internet.
Environ 200 personnes reçoivent chaque année le statut de victime de la traite des êtres humains, a indiqué l’Ukraine, reconnaissant que ce chiffre ne reflète pas la situation réelle, « de nombreuses questions se posant quant à l’identification de ces personnes ». Le statut juridique de la victime est accordé indépendamment du fait que la victime coopère ou non avec les forces de l’ordre, a précisé la Ministre. Enfin, a-t-elle conclu, le programme social national de lutte contre la traite des êtres humains allant jusqu’à 2025 continue d’être élaboré. Il contiendra notamment des mesures visant à assurer la protection du droit des victimes et à leur fournir une assistance complexe.
M. ROBERT STEWART, Vice-Ministre de la sécurité publique du Canada, a souligné l’importance d’une approche coordonnée multifacettes pour lutter contre la traite des personnes. Son pays a lancé une stratégie à cette fin qui réunit tous les efforts fédéraux et met l’accent sur la protection, la prévention, les poursuites et l’autonomisation des survivants de ce fléau. Dans le domaine de la prévention en particulier, le délégué a précisé que le Canada continue de mettre au point des programmes d’information ciblant les populations les plus à risque. Enfin, le Canada travaille avec ses partenaires internationaux, notamment l’ONUDC, Interpol et l’OIM, pour aider à la protection des victimes.
Mme ROSA MONTEIRO, Secrétaire d’État à la citoyenneté et à l’égalité du Portugal, a rappelé que son pays est partie prenante aux campagnes internationales contre la traite des personnes. Le pays prépare d’ailleurs son cinquième plan d’action national à cet effet, et il apporte son soutien aux victimes. L’assistance sanitaire, la disponibilité des services d’interprétation et un conseil juridique sont parmi les facilités accessibles aux victimes. Mme Monteiro a dit que le Gouvernement portugais met l’accent sur les « 4P », à savoir prévention, protection, poursuite des auteurs, et partenariat. Selon elle, il est crucial pour les gouvernements de prendre de court les trafiquants et tous les responsables du fléau.
Pour M. BENEDETTO DELLA VEDOVA, Ministre adjoint des affaires étrangères et de la coopération internationale de l’Italie, ce qui se passe à la frontière entre la Pologne et le Bélarus est « le dernier exemple en date de la manière dont les migrants peuvent être utilisés par les États de manière cynique et manipulatrice », mais cela met aussi en évidence les limites et les faiblesses des outils à notre disposition pour apporter une réponse efficace. Plus de 20 ans se sont écoulés depuis que la Convention des Nations Unies sur la criminalité transnationale organisée a été ouverte à la signature à Palerme, ainsi que deux de ses trois protocoles. Le premier de ces protocoles était celui sur la traite des personnes, qui, au cours des deux dernières décennies, a obtenu une ratification quasi universelle et fourni aux États Membres les cadres juridiques nécessaires pour définir, pénaliser et prévenir ce phénomène épouvantable, a rappelé le Ministre. Si nous en sommes aujourd’hui plus conscients et mieux préparés à y faire face, c’est notamment grâce au Protocole, a-t-il ajouté.
Malgré les efforts internationaux en cours, la traite des personnes reste un fléau qui peut revêtir différentes formes, ce qui la rend plus difficile à détecter, a constaté M. Della Vedova, en évoquant un « esclavage des temps modernes ». Les victimes de la traite à des fins sexuelles continuent de représenter la majorité des victimes, tandis qu’une part croissante le sont à des fins de travail forcé. Reconnaissant que la COVID-19 a exacerbé les conditions qui exposent les individus vulnérables au risque de devenir la proie des trafiquants, le Ministre a noté que les femmes, les filles, mais aussi de plus en plus les garçons, les enfants, les migrants irréguliers et les travailleurs domestiques, sont particulièrement exposés. L’Italie reconnaît les risques supplémentaires de traite et d’exploitation des personnes le long des routes migratoires et s’engage pleinement à les prévenir et à les combattre, a-t-il assuré. À cet égard, l’Italie est fière d’avoir contribué au fil des ans, dans le cadre de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), à organiser une série d’exercices basés sur la simulation pour améliorer les capacités des pays d’origine, de transit et de destination à détecter le phénomène, poursuivre les auteurs et protéger les victimes.
M. AJAY KUMAR MISHRA, Ministre d’État de l’intérieur de l’Inde, a indiqué que la loi sur l’agence nationale d’investigation de 2008 a été amendée en 2019 pour autoriser cette dernière à enquêter sur les cas de traite d’êtres humains. Le Gouvernement a également mis en place différents programmes, axés notamment sur le sauvetage, la réadaptation et le rapatriement des victimes de la traite, et lancé, en association avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), un projet pluriannuel de formation au profit des forces de l’ordre.
Le Ministre d’État a également évoqué le lancement, en mars 2020, d’une plateforme de communication nationale « Cri-MAC » (Crime Multi Agency Centre), qui facilite la diffusion en temps réel d’informations sur les crimes graves, y compris les cas de traite des êtres humains, et permet une coordination efficace entre la police des différents États du pays.
Mme NAELA GABR, Présidente de la Commission de coordination et d’interdiction de la lutte contre la migration irrégulière et le commerce des êtres humains de l’Égypte, a indiqué qu’en 2007, son pays avait jeté les bases du cadre juridique d’interdiction et de pénalisation de la traite des personnes et d’appui aux victimes. Cependant, la pandémie de COVID-19 a provoqué une hausse substantielle des victimes de ce crime, en particulier dans le secteur informel. Face à cette situation, le Président Abdel Fattah Al Sisi a pris une série de décisions, dont celle de consacrer 100 milliards de livres égyptiennes à la lutte contre la propagation du nouveau coronavirus, et celle visant au soutien de l’initiative de 2019 « Une vie dans la dignité » axée sur les personnes vulnérables dans les zones rurales, et celles marginalisées en milieu urbain. De leur côté, les organismes publics ont mis sur pied des programmes pour combattre la délinquance et la cybercriminalité.
Mme Gabr a ensuite décrit les activités de la Commission qu’elle préside, notamment en matière d’assistance aux victimes, d’octroi de refuge et de réinsertion sociale. La Commission a également mené des campagnes d’information et de sensibilisation depuis le début de la pandémie; ainsi que des cycles de formation à l’intention des assistantes sociales, du personnel médical et d’autres métiers, pour reconnaître les situations de personnes à risque, notamment les femmes et les enfants. Une plateforme électronique a en outre été mise en place, et la Commission a signé un mémorandum d’entente avec l’Union des associations et institutions sociales qui regroupe plus de 52 000 ONG, au sujet de la sensibilisation à tous les risques d’exploitation.
Mme SANDY RECINOS CABRERA, Secrétaire exécutive au Secrétariat contre la violence sexuelle, l’exploitation et la traite des êtres humains du Guatemala, a alerté sur l’augmentation du risque de criminalité dans son pays dans le contexte de la pandémie de COVID-19, pointant notamment l’utilisation abusive de l’Internet. De fait, cette crise a montré que, dans les contextes de mobilité humaine à large échelle, le Guatemala, en plus d’être un pays d’origine, de transit et de destination pour les victimes de la traite, est également un pays de retour pour les migrants, un groupe très vulnérable.
Face à cette situation, le Guatemala a mis en œuvre des stratégies et des actions en matière de prévention, de lutte et de répression de ce crime, a poursuivi Mme Recinos Cabrera, citant le lancement du projet « Me conecto sin clavos » qui vise à promouvoir la sécurité et la protection des enfants et des adolescents dans le cyberespace. Elle a également évoqué la participation de son pays à la Campagne Cœur bleu. Le projet des unités mobiles « UNIVET » est une autre initiative novatrice mise en œuvre dans le pays et la région pour la prévention de la violence sexuelle, de l’exploitation et de la traite des personnes. Ces six unités mobiles permettent de sensibiliser la population, dans son contexte et sa langue et dans les lieux où l’incidence est la plus forte, a-t-elle expliqué.
Pour finir, la responsable s’est enorgueillie qu’en matière de poursuite et de sanctions le Guatemala reste « une référence régionale », avec des institutions spécialisées au sein du Ministère public, de la police ainsi que des tribunaux ayant une compétence dans les crimes de traite des personnes.
Mme DINA DOMINITZ, Coordonnatrice nationale de lutte contre la traite au Ministère de la justice d’Israël, s’est enorgueillie des résultats remarquables obtenus en matière de lutte contre la traite des personnes. Si son pays, « pionnier mondial » dans ce domaine, a réussi à éradiquer la forme grave de la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle, c’est grâce à l’élaboration d’une législation et d’outils novateurs et durables. Il s’est agi, a détaillé Mme Dominitz, de prévenir la traite en ciblant la demande qui alimente ces crimes odieux et en poursuivant ceux qui facilitent l’exploitation des victimes ou en tirent profit. Outre des cadres de protection et des soins holistiques centrés sur les victimes de la traite et leurs traumatismes, Israël a mis en place un fonds dédié à l’indemnisation et à l’aide aux victimes. L’intervenante a vanté à ce sujet les partenariats noués avec la société civile et au niveau international. Néanmoins, a-t-elle reconnu, il reste encore des défis à relever, eu égard notamment à l’impact disproportionné que la pandémie de COVID-19 a eu sur les populations vulnérables, exacerbant le risque de l’exploitation des femmes et des enfants. En réponse à cette crise, Israël s’attache à renforcer la coordination, aux niveaux national et international, à donner la priorité à la prévention et à intensifier les actions de protection concernant les populations vulnérables. Le pays s’attache aussi à exploiter la technologie qui est détournée par les auteurs d’infractions, afin de lutter contre la traite, d’accroître l’identification des victimes et d’améliorer la collecte de données.
Mme LUCIENNE MANTON, Ambassadrice pour le trafic des êtres humains et la traite des personnes de l’Australie, a réaffirmé l’engagement de l’Australie à lutter contre la traite des êtres humains, un crime grave entraînant de graves violations des droits humains qui ruinent des vies et affaiblissent les économies et les communautés. Elle a relevé que la pandémie a rendu plus difficile l’accès aux personnes qui ont besoin d’aide. C’est pourquoi, a-t-elle ajouté, le Plan d’action mondial est essentiel car aucun pays n’est à l’abri de ce fléau et aucun pays ne peut s’y attaquer seul. Mme Manton a appelé la communauté internationale à utiliser les meilleures pratiques pour relever ce défi, y compris l’usage des technologies. Pour sa part, l’Australie a l’intention de renforcer les partenariats avec des acteurs régionaux et internationaux. La coopération avec le secteur privé, et surtout les organisations qui donnent la parole aux victimes, est également nécessaire, a-t-elle estimé.
Mme KARI JOHNSTONE (États-Unis) a présenté les faits saillants de la lutte contre la traite aux États-Unis. Elle a tout d’abord souligné que malgré l’impact de la pandémie, des progrès ont été réalisés dans son pays, notamment une augmentation du nombre d’enquêtes sur la traite des personnes et le renforcement des capacités des forces de l’ordre à mener des entretiens médico-légaux à distance. L’an dernier, le Congrès américain a également adopté plusieurs lois relatives à la traite des personnes et aux crimes connexes. Sur le plan international, a poursuivi Mme Johnstone, le Programme pour mettre fin à l’esclavage moderne a permis à ses bénéficiaires de recevoir 125 millions de dollars dans 17 pays du monde pour mettre en œuvre des programmes de lutte contre la traite des personnes.
La représentante a ensuite indiqué que le bureau de surveillance et de lutte contre la traite des personnes a récemment publié un guide de ressources complet pour les responsables gouvernementaux et autres parties prenantes clefs afin d’établir et d’améliorer des mesures de lutte contre la traite en tenant compte des traumatismes dans un environnement marqué par la COVID-19. En outre, les États-Unis publieront bientôt la mise à jour de leur plan d’action national contre la traite des personnes qui tiendra davantage compte de la promotion de l’équité raciale et de genre, des droits des travailleurs, du commerce équitable et du soutien aux communautés mal desservies.
M. JEAN-CLAUDE BRUNET (France) a relevé que la traite des êtres humains est devenue l’une des activités les plus rémunératrices du crime organisé. Il a expliqué que depuis 2013, la France s’est mobilisée contre ce fléau par une approche interministérielle portée par une Mission interministérielle (MIPROF) et qu’un second plan d’action national (2019-2022) intègre tous les aspects de la prévention, ainsi que l’identification des victimes, leur protection, l’éducation, la formation des spécialistes, jusqu’à la répression et la coopération internationale.
M. Brunet a rappelé que son pays a rejoint la Campagne Cœur bleu en 2019 et adopté la stratégie franco-suédoise de lutte contre la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle, à l’occasion de la Journée internationale des droits de la femme, le 8 mars 2019. Preuve de son engagement, la France est candidate au statut de « pays pionnier » au sein de l’Alliance 8.7, partenariat mondial contre le travail des enfants, le travail forcé, la traite des êtres humains et les formes contemporaines de l’esclavage, a-t-il souligné. Elle vient par ailleurs de lancer un plan national sur la protection des enfants contre la prostitution et l’exploitation sexuelle. L’objectif, a-t-il précisé, est l’identification précoce et systématique des victimes, leur protection, l’aide apportée pour leur donner un meilleur avenir et, d’autre part, la fin réelle de l’impunité pour les criminels qui les exploitent et qui doivent être combattus.
M. JOEL ADRIAN MENA SORETT, Chef de l’Office national de lutte contre la criminalité organisée et le financement du terrorisme du Venezuela, a accusé la Colombie d’être incapable de contrôler ses frontières et a assuré que l’État vénézuélien mène un combat permanent contre les mafias criminelles impliquées dans la traite d’êtres humains. Il a alerté que l’imposition illégale de mesures coercitive unilatérales à l’encontre de son pays ne fait que renforcer les réseaux criminels impliqués dans ce trafic, favorisant la discrimination, la xénophobie, l’esclavage, l’exploitation et la violation des droits fondamentaux. Il a appelé à la tenue d’un dialogue respectueux, à la coopération et à la levée de ces mesures afin de mettre fin à ces complots criminels.
Le représentant s’est ensuite inquiété de l’augmentation alarmante, ces dernières années, de la traite des êtres humains, notant que la majorité des victimes sont des femmes et des enfants. La marchandisation de personnes est un crime ignoble contre l’humanité, s’est-il indigné. Face à ce fléau, le Gouvernement du Venezuela a approuvé cette année un plan national de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2021-2025 et la création d’un Conseil national contre la traite des personnes, qui donne un nouvel élan au développement de la politique globale des institutions nationales et les organisations internationales en la matière.
La criminalité organisée est de plus en plus complexe et s’adapte facilement aux nouvelles conditions dans de nombreux pays, a constaté Mme ANNA EKSTEDT, Ambassadrice itinérante pour la lutte contre la traite des personnes de la Suède, reconnaissant que son pays ne fait pas exception à la règle. Les réseaux criminels se sont avérés très dynamiques pendant la pandémie de COVID-19, mais ils le sont aussi dès l’apparition de nouvelles crises à travers le monde car les trafiquant abusent souvent de ces situations pour profiter de la vulnérabilité des personnes. Déplorant l’utilisation des nouvelles technologies par les réseaux criminels, à laquelle les enfants sont exposés, elle a incité à ne pas oublier que la technologie peut aussi être un outil parfait pour les services répressifs afin de prévenir et de combattre la criminalité. Le cadre international et la législation nationale doivent se développer pour offrir les meilleures conditions aux organes chargés de l’application de la loi, a-t-elle ensuite demandé, appelant à accroître la coopération avec les fournisseurs de services Internet. Dans ce domaine, l’ONUDC et le Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes ont un rôle clef à jouer. Par ailleurs, « la traite des êtres humains existe parce que quelqu’un la paie », a asséné l’intervenante, incitant à s’attaquer à la demande. Pour sa part, la Suède applique une approche sexospécifique de la traite et a été le premier pays au monde à pénaliser l’achat -mais pas la vente- des services sexuels. Cela en a fait un marché moins attractif pour les trafiquants et a renforcé la position des victimes, a expliqué Mme Ekstedt, avant d’exhorter les États Membres à mettre pleinement en œuvre le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Le traitement de la demande et la dimension en ligne du phénomène doivent être au cœur des futurs efforts conjoints, en incluant les survivants, a-t-elle conclu.
Notre système de lutte contre la traite des êtres humains a prouvé à de nombreuses reprises sa fonctionnalité, a assuré Mme MADALINA TURZA, Conseillère au Cabinet du Premier Ministre de la Roumanie, ajoutant qu’il s’aligne sur le principe des 4 P -Prévention, Poursuite, Protection, Partenariat-. Mais, a-t-elle nuancé, il reste beaucoup à faire. Durant la pandémie de COVID-19, la traite des personnes a évolué de manière plus insidieuse vers le recrutement et l’exploitation en ligne, rendant les personnes déjà vulnérables, en particulier les enfants, encore plus vulnérables et exposées. C’est la raison pour laquelle la lutte contre la traite des personnes a été directement reliée au Cabinet du Premier Ministre, a indiqué la Conseillère.
La Roumanie, a-t-elle poursuivi, a ainsi investi dans un système sophistiqué de lutte contre la traite et développe une alerte « Amber » pour les enfants disparus. Le pays s’est également doté de procureurs dédiés aux affaires liées à la traite et a formé un personnel pour l’aide aux victimes. De plus, un plan national d’assistance médicale et d’identification proactive des victimes à l’intention des professionnels de la santé est à l’étude. Toutefois, a souligné la Conseillère, la lutte contre la traite ne relève pas uniquement de l’engagement national. Les moyens et les méthodes pour réduire « l’offre » ne seront jamais vraiment efficaces sans une réduction de « la demande », a affirmé Mme Turza. Elle a donc souligné la nécessité d’un effort collectif international.
Dans une vidéo préenregistrée, M. SAMIR GARAYEV, Chef du Secteur des mesures opérationnelles au Département principal de lutte contre la traite des personnes du Ministère des affaires intérieures de l’Azerbaïdjan, a fait savoir qu’une loi contre la traite des personnes est en vigueur et qu’une entité formée de responsables de plusieurs ministères et des forces de l’ordre veille au grain. De même, la prise en charge des victimes s’appuie sur la stratégie des « 3R », à savoir la réhabilitation, la réintégration et le rapatriement. À cet effet, des partenariats bilatéraux et multilatéraux sont mis à contribution, ainsi qu’avec une coalition d’ONG.
M. KIFAH AL-NADDAF, Chef du Département des enquêtes et de la lutte contre la traite des personnes au sein du Ministère de l’intérieur de la République arabe syrienne, a indiqué que son pays avait joué un rôle positif au niveau international dans la lutte contre la traite des personnes, citant son adhésion à la Convention des Nations Unies sur la criminalité transnationale organisée et ses deux Protocoles additionnels ainsi qu’au Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer. La recherche scientifique peut aider les appareils de sécurité, a fait valoir l’intervenant. En Syrie, les statistiques ont ainsi permis aux autorités de mesurer la propagation de ce phénomène qui n’avait pas connu une telle ampleur avant 2011. Il a pointé du doigt la guerre terroriste menée contre le pays et les sanctions économiques « injustes » qu’il subit. Depuis 2010 et jusqu’en octobre 2021, 1 122 cas de traites des êtres humains ont été recensés, ainsi qu’une centaine de cas de trafics de jeunes filles à des fins de prostitution, a-t-il indiqué. Concernant le trafic d’organes, une enquête a été ouverte dans 47 cas. Les chiffres disponibles sur ce crime dans le monde sont encore loin de la réalité, a-t-il noté, relevant notamment l’absence de définition de certains termes spécifiques des infractions relatives à la traite des personnes et le manque de surveillance appropriée dans les zones où sévit l’exploitation. Par ailleurs, il n’existe pas de base de données avec des normes unifiées à l’échelle internationale. Par exemple, l’exploitation des enfants pour mendicité est considérée comme une forme de traite dans certains pays, contrairement à d’autres, a-t-il indiqué.
M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a indiqué que la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (UNTOC), approuvée par le Parlement iranien en 2018, est examinée par le Conseil de discernement pour approbation finale. Après avoir passé en revue la batterie de mesures juridiques mise en place contre la traite des personnes au niveau national, M. Ravanchi a annoncé qu’un nouveau projet de loi est soumis au Parlement pour adoption. Ce projet de loi se concentre sur la définition de la traite en tant que crime notoire, tout en couvrant les circonstances aggravantes telles que la commission du crime contre les mineurs et les femmes, a détaillé le représentant.
Mme RABAB FATIMA (Bangladesh) a indiqué que les mesures adoptées par son pays pour lutter contre la traite des personnes reposent sur la lutte contre les causes profondes; l’appui accordé aux victimes; et la poursuite des trafiquants. Des comités de lutte contre la traite ont également été mis en place au niveau local, et le Gouvernement privilégie une approche axée sur la victime qui est renforcée et complétée par la participation des ONG et d’autres acteurs de la société civile.
La représentante a ensuite estimé que la coopération internationale est nécessaire pour lutter contre les causes profondes de la traite, citant la vulnérabilité climatique, les conflits, ou encore les déplacements. Elle a plus particulièrement donné l’exemple de la situation des Rohingya, « l’une des grandes causes de la traite dans notre région ». Elle a par ailleurs appelé à renforcer la coopération internationale et régionale dans le domaine de la migration de main-d’œuvre, exhortant à lutter contre « les entremetteurs sans scrupules qui exploitent des travailleurs ». Enfin, Mme Fatima a rappelé que la mise en œuvre des engagements mondiaux, notamment le Pacte mondial sur les migrations et le Programme 2030, est cruciale pour éliminer le fléau de la traite. L’ONUDC, l’OIM, le Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes et d’autres entités, y compris les organisations régionales et locales, doivent disposer de ressources suffisantes pour soutenir les efforts déployés au niveau national dans la lutte contre la traite, a-t-elle appuyé.
M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a reconnu qu’en ce qui concerne la traite des personnes, beaucoup reste à faire, en particulier en faveur des femmes et des filles. Le Gouvernement démocratiquement élu du Myanmar, a-t-il affirmé, a déployé tous les efforts possibles, notamment en matière de gouvernance démocratique. Malheureusement, ces « grands » progrès ont été effacés par le coup d’État militaire. Plus de 1 300 personnes ont été assassinées dont des enfants et quelque 234 000 ont fui dans d’autres parties du pays, devenant particulièrement vulnérables à la traite. Le coup d’état militaire est donc un facteur aggravant dont les trafiquants ne peuvent que profiter, a alerté le représentant. Il a appelé la communauté internationale à aider le Myanmar à mettre fin à la junte militaire et à rétablir le Gouvernement démocratique « choisi par le peuple ». La communauté internationale, a-t-il insisté, doit tendre la main à mon peuple.
M. ENKHBOLD VORSHILOV (Mongolie) a détaillé les différentes mesures mises en œuvre par son pays, notamment dans le domaine législatif. Il a par exemple cité le plus récent programme national de lutte contre la traite, en vigueur jusqu’à la fin de cette année, qui vise à fournir des conseils techniques sur la prévention et à coordonner les efforts des agences publiques. Pour éviter que la Mongolie ne devienne un pays de transit, le Gouvernement et le Bureau des Nations Unies de lutte contre le terrorisme ont signé, en octobre dernier, un protocole d’accord destiné à mettre en œuvre le programme phare de l’ONU sur la lutte contre le mouvement des terroristes. Le représentant a, par ailleurs, préconisé d’aborder collectivement les nouvelles menaces émergentes dans le domaine de l’information et de la technologie, dont le développement rapide sert les desseins des groupes criminels transnationaux. C’est pourquoi il a recommandé un meilleur partage d’informations et un soutien au renforcement des capacités nationales.
M. NEVILLE GERTZE (Namibie) a relevé que le creusement des inégalités suite à la COVID-19 a rendu de nombreuses personnes plus vulnérables à la traite, pointant notamment l’augmentation des cas d’exploitation sexuelle en ligne. Il a appelé à ne pas laisser la récession provoquée par la pandémie inverser les progrès réalisés pour combattre la traite. Même si la pandémie met les ressources sous pression, les mesures d’application de la loi et de protection sociale doivent continuer à être vigilantes face aux risques de traite, a-t-il souligné. La traite des personnes est une pandémie en soi, et il faut travailler ensemble pour élaborer des solutions capables de s’attaquer aux causes profondes et aux facteurs de risques. Il a également appelé à ne pas punir les victimes pour les actes qu’elles commettent en raison de la traite.
Le délégué a ensuite indiqué que la Namibie avait adopté, en 2018, une loi sur la lutte contre la traite des personnes, et établi un mécanisme national de coordination des initiatives, ainsi que des procédures opératoires normalisées pour identifier et protéger les victimes de la traite. Par ailleurs, M. Gertze a estimé que c’est en tirant des enseignements de l’expérience des victimes et en transformant leurs suggestions en actions concrètes, qu’il sera possible d’adopter une approche plus efficace dans la lutte contre la traite.
M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a informé l’Assemblée générale que depuis l’adoption du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, l’Ouzbékistan a pris des mesures pour sa mise en œuvre, avec une attention particulière portée à l’identification et à la protection des victimes de la traite et à leur accompagnement dans leur réinsertion sociale. Ainsi, a-t-il décliné, un centre de réinsertion qui fournit assistance et protection aux victimes de la traite a été créé dans la capitale, Tachkent; une Commission nationale de lutte contre la traite des personnes et le recours au travail forcé a été créée pour coordonner les efforts dans le domaine de la lutte contre la traite des personnes et le recours au travail forcé; et un Bureau du Rapporteur national sur la traite des personnes et le travail forcé a été créé. Aussi, a précisé M. Ibragimov, le Gouvernement a mené cinq opérations humanitaires pour rapatrier des ressortissants ouzbeks, principalement des femmes et des enfants, des zones de conflit au Moyen-Orient et en Afghanistan et a créé toutes les conditions pour leur réinsertion dans la société.
M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne), intervenant au nom de l’Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie, a estimé que la prévention et la lutte contre la traite des êtres humains nécessite un partenariat d’ensemble et une approche centrée sur les victimes et le respect des droits humains. Il a également jugé important de tenir compte des problèmes de la discrimination et de la marginalisation.
Le représentant a ensuite attiré l’attention sur la situation alarmante à la frontière entre la Pologne et le Bélarus, appelant la communauté internationale à condamner cette instrumentalisation de la migration. Il a affirmé que les autorités du Bélarus ont eu recours à des ruses pour faire miroiter aux migrants l’entrée dans l’Union européenne, leur accordant des visas d’entrée et les faisant venir par vols charters pour ensuite les amasser le long de la frontière avec la Pologne, la plupart d’entre eux ayant payé des sommes importantes. Il a salué les efforts déployés par l’Union européenne pour travailler avec les pays d’origine de ces migrants et commencer à les rapatrier. À ce jour, la Pologne a recensé environ 17 000 cas de franchissement illégal de sa frontière, a-t-il fait savoir. Il a ensuite appelé les autorités du Bélarus à respecter leurs obligations internationales, à protéger les droits humains, et à cesser d’utiliser des personnes innocentes à des « fins politiques cyniques ».
M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a indiqué que le Gouvernement de son pays a adopté une loi sur la lutte contre la traite de personnes et créé un centre de prévention et de conseil sur ce phénomène. Le Gouvernement a aussi établi et financé le Fonds d’assistance aux victimes de la traite, et participe aux efforts régionaux et internationaux en vue d’aider les victimes. La création de la Commission nationale de lutte contre la traite de personnes vise à coordonner les actions et les initiatives des différents ministères dans ce domaine, a ajouté le représentant qui a en outre annoncé la mise en place du Centre de renforcement de capacités de lutte contre la traite avec l’appui technique de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Conseil de coopération du Golfe. De plus, Bahreïn a pris des mesures pour promouvoir la protection pénale des victimes, créant notamment le poste de procureur spécial sur la question de la traite de personnes, afin de réprimer ce crime et de préserver et protéger les droits des victimes.
M. RÓBERT CHATRNÚCH (Slovaquie) a estimé que l’adoption d’une approche sensible au genre est cruciale pour s’assurer qu’aucune victime ne soit laissée pour compte. Il a également préconisé une approche coordonnée visant à réduire le champ d’action de la traite des êtres humains en tenant compte des nouvelles tendances et évolutions, ce qui inclut le ciblage des auteurs et des victimes potentielles.
Pour atteindre cet objectif, le représentant a appelé à accorder une attention particulière aux « 4P »: prévention, protection, poursuites et partenariat, tout en reconnaissant que « nos efforts seront vains si nous ne nous attaquons pas en même temps aux causes profondes de ce fléau, telles que la discrimination et l’exclusion sociale ». Notant que la traite des êtres humains évolue de manière dynamique, il a également recommandé d’adapter la communication entre les fournisseurs d’aide et les autorités chargées du maintien de l’ordre, tant au niveau national qu’international.
Face à la gravité de ce fléau, M. Chatrnúch a par ailleurs déploré qu’un État instrumentalise actuellement la migration à grande échelle à des fins politiques - une pratique qui s’apparente également à un trafic d’êtres humains. Cela montre le cynisme du « régime Lukashenko » qui met en danger la dignité, la vie et la santé des personnes afin de détourner l’attention des violations des droits humains et de la répression brutale au Bélarus.
M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan) a souligné que c’est la prolifération des conflits et l’insécurité économique aggravée par la pandémie de COVID-19 qui poussent, dans toutes les régions du monde, des migrants à rechercher une nouvelle vie ailleurs. Déplorant les milliers de morts dans les déserts et les mers, le représentant a aussi insisté sur la vulnérabilité des migrants à la traite des personnes et aux réseaux criminels. Il a indiqué que son pays a renforcé ses capacités de répression, établi un Plan d’action 2021-2025 et amélioré le contrôle aux frontières.
Le Plan d’action global, a-t-il estimé, est une nouvelle étape dans la coopération internationale d’autant que les migrations peuvent avoir des conséquences positives et que lorsqu’elles sont mal gérées, elles peuvent conduire à des pertes en vies humaines et à des souffrances. Il a préconisé le développement de nouveaux moyens d’immigration régulière pour contribuer à la lutte contre la traite des êtres humains.
M. MOHAMMED ABDULAZIZ H. ALATEEK (Arabie saoudite) a fait état d’une loi promulguée en 2009 par un décret royal, qui prévoit des sanctions contre les auteurs de la traite des personnes ainsi qu’une prise en charge des victimes durant la phase d’investigation et de poursuites judiciaires, conformément aux dispositions de la charia islamique et des instruments internationaux auxquels l’Arabie saoudite est partie. Le délégué a également évoqué la création par le Conseil des ministres de son pays d’une commission de lutte contre la traite, qui réunit toutes les entités gouvernementales concernées par ce fléau. Soulignant l’importance de la complémentarité et de la coordination en la matière, il a indiqué que la feuille de route des institutions nationales a été élaborée en collaboration avec le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. En conclusion, le représentant a affirmé que cette question est une priorité absolue pour le Royaume, tant au niveau national qu’international, son objectif étant d’éliminer ce crime et de garantir la dignité et la liberté de tous les êtres humains.
M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a craint que les survivants de la traite des personnes ne soient de nouveau victimes de l’exploitation en raison de la crise socioéconomique et sanitaire. Si la pandémie de COVID-19 a touché de plein fouet les plus vulnérables, elle a également eu un impact sur la capacité des autorités à lutter contre les crimes liés à la traite et à travailler avec les ONG pour fournir des services essentiels aux victimes. La Malaisie reconnaît que la traite des personnes ne porte pas seulement atteinte aux droits fondamentaux de l’homme mais aussi à la souveraineté et à la sécurité des États, a dit le représentant en passant en revue les mesures adoptées par son pays. Parmi les mesures phares, M. Aidid a cité le Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes 2021-2025 (NAPTIP 3.0) lancé en mars de cette année. Ce Plan expose la vision, les principes directeurs et les objectifs stratégiques de la Malaisie et reflète ses obligations et responsabilités aux niveaux régional et international. Pour finir, le pays continuera à lutter contre la traite des personnes, tout en veillant à ce que son indépendance, sa souveraineté et son intégrité territoriale ne soient pas compromises.
M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) a mis en relief les efforts de son pays en matière de collecte de données statistiques sur la traite des personnes et de campagnes de sensibilisation de l’opinion publique. Le pays ne pénalise pas les victimes mais leur apporte des services médicaux, psychologiques ou psychiatriques, ainsi que des conseils juridiques, une assistance en matière d’éducation, de réinsertion sur le marché de l’emploi ou de régularisation du statut migratoire pour les étrangers. En outre, le système national de protection des témoins et des membres de leur famille veille à la protection des victimes et offre une indemnisation économique ou des mécanismes de réparation, tandis que des centres spécialisés accueillent les victimes féminines. Le Comité de lutte contre la traite des personnes coordonne les activités au niveau international avec les pays alliés et les agences multilatérales. L’Équateur, a expliqué le représentant, s’est engagé à remédier aux facteurs socioéconomiques, culturels et politiques qui rendent des personnes vulnérables à la traite. Il a cité la pauvreté, la migration irrégulière, la violence sexiste et la discrimination sous toutes ses formes. La traite des personnes constitue un crime contre l’humanité qui réduit la victime à un objet et la prive de la jouissance de ses droits, a-t-il affirmé. Il a appelé à former des alliances concrètes en matière de coopération et à utiliser les nouvelles technologies pour combattre ce fléau.
M. TETSUYA KIMURA (Japon) a mis en garde contre l’impact social et économique de la pandémie de COVID-19 qui pourrait entraîner une augmentation de la traite des personnes. Au Japon, la lutte contre ce fléau est une priorité, a-t-il affirmé, notant que la mise en œuvre du Plan d’action 2014 fait l’objet d’un suivi et donne lieu à la publication d’un rapport annuel sur les mesures prises et la sensibilisation des citoyens.
Le Japon, État partie à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants depuis 2017, se félicite de la mise en place d’un mécanisme d’examen et s’engage de manière proactive dans la première phase de l’examen, a assuré le délégué. Sur le plan international, le Japon organise chaque année, depuis 2013, un dialogue sur les politiques stratégiques avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). De même, son pays a participé à plusieurs projets développés par l’ONUDC et d’autres organisations internationales. C’est dans ce cadre, a conclu M. Kimura, que plus de 300 victimes ont pu retourner chez elles en toute sécurité grâce à une collaboration avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) s’est dit préoccupé par la persistance de la menace de la traite des personnes en Afrique de l’Ouest et par le lien croissant entre ce phénomène et les groupes armés. Il s’est inquiété de l’utilisation de plateformes en ligne pour faciliter divers aspects de la traite, notamment le recrutement, et de multiples formes d’exploitation comme la pédophilie. À cet égard, le délégué a fait valoir que des facteurs de la traite, à commencer par la situation socioéconomique de nombreux pays en développement, ont été exacerbés par la pandémie de COVID-19. Il s’est donc félicité de l’adoption de la Déclaration politique qui contribuera à raviver la solidarité mondiale pour combattre cette menace. Au niveau national, a-t-il précisé, le Gouvernement du Ghana a démontré son engagement en promulguant des législations pour prévenir et réprimer la traite, punir les complices et promouvoir la protection des victimes. Le délégué a ensuite souligné l’importance de l’assistance technique pour les pays en développement, saluant notamment l’aide fournie par l’ONUDC, l’OIM et l’OIT. Au-delà des investissements dans des domaines tels que la gestion des frontières et le partage de renseignements pour aider à la détection précoce, il a estimé qu’un soutien supplémentaire est nécessaire pour s’attaquer aux causes de ce crime odieux, en particulier les déficits de gouvernance et de développement. Il a également plaidé pour une annulation ou une restructuration du remboursement de la dette des pays en développement afin de les aider à se reconstruire de telle sorte que les victimes potentielles de la traite soient moins enclines à tomber dans les pièges des trafiquants. Enfin, il a encouragé un soutien financier accru au Fonds d’affectation spéciale pour les victimes de la traite des personnes ainsi qu’aux arrangements régionaux et sous-régionaux tels que les plans d’action de l’Union africaine et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a demandé de renforcer les efforts internationaux pour mieux lutter contre le fléau de la traite des personnes. Au niveau national, le Gouvernement a créé en 2017 la Commission nationale de lutte contre la traite. La prévention étant selon les Émirats arabes unis la manière la plus efficace de combattre ce fléau, le Gouvernement a lancé une campagne de sensibilisation sur la menace que représente la traite de personnes. Il a mis en place des mesures de protection des victimes, de renforcement des capacités et de partage des expériences avec d’autres pays. Sur le plan régional, dans le cadre d’un programme régional, les États membres visent à assurer leurs capacités opérationnelles en vue de l’identification et de la protection des victimes. Le Gouvernement, a expliqué la représentante, fournit également une prise en charge psychosociale et financière aux victimes. Au niveau international, nous devons être à la hauteur de nos obligations, a exhorté la représentante qui a annoncé que son gouvernement a signé des accords de coopération de protection des victimes de la traite de personnes avec les pays d’origine et de destination des travailleurs étrangers dans le pays. Elle a insisté sur l’importance du dialogue avec ces pays.
M. CRAIG JOHN HAWKE (Nouvelle-Zélande) a condamné toutes les formes de traite des êtres humains et appelé tous les États à assumer leur responsabilité de mettre fin à cette violation de la dignité et des droits humains. Il a indiqué que son pays a mis sur pied un Plan d’action national qui vise à lutter contre le travail forcé, le trafic d’êtres humains et les différentes formes d’esclavage. Organisé autour des trois piliers internationalement reconnus que constituent la prévention, la protection et les poursuites, ce dispositif s’appuie sur un partenariat entre le Gouvernement, les entreprises et la société civile, a précisé le représentant, avant de faire état d’une nouvelle législation destinée à lutter contre l’esclavage dans les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Il s’agit, a-t-il dit, de veiller à ce que les entreprises et les consommateurs néo-zélandais ne contribuent pas par inadvertance à l’exploitation d’autres personnes, y compris des enfants, à travers le monde. Avant de conclure, le délégué a souhaité que, dans le cadre des discussions sur le Plan d’action mondial, une attention particulière soit accordée aux problèmes persistants liés à la traite des femmes et des enfants à des fins d’exploitation sexuelle. Il a assuré que la Nouvelle-Zélande continuera à œuvrer contre ce fléau, notamment par le biais du Processus de Bali et de l’Organisation internationale du Travail (OIT).
M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal), décrivant la traite des personnes comme une atteinte aux fondements moraux de la civilisation humaine, a appelé à répondre aux problèmes comme la pauvreté, le chômage, les inégalités, la discrimination en fonction du genre, l’exclusion et la marginalisation, qui tous contribuent à une plus grande vulnérabilité à la traite des personnes.
Il a indiqué que son pays s’est doté d’une loi sur les transports et la traite de personnes, qui vise à protéger et réinsérer les victimes et qu’un plan d’action national spécifique est en place depuis 2011. Il a ajouté que, conformément au Protocole de Palerme, le code pénal népalais interdit les prises d’otages et les enlèvements à des fins de travail forcé et d’exploitation sexuelle et garantit l’indemnisation des victimes, ainsi que leur soutien économique et psychosocial. En tant que membre pionnier de l’Alliance 8.7, le Népal applique son second plan national pour l’élimination des pires formes de travail des enfants en 2022 et pour l’abolition du travail des enfants en 2025.
M. MOHAMED AL HASSAN (Oman) s’est félicité de ce que la question de la traite de personnes préoccupe de plus en plus du monde. Il a indiqué que son Gouvernement a créé dès 2008 un comité national de lutte contre ce fléau qui a lancé une campagne de sensibilisation aux risques liés à ce phénomène. Des propositions de lois visant à combattre ce crime ont été formulées et le Gouvernement poursuit ses efforts en dépit des restrictions liées à la pandémie de COVID-19, a ajouté le représentant qui a évoqué la création d’un Plan national de lutte contre la traite pour la période 2021-2023. Ce Plan comprend notamment un volet sur la formation des travailleurs et le renforcement de la sensibilisation de la population en coopération avec la société civile et le secteur privé pour préserver les droits de l’homme, a-t-il détaillé. Le délégué a ensuite rappelé qu’Oman a adhéré à de nombreux traités internationaux et régionaux pour prévenir et réprimer la traite, favoriser les droits économiques et culturels, et lutter contre la piraterie maritime.
M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a appelé à améliorer la coopération aux niveaux national et international pour mettre fin à la traite des personnes, « une forme moderne d’esclavage ». Nous devons agir ensemble: pays d’origine, de transit et de destination, agences du maintien de l’ordre, services sociaux, secteur privé et ONG. Le taux des poursuites et des condamnations reste faible, faisant de la traite un crime à faible risque et très rentable, a alerté le représentant. Pour changer cette équation, il a appelé à la responsabilité, s’agissant entre autres de la lutte contre le blanchiment d’argent. Il a attiré l’attention sur les « graves » allégations selon lesquelles un État serait impliqué dans le recrutement et le transfert de migrants à la frontière, abusant de leur position de vulnérabilité et s’en servant pour déstabiliser les voisins. Si elle est prouvée, cette pratique peut constituer un trafic parrainé par l’État en question. Au cours de ces 20 dernières années, a conclu le représentant, en parlant de son pays, 417 victimes ont été identifiées dont une majorité de femmes et de filles. La Croatie, qui a ratifié tous les instruments internationaux pertinents, offre également des formations spécifiques, des refuges gérés par les ONG et une ligne téléphonique gratuite d’urgence.
Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a indiqué qu’après avoir ratifié le Protocole de Palerme, El Salvador a promulgué plusieurs lois pour assurer la protection et la réinsertion des victimes de la traite ainsi que pour engager des poursuites contre les trafiquants. Elle a également cité la création d’un Conseil national chargé de contrôler la politique nationale contre ce crime, précisant que celle-ci se concentre sur la détection des victimes, leur prise en charge et le renforcement des capacités des forces de l’ordre grâce à de nouveaux instruments juridiques.
Des outils interinstitutionnels permettant d’appliquer des directives de protection intégrale des victimes ont également été créées. La représentante a par ailleurs estimé qu’en vertu du Pacte de Marrakech sur les migrations, les États, qu’ils soient pays d’origine, de transit ou de destination, pourraient intensifier leurs efforts de prévention en misant sur une migration ordonnée, en assouplissant les règles sur les permis de travail et en appuyant la réunification des familles de migrants, notant que de telles initiatives rendraient ces personnes moins vulnérables à la traite des êtres humains.
Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a indiqué que le Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes est un outil de travail fondamental pour la mise en œuvre des politiques publiques de son pays. Selon elle, la coopération, la formation et l’échange d’informations et de bonnes pratiques promus par les organes de l’ONU ont permis aux pays d’enrichir leur compréhension du problème et d’établir des outils pour y faire face. En Argentine, la réforme de la loi sur la traite des êtres humains en 2012 a débouché sur la création d’un Conseil national pour la lutte contre la traite et l’exploitation des personnes et pour la protection et l’assistance aux victimes, avec une autonomie fonctionnelle et une portée interjuridictionnelle et interministérielle. En outre, un Plan biennal 2020-2022 de lutte contre ce crime a été élaboré en collaboration avec 44 organisations associées. Il comprend 100 actions réparties en trois axes stratégiques: prévention, assistance et persécution, et transversalité. Le Gouvernement argentin, a précisé la représentante, a secouru plus de 19 000 victimes de trafic sexuel ou de main-d’œuvre depuis 2008.
M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a relevé que les trafiquants prennent pour cible les plus vulnérables, en particulier les femmes et les enfants, et que la COVID-19 a renforcé les vulnérabilités tout en réduisant les ressources et les capacités de réponses. Les phénomènes de migration ajoutés au problème de la répartition des vaccins pourraient accentuer encore davantage ce fléau, a averti le représentant qui a appelé les États Membres à renforcer leurs engagements tout en s’adaptant aux nouveaux défis. Il a suggéré de consolider la coopération internationale pour faire face à ce phénomène transnational et démanteler les réseaux criminels. Il faut également continuer de s’adapter aux nouvelles technologies de l’information et de les utiliser à « notre avantage » pour sensibiliser et détecter les cas de trafic, sachant que 60% de la population mondiale a recours à l’Internet et de plus en plus de trafiquants utilisent cet outil pour recruter des victimes.
Le représentant a aussi plaidé pour le renforcement des partenariats multipartites, en promouvant une plus grande coopération avec la société civile, le milieu universitaire et le secteur privé. Une approche à l’échelle de tout le Gouvernement et de toute la société permettra d’intégrer les stratégies axées sur les victimes, a-t-il estimé.
M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a indiqué que son gouvernement est engagé dans le processus de mise à jour de la loi contre la traite des personnes. Même pendant la pandémie de COVID-19, il a tout mis en œuvre pour démanteler les réseaux de trafic des personnes, traduire les auteurs en justice, identifier les victimes et les orienter vers les services de protection. En coopération avec des organisations de la société civile, les autorités ont aussi assuré le renforcement des capacités de la Direction de la lutte contre la traite des personnes du Ministère de l’intérieur. Elles se sont notamment attelées à améliorer la connaissance des fonctionnaires sur des lois anti-traite. Les efforts déployés pour libérer les personnes enlevées, notamment les Yézidis qui demeurent toujours sous l’emprise des gangs criminels de Daech, se sont également poursuivis.
La traite des personnes est un problème mondial et doit être combattue par l’ONU, a souligné M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie), en se félicitant de la Déclaration politique adoptée hier. Appelant à « une action mondiale renouvelée et revigorée » contre des réseaux criminels qui bâtissent une fortune, le représentant a tranché: l’approche traditionnelle de la lutte contre la criminalité transnationale organisée ne suffit plus. Aujourd’hui, s’est-il expliqué, cette criminalité a gagné en sophistication grâce aux nouvelles technologies qui lui permettent de capturer ses victimes et de dissimuler les fruits de ses activités illicites. C’est un problème qui exige bien plus que les simples témoignages des victimes et de leur famille. La Bolivie, qui a ratifié les instruments pertinents, élabore actuellement un plan de collecte de données sur les frontières les plus sensibles et s’efforce de créer des mécanismes de coopération bilatérale, a encore expliqué le représentant.
Un crime grave, une violation de la dignité, de l’intégrité physique et mentale et des droits de l’homme, un esclavage des temps modernes, c’est en ces termes que Mme CEREN HANDE ÖZGÜR (Turquie) a qualifié la traite des personnes. En Turquie, a-t-elle indiqué, la lutte s’appuie sur la méthode des « 4P »: prévention, protection, poursuite, et partenariat. Un comité de coordination et des commissions régionales ont été mis en place, regroupant tous les acteurs pertinents. À cet égard, a-t-elle souligné, la coopération avec les ONG est particulièrement importante puisque les victimes ont tendance à se tourner vers elles plutôt que vers les institutions publiques. À l’occasion de la Journée internationale contre la traite des personnes le 31 juillet, une campagne intitulée « Sois ma voix » a été lancée, a encore indiqué la représentante, affirmant que des dispositions détaillées sur la lutte contre la traite et la prise en charge des victimes, quelle que soit leur nationalité, sont prévues dans le Code pénal turc, des règlements et des décrets. La représentante a attiré l’attention sur la vulnérabilité particulière des migrants et des réfugiés et dénonçant le traitement inhumain qui leur est réservé, elle a dit: « il est rare qu’un jour se passe sans que l’on ne voie des images de garde-côtes attaquant des navires de réfugiés ». C’est tout simplement « un affront à notre humanité ».
Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) s’est réjouie que la Déclaration politique adoptée à l’occasion de cette réunion souligne la nécessité d’éliminer toutes les formes de discrimination et de violence dont souffrent les victimes de la traite des êtres humains. Elle s’est également félicitée que le texte reconnaisse le Pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière et le pacte mondial sur les réfugiés, qui sont, selon elle, des instruments pertinents en matière de prévention, de lutte et d’éradication du crime de traite des personnes dans des contextes de mobilité humaine. La déléguée a indiqué qu’à titre national, son pays a défini cinq priorités alignées sur le Plan d’action mondial et la Déclaration politique: une réforme du cadre réglementaire en matière de lutte contre la traite; une coordination à tous les niveaux de gouvernement; un renforcement de la prise en charge et de la réinsertion sociale des victimes et survivants; la promotion des droits humains des victimes du point de vue du genre; et la collecte de données à partir de contextes communautaires, municipaux, régionaux et nationaux. Le Mexique a également promulgué des lois visant à prévenir, punir et éliminer les délits liés à la traite et à garantir une protection et une assistance aux victimes, a-t-elle ajouté, faisant également état d’enquêtes financières et économiques destinées à combattre les groupes criminels qui profitent de la traite. Enfin, elle a souligné l’implication de la société civile et du monde universitaire dans les travaux de la Commission interministérielle de lutte contre la traite des personnes, organe collégial qui a pour mandat de coordonner l’action de l’État concernant la traite des personnes.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a noté avec préoccupation que, 11 ans après l’adoption du Plan d’action mondial pour la lutte contre la traite des personnes, les efforts déployés aux niveau national et international n’ont toujours pas permis d’éradiquer ce fléau. Selon les Nations Unies, il se classe au troisième rang des trafics les plus répandus dans le monde, après la drogue et les armes. Saluant néanmoins certains progrès, le délégué a évoqué l’amélioration du taux de ratification des instruments internationaux de lutte contre la traite des personnes et le renforcement significatif des mécanismes nationaux de lutte contre le trafic humain. La Côte d’Ivoire appelle à redoubler d’efforts et à adapter les moyens de lutte contre ce phénomène. Cela exige une meilleure compréhension de cette menace multiforme qui se nourrit, entre autres, de la corruption, des migrations irrégulières et du terrorisme, a dit le délégué. Il a plaidé en faveur de cadres robustes qui se renforcent mutuellement, alliant prévention, protection, poursuites judiciaires et assistance aux victimes. Il faut également lutter contre l’utilisation à des fins criminelles des technologies de l’information et de la communication qui sont devenues les outils privilégiés des trafiquants. Il est tout aussi impérieux de s’attaquer aux causes profondes de ce fléau que sont le terrorisme, les effets des changements climatiques, ainsi que la pauvreté et le chômage amplifiés par les effets de la COVID-19. La Côte d’Ivoire a fait de la lutte contre la traite des personnes l’une de ses priorités, a poursuivi M. Ipo. Le pays a ratifié les conventions internationales en la matière, puis adapté son cadre législatif et initié des actions vigoureuses de sensibilisation. Sur les plans législatif et institutionnel, de nouvelles dispositions ont été prises: création en 2011 d’un comité interministériel de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants; adoption de la loi relative à la traite des personnes de 2016; élaboration d’une stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes, assortie d’un plan d’action quinquennal; création du Comité national de lutte contre la traite des personnes et d’une ligne verte pour dénoncer la traite.
Mme EMAN HUSSAIN, Ministre-Conseillère auprès du Premier Ministre des Maldives, a salué la Déclaration politique adoptée hier et le signal clair qu’elle envoie pour dire que la communauté internationale ne tolèrera pas la traite des personnes et continuera à prendre les mesures nécessaires pour l’éliminer sous toutes ses formes. Malgré les contraintes imposées par la pandémie de COVID-19, la Ministre a assuré que son gouvernement n’a pas relâché ses efforts pour combattre ce fléau. Les Maldives ont développé un plan d’action national de lutte contre la traite dont l’application est supervisée par le Ministère de la défense. Le Comité directeur sur la traite réunit divers agences gouvernementales et ministères afin d’assurer une approche pangouvernementale en la matière. Le Gouvernement a également intensifié son action sur le terrain: un centre d’accueil pour les victimes de la traite a été mis en place et des campagnes de sensibilisation ont été lancées sur les réseaux sociaux. Le rôle des autorités chargées de l’application de la loi a été renforcé, a poursuivi Mme Hussein. Ces différentes initiatives coordonnées ont permis aux Maldives de passer au niveau 2 dans le rapport 2021 sur la traite des personnes du Département d’État américain et d’être retirées de la liste du Ministère des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement du Royaume-Uni en tant que pays prioritaire en matière de droits de l’homme. La Ministre s’est dite satisfaite de ces progrès importants, même si elle a reconnu la nécessité d’intensifier les efforts de lutte contre la traite.
Mme MARÍA BASSOLS DELGADO (Espagne) a déclaré que la crise sociale et économique due à la COVID-19 a aggravé les pertes d’emplois et les difficultés liées à la migration légale, augmentant la vulnérabilité des populations face aux réseaux de trafiquants, qui, s’est-elle inquiétée, ont fait preuve d’une capacité d’innovation constante de leur modèle commercial, entravant ainsi les efforts des gouvernements et des organisations internationales. Ce phénomène transnational complexe exige une approche intégrale et multidisciplinaire, a-t-elle souligné.
Afin de prévenir ce fléau, l’Espagne met l’accent sur l’éducation, l’information et la conscientisation, notamment de l’égalité des genres. La représentante a également indiqué que la politique étrangère féministe de l’Espagne prend en compte le fait que 7 victimes sur 10 sont des femmes. Les poursuites contre les malfaiteurs sont une autre priorité du Gouvernement qui entend renforcer la mise en œuvre du Protocole de Palerme, établir un réseau d’accords bilatéraux spécifiques et appliquer la stratégie de l’Union européenne.
La représentante a aussi mis l’accent sur l’importance des partenariats internationaux, précisant que l’Espagne a tissé des liens bilatéraux avec plusieurs pays affectés par les mêmes circuits de traite. Le Ministère des affaires étrangères a par ailleurs organisé un séminaire international sur la traite des personnes en mars dernier qui a confirmé le souhait de donner priorité à ce sujet sur le plan international.
Mme MARIA DE JESUS DOS REIS FERREIRA (Angola) a, d’entrée de jeu, évoqué la stratégie de son pays pour gérer les cas de traite de personnes. Les représentants du Gouvernement, les organisations de jeunes et de femmes ainsi que d’autres organisations de la société civile ont été formés à la détection des victimes et aux moyens d’alerter les autorités. Chaque année en Angola, plus de 100 victimes issues de milieux défavorisées sont concernées, avec de nombreux cas repérés aux frontières nationales, a-t-elle déploré. Depuis 2014, le Gouvernement a défini des dispositions légales pour lutter contre ces crimes et punir les trafiquants. Et en 2020, l’Angola a rejoint le groupe de pays sous observation pour atteindre les normes en matière de lutte contre ce phénomène ainsi que la Campagne Cœur bleu pour soutenir les victimes.
La représentante a également évoqué le lancement d’une campagne de sensibilisation qui a pour objectif de dénoncer ces actes en tant qu’atteinte aux droits humains et aux libertés fondamentales. L’Angola est cependant confronté à des défis liés à l’utilisation des nouvelles technologies à des fins criminelles. Elle a ensuite appelé au renforcement des capacités d’un grand nombre de pays pour répondre à ce type de criminalité.
M. MARTIN KIMANI (Kenya) a mis en exergue l’importance des approches multilatérales qui doivent être guidées par un consensus renforcé basé sur les mécanismes existants. Mon pays, a-t-il dit, est déterminé à empêcher la traite des personnes, une grave menace à la dignité humaine, aux droits de l’homme, à la paix, à la sécurité et au développement. Le Plan d’action national repose sur une solide coopération internationale pour la prévention, la détection, l’enquête et la neutralisation des actes criminels. Dans ce cadre, l’approche multiinstitutions a été consacrée par la loi sur la lutte contre la traite des personnes. Le représentant a insisté sur la protection des groupes les plus vulnérables, notamment les migrants, les femmes, les filles et les enfants que la pandémie de COVID-19 a rendus particulièrement vulnérables à la traite. Insistant sur une approche centrée sur les victimes et les survivants, il a déclaré que la sensibilisation, les données, le partage d’informations, le renforcement des capacités et l’implication de toutes les institutions pertinentes sont indispensables pour poursuivre, protéger et prévenir la traite des personnes.
M. GEORG CHRISTIAN KLUSSMANN (Allemagne) a souligné que la pandémie de COVID-19 a exacerbé la vulnérabilité des victimes de la traite et a rendu plus difficile leur détection ainsi que les mesures de soutien à leur intention. Il a rappelé que l’Allemagne est membre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, et a indiqué que son pays établit d’autres structures au niveau national pour mieux collecter et analyser les données sur le sujet, ainsi que pour détecter et prévenir la traite des personnes.
Le représentant est ensuite revenu sur la situation à la frontière avec le Bélarus. Le Gouvernement du Bélarus joue avec les espoirs d’une population d’une manière très cynique, a-t-elle accusé, jugeant en outre que l’accès humanitaire demeure insuffisant. Il a estimé que la responsabilité pour les migrants décédés à la frontière repose sur le « régime Loukachenko », saluant par ailleurs les mesures déployées par l’Iraq et le Gouvernement de la Région du Kurdistan dans cette crise.
M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a décrit la traite des personnes comme un problème complexe, dû à diverses causes économiques et sociales et prôné une approche pluridisciplinaire et une meilleure coordination internationale, « car les mesures nationales ne suffisent pas ». Il a prévenu que les politiques migratoires trop restrictives et insensibles aux situations particulières rendent les migrants plus vulnérables à la traite des personnes. Préconisant une meilleure prise en compte des droits de l’homme dans les politiques migratoires, le représentant a affirmé que son pays octroie des visas humanitaires et des permis de séjour aux victimes de la traite. Il a aussi rappelé l’importance de la coopération internationale, illustrée par la bonne collaboration de son pays avec INTERPOL.
Reconnaissant que beaucoup de progrès ont été faits depuis 2010 pour identifier les problèmes sociaux, économiques et culturels rendant les personnes vulnérables à la traite, M. FERIT HOXHA (Albanie) a estimé que tout ceci ne suffit pas. Il est urgent, a-t-il estimé, de renforcer la prévention, les enquêtes, les poursuites et les peines et améliorer les mécanismes d’identification précoce des victimes. Il faut aussi, a-t-il ajouté, examiner en profondeur quels facteurs internes alimentent « l’industrie mondiale de la traite », tout en renforçant la lutte contre les trafiquants de l’ère numérique. La réponse internationale doit s’ancrer dans les droits humains et la situation des victimes qu’il faut écouter et à qui il faut donner les outils nécessaires pour se reconstruire.
Insistant sur l’état de droit, le représentant a dénoncé l’insuffisance des condamnations et l’impunité. Il a, à son tour, prôné le renforcement des partenariats entre les gouvernements, le secteur privé, les universitaires et la société civile, avant d’indiquer que son pays a mis à jour la législation nationale contre la traite des personnes et amélioré la coordination nationale et régionale. Le Plan d’action 2021-2023 continue d’être mis en œuvre tandis qu’une importante réforme judiciaire est en cours. Aucun autre pays, a-t-il aussi affirmé, n’a jamais entrepris une réforme aussi profonde, aussi complète et aussi vaste pour créer un système judiciaire plus efficace, responsable et transparent, au service des citoyens et de la démocratie.
M. JÖRUNDUR VALTÝSSON (Islande) a signalé qu’en Europe, une victime sur quatre de la traite est mineure, déplorant en outre l’insuffisance des progrès accomplis pour combattre ce fléau. Il a invité à se pencher sur les causes profondes du phénomène et à mettre un terme à l’impunité. Détaillant les diverses mesures prises par l’Islande, le représentant a notamment évoqué la révision de la législation actuelle, l’amélioration de la prise en charge des victimes à travers des réponses coordonnées ainsi que l’amendement du code pénal pour renforcer la protection des victimes. Il a également cité une campagne de sensibilisation pour identifier les victimes, tout en soulignant que la traite, en tant que phénomène international, exige une réponse internationale.
Le délégué s’est par ailleurs préoccupé de l’instrumentalisation à grande échelle des migrants à des fins politiques. De telles activités mettent en danger la vie et la santé d’êtres humains et doivent cesser immédiatement, a-t-il martelé.
M. GVARAM KHANDAMISHVILI (Géorgie) a indiqué que, s’appuyant sur le principe des « 4P », les autorités géorgiennes se sont engagées à prendre des mesures efficaces pour renforcer la prévention, la protection, les poursuites et le partenariat, tant au niveau national qu'international. D’importantes mesures de lutte contre la traite ont été prises sous les auspices du Conseil inter-agences de lutte contre la traite, et la Géorgie met actuellement en œuvre son plan d’action de lutte contre la traite des personnes 2021-2022, qui reflète la plupart des recommandations des Nations Unies, de l’OSCE, des États-Unis, du Conseil de l’Europe et des rapporteurs spéciaux. La création récente du Service d’inspection du travail avec une unité spéciale pour le travail forcé est une autre évolution positive. Le Gouvernement de Géorgie fournit également aux victimes des services étatiques, tels que des consultations juridiques, une assistance médicale et psychologique, une indemnisation, un centre de crise et un abri.
Le représentant a ensuite déclaré que l’occupation illégale des régions géorgiennes de Tskhinvali/Ossétie du Sud et d’Abkhazie par la Fédération de Russie demeure le principal obstacle aux efforts déployés par le Gouvernement pour lutter contre la traite sur l’ensemble du territoire géorgien. Il a notamment regretté l’absence de mécanisme pour identifier, enquêter et poursuivre efficacement les cas présumés de traite des personnes dans les régions de Géorgie occupées par la Russie, et a accusé la Puissance occupante d’imposer des restrictions excessives à la population locale, en particulier les personnes d’ethnie géorgienne, et de violer leurs droits fondamentaux.
M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a déclaré que le fléau de la traite est un problème qui dépasse les frontières nationales. Reprenant le chiffre de 25 millions de personnes réduites à l’esclavage ou au travail forcé, il a rappelé qu’il s’agit souvent de migrants, de femmes et d’enfants et a regretté que l’aide apportée aux victimes reste un objectif encore non réalisé.
Pour pouvoir efficacement lutter contre ce fléau, il a jugé nécessaire de mieux comprendre les causes qui conduisent à la traite dans différents contextes. S’indignant que le traite représente une industrie de 150 milliards de dollars, il a appelé à renforcer la lutte à travers des mécanismes régionaux et internationaux. Le représentant a ensuite fait part des politiques mises en place à Sri Lanka pour une plus grande coopération avec l’ONU et d’autres mécanismes régionaux dans le but d’éradiquer la traite des personnes. Il a expliqué que le code pénal sri-lankais définit d’ores et déjà la traite de façon très large, et a insisté sur l’impératif de la reddition de comptes des criminels et trafiquants de personnes.
M. JASSER JIMÉNEZ (Nicaragua) a condamné énergiquement la traite des personnes qui menace la dignité humaine et le développement. Exhortant à la concertation, à la solidarité et au multilatéralisme, il a décrit la traite comme un fléau mondial, produit de l’exclusion et des inégalités inhérentes au système néolibéral, inhumain, injuste et corrompu, qui place les profits au-dessus des droits humains et alimente la discrimination et l’exploitation de l’homme. Il a attiré l’attention sur ces femmes, trompées, séquestrées et maltraitées par des réseaux criminels pour alimenter la demande croissante de l’industrie du sexe et du marché clandestin de l’emploi comme en Amérique du Nord, en Europe et ailleurs. Il s’est enorgueilli de la loi nationale qui sanctionne la traite et protège les victimes et a promu un nouveau « contrat social » pour un monde d’amour, d’inclusion, d’équité et de justice sociale, capable d’éradiquer totalement « ce fléau ».
Mme ZSUZSANNA HORVÁTH (Hongrie) a confirmé que la lutte contre la traite des personnes est une priorité du Gouvernement hongrois, qui s’est engagé à soutenir les victimes et à traduire les malfaiteurs en justice. La représentante a cité la Stratégie nationale contre la traite des personnes, ainsi qu’un nouveau plan d’action pour 2022-2023 qui met l’accent sur les personnes les plus vulnérables, notamment les jeunes femmes vivant dans des institutions publiques. « Les personnes en situation d’extrême pauvreté, et surtout les femmes et filles d’origine rom, sont particulièrement vulnérables à l’exploitation sexuelle, et doivent bénéficier d’informations et de mises en garde », a précisé la représentante.
Mme Horváth a aussi souligné le rôle du Ministère de l’intérieur qui supervise deux organes de consultation incluant des ONG compétentes. De plus, des officiers supérieurs ont été déployés au niveau des centres de police régionaux pour assurer l’efficacité de la prévention et des enquêtes, tandis que le code pénal a été amendé pour durcir les réglementations, traduire les criminels en justice et mieux protéger les enfants. En dépit de la pandémie, une formation des professionnels concernés, juges, enquêteurs, et procureurs s’est poursuivie dans 19 comtés et dans la capitale. Parallèlement, plusieurs projets de grande envergure touchant à la sensibilisation et à l’aide aux victimes ont été cofinancés par le Fonds pour la sécurité intérieure de l’Union européenne.
M. DENNIS FRANCIS (Trinité-et-Tobago) a indiqué que la traite des personnes reste un défi important pour son pays dans la mesure où ses frontières maritimes le mettent en position de vulnérabilité. Les autorités accordent donc de l’importance à la gestion des frontières et à la coopération internationale pour lutter contre ce fléau. La stratégie nationale inclut des campagnes à l’intention du grand public et des activités de sensibilisation, notamment à destination des étudiants et des communautés de migrants. Nous essayons d’organiser un accueil des personnes victimes afin qu’elles n’aient rien à craindre, a-t-il assuré.
Évoquant ensuite le programme national mis en place pour la période 2021-2023, afin de renforcer l’efficacité des poursuites judiciaires et accélérer l’examen des cas devant les tribunaux, le représentant a souligné que son gouvernement a adopté une « approche holistique », étant donné la complexité des modes opératoires. Il a également insisté sur les relations étroites entre l’unité spécialisée en la matière et différentes institutions, dont le Département de l’immigration. Par ailleurs, en tant que petit État insulaire en développement, nous comprenons très bien le besoin de renforcer les capacités et les différents partenariats, a-t-il affirmé, ajoutant que le pays était à la disposition de ses partenaires pour participer à différents projets.
Mme PETRONELLAR NYAGURA (Zimbabwe) a réaffirmé l’engagement de son gouvernement à réviser la loi sur la traite des personnes pour l’aligner sur le Protocole de Palerme. Nous avons, a-t-elle dit, un Comité interministériel de lutte contre la traite des personnes (ATIMC), chargé d’élaborer un plan d’action national (NAPLAC) qui devrait être lancé avant la fin de l’année. En outre, s’est félicitée la représentante, le Zimbabwe est à un stade avancé de la ratification du Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer. Malgré ces efforts, certains défis subsistent, a reconnu la représentante, estimant nécessaire de renforcer les capacités des institutions nationales. Pour l’heure, le Zimbabwe prévoit la création d’une base de données d’ici le premier trimestre de l’année 2022 avec pour objectif la détection et la prévention. Avant la pandémie de COVID-19, le Zimbabwe avait organisé de vastes campagnes de sensibilisation auprès des communautés. Mon pays, a conclu la représentante, a dû s’adapter aux contraintes liées à la pandémie et rechercher d’autres moyens de poursuivre ces campagnes, y compris sur les plateformes en ligne.
Cette solution a, cependant, ses limites en raison de l’accès limité aux technologies de l’information et des communications, en particulier dans les zones rurales.
M. OMAR KADIRI (Maroc) a expliqué que son pays a fait le choix d’une approche de la lutte contre la traite des personnes axée sur la prévention, la protection, et l’assistance aux victimes. Une Commission nationale a été mise sur pied pour mettre en place des mesures de prévention, en s’appuyant sur la loi de 2016. Grâce à cette dernière, le Maroc a redoublé d’efforts pour poursuivre les trafiquants. Le pays a ainsi pu renforcer la gestion intégrée des frontières pour limiter les flux migratoires et détecter les victimes de la traite. Il a aussi pu créer une unité spécialisée qui facilite l’accès des plaignants à la justice. Le Maroc, a ajouté le représentant, travaille à l’intégration de la dimension « lutte contre la traite » dans ses politiques structurelles. Outre les 80 accords de coopération judiciaires bilatéraux qu’il a signés, le Maroc a également signé tous les instruments internationaux pertinents. Il coopère activement avec l’ONUDC, a précisé le représentant, avant de passer en revue une série de projets menés avec l’ONU.
M. BIRUK MEKONNEN DEMISSIE (Éthiopie) a indiqué que son pays accueille près d’un million de réfugiés de plusieurs pays et que cette situation, couplée à la pression démographique et au sous-développement économique, contribue à aggraver le phénomène de la traite des personnes. La traite se produit non seulement sur la route vers les destinations, mais aussi dans les cellules des prisons des pays de destination les plus riches du monde, s’est indigné le représentant qui a par ailleurs relevé que la migration irrégulière contribue à accroître le phénomène de la traite des personnes. Face à cette situation, l’Éthiopie déploie des efforts concertés pour mettre en place des canaux légaux de migration et appuyer une situation de travail propice dans les pays de destination, a-t-il indiqué, citant notamment « un travail louable » accompli avec certains pays du Moyen-Orient. Regrettant l’expulsion massive et le traitement inhumain de migrants dans les pays d’accueil, M. Mekonnen Demissie a appelé les pays de destination des migrants à être conscients du facteur humain et à respecter la dignité des migrants, quel que soit leur statut juridique.
M. DAVIT KNYAZYAN (Arménie) a indiqué que son pays met actuellement en œuvre son sixième programme national de lutte contre la traite des personnes, et a tout particulièrement souligné la vulnérabilité des personnes déplacées dans sa région suite à la guerre. Il a indiqué que le Ministère du travail et des questions sociales a mis en place une Commission pour l’identification des victimes de la traite et de l’exploitation des personnes, qui propose des compensations financières aux victimes. La législation dans ce domaine a également été perfectionnée: un arrêté a été adopté pour les années 2020-2022 afin de réglementer la lutte contre la traite de personnes, et à partir du 1er juin 2022, entreront en vigueur les amendements correspondants du code pénal arménien, qui permettront de rendre ce combat encore plus efficace. Enfin, M. Knyazyan a jugé indispensable de renforcer la coopération dans le cadre de l’ONU ainsi qu’au niveau des autres structures intergouvernementales.
M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) s’est félicité de l’adoption de la Déclaration politique qui, selon lui, devrait contribuer à améliorer les interactions dans la lutte contre le phénomène criminel que constitue la traite des personnes. Il a également salué la création, à l’initiative du Bélarus, d’un Groupe des amis unis pour lutter contre la traite des êtres humains afin d’aider à la mise en œuvre du Plan d’action mondial. Le délégué a d’autre part plaidé pour une coopération internationale qui reconnaisse le lien entre la traite et les déséquilibres persistants dans le développement socioéconomique de chaque pays et région, ainsi que l’augmentation des flux migratoires illégaux et l’intensification des activités criminelles organisées. Il a également souligné la nécessité de s’attaquer aux causes profondes du commerce des personnes, à commencer par l’industrie du sexe, légalisée dans un certain nombre de pays, la demande constante de main-d’œuvre bon marché et privée de ses droits, le faible niveau de vie d’un grand nombre de familles, la féminisation de la pauvreté et le chômage dans les pays d’origine. À cet égard, il a plaidé pour un durcissement des mesures à l’encontre des groupes criminels qui sont les principaux organisateurs de la traite ou agissent comme intermédiaires dans des transactions illégales. À ses yeux, seule une approche intégrée permettra d’obtenir des résultats réels en matière de prévention, d’assistance aux victimes et de justice. Enfin, tout en appuyant le rôle central de l’ONU dans ces efforts, il a souhaité que les projets de pays tiennent compte des intérêts des pays d’origine comme de destination et soient mis en œuvre à la demande exclusive des gouvernements intéressés. Chaque État a le droit de déterminer indépendamment sa politique optimale de lutte contre la traite, a-t-il fait valoir, concluant sur un appel à la volonté politique face à ce problème qui nécessite de rassembler dans l’action les gouvernements, le secteur privé et la société civile.
Mgr Fredrik Hansen, observateur du Saint-Siège, a reconnu que l’évaluation du Plan d’action mondial pour la lutte contre la traite des personnes est compliquée par le manque d’estimations mondiales fiables du nombre des victimes. Bien qu’un nombre croissant d’États aient développé des systèmes de collecte de données au cours des dernières décennies, les données mondiales sont encore limitées, a-t-il déploré, avant d’observer que la pandémie de COVID-19 a rendu cette entreprise encore plus complexe. La crise sanitaire a en effet rendu les victimes plus isolées et moins visibles, tandis que ses conséquences socioéconomiques ont exacerbé la vulnérabilité de ceux qui sont le plus à risque, notamment les millions de femmes et d’hommes qui ont perdu leur emploi et se sont retrouvés sans soutien social. Mgr Hansen a constaté que les enfants, en particulier ceux issus de ménages extrêmement pauvres ou privés d’attention parentale, continuent de représenter environ un tiers des victimes détectées de la traite, en particulier dans les pays les plus pauvres où le phénomène est lié au problème plus large du travail des enfants. Les fermetures d’écoles ont accentué la vulnérabilité de millions d’enfants, a-t-il noté, ajoutant que, plus globalement, les femmes et les filles constituent toujours la grande majorité des victimes. Selon lui, éradiquer des pratiques comme la pornographie et la prostitution qui déshumanisent les femmes et les filles et réduisent leur corps à de simples objets de gratification est une partie cruciale de la lutte contre la traite.
Face à cette situation alarmante, l’observateur s’est félicité des progrès réalisés pour répondre aux défis, et notamment de l’identification de nombre des facteurs sociaux, économiques, culturels et politiques qui rendent les personnes vulnérables à la traite. Il également salué la prise de conscience du statut des victimes, qui ne doivent pas être indûment punies ou poursuivies pour des actes qu’elles pourraient avoir commis en conséquence directe de la traite. De plus, davantage est fait pour les libérer, régulariser leur situation et aider à leur réadaptation, a-t-il applaudi, relevant aussi qu’un nombre croissant de pays ont pénalisé la traite, conformément au Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. Enfin, il s’est réjoui du renforcement de la coopération entre les autorités locales, les gouvernements nationaux et les organisations confessionnelles, très actives dans la lutte contre la traite et les autres formes contemporaines d’esclavage moderne.
M. MAGED ABDELFATTAH ABDELAZIZ, de la Ligue des États arabes, s’est alarmé des chiffres véhiculés par les rapports des diverses instances des Nations Unies, en particulier l’augmentation « frappante » des enfants touchés par le fléau de la traite des personnes. Il a donc appelé au renforcement de la coopération internationale, avec l’implication de la société civile, et à une action coordonnée entre les pays d’origine, de transit et de destination. La Ligue, a indiqué le représentant, a mis en place un système de lutte contre la traite dans ses États membres. Il s’agit d’un système qui adapte les approches de l’ONU au contexte culturel. La Ligue est aussi à l’origine de l’Initiative arabe de renforcement des capacités de lutte contre la traite et contribue au financement du Fonds volontaire des Nations Unies pour les victimes de la traite. Le représentant a fait état d’une excellente coopération entre les pays membres de la Ligue et l’ONUDC. Il a invité l’Assemblée générale et l’ECOSOC à étudier le lien complexe entre les pandémies, les conflits, les migrations et la traite des personnes.
Droits de réponse
Répondant aux propos de la Turquie sur le traitement des migrants dans ses eaux territoriales, la Grèce a réitéré son engagement dans sa lutte contre la traite des personnes et a rejeté catégoriquement toute instrumentalisation de l’immigration. Elle a dénoncé « les pratiques inhumaines » qui poussent des gens à prendre le risque des traversées en mer et en tant que pays situé à la frontière de l’Union européenne, elle a appelé la communauté internationale à renforcer la coopération face au problème des migrants.
Le Bélarus s’est insurgé contre le fait que la Lituanie et la Pologne aient tenté manifestement de déformer les évènements qui se passent sur son territoire. Il a dénoncé une instrumentalisation « cynique » de la part de la Pologne qui veut entraîner l’Union européenne dans cette « aventure », accusant les deux pays d’avoir attaqué les migrants à coup de canons à eau mêlée de pesticides, de gaz, de grenades assourdissantes et autres actes de violence. Se tournant vers l’Union européenne, le Bélarus a dit: nous ne sommes pas un de vos États membres et nous n’attendons aucun commentaire de votre part sur nos affaires intérieures. Il est regrettable, a-t-il conclu, que la Lituanie et la Pologne aient ainsi perturbé un débat important. Nous continuerons, a-t-il promis, à informer la communauté internationale des violations des droits de l’homme à nos frontières.