En cours au Siège de l'ONU

Soixante-quinzième session,
87e séance – matin
AG/12342

L’Assemblée générale adopte deux résolutions renforçant l’efficacité de l’ECOSOC et du forum politique, en dépit de divergences sur certains libellés 

L’Assemblée générale a adopté ce matin deux résolutions, l’une (A/75/L.102) par consensus portant sur la coordination entre le Conseil économique et social (ECOSOC) et le forum politique de haut niveau pour le développement durable, et la seconde (A/75/L.101), relative au renforcement de l’efficacité de l’ECOSOC, qui a été approuvée avec 90 voix pour et 47 abstentions, après l’adoption d’un amendement (A/75/L.104) présenté par le Groupe des 77 et la Chine (G77) par 71 voix contre 51 et 10 abstentions.

Par la seconde résolution, l’Assemblée générale réaffirme l’engagement qu’elle a pris de « renforcer la fonction de délibération » de l’ECOSOC, en mettant l’accent sur « la responsabilité, l’échange de connaissances et l’apprentissage réciproque » pour l’obtention de meilleurs résultats, afin que celui-ci soit mieux à même d’appuyer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 20303 et le suivi intégré et coordonné des grandes conférences et réunions au sommet organisées par les Nations Unies.  Dans ce cadre, l’Assemblée a adopté un texte figurant en annexe de sa résolution, en demandant aux organes subsidiaires de l’ECOSOC et aux autres organes et mécanismes concernés du système des Nations Unies d’appliquer rapidement les dispositions qui y sont énoncées. 

Au sujet du préambule de cette résolution, le G77 a donc demandé et acquis que le troisième alinéa soit remplacé par un texte plus étoffé.  L’Assemblée y rappelle ainsi que « le Programme 2030 est guidé par les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, notamment le plein respect du droit international, se fonde sur la Déclaration universelle des droits de l’homme, les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, la Déclaration du Millénaire et le Document final du Sommet mondial de 2005 et s’inspire d’autres instruments, tels que la Déclaration sur le droit au développement.  

Dans son ancienne mouture, le paragraphe faisait essentiellement référence à « la Déclaration faite à l’occasion de la célébration du soixante-quinzième anniversaire de l’Organisation, selon laquelle nous sommes guidés par la Déclaration universelle des droits de l’homme et les traités et instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme » et ajoutait: « nous veillerons à garantir les droits humains et les libertés fondamentales de chacune et chacun ».

De même, le G77 a fait remplacer le paragraphe 19 de l’annexe par le texte suivant: « au cours du débat consacré aux questions de coordination, le Conseil économique et social “pourra tenir” également des discussions sur des questions relatives à la coordination inscrites à l’ordre du jour qui jusqu’ici ont été examinées dans le cadre du débat consacré à la gestion ».  La phrase remplacée, plus directive, se lisait comme suit: « Au cours du débat consacré aux questions de coordination, le Conseil économique et social “tiendra” également une discussion sur “les points ci-après” de l’ordre du jour relatifs à la coordination qui ont été jusqu’à présent examinés dans le cadre du débat consacré à la gestion: prise en compte de la problématique femmes-hommes dans l’ensemble des politiques et programmes du système des Nations Unies; application des résolutions 50/227, 52/12 B, 57/270 B, 60/265, 61/16, 67/290, 68/1 et 72/305 de l’Assemblée générale sur le renforcement du Conseil économique et social ».

Le même amendement a légèrement modifié le paragraphe 25 de l’annexe, qui porte sur « la réunion d’une journée sur le passage de la phase des secours aux activités de développement ».  Le texte actuel prévoit que cette réunion « pourrait également être l’occasion d’examiner, entre autres questions, celles de la promotion de sociétés pacifiques et inclusives aux fins du développement durable et de l’accès de toutes et tous à la justice, dans le respect des mandats du Conseil économique et social et d’autres organes intergouvernementaux ».

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, la Guinée a justifié ces amendements en faisant valoir que ces ajouts visent à renforcer le travail de l’ECOSOC, tout en respectant son mandat et ceux d’autres organes intergouvernementaux.   Avant le vote, le Sénégal qui parlait également au nom de l’Autriche, avec qui il a assuré la facilitation des négociations, a dit que le projet de résolution présenté leur semblait pourtant équilibré, avant de saluer le fait que la procédure de silence n’avait pas été rompue. 

Pour sa part, le Portugal, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et des États-Unis, s’est dit « sidéré » de voir pas un, mais trois amendements, alors même que le silence n’a pas été rompu, ce qui laissait croire que les délégations avaient agréé cette troisième mouture d’un texte déjà négocié.  La délégation a indiqué son opposition à ces amendements qui sapent la confiance placée dans le travail des facilitateurs, d’autant plus que des propositions d’amendements avaient été discutées au cours des négociations et avaient donné lieu à des compromis.  L’Australie, qui parlait aussi au nom du Canada, et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), a également marqué son opposition aux amendements dont l’un, de son avis, empiète sur la volonté des États de soutenir les droits de l’homme.  Même son de cloche pour la République de Corée que s’est dite déçue de ces amendements arrivés après la fin de la procédure d’accord tacite, ce qui rompt avec la pratique et pourrait constituer un précédent.

Après le vote, l’Union européenne s’est de nouveau dite « très déçue » des amendements.  C’est d’ailleurs pour cela qu’elle s’est « abstenue » de voter sur les amendements mais a voté en faveur de la résolution « avec beaucoup de réserves ».  Tel qu’amendé, ce texte ne représente pas l’ambition initiale des cofacilitateurs et maintient le statu quo et l’obsolescence du segment de haut niveau de l’ECOSOC qui devient un doublon du Forum pour la coopération en matière de développement, a argué la délégation.  Elle a promis « d’examiner avec soin » la façon dont l’ECOSOC et le Secrétariat utilisent ce temps additionnel qui lui sera accordé.  Elle a aussi déploré les tentatives d’affaiblir la participation des partenaires et de parties prenantes au forum politique de haut niveau, notamment les défenseurs des droits humains, la société civile et le milieu universitaire dont les contributions enrichissent pourtant les débats.  

Le Mexique a dit avoir voté en faveur de la résolution et de l’amendement du Groupe des 77 et la Chine, en dépit du fait que leur pertinence est aujourd’hui diminuée parce que « ces textes répondent aux priorités d’un seul groupe ».   En outre, le paragraphe 3 du préambule modifie le terme agréé durant la soixante-quinzième session, a dénoncé la délégation pour qui « ces amendements sont faits au détriment du mandat de l’ECOSOC » qui est de promouvoir les questions économiques, sociales, culturelles, sanitaires « ainsi que les droits humains ».   Elle a, elle aussi, dénoncé l’affaiblissement de la participation de la société civile aux débats de l’ECOSOC.

« C’est avec beaucoup de regrets que nous voyons que le calendrier de l’ECOSOC a été rallongé », a décrié le Royaume-Uni.  À son tour, la délégation a regretté que des obstacles soient édifiés contre une large participation de la société civile à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Elle a tout de même dit espérer que la déclaration ministérielle de 2021 sera forte et ambitieuse.  Même vision pour les États-Unis, qui se sont abstenus sur le vote de la résolution pour protester contre les amendements: ils n’ont pas apprécié que l’on mette à mal le respect des droits humains et que l’on rajoute des jours de travail au calendrier de l’ECOSOC, arguant que cela ne va pas forcément apporter plus d’efficacité.  À ces griefs, les États-Unis ont ajouté que l’expression « droit au développement » n’a pas encore trouvé une définition acceptée par tous.  La Suisse a déploré le manque de consensus, avant de regretter que les aspects liés au genre aient été édulcorés par les amendements.  Justifiant cette modification tout en assurant de son soutien en faveur de l’autonomisation des femmes et de l’égalité des sexes, le Guatemala a rappelé que ces amendements du G77 n’empêchent nullement cette perspective dans les travaux des Nations Unies.  Au nom d’un groupe de pays, le Chili a, de manière générale, plaidé pour la promotion de l’égalité des sexes « dans tous les programmes et les politiques des Nations Unies ».

Le G77 a dit comprendre que malgré les efforts déployés, il avait été difficile de rapprocher les positions.  « Le G77 s’est montré souple et flexible sur de nombreux libellés, mais n’a pas été en mesure de faire preuve de souplesse sur les trois paragraphes ayant été amendés », a expliqué le groupe.  Selon lui, il est important d’avoir une approche générale et holistique, au lieu de mettre l’accent sur un aspect du développement durable.  Et concernant la participation des grands groupes de la société civile, le G77 a reconnu que c’est un atout tout en rappelant qu’elle doit tenir compte des règlements en vigueur au sein de l’ECOSOC. 

L’autre résolution adoptée ce matin par l’Assemblée générale, par consensus, porte sur la coordination entre l’ECOSOC et le forum politique de haut niveau pour le développement durable (A/75/L.102).  Elle les appelle à se coordonner étroitement, « dans le respect des attributions et mandats de chacun », de manière que leurs travaux, qui sont interconnectés et interdépendants, soient « cohérents et se renforcent mutuellement » pour concourir à la mise en œuvre accélérée du Programme 2030 tout au long de la décennie d’action en faveur des objectifs de développement durable d’ici à l’année 2030.  

Dans cette optique, l’Assemblée a adopté un texte figurant en annexe de sa résolution et dans lequel il est souligné que les thèmes retenus pour le reste du cycle en cours du forum politique de haut niveau seront: « Reconstruire en mieux après la pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19), tout en avançant sur la voie d’une mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 », pour 2022; et « Accélérer la reprise au sortir de la pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) et la mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 à tous les niveaux », pour 2023.

Pour le reste du cycle en cours du forum politique de haut niveau organisé sous les auspices de l’ECOSOC, les groupes d’objectifs de développement durable qui seront examinés en profondeur seront: les objectifs 4, 5, 14, 15 et 17 pour 2022; les objectifs 6, 7, 9, 11 et 17 pour 2023.  En 2022 et en 2023, le forum politique devra également promouvoir et examiner l’application de la déclaration politique négociée au niveau intergouvernemental adoptée lors du Sommet de 2019 sur les ODD, ainsi que des déclarations ministérielles négociées au niveau intergouvernemental adoptées par le forum politique organisé sous les auspices de l’ECOSOC, de manière à contribuer à la mise en œuvre du Programme 2030.

Enfin, l’Assemblée générale, par ce texte, décide que les dispositions de sa résolution et de son annexe seront réexaminées à sa soixante-dix-huitième session, afin que les enseignements tirés des cycles précédents du forum politique et d’autres mécanismes de l’Assemblée générale et de l’ECOSOC qui concernent le suivi et l’examen du Programme 2030 soient mis à profit.

POURSUITE DU DÉBAT SUR LA SITUATION DES DÉPLACÉS ET DES RÉFUGIÉS D’ABKHAZIE ET DE LA RÉGION DE TSKHINVALI/OSSÉTIE DU SUD EN GÉORGIE (A/75/891)

Suite et fin du débat

Au nom de l’Australie, du Canada et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), M. MITCHELL FIFIELD (Australie) a déclaré que son groupe est très préoccupé par les changements démographiques forcés en Géorgie et par la situation humanitaire consécutive aux événements de 2008.  Il a milité pour les droits des déplacés et leur retour, conformément au droit international humanitaire.  Préoccupé de ce que le cessez-le-feu négocié par l’Union européenne ne soit toujours pas respecté, le représentant a dénoncé le fait que le processus de délimitation des frontières soit bloqué, tout comme l’accès des défenseurs des droits de l’homme en Abkhazie et en Ossétie du Sud, ce qui a une incidence négative sur la sécurité et la sûreté des déplacés.  Le représentant a conclu en réaffirmant l’attachement de son groupe à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de la Géorgie.

La semaine dernière, nous avons voté pour la résolution, a expliqué, M. ERICK THOMAS (Royaume-Uni), parce qu’il y a 280 000 déplacées en Géorgie.  Il a insisté sur « l’ampleur » des problèmes humanitaires, et a encouragé les parties à redoubler d’efforts pour trouver une solution aux questions en suspens, dont la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu de 2008.  Le représentant a aussi insisté sur l’accès des mécanismes de contrôle internationaux et a, à son tour, soutenu l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Géorgie.  Il a appelé la Fédération de Russie à les respecter ainsi que le droit au retour des déplacés.

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a annoncé que sa délégation travaille étroitement avec les Nations Unies pour la protection et les droits des réfugiés et des déplacés.  Il a d’ailleurs mis l’accent sur le lien entre les changements climatiques et les mouvements de population.  Insistant sur l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Géorgie, le représentant a souligné que la présence russe met en danger les populations concernées.  Il a appelé la Fédération de Russie et « les autorités de facto » à respecter les droits humains, cesser la construction de barrières aux frontières et à accepter le retour digne des déplacés, le cessez-le-feu et l’accès humanitaire. 

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a expliqué que sa délégation s’est abstenue car le texte préjuge des résultats des négociations qui ont cours à Genève sur la question.  Il a réitéré que le Brésil soutient l’intégrité territoriale de la Géorgie et estime que le différend devrait être résolu par le dialogue.  Il a aussi exhorté les parties à créer les conditions politiques favorables à un retour des personnes déplacées, leur demandant aussi de prendre des mesures de renforcement de la confiance dans le cadre du processus de Genève.

M. MICHAEL BARUCH BAROR (Israël) a jugé important que les parties en conflit mettent en avant le dialogue et l’esprit de réconciliation.  Il a rappelé que son pays soutient l’intégrité territoriale de la Géorgie, arguant que la solution doit découler des principes auxquels les parties ont mutuellement convenu.

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