L’Assemblée générale clôt le chapitre de sa session extraordinaire contre la corruption, avec des appels à un recours plus systématique aux technologies modernes pour vaincre ce fléau
L’Assemblée générale a achevé aujourd’hui sa session extraordinaire contre la corruption dont la Déclaration politique*, adoptée au premier jour, le 2 juin dernier, dresse le bilan des 15 années d’application de la Convention des Nations Unies sur un fléau qui coûte 2 à 5% du PNB mondial, charrie 1 000 milliards de dollars par an de pots-de-vin; et facilite 80 milliards de flux financiers illicites.
Contre ce mal qui érode la confiance des citoyens, sape l’état de droit, sème les conflits, déstabilise les efforts de paix, fragilise les droits humains, entrave les efforts pour l’égalité des sexes et frappe les plus vulnérables de plein fouet, selon les propos tenus par le Président de l’Assemblée, M. Volkan Bozkir, au premier jour de la session, les délégations ont dégainé l’arme redoutable des technologies modernes.
Parmi les plus de 100 intervenants, dont des Chefs d’État et de gouvernement, qui ont alerté du frein que constitue la corruption pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, le Secrétaire général d’INTERPOL a en outre constaté aujourd’hui que la pandémie de COVID-19 a offert aux criminels l’occasion de s’attaquer aux fonds publics débloqués pour l’urgence sanitaire et pour les plans de relance économique.
La pandémie et la corruption se sont entrelacées pour sonner le glas du programme mondial de développement social et économique, a confirmé le Directeur exécutif de « Transparency International (TI) Zambie ». Celle de l’ONG argentine « Fundación para la Democracia International » a par exemple rappelé la démission de son Ministre de la santé, en février dernier, après la « vaccination VIP » où des proches du Gouvernement ont pu se faire vacciner des mois avant tous les autres.
Les plus de 1 600 alertes partagées entre les 194 pays membres d’INTERPOL montre que la corruption n’a pas été freinée par le confinement. Bien au contraire, en 2020, les demandes de coopération soumises à INTERPOL pour des affaires de corruption ont augmenté de près de 30% par rapport à 2019, et 2021 confirme cette tendance à la hausse. La corruption transnationale s’adapte à « une vitesse folle » à cette nouvelle situation, a prévenu le Secrétaire général d’INTERPOL.
C’est la raison pour laquelle, la Chambre de commerce internationale, a indiqué sa Vice-Présidente, a publié un guide pour une réponse « intègre et résiliente » à la pandémie qui appelle notamment à la préservation des procédures des marchés publics et à une lutte contre les contrefaçons de médicaments. En tant que garants des fonds publics et principaux acteurs dans l’élaboration des budgets, les parlementaires disposent d’un mandat robuste contre la corruption, a fait valoir le représentant de l’Organisation mondiale des parlementaires contre la corruption (GOPAC).
Aux parlementaires comme aux gouvernements, il a été conseillé un recours plus systématique aux technologies modernes, « une priorité nationale », selon le Directeur de l’Autorité nationale de la transparence de la Grèce. Le premier jour de la session, le Contrôleur général du Brésil a parlé des 55 milliards de dollars d’aide sociale qui ont échappé aux filets de la corruption, grâce aux technologies. De plus, en croisant les bases de données, le pays a été capable de détecter une fraude de 1,8 milliard et d’en bloquer la moitié.
Se voulant championne de la gouvernance en ligne, l’Estonie, par la voix de son Ministre de la justice, se disait convaincue hier des avantages d’une société numérique, surtout dans la prévention de la corruption. Le Secrétaire général d’INTERPOL n’a pas dit autre chose. Il a attiré l’attention sur la mise en place d’un système électronique pour transmettre en toute sécurité les demandes d’entraide judiciaire « en temps réel ». L’initiative « e-MLA » est un concept clef en main, prêt à l’emploi, doté d’un cadre juridique sur mesure déjà reconnu aujourd’hui par 194 pays dans le monde. L’initiative peut aider les États Membres à mettre en œuvre les engagements pris en vertu de la Convention des Nations Unies contre la corruption et de la Déclaration politique du 2 juin.
Dans ce texte de 86 paragraphes étalés sur 21 pages, les chefs d’État et de gouvernement, les ministres et les représentants d’États Membres reconnaissent le rôle que les technologies peuvent jouer à l’appui des mesures de lutte contre la corruption, notamment en ce qui concerne la passation des marchés publics et les déclarations d’avoirs et de conflits d’intérêts qui sont remises par les agents publics aux autorités compétentes. Ils reconnaissent aussi l’importance qu’il y a à renforcer la coopération et la mise en commun des meilleures pratiques en la matière.
Tout en assurant la protection des données personnelles et le respect du droit à la vie privée, ils promettent de promouvoir le recours aux innovations technologiques pour prévenir, détecter et combattre la corruption et pour faciliter l’administration numérique, en s’appuyant sur les systèmes et les programmes d’analyses financières comme le logiciel goAML de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONDCU).
L’Assemblée a prévu une autre séance publique lundi 7 juin à partir de 10 heures pour, entre autres, élire le Président et les Vice-Présidents de sa prochaine session.
SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE SUR LES PROBLÈMES POSÉS PAR LA CORRUPTION ET LES MESURES VISANT À LA PRÉVENIR ET À LA COMBATTRE ET À RENFORCER LA COOPÉRATION INTERNATIONALE - RÉSOLUTION 74/276 ET DÉCISION 74/568 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Déclarations (suite)
Le Ministre des finances des Maldives, M. IBRAHIM AMEER, a indiqué que pour lutter contre le fléau de la corruption, son pays a mis en place une Commission présidentielle afin de récupérer les avoirs de l’État et veiller à ce que toutes les obligations en matière d’enquête sur les abus de pouvoir au sein des institutions publiques soient honorées. En outre, un portail a été ouvert en ligne pour faciliter la soumission anonyme de plaintes et de documents. Les déclarations des avoirs de toutes les personnes nommées ou élues politiquement sont divulguées au public, ainsi que les données fiscales, celle sur la dette nationale et d’autres informations économiques, y compris des rapports hebdomadaires sur les dépenses liées à la lutte contre la pandémie de COVID-19. Toutes ces mesures ont amélioré la transparence et la responsabilité, dans un contexte où la plupart des ressources du pays sont orientées vers la riposte sanitaire et économique liée à la pandémie. Nos efforts et nos réformes ont donné des résultats concrets, s’est réjoui M. Amer, expliquant qu’en 2020, les Maldives sont passés du cent trente-cinquième au soixante-quinzième rang dans le classement « Transparency International ».
M. SERHAD VARLI (Turquie) a estimé qu’il est impossible de remédier au fléau de la corruption sans une robuste coopération internationale. Il a souligné l’importance de la Convention des Nations Unies comme « le reflet de la détermination de la communauté internationale » à éradiquer et à prévenir ce phénomène. Il a apporté son soutien au Mécanisme d’examen et exhorté chaque État partie à mettre en place des politiques rigoureuses, en y associant la société civile. La création d’entités anticorruption et la définition d’un code de conduite pour les agents publics sont essentielles, a martelé le représentant qui a invité la communauté internationale à faire plus pour le recouvrement des avoirs volés. Le délégué a détaillé les efforts de son pays visant au renforcement de sa capacité de lutte contre la corruption, en particulier l’adoption de nouvelles lois portant sur les marchés publics et le blanchiment d’argent. La stratégie turque est menée en partenariat étroit avec la société civile, le monde des affaires et le milieu universitaire, a conclu le délégué.
M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a noté que, lorsque la pandémie de COVID-19 oblige les gouvernements à dépenser des fonds publics à grande échelle, la lutte contre la corruption « peut faire la différence entre la vie et la mort ». Bien que ce phénomène soit à la fois national et transnational, il affecte de manière disproportionnée les pauvres et les plus vulnérables, en augmentant les coûts et en réduisant l’accès aux services publics, a souligné le représentant. Selon lui, la mise en œuvre pleine et effective de la Convention des Nations Unies contre la corruption est essentielle pour parvenir à des sociétés justes, inclusives et prospères, comme l’envisage le Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Le Gouvernement du Népal, a-t-il relevé, a adopté une approche de « tolérance zéro » contre la corruption. Dans ce cadre, il s’est notamment engagé à renforcer la Commission d’enquête sur les abus de pouvoir afin d’assurer l’intégrité, la transparence et la responsabilité. État partie depuis 2011 à la Convention des Nations Unies, le pays s’efforce également de la mettre en œuvre à travers une stratégie nationale et un plan d’action. Tout en consolidant les capacités de ses institutions anticorruption, il s’emploie à promouvoir une société informée avec un accès libre à l’information, « ce qui est une forte dissuasion contre la corruption », a souligné le délégué. Au cours des dernières années, le Népal a enregistré des progrès significatifs en matière de développement humain, d’état de droit et de contrôle de la corruption, s’est-il enorgueilli, assurant que son pays reste déterminé à tirer parti de ces avancées et à « matérialiser les rêves de paix, de stabilité, de prospérité et de bonheur du peuple népalais ».
M. ANOUPARB VONGNORKEO (République démocratique populaire lao) a dit que son pays a élaboré des stratégies pour prévenir et combattre la corruption en révisant les lois sur l’inspection de l’État, la lutte contre la corruption, le traitement des requêtes, le Code pénal, le Code civil et la déclaration du patrimoine. Nous avons concentré nos efforts de plusieurs manières, notamment en multipliant les campagnes de sensibilisation, en développant des programmes d’enseignement, de la maternelle à l’université, et en dégraissant la bureaucratie, a expliqué le représentant. Ce faisant, le Gouvernement a misé sur le recours aux technologies pour limiter les risques de corruption dans l’administration publique. Le représentant a cité les progrès en matière d’enquêtes et de poursuites qui se sont traduits par des condamnations et la récupération d’avoirs spoliés. Il a également parlé de l’échange de meilleures pratiques avec d’autres pays, organisations régionales et internationales, en particulier l’ONUDC. En tant qu’État membre du Réseau de l’Association des États de l’Asie du Sud-Est contre la corruption (ASEAN-PAC), nous sommes activement engagés dans des contacts bilatéraux et trilatéraux avec cinq pays voisins, avec lesquels a été signé d'un protocole d'accord, a encore indiqué le représentant.
M. MILENKO ESTEBAN SKOKNIC TAPIA (Chili) a affirmé que son pays travaille activement pour promouvoir la mise en œuvre des principaux instruments internationaux consacrés à la lutte contre la corruption. En ce qui concerne la Convention contre la corruption, le Chili est l’un des États hispanophones ayant évalué la mise en œuvre des chapitres II et V. De même, le Chili est actuellement évalué par la Jamaïque et l’Ouzbékistan, dans le cadre d’un processus d’examen qui, bien qu’ayant été retardé par la crise sanitaire mondiale, devrait être conclu cette année.
Le Chili a mis en place un système anticorruption qui lui a permis de réduire au minimum, détecter et punir la corruption lorsqu’elle se produit, ainsi que de lutter efficacement contre tous les types d’abus et protéger la dignité des citoyens. Cela se reflète dans les indicateurs internationaux de transparence qui placent le Chili parmi les meilleurs pays de sa région, s’est félicité M. Skoknic. Conscient du fait qu’il reste encore beaucoup à faire, le pays entend mener la lutte contre la corruption de manière transversale. Au sujet de la Déclaration politique, le Chili a estimé qu’elle contient des éléments que le pays considère comme fondamentaux dans les efforts de la communauté internationale pour lutter contre la corruption, notamment l’importance et l’indépendance des institutions supérieures de contrôle, le rôle de la société civile et l’importance de l’intégration d’une perspective sexospécifique. Dans une période comme celle-ci, la corruption coûte non seulement des ressources publiques, mais aussi des vies, a également déploré le Chili.
M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a estimé que les effets de la corruption sont plus graves dans les pays en développement, où comme la COVID-19, elle ébranle la notion même de PIB. Même le citoyen ordinaire peut devenir corrupteur pour obtenir des faveurs. La société civile non plus n’est pas épargnée, a affirmé le représentant, qui a voulu qu’en matière de lutte, l’on aille plus loin que les beaux discours. La coopération internationale, a-t-il martelé, est la seule manière d’éradiquer ce fléau. Les objectifs de développement durable nous donnent « un plan d’action » que les gouvernements doivent mettre en œuvre, avec tous les segments de la société. Qualifiant la Convention des Nations Unies de « base commune pour 187 États », le représentant a insisté sur l’assistance technique au renforcement des capacités. Il a donc plaidé pour un financement stable de l’ONUDC, avant de détailler les efforts déployés par son pays dont la création de la Commission nationale de lutte contre la corruption.
Pour M. WISNIQUE PANIER (Haïti), la Convention des Nations Unies constitue un cadre global de lutte contre « le phénomène omniprésent » qu’est devenue la corruption. Il a insisté sur l’importance de la restitution des avoirs volés pour les pays en développement, avant d’indiquer qu’en Haïti, « la corruption fait partie du patrimoine colonial » que les planteurs dominicains ont laissé en héritage. C’est donc un problème ancien qui explique que dès 1834, le pays s’est doté de lois. Aujourd’hui, un ensemble d’institutions s’efforcent d’éradiquer ce fléau dont l’Unité centrale de renseignements financiers et l’Unité de lutte contre la corruption. Depuis son accession au pouvoir, le Président Jovenel Moïse s’attaque à ce phénomène par la répression, le contrôle et une stricte surveillance des dépenses publiques.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a lié la corruption à de graves crimes transnationaux comme le financement du terrorisme, le blanchiment d’argent, le trafic d’armes ou de drogues. Il est urgent de faire plus d’efforts pour combler les lacunes dans la lutte contre ce fléau. Le représentant a souligné l’importance de la Déclaration politique, laquelle doit s’accompagner d’une meilleure coopération internationale et d’un meilleur échange de pratiques exemplaires. Pour sa part, a poursuivi le représentant, le Koweït a promulgué de nombreuses lois pour garantir l’état de droit, lutter contre les crimes et atteindre des niveaux élevés de justice. C’est dans ce cadre que le pays a lancé, en janvier 2019, sa stratégie nationale globale pour renforcer l’intégrité et lutter contre la corruption qu’elle met en œuvre avec la contribution du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’ONUDC. Le Koweït encourage également la contribution des organisations régionales et des institutions et organisations de la société civile, et prône la sensibilisation du public aux dangers de ce fléau, « contraire à toutes les valeurs morales ».
M. MUSA A. R. ALSHARRA (Libye) a jugé impératif que la communauté internationale travaille de manière constructive à l’éradication du phénomène de la corruption. Mon pays, a-t-il rappelé, a ratifié en 2005 la Convention des Nations Unies, laquelle est devenue une partie intégrante de ses engagements comme en atteste ses lois dont celle sur le blanchiment d’argent. La mise en œuvre des textes anticorruption a été confiée à des organes de contrôle spécialisés tels que l’Autorité nationale de prévention et de lutte contre la corruption, l’Autorité de contrôle administratif et la Cellule d’information financière. En dépit de ces efforts, le conflit et l’instabilité, que connaît la Libye depuis plusieurs années, a créé un environnement propice à l’exacerbation de la corruption. Des fonds appartenant au peuple libyen ont ainsi été volés et transférés à l’étranger, sans parler des pertes subies du fait de l’implantation de « certains pays qui tirent profit de la situation politique exceptionnelle ».
La question du vol et du transfert illégal à l’étranger d’avoirs libyens est devenue une des priorités des autorités libyennes, a souligné le représentant, faisant état de la création d’agences gouvernementales chargées du suivi et du recouvrement de ces fonds, la dernière en date étant le Bureau de récupération et de gestion des fonds publics illégalement transférés. Ces efforts, aussi grands soient-ils, nécessitent la coopération internationale et notamment une « interaction positive » des pays vers lesquels ces fonds ont été transférés. Le délégué a donc invité ces pays à restituer à la Libye cet « argent de contrebande » afin qu’elle puisse l’investir dans des programmes de développement et de reconstruction. Il a salué l’initiative lancée par l’Union européenne en septembre dernier, en coopération avec l’ONUDC et l’Institut régional des Nations Unies pour la recherche sur le crime et la justice, pour renforcer les capacités de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent.
Mme ELISENDA VIVES BALMAÑA (Andorre) a indiqué que dans son pays, la prévention de la corruption a conduit le Gouvernement à se doter d’une structure normative et institutionnelle permettant des actions aux niveaux national et international. Andorre est membre du Conseil de l’Europe et fait partie du Groupe d’États contre la corruption (GRECO), dont les textes ont inspiré les instruments nationaux. La coopération et le multilatéralisme sont des espaces indispensables à la lutte contre la corruption et l’impunité, ainsi qu’à la consolidation des progrès pour des sociétés plus justes, a déclaré la déléguée. Elle a attiré l’attention sur la politique de tolérance zéro que pratique son pays afin de veiller à la pleine application du Programme 2030 dans les délais impartis.
Parce que la corruption touche tous les pays, M. ALI CHERIF (Tunisie) a dit que la lutte nécessite une réponse collective et solidaire par le biais de la coopération internationale. Il s’agit, a-t-il souligné, d’un défi transversal dans le sens où ce fléau touche tous les secteurs d’activité d’une manière grave et qu’il menace le développement durable. La corruption favorise la floraison des marchés parallèles et la criminalité organisée, s’est inquiété le représentant. Il a plaidé pour l’annulation urgente de la dette des pays pauvres afin qu’ils puissent mieux se consacrer au Programme 2030, « car la corruption ne peut être combattue par des économies fragilisées ». Le représentant a insisté sur les campagnes de promotion de la transparence, de l’intégrité et de la culture de responsabilité. Il a expliqué les efforts de coordination de l’ensemble des institutions gouvernementales de son pays pour veiller à ce que l’application des lois nationales soit en phase avec les normes internationales. Il a mentionné la création récente d’une Instance nationale de lutte contre la corruption, dont l’objectif est de mettre en œuvre une politique d’orientation générale visant notamment à identifier les foyers de corruption dans les secteurs public et privé. Il a aussi mentionné la création d’un Centre d’études, de formation et d’information sur la lutte contre la corruption, dont un des buts est de collecter des statistiques.
Au moment où la communauté internationale lutte pour se relever des conséquences désastreuses de la pandémie, la corruption continue de coûter aux États, en particulier ceux en développement, des ressources nationales qui autrement auraient pu être utilisées pour promouvoir le développement et améliorer le bien-être des populations, a regretté M. ABDOU NDOYE (Sénégal). Il a mentionné les constatations du PNUD selon lesquelles, dans les pays en développement, le montant des fonds soustraits de leur destination par la corruption est 10 fois plus élevé que celui de l’aide publique au développement (APD). En outre, la corruption décourage les investissements privés, réduit les ressources disponibles pour les dépenses d’infrastructures, alimente les tensions politiques et sociales, conduit les pays affectés à la dérive et à l’instabilité et fausse les règles du jeu démocratique et de l’économie de marché.
La prévention et la lutte exigent une approche globale qui appelle à la coopération internationale, a poursuivi le représentant, estimant que la Convention des Nations Unies constitue, à cet égard, un outil incontournable qui contient des normes « novatrices ». Au niveau régional, la Convention de l’Union africaine encourage les États parties à créer les conditions nécessaires pour promouvoir la transparence et la reddition de comptes dans la gestion des affaires publiques. Celles-ci sont d’autant plus importantes pour les pays de la région du Sahel, où la corruption entretient des liens avec d’autres facteurs tels que le trafic d’êtres humains, le trafic de drogue, le trafic de médicaments, le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et l’exploitation illégale de ressources naturelles, a expliqué le représentant.
Au Sénégal, a-t-il affirmé, la lutte contre la corruption est l’une des composantes transversales de la gouvernance publique. Elle occupe une place importante au niveau de l’axe « Gouvernance, Institutions, Paix et Sécurité » du Plan Sénégal Emergent (PSE) qui constitue le cadre de référence de la politique économique et sociale du Gouvernement à l’horizon 2035. Cet engagement a été traduit, de façon concrète, par la ratification et la transposition des instruments internationaux dans le droit positif sénégalais d’une part, et par le renforcement du dispositif institutionnel de lutte contre la fraude et la corruption, d’autre part. Ainsi, en plus des corps et organes de contrôle interne de l’État, une structure dédiée nommée Office national de Lutte contre la Fraude et la Corruption (OFNAC) a été mise en place et une Autorité de régulation des marchés publics a également été créée.
Au niveau de la sous-région, a conclu le représentant, le Sénégal abrite le siège du Réseau des Institutions Nationales de Lutte contre la Corruption en Afrique de l’Ouest qui vise à harmoniser les dispositions juridiques, réglementaires et administratives; à échanger expériences et outils standardisés et techniques, et approches; et à faciliter l’application de la Convention des Nations Unies.
Après avoir salué l’adoption de la Déclaration politique, l’archevêque PAUL RICHARD GALLAGHER, Secrétaire pour les relations avec les États de la Secrétairerie d’État du Saint-Siège, a souligné que la corruption n’est limitée ni par la politique ni par la géographie, et qu’elle existe dans les pays riches comme dans les pays pauvres. En trahissant « les principes moraux et les normes de justice sociale », elle entrave la réalisation du développement intégral et l’éradication de la pauvreté, a-t-il dénoncé. En sapant la confiance dans les institutions publiques et entre les gouvernements et les gouvernés, la corruption compromet le bon fonctionnement de toute société bien organisée, a renchéri l’archevêque. Si nous voulons « assurer l’accès à la justice pour tous et mettre en place des institutions efficaces, responsables et inclusives à tous les niveaux », comme nous nous sommes engagés à le faire dans l’objectif de développement durable 16, la corruption doit être combattue et éradiquée, a-t-il tranché. En raison de sa nature omniprésente et de ses multiples conséquences, la prévention de la corruption nécessite plus que des mécanismes juridiques, selon le prélat qui a recommandé de promouvoir une « culture d’intégrité » plus large. Les fonctionnaires, en particulier, doivent opter pour la justice, une gestion financière saine, la bonne gouvernance et la responsabilité sociale. Il est également crucial d’inscrire la valeur de justice dans la société humaine et de fortifier le bien commun par le respect de l’état de droit. En fait, l’état de droit et la prévention du crime doivent aller de pair, a résumé l’archevêque. Comme l’a noté le pape François, « la vraie justice n’est pas satisfaite en punissant simplement les criminels; il est essentiel d’aller plus loin et de tout mettre en œuvre pour réformer, améliorer et éduquer la personne ». »
Revenant à la déclaration politique, l’archevêque a soutenu l’idée qu’il faut renforcer davantage la coopération internationale pour lutter contre les flux financiers illicites, qui sont à la fois un catalyseur et une conséquence des activités criminelles, et élargir les mécanismes internationaux existants pour le recouvrement d’avoirs et les poursuites pénales en cas de corruption. Rappelant que le Saint-Siège a adhéré à la Convention des Nations Unies contre la corruption en 2016, le représentant a expliqué que le pape François a récemment adopté diverses dispositions juridiques et des mesures administratives visant à favoriser la transparence et le contrôle dans les procédures d’attribution des contrats de marchés publics et pour lutter contre les potentiels conflits d’intérêts au Saint Siège et dans la Cité du Vatican.
Mme JAN BEAGLE, Directrice générale de l’Organisation internationale de droit du développement, a indiqué que son organisation, la seule exclusivement consacrée à la promotion de la paix et du développement durable par l’état de droit, approuve l’appel de l’Assemblée générale à remédier au défi de la corruption, que la pandémie est venue aggraver. « Le monde traverse une crise de confiance dans les institutions publiques à une époque où celles-ci n’ont jamais été aussi nécessaires. » Elle a expliqué que l’organisation œuvre au renforcement de la transparence des institutions judiciaires dans des pays tels que l’Arménie, les Bahamas, le Kenya, la Somalie ou bien encore l’Ukraine. Elle a estimé que la pandémie offre l’occasion de bâtir des institutions transparentes et ouvertes au service des peuples. Rappelant l’importance du système judiciaire dans la lutte contre la corruption, elle s’est félicitée que la Déclaration politique réaffirme l’importance de préserver son indépendance. Enfin, elle a appelé à travailler ensemble en vue de mettre en œuvre les principes contenus dans ladite Déclaration. « L’état de droit est crucial pour remédier aux causes profondes de ce manque de confiance. »
M. DUARTE PACHECO, Président de l’Union interparlementaire (UIP), a apprécié la portée de la Déclaration sur les questions de gouvernance sous-jacentes, telles que la nécessité d’assurer des élections libres et équitables, ou de sauvegarder l’indépendance de la justice. Il a aussi salué l’engagement pris dans la Déclaration de soutenir le dialogue et la coopération interparlementaires, notamment par l’intermédiaire de l’UIP, pour faciliter l’échange de bonnes pratiques relatives à la législation, au contrôle et à l’intégration des bonnes pratiques dans le droit interne. La Déclaration aurait cependant pu être renforcée sur le rôle des femmes à la fois en tant que victimes de la corruption et en tant qu’acteurs clefs dans la lutte contre la corruption.
Au-delà des nombreuses recommandations concrètes pour prévenir et combattre la corruption, le Président de l’UIP a estimé que ce qui est nécessaire dans la plupart des pays, y compris dans les démocraties avancées, c’est une poussée plus profonde pour un changement culturel contre la corruption, ainsi qu’une volonté politique plus forte. « Dans trop d’endroits, la corruption est encore considérée comme une réalité inévitable alors qu’il s’agit en fait d’une violation des droits, d’une atteinte à la confiance du public et d’un gaspillage de l’argent des contribuables qui doivent être dénoncés, signalés et poursuivis vigoureusement », a souligné M. Pacheco. Ce dernier a en outre insisté, qu’en tant que faiseurs d’opinion et représentants du peuple, les parlementaires doivent être des modèles d’honnêteté, de transparence et de responsabilité. Il a appuyé sans réserve la recommandation de la Déclaration de criminaliser de manière plus cohérente le trafic d’influence, l’abus de fonctions et l’enrichissement illicite impliquant des agents publics, qu’ils soient élus ou nommés. À cet égard, il a estimé que des mesures plus strictes sont nécessaires pour poursuivre les cas de grande corruption impliquant des dirigeants politiques qui volent les deniers publics en toute impunité. Bien qu’il n’ait pas été possible de trouver de consensus sur la création d’un tribunal pénal pour enquêter sur de tels cas, M. Pacheco a jugé clair que beaucoup plus peut être fait pour traquer l’argent mal acquis dans les paradis fiscaux, divulguer la véritable propriété effective de ces actifs et, en fin de compte, remettre l’argent là où il doit être.
M. JÜRGEN STOCK, Secrétaire général de l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL), a constaté que la pandémie de COVID-19 a offert aux criminels l’occasion de s’attaquer aux fonds publics débloqués d’urgence et aux plans de relance. Les plus de 1 600 alertes partagées entre les 194 pays membres d’INTERPOL, la corruption n’a pas été freinée par le confinement. Bien au contraire, en 2020, les demandes de coopération soumises INTERPOL pour des affaires de corruption ont augmenté de près de 30% par rapport à 2019, et 2021 confirme cette tendance à la hausse. La corruption transnationale s’adapte à « une vitesse folle » à cette nouvelle situation, a prévenu M. Stock.
La pandémie ayant rappelé qu’une menace mondiale exige une réponse mondiale, M. Stock a indiqué qu’INTERPOL s’est associée à la Banque mondiale et à l’Initiative pour le recouvrement des avoirs volés (StAR) de l’ONUDC. Près de 250 acteurs qui travaillent dans 137 pays contre la corruption font partie du Réseau mondial des points focaux sur le recouvrement d’avoirs. En outre, une nouvelle plateforme de collaboration à la pointe de la technologie vient d’être introduite pour faciliter un échange sécurisé d’informations. Cette session extraordinaire, s’est félicité M. Stock, intervient à un moment clef, un moment où les économies essayent de sortir plus fortes de la crise mondiale. Il a donc salué une Déclaration politique « tournée vers l’avenir et orientée vers l’action » qui appelle toutes les parties prenantes à mettre en œuvre un plan clair pour la collaboration et la coordination internationales.
Pour INTERPOL, un système « fiable, de haute qualité, rapide et efficace » est essentiel pour rattraper les retards dans les procédures d’entraide judiciaire. M. Stock a d’ailleurs rappelé que l’Assemblée générale d’INTERPOL a approuvé la mise en place d’un système électronique pour transmettre en toute sécurité les demandes d’entraide judiciaire « en temps réel ». L’initiative « e-MLA » est un concept clef en main, prêt à l’emploi, doté d’un cadre juridique sur mesure déjà reconnu aujourd’hui par 194 pays dans le monde. L’initiative peut aider les États Membres à mettre en œuvre les engagements pris en vertu de la Déclaration politique et naturellement de la Convention des Nations Unies.
M. THOMAS STELZER, Doyen et Secrétaire exécutif de l’Académie internationale de lutte contre la corruption (IACA), a rappelé que son académie, conçue pour faciliter la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies contre la corruption, fournit une formation dans ce domaine, notamment au bénéfice des praticiens venant des pays en développement. Il a insisté sur l’importance des partenariats et mentionné les cours de formation dispensés par son académie et l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR). Il a salué le fait que la Déclaration politique appelle au renforcement de la relation entre l’Académie et l’UNODC, ainsi qu’avec d’autres entités onusiennes. « Je suis convaincu que notre mandat unique peut venir compléter les efforts anticorruption de l’ONU tout en évitant les doublons. » Enfin, M. Stelzer s’est félicité que la Déclaration politique reconnaisse l’importance de l’éducation et de la formation dans la lutte contre la corruption.
M. ROBIN OGILVY, de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a dit que son organisation se focalise notamment sur la lutte contre les pots-de-vin et la corruption. Grace à ces efforts, plus de 260 entités ont été condamnées pour corruption l’année dernière, a informé, le représentant qui a ajouté que l’OCDE concentre également ses efforts sur la formation à la culture de la transparence et de l’intégrité dans les administrations et les entreprises privées. Il a insisté sur la transparence des activités de lobbying du secteur privé auprès du secteur public, la lutte contre l’évasion fiscale et l’échange d’informations. À ce propos, il a indiqué que 180 millions de comptes bancaires privés ont fait l’objet d’enquêtes, ce qui représente des milliers de milliards de dollars. Il a aussi insisté sur la coopération entre l’OCDE avec le G20, y compris pour ce qui est de la corruption dans les milieux sportifs.
M. MARIN MRČELA, Président du Groupe d’États contre la Corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe, a indiqué que l’expérience de suivi que mène le GRECO depuis plus de 20 ans, confirme clairement que plusieurs outils sont indispensables pour freiner effectivement le fléau de la corruption. Il a notamment cité une approche pluridisciplinaire où répression et prévention vont de pair; des mesures législatives efficaces; une volonté politique soutenue; et la mobilisation et l’inclusion de la société civile et du secteur privé.
Par ailleurs, il a expliqué que les recommandations multidisciplinaires du GRECO ont orienté la lutte contre la corruption, dans le plein respect des droits de l’homme et libertés fondamentales. « Suite à nos recommandations et suivi, les lois, voire les constitutions, ont été modifiées, les pratiques améliorées, et les institutions créées ou réformées », s’est félicité le Président du GRECO avant de scander que son organisation est devenue progressivement une référence mondiale en matière de lutte contre la corruption.
En outre, M. Mrčela a indiqué que le GRECO coorganise cette semaine un événement parallèle, avec le Département des affaires économiques et sociales de l’ONU (UN DESA) sur les bonnes pratiques et les leçons apprises pour renforcer l’intégrité dans le secteur public, notamment par la transparence.
Mme MARÍA FERNANDA GARZA, Vice-Présidente de la Chambre de commerce internationale (CCI), a indiqué que la lutte contre la corruption fait partie de l’ADN de la Chambre. En 1977, la Chambre a ainsi été la première organisation commerciale à élaborer des règles contre l’extorsion et les pots-de-vin. Elle joue désormais un rôle de leader dans la promotion de cadres d’élimination de la corruption. Elle a indiqué par ailleurs que la pandémie a eu pour effet d’exacerber les faits de corruption. Pour y remédier, la Chambre a publié un guide pour une réponse intègre et résiliente à la pandémie qui appelle notamment à la préservation des procédures d’achat publics et à une lutte contre les contrefaçons de produits médicaux. Une économie postpandémie résiliente devra s’appuyer sur un élan renouvelé en faveur de la promotion de l’intégrité et de la bonne gouvernance, a recommandé le représentant.
En ce qui concerne la Convention des Nations Unies contre la corruption, elle a déploré le manque de progrès accomplis et appelé au renforcement de ses mécanismes de suivi. Elle a appelé à la création d’un groupe de travail intergouvernemental d’experts chargé de faire des propositions concrètes pour remédier aux lacunes dans l’application de la Convention. Un tel groupe pourrait examiner la manière dont les nouvelles technologies et l’intelligence artificielle peuvent contribuer à la lutte contre la corruption, a-t-elle conclu.
M. AHMAD BIN ABDULLA BIN ZAID AL MAHMOUD, Président de l’Organisation mondiale des parlementaires contre la corruption (GOPAC), a observé que de nombreux obstacles continuent de se dresser dans la lutte contre la corruption, laquelle est favorisée par « ceux qui sont au pouvoir et qui ne sont pas redevables de la manière dont ils gèrent les deniers publics », alors que des montants exorbitants sont aujourd’hui dépensés pour relever les économies après la pandémie de COVID-19. Dans la période de crise actuelle, il est nécessaire de mettre en place des plans de relance, a-t-il admis. Mais il faut aussi que cette aide atteigne ceux qui en ont besoin. Les montants très élevés qui sont décaissés ne doivent pas aller à une poignée de corrompus, a martelé le responsable de la GOPAC, selon lequel les parlementaires sont les mieux placés pour demander des comptes et éviter les abus. En tant que garants des fonds publics et principaux acteurs dans l’élaboration des budgets, les parlementaires disposent d’un mandat robuste contre la corruption, a-t-il insisté, avant d’appeler la communauté internationale à resserrer sa coopération avec les parlements afin de faire appliquer les normes les plus élevées en matière de lutte contre la corruption. Tout en se félicitant de l’adoption par l’Assemblée générale d’une Déclaration politique sur cette problématique, il a réitéré l’appel de son réseau en faveur de davantage de coopération internationale et de transparence dans la gestion des affaires publiques.
La Directrice générale de l’ONG argentine « Fundación para la Democracia International », Mme MARINA SALA, a estimé que la corruption est certainement le défi principal qui sous-tend la plupart des problèmes d’Amérique latine et des Caraïbes. Elle aggrave les inégalités, l’injustice et menace l’état de droit. Les ressources qui devraient aider les gens dans le besoin finissent par augmenter les richesses d’une minorité, et la pandémie de COVID-19 dans laquelle nous sommes plongés a tout aggravé. La corruption sape en effet la réponse sanitaire et cela coûte des vies, a-t-elle déploré. Mme Sala a rappelé qu’en février dernier, le Ministre argentin de la santé a démissionné après une série d’événements connus sous le nom de « vaccination VIP » où des personnes proches du Gouvernement ont été vaccinées des mois avant les autres. Une telle situation érode la crédibilité de l’État et aujourd’hui plus que jamais, nous devons collaborer. La coopération internationale est essentielle pour surmonter cette crise mondiale, a conclu l’oratrice.
M. MAURICE K. NYAMBE, Directeur exécutif de Transparency International (TI) Zambie, a estimé que l’urgence de lutter contre la corruption a été exacerbée par la COVID-19 qui a, dans de nombreux cas, accéléré et renforcé les effets négatifs de la corruption, en particulier dans les pays les moins avancés (PMA. Comme le montre le dernier Indice de perception de la corruption de Transparency International (IPC), la pandémie de COVID-19 et la corruption se sont entrelacées de manière à sonner le glas du programme mondial de développement social et économique.
Alors que le monde se remet de la pandémie de COVID-19, il a appelé à se concentrer sur la résolution des problèmes liés à la corruption qui ont caractérisé différents aspects du relèvement, tels que les dons matériels, le soutien bilatéral et le déploiement de la vaccination contre la COVID-19, entre autres défis. Ensuite, les gouvernements doivent mettre en place des mécanismes et des interventions qui protègent les programmes de subsistance bénéficiant aux segments vulnérables de la société en proie à la corruption et/ou aux effets persistants de la pandémie de COVID-19. Enfin, les gouvernements doivent renforcer la mobilisation des ressources nationales afin de consolider leurs capacités à réagir aux effets à la fois de la COVID-19 et de la corruption. Cela signifie, entre autres, renforcer les cadres législatifs et politiques qui permettront un recouvrement efficace des avoirs, et rendre difficile les flux financiers illicites.
Mme CYNTHIA GABRIEL, fondatrice et Directrice exécutive de « Center to Combat Corruption and Cronyism (C4) », a déclaré que la Malaisie est impliquée dans de multiples stratagèmes de corruption, y compris le scandale « 1MDB » qui implique des banques, des avocats, des comptables et autres qui ont utilisé des sociétés écrans pour subtiliser de l’argent. Soulignant que ce sont les activistes qui ont dévoilé ces abus, elle a décrit son propre interrogatoire, les attaques des autorités, les représailles, les châtiments et ses efforts pour surmonter la peur. Mais la victoire était au bout du tunnel: inculpés, l’ancien Premier Ministre et ses alliés, sont en train d’être jugés. Mais, dans de très nombreux cas, a-t-elle reconnu, les puissants et leurs facilitateurs jouissent d’une impunité totale, surtout lorsqu’ils sont impliqués dans le financement des partis politiques et autres activités de la vie publique.
C’est un échec du système international, a-t-elle tranché, regrettant l’absence d’un accord spécifique au cours de cette session extraordinaire. Elle a réclamé la protection des lanceurs d’alerte, le financement et la dotation en personnel des organes de contrôle, des mesures plus coercitives contre la corruption et surtout l’implication effective de la société civile dans la lutte contre la corruption.
Mme GRETTA FENNER, Directrice générale de l’Institut de Bâle sur la gouvernance, a particulièrement salué les paragraphes de la Déclaration politique qui encouragent les États à recourir aux régimes de confiscation des avoirs, avec ou sans condamnation. Elle a aussi salué le fait que le texte reconnaisse que les États ne respectent pas encore leur engagement en matière de coopération, lorsqu’il s’agit d’enquêter sur la corruption et de récupérer les avoirs volés. La coopération internationale, a-t-elle fait observer, est obstruée par la lourdeur des bureaucraties dans de nombreux pays, et parfois par des procédures qui semblent favoriser la partie défenderesse. La représentante s’est aussi dite encouragée par le fait que les États Membres aient consacré la notion d’action collective en tant que norme émergente importante dans la prévention de la corruption. Elle a dûment salué la référence au rôle essentiel des acteurs autres que les gouvernements. L’essentiel de ce document donne donc des raisons d’espérer.
Alors que les niveaux de corruption restent incroyablement élevés et qu’aucun pays n’est épargné, la représentante a félicité « les courageux » parmi les forces de l’ordre, les médias et la population générale qui résistent, se lèvent et protestent, souvent au prix de grands sacrifices. Parce que la corruption est une maladie « très résistante aux multiples variantes », les solutions purement juridiques et techniques ne suffisent pas. Nous devons, s’est expliquée la représentante, comprendre l’économie politique de ce fléau et investir dans l’éducation pour aiguiser le regard de la population dans « le brouillard de la corruption ». À ce stade, la pire des choses qui pourrait arriver à la communauté internationale serait d’adopter une Déclaration politique sans suite. Elle a donc exhorté les États Membres à autoriser l’examen « complet et public » de leurs efforts de mise en œuvre.
M. ADESOLA KAZEEM ADEDUNTAN, Président-Directeur général de la « First Bank of Nigeria », a constaté à son tour que la corruption nuit à la croissance économique, à l’innovation et au développement durable. C’est aussi l’une des principales contraintes auxquelles fait face le secteur privé, a-t-il souligné, relevant que les entreprises sont confrontées à des risques élevés liés aux flux financiers illicites. Il est donc urgent de faire reculer ce phénomène, particulièrement à l’heure où les économies sont sévèrement impactées par la pandémie de COVID-19, a plaidé le responsable. En tant que membre du Pacte mondial, a-t-il indiqué, la « First Bank of Nigeria » intègre les principes des Nations Unies et promeut une culture d’intégrité, en insistant sur la prévention et la lutte contre l’extorsion et les pots-de-vin. L’établissement, a affirmé son PDG, s’engage à faire montre du plus haut niveau de transparence et sa réputation atteste de son engagement.
Dans ce cadre, la « First Bank of Nigeria » a pris des mesures à la fois internes et externes, axées sur une « tolérance zéro » en matière de corruption et un respect des lois et des réglementations dans toutes ses activités. En interne, a-t-il expliqué, le personnel doit signaler tout comportement non éthique ou illicite de manière confidentielle, sans crainte de représailles, de harcèlement ou d’intimidation. Au niveau externe, la banque travaille aux efforts menés sur la responsabilité sociale des entreprises. Elle œuvre aussi avec différentes parties prenantes à la promotion des programmes de lutte contre la corruption dans le secteur privé.