En cours au Siège de l'ONU

Soixante-quinzième session,
64e & 65e séances - matin & après-midi
AG/12323

Assemblée générale: Quinze après son adoption, la notion toujours controversée de « la responsabilité de protéger » compte un nouveau partisan, le Myanmar

Au cours de son débat annuel sur notion de « la responsabilité de protéger » contre les « atrocités criminelles » que sont les crimes de génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le nettoyage ethnique, l’Assemblée générale a entendu aujourd’hui une cinquantaine d’orateurs, dont le Myanmar qui, ne craignant plus ni « manipulation », ni « deux poids, deux mesures », ni « hypocrisie » dans l’interprétation du concept, s’en est fait le fervent défenseur face aux agissements de la junte militaire au pouvoir, depuis le mois de février dernier. 

La majorité des délégations ont promis de voter « oui » au projet de résolution*, présenté par la Croatie, visant à inscrire à l’ordre du jour de la session annuelle de l’Assemblée générale la question de la responsabilité de protéger et à ce que le Secrétaire général présente un rapport annuel, car il est temps de parler de l’opérationnalisation du concept, ont-elles argué.  

Alors qu’en cette soixante-quinzième année de l’ONU nous réfléchissons souvent à son histoire, il est essentiel, a estimé le Président de l’Assemblée générale, M. Volkan Bozkir, que nous apprenions de nos échecs, comme au Rwanda et à Srebrenica.  Plusieurs décennies plus tard, nous voyons clairement un écart entre les obligations des États, en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme, d’une part, et la réalité de populations exposées au risque d’atrocités criminelles.  

Le programme de la responsabilité de protéger, qui a été adopté à l’unanimité au Sommet mondial des Nations Unies en 2005, offre à la communauté internationale un outil « essentiel » pour construire la paix, donner la priorité à la prévention et protéger les populations, a souligné le Président qui s’est alarmé de ce qu’en 2020, les populations vulnérables aient été exposées à des risques accrus, à de graves violations des droits humains et autres crimes, derrière le voile de la pandémie de COVID-19.  

Ne perdons pas de vue, a plaidé M. Bozkir, notre responsabilité vis-à-vis des autres, laquelle n’est en fait qu’une responsabilité vis-à-vis de nous-mêmes, de la communauté humaine dont nous faisons partie.  Notre responsabilité est de protéger les civils.  En 2005, a renchéri Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti, Chef de Cabinet du Secrétaire général de l’ONU, les États Membres ont accepté trois responsabilités interdépendantes énoncées « en termes clairs »: ils ont reconnu leur responsabilité première de protéger leurs populations; ils ont pris l’engagement parallèle de la communauté internationale à les aider à s’acquitter de cette responsabilité; et ils ont proclamé celle de cette communauté internationale de protéger les civils lorsqu’un État ne peut pas assumer la sienne, y compris en menant une action collective, par l’intermédiaire de l’Organisation et conformément à la Charte des Nations Unies. 

La prévention est la pierre angulaire de la responsabilité de protéger et les rapports que le Secrétaire général a produits à ce sujet ont mis en évidence les moyens de renforcer les stratégies nationales et internationales de prévention et de protection.  Cette année, a indiqué Mme Viotti, le rapport du Secrétaire général** se concentre sur le rôle du Bureau des Nations Unies pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger dans la mise en œuvre du principe et la promotion de la prévention des atrocités, dont le travail a été salué par la majorité des délégations.  Aussi, a encouragé Mme Viotti, devons-nous continuer d’œuvrer à surmonter les divergences et forger une compréhension commune de la responsabilité de protéger.

Les divergences?  Mais elles sont imputables « aux arguments juridiques fallacieux », a estimé la Syrie, après que le Brésil s’est dit préoccupé par le fait que le rapport du Secrétaire général fasse à nouveau référence aux termes « atrocités criminelles » et tente surtout d’en proposer une définition.  Nous, les États Membres, devrions résister à la tentation d’accepter ce type de « concepts vagues », a-t-il fait valoir, relevant que la notion d’« atrocités criminelles » n’est pas définie par le droit international.  Chaque type de crime découle de facteurs différents et exige donc des mécanismes de prévention distincts. 

Comment parler de l’opérationnalisation de la responsabilité de protéger, sans consensus? s’est demandé Cuba.  Qui prend la décision de laisser la main à la communauté internationale?  Qui va conclure qu’un État ne protège pas sa population et qui va décider d’une intervention?  L’on parle de la mise en œuvre du concept mais l’on se garde d’imposer une zone d’exclusion aérienne au-dessus du Territoire palestinien occupé, pour en protéger les civils, a fait observer la Syrie.  En Colombie, a embrayé le Venezuela, des centaines de leaders politiques, sociaux et communautaires, d’autochtones et de défenseurs des droits de l’homme sont assassinés mais nous ne voyons pas « les puissances interventionnistes » invoquer la responsabilité de protéger.  Cette notion, a renchéri la République populaire démocratique de Corée (RPDC), n’est qu’une autre façon de qualifier les interventions étrangères. 

Adhérant autrefois à ces propos pour s’opposer à l’idée que des atrocités criminelles étaient commises dans l’État rakhine, le Myanmar a changé aujourd’hui de fusil d’épaule.  Ne craignant plus ni « manipulation », ni « deux poids, deux mesures », ni « hypocrisie » dans l’interprétation du concept, il a dénoncé avec vigueur les agissements de la junte militaire au pouvoir depuis le mois de février dernier.  

« L’armée nous attaque dans les rues, dans nos maisons, dans les écoles, les hôpitaux, les villages et les lieux de culte », a-t-il alerté.  Les Nations Unies « ne sont pas là pour remplacer l’État », mais lorsqu’une population est désespérée face à des crimes, elle se doivent d’intervenir, a dit le Myanmar qui a ajouté: nous avons attendons du Conseil de sécurité qu’il oppose une riposte « unifiée, décisive et opportune » à cette situation atroce, protège le peuple, déclare des zones d’exclusion aériennes, décrète un embargo sur les armes et le gel des avoirs contre l’armée et reconnaisse le Gouvernement d’union nationale comme représentant légitime du peuple. 

L’Assemblée générale devrait achever ce débat demain mardi 18 mai à partir de 10 heures. 

*A/75/L.82

**A/75/86

LA RESPONSABILITÉ DE PROTÉGER ET LA PRÉVENTION DU GÉNOCIDE, DES CRIMES DE GUERRE, DU NETTOYAGE ETHNIQUE ET DES CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ

Déclarations liminaires

Alors qu’en cette soixante-quinzième année de l’ONU nous réfléchissons souvent à son histoire, il est essentiel, a estimé le Président de l’Assemblée générale, M. VOLKAN BOZKIR, que nous apprenions de nos échecs, comme au Rwanda et à Srebrenica.  Ce sont là les lieux de nos échecs collectifs, le genre de tragédies que l’ONU a été chargée d’empêcher dès sa création.  Plusieurs décennies plus tard, nous voyons clairement un écart entre les obligations des États, en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme, d’une part, et la réalité de populations exposées au risque de génocide, de crimes de guerre, de nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité, d’autre part.  Le programme de la responsabilité de protéger, qui a été adopté à l’unanimité au Sommet mondial des Nations Unies en 2005, offre à la communauté internationale un outil essentiel pour construire la paix, donner la priorité à la prévention et protéger les populations.

Le Président de l’Assemblée a reconnu que ce concept n’est pas une solution universelle.  Les pires formes de crimes continuent d’être commises, avec des ramifications profondes et durables.  Aujourd’hui, plus de 80 millions de personnes, que nous avons le devoir de servir, ont été déplacées de force.  J’ai moi-même, a-t-il confié, rencontré des déplacés lors de ma visite à la frontière syrienne, à Hatay, le mois dernier.  La semaine prochaine, je serai à Cox’s Bazar, pour entendre les réfugiés et leur pays d’accueil.  En 2020, les populations vulnérables ont été exposées à des risques accrus, à de graves violations des droits humains et autres crimes, derrière le voile de la pandémie de COVID-19. 

L’intolérance a persisté tout au long de la pandémie, avec une tendance particulièrement inquiétante à l’incitation à la haine et à la violence contre les minorités ethniques, religieuses et linguistiques.  Ne perdons pas de vue, a plaidé M. Bozkir, notre responsabilité vis-à-vis des autres, laquelle n’est en fait qu’une responsabilité vis-à-vis nous-mêmes, de la communauté humaine dont nous faisons partie.  Le Président de l’Assemblée a demandé à tous les États Membres de prendre des mesures pour protéger leurs populations, en accordant une attention particulière aux problèmes auxquels sont confrontés les groupes les plus vulnérables et les plus marginalisés. 

À l’heure actuelle, nous devons mobiliser la volonté politique de tous les États, si nous voulons prévenir des atrocités.  Les États Membre doivent s’entraider, conformément à la Charte des Nations Unies, au droit international et à la responsabilité de protéger, lorsque des autorités nationales échouent manifestement à assurer la protection de leurs populations.  M. Bozkir a fait sien l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu mondial et a condamné toutes les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme, que ce soit par des acteurs étatiques ou non étatiques.  Il a dénoncé l’instrumentalisation de la nourriture, la violence sexuelle et sexiste, la prise des écoles et des hôpitaux pour cible et la destruction de sites religieux.  Tout ceci est d’une « cruauté inimaginable », a-t-il martelé.  Notre responsabilité est de protéger les civils, de stopper les discours de haine quand ils apparaissent, de condamner les incitations à la violence et le harcèlement, de prendre des mesures efficaces et opportunes pour protéger les communautés menacées par des atrocités de masse, de prévenir les crimes de génocide et de garantir l’établissement des responsabilités et la justice.

Si elle a reconnu que l’Assemblée générale a permis d’améliorer « notre compréhension commune » de la responsabilité de protéger et d’affiner les stratégies pour prévenir les atrocités, Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI, Chef de Cabinet du Secrétaire général de l’ONU, a cependant estimé qu’il reste beaucoup à faire pour tenir la promesse du Document final du Sommet mondial de 2005.  La pandémie de COVID-19 a encore exacerbé les dangers auxquels sont confrontées les populations les plus vulnérables et marginalisées du monde entier, révélant et aggravant les inégalités et les schémas de la discrimination existants.  Les discours de haine, les incitations à la haine, l’exclusion et les discriminations se sont multipliés, alimentés par une aggravation « spectaculaire » de la désinformation.

L’année 2020 a marqué le quinzième anniversaire des engagements relatifs à la responsabilité de protéger.  Les États Membres, a rappelé la Chef de Cabinet, ont accepté trois responsabilités interdépendantes énoncées « en termes clairs » dans le Document final du Sommet mondial: ils ont reconnu leur responsabilité première de protéger leurs populations ; ils ont pris l’engagement parallèle de la communauté internationale à les aider à s’acquitter de cette responsabilité première ; et ils ont proclamé la responsabilité de la communauté internationale de protéger lorsqu’un État ne peut pas assumer la sienne, y compris en menant une action collective, par l’intermédiaire de l’Organisation et conformément à la Charte des Nations Unies.

La prévention est la pierre angulaire de la responsabilité de protéger et les rapports que le Secrétaire général a produits à ce sujet ont mis en évidence les moyens de renforcer les stratégies nationales et internationales de prévention et de protection.  L’accent a notamment été mis sur le rôle des organisations régionales et sous-régionales, les enseignements tirés, les pratiques optimales, l’établissement des responsabilités, le rôle des femmes dans la prévention des atrocités, les valeurs de diversité et d’inclusion, ainsi que les mécanismes d’alerte rapide et de prévention des conflits.

Cette année, a indiqué Mme Viotti, le rapport du Secrétaire général se concentre sur le rôle du Bureau des Nations Unies pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger dans la mise en œuvre du principe et la promotion de la prévention des atrocités.  Ce Bureau, en coordination avec d’autres entités des Nations Unies, aide les États Membres, les acteurs locaux, la société civile et les organisations régionales et sous-régionales à évaluer et à remédier aux vulnérabilités existantes afin d’atténuer le risque d’atrocités.  Donner la priorité à la prévention et à l’action rapide permet d’envisager un plus large éventail de mesures préventives et une coopération durable à tous les niveaux, a ajouté Mme Viotti.  Aussi devons-nous continuer d’œuvrer à surmonter les divergences, forger une compréhension commune et renforcer le soutien à la responsabilité de protéger en tant qu’outil clef de protection et de prévention, a conclu la Chef de Cabinet.

Déclarations

Au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, M. RODRIGO A. CARAZO (Costa Rica) a noté que le débat de cette année se déroule à un moment sans précédent, en pleine période de pandémie, laquelle a renforcé la nécessité de trouver des solutions multilatérales aux problèmes mondiaux et de respecter le droit international.  Il s’agit de réaffirmer notre engagement collectif en faveur de la responsabilité de protéger et d’améliorer nos réponses aux besoins des populations exposées au risque d’atrocités, a souligné le représentant, estimant qu’une façon d’y parvenir consiste à appuyer le projet de résolution examiné aujourd’hui par l’Assemblée.

L’année dernière, a-t-il rappelé, nous avons célébré le quinzième anniversaire de l’adoption à l’unanimité du concept de la responsabilité de protéger.  Depuis lors, des progrès importants ont été accomplis par l’ONU, les États Membres et d’autres parties prenantes pour faire progresser la prévention des atrocités aux niveaux local, national, régional et international.  Le représentant s’est ainsi félicité de ce que les acteurs concernés aient réussi à créer des cadres pour identifier les déclencheurs et les risques, développé des mécanismes d’alerte précoce et commencé à institutionnaliser les mécanismes de prévention.  Dans le même temps, a-t-il relevé, d’importants réseaux intergouvernementaux, tels que le Groupe des Amis de la responsabilité de protéger et le Réseau mondial des points focaux sur la responsabilité de protéger continuent de se développer. 

Au sein des enceintes multilatérales, a poursuivi le délégué du Costa Rica, la responsabilité de protéger continue d’être « un appel puissant à l'action » pour prévenir les atrocités et faire face aux risques dans des situations spécifiques.  C’est ainsi que de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité, du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale font référence à la responsabilité des États de protéger leurs populations.  En juillet dernier, a noté le représentant, le Conseil des droits de l’homme a adopté sa première résolution thématique sur la responsabilité de protéger, reflétant l’institutionnalisation croissante et l’attention portée à cette question dans tout le système des Nations Unies.  De plus, plusieurs rapporteurs spéciaux mandatés par le Conseil des droits de l’homme et les mécanismes d’enquête ont utilisé le cadre d’analyse des crimes atroces, élaboré par le Bureau des Nations Unies pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger, pour évaluer les facteurs de risque structurels. 

Dans ce contexte, a souligné le représentant, mon groupe appuie fermement une approche inclusive de la prévention des atrocités, une approche qui reconnaît le rôle essentiel des femmes et des jeunes dans l’alerte rapide, le maintien et la consolidation de la paix, le renforcement des capacités et l’édification de sociétés plus tolérantes et plus résilientes.  Observant que les atrocités comprennent souvent la perpétration de violences sexuelles liées aux conflits, il a estimé que des mesures concrètes doivent être prises pour mettre fin à toutes les formes d’inégalités entre les sexes, et de violence qui y sont associées, et pour autonomiser les femmes et les filles en tant qu’agents du changement.

Malgré les progrès accomplis, force est de reconnaître que la communauté internationale continue de ne pas respecter notre responsabilité collective de protéger, a ensuite constaté le délégué, en pointant du doigt le rôle des institutions multilatérales, dont le Conseil de sécurité.  Au titre des mesures rapides et décisives qu’il faut prendre, il a cité les initiatives diplomatiques, les sanctions ciblées et la révision ou la suspension des accords militaires et commerciaux.  Toujours à propos du Conseil, il s’est réjoui du soutien de nombreux États Membres au Code de conduite du Groupe ACT -Accountability, Coherence, Transparency- et à l’initiative franco-mexicaine sur les limites à l’exercice du droit de veto. 

Lorsque la communauté internationale ne parvient pas à empêcher la commission d’atrocités, nous devons veiller à ce que les auteurs soient tenus pour responsables, a ajouté le représentant, selon lequel l’impunité structurelle est une cause directe des atrocités criminelles.  Il a donc exhorté les États Membres à respecter leurs obligations juridiques internationales et à enquêter et poursuivre les personnes responsables de crimes atroces.  Il a noté que les poursuites nationales fondées sur la compétence universelle jouent un rôle important dans la lutte contre l’impunité.  En outre, les missions d’établissement des faits, les mécanismes d’enquête, les commissions d’enquête, les cours et tribunaux hybrides et internationaux, y compris la Cour pénale internationale (CPI), offrent des moyens complémentaires lorsque les options du droit interne se révèlent insuffisantes. 

Avant de conclure, le représentant a encouragé les deux Conseillers spéciaux du Secrétaire général pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger à utiliser leur rôle de chef de file pour faire progresser la prévention des atrocités de masse.  Cela comprend, à ses yeux, un engagement constructif et un dialogue ouvert avec les États Membres, le partage de leur expertise, la sensibilisation aux causes des atrocités criminelles et l’identification des mesures qui pourraient être prises pour les prévenir.  Invitant le Bureau à mettre à jour le cadre d’analyse des crimes atroces et à élaborer des orientations techniques supplémentaires, il a également exhorté les Conseillers spéciaux à partager leurs analyses avec l’ensemble des membres de l’ONU et à fournir régulièrement des évaluations et des recommandations sur la manière de prévenir les atrocités, notamment au Conseil de sécurité, à l’Assemblée générale et au Conseil des droits de l’homme.  Enfin, il a réitéré son appel à tous les États Membres pour qu’ils appuient le projet de résolution.  Son adoption, a-t-il dit, nous permettra de continuer à discuter de « la meilleure façon de concrétiser l’engagement historique que nous avons pris en 2005 ». 

Mme THISVI EKMEKZOGLOU-NEWSON, déléguée de l’Union européenne, a indiqué que le Réseau européen de points de contact contribue à une coopération étroite entre les autorités nationales pour enquêter et poursuivre les responsables de crimes de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et nettoyage ethnique.  L’Union européenne est également prête à aider les autres États à réglementer la responsabilité pour les atrocités criminelles.  À cet égard, la représentante a souligné la contribution de la Cour pénale internationale, ajoutant que grâce à son soutien à la Cour, l’Union européenne renforce les capacités d’établissement des responsabilités et de réconciliation, qui sont des éléments clefs de la non-répétition.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité à examiner attentivement le mécanisme de saisine prévu par le Statut de Rome.

La responsabilité de protéger fait partie intégrante de la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne, a souligné la représentante.  Elle utilise des outils d’analyse des conflits et son système d’alerte rapide pour identifier les problèmes liés à cette responsabilité, a expliqué la représentante.  L’Union européenne, a-t-elle ajouté, soutient le renforcement des mécanismes d’alerte rapide et de prévention au sein du système des Nations Unies et se tient prête à apporter son soutien, à cet égard.  La représentante s’est donc félicitée du projet de résolution.  Née comme l’ONU des cendres de la Deuxième Guerre mondiale, l’Union européenne, a-t-elle conclu, a pour raison d’être la protection des peuples contre les atrocités.  Tant que nous ne serons pas capables collectivement d’assurer une protection totale contre les atrocités criminelles dans le monde entier, l’Assemblée générale devrait continuer d’évaluer la mise en œuvre du concept de responsabilité de protéger, a-t-elle estimé.

Au nom des pays nordiques, M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a réaffirmé son engagement en faveur de la responsabilité de protéger et de ses trois piliers.  Il a jugé important que l’Assemblée générale échange régulièrement sur les pratiques optimales et les difficultés rencontrées.  Le partage d’exemples pratiques contribuerait effectivement à une meilleure compréhension de la manière de concrétiser le concept, avec l’aide du Bureau du Conseiller spécial du Secrétaire général.  Le représentant a salué la collaboration avec le Conseil des droits de l’homme et réitéré son appui à la CPI, « l’institution la plus importante pour la lutte contre l’impunité ».  S’agissant de la prévention, il a insisté sur l’importance qu’il y a à identifier les facteurs en amont des atrocités criminelles, avant d’appuyer le projet de résolution.

Également au nom de la France, Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a déclaré que la responsabilité première des États de protéger leurs populations contre les atrocités criminelles n’est pas une question de volonté politique, mais une obligation, en vertu du droit international.  Aucune action du Conseil de sécurité ne peut remplacer cette obligation « inhérente » d’un État souverain.  Quatre priorités doivent être prises en compte, a-t-elle poursuivi, et tout d’abord le renforcement de nos efforts de prévention, grâce à une approche globale et cohérente comprenant la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et d’Action pour le maintien de la paix, la promotion des droits de l’homme et la protection des enfants dans les conflits armés.  Comme deuxième priorité, la représentante a cité l’implication des femmes et des jeunes et le renforcement des efforts pour prévenir et combattre la violence sexuelle et sexiste, en tant que tactique de guerre. 

Elle est ensuite passée à la troisième priorité qui est le renforcement des capacités de prévention des organisations régionales et sous-régionales.  Elle a rappelé l’initiative franco-mexicaine de suspendre l’exercice du droit de veto au Conseil de sécurité, en cas d’atrocités de masse.  Ce droit n’est pas un privilège, mais une responsabilité internationale, a martelé la représentante.  Cette initiative, déjà soutenue par 105 États, vise à obtenir l’engagement volontaire et collectif des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de ne pas exercer le droit de veto en cas de crimes de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, a-t-elle expliqué.

Enfin, comme quatrième priorité qui est le renforcement de la lutte contre l’impunité, elle a estimé qu’il faut obtenir des États leur coopération avec les différentes missions d’établissement des faits et les commissions d’enquête sur les atrocités de masse, ainsi qu’avec les instruments de la justice pénale internationale.  Elle a réitéré son appel à tous les États pour qu’ils adhèrent au Statut de Rome. 

M. GERT AUVÄÄRT (Estonie), intervenant également au nom de la Lettonie et de la Lituanie, a souligné que la responsabilité de protéger incombe en premier lieu à l’État.  Malheureusement, on continue d’être les témoins d’une tendance négative dans la mise en œuvre de cette responsabilité alors que des atrocités criminelles sont commises dans de nombreuses parties du monde.  Il a appelé à redoubler d’efforts afin de protéger les populations contre ces atrocités, insistant en outre sur l’importance de la prévention.  Une société civile forte et diversifiée et des médias pluralistes contribuent positivement au développement de systèmes d’alerte précoce et de réponse en sensibilisant le public aux violations des droits humains et en aidant à promouvoir des sociétés résilientes, a-t-il estimé.

Il a appelé à redoubler d’efforts pour renforcer le rôle des femmes dans la prévention des atrocités.  Il est également essentiel que tous ces acteurs susmentionnés puissent exprimer leurs préoccupations, communiquer et coopérer avec l’ONU sans crainte de représailles, a-t-il ajouté.  M. Auväärt a ensuite fait part de son soutien aux initiatives visant à limiter l’utilisation du veto au Conseil de sécurité dans des situations impliquant des atrocités de masse.  Il s’est aussi dit d’avis que la mise en œuvre de la responsabilité de protéger devrait être un point permanent de l’ordre du jour de l’Assemblée générale.

M. ENRI CIPRIAN PRIETO TICA (Pérou) a réaffirmé son attachement à la consolidation du principe de responsabilité de protéger, exprimant son soutien au projet de résolution présenté ce jour, d’autant plus que la pandémie de COVID-19 a multiplié les facteurs de risque pouvant conduire à la commission d’atrocités. Rappelant que son pays adhère aux instruments du droit international humanitaire et des droits de l’homme, le représentant a indiqué que le Pérou s’efforce aussi de former en permanence ses forces armées et de police, afin de garantir leur comportement approprié dans le cadre des opérations de maintien de la paix.  À cet égard, il s’est déclaré préoccupé par l’impunité dont jouissent aujourd’hui ceux qui violent le droit international humanitaire.  Selon lui, la communauté internationale et le Conseil de sécurité ont l’obligation d’agir dans l’unité pour mettre fin aux souffrances subies par des millions de personnes dans le monde. 

C’est pourquoi, a-t-il dit, le Pérou soutient l’Initiative franco-mexicaine visant à restreindre le recours au veto en cas d’atrocités, ainsi que le Code de conduite du Groupe ACT, dont il est membre.  Enfin, considérant comme essentiel l’allocation de ressources et de personnels suffisants pour évaluer la prévention des crimes odieux et soutenir les travaux de la Cour pénale internationale, il a soutenu la possibilité d’inclure la prévention des atrocités dans les mandats du Conseil des droits de l’homme ainsi que dans les rapports nationaux préparés dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU). 

M. ENRIQUE AUSTRIA MANALO (Philippines) a rejeté l’idée que la responsabilité de protéger ne serve de prétexte pour s’immiscer dans les affaires intérieures des États et saper leur souveraineté nationale.  La communauté internationale devrait agir collectivement et avec détermination, à travers le Conseil de sécurité et conformément à la Charte des Nations Unies, lorsque qu’un pays n’assume pas sa responsabilité.  En demandant au Secrétaire général de présenter un rapport annuel, nous nous donnons les moyens, s’est félicité le représentant, d’examiner les progrès réalisés et les défis qui subsistent.  L’application du concept doit d’abord passer par le renforcement des institutions nationales, la bonne gouvernance et le strict respect des paramètres établis dans le Document final de 2005.

Mme PASCALE BAERISWYL (Suisse) a réaffirmé l’importance du Bureau de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger et de ses conseillères spéciales, dont elle salué la collaboration dans le cadre des préparatifs de la quatrième Conférence internationale de l’Action globale contre les atrocités de masse.  Par ailleurs, elle a réitéré son appel à faire pleinement usage du « potentiel préventif » du Conseil de sécurité pour « passer de l’alerte précoce à l’action précoce ».  En tant que coordonnatrice du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT), la Suisse a invité tous les États membres à souscrire au Code de conduite dudit groupe, qui demande aux États membres du Conseil, « élus ou non », de ne pas voter contre une résolution qui vise à prévenir ou mettre un terme à des atrocités de masse. 

En outre, pour renforcer la résilience nationale, il faut traiter les causes profondes des conflits et des atrocités qui en découlent ainsi que mettre en place des « garanties de non-répétition ».  Dans ce sens, la Suisse a appelé à assurer la mise en œuvre des conclusions du rapport conjoint de 2018 sur la justice transitionnelle élaboré avec le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition.  « La prévention des atrocités implique en effet de relier davantage Genève et New York », a estimé la délégation, pour qui la société civile a également un rôle fondamental à jouer.  Enfin, elle a rappelé que les États parties au Statut de Rome avaient adopté un amendement proposé par la Suisse pour « étendre aux conflits armés internes la compétence de la Cour pénale internationale à l’égard du crime de guerre consistant à affamer des populations civiles ».  Mme Baeriswyl a donc appelé tous les États parties à le ratifier.

M. PETER NAGY (Slovaquie) s’est déclaré convaincu que l’Assemblée joue un rôle important en contribuant à renforcer le consensus sur la responsabilité de protéger et la compréhension par tous les États Membres de leur responsabilité individuelle et collective de protéger toutes les personnes des crimes contre l’humanité.  Sur cette base, il a salué le douzième rapport du Secrétaire général, qui met l’accent sur la dimension de genre dans la prévention des atrocités et la responsabilité de protéger.  En 2005, a rappelé le représentant, tous les États Membres de l’ONU ont pris un engagement politique envers le principe de la responsabilité de protéger.  Pourtant, a-t-il ajouté, nous constatons trop souvent que les actions de la communauté internationale ne parviennent pas à dissuader ou à prévenir de manière adéquate les atrocités criminelles.  À ses yeux, il faut faire davantage pour aborder l’aspect préventif, conformément au programme de prévention initié par le Secrétaire général.  

De plus, a poursuivi le représentant, il est essentiel de parvenir à un accès universel à la justice et à une responsabilité non sélective pour assurer la protection de tous les individus et groupes contre la discrimination, l’exclusion et autres violations des droits humains.  Dans ce contexte, il a souligné le rôle de la Cour pénale internationale (CPI) en tant qu’organe judiciaire impartial intervenant là où les juridictions nationales ne peuvent ou ne veulent pas aborder la question de la responsabilité.  À ce titre, a-t-il fait valoir, la CPI sert de « garante de la non-répétition des atrocités de masse », tout en rendant justice aux victimes des crimes les plus graves commis au regard du droit international.  Le délégué a donc appelé tous les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome et ses amendements. 

M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a déclaré que la communauté internationale a appris de ses succès mais aussi de ses échecs.  Beaucoup réduisent la responsabilité de protéger à une intervention militaire, alors qu’il est entendu de donner la priorité aux mesures pacifiques et préventives.  Regrettant que le monde continue d’être aux prises avec une « certaine paralysie », le représentant a estimé qu’il faut montrer aux populations, dont celles qui sont persécutées au Myanmar, que « nous ne leur tournons pas le dos », ni au peuple syrien, qui endure tant d’atrocités depuis 10 ans, après la série de vetos qui a empêché toute action du Conseil de sécurité.  Le recours au droit de veto dans le cadre de telles atrocités est tout simplement une « honte », a tranché le représentant, en réitérant son soutien à la proposition franco-mexicaine de le suspendre dans le cas d’atrocités de masse.  La prévention a toujours été et reste l’élément le plus important de la responsabilité de protéger, a-t-il insisté, en citant les « agents de la prévention » que sont la société civile, les médias, les journalistes et les femmes.

M. CHANAKA LIAM WICKREMASINGHE (Royaume-Uni) a évoqué un certain nombre de cas préoccupants qui soulignent l’importance qu’il y a à faire appliquer la responsabilité de protéger, notamment celui du Myanmar depuis le coup d’État.  Nous avons lancé un appel à l’Armée et aux forces de sécurité du Myanmar pour qu’elles cessent les violences, rétablissent l’ordre démocratique, traduisent les responsables des violences en justice et libèrent les opposants politiques, a énuméré le représentant.  En Syrie, a-t-il poursuivi, nous continuons de dénoncer les 32 cas d’utilisation d’armes chimiques et exigeons la comparution des responsables de ces attaques.  Le représentant a ajouté que son pays a fourni plus de 14 millions de livres aux mécanismes d’enquête en Syrie et a exigé la reprise des visites sur le terrain pour obtenir des informations claires et vérifiables.  Le représentant a conclu en appuyant le Code de conduite du Groupe ACT.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a déclaré que la prévention des atrocités de masse est une responsabilité tant individuelle que collective des États Membres, en vertu de la Charte des Nations Unies et du droit international des droits de l’homme.  À cet égard, la représentante a fait valoir la poursuite des efforts du Qatar en tant que Coprésident du Groupe d’amis interrégionaux de la responsabilité de protéger.  Pour elle, le Conseil de sécurité a une responsabilité spéciale pour mettre en œuvre ce principe, ses membres permanents devant notamment s’abstenir d’exercer leur droit de veto dans les cas d’atrocités de masse. 

M. LUIS ANTONIO LAM PADILLA (Guatemala) a rappelé, à son tour, que la responsabilité de protéger incombe d’abord et avant tout aux États.  Membre du Groupe des Amis de cette responsabilité, le Guatemala, a dit son représentant, insiste sur « l’urgence » de prévenir les atrocités criminelles.  Il a appuyé l’initiative franco-mexicaine et le Code de conduite du Groupe ACT, avant d’exhorter tous les États à ratifier la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide et le Statut de Rome.  

Mme HESSA MUNEER MOHAMMED RASHED ALATEIBI (Émirats arabes unis) a rappelé d’emblée que si un état n’est pas en mesure d’assurer la protection de sa population, il lui incombe de demander l’aide de la communauté internationale.  L’intervention militaire doit être le dernier recours lorsque tous les autres moyens auront été épuisés, a-t-elle souligné.  Elle a appuyé l’initiative franco-mexicaine visant à limiter l’utilisation du droit de veto en cas d’atrocités de masse ainsi que le Code de conduite du Groupe ACT.  Elle a ensuite mis l’accent sur l’importance des mécanismes d’alerte précoce pour la prévention des atrocités de masse et appelé à encourager la tolérance pour contrer l’incitation à la haine.  Mme Alateibi a par ailleurs souligné que les femmes sont primordiales pour la consolidation de la paix.  Les Émirats arabes unis ne ménageront aucun effort pour promouvoir l’autonomisation de la femme dans la région arabe, a assuré la représentante.

M. DAMIANO BELEFFI (Saint-Marin) a regretté que malgré tous les efforts, certaines populations sont toujours menacées par des atrocités de masse, notamment en Syrie, au Myanmar et au Yémen.  Il a demandé au Bureau du Conseiller spécial du Secrétaire général pour la responsabilité de protéger de faire rapidement part des crises en cours aux États Membres de l’ONU, l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et au Conseil des droits de l'homme.  Il a appuyé les enquêtes d’établissement des faits de l’ONU ainsi que la CPI, notant que ses activités sont essentielles dans la lutte contre l’impunité et les atrocités criminelles, de même que le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine.

Le représentant a ensuite condamné le nombre croissant d’attaques préméditées contre des écoles, des hôpitaux, des lieux de cultes, ainsi que les attaques sexistes, et a appelé à associer les dirigeants religieux et de la société civile aux efforts de prévention des crimes de haine et d’atrocités de masse.  Il a par ailleurs appelé la communauté internationale à impérativement respecter les droits des réfugiés.

M. CHO HYUN (République de Corée) a souligné le fossé qui persiste entre les engagements pris en 2005 pour faire de la responsabilité de protéger une réalité et la mise en œuvre même de ce principe.  Nous devons, a-t-il martelé, mettre un terme à l’impunité et insister sur la responsabilité première des États de protéger leurs populations contre les atrocités criminelles.  Le représentant a constaté avec regret que la « dynamique politique » au sein du Conseil de sécurité fait qu’il est difficile « d’agir de manière décisive ».  Aussi a-t-il encouragé ses membres à faire leur la proposition franco-mexicaine de suspendre le droit de veto dans les cas d’atrocités de masse.  Il faut, a-t-il ajouté, mieux mobiliser le système des droits de l’homme des Nations Unies et reconnaître que les opérations de maintien de la paix sont un outil « particulièrement efficace » pour donner vie à la responsabilité de protéger, à condition toutefois qu’elles aient les mandats et les moyens d’assurer la protection des civils.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a commencé par souligner la responsabilité première qui incombe aux États de protéger leur population, la communauté internationale pouvant les aider à s’en acquitter.  Toutefois, lorsque les autorités manquent à leur obligation, une action collective s’impose et les Nations Unies ne peuvent s’y soustraire, a fait valoir le représentant, rappelant le Document final du Sommet mondial de 2005.  Certes, a-t-il ajouté, les Nations Unies « ne sont pas là pour remplacer l’État », mais lorsqu’une population est désespérée face à des crimes de haine, elles se doivent d’aider les États à assumer leur responsabilité.  Le représentant en a voulu pour preuve la situation dans son propre pays, où depuis le début de cette année, l’armée mène une véritable répression contre la population civile, ciblant en particulier des manifestants pacifiques qui demandent le rétablissement de l’ordre démocratique. 

« L’armée nous attaque dans les rues, dans nos maisons, dans les écoles, les hôpitaux, les villages et les lieux de culte », a alerté le représentant.  À ce jour, a-t-il indiqué, l’armée a exécuté sommairement et de manière extrajudiciaire près de 800 civils innocents et torturé des centaines d’autres, les soumettant à des traitements cruels et dégradants.  L’armée s’en prend à la population civile avec une brutalité extrême et parmi ses victimes figurent aussi des enfants et de simples passants.  Récemment, a poursuivi le représentant, l’armée a tiré à l’arme lourde dans une ville, tout en utilisant les habitants comme boucliers humains.  Au nombre des victimes, on compte des dirigeants élus démocratiquement et des militants, qui sont placés en détention sans inculpation et sans que soient respectées les procédures régulières.  Du fait de ces atrocités, des civils ont fui en masse, a-t-il encore relaté, avant de faire remarquer que ces atrocités et cette violence contre des civils est largement connue et documentée.  Le Gouvernement d’union nationale a dûment transmis aux organismes des Nations Unies plus de 500 000 documents prouvant les crimes contre l’humanité commis par une armée qui viole quotidiennement les normes fondamentales du droit international. 

L’armée n’a jamais eu l’intention de respecter ses obligations, a asséné le représentant, selon lequel le haut commandement ne jouit d’aucune légitimité.  Dans un monde régi par l’état de droit, il ne saurait représenter le peuple du Myanmar, a-t-il martelé, accusant l’armée de n’agir que pour elle-même.  Face à elle, le Gouvernement d’union nationale est fait de représentants de tous les groupes ethniques du pays et jouit du soutien de la population civile.  Au nom du peuple et du Gouvernement d’union nationale, il a remercié les États Membres et les organes des Nations Unies qui ont fermement condamné le coup d’état militaire et sa brutalité.  Cependant, a-t-il déploré, les appels de la communauté internationale, y compris ceux du Conseil de sécurité, ont été ignorés par la junte militaire.  Le 27 mars, Journée des forces armées au Myanmar, l’armée a assassiné 130 personnes non armées. 

Dans ce contexte, nous avons besoin du soutien de la communauté internationale et attendons du Conseil de sécurité qu’il oppose une riposte « unifiée, décisive et opportune » à cette situation atroce.  Dans le droit fil du principe de responsabilité de protéger, le Gouvernement d’union nationale a pris toutes les mesures possibles face à ces actes inhumains.  Il appelle maintenant la communauté internationale à faire respecter ce principe, a souligné le représentant, avant d’énoncer un ensemble de mesures à prendre de toute urgence: protéger le peuple du Myanmar face aux crimes contre l’humanité; déclarer des zones d’exclusion aériennes pour éviter un bain de sang; imposer des sanctions coordonnées contre l’armée et ses entreprises; instaurer un embargo sur les armes à l’armée; décider d’un gel des avoirs financiers de l’armée et des membres du régime; interdire les flux financiers illicites bénéficiant à l’armée; fournir une aide humanitaire à la population; tenir l’armée comptable de ses actes et des crimes commis; et reconnaître le Gouvernement d’union nationale comme représentant légitime du peuple du Myanmar.  Face à cette cruauté, a conclu le représentant, la population du pays fuit non pas des combats entre deux parties en guerre, mais une armée brutale et déterminée à la faire taire. 

Mme VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda) a appuyé le rôle important des Conseillers spéciaux sur la prévention des génocides et la responsabilité de protéger.  Nous ne saurions tout simplement pas débattre de « beaux principes » pendant que des innocents continuent d’être massacrés par des gouvernements et des forces censées les protéger.  La représentante a jugé inadmissible que les auteurs de crimes restent souvent impunis.  Accorder la priorité à la prévention est plus important que jamais, a-t-elle ajouté, avant de préciser que son pays a créé des institutions « fortes » qui sont aujourd’hui les garantes de la paix, de la sécurité et d’une gouvernance inclusive, préservant l’égalité de tous les Rwandaises et Rwandais. 

Nous appuyons, a dit la représentante, l’accent mis sur la prévention qui est toujours plus souhaitable que la réaction et la primauté du droit fait partie intégrante de cette prévention.  Elle a donc conseillé d’investir dans la pérennisation de la paix, par le renforcement des institutions judiciaires.  Elle a souligné la pertinence de la stratégie et du Plan d’action des Nations Unies pour la lutte contre les discours de haine.  Établir les responsabilités pour les atrocités de masse participe de la dissuasion, a insisté la représentante et citant son Président, M. Paul Kagame, elle a dit: « si nous ne pouvons revenir en arrière, nous pouvons au moins façonner l’avenir et faire en sorte que ce qui est arrivé ne se reproduise plus ».

Mme MAITÊ DE SOUZA SCHMITZ (Brésil) a constaté qu’en dépit des effets dévastateurs de la pandémie de COVID-19 et des appels au cessez-le-feu mondial lancés par l’ONU, les hostilités se poursuivent dans de nombreuses régions du monde, avec des conséquences dramatiques pour les populations.  Une fois qu’un conflit éclate, a-t-elle noté, un cercle vicieux s’enclenche qu’il est difficile d’enrayer.  C’est la raison pour laquelle la prévention doit être une priorité absolue de la communauté internationale, a estimé la représentante, se disant convaincue qu’ensemble, les États Membres peuvent renforcer la prévention du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité, notamment via le renforcement des capacités des États concernés.  Dans ce même esprit, il importe, selon elle, d’élaborer des politiques contribuant à l’édification de sociétés plus tolérantes et plus ouvertes. 

Pour la déléguée du Brésil, l’application de la responsabilité de protéger exige toutefois « clarté et précision ».  Elle s’est ainsi déclarée préoccupée par le fait que le rapport du Secrétaire général fasse à nouveau référence aux termes « atrocités criminelles ».  Plus inquiétant encore, a-t-elle dit, le rapport « tente d’introduire une définition de ces atrocités ».  Nous, les États Membres, devrions résister à la tentation d’accepter ce type de « concepts vagues », a-t-elle fait valoir, relevant que la notion d’« atrocité criminelle » n’est pas définie par le droit international.  Chaque type de crime découle de facteurs différents et exige des mécanismes de prévention distincts. 

La représentante a indiqué que le Brésil s’est porté coauteur de ce projet de résolution « d’une importance capitale » et considère l’Assemblée générale comme le lieu idoine pour discuter de la responsabilité de protéger.  Elle s’est néanmoins étonnée que, plus de 15 ans après le Sommet mondial de 2005, une notion « aussi consensuelle » demande autant de discussions pour être incluse à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Il est plus que temps que les États Membres parlent de l’opérationnalisation de la responsabilité de protéger, a-t-elle plaidé en conclusion, non sans souligner que les crimes relevant de cette responsabilité sont « évitables ». 

M. ION JINGA (Roumanie) a voulu que les États Membres fassent de la responsabilité de protéger une réalité, soulignant que son gouvernement, après avoir ratifié la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, s’est doté d’une législation pertinente.   Partisane d’un ordre international fondé sur des règles, la Roumanie, a dit son représentant, considère que le respect des droits de l’homme est une composante essentielle de la responsabilité de protéger.  Nous avons mis l’accent sur ce point dans notre candidature à un siège au Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour l’exercice 2023-2025, a souligné le représentant.  Il a jugé impératif de lutter contre les discours de haine et les incitations à la haine, en indiquant que son pays est en train d’élaborer un projet de loi contre l’antisémitisme.  Il a, en conclusion, appuyé le projet de résolution dont est saisie l’Assemblée générale.

Mme FIONA WEBSTER (Australie) a souligné que la communauté internationale partage l’objectif commun de prévenir les atrocités criminelles et a donc appuyé le projet de résolution dont est saisie l’Assemblée.  Réaffirmant l’indivisibilité des principes de la Charte, elle a encouragé le Secrétaire général à inclure dans ses rapports de nouvelles recommandations sur la mise en œuvre de la responsabilité de protéger.  Nous devons, a dit la représentante, intégrer pleinement cette responsabilité dans tout le système des Nations Unies, et encourager le Conseil de sécurité à examiner aussitôt que possible les situations menacées d’atrocités criminelles.  Elle a aussi appelé les membres du Conseil à soutenir sans ambiguïté l’initiative franco-mexicaine et le Code de conduite du Groupe ACT.

M. CHRISTIAN BRAUN (Luxembourg) a regretté que les choses n’aient guère changé sur le terrain de la responsabilité de protéger depuis 2005: le nombre des crimes les plus graves n’a pas diminué.  Certains États, souvent d’ailleurs « en délicatesse » avec la responsabilité de protéger et les obligations qu’elle implique, refusent d’engager le débat, en prétextant des principes de souveraineté nationale et de non-ingérence dans les affaires intérieures.  Ces principes sont consacrés par la Charte des Nations Unies mais elle ne donne en aucun cas « carte blanche » pour violer impunément des droits de l’homme, a fait observer le représentant.  Ces États nous disent craindre que la responsabilité de protéger soit manipulée politiquement et serve à provoquer des changements de régime, mais ils oublient un peu vite que cette responsabilité leur incombe en premier lieu.  

Le mécanisme de ladite responsabilité est « graduel » et prévoit toute une panoplie de mesures, « pacifiques, diplomatiques ou humanitaires », a ajouté le représentant.  Il a profité du débat pour dénoncer le fait que le Conseil de sécurité soit trop souvent paralysé par l’exercice du droit de veto.  Il s’est en revanche félicité du rôle « indispensable » de la société civile, tant au niveau local qu’au niveau international, où des ONG comme « Global Centre for the R2P » aident les pays soucieux de s’acquitter de leurs obligations internationales.  Le représentant a encouragé tous les États Membres à désigner un point focal afin de maintenir à la fois l’élan et la pression pour concrétiser le concept de responsabilité de protéger.  Il a appuyé le projet de résolution présenté aujourd’hui qui, même si elle est procédurale, ne manquera pas d’envoyer un « signal fort » de notre engagement commun.

M. MARK ZELLENRATH (Pays-Bas) a mis l’accent sur l’importance de la résolution de l’Assemblée générale sur la responsabilité de protéger, en faisant valoir que les atrocités criminelles touchent à la nature même des sociétés.  Il faut des efforts à tous les niveaux pour lutter contre ces atrocités et atténuer leur risque, que ce soit par des mécanismes d’alerte précoce ou des interventions à temps.  Le représentant a insisté sur le fait que le Conseil de sécurité a un mandat en la matière.  La comparution des criminels en justice est un moyen, a souligné le représentant, de rompre le cycle de l’impunité et de la violence.  Il a insisté sur le rôle de « premier plan » que la Cour pénale internationale doit jouer à cet égard.  Concluant sur la coopération entre New York et Genève, il a souligné la contribution pertinente du Conseil des droits de l’homme au principe de la responsabilité de protéger.  Il a encouragé la Haut-Commissaire aux droits de l’homme à prévenir le Conseil de sécurité dès qu’elle entrevoit un risque d’atrocités de masse. 

Mme MARIE CHATARDOVÁ (République tchèque) a déclaré que les trois piliers de la responsabilité de protéger doivent être pleinement mis en œuvre.  En outre, l’établissement des responsabilités en cas de crimes graves représente un moyen important d’empêcher qu’ils ne se répètent, d’où le rôle essentiel que doit jouer la Cour pénale internationale dans la lutte contre l’impunité.  La médiation, les sanctions et autres mesures doivent également être mobilisées dans le cadre des efforts de prévention, avec au centre le respect des droits de l’homme, a poursuivi la délégation.  En outre, la pandémie de COVID-19 a mis en évidence des inégalités persistantes, qui rendent la responsabilité de protéger d’autant plus cruciale, a-t-elle ajouté.  La représentante a exprimé son soutien au projet de résolution présenté par la Croatie.

M. STEFANO STEFANILE (Italie) a déclaré que malgré certains progrès tangibles sur le plan de la prévention des atrocités criminelles, le monde continue d’être le témoin de violations répandues des droits humains et du droit international humanitaire.  Il a également constaté que la COVID-19 a aggravé les souffrances des populations vivant dans les zones de conflit.  Répondre aux racines des atrocités criminelles est essentiel pour faire progresser les principes de responsabilité de protéger, a-t-il souligné pour ensuite appeler à renforcer les outils de détection précoce.  L’inclusion systématique de référence à la protection des civils dans les mandats des opérations de paix est également essentielle.

Il a appelé à établir une stratégie transversale pour lier les différents agendas de l’ONU, « allant de la protection des civils aux femmes, paix, et sécurité et du développement durable aux droits humains ».  Il a également insisté sur l’importance de la sexospécificité, les femmes et les filles étant disproportionnellement touchées lors des crises humanitaires.  Le renforcement de la société civile et la création de sociétés inclusives et pluralistes sont le meilleur « filet de sécurité » face aux atrocités de masse, a-t-il estimé. 

M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a dénoncé les propos tenus par un « groupe de pays » dont il a contesté la politique de « deux poids, deux mesures ».  L’on parle de la mise en œuvre de la responsabilité de protéger mais l’on se garde d’imposer une zone d’exclusion aérienne au-dessus du Territoire palestinien occupé, pour en protéger les civils, a fait observer le représentant.  Il a imputé les « profondes divergences » sur le concept aux États qui inventent des « arguments juridiques fallacieux » pour soutenir leur vision « partiale ».  (Le Webcast ayant démarré en retard, la Section des communiqués n’a pas eu accès à l’intégralité de la déclaration du représentant syrien).

M. AZRIL BIN ABD AZIZ (Malaisie) s’est déclaré « consterné » que 15 ans après le Sommet mondial et près d’un an après l’appel au cessez-le-feu mondial lancé par le Secrétaire général, le nombre des atrocités criminelles continue d’augmenter dans le monde.  Il s’est aussi alarmé de la progression des discours de haine et des incitations à la violence.  Il ne fait aucun doute, a-t-il dit, que la responsabilité de protéger commence au niveau des États et que la prévention est une priorité essentielle.  À cette aune, la communauté internationale devrait encourager les États à faire montre de responsabilité.  Néanmoins, a fait valoir le représentant, les principes de souveraineté et le consentement préalable devraient être fondamentaux quand il s’agit d’aider les États.  De même, a-t-il poursuivi, les solutions non militaires, comme la médiation, les missions d’enquête et d’établissement des faits, et les plaidoyers publics, doivent être la « première option » pour éviter l’escalade des atrocités criminelles.  « La prévention doit être la règle plutôt que l’exception », a insisté le représentant, soulignant la nécessité d’une réaction face aux premiers risques.

Il a par ailleurs plaidé pour la modération dans le recours au veto au Conseil de sécurité, en particulier pour les situations d’atrocités de masse. Le veto devrait, selon lui, être réglementé pour que la communauté internationale puisse intervenir efficacement en faveur des innocents en danger.  Par ailleurs, tout en se félicitant de la « noble intention » que représente la responsabilité de protéger, il a estimé qu’elle nécessite des discussions supplémentaires pour mieux en appréhender les contours et la mise en œuvre.  Ce n’est que grâce à une meilleure compréhension que nous pourrons en faire une norme internationale, a relevé le délégué, avant de rappeler que des divergences subsistent aussi quant à la souveraineté des États et le mandat international d’agir.  L’absence de discussion empêche le consensus et entraîne l’inaction, a-t-il martelé, assurant en conclusion que son pays est prêt à collaborer avec l’ONU et les États Membres pour éviter la tragédie des atrocités criminelles.

Mme SAŠA JUREČKO (Slovénie) a souligné que des efforts de prévention et d’alerte précoce suivis d’une action rapide sont essentiels pour éviter la répétition des échecs du passé.  Elle a appuyé l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu mondial immédiat afin d’assurer la protection des plus vulnérables face aux risques liés à l’incitation à la violence et les discours haineux basés sur l’identité en période de conflit dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  L’augmentation de la violence dans le monde démontre la nécessité urgente d’intensifier les efforts à tous les niveaux pour protéger les populations contre les futures atrocités de masse et pour construire des sociétés plus résilientes, a-t-elle insisté. 

La représentante a réaffirmé, en outre, la nécessité manifeste de tenir des dialogues réguliers sur la mise en œuvre de la responsabilité de protéger et de prévenir les atrocités de masse et a exhorté tous les États Membres à soutenir le projet de résolution en votant pour son adoption.

M. GYULA MIKE (Hongrie) a indiqué que son pays, en tant que coauteur, appuie pleinement l’adoption par consensus du projet de résolution.  Il a dit partager la préoccupation exprimée par le Secrétaire général dans son rapport en ce qui concerne l’effet ricochet de la pandémie de COVID-19 en matière de discriminations et de violences.  Se disant favorable à une amélioration de la coordination au sein des Nations Unies à cet égard, le représentant a apporté son plein soutien au travail de la Conseillère spéciale pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger.  En tant que membre du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, la Hongrie, a-t-il dit, souhaite également que soit renforcée la sensibilisation à cette notion aux niveaux national et international.

En outre, a plaidé le délégué, les efforts en matière de prévention doivent aller plus loin, avec une plus grande diffusion d’informations et un renforcement du dialogue à tous les niveaux de la société.  À cet égard, a-t-il relevé, le centre de Budapest pour la prévention des atrocités de masse joue un rôle essentiel.  Il s’ajoute au projet d’Europe centrale sur la prévention des discours de haine et d’intolérance, qui a pour objectif de créer une plateforme de coopération entre les différents pays de la région.  Enfin, a conclu le délégué, la Hongrie est attachée au renforcement du rôle des points focaux et encourage le recours à la Cour pénale internationale pour traduire en justice les auteurs d’atrocités criminelles.

Mme YOLANNIE CERRATO (Honduras) a jugé nécessaire, en ces temps difficiles pour l’humanité, de renforcer la coopération internationale pour répondre aux défis de la protection auxquels sont actuellement confrontés les pays en développement, en donnant la priorité aux droits humains, au droit international humanitaire, et aux droits des réfugiés et des migrants.  De même, a-t-elle souligné, la responsabilité de protéger ne doit pas être déconnectée des efforts consentis pour parvenir à une véritable paix durable, avec pour objectif la pleine participation des femmes et des jeunes dans tous les domaines de la société, en particulier dans la prévention et la consolidation de la paix.

La représentante a indiqué que son pays, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies, s’est joint à l’appel à un cessez-le-feu mondial lancé par le Secrétaire général en juin 2020.  Pour le Honduras, a-t-elle dit, la responsabilité de protéger est une priorité, comme en attestent les actions prises ces dernières années par plusieurs de ses institutions publiques avec la société civile.  Elle a ainsi fait état d’une formation dispensée par le Ministère des droits de l’homme entre 2018 et 2021 à 4 361 membres des forces armées.  Durant la même période, une centaine de fonctionnaires des Ministères des droits de l’homme, de la sécurité et de la défense ainsi que d’autres institutions publiques ont été formés à la prévention des atrocités de masse, grâce à l’Institut Auschwitz pour la prévention du génocide.

Le Honduras, a ajouté sa représentante, participe aussi activement depuis 2012 au Réseau latino-américain pour la prévention du génocide et des atrocités de masse.  Elle a conclu son intervention en réitérant la détermination de son pays à respecter le Statut de Rome et à continuer de progresser avec les autorités compétentes dans la prévention des atrocités criminelles et sa responsabilité de protéger le peuple hondurien.

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a déclaré qu’il est de notre devoir de redoubler d’efforts pour s’assurer que les populations civiles du monde entier bénéficient d’une mise en œuvre concrète de la notion de la responsabilité de protéger.  Elle s’est dite inquiète de la propagation des idéologies de haine, des vagues de désinformation ainsi que de la participation de groupes non étatiques à des conflits de plus en plus complexes et nombreux.  Si le Conseil de sécurité ne parvient pas à mettre fin ou à prévenir les crimes graves, il revient alors à l’Assemblée générale d’agir, y compris pour mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur le programme « femmes, paix, sécurité ».  En effet, travailler avec les femmes dans le domaine de la consolidation de la paix, a-t-elle rappelé, renforce la prévention des crimes graves.  De même, il faut aussi inclure les organisations régionales et sous-régionales, qui doivent être mobilisées en raison de leur bonne connaissance des situations sur le terrain.  La représentante a souligné la nécessité de reconnaître la responsabilité juridique des puissances occupantes vis-à-vis des populations concernées, avant d’annoncer son vote en faveur du projet de résolution présenté aujourd’hui.

M. PHILIPPE KRIDELKA (Belgique) a estimé que cette réunion s’inscrit dans le droit fil des engagements pris lors du Sommet mondial de 2005.  Dans le Document final du Sommet mondial, a-t-il rappelé, l’accent a été mis sur la responsabilité première des États de protéger leurs populations.  Il ne peut y avoir aucune ambiguïté à ce sujet, la souveraineté nationale ne faisant pas obstacle à la responsabilité de protéger.  Au contraire, a-t-il relevé, « il s’agit de deux concepts qui se renforcent mutuellement ».  Notant que, depuis 2009, les rapports annuels du Secrétaire général ont fourni des orientations « claires et concrètes » sur la mise en œuvre du concept, le représentant a souhaité que le débat conceptuel n’empêche pas de continuer à travailler à son opérationnalisation.  Nous le devons aux populations victimes d’atrocités multiples au Yémen, au Myanmar, en Syrie, en Éthiopie ou ailleurs, mais aussi à celles qui se trouvent dans des pays où il y a des risques d’atrocités.  C’est dans cet esprit, a-t-il indiqué, que la Belgique a rejoint le groupe transrégional à l’origine du projet de résolution soumis aujourd’hui.

Le représentant a ensuite invité le Conseil de sécurité à utiliser les nombreux outils dont il dispose pour agir dans le domaine de la prévention des atrocités.  Durant son mandat en 2019 et 2020, a-t-il encore rappelé, la Belgique a mis un accent particulier sur des mesures spécifiques au bénéfice des filles et des jeunes femmes, conformément à la priorité qu’elle accorde aux droits de l’enfant, aux droits des femmes et au programme « femmes, paix et sécurité ».  Nous avons également plaidé avec succès pour l’organisation régulière de briefings informels avec des représentants du Secrétariat, a-t-il ajouté, jugeant que ceux-ci doivent renforcer la capacité d’alerte rapide du Conseil qui serait ainsi mieux informé de situations susceptibles de conduire à des atrocités.   

Dans cette veine, le représentant a estimé nécessaire de resserrer les liens entre le Conseil de sécurité à New York et les organes et mécanismes des droits humains à Genève.  Au-delà, a-t-il relevé, le Conseil de sécurité peut également contribuer, dans le cadre des mandats des opérations de paix, au renforcement des capacités en matière d’état de droit, de bonne gouvernance et d’accès à la justice.  Pour dissuader la commission de nouvelles atrocités criminelles, il peut aussi appuyer des procédures judiciaires nationales et des juridictions hybrides, voire renvoyer des situations à la Cour pénale internationale, a souligné le délégué.  En cas de situation d’atrocités de masse, le Conseil doit aussi être en mesure d’adopter des mesures coercitives si nécessaire.  Sur la base de ce principe, la Belgique, a conclu son représentant, a adhéré au Code de conduite du Groupe ACT et apporte son ferme soutien à l’initiative franco-mexicaine visant à encadrer le droit de veto en cas de crimes d’atrocité.  Le représentant n’a pas manqué de saluer le travail « remarquable » du Bureau de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger. 

M. GEORG HELMUT ERNST SPARBER (Liechtenstein) a considéré que la responsabilité de protéger peut être appliquée par des moyens diplomatiques ou par des moyens plus vigoureux, notamment au Conseil de sécurité.  Il a encouragé ce dernier à adopter l’initiative franco-mexicaine et le Code de conduite du Groupe ACT, pour changer la « culture politique ».  Il s’est prononcé pour que l’Assemblée générale se saisisse d’une situation quand le Conseil n’est pas en mesure de prévenir ou de mettre fin à des atrocités.  Les États doivent promouvoir l’état de droit, notamment en reconnaissant l’importance du Statut de Rome.

M. NAM HYOK KIM (République populaire démocratique de Corée) a estimé que la notion de la responsabilité de protéger doit se fonder sur les principes consacrés par la Charte de l’ONU et le droit international.  Pour le représentant, cette responsabilité « relève » strictement de la souveraineté de l’État concerné.  Mais nous voyons, a-t-il estimé, que cette notion n’est qu’une autre façon de qualifier les interventions étrangères, rejetées par le passé par toute la communauté internationale.  Le respect de la souveraineté nationale, de l’intégrité territoriale et de la non-ingérence constitue la « pierre angulaire » de la Charte de l’ONU et des relations internationales, a-t-il fait valoir.  De fait, l’idée qu’un pays tiers assume la responsabilité de protéger une population face aux crimes de génocide, aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité fait fi de la capacité de l’État concerné de le faire et représente une violation de sa souveraineté nationale.  Comme le démontre déjà la réalité actuelle, les pays en développement sont « victimes » de la mise en œuvre de cette notion qui ne devrait même pas faire l’objet de discussions aux Nations Unies, a conclu le représentant. 

M. OMAR KADIRI (Maroc) a rappelé que son pays a toujours privilégié une approche « consensuelle » de la responsabilité de protéger, convaincu que la prévention devait être « holistique ».  Rappelant la « relation d’intersection » entre les trois piliers de la responsabilité de protéger, et réitérant que le dernier incombe en premier lieu aux États, le délégué a souligné l’importance du renforcement de la résilience nationale.  Les différents organes des Nations Unies pourraient mieux utiliser les instruments dont ils disposent pour prévenir le génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le nettoyage ethnique.  Prenant pour exemple l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme, « bien placé pour soutenir les efforts de prévention », il a encouragé les États Membres à exploiter davantage ce processus en tant que mécanisme préventif. 

M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) s’est dit très attaché à la responsabilité de protéger, et a appuyé le projet de résolution dont il s’est porté coauteur.  Il a insisté sur le rôle du Conseil de sécurité en matière de prévention des atrocités criminelles et l’a incité à tenir des réunions d’information avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  Il a appuyé l’abandon du droit de véto en cas d’atrocités criminelles, avant de demander aussi au Secrétaire général de donner la priorité à la prévention.  À cet égard, il a souligné l’importance de l’assistance technique pour renforcer les capacités en matière d’alerte précoce.  L’établissement des responsabilités est aussi un instrument important de la prévention des atrocités criminelles et c’est la raison, a expliqué le représentant, pour laquelle nous avons appelé à plusieurs reprises le Conseil de sécurité à renvoyer certaines affaires devant la Cour pénale internationale. 

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a dénoncé la politique de « deux poids, deux mesures » et l’absence de volonté politique, qui expliquent le fossé entre la notion de responsabilité de protéger et sa mise en œuvre.  Il a pointé un doigt accusateur sur l’Arménie, qui a lancé une « guerre à grande échelle » contre son pays et continue d’occuper une partie du territoire azerbaïdjanais, après qu’une partie de sa population a été « décimée » et ses villages, « rasés ».  Ces opérations militaires s’inscrivent dans le cadre d’une campagne de « nettoyage ethnique » intentionnelle et démontrent que les agissements de l’Arménie constituent des crimes graves, au regard du droit international.  Le 27 septembre 2020, nous avons vu le résultat de l’impunité dont jouit l’Arménie depuis 20 ans, s’est indigné le représentant, qui a fait état de tirs de missile bien au-delà de la ligne de front, touchant des zones résidentielles et faisant des dizaines de pertes en vies humaines, des centaines de blessés et des dizaines de milliers de personnes déplacées.  La nouvelle réalité qui résulte de l’Accord trilatéral du 10 novembre 2020 et du 10 janvier 2021 est une voie pour la coopération régionale.  Pourtant, a accusé le représentant, l’Arménie refuse de dévoiler la localisation des mines qu’elle a disséminées.  Le niveau de haine et de xénophobie actuel est inimaginable: quiconque essaie de promouvoir la coopération pacifique avec l’Azerbaïdjan est considéré comme un traître en Arménie, a affirmé le représentant. 

Mme INDIRA GUARDIA GONZÁLEZ (Cuba) a estimé d’emblée qu’on ne peut pas considérer la responsabilité de protéger comme un principe international, la notion étant loin d’être définie et acceptée par tous les États Membres.  Dès lors, a-t-elle souligné, parler de la mise en œuvre de ce principe n’est pas possible, sans consensus sur le champ d’application.  Constatant que de nombreuses délégations ont manifesté leur désaccord avec ce terme, la représentante a prévenu qu’en l’absence d’un accord unanime, certaines notions peuvent être facilement manipulées.  La communauté internationale doit d’abord et avant tout encourager les États à assumer leur responsabilité première de protéger leurs populations, sinon on pourra toujours se demander qui prend la décision et à quel moment la communauté internationale doit assurer cette responsabilité.  Qui va conclure qu’un État ne protège pas sa population et qui va décider d’une intervention?  Doit-on adhérer au « prétendu droit d’intervention »? 

Nous condamnons fermement, a poursuivi la représentante, les crimes de génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le nettoyage ethnique.  Mais nous militons pour un système respectueux de la Charte et du droit international, et qui applique le principe de consentement préalable.  Concentrons-nous sur les causes sous-jacentes des conflits susceptibles de se transformer en situations extrêmes et méfions-nous d’un concept de la responsabilité de protéger qui cache mal l’idée d’avoir un outil supplémentaire pour faciliter l’ingérence et les changements de régime.  

M. SAMUEL MONCADA (République bolivarienne du Venezuela) a réaffirmé « le rôle central de l’État » en tant que garant de la sécurité de sa population à tout moment.  Il a rappelé qu’il a plusieurs fois dénoncé le fait que la notion de responsabilité de protéger, promue à l’origine à des fins altruistes, ait dégénéré en un instrument d’intervention « coloniale » par « les mêmes puissances qui menacent l’indépendance et l’intégrité territoriale du Venezuela ».  Il s’est étonné de ce que ces « puissances militaires » prétendument défenseurs du concept, s’agissant de son pays, ferment les yeux devant Israël, « puissance occupante » et auteur « de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et d’un nettoyage ethnique contre le peuple palestinien ».  Voilà une « application sélective » d’un concept que nous savons tous « au service du colonialisme ».

Le représentant a aussi dénoncé les agissements du Gouvernement colombien, pointant du doigt les assassinats de dizaines de manifestants et de centaines de leaders politiques, sociaux et communautaires, d’autochtones et de défenseurs des droits de l’homme.  Mais, a-t-il fait observer, nous ne voyons pas « les puissances interventionnistes » invoquer la responsabilité de protéger dans ce cas.   Il a rejeté l’idée de soutenir le projet de résolution dont est saisie l’Assemblée générale et a préféré appeler au strict respect de la Charte des Nations unies, « le meilleur instrument juridique créé par l’humanité pour défendre la paix, l’indépendance et les droits de l’homme de nos peuples ».

Mme ELENE AGLADZE (Géorgie) a réaffirmé le soutien de sa délégation à l’initiative sur la suspension du droit de veto en cas d’« atrocités criminelles ».  La représentante a apporté son soutien aux mandats des Conseillers spéciaux pour la responsabilité de protéger et pour la prévention du génocide, tout en espérant que le projet de résolution présenté aujourd’hui sera adopté. 

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a accueilli favorablement la stratégie et le plan d’action des Nations Unies sur les discours de haine.  L’Arménie, dont le peuple a subi les horreurs du génocide au début du XXe siècle, continuera de soutenir l’action précoce pour prévenir les atrocités criminelles, a promis le représentant.  Évoquant « la violence brutale et à grande échelle » déclenchée au milieu de la pandémie mondiale dans le Haut-Karabakh, « mettant la vie de milliers de civils et l’ancien patrimoine chrétien arménien en danger », il a alerté la communauté internationale sur le niveau dangereusement croissant des discours de haine et de la rhétorique raciste qui domine le discours politique en Azerbaïdjan.

Le délégué a cité le refus de l’Azerbaïdjan de libérer les nombreux prisonniers de guerre et otages civils toujours en captivité, en violation du droit humanitaire international, les provocations permanentes que sont les incursions sur le territoire arménien, ainsi que la vaste campagne publique de « déshumanisation » des Arméniens, comme le « parc des trophées militaires » qui vient d’ouvrir et que plusieurs médias internationaux ont surnommé « parc thématique de la haine nationale ».  Ces faits montrent que l’idéologie génocidaire n’appartient pas seulement à l’histoire, a prévenu le délégué arménien.  Fermement engagée à faire avancer le programme de prévention et partageant l’opinion selon laquelle la responsabilité de la prévention des atrocités criminelles peut être renforcée par un dialogue inclusif et des médias libres, il a salué le rôle central du Bureau pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger.  

M. OLEKSIY ILNYTSKYI (Ukraine) a exprimé sa gratitude au Secrétaire général et au Bureau de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger pour le rapport de cette année.  La responsabilité de protéger reste un « défi mondial constant et un impératif permanent ».  Malheureusement, a-t-il commenté, certains pays qui s’étaient engagés en sa faveur il y a 15 ans tentent aujourd’hui de s’opposer au débat et à l’inscription de la question à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Le concept de la responsabilité de protéger exclut totalement toute possibilité d’utilisation « secrète » de la force militaire contre un autre État, pour prétendument protéger la population et finir par occuper un territoire.  Pourtant, a-t-il constaté, l’exploitation de cette notion à des fins stratégiques et sécuritaires se poursuit.  L’Assemblée générale a dûment condamné l’occupation temporaire de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol par la Fédération de Russie, montrant son intolérance totale aux manipulations des principes de la responsabilité de protéger. 

Malgré cela, les forces d’occupation russes continuent de refuser l’accès de la Crimée aux mécanismes internationaux des droits de l’homme pour évaluer la situation sur le terrain et faire des recommandations en matière d’alerte rapide.  Ce pays néglige également la vie et la sécurité de la population ukrainienne dans certaines zones temporairement occupées des régions de Donetsk et de Louhansk et mène des actions contraires à l’esprit et à la lettre de la responsabilité de protéger, a ajouté le délégué.  Dans le même temps, a-t-il poursuivi, l’occupation de certaines parties du territoire limite la capacité de l’Ukraine à mettre en œuvre le premier pilier de la responsabilité de protéger.  En Crimée, le régime d’occupation russe refuse l’accès aux observateurs internationaux des droits de l’homme.  Dans le contexte de ce débat, a plaidé le représentant, il faut dire que les droits de l’homme et la présence humanitaire constituent un élément essentiel de tout mécanisme de prévention.  L’impunité pour le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, et le refus d’enquêter et de poursuivre les responsables de ces crimes entraîneront leur récurrence et saperont nos efforts multilatéraux en matière de responsabilité de protéger, a prévenu le représentant. 

Évoquant ensuite les deuxième et troisième piliers, le représentant a jugé qu’une responsabilité particulière incombe au Conseil de sécurité.  Cependant, a-t-il déploré, le recours au veto ou la simple menace de l’utiliser peut bloquer la réponse de cet organe dans des situations où une action urgente est nécessaire pour protéger les civils.  À cet égard, il a réaffirmé la position ferme de son pays sur la nécessité d’éliminer progressivement le veto en tant qu’obstacle majeur à la capacité du Conseil d’agir efficacement dans certaines situations.  Il a rappelé que son pays soutient l’initiative franco-mexicaine et le Code de conduite du Groupe ACT.  Le délégué s’est également dit convaincu que le recours au veto devrait également être limité dans les cas où un membre permanent est directement impliqué dans le conflit examiné par le Conseil ou est partie à un différend. 

Pour Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana), il faut reconnaître l’obligation morale de protéger les populations exposées aux crimes de guerre, aux génocides et autres atrocités criminelles.  Elle a salué l’accent mis par l’ONU sur les efforts collectifs, avec les mécanismes régionaux et nationaux, pour prévenir les atrocités criminelles et a appuyé les recommandations faites par le Secrétaire général dans son rapport.  La responsabilité de protéger est l’expression d’un engagement « moral et politique », a estimé la représentante qui s’est dite encouragée par le soutien à ce principe.  S’agissant de sa mise en œuvre, elle a insisté sur la prévention qui est « fondamentale ».  Elle s’est dite favorable aux mécanismes d’alerte rapide en amont, mais aussi à l’établissement des responsabilités par le truchement de la Cour pénale internationale notamment.  Le Conseil des droits de l’homme peut également contribuer à identifier les foyers de risques, a estimé la représentante, avant de plaider pour un engagement transparent, une approche concertée et des partenariats vitaux.  Elle a encouragé les États Membres à désigner, à l’instar de son pays, un point focal pour le suivi de la responsabilité de protéger au niveau national.

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a plaidé en faveur du rôle des femmes, qui jouent un rôle fondamental dans la prévention des violences et dans le règlement des conflits.  Pour la délégation, il faut aussi garantir l’établissement des responsabilités dans les violences sexuelles, qui prennent souvent pour cible les femmes et peuvent constituer des crimes graves au regard du droit international.  En sa qualité de membre non permanent du Conseil de sécurité, l’Irlande, a dit le représentant, tient compte des recommandations formulées par les Conseillers spéciaux pour la responsabilité de protéger et pour la prévention du génocide.  Il a apporté son soutien à la proposition franco-mexicaine et a renouvelé son appui au projet de résolution présenté par la Croatie. 

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a rappelé que les femmes et les filles sont victimes, de manière disproportionnée, des atrocités, comme actuellement en Éthiopie où les informations font état de violences sexuelles et sexistes généralisées.  Il a dénoncé la guerre « odieuse » qui est menée dans le Tigré « contre le corps des femmes » et souligné que quand les citoyens ne sont pas protégés par leur État, la communauté internationale est appelée à intervenir.  La prévention, a-t-il dit, vient avant l’établissement des responsabilités.  Tout doit être fait pour prévenir ces actes indicibles.  Les États-Unis, a-t-il dit, s’attachent en effet à renforcer les activités de prévention, comme les y oblige la loi « Elie Wiesel », dont le but est de reconnaître les signes d’escalade et d’atrocités potentiels.  En parallèle, la Maison-Blanche continue de coordonner les mesures pour prévenir les atrocités qui hélas perdurent.  C’est là, quand les atrocités perdurent, que le processus d’établissement des responsabilités doit intervenir car il permet de rendre justice et de dissuader des crimes futurs.  Rien n’est plus important que la prévention des atrocités et l’établissement des responsabilités, a insisté le délégué, avant d’appuyer le projet de résolution dont est saisie l’Assemblée générale. 

Selon Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie), la prévention des atrocités est un processus continu, nécessitant des efforts soutenus aux niveaux national, régional et international.  Si la responsabilité première de la protection incombe à chaque État Membre, la communauté internationale doit aider les États à l’assumer.  Pour utiliser efficacement tous les outils de prévention disponibles, Mme Stoeva a appelé à renforcer la coordination entre les différentes entités de l’ONU, y compris le nouveau système des coordinateurs résidents, et à soutenir les efforts déployés au niveau local par les organisations de la société civile, les travailleurs humanitaires et les défenseurs des droits de l’homme.  Soulignant également le rôle important des femmes dans la prévention des atrocités criminelles, la déléguée a appelé à poursuivre les efforts pour renforcer l’égalité des sexes et promouvoir une participation égale et significative des femmes dans tous les efforts.  Mme Stoeva a enfin appelé tous les États Membres à soutenir l’adoption du projet de résolution présenté par la Croatie.

M. XING JISHENG (Chine) a rappelé à son tour l’absence de consensus sur la notion de responsabilité de protéger.  Les États Membres ne sont pas tombés d’accord sur ses critères et certains pays ont même élargi son interprétation en la faussant, a-t-il constaté.  Pour le représentant, tout cela met à mal le dialogue entre les parties et la recherche des intérêts communs.  Tout en plaidant pour qu’un consensus soit trouvé, il a regretté que certains introduisent des questions polémiques à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Nous sommes contre cette pratique et nous venons d’exprimer notre désaccord dans une lettre commune, a indiqué le délégué.  Il convient en premier lieu, a-t-il estimé, d’obtenir le strict respect la Charte de l’ONU, et en particulier ses principes de souveraineté nationale, d’intégrité territoriale, de non-ingérence, de non-agression et de règlement pacifique.  Une assistance peut être fournie aux pays, mais seulement avec leur accord et dans la recherche de l’appropriation nationale.  De plus, a poursuivi le représentant, si la prévention est une dimension clef de la réponse aux crimes les plus graves, elle doit mettre l’accent sur les causes profondes des conflits.  La communauté internationale devrait donc s’engager à réduire la pauvreté, à aider les pays en développement et à encourager la coopération internationale.  De même, le recours à la force ne doit être possible que lorsque tous les autres moyens pacifiques sont épuisés.  Enfin, a-t-il dit en conclusion, l’imposition de sanctions doit recevoir l’accord du Conseil de sécurité et être strictement limitée. 

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran) a soutenu que l’un des aspects les plus importants du principe de prévention, et un motif de grave préoccupation pour la communauté internationale, est un scénario impliquant différents types d’intervention dans les affaires intérieures d’un État, sous le prétexte de la responsabilité de protéger.  Cette responsabilité incombe d’abord à l’État concerné, a souligné le délégué iranien, qui a renvoyé aux principes édictés dans la Charte des Nations Unies.  Il y est stipulé que la communauté internationale agit « au cas par cas », et « par le biais du Conseil de sécurité ».  Le concept de prévention, a-t-il estimé, n’implique pas de mesures coercitives, mais des mesures pour endiguer la pauvreté, par exemple, et elle ne préjuge en rien l’intervention d’un État dans un autre.  Les Nations Unies doivent garder un rôle crucial: celui d’éviter la manipulation politique de la notion de prévention.

Des pays, prétendument fervents partisans de ce principe de prévention, ferment les yeux à dessein sur certains conflits et ignorent leurs engagements.  Le soutien inébranlable de certains d’entre eux aux auteurs de crimes contre le peuple palestinien montre bien les « deux poids, deux mesures » et l’hypocrisie.  L'Assemblée générale n’est donc pas le lieu idoine pour discuter de la responsabilité de protéger.  Revenons, a encouragé le représentant, à nos dialogues officieux pour faciliter le consensus.  Résolument contre la diffusion de toute « notion biaisée » visant à saper les principes de base du droit international, comme la non-ingérence dans les affaires internes, nous ne pouvons accepter des idées et des principes qui saperaient l’état de droit et pourraient être utilisés à mauvaises escient, a tranché le représentant. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a déclaré que les circonstances actuelles confèrent plus d’urgence à la prévention des atrocités criminelles, la COVID-19 ayant notamment amplifié les vulnérabilités existantes en entrainant une augmentation des incitations et des actes de violences ainsi que des discours de haine.  Elle s’est aussi inquiétée de l’escalade des conflits et des violations des droits humains dans plusieurs situations, et des risques que cela entraîne en matière d’atrocités criminelles.

La représentante a insisté sur l’importance de renforcer les mécanismes d’alerte précoce et de prévention, ainsi que sur le rôle que jouent les femmes et les jeunes dans la création de sociétés tolérantes, inclusives et résilientes.  Elle a déploré les écarts qui persistent entre les engagements pris lors du Sommet mondial de 2005 et la situation des populations exposés aux risques.  La responsabilisation doit être priorisée, autant pour rendre justice et que pour son effet dissuasif, a-t-elle estimé.

Pour Mme AYSE INANÇ ÖRNEKOL (Turquie), le rapport du Secrétaire général est une base solide pour les délibérations d’aujourd’hui.  L’ONU a un rôle crucial à jouer dans l’application du principe de la responsabilité de protéger depuis 2005, en mettant l’accent sur la prévention et l’alerte précoce et ce, « en toute impartialité ».  La représentante a salué le travail effectué dans le contexte de la pandémie, dans la lutte contre l’incitation à la haine et la désinformation.  Elle s’est enorgueillie que son pays soit en tête des efforts de médiation dans les initiatives régionales.  Pour la Turquie, a-t-elle dit, le rôle du Conseil de sécurité pourrait être renforcé dans l’application de la responsabilité de protéger.  Elle a d’ailleurs dénoncé l’inaction du Conseil dans le conflit actuel en Palestine et demandé qu’un mécanisme de protection des Palestiniens soit mis en place.

Pour ce qui est du projet de résolution d’aujourd’hui, la représentante a estimé qu’il constitue une voie pour la mobilisation d’un consensus sur le champ et les modalités d’application du concept, tout en soulignant que cela ne signifie pas qu’il faille revisiter des notions acceptées.  La responsabilité de protéger consiste, selon elle, à trouver un équilibre « délicat » entre les préoccupations de la communauté internationale et la souveraineté et l’intégrité des États.  Si ces États échouent dans la protection de leur population, alors la communauté internationale doit pouvoir intervenir, a concédé la Turquie, mais, dans la mesure où le terme génocide est un terme défini par le droit international, seule une cour appropriée peut en faire la détermination.

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a souhaité que la communauté internationale travaille davantage à la mise en œuvre du principe de responsabilité de protéger et de ses trois piliers.  Assurant que son pays participe activement aux débats sur cette questions, il a estimé que les initiatives de la communauté internationale doivent respecter à la lettre les principes de la Charte de l’ONU et du droit international.  Il a également jugé que la priorité doit être donnée au renforcement des capacités des États, en matière de prévention, celle-ci étant un outil clef aux niveaux national, mais aussi régional et international.  De même, a ajouté le représentant, il convient de renforcer le rôle des organisations régionales et des acteurs locaux.  Saluant le travail du Bureau de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger pour ce qui est de l’opérationnalisation de la prévention, il a aussi appuyé l’action menée par les Conseillères spéciales.  À ses yeux, il est nécessaire de continuer de perfectionner les outils pour obtenir les informations utiles sur les problèmes qui se posent en matière de droits humains.  Nous avons besoin d’une analyse complète qui permette de connaître les facteurs de risque et de déclencher des alertes précoces.  À cet égard, il a mis en garde contre les risques d’une inaction excessive.  En conclusion, le représentant s’est dit favorable au projet de résolution, l’objectif étant que la responsabilité de protéger soit désormais un point annuel examiné par l’Assemblée générale, que son opérationnalisation soit assurée et que les États adhèrent aux instruments internationaux de prévention. 

Pour Mme MARÍA PAULA PERDOMO (Chili), la pandémie a mis en exergue le fait que les problèmes mondiaux appellent des solutions mondiales.  Elle a réaffirmé son appui au Bureau des Nations Unies de prévention des génocides et de la responsabilité de protéger et s’est félicitée de l’inclusion de la question à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.

Mme RABAB FATIMA (Bangladesh), dont le pays est coauteur du projet de résolution, a estimé que les Nations Unies doivent jouer un rôle central dans la responsabilité de protéger, en garantissant la complémentarité avec d’autres initiatives dans le domaine de la pérennisation de la paix et du développement durable.  La prévention est au cœur de cette notion et le Conseil de sécurité doit réfléchir à son rôle en la matière.  La Cour pénale internationale, a poursuivi la représentante, doit pouvoir jouir de toute l’autorité possible pour faire face aux atrocités criminelles.  La représentante a avoué qu’elle aurait souhaité plus d’informations « concrètes » sur l’application de ce principe et sur les défis rencontrés.  Abordant les atrocités de masse contre les Rohingya, dont beaucoup se sont réfugiés dans son pays, la représentante a souligné que ces atrocités étaient prévisibles.  Pourtant, a-t-elle regretté, la communauté internationale n’a pas su réagir à temps et cela prouve bien toute la complexité de l’application de cette notion.  L’amélioration de la situation des réfugiés rohingya, a insisté la représentante, dépend des autorités du Myanmar qui doivent leur assurer un retour sûr et digne et un statut de citoyen « à part entière ».  

Pour M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka), la responsabilité de protéger met en tension souveraineté nationale et droits de la personne, mais il est possible de surmonter cette dichotomie en responsabilisant l’État, plutôt qu’en faisant de cette notion « un outil sans limite ».  L’ancien Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, avait bien insisté sur l’idée que l’intérêt national doit être repensée en « intérêt collectif ».  Il faut donc aborder la question de la responsabilité de protéger avec « délicatesse, prudence et retenue », en réaffirmant la responsabilité première de l’État concerné et le fait que l’intervention militaire se fait en dernier recours.  En toutes choses, la souveraineté nationale doit être considérée comme un principe « fondamental ».  Seul le Conseil de sécurité peut décider d’une intervention internationale et cela implique le respect du droit de veto car il faut bien l’avouer, la responsabilité de protéger peut sembler contraire à certains principes fondamentaux des Nations Unies, dont la primauté de la souveraineté nationale.  Dans les faits, cette notion n’est pas à la hauteur de son ambition, a tranché le délégué.  Trop de contradictions l’empêchent de devenir une véritable doctrine pratique, et les raisons qui ont empêché son utilisation sont les mêmes qui empêcheront son utilisation à l’avenir.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a observé à son tour que, bien que l’Assemblée générale ait entériné voilà plus de 15 ans la responsabilité de protéger, cette notion ne jouit toujours pas d’un consensus global.  Il a également estimé que les paramètres devraient être définis de manière plus précise afin d’éviter tout chevauchement ou tout malentendu avec d’autres instruments de prévention.  S’agissant notamment des modalités d’application du troisième pilier, il a jugé que ladite responsabilité ne peut être invoquée pour déclencher une intervention armée ou donner un « vernis de légitimité » à une tentative de renverser un régime. 

Pour le représentant, la responsabilité de protéger les civils contre le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité incombe à l’État concerné dans le cadre sa souveraineté.  C’est l’État qui doit s’assurer du caractère pacifique de sa société, le rôle de l’ONU étant d’aider à la prévention et de contribuer au maintien de la paix si nécessaire.  Dans ce cadre, a-t-il ajouté, la Guinée équatoriale estime que l’alerte précoce peut jouer un rôle important dans la prévention des atrocités criminelles, un mécanisme de ce type existant déjà en Afrique pour réduire les violences sur le continent.  Après s’être félicité des efforts déployés par l’ONU pour renforcer les capacités des États en matière de prévention, il a indiqué que sa délégation votera en faveur de la résolution. 

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