SC/14317

Haïti: face à une crise multidimensionnelle, les membres du Conseil de sécurité se disent favorables à la prorogation du mandat du Bureau intégré

À la veille du premier anniversaire du départ des troupes de maintien de la paix d’Haïti et de son remplacement par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), la Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti, Mme Helen La Lime, a fait, ce matin devant le Conseil de sécurité, le point sur les 12 premiers mois de fonctionnement du Bureau.  Lors d’une séance organisée sous forme de visioconférence, les membres du Conseil ont salué les efforts du BINUH et des 19 Fonds et Programmes des Nations Unies présents dans le pays, qui opèrent dans un environnement difficile marqué par une crise constitutionnelle, politique, économique et de gouvernance, avec une résurgence de la violence en toile de fond. 

Mme La Lime, qui présentait le rapport semestriel du Secrétaire général, a expliqué que la priorité tout au long de cette année avait été de créer un environnement propice pour que les secteurs clefs de la société haïtienne puissent sortir de l’impasse dans laquelle le pays est actuellement installé et le mettre sur le chemin de la stabilité et du développement durables.     Pourtant, a-t-elle concédé, Haïti lutte à nouveau contre le spectre de l’instabilité, et l’appréhension de l’avenir est de plus en plus palpable, surtout depuis l’assassinat, le 28 août, du président du barreau de Port-au-Prince, maître  Montferrier  Dorval.  Les gangs continuent de contester l’autorité de l’État, en particulier dans les quartiers les plus peuplés de Port-au-Prince, et un groupe marginal de policiers mécontents, « Fantom 509 », a semé le désordre dans la capitale en plusieurs occasions.    

Les membres du Conseil se sont impatientés face à la lenteur du processus politique depuis que le Président Jovenel Moïse a commencé à gouverner Haïti par décret exécutif le 13 janvier 2020, date à laquelle le mandat du Parlement avait expiré.  À ce jour il n’y a toujours pas de nouveau Parlement en place, du fait que les élections législatives et locales prévues en 2019 n’ont jamais pu avoir lieu.  La délégation des États-Unis a ainsi fait savoir que, pas plus tard que samedi dernier, elle avait, lors d’un entretien téléphonique, exhorté le Président d’Haïti ainsi que son gouvernement à organiser des élections législatives dès que cela serait techniquement possible, afin de rétablir le  Parlement haïtien, « pour sortir de la période  actuelle  de gouvernement par décret ».  

La Belgique et l’Allemagne ont-elles aussi regretté qu’en l’absence de Parlement, il n’ait toujours pas été possible d’arrêter un cadre et un calendrier électoral, première étape pour l’organisation d’élections libres, transparentes et crédibles.  Or, comme l’a dit la Belgique, il est urgent pour la légitimité du système politique d’arriver à u n calendrier  réaliste  pour l’organisation de ces élections.   

Pour dépasser les désaccords persistants, certains membres du Conseil, dont le Groupe des A3+1 (Afrique du Sud, Niger, Tunisie et Saint-Vincent-et-les Grenadines) ont souhaité la convocation par les différents acteurs haïtiens d’un dialogue national et la formation rapide d’un gouvernement pour sortir de l’impasse politique.    

L’histoire récente d’Haïti a montré à maintes reprises que la polarisation politique aiguë et la faiblesse des institutions de l’État sont des catalyseurs de la violence, a reconnu Mme La Lime.  Elle a toutefois rappelé que, depuis sa dernière intervention devant le Conseil, le 19 juin, plusieurs initiatives gouvernementales visant des réformes économiques et de gouvernance avaient pris de l’ampleur, non sans susciter des critiques internes.  Un nouveau code pénal a ainsi été promulgué et le Président Moïse a désigné un nouveau Conseil électoral provisoire, provoquant de vives réactions de la part de certains segments de la société haïtienne, y compris la Cour de cassation, prétendument du fait d’un manque de représentativité de l’organe et de l’ampleur de la mission qui lui a été confiée.    

Pour Mme la Lime, c’est avant tout la capacité des classes politiques et économiques d’Haïti à faire des compromis et à résoudre leurs différends sans recourir à la violence, ainsi que la capacité des institutions naissantes du pays à prendre les mesures nécessaires, qui détermineront la possibilité d’élections libres, justes et inclusives organisées dans un climat propice; rendront possibles les tentatives de redémarrage de l’économie; et permettront de régler enfin le problème permanent de l’impunité.  Or, le climat d’impunité a été encore renforcé par l’absence totale de mesures concrètes du système judiciaire haïtien pour ouvrir des poursuites judiciaires face à la montée de la violence, ont déploré plusieurs membres du Conseil, dont les États-Unis et la France.   

Pour plusieurs membres du Conseil, le caractère  multidimensionnel de la crise  haïtienne, qui rend plus difficile sa résolution, rend essentiel le rôle du BINUH, qui  accompagne  sans relâche les autorités  depuis un an.  Ces pays ont donc plaidé pour la prorogation du mandat du BINUH, sur laquelle le Conseil doit se prononcer le 15 octobre.  Ils ont aussi demandé que le Bureau intégré dispose des moyens  nécessaires à la pleine mise  en œuvre son mandat, à l’image du Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine.  Ce dernier a regretté le départ, jugé trop rapide, l’an dernier, de la dernière Mission de maintien de la paix de l’ONU dans le pays, la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), estimant qu’il avait contribué à ce que la crise politique et économique dégénère.  En avril 2019, la République dominicaine s’était abstenue lors du vote de la résolution 2466(2019), qui fixait au 15 octobre 2019 la clôture de la MINUJUSTH. 

La Section des communiqués de presse ne couvre que les déclarations faites en visioconférence dont les textes ont été transmis à temps par la Division des affaires du Conseil de sécurité.

À la veille du premier anniversaire du départ des troupes de maintien de la paix d’Haïti et de la création du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), Mme HELEN LA LIME, Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti, a fait le point sur les 12 premiers mois de fonctionnement du Bureau, qui s’est efforcé de s’acquitter de son mandat en cherchant, entre autres, à créer un environnement propice pour que les secteurs clefs de la société haïtienne sortent de l’impasse dans laquelle le pays est actuellement installé et à le mettre sur le chemin de la stabilité et du développement durables.   

Pourtant, Haïti lutte à nouveau contre le spectre de l’instabilité, a concédé la Représentante spéciale, et l’appréhension de l’avenir est de plus en plus palpable, surtout depuis l’assassinat choquant, le 28 août, du président du Barreau de Port-au-Prince, Maitre Monferrier Dorval.  Au cours des derniers mois, les troubles -parfois sous la forme de violentes manifestations- sont devenus de plus en plus répandus, et le sentiment d’insécurité plus aiguë, a-t-elle ajouté. Les gangs continuent de contester l’autorité de l’État, en particulier dans les quartiers les plus peuplés de Port-au-Prince, et un groupe marginal de policiers mécontents se faisant appeler « Fantom 509 » a, avec ses adeptes, semé le désordre dans la capitale en plusieurs occasions.  

Alors que la police et les autorités judiciaires luttent pour relever leurs défis persistants pour répondre aux demandes légitimes de sécurité et de responsabilité de la population haïtienne, la violence perdure et les violations des droits de l’homme continuent.  Pour Mme La Lime, le sentiment d’impunité que ces dynamiques suscitent ne peut être contrecarré qu’en veillant à ce que les droits des victimes de violations et d’abus des droits humains soient respectés et que les auteurs soient tenus de rendre des comptes.  La Représentante spéciale a estimé que, malgré la compétence démontrée de la Police nationale haïtienne (PNH), elle aurait besoin d’au moins 10 000 policiers supplémentaires bien formés et équipés pour répondre aux normes de police internationalement acceptées et renforcer sa capacité à fournir des services professionnels à la population.  La PNH doit être financée et équipée de manière adéquate par son gouvernement pour surmonter ses lacunes récurrentes et continuer à respecter les normes internationales, a fait valoir Mme La Lime.  

De même, alors que des progrès ont été accomplis dans la mise en œuvre de la Commission nationale de désarmement, de démantèlement et de réintégration –l’organe d’État chargé de coordonner les efforts visant à réduire les activités des gangs- un soutien continu ainsi qu’une détermination politique inébranlable et une action décisive seront nécessaires pour faire en sorte que la Commission soit capable de s’acquitter de ses tâches alors que le Gouvernement est sur le point d’adopter une stratégie nationale DDR/VR et d’intensifier ses efforts pour lutter contre la prolifération des armes et des munitions illicites.  

L’histoire récente d’Haïti a montré à maintes reprises que la polarisation politique aiguë et la faiblesse des institutions de l’État sont des catalyseurs de la violence, a poursuivi Mme La Lime.  La Représentante spéciale a rappelé que, depuis qu’elle s’était adressée au Conseil le 19 juin, plusieurs initiatives gouvernementales, notamment en matière de réforme économique et de gouvernance, avaient pris de l’ampleur malgré des critiques internes.  Un nouveau code pénal a été promulgué et le Président Moïse a désigné un nouveau Conseil électoral provisoire, ce qui a suscité de vives réactions de la part de segments de la société haïtienne, y compris la Cour de cassation, prétendument en raison du manque de représentativité de l’organe et de l’ampleur de la mission qui lui a été confiée.  

La méfiance qui règne entre les forces politiques entrave tout progrès, a regretté la Représentante spéciale et ce, même sur des priorités qui avaient auparavant recueilli un large accord, comme la nécessité d’entreprendre une réforme constitutionnelle pour mieux refléter les réalités haïtiennes actuelles et remédier aux principales lacunes de la Constitution de 1987 avant la tenue d’élections.  

Alors même que la fenêtre pour concevoir un processus acceptable pour tous se referme rapidement, de nombreux acteurs politiques considèrent la formation d’un consensus politique et la mise en place d’un gouvernement d’unité nationale comme essentielles à un environnement propice aux élections participatives, a néanmoins souligné Mme La Lime.  La Représentante spéciale a expliqué qu’alors que le pays se prépare à entrer dans un nouveau cycle électoral, il est primordial que les aspects clefs du processus électoral, tels que le cadre et le calendrier électoraux, soient traités afin de réduire le risque de contestation des élections et de nouvelles violences.  Alors que le BINUH continuera à impliquer les parties prenantes nationales, elle a exhorté les États Membres à amplifier leur soutien à un processus qui, s’il est correctement géré, contribuera à garantir que le scrutin permettra de renouveler le leadership élu d’Haïti, conduira à une plus grande représentation des femmes dans la vie politique, et revigorera le contrat social entre les citoyens haïtiens et l’État.  

Bien que moins virulente en Haïti qu’initialement prévu, la pandémie de COVID-19 semble avoir aggravé les effets déjà débilitants de près de deux ans de troubles sociopolitiques sur l’économie du pays, a poursuivi la Représentante spéciale.  Malgré une augmentation des envois de fonds et le succès récent des mesures de renforcement de la monnaie nationale, les ménages de tout le pays ont vu leurs revenus baisser tandis que les prix des produits de base ont fortement augmenté, entraînant ainsi une nouvelle augmentation de l'insécurité alimentaire. Dans l’ensemble, l’impact national de la pandémie, ainsi que l’effet qu’elle a eu sur les économies des partenaires commerciaux essentiels, contribueront à une nouvelle année de récession pour Haïti en 2020.  Pour y faire face, le Gouvernement a l’intention de lancer un plan triennal de relance économique post COVID-19 fondé sur la stimulation de la production nationale et des exportations par la diversification économique, le soutien aux petites et moyennes entreprises, et les investissements dans les secteurs énergétique et agricole.  

Par-dessus tout, c’est la capacité des classes politiques et économiques d’Haïti à faire des compromis et à résoudre leurs différends sans recourir à la violence, ainsi que la capacité des institutions naissantes du pays à prendre les mesures nécessaires qui détermineront la possibilité de voir des élections libres, justes et inclusives se dérouler dans un climat propice; les tentatives de redémarrer l’économie et de remettre le pays sur une trajectoire de développement positive aboutir; et le problème permanent de l’impunité être réglé, a conclu la Représentante spéciale. 

M. ROBERTO ÁLVAREZ GIL, Ministre des affaires étrangères de la République Dominicaine, a salué les efforts du Gouvernement haïtien pour contrer les effets de la pandémie de COVID-19, cela sous la houlette de la commission dédiée.  Il a ajouté qu’au plan économique et social, l’absence de consensus politique commun pour sortir de l’impasse et définir un nouveau cycle électoral à même de mettre le pays sur la voie d’une stabilité pérenne faisait regretter un départ trop rapide, l’an dernier, de la dernière Mission de maintien de la paix de l’ONU du pays, la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH).  Selon lui, ce retrait trop rapide a contribué à ce que la crise politique et économique dégénère, toute bonne gouvernance étant actuellement impossible.  

Le Ministre a ensuite souligné que cinq millions d’Haïtiens étaient touchés par une crise complexe qui impacte aussi les activités de l’ONU et des partenaires sur place.  Face à l’insécurité et à l’impunité, il a appelé à la prise de mesures interdisciplinaires.  Des centaines de familles ont été déplacées en raison de la violence des gangs, et le Président du Barreau d’Haïti a été retrouvé mort, sûrement assassiné par des gens qui préfèrent le chaos au processus de réformes institutionnelles du pays, a poursuivi M. Gil.  Après avoir demandé que les auteurs de ce crime « odieux » soient traduits en justice, il a exhorté le Conseil de sécurité à doter le BINUH de tout le personnel nécessaire à la pleine exécution de son mandat.  

La communauté internationale et le Gouvernement haïtien doivent appuyer la mise en œuvre du Plan pour la Police haïtienne en 2021 et donner au système judicaire les ressources exigées pour protéger les droits des citoyens, notamment les plus vulnérables, a ensuite déclaré M. Gil.  

Concernant le volet humanitaire, le Ministre a noté que 53% des foyers haïtiens avaient connu la faim de mai à juin dernier et demandé à cette aune que soit assuré le financement du Plan humanitaire révisé.  Près de 5 milliards de dollars sont requis.  Or, au 10 septembre, le plan n’était financé qu’à hauteur de moins de 20%, a-t-il regretté.   

M. Gil a rappelé que le sort d’Haïti et de son pays qui partage une frontière, était lié ce qui exige une coordination binationale étroite en particulier dans le cadre de la mise en œuvre des politiques régionales et internationales de lutte contre les changements climatiques.  L’instabilité haïtienne est une menace pour la République dominicaine, a-t-il encore signalé, estimant que les Nations Unies et la communauté internationale n’avaient pas le droit de rester inertes face à la convergence des crises qui frappent Haïti.  Ainsi, a-t-il exhorté la communauté internationale et l’Organisation à proroger le mandat du BINUH en le dotant de ressources nécessaires à son bon fonctionnement. Le Bureau doit être en mesure de favoriser l’atteinte d’un consensus autour de l’organisation des élections législatives l’an prochain, tâche la plus urgente, a-t-il conclu.   

Les États-Unis ont déclaré qu’au cours d’une conversation samedi avec le Président d’Haïti, ils avaient exhorté ce dernier ainsi que son gouvernement à organiser des élections législatives dès que possible techniquement afin de rétablir le parlement haïtien, « pour sortir de la période actuelle de gouvernement par décret ».  Si l’annonce par le Gouvernement des membres du Conseil électoral provisoire était une étape nécessaire sur cette voie, il reste encore beaucoup à faire, notamment l’approbation d’une loi, budget et calendrier électoraux, a noté la délégation. 

Les États-Unis sont profondément préoccupés par le fait que des gangs armés continuent de commettre des violations des droits humains dans les communautés vulnérables à travers tout le pays, provoquant le déplacement de centaines de familles.  « Nous exhortons le Gouvernement haïtien à protéger ses citoyens les plus vulnérables en mettant en œuvre une stratégie antigang globale pour saper le soutien aux gangs et tenir les auteurs de violence et leurs complices responsables », a ajouté la délégation.  Elle s’est alarmée du fait que le système judiciaire haïtien n’ait pris aucune mesure concrète pour ouvrir des poursuites judiciaires à cet égard ces derniers mois, renforçant le climat d’impunité.  

La délégation a fait savoir au Président Moïse que les États-Unis restaient déterminés à travailler aux côtés de la Police nationale haïtienne pour renforcer sa capacité à mettre en échec les gangs armés.  Les États-Unis ont récemment réattribué une aide de 5 millions de dollars aux efforts antigangs et fourniront des conseillers supplémentaires à la PNH pour l’aider à résoudre les problèmes de droits de la personne et de conduite de la police.  « Cependant, la Police nationale haïtienne continue de faire face à des contraintes budgétaires et à des pressions opérationnelles croissantes.  Sans un financement opportun et suffisant et un engagement à long terme du Gouvernement d’Haïti, elle ne peut pas remplir efficacement son mandat de sécurité publique  », a observé la délégation.  Celle-ci a par ailleurs rappelé que les États-Unis avaient à ce jour versé plus de 16 millions de dollars d’aide à l’appui des efforts haïtiens de lutte contre la COVID-19. 

Saint-Vincent-et-les Grenadines, qui s’exprimait au nom du Groupe des A3 +1 (Tunisie, Afrique du Sud, Niger et Saint-Vincent-et-les Grenadines), a salué les efforts du BINUH pour mener à bien le processus politique en Haïti, où la situation reste néanmoins extrêmement complexe.  Le vide institutionnel créé par l’absence d’un parlement a exacerbé les difficultés politiques et économiques du pays, une situation qui pourrait devenir hors de contrôle, a mis en garde Saint-Vincent-et-les Grenadines.  Félicitant le Gouvernement d’Haïti pour sa lutte contre la pandémie, qui a eu des effets limités sur l’île, la délégation a souligné que le pays connaissait toutefois toujours de grandes difficultés, notamment une crise constitutionnelle et de gouvernance.  Dès lors les A3 +1 ont appelé toutes les parties politiques à convoquer un dialogue national et à se lancer dans la formation urgente d’un gouvernement pour sortir de l’impasse politique actuelle.  

Le Groupe A3 +1 appuie les efforts de la Commission nationale chargée du désarmement, démobilisation et de réintégration, et appelle le Gouvernement haïtien à adopter des mesures de lutte contre les violences communautaires.  Il encourage l’allocation de ressources supplémentaires à la Police nationale haïtienne et invite à y intégrer davantage de femmes.  Au-delà de la police, il faut veiller à la représentation des femmes à tous les niveaux de prise de décisions dans le pays.  Le Groupe A3 +1 exhorte les autorités à régler les questions d’impunité dans les cas de violation des droits de la personne, saluant au passage la nomination d’un ministre des droits de la personne.  

Les réalités socioéconomiques sont moroses et Haïti se heurte également à la menace existentielle des changements climatiques, a noté la délégation, ce qui complique davantage la situation sur le terrain.  Voilà pourquoi le groupe A3 +1 appelle la communauté internationale à poursuivre son aide humanitaire à Haïti et à envisager l’allègement, voire l’annulation de la dette d’Haïti.  

En conclusion, le Groupe de A3 +1 a demandé que le BINUH soit financé de manière adéquate et s’est prononcé en faveur de la prorogation de son mandat.   

La Chine a estimé insuffisantes les capacités de gestion des autorités haïtiennes.  Le Gouvernement doit renforcer ses capacités de gouvernance pour être à la hauteur des attentes du peuple haïtien, a-t-elle ajouté.  S’agissant de la préparation des élections générales l’année prochaine, la Chine a demandé qu’elles aient lieu conformément à la Constitution, cela pour garantir la crédibilité des résultats électoraux des scrutins présidentiel et législatif.  Pour la Chine, les bailleurs de fonds doivent se concentrer sur les besoins et priorités d’Haïti, à savoir la réduction de la pauvreté et le développement socioéconomique.  

Concernant le mandat du BINUH, la délégation, qui a déploré le peu de progrès réalisé en un an, a affirmé qu’il n’existait pas de solution  «  externe » à Haïti.  « Il revient aux acteurs locaux d’assumer leurs responsabilités et au Conseil de sécurité de réfléchir à la présence des Nations Unies sur le terrain, en tirant les enseignements de son action au cours des dernières années  », a conclu la délégation. 

La Belgique a qualifié le climat politique d’extrêmement polarisé, l’incertitude sur le calendrier électoral, la composition d’un nouveau Conseil électoral provisoire et la nécessaire réforme constitutionnelle demeurant des facteurs d’instabilité.  Il est urgent pour la légitimité du système politique d’arriver à un calendrier réaliste pour l’organisation des élections, et essentiel d’associer les femmes à toutes les étapes du processus électoral, a-t-elle ajouté. S’agissant des droits de l’homme, de la lutte contre l’impunité et de l’insécurité, la Belgique a condamné à son tour fermement l’assassinat « choquant » de maître Montferrier Dorval, soulignant que la société civile « ne peut être réduite au silence ».  « Nous exhortons les autorités à ne ménager aucun effort pour traduire les auteurs en justice », a-t-elle dit.  Pour la Belgique, le développement d’une police nationale fiable doit rester une préoccupation primordiale des bailleurs de fonds et du BINUH.  Concernant ce dernier, la Belgique a apporté son plein soutien au travail qu’il mène depuis un an pour faciliter le dialogue politique en Haïti, « compte tenu du niveau élevé de polarisation ».  « Haïti ne peut faire face seul à ses défis.  En collaboration avec nos partenaires de l’UE, nous fournissons un soutien financier, technique et politique et nous appelons tous les partenaires internationaux à nous emboîter le pas », a-t-elle déclaré.  

Le Royaume-Uni s’est dit conscient des circonstances adverses en Haïti, tout en saluant les progrès réalisés.  La population haïtienne mérite que cesse la crise constitutionnelle actuelle en Haïti, a estimé la délégation, qui a demandé des élections crédibles et transparentes dans les plus brefs délais, ainsi que des progrès en matière de droits de l’homme.  À cet égard, le Royaume-Uni a salué la nomination d’un ministre des droits de la personne mais reste préoccupé par le fait que la Plan d’action pour la défense des droits de la personne n’ait toujours pas été adopté par le Gouvernement.  

Le BINUH est l’illustration que le travail du Conseil de sécurité avec Haïti doit se baser sur une nouvelle coopération, et le Royaume-Uni est ravi de voir le rôle joué par l’équipe pays des Nations Unies ainsi que par le BINUH, a ajouté la délégation. 

Le Viet Nam a jugé que l’impasse politique principale était la première cause des instabilités multiples en Haïti.  Il a par conséquent exhorté les partis politiques et la société civile à s’engager dans un dialogue constructif en vue de l’organisation des élections générales l’an prochain.  Des progrès doivent être accomplis pour mettre en place un cadre électoral, un calendrier et le conseil électoral provisoire que le Secrétaire général appelle de ses vœux dans son rapport, a ajouté la délégation.  Sur ce point, le Viet Nam a également plaidé pour une représentation accrue des jeunes et des femmes aux processus politiques en cours.  

En matière de sécurité, la délégation a souligné que la violence des gangs, en remettant en cause l’autorité de l’État, avait des effets délétères sur la vie quotidienne des populations civiles.  Dans ce contexte, a-t-elle insisté, le Gouvernement et les autorités locales doivent améliorer le cadre juridique du pays et prendre les mesures sécuritaires requises, pour protéger notamment les femmes et les enfants.  Le Viet Nam soutient la prorogation du mandat du BINUH. 

L’Indonésie a déploré que le peuple haïtien continue de payer un lourd tribut à l’instabilité et à l’insécurité.  La stabilité politique est le facteur clef pour sortir de l’impasse, a ajouté la délégation, qui a appelé les acteurs politiques locaux à mettre de côté leurs différends et à s’engager dans le dialogue national requis pour parvenir à la tenue, l’an prochain, d’élections libres et régulières. 

L’Estonie a apporté son plein soutien aux activités du BINUH.  La délégation a appelé à un programme de réformes constitutionnelles ainsi qu’à des élections libres, crédibles et transparentes.  Elle a regretté qu’à ce jour, la justice n’ait pas encore été rendue en Haïti, en citant notamment les incidents des salines.  Alors que l’impunité ne fait qu’aggraver la violence des gangs criminels, l’Estonie a exhorté le Gouvernement haïtien à moderniser les institutions judiciaires nationales pour y remédier et a invité les autorités à appuyer la création d’un bureau de la Haute Commissaire des droits de l’homme de l’ONU en Haïti.  

Pour l’Estonie il est capital de remédier aux impacts de la pandémie de COVID-19 en Haïti, ce qui doit passer par la mise en œuvre du plan préconisé par les Nations Unies.  L’Estonie exhorte toutes les parties à travailler ensemble dans un effort constructif pour assurer un avenir meilleur à Haïti. 

L’Allemagne s’est dite déçue de voir que les parties prenantes haïtiennes ne sont toujours pas parvenues à un consensus a minima dans le cadre du processus politique, et a souhaité un cadre électoral réaliste permettant des élections crédibles et transparentes dans les meilleurs délais.  La délégation a condamné l’assassinat de maître Duval et a exigé que les auteurs de ce crime soient traduits en justice.  

L’Allemagne s’est dite préoccupée par la résurgence de bandes criminelles et « effarée » d’entendre que des acteurs politiques et des hommes d’affaires avaient des liens avec ces gangs.  Il est important que le Gouvernement continue d’appuyer le plan de désarmement, démobilisation et réintégration pour lutter contre la montée de la violence, a poursuivi la délégation.  De plus l’Allemagne a déploré des progrès jugés dérisoires en matière de reddition des comptes pour les scandales de corruption et de violation des droits de la personne.  Elle a soutenu l’idée de créer un bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en Haïti.  

Tout en saluant l’évolution prometteuse de la professionnalisation de la Police nationale haïtienne, l’Allemagne a insisté sur la responsabilisation de ses membres.  Elle est préoccupée par « l’érosion des maigres ressources » allouées à la PNH ainsi que par la tendance croissante de polarisation des forces de police, notamment par l’apparition du groupe « Fantom 509 » composé d’anciens policiers.  La délégation a également regretté la surpopulation carcérale, en particulier dans le contexte de la COVID-19.  

L’Allemagne a enfin apporté son plein soutien aux travaux du BINUH et des 19 Fonds et programmes des Nations Unies en Haïti, et s’est dite favorable à la prorogation du mandat du Bureau intégré. 

La France a considéré que la lutte contre la corruption, dans le contexte de crises multiples que traverse Haïti, était la priorité absolue des autorités haïtiennes.  Elle a condamné fermement l’assassinat de maître Dorval le 28 août dernier, un crime reflétant selon elle l’instabilité et la profondeur de la crise dans un pays où la pandémie de de COVID-19 pèse d’un poids supplémentaire.  À cet égard, elle a assuré que la France et l’Union européenne continueront d’apporter l’aide humanitaire nécessaire pour répondre aux besoins les plus urgents de la population civile.  Pour la France, le caractère multidimensionnel de la crise rend sa résolution d’autant plus complexe, et, dans ce cadre, le BINUH, qui accompagne sans relâche les autorités depuis un an, est absolument essentiel au redressement politique, économique et social du pays.  La France a ainsi plaidé pour la prorogation du mandat du BINUH et l’allocation des moyens nécessaires à la pleine mise en œuvre son mandat.  Elle a conclu en assurant que la France se tenait aux côtés du pays pour l’aider à construire l’environnement propice à la stabilité et à la prospérité auxquelles aspire « bien légitimement » le peuple haïtien. 

La Fédération de Russie a déclaré que l’absence de dialogue intérieur avait provoqué une véritable paralysie des autorités haïtiennes et l’incapacité de l’État à s’acquitter de ses prérogatives de base, en particulier la sécurité des citoyens haïtiens.  Elle a estimé que, dans un contexte de crises multiples aggravé par la pandémie de COVID-19, le BINUH, au cours de l’année écoulée, n’avait pas été en mesure d’accomplir pleinement sa mission d’accompagnement du dialogue politique national.  « La société est divisée mais si elle choisissait de demander une révision de la Constitution, l’ONU devrait se déclarer faveur de cette aspiration », a ajouté la délégation. 

La délégation de la Fédération de Russie s’en est ensuite prise au comportement « menaçant » du Département d’État américain, qui appelle selon elle à condamner ceux qui ne partagent pas sa conception de la démocratie américaine, tout en n’hésitant pas à exiger la démission de gouvernements élus.  Le dialogue législatif est l’unique moyen d’aller de l’avant, et la seule mission de l’ONU en Haïti doit être d’appuyer ce dialogue, faute de quoi le pays mettra encore des années à se relever, a conclu la délégation. 

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