En cours au Siège de l'ONU

8739e séance – matin
CS/14134

Iraq: la Représentante spéciale appelle les dirigeants politiques à agir rapidement pour sortir de la crise, en s’appuyant sur la détermination du peuple

Pour qu’un Iraq plus juste, plus solide et plus résilient émerge, les dirigeants politiques doivent agir rapidement pour résoudre la crise politique en plaçant les intérêts du pays au-dessus de tout autre intérêt, a déclaré, ce matin, la Représentante spéciale pour l’Iraq, devant le Conseil de sécurité, en s’inquiétant de voir peu de résultats de ce côté-là.

Selon Mme Jeanine Hennis-Plasschaert, qui est à la tête de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), la situation politique confuse dans laquelle se trouve le pays ne permet malheureusement pas d’être optimiste.  Après cinq mois de manifestations et de nombreux morts et blessés, les manifestants n’entendent pas modifier leurs aspirations, a-t-elle mis en garde. 

En effet, depuis la démission du Premier Ministre Abdul Mahdi en novembre 2019, la nomination de son remplaçant et, partant, d’un nouveau gouvernement n’a pu avoir lieu à cause de la méfiance et la désunion.  La question qui demeure est de savoir si la classe politique va trouver un candidat de consensus, a-t-elle expliqué, ajoutant que cette situation d’incertitude sape encore plus la confiance du public.  Elle a malgré tout souligné « l’espoir » qui ressort de cette situation, en se basant sur trois éléments: un peuple qui reste uni dans sa détermination à forger un avenir juste et prospère, une nation souveraine qui refuse d’être le champ de bataille de conflits qui ne sont pas les siens, ainsi que la chance de pouvoir dans une génération mener une réforme politique durable. 

Le représentant de l’Iraq a exposé également plusieurs raisons de se réjouir: des consultations ont récemment eu lieu pour répondre aux demandes « tout à fait légitimes » des manifestants et le Président iraquien va prochainement nommer un premier ministre chargé de constituer un nouveau gouvernement.  De plus, une loi a été adoptée dans le but de tenir des élections anticipées, et neuf membres ont été élus au Conseil des commissaires de la Haut Commission électorale indépendante.  Ces derniers sont dirigés par une femme, un fait sans précédent, s’est-il félicité.

Inquiètes des atermoiements des acteurs politiques iraquiens, plusieurs délégations ont plaidé pour qu’il soit mis fin à l’impasse politique actuelle.  Les problèmes du pays ne datent pas d’hier, a rappelé la Fédération de Russie en prévenant qu’il sera difficile de mettre en œuvre les réformes à défaut de parvenir à une stabilité sur le plan politique.

Pour la Représentante spéciale, « les nombreux braves Iraquiens qui continuent de payer un prix inimaginable pour que leur voix soit entendue méritent que l’on reconnaisse les abus intolérables dont ils ont été victimes ».  Les tueries, les enlèvements, la violence, l’intimidation, les menaces: de telles violations abjectes des droits de l’homme ont cours, alors qu’elles n’ont aucune place dans une démocratie, a-t-elle rappelé.  Elle a également noté que la participation sans précédent des femmes iraquiennes aux manifestations marque une nouvelle page dans l’histoire de la mobilisation des femmes du pays au niveau communautaire.  Mme Hennis-Plasschaert a aussi insisté sur le fait que la justice et la responsabilité sont des questions de la plus haute importance pour de nombreux Iraquiens qui ont perdu des proches ou qui ont été blessés juste parce qu’ils exprimaient leur frustration face aux perspectives économique, sociales et politiques peu favorables. 

Pour l’Allemagne, ces manifestations de protestation sont le signe du dynamisme de la société iraquienne.  De leur côté, les États-Unis ont promis d’utiliser davantage tous les outils nationaux disponibles pour promouvoir la responsabilisation.  Ainsi, quatre Iraquiens impliqués dans de graves violations des droits de l’homme et dans des activités de corruption figurent déjà sur une liste de sanctions américaines.

La Représentante spéciale a aussi relevé la présence de groupes armés non identifiés avec des affinités peu claires, et qui se sont servi des manifestants pacifiques et des forces de sécurité pour rendre confuses les préoccupations, trompant ainsi le public, sapant les intérêts du pays et faisant des victimes.  Elle a demandé aux dirigeants politiques d’agir au plus vite pour démanteler les groupes armés ou les intégrer dans le contrôle de l’État.  La plupart des orateurs se sont eux aussi inquiétés de la reprise des activités de Daech dans certaines régions. 

Les États-Unis ont dénoncé les attaques menées par des milices appuyées par l’Iran contre des bases américaines ainsi que contre l’ambassade américaine à Bagdad, mais le délégué de l’Iraq a assuré que son gouvernement s’engageait à garantir la protection de l’ensemble du corps diplomatique présent en Iraq, avant d’inviter les pays concernés à prendre attache avec son gouvernement pour le rapatriement des familles des membres de Daech. 

Le délégué chinois a insisté pour que l’on évite toute ingérence dans les affaires intérieures du pays et a souligné que toute action militaire en Iraq doit faire l’objet d’un accord des autorités iraquiennes, alors que la Fédération de Russie mettait en garde contre toute tentative de faire de l’Iraq une « arène pour régler des comptes régionaux ».  Justement, le représentant du pays a rappelé qu’en début d’année, son gouvernement avait envoyé quatre lettres à l’ONU pour condamner les attaques ayant attenté à la souveraineté iraquienne et exprimer sa détermination pour éviter que son territoire soit utilisé pour cibler d’autres pays. 

Nombre de délégations, dont la France, se sont dites inquiètes de la situation humanitaire dans le pays et ont appelé à une mobilisation internationale pour y répondre.  Selon la Représentante spéciale, la corruption est un autre sujet de première importance en Iraq et c’est peut-être la plus grande source de dysfonctionnement dans le pays.  Elle a appelé à cet égard à une réforme systémique. 

En ce qui concerne les ressortissants koweïtiens et les nationaux d’États tiers portés disparus, ainsi que la restitution des biens koweïtiens, les délégations ont salué les avancés récentes avec notamment l’exhumation de corps en janvier dernier à Samaoua. 

LA SITUATION CONCERNANT L’IRAQ

Vingt-cinquième rapport du Secrétaire général en application du paragraphe 4 de la résolution 2107 (2013) du Conseil de sécurité (S/2020/133)

Rapport du Secrétaire général en application de la résolution 2470 (2019) (S/2020/140)

Déclarations

Mme JEANINE HENNIS-PLASSCHAERT, Représentante spéciale du Secrétaire générale pour l’Iraq et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), a d’emblée parlé de « l’espoir d’un peuple qui reste uni dans sa détermination pour un avenir plus juste et prospère ».  Elle a aussi évoqué l’espoir d’une nation souveraine qui refuse d’être le champ de bataille de conflits qui ne sont pas les siens, ainsi que l’espoir que l’Iraq puisse se trouver au moment le plus opportun pour une réforme politique authentique et durable dans une génération.  Mais pour que cela se matérialise, les dirigeants politiques et les communautés doivent placer les intérêts du pays au–dessus de tout autre intérêt, et renforcer la force intérieure du pays, a-t-elle prévenu. 

Pour la Représentante spéciale, « les nombreux braves Iraquiens qui continuent de payer un prix inimaginable pour que leur voix soit entendue méritent que l’on reconnaisse les abus intolérables dont ils ont été victimes ».  Les tueries, les enlèvements, la violence, l’intimidation, les menaces: ces violations abjectes des droits de l’homme sont en cours et n’ont aucune place en démocratie, a-t-elle rappelé.  Elle a souligné que la sécurité des populations est la responsabilité première de l’État, avant d’appeler à mettre fin à ces abus et à traduire en justice leurs auteurs.  Elle a insisté sur le fait que la justice et la responsabilité sont des questions de grande importance pour de nombreux Iraquiens qui ont perdu des proches ou qui ont été blessés juste parce qu’ils exprimaient leur frustration face aux perspectives économique, sociales et politiques peu favorables. 

Mme Hennis-Plasschaert a rappelé que les problèmes de l’Iraq ne sont pas apparus en une nuit et qu’ils ne seront pas non plus résolus en un clin d’œil.  Selon elle, les temps de crise présentent aussi des opportunités, mêmes si la fenêtre de tir se referme rapidement.  Elle a noté que la participation des femmes iraquiennes aux manifestations est sans précédent et marque une nouvelle page dans l’histoire de la mobilisation des femmes du pays au niveau communautaire.  Elle a appelé les dirigeants politiques à entendre cet appel. 

Sur le plan sécuritaire, elle a relevé la présence de groupes armés non identifiés avec des affinités peu claires, notant aussi que des groupes d’individus se sont servi des manifestants pacifiques et des forces de sécurité pour rendre confuses les préoccupations, trompant ainsi le public, sapant les intérêts du pays et causant des victimes.  Elle a demandé aux dirigeants politiques de démanteler, ou d’intégrer, les groupes armés dans le contrôle de l’État, au plus vite. 

Après cinq mois de manifestations et de nombreux morts et blessés, il est clair, selon la Représentante spéciale, que les manifestants n’entendent pas changer leurs aspirations.  Il revient donc à la classe politique d’agir, mais on voit peu de résultats de leur part, s’est-elle inquiétée.  Depuis la démission du Premier Ministre Abdul Mahdi en novembre dernier, la nomination de son remplaçant et, partant, d’un nouveau gouvernement n’a pas pu avoir lieu à cause de la méfiance et la désunion.  La question qui demeure est de savoir si la classe politique va trouver un candidat de consensus, a-t-elle déclaré, ajoutant que cette situation d’incertitude sape encore plus la confiance du public. 

Selon la Représentante spéciale, la corruption est un autre sujet de première importance en Iraq, et c’est peut-être la plus grande source de dysfonctionnement dans le pays.  Elle a appelé à cet égard à une réforme systémique.  Elle a affirmé que l’Iraq n’est pas un pays pauvre, expliquant que les intérêts privés et partisans conspirent pour détourner les ressources qui pourraient servir à des investissements cruciaux.  En plus de la fluctuation des prix du pétrole, le pays fait face à des facteurs internes de blocage qu’il peut néanmoins contrôler, selon elle, mais il faut réduire la bureaucratie, renforcer le climat des affaires et l’état de droit, ainsi que les mécanismes anticorruption.  L’Iraq doit aussi réparer les infrastructures détruites et élargir les sources de revenus de l’État afin de réduire sa dépendance aux hydrocarbures.  À ce propos, l’agriculture est un secteur propice d’investissement, a-t-elle noté.

Mme Hennis-Plasschaert a relevé que Daech a repris ses activités, notamment dans le nord-est de Diyala, le nord de Bagdad et dans d’autres régions du pays.  Elle a aussi plaidé pour le renforcement de la loi électorale et pour l’établissement d’un accord définitif sur les relations entre Bagdad et Erbil.  En ce qui concerne les ressortissants koweïtiens et les nationaux d’États tiers portées disparus, ainsi que la restitution des biens koweïtiens, la Représentante spéciale a parlé d’un espoir renouvelé en janvier dernier quand des restes humains ont été découverts et exhumés dans un troisième site d’inhumation à Samaoua.  Elle a salué le rôle qu’a joué la Commission tripartite dans cet exercice, avant de demander son soutien également pour d’autres sites. 

Selon la Représentante spéciale, la situation politique confuse qui règne ne permet malheureusement pas d’être optimiste, étant donné que le pays et sa population continuent d’aller vers l’inconnu.  Pour qu’un Iraq solide et plus résilient émerge, elle a appelé les dirigeants politiques à agir rapidement et à placer les intérêts du pays au-dessus de tout autre intérêt. 

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a appelé les prochains dirigeants de l’Iraq à poursuivre le processus de réformes et à assurer la tenue d’élections libres et équitables, ainsi qu’à protéger les manifestants et poursuivre en justice de façon transparente les auteurs de meurtres.  Elle a expliqué que cela permettra de limiter l’influence des groupes armés déstabilisateurs, d’attirer des investissements étrangers et de faire en sorte que les ressources naturelles de l’Iraq soient transformées en une meilleure qualité de vie pour tous.  Selon la représentante, les Iraquiens continuent d’exiger un État souverain qui leur accorde la dignité et résiste à la coercition iranienne.  Face aux meurtres scandaleux, aux passages à tabac, aux enlèvements et à la torture, le mouvement réformiste perdure, a-t-elle constaté en dénonçant aussi les agissements contre la liberté de rassemblement et d’expression.  Les États-Unis continueront d’utiliser tous les outils nationaux disponibles pour promouvoir la responsabilisation, ayant ainsi récemment désigné quatre Iraquiens impliqués dans de graves violations des droits de l’homme et de la corruption. 

Mme Norman-Chalet a également dénoncé les attaques menées par des milices appuyées par l’Iran contre des bases américaines ainsi que contre l’ambassade américaine à Bagdad.  Des tirs de roquettes ont été lancés ces deux derniers jours et le Gouvernement doit prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les enceintes diplomatiques, a-t-elle insisté en citant la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques.  Elle a ensuite appelé la communauté internationale à aider l’Iraq dans ses efforts de lutte contre le terrorisme.  Si l’Iraq ne répond pas aux attentes légitimes du peuple, des années de progrès pourraient être perdues, a averti Mme Norman-Chalet.  Elle a appelé les nouveaux dirigeants du pays à promouvoir un dialogue inclusif et la réconciliation, et à résoudre les tensions avec le Gouvernement du Kurdistan.  Elle a appelé à la tenue des élections le plus rapidement possible et a encouragé la MANUI à aider le pays à mener à bien le processus.  Enfin, elle s’est souciée des problèmes d’acheminement de l’aide humanitaire et a appelé les autorités à y trouver une solution urgente.  Elle a estimé que la découverte de nouvelles dépouilles marque un nouveau pas vers la réconciliation entre l’Iraq et le Koweït. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a noté que l’exposé de la Représentante spéciale est à la fois inquiétant et empreint d’espoir.  Il a appelé toutes les parties en Iraq et hors du pays à faire preuve de retenue, plaidant pour que l’Iraq ne se retrouve pas au centre de conflits régionaux, mais pour qu’il puisse plutôt se focaliser sur la reconstruction.  Selon le délégué, les manifestations de protestation sont le signe du dynamisme de la société iraquienne.  Devant le recours disproportionné à la force, il a appelé à la justice et à la responsabilité.

M. Heusgen a ensuite dit que l’Iraq a besoin d’une classe politique solide, afin notamment de contrecarrer les activités de groupes armés dont certains sont responsables d’attaques contre les manifestations.  S’il y a un nouveau gouvernement et que la bonne gouvernance se concrétise et si la société civile peut s’épanouir, le pays pourra se relever, a affirmé le représentant.  S’adressant à l’Ambassadeur du Koweït, il a déclaré soutenir la poursuite du travail de la MANUI sur la question du sort des ressortissants koweïtiens et d’autres États tiers qui ont disparu. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) s’est inquiété de l’absence de consensus au sujet de l’élection d’un premier ministre et de la formation d’un gouvernement en Iraq, et a appelé les acteurs politiques à placer le bien-être de la population au-dessus de leurs intérêts partisans ou personnels.  Il les a aussi appelés à tenir compte des demandes de la société en matière de restructuration du Gouvernement et pour créer une société protégée de la corruption.  Le représentant a aussi appelé à prévenir toute répression violente des manifestations. 

M. Singer Weisinger a regretté les événements de début d’année qui ont conduit le Parlement à demander au Gouvernement iraquien de refuser le soutien de la communauté internationale dans sa lutte contre le terrorisme.  Il s’est dit inquiet à la perspective que cette décision permette à Daech de reprendre des forces.  Il s’est ensuite préoccupé de la situation humanitaire dont souffre le pays et a appelé à continuer de répondre aux besoins des réfugiés et des personnes déplacées.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit espérer que le Président iraquien puisse rapidement œuvrer à la mise en place d’un nouveau gouvernement.  Il a appelé toutes les forces politiques nationales à unir leurs efforts pour avancer vers la stabilité politique.  Le délégué a aussi plaidé pour le respect de l’expression démocratique que représentent les manifestations de la population.  Il a reconnu que le pouvoir iraquien élabore des réformes, mais expliqué que sans stabilité politique, il sera difficile de les mettre en œuvre.  Les problèmes du pays ne datent pas d’hier, a-t-il souligné en rappelant qu’ils sont le fruit de longs conflits que le pays a connus. 

Le représentant a ensuite plaidé pour une meilleure coopération entre Bagdad et Erbil, avant de s’inquiéter de la reprise des activités terroristes de Daech, notamment avec des éléments venant de Syrie.  Il a en outre dénoncé les tentatives de certaines parties de susciter des confrontations internationales en Iraq, avant de prévenir que le pays ne doit pas servir d’« arène pour régler des comptes régionaux », ajoutant que personne n’a le droit de saper les efforts de développement du pays.  Il a relevé que l’assassinat d’un général iranien en début d’année à Bagdad avait conduit à une escalade régionale, avant d’assurer que la Fédération de Russie est disposée à apporter sa contribution à la stabilité de l’Iraq et de toute la région. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a noté que ces derniers mois avaient été difficiles pour l’Iraq et a appelé à placer le bien-être de la population au cœur des préoccupations des dirigeants du pays.  L’Iraq a besoin de toute urgence d’un gouvernement inclusif et représentatif, un gouvernement qui soit prêt à répondre aux demandes du peuple, a-t-elle dit en soulignant que cela est d’autant plus important qu’il y a actuellement un rejet du statut quo.  Elle a insisté sur le droit de la population de manifester pacifiquement et a dénoncé la répression des manifestations ainsi que les violations des droits de l’homme.  Des enquêtes doivent être menées pour élucider ces cas, a-t-elle demandé.  S’adressant au représentant de l’Iraq, elle a appelé à veiller à ce que la nouvelle loi électorale permette de répondre aux attentes de la population.

Mme Pierce s’est ensuite inquiétée de la menace que continue de représenter Daech et a appelé la coalition internationale à poursuivre ses efforts pour y faire face.  Condamnant les attaques contre les enceintes diplomatique, elle souligné que le Gouvernement iraquien a la responsabilité de les protéger.  Elle s’est aussi inquiétée du fait que 1,4 million d’Iraquiens demeurent déplacés et qu’ils vont nécessiter une aide.  Il faut veiller à ce que la poursuite des manifestations n’empêche pas de prendre des mesures pour lutter contre Daech, a-t-elle de nouveau insisté.  La représentante a aussi jugé crucial de s’attaquer à la corruption.  S’agissant du dossier Iraq-Koweït, elle a qualifié les faits récents d’encourageants.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a appelé à faire en sorte que l’Iraq soit pleinement souverain et qu’il recouvre rapidement sa stabilité institutionnelle ainsi que les moyens de répondre aux différents défis, et ce, avec la communauté internationale à ses côtés.  Mme Gueguen a ensuite livré deux messages dont le premier est « un message de soutien »: soutien au peuple iraquien qui doit pouvoir exprimer ses revendications légitimes sans craindre pour sa sécurité.  La France est particulièrement préoccupée par les arrestations arbitraires, les assassinats, les disparitions forcées et le recours indiscriminé à la force contre les personnes exerçant leur droit à manifester pacifiquement, a déclaré la représentante.  Elle a jugé impératif que l’Iraq se dote d’un gouvernement qui soit en mesure de mettre en œuvre les réformes attendues par les Iraquiens, notamment pour lutter contre la corruption, assurer des services de qualité à la population et organiser des élections anticipées justes et transparentes.  La représentante a aussi fait part du soutien, sans réserve, de la France à la MANUI et à la Représentante spéciale du Secrétaire général pour leur engagement courageux et efficace.

Mme Gueguen a ensuite appelé à la mobilisation internationale pour l’Iraq, pour que le pays reste à l’écart des tensions régionales et que sa souveraineté soit préservée.  Car un Iraq stable est indispensable pour créer les conditions d’une désescalade durable dans la région, a-t-elle expliqué.  « Il faut également se mobiliser dans la lutte contre Daech car le combat n’est pas fini. »  La coalition internationale est déterminée à poursuivre son soutien aux autorités iraquiennes afin d’éviter toute résurgence de grande ampleur du terrorisme dans ce pays, a-t-elle assuré.  La représentante a enfin parlé de mobilisation internationale pour répondre à l’urgence humanitaire et aux défis de la stabilisation et de la reconstruction du pays.  Elle a souligné le caractère indispensable de cette mobilisation pour contrer le risque de résurgence de Daech et favoriser la réconciliation entre les différentes composantes de la population iraquienne. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a indiqué que la MANUI demeure cruciale pour coordonner les efforts onusiens en Iraq, avant de saluer les réformes entreprises par le Gouvernement.  Il a appelé de ses vœux un gouvernement inclusif rassemblant en son sein toutes les composantes de la société iraquienne.  La réconciliation nationale et l’unité en Iraq sont vitales pour une paix durable, a-t-il en effet souligné.  Il a ensuite appuyé la pleine consolidation du contrôle de l’armée iraquienne sur son territoire, ainsi que les efforts du Gouvernement pour éradiquer la menace posée par Daech.

Le délégué a aussi appelé à la poursuite de la coopération entre le Gouvernement iraquien et le Gouvernement de la Région du Kurdistan en vue de promouvoir la paix et la stabilité dans le pays.  Il a salué la nomination d’une femme à la tête de la Haute Commission électorale indépendante iraquienne.  Enfin, M. Matjila a indiqué que la situation s’est améliorée notablement ces 17 dernières années en Iraq et exhorté la communauté internationale à jouer sa partie dans le relèvement du pays, tout en respectant sa souveraineté. 

M. TAREK LADEB (Tunisie) a espéré que les acteurs politiques iraquiens pourraient dépasser la phase sensible que traverse actuellement le pays et s’entendre sur la formation d’un gouvernement de manière à accorder la priorité à l’intérêt général.  Il a estimé que l’Iraq a besoin d’un appui international constant, soulignant notamment l’importance de lutter contre la corruption et de répondre aux aspirations de la population.  Il a ensuite insisté sur la nécessité de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Iraq.  Par ailleurs, le représentant s’est inquiété du fait que malgré une relative amélioration de la situation économique, le pays a toujours besoin d’une aide humanitaire.  S’agissant du dossier Iraq-Koweït, il s’est dit satisfait de la coopération des parties concernées concernant la mise en œuvre du paragraphe 4 de la résolution 2107 du Conseil de sécurité.

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a constaté que l’Iraq affronte des difficultés notables, notant que dans un contexte marqué par l’augmentation des tensions régionales, l’appui constant de la communauté internationale à la sécurité et à la reconstruction de l’Iraq demeure essentiel.  Il s’est dit préoccupé par la crise politique à laquelle l’Iraq fait toujours face.  Il a exhorté les parties et factions politiques à résoudre de manière urgente leurs différends et à s’accorder de manière consensuelle sur la désignation d’un candidat au poste de premier ministre.

Le représentant a également jugé essentiel de poursuivre des réformes économiques « crédibles », de créer des emplois, de fournir des services de base, d’améliorer la gouvernance et de prendre des mesures effectives pour lutter contre la corruption et faire respecter l’état de droit.  Il faut aussi veiller à une plus grande part de femmes et de jeunes dans la nomination des ministres, a-t-il ajouté.  Le processus de réforme électorale doit également être achevé, a dit M. Jürgenson qui s’est par ailleurs inquiété des violations des droits de l’homme perpétrées lors des manifestations publiques qui se déroulent depuis six mois en Iraq.  Il a appelé le Gouvernement à protéger les manifestants pacifiques et à mener des enquêtes exhaustives sur les cas de violation des droits.  Il a ensuite salué les mesures importantes prises par le Gouvernement iraquien pour prévenir le recrutement d’enfants et leur utilisation dans les conflits armés.  Une solution durable à la situation des personnes déplacées doit en outre être trouvée, a-t-il ajouté.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a condamné l’utilisation de la violence, y compris par le Gouvernement, dans le contexte des protestations qui ont commencé à l’automne, soulignant que chaque abus doit faire l’objet d’une enquête.  Il a relevé que, sur le plan politique, les institutions restent faibles.  Il a donc appelé toutes les parties à s’engager dans un dialogue constructif afin de former un nouveau gouvernement qui réponde aux aspirations légitimes de la population.  Il a espéré que ce gouvernement pourra poursuivre les efforts du précédent, notamment en ce qui concerne la lutte contre la corruption, la relance économique et la création d’emplois.  Il devra également continuer ses initiatives importantes et courageuses déjà prises en matière de réforme du secteur de la sécurité, a-t-il ajouté.

Le représentant a ensuite indiqué être très préoccupé par le manque d’accès humanitaire suite à la décision des autorités iraquiennes de mettre un terme au système de lettres d’accès pour les ONG.  Il a jugé alarmantes les conséquences que cela a eu sur la délivrance de l’aide humanitaire dans le pays, appelant les autorités à immédiatement mettre en place une solution.  M. Pecsteen de Buytswerve a par ailleurs appelé à tout faire pour éviter la résurgence de l’État islamique.  Il a aussi signalé que les défis restent toujours importants en ce qui concerne les enfants en temps de conflit armé.  Sous la présidence belge du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé, le Conseil de sécurité ne devrait pas tarder d’y apporter le suivi approprié sous forme de conclusions, a-t-il annoncé.

M. ABDOU ABARRY (Niger) s’est réjoui de l’accalmie en Iraq et a encouragé les autorités à poursuivre leurs efforts pour le développement de relations amicales avec les pays voisins.  Il a souhaité que le processus politique aboutisse à la mise en place d’institutions qui garantissent la stabilité du pays et à la désignation d’un nouveau premier ministre.  Un processus durable doit inclure les femmes iraquiennes, a ajouté le représentant.  M. Abarry est toutefois préoccupé de la manière dont les manifestations ont été gérées.  Il a rappelé son attachement aux respects des libertés publiques. 

Le représentant a aussi appelé le Gouvernement à prendre des mesures pour surmonter les difficultés administratives et de sécurité existantes pour que les violations contre les enfants cessent.  Les enfants doivent pouvoir obtenir leurs documents d’état civil et avoir accès à l’enseignement, a-t-il plaidé.  Il est fort regrettable que la menace transnationale du terrorisme reste présente dans le pays avec l’État islamique d’Iraq et du Levant en son centre, a déploré M. Abarry.  Il a appelé les autorités iraquiennes à poursuivre la lutte contre les terroristes tout en veillant au respect des droits des personnes. 

Mme ISIS AZALEA MARIA GONSALVES (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a souligné l’importance d’une forte participation des femmes aux processus politiques en vue d’instaurer une paix durable.  Dans ce droit fil, elle a salué la nomination d’une femme à la tête de la Haute Commission électorale indépendante iraquienne.  Elle a salué l’engagement de la MANUI auprès de jeunes activistes de la société civile avant de noter la coopération constructive entre la Mission et le Gouvernement concernant le sort des personnes koweïtiennes ou ressortissantes de pays tiers portées disparues. 

Mme Gonsalves s’est dite préoccupée par les manifestations actuelles et les allégations de violences commises contre les manifestants.  Elle a souhaité que les responsables de ces violences répondent de leurs actes.  La déléguée a ensuite rappelé les principes qui doivent gouverner les efforts d’assistance à l’Iraq, en particulier la souveraineté, la non-intervention et la non-ingérence.  L’Iraq, en tant qu’État souverain, a pleine autorité sur ses affaires intérieures, conformément au droit international, a-t-elle souligné.  Elle a appelé tous les États, y compris ceux qui sont présents en Iraq, à respecter le droit international et à se conformer aux paramètres établis par le Gouvernement.  Enfin, Mme Gonsalves a jugé essentiel que soient éradiqués les derniers éléments de Daech afin de promouvoir la réconciliation dans le pays. 

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a salué les progrès réalisés ces derniers mois par l’Iraq, notamment pour répondre aux demandes de son peuple et promouvoir la réconciliation nationale, ainsi que l’adoption des nouvelles lois électorales.  Il a relevé que la situation dans le pays reste un défi en raison de l’augmentation des tensions régionales et s’est inquiété des retards rencontrés pour former un nouveau gouvernement.  Il a appelé les parties à redoubler d’efforts pour surmonter leurs différends et faciliter la formation d’un nouveau gouvernement afin de stabiliser la situation politique.  Des réformes seront également nécessaires pour répondre aux attentes de la population, a-t-il noté.  Le représentant a aussi jugé essentiel d’accorder la priorité aux difficultés économiques que traverse l’Iraq, insistant sur l’importance de l’appui et de l’aide internationale pour assurer la stabilité à long terme du pays.  Il a par ailleurs souligné le rôle important que joue à ce stade la MANUI dans le pays.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) s’est préoccupé de la fragilité de la stabilité et de la sécurité de l’Iraq, tout en se disant encouragé par la retenue maximale dont ont fait preuve les autorités et par leur engagement à appuyer la quête pour la paix et la prospérité de l’Iraq.  Il a fermement appuyé les efforts déployés par l’Iraq pour combattre Daech, insistant sur l’importance des pays voisins dans ce combat.  Le représentant a ensuite dit soutenir les mesures prises en matière de réforme électorale, et a salué l’adoption de la loi de la Haute Commission électorale indépendante et la nomination d’une femme à sa tête.  Il a espéré la désignation prochaine d’une nouveau premier ministre, suivie de la formation d’un nouveau cabinet, afin de mettre en œuvre les réformes réclamées par la population.  M. Syihab a par ailleurs appelé le Gouvernement iraquien à continuer de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.  Il a aussi appuyé les efforts déployés au sujet des Koweïtiens et ressortissants de pays tiers portés disparus.

M. ZHANG JUN (Chine) a demandé que soient préservées l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Iraq, avant d’inviter la communauté internationale à aider le pays dans sa reconstruction.  Le délégué a insisté pour que l’on évite toute ingérence dans les affaires intérieures du pays et a souligné que toute action militaire en Iraq doit faire l’objet d’un accord des autorités iraquiennes.  Il a aussi estimé que le pays doit être soutenu dans la consolidation des acquis en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme.  Il a demandé que la communauté internationale aide l’Iraq à traduire en justice les terroristes étrangers qui se trouvent dans le pays.  Il faut aussi promouvoir le relèvement économique de l’Iraq et répondre aux attentes de la population, a encore plaidé le représentant.  Pour sa part, la Chine a promis qu’elle allait continuer de participer à la reconstruction du secteur énergétique, tout en apportant son appui aux activités humanitaires.

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a rappelé que cela fait cinq mois que les Iraquiens descendent dans la rue et a affirmé qu’ils avaient réussi à faire entendre leur voix.  Il a aussi indiqué que la violation de la souveraineté de l’Iraq, au mois de janvier, avait porté atteinte à sa stabilité.  Les forces de sécurité iraquiennes continuent de lutter contre les vestiges de Daech, et les Iraquiens vont pouvoir connaître le renouveau social et économique qu’ils méritent, a-t-il prédit, assurant que le pays est entré dans une nouvelle ère.

Le représentant a expliqué que des consultations avaient récemment eu lieu pour répondre aux demandes « tout à fait légitimes » des manifestants.  Il a indiqué que le Président iraquien allait prochainement nommer un candidat chargé de constituer un nouveau gouvernement.  Une loi a également été adoptée dans le but de tenir des élections anticipées et neuf membres ont été élus au Conseil des commissaires de la Haute Commission électorale indépendante.  Ces derniers sont dirigés par une femme, un fait sans précédent, s’est-il félicité.  Il a expliqué que la loi électorale représente un changement de taille en ce qu’elle garantit une représentation plus juste des différentes couches de la société, ainsi qu’une plus grande participation des jeunes en abaissant de 30 à 25 ans l’âge permettant d’être éligible.  Il a demandé à l’ONU de fournir à l’Iraq toutes les ressources nécessaires pour garantir le succès du scrutin.

Poursuivant, le représentant a affirmé que les autorités iraquiennes ont fait montre de la plus grande retenue face aux incidents regrettables commis lors des manifestations.  Il a accusé « certains partis politiques » de tenter de les faire dérailler et de semer la zizanie, pour ensuite affirmer qu’une coopération importante a été établie entre les forces de sécurité et les manifestants pour garantir le caractère pacifique des manifestations.  Des efforts notables sont également déployés pour garantir le retour à la normale dans le pays, lesquelles ont notamment permis aux marchés de rouvrir et à certaines restrictions d’être levées.

M. Bahr Aluloom a ensuite rejeté toute tentative visant à faire de l’Iraq un terrain de conflit externe.  Il a rappelé qu’en début d’année, le Gouvernement iraquien avait envoyé quatre lettres à l’ONU pour condamner les attaques ayant attenté à la souveraineté iraquienne et souligner que l’Iraq est déterminé à faire en sorte que son territoire ne soit pas utilisé pour cibler d’autres pays.  Il a ensuite appelé le Conseil de sécurité à insister sur la nécessité de préserver la souveraineté de l’Iraq.

En ce qui concerne les attaques contre l’ambassade des États-Unis, le Gouvernement iraquien s’engage à garantir la protection de l’ensemble du corps diplomatique présent en Iraq, a assuré le représentant.  Il a ensuite indiqué que certains éléments de Daech continuent de menacer la stabilité du pays et a appelé la communauté internationale à continuer de coopérer dans la lutte contre le terrorisme et d’aider les forces de sécurité iraquiennes.  Il a indiqué que les éléments de Daech en détention sont entre les mains d’« éléments compétents » et que leurs droits sont respectés, notamment celui de contacter leur ambassade. 

L’Iraq, a poursuivi le représentant, a encore besoin d’élaborer des programmes pour appuyer le rapatriement des familles des membres de l’EIIL.  Il est donc important, selon lui, que les pays concernés prennent des décisions à cet égard en coordination avec le Gouvernement iraquien.  Ces individus représentent un lourd fardeau pour mon pays, a-t-il affirmé, avant de remercier plusieurs pays qui ont répondu favorablement aux autorités iraquiennes en accueillant plus de 800 membres de l’EIIL.  Il a exhorté les autres pays concernés à également rapatrier leurs ressortissants.  L’Iraq espère en outre recevoir une aide pour déterminer les sources de financement de Daech.  Des efforts s’imposent par ailleurs pour venir en aide aux victimes du terrorisme, notamment dans les zones libérées, a-t-il ajouté.

Abordant la question de la coopération entre l’Iraq et le Koweït, M. Bahr Aluloom a annoncé que le Gouvernement iraquien avait réalisé des progrès importants pour mettre en œuvre le paragraphe 4 de la résolution 2107 (2013).  Il a indiqué que des dépouilles de personnes portées disparues avaient été retrouvées fin janvier et a appelé le Koweït à informer son gouvernement dès que possible des résultats de l’analyse pour déterminer la nationalité des personnes concernées.

Le représentant s’est, enfin, félicité des progrès réalisés sur le plan régional, notamment en ce qui concerne les recettes pétrolières, et a espéré la conclusion d’un accord définitif entre l’Iraq et le Kurdistan.  Il a espéré qu’après la défaite complète de l’EIIL et grâce au soutien constant de la communauté internationale, il sera possible de continuer à répondre aux aspirations de la population.

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