En cours au Siège de l'ONU

8725e séance – matin
CS/14111

Conseil de sécurité: au Yémen, l’escalade militaire éloigne les parties au conflit du processus politique, met en garde l’Envoyé spécial de l’ONU

« Nous sommes témoins au Yémen de ce que nous redoutions de longue date », a déclaré, ce matin, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Martin Griffiths, devant un Conseil de sécurité résonnant d’appels à la désescalade militaire et à la reprise du processus politique. 

Alors que des « signes d’espoir » et des « avancées » vers la paix avaient été constatés de part et d’autre depuis octobre dernier, la « recrudescence des violences pourrait se traduire par des revers et des conséquences humanitaires encore plus graves pour la population », a prédit le haut fonctionnaire, dans une mise en garde dont s’est fait l’écho le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Mark Lowcock.  « Cela fait des mois que j’appelle à un cessez-le-feu national », s’est impatienté celui-ci, en soulignant l’urgence absolue devant le « risque que la spirale de violence ne devienne incontrôlable ». 

C’est qu’au cours du mois écoulé, des opérations militaires d’envergure ont été lancées par les deux parties, assorties d’une rhétorique incendiaire, de violents affrontements ayant été constatés dans le district de Nehm et les provinces de Jaouf, de Mareb et de Saada.  Des lignes de front calmes depuis plusieurs mois sont maintenant gagnées par l’escalade, tandis qu’on signale de plus en plus de frappes et d’attaques aériennes transfrontalières, s’est alarmé M. Griffiths, en déplorant les informations selon lesquelles il y aurait des dizaines de victimes civiles, sans compter les déplacements de populations et les dégâts matériels dans les écoles et les hôpitaux. 

Or 30% des projets d’ONG humanitaires n’ont pas pu être menés l’an dernier à cause de l’absence d’autorisation du Gouvernement, a regretté M. Lowcock, sans oublier que 40% des projets de ce genre n’ont, eux, pas été approuvés par « les autorités d’Ansar Allah ».

Si les membres du Conseil de sécurité sont tous tombés d’accord, à la suite de M. Lowcock, pour demander la levée des obstacles à l’acheminement de l’aide humanitaire, certains ont affiché leurs divergences de vues quant à la responsabilité de la détérioration de la situation sur le terrain.  Les États-Unis ont ainsi accusé la République islamique d’Iran d’ingérence étrangère dans les affaires intérieures du Yémen et de soutien militaire aux houthistes, qui détourneraient, selon la délégation américaine, l’aide censée parvenir aux populations des zones sous le contrôle de ces milices.

« Alors que nous tous autour de cette table appelons à un retour aux pourparlers, l’Iran montre ses vraies couleurs en continuant d’envoyer des armes sophistiquées aux houthistes en violation de l’embargo imposé par le Conseil de sécurité », a lancé la représentante des États-Unis.  Des propos repris à son compte par son homologue du Yémen, qui a tempêté contre le « régime des mollahs » de Téhéran, soutien d’après lui des houthistes qui chercheraient à « affamer » les Yéménites. 

La Fédération de Russie a, en revanche, jugé « dangereux et improductif d’inciter à la haine contre l’Iran », plaidant plutôt pour une coopération qui permette de mettre fin à la guerre au Yémen et d’établir un dialogue entre les pays arabes et l’Iran. 

La Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2140 (2014), relatif aux sanctions applicables au Yémen, a également fait un exposé devant le Conseil de sécurité au cours duquel elle a exhorté les parties à respecter le droit international et à poursuivre les acteurs commettant des violations.  La Chine a, quant à elle, considéré que les sanctions ne constituent pas une « fin en soi ».

Pour l’Envoyé spécial, l’engagement des parties dans le processus politique dirigé par l’ONU doit être inconditionnel et ne saurait être indexé à des gains territoriaux, surtout lorsqu’il n’y a pas de solution militaire au conflit.  Avec le soutien du Conseil, nous travaillons à l’élaboration d’un « arrangement de désescalade véritablement inclusif », a souligné le haut fonctionnaire, pour qui une simple réduction de la violence serait insuffisante.  Elle doit en effet aller de pair avec la vision d’un Yémen postconflit conforme aux résolutions pertinentes du Conseil.

M. Griffiths a saisi cette occasion pour rappeler les éléments indispensables à la réalisation de cette vision: un gouvernement véritablement inclusif et un processus de transition politique; un secteur militaire et de la sécurité qui protège tous les Yéménites; des opportunités de reconstruire et revitaliser les institutions et l’économie nationales; et la fin des inimitiés même si les différences persistent.  « Les parties doivent faire preuve du courage nécessaire pour renoncer à leurs objectifs militaires de court terme et prendre un engagement soutenu, tangible et irréversible vis-à-vis du processus politique », a-t-il encore insisté.

Le Royaume-Uni, la Tunisie, le Viet Nam ou encore la Belgique se sont cependant félicités de l’échange de prisonniers auquel ont agréé les parties entre les 10 et 16 février, conformément au mécanisme exécutif agréé à Stockholm.  Plusieurs intervenants se sont aussi dits rassurés de l’abandon de la taxe de 2% que les houthistes envisageaient de prélever sur les ONG pour financer leur organe de coordination de l’aide, ainsi que de la reprise des vols dans le cadre du pont aérien médical.

En revanche, à la suite de l’Envoyé spécial et du Secrétaire général adjoint, les membres du Conseil ont fait part de leur inquiétude partagée quant à la menace environnementale posée par le pétrolier Safer, amarré près du port de Ras Issa, et dont l’état se détériore de jour en jour.  Toute rupture de sa coque pourrait conduire au déversement de plus d’un million de barils de pétrole dans la mer Rouge, a rappelé M. Griffiths, ce qui provoquerait une catastrophe environnementale et économique pour le Yémen et les États limitrophes.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

« Nous sommes témoins au Yémen de ce que nous redoutions de longue date », a déclaré M. MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, à l’entame de son intervention.  « Depuis octobre dernier, j’ai informé ce Conseil à plusieurs reprises des signes d’espoir et des élans vers la paix.  Mais nous sommes tous particulièrement conscients que la recrudescence des violences pourrait se traduire par des revers et des conséquences humanitaires encore plus graves pour la population », a-t-il dit.  Or, au cours du mois écoulé, a observé le haut fonctionnaire, la situation militaire est devenue extrêmement précaire.  Les deux parties ont annoncé des manœuvres militaires d’envergure et échangé des propos incendiaires, avec des affrontements particulièrement violents dans le district de Nehm et dans les provinces de Jaouf, de Mareb et de Saada.  Des lignes de front calmes depuis plusieurs mois sont maintenant gagnées par l’escalade et on signale de plus en plus de frappes aériennes et d’attaques aériennes transfrontalières, s’est-il alarmé.

« Je suis bouleversé par les informations faisant état de dizaines de victimes civiles, de déplacements de familles et de dégâts matériels causés dans les écoles et les hôpitaux. »  Les femmes et les enfants sont ceux qui souffrent le plus de plusieurs attaques, a souligné M. Griffiths, en ajoutant que les journalistes yéménites et les militants de la société civile continuent également de faire l’objet de pressions et de restrictions sévères.  Pour l’Envoyé spécial, cette escalade contredit directement la volonté affichée par les parties de progresser vers la paix.  M. Griffiths a dit craindre que cette situation ne menace également les progrès réalisés à Hodeïda, en vertu d’un fragile accord conclu en décembre 2018. 

Malgré la situation militaire désastreuse, les parties ont accompli des progrès significatifs en intensifiant leurs efforts pour renforcer la confiance et soulager les populations touchées, a-t-il poursuivi.  Entre le 10 et le 16 février, les parties se sont réunies à Amman, convenant d’échanger des prisonniers et des détenus conformément au mécanisme exécutif agréé à Stockholm.  « Il s’agit d’un engagement ferme des parties envers les familles pour qu’elles retrouvent leurs proches.  Et c’est un signe qu’elles sont prêtes à progresser vers leur engagement de remettre en liberté toutes les personnes privées de liberté dans le cadre du conflit », s’est félicité le haut fonctionnaire.  Cette mesure positive intervient à la suite de la libération par Ansar Allah, avec le soutien de l’UNICEF, de 68 garçons maintenant rendus à leurs familles.  En outre, au cours de la première moitié de février, les deux premiers vols dans le cadre du pont aérien médical ont permis de transporter 28 patients de Sanaa vers l’étranger pour qu’ils y bénéficient d’une assistance médicale. 

Dans l’ensemble, les progrès sur ces questions démontrent que les parties peuvent œuvrer de concert à l’atténuation des souffrances et que la confiance qu’elles ont forgée n’est pas perdue.  « Mais je crains qu’elle ne devienne de plus en plus fragile », a tempéré M. Griffiths.  « Je suis également profondément alarmé par le manque de progrès dans la lutte contre la menace posée par le pétrolier Safer, dont l’état se détériore de jour en jour.  Toute rupture de la coque pourrait conduire au déversement de plus d’un million de barils de pétrole dans la mer Rouge, provoquant une catastrophe environnementale et économique pour le Yémen et ses voisins », a prévenu l’Envoyé spécial.  Déjà retardée, la mission d’évaluation sous l’égide de l’ONU doit être dépêchée immédiatement et sans conditions, a-t-il exhorté.

« Tout ce que j’ai entendu de la part des dirigeants yéménites indique un principe fondamental: la paix ne peut émerger que d’un compromis politique par le biais d’un processus dirigé par l’ONU. »  M. Griffiths a précisé que ce processus ne sera pas dicté par une position de domination militaire.  L’engagement dans le processus mené par l’ONU doit être inconditionnel et ne peut être négligé au profit de gains territoriaux, surtout lorsqu’il n’y a pas de solution militaire.  Alors, comment pouvons-nous passer au lancement, enfin, de ce processus? a demandé l’Envoyé spécial.  Encouragé par ce Conseil, nous travaillons activement à cet objectif et à un « arrangement de désescalade véritablement inclusif », a expliqué le haut fonctionnaire.  Mais une réduction de la violence sera insuffisante, selon lui.  « Nous avons besoin que les parties s’unissent autour d’une vision pour un Yémen postconflit conforme aux résolutions pertinentes du Conseil. »

Pour M. Griffiths, il est peut-être opportun de rappeler les éléments suivants qui sont nécessaires: un gouvernement véritablement inclusif et un processus de transition politique; un secteur militaire et de sécurité qui protège tous les Yéménites; des chances de reconstruction et de revitalisation pour les institutions et l’économie du pays; et une acceptation que les inimitiés doivent cesser même si les différences persistent.  Ce sont des objectifs réalisables, lorsque la volonté politique est vraiment là, a-t-il assuré.  L’hésitation à s’engager sur la voie politique risque de compromettre notre travail acharné, a mis en garde l’Envoyé spécial.  « Les parties doivent faire preuve du courage nécessaire pour renoncer à leurs objectifs militaires de court terme et prendre un engagement soutenu, tangible et irréversible vis-à-vis du processus politique », a-t-il conclu.

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a rappelé que, chaque mois, il informe le Conseil des développements concernant les cinq priorités au Yémen: la protection des civils et le respect du droit international humanitaire; l’accès et les livraisons humanitaires; le financement des opérations d’aide des Nations Unies; l’économie yéménite et les progrès accomplis sur la voie de la paix.

Le Secrétaire général adjoint a commencé par confirmer ce que l’Envoyé spécial a souligné, à savoir que le Yémen traverse « une période extrêmement inquiétante », ce qui est également vrai pour les opérations humanitaires.  M. Lowcock a d’abord signalé, au chapitre de la protection des civils, une escalade des hostilités sur plusieurs fronts, plus spécialement dans les provinces de Mareb, Jaouf et Sanaa, alors que ces lieux étaient plutôt calmes ces deux dernières années.  Les combats dans ces zones ont conduit au déplacement de plus de 35 000 personnes depuis la mi-janvier, a-t-il précisé avant de parler des frappes aériennes de samedi qui auraient tué des dizaines de civils à Jaouf.  De plus, il y a 10 jours, les combats ont endommagé deux hôpitaux à Mareb et un membre du personnel médical a été blessé.  « Cela fait des mois que j’appelle à un cessez-le-feu national », s’est impatienté le Secrétaire général adjoint en soulignant que cela est plus urgent que jamais car il y a « un risque que la spirale de violence devienne incontrôlable ». 

En ce qui concerne l’accès humanitaire, M. Lowcock a rappelé les exigences du droit international humanitaire à cet égard qui s’appliquent à toutes les parties.  Il s’est inquiété de voir l’espace se réduire de part et d’autre pour mener les activités humanitaires.  Dans le Sud, les agences humanitaires doivent attendre trop longtemps pour l’approbation des projets et 30% des projets d’ONG l’an dernier n’ont pas pu être menés à cause de l’absence d’autorisation du Gouvernement.  M. Lowcock s’est aussi inquiété du projet de réglementation que le Gouvernement veut adopter, qui entraverait la capacité des agences humanitaires de circuler dans le pays.  La semaine dernière, a-t-il ajouté, le Gouvernement a rendu huit camions contenant des fournitures de l’UNICEF, qui étaient aux mains des forces gouvernementales à Mareb depuis le 30 janvier, mais 70% de la cargaison manquait.  Il a dit apprécier le dialogue en cours avec le Gouvernement sur ces questions.

Le Secrétaire général adjoint a ensuite souligné les graves problèmes rencontrés dans la fourniture de l’aide dans les zones contrôlées par les autorités d’Ansar Allah.  Il a fait état d’incidents qui interrompent les livraisons ou les déplacements du personnel humanitaire, dont un quart environ ont pour objectif d’influer sur les décisions déterminant les destinataires de l’aide ou d’interférer avec les programmes.  Les autorités d’Ansar Allah ont demandé aux ONG de signer des accords qui seraient incohérents avec les principes humanitaires, a-t-il aussi indiqué.  De plus, environ 40% des projets des ONG l’an dernier n’ont pas été approuvés, tandis qu’une taxe de 2% pourrait être payée par les ONG pour financer l’organe de coordination de l’aide des autorités.  « La situation est inacceptable », a déclaré le Secrétaire général adjoint en soulignant que l’arrêt des opérations d’aide les plus importantes au monde serait fatal pour des millions de personnes.  Il a rappelé à cet égard la récente déclaration du Secrétaire général à ce sujet et la réunion qui s’est tenue à Bruxelles la semaine dernière pour discuter des moyens de maintenir une assistance qui sauve des vies.

L’ONU, a-t-il indiqué, cherche à intensifier le dialogue avec les autorités d’Ansar Allah à tous les niveaux et par tous les moyens.  La semaine dernière, les autorités d’Ansar Allah ont rendu de la nourriture qui avait été prise d’un entrepôt du Programme alimentaire mondial (PAM) à Hajjah et elles ont annoncé qu’elles abandonnaient le projet de prélèvement de 2%.  Elles ont aussi écrit au PAM pour dire qu’elles mettraient en œuvre un accord de longue date sur l’enregistrement biométrique et d’autres questions.  M. Lowcock a déclaré se réjouir de ces annonces et attendre avec intérêt leur mise à exécution.  Parmi les questions qui restent en cours de discussion, il a cité l’approbation des projets des ONG, la nécessité d’une évaluation urgente en matière de sécurité alimentaire, et l’approbation d’une mission de surveillance.  Il a aussi appelé à résoudre le problème du pétrolier Safer après une mission d’évaluation de l’ONU qui est nécessaire et urgente.

Malgré toutes ces difficultés, les opérations d’aide humanitaire se poursuivent, a témoigné le Coordonnateur des secours d’urgence, le PAM fournissant une aide à 13 millions de personnes chaque mois et l’OMS des consultations médicales à plus de 1,5 million de personnes par mois.  Il a salué les travailleurs humanitaires et particulièrement le personnel yéménite, avant de s’inquiéter du manque d’évaluation des besoins dans le pays.  Nous n’avons pas entendu, encore, d’information qu’il y aurait des conditions de famine dans les zones à haut risque, a-t-il dit, tout en exprimant son incertitude à ce sujet du fait du manque d’évaluation. 

Sur le plan du financement des opérations d’aide, M. Lowcock a remercié nommément les pays qui ont apporté leur soutien et assuré que les agences humanitaires se montrent responsables de l’utilisation des fonds reçus.  Sachant que la générosité des donateurs dépend entre autres de la confiance que l’aide parvient aux personnes dans le besoin, il a souligné le risque que prennent ceux qui entravent la fourniture de l’aide.

En ce qui concerne l’économie, M. Lowcock a rappelé que les Yéménites dépendent presque entièrement des importations pour les aliments, le pétrole, les médicaments et d’autres biens de base, ce qui rend essentielle l’ouverture des ports.  Grâce à un mécanisme pour les importations commerciales de pétrole géré par l’Envoyé spécial, un volume plus important de pétrole arrive par rapport à octobre dernier.  Il a aussi mentionné les problèmes de taux de change de la monnaie entre le sud, où un dollar vaut 650 rials, et le nord, où il vaut 595 rials.  Il a salué les efforts de l’Arabie saoudite pour stabiliser la monnaie, notamment en mobilisant 227 millions de dollars, et espéré que ce soutien se poursuivrait.

Avant de conclure son intervention, M. Lowcock a rappelé que la paix est la seule façon de mettre un terme à la crise humanitaire au Yémen.  Il a attiré l’attention sur les sérieux risques mis en évidence par l’Envoyé spécial.  « Nous entamons maintenant la sixième année de cette guerre: trop c’est trop! » a-t-il prévenu.

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines), Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2140 (2014), a passé en revue les activités menées par le Comité depuis le 16 mai 2019.  Quatre recommandations ont été envoyées au Comité, a-t-elle ainsi indiqué.  Mme King a ensuite demandé le renforcement des capacités du Mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies au Yémen.  Elle a indiqué que le Comité a reçu deux rapports de mise en œuvre du Portugal et du Panama.  Le Comité exhorte les parties à respecter le droit international et à poursuivre les acteurs commettant des violations, a poursuivi la Présidente.  Enfin, elle a indiqué que le Comité a achevé le processus d’examen d’une demande de radiation des listes. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est félicitée de la conclusion d’un accord préliminaire relatif à l’échange de prisonniers, soulignant cependant que, « comme toujours », c’est la mise en œuvre qui sera décisive.  La désescalade commencée en octobre semble remise en cause par la reprise des hostilités, a déclaré la représentante en attribuant cela aux agissements des houthistes.  Mme Pierce a exhorté les parties à redoubler d’efforts pour entamer des pourparlers, avec la participation des femmes au processus politique.  Elle s’est dite ensuite préoccupée par les restrictions à l’accès humanitaire, qui se sont multipliées au cours du mois écoulé, en violation des résolutions pertinentes du Conseil.  Tant qu’elles ne seront pas levées, les organisations d’aide risquent de ne pas être en mesure d’apporter une assistance vitale aux nécessiteux, a prévenu Mme Pierce.  Elle a ensuite déclaré que le Gouvernement yéménite présenterait un plan crédible pour rassurer les bailleurs de fonds et leur inspirer la confiance nécessaire pour investir dans la population yéménite.  Mme Pierce s’est également déclarée inquiète des risques de rupture posés par le pétrolier Safer en mer Rouge.

Mme KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines), en sa capacité nationale, s’est inquiétée des menaces « sans précédent » qui persistent au Yémen, dénonçant notamment les conséquences, pour 6,7 millions de personnes dans le besoin, des contraintes qui entravent l’acheminement de l’aide humanitaire.  On ne saurait exagérer l’importance du maintien de l’aide humanitaire, alors que les conséquences d’un accès limité ne font que prolonger les souffrances de nombreuses personnes, a-t-elle indiqué.  Elle a appelé la communauté internationale à intervenir auprès des parties pour faciliter un accès humanitaire sûr et sans entrave, pour ensuite saluer les efforts déployés par les humanitaires.  Elle a également pris note de l’appel lancé en faveur de la levée des obstacles d’accès lors de la récente conférence des agences humanitaires qui s’est tenue à Bruxelles.

Poursuivant son intervention, la représentante a appelé à la reprise du processus de paix, « seule façon d’empêcher le conflit de perdurer ».  Elle a également fait part de ses préoccupations au sujet du pétrolier Safer.  Face à un risque environnemental sans précédent, il est urgent d’agir, a-t-elle lancé.  Elle a conclu en exhortant à faciliter immédiatement l’accès au navire.

M. TAREK LADEB (Tunisie) a noté la désescalade en cours au Yémen, malgré les points de tension qui demeurent.  Il a exhorté les parties à parvenir à un cessez-le-feu et à mettre l’intérêt du pays au-dessus de toute autre considération.  Il n’y a pas de solution militaire à la situation dans le pays, a-t-il affirmé.  Le représentant a demandé la mise en œuvre de l’Accord de Riyad et l’instauration des conditions nécessaires à une reprise du dialogue.  Il a salué l’accord en vue d’un échange de prisonniers de grande ampleur, qui constitue, selon lui, un pas positif vers la pleine application de l’Accord de Stockholm.  La situation humanitaire s’est détériorée, a-t-il ensuite regretté.  Le délégué a également appelé à donner accès au pétrolier Safer, afin de pouvoir éviter une catastrophe environnementale.  Enfin, le représentant tunisien a demandé la protection des travailleurs humanitaires dans le pays.

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) s’est dite troublée par la lenteur de la mise en œuvre de l’Accord de Riyad et consternée par le manque de progrès vers une solution politique au conflit.  « Nous demandons au Gouvernement yéménite et au Conseil de transition du Sud de mettre rapidement en œuvre l’Accord et nous nous félicitons de la poursuite de la facilitation saoudienne de ce processus », a-t-elle dit.  Les récentes mesures prises par les houthistes nuisent aux populations yéménites et devraient cesser, a-t-elle considéré, avant de déclarer que l’Iran est responsable des tirs de missiles en date du 14 septembre dernier contre des installations pétrolières saoudiennes et que cet État continue d’intervenir dans la situation au Yémen.  La représentante a cité à charge l’interception par la marine américaine de 358 missiles de fabrication iranienne destinés à être livrés aux houthistes.  « Alors que nous tous autour de cette table appelons à un retour aux pourparlers, l’Iran montre ses vraies couleurs en continuant d’envoyer des armes sophistiquées aux houthistes en violation de l’embargo imposé par le Conseil de sécurité. »

La représentante a également dénoncé l’ingérence des houthistes dans le travail des partenaires humanitaires dans le nord du Yémen.  Si les houthistes ont accepté d’abandonner leur projet de taxe sur les projets, ils ont quand même été clairs sur le fait qu’ils attendent des ONG un financement quel qu’il soit, a-t-elle affirmé.  Elle s’est aussi inquiétée de l’interférence des houthistes qui empêche actuellement de garantir une assistance dans les zones que ces derniers contrôlent.  En conséquence, les donateurs sont confrontés à un dilemme: comment poursuivre l’acheminement de l’aide tout en rendant des comptes aux contribuables, a expliqué la déléguée, qui a prévenu que son propre gouvernement pourrait devoir envisager de suspendre l’aide au Yémen dès le mois de mars.  Enfin, Mme Craft a réitéré son appel aux houthistes pour qu’ils autorisent l’ONU à procéder à une évaluation de l’état du pétrolier Safer, sous peine de devoir assumer l’entière responsabilité de toute catastrophe environnementale future.

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a dit craindre que le Yémen ne soit entré dans une phase d’intensification des violences armées, avec des conséquences humanitaires majeures pour les populations civiles.  Il s’est dit convaincu que la solution définitive au conflit doit se fonder sur des compromis mutuels de la part des parties, soulignant la nécessité de mettre en œuvre les accords conclus jusqu’à présent, avec la participation de tous les Yéménites, sans qu’aucun ne soit exclu.  La Russie continuera, à titre national et en tant que membre du Conseil de sécurité, de travailler avec l’ensemble des parties concernées, a assuré le représentant.  Pour le moment, le régime de cessez-le-feu perdure dans la région d’Hodeïda, où la livraison de l’aide humanitaire doit se poursuivre, a-t-il souligné. 

Le représentant a ensuite appelé tous les Yéménites à s’unir pour lutter contre le terrorisme.  L’approche du cinquième anniversaire du début du conflit doit être l’occasion de relancer le processus politique, qui est « plus urgent que jamais », a-t-il estimé.  Tout ceci doit se faire dans le cadre d’un travail impartial, selon M. Safronkov pour qui il est « dangereux et improductif d’inciter à la haine de l’Iran ».  Il a plaidé pour une coopération qui permette de mettre fin à la guerre au Yémen et d’établir un dialogue entre les pays arabes et l’Iran.

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) s’est dit préoccupé par la reprise des hostilités, qui ont provoqué le déplacement de près de 5 000 personnes dans le centre du pays, et a appelé au respect du droit international humanitaire. Le représentant s’est également soucié de la détérioration de la situation humanitaire, notant qu’elle se complexifie en raison de la situation climatique.  L’infestation de criquets pèlerins menace le Yémen où les conséquences pourraient s’avérer particulièrement sévères en raison de la fragilité de la sécurité alimentaire dans le pays, a-t-il alerté.  Il a appelé à agir d’urgence pour éviter que cette infestation n’atteigne le Yémen.

M. Singer Weisinger a ensuite appelé à aboutir « aujourd’hui plus que jamais » à un accord politique complet et inclusif et à progresser dans la mise en œuvre des Accords de Stockholm et de Riyad.  Le processus politique au Yémen doit également reposer sur la participation des femmes et des jeunes et tenir compte de leurs besoins, a-t-il ajouté.  Il a notamment relevé que, depuis le début du conflit, la production agricole est de plus en plus souvent assumée par les femmes, augmentant ainsi leur participation à l’économie du pays.  Il s’est en outre félicité des évacuations médicales qui ont pu être effectuées vers des pays voisins grâce à l’établissement d’un pont aérien depuis l’aéroport de Sanaa.

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a condamné la résurgence de la violence dans le nord du Yémen.  Il a appelé les parties à briser le cycle de violences et à s’engager de manière constructive et sans délais dans des efforts de désescalade militaire.  De telles mesures de renforcement de la confiance sont nécessaires pour reprendre le chemin des pourparlers politiques, selon la délégation, qui a appelé tous les acteurs à respecter le droit international humanitaire et des droits de l’homme et à protéger les civils ainsi que les infrastructures civiles.  Le représentant s’est dit horrifié par les informations faisant état de violence à l’encontre des femmes, en particulier dans les zones sous contrôle des houthistes.  Aussi a-t-il exhorté à nouveau les parties à ne pas perdre de temps et à coopérer avec l’Envoyé spécial pour parvenir à une solution politique.  Il a conclu en lançant un appel à la levée de tous les obstacles entravant la livraison de l’aide humanitaire. 

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a exprimé sa profonde inquiétude face à la dégradation de la situation humanitaire au Yémen.  Toutes les parties doivent respecter pleinement le droit international et faciliter le travail des agences humanitaires, a-t-il plaidé.  Le délégué a salué les premiers vols d’évacuations médicales mis en place entre Sanaa et Amman et l’accord pris en vue d’un échange de prisonniers.  Malgré la fragilité de la situation, il s’est dit convaincu qu’un règlement politique est possible au Yémen.  Le délégué a ainsi demandé la pleine mise en œuvre des Accords de Riyad et de Stockholm.  Le Conseil de sécurité doit rester uni dans son appui à une solution politique globale, a conclu le délégué du Viet Nam.

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie), jugeant la situation au Yémen très préoccupante, a appelé les parties à cesser les hostilités.  Il a dénoncé les attaques contre les infrastructures civiles, qui ne peuvent être justifiées par aucune circonstance, a-t-il rappelé.  La protection des civils doit être la priorité des parties, a-t-il dit.  Le délégué a en outre demandé la levée des restrictions au bon acheminement de l’aide humanitaire et souligné la nécessité de laisser aux responsables onusiens un accès au pétrolier Safer, pour prévenir une catastrophe environnementale en mer Rouge.  Le délégué a néanmoins salué l’annonce d’un accord pour un échange de prisonniers à grande échelle.  Enfin, le délégué a demandé la pleine application de l’Accord de Riyad, en vue de parvenir à un règlement politique. 

Mme DIYANA SHAISTA TAYOB (Afrique du Sud) a appelé les parties à s’engager en faveur d’un processus politique par l’intermédiaire du dialogue, regrettant l’absence de mise en œuvre supplémentaire de l’Accord de Riyad.  Elle a salué le travail effectué par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) pour établir un pont aérien entre Sanaa et Amman pour les évacuations médicales.  L’accord conclu à cet effet démontre que des progrès peuvent être accomplis lorsque la volonté politique est ferme, a-t-elle fait remarquer.  Elle s’est en revanche inquiétée des restrictions imposées aux opérations humanitaires dans le nord du pays et a appelé les parties au conflit à assurer le passage libre, régulier et sans entrave de vivres et d’autres articles d’aide.

La représentante s’est par ailleurs déclarée consternée par la récente escalade des combats au Yémen et de l’augmentation du nombre de victimes, notamment à Nehm, Mareb et Jaouf.  Elle a appelé au respect du cessez-le-feu à Hodeïda.  La crise humanitaire sans précédent nécessite un engagement urgent en faveur d’un cessez-le-feu et la recherche d’une solution négociée, pacifique et inclusive à la crise, a-t-elle souligné.

M. ZHANG JUN (Chine) s’est félicité de l’accord relatif à l’échange de prisonniers récemment conclu par les parties, soulignant que, lorsque la volonté politique est là, des progrès peuvent être accomplis.  Toutes les parties doivent maintenant relancer le processus politique le plus rapidement possible, a-t-il exhorté, en se félicitant de la conclusion de l’Accord de Stockholm et de l’Accord de Riyad.  Toutes les parties doivent coopérer avec la mission et faire preuve de consensus sur le volet de la mise en œuvre, a souligné le représentant, qui les a également encouragées à lever les obstacles entravant l’aide humanitaire.  Selon la délégation chinoise, l’unité du Conseil de sécurité est la base sine qua non pour permettre au processus politique d’avancer.  Enfin, le représentant a estimé que les sanctions imposées au Yémen ne sont pas une fin en soi.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) s’est dit très préoccupé par les restrictions imposées par les houthistes au bon acheminement de l’aide humanitaire, alors que 12 millions de Yéménites font face à un besoin désespéré d’assistance.  Il a jugé inacceptable que la population dans le besoin soit victime de la bureaucratie et d’autres obstacles, et exhorté les houthistes à coopérer avec le Coordonnateur humanitaire pour instaurer un environnement propice au travail des intervenants humanitaires.  Sur le plan politique, il a appuyé le travail abattu par l’Envoyé spécial, ajoutant que tout progrès, même minime, est le bienvenu.  Le délégué a salué les premiers vols d’évacuations médicales mis en place depuis Sanaa, ainsi que l’accord en vue d’un échange de prisonniers de grande ampleur.  Nous espérons que cet échange sera bientôt réalisé, a-t-il dit.  Le délégué de l’Indonésie a par ailleurs souligné la nécessité de permettre un accès au pétrolier Safer, afin d’éviter une catastrophe environnementale.  Les parties doivent tout faire pour éviter les victimes civiles, a-t-il conclu, en appelant à la poursuite du dialogue. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a appelé à mettre un terme aux souffrances de la population yéménite.  Il a demandé une solution politique globale et inclusive au Yémen.  Jugeant nécessaires des mesures de confiance, il a salué les premiers vols d’évacuations médicales mis en place entre Sanaa et Amman, se félicitant aussi de l’accord en vue d’un échange de prisonniers de grande ampleur.  Le représentant a demandé la mise en œuvre de l’Accord de Riyad et la reprise du dialogue politique en vue d’une solution inclusive pour l’ensemble du Yémen.  Tout doit être fait pour garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave, ainsi que la protection des acteurs humanitaires, a déclaré le délégué.  L’annonce de l’abandon par les houthistes de la taxe de 2% sur les projets humanitaires est une première étape, a-t-il estimé.  Enfin, M. de Rivière a souligné la nécessité que les responsables onusiens aient accès au pétrolier Safer, pour prévenir une catastrophe environnementale. 

M. ABDOU ABARRY (Niger) s’est déclaré préoccupé par l’escalade militaire observée au cours des derniers jours au Yémen, qui constitue un obstacle considérable à la reprise du dialogue.  Il a appelé les parties à faire preuve d’unité dans la mise en œuvre des accords conclus.  En ce qui concerne l’aide humanitaire, indispensable pour les « populations nécessiteuses », elle doit se poursuivre et même être renforcée, a ensuite préconisé le représentant.  S’agissant du processus politique, il demeure, selon lui, le seul moyen de parvenir au règlement du conflit.  « On ne le dira jamais assez », a-t-il insisté.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a demandé la reprise du dialogue politique, ajoutant que le Gouvernement du Yémen devra être à un moment impliqué dans les pourparlers.  Il a salué l’accord en vue d’un échange de prisonniers de grande ampleur, avant de demander la mise en œuvre de l’Accord de Riyad.  Le délégué belge a en outre demandé la levée des restrictions au bon acheminement de l’aide humanitaire.  Lors de la réunion de Bruxelles, le 13 février, les donateurs ont réaffirmé leur soutien aux Nations Unies et aux autres acteurs humanitaires, a-t-il rappelé.  Il a salué l’annonce de l’abandon par les houthistes de la taxe de 2% sur les projets humanitaires, ainsi que la reprise des vols médicaux.  Le délégué a également souligné la nécessité d’un accès au pétrolier Safer, pour prévenir une catastrophe environnementale.  Toutes les parties doivent respecter leurs obligations découlant du droit international humanitaire, a-t-il conclu. 

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a salué les efforts de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, Martin Griffiths, en faveur d’un règlement politique au Yémen.  L’Accord de Stockholm aurait dû être un point de départ pour mettre un terme au conflit et aux souffrances du peuple yéménite, victimes de la guerre des houthistes appuyés par l’Iran, a-t-il déclaré.  Il a ensuite accusé les houthistes d’être toujours récalcitrants à la mise en œuvre de l’accord et de vouloir exécuter les desseins de l’Iran dans le pays.  Selon lui, les houthistes veulent tuer dans l’œuf tout effort de paix.  Pour le représentant, la tenue de consultations est tributaire des mesures de bonne foi qui seront prises pour mettre en œuvre l’Accord de Stockholm.  Il a rappelé l’implication de son gouvernement dans l’accord en vue d’un échange de prisonniers de grande ampleur, annoncé récemment, ainsi que ses efforts pour mettre en œuvre l’Accord de Riyad.

Par ailleurs, le représentant du Yémen a accusé les houthistes de piller l’aide humanitaire et d’agresser les agents humanitaires.  La communauté internationale doit se montrer ferme dans sa condamnation de tels agissements, a-t-il dit.  « Les milices houthistes veulent affamer les Yéménites et tirent profit de la situation actuelle. »  Il a aussi accusé ces milices d’appuyer l’État islamique au Yémen, lequel a pris le contrôle de certaines positions militaires.  Il a insisté sur le lien étroit entre ces milices et le « régime des mollahs » de Téhéran.  Le représentant yéménite a également fait part des préoccupations de son gouvernement face à la potentielle catastrophe écologique, qui pourrait découler de la situation du pétrolier Safer.  Enfin, il a appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à faire pression sur les houthistes pour obtenir l’accès à ce navire en vue de pouvoir évaluer la situation. 

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