En cours au Siège de l'ONU

Soixante-quinzième session,
Dialogues virtuels – matin
AG/SHC/4293

La Troisième Commission mesure à nouveau les conséquences de la COVID-19 sur la promotion et la protection des droits de l’homme

La Troisième Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles a entamé aujourd’hui son imposant examen de la promotion et de la protection des droits de l’homme, et de l’application des instruments aux situations spécifiques de pays, entendant à cette occasion plusieurs titulaires de mandats qui, l’un après l’autre, ont évoqué les répercussions préjudiciables de la pandémie de COVID-19 sur les personnes et leurs travaux. 

Venu présenter 10 rapports du Secrétaire général et de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, le Directeur du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), n’a pas caché que les perturbations liées à la pandémie ont rendu difficile l’obtention des informations et le dialogue des États avec les mécanismes.  « Nous veillons à ce que ce dialogue se poursuive », a-t-il néanmoins assuré lors d’un échange interactif virtuel avec les délégations.  

Parmi les rapports détaillés par M. Craig Mokhiber, celui sur les mariages d’enfants et les mariages précoces et forcés suggère de s’attaquer à ces problèmes exacerbés par la pandémie en fixant l’âge minimum légal du mariage à 18 ans.  Le rapport consacré au droit au développement appelle quant à lui à tenir compte de l’appel lancé par le groupe des pays les moins avancés (PMA) en faveur d’un plan de relance mondial pour relever les défis croissants que pose la COVID-19. 

S’agissant des rapports relatifs à la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), en République islamique d’Iran, au Myanmar ainsi que dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine), M. Mokhiber a, là aussi, pointé les effets néfastes de la COVID-19 sur le terrain.  

Le rapport sur la RPDC s’inquiète notamment de l’impact négatif de la réponse du Gouvernement, qui ne reconnaît pas les cas de COVID-19 et impose à la population de nouvelles restrictions à la liberté de mouvement.  De son côté, le rapport sur l’Iran fait état de défis socioéconomiques supplémentaires en raison des contraintes de ressources liées à l’imposition de sanctions, entre autres, et appelle à leur levée.   

Le rapport du Secrétaire général sur la question des droits de l’homme dans l’administration de la justice se concentre, pour sa part, sur la situation d’un groupe particulièrement vulnérable en cette période de crise: les personnes handicapées.  Il aborde en particulier les questions de l’institutionnalisation et de la détention des personnes souffrant d’un handicap psychologique ou intellectuel, en encourageant les États à élaborer des stratégies de désinstitutionalisation.   

Sur une question connexe, celle des mesures prises par le système des Nations Unies pour assurer l’intégration des personnes handicapées, la Conseillère principale pour les questions politiques, Mme Ana María Menéndez, a présenté un rapport du Secrétaire général sur la stratégie ad hoc lancée pour aider les États Membres à mettre en œuvre la Convention relative aux droits des personnes handicapées.  La COVID-19 a de « grandes retombées » sur la question du handicap et sur les travaux des entités onusiennes impliquées, a-t-elle reconnu tout en assurant que la continuité des opérations sera assurée en dépit de la pandémie. 

La COVID-19 a également eu pour conséquence la suspension en mars de la cent-vingt-huitième session du Comité des droits de l’homme, qui a pu reprendre ses activités en juillet sur une plateforme en ligne.  Son Président, M. Ahmed Amin Fathalla, a précisé que les organes conventionnels travaillent désormais de manière virtuelle « pour éviter une lacune de protection pour les titulaires de droits ».  

Ce n’est cependant pas le cas pour le « dialogue constructif » avec les États parties, que le Comité ne peut entretenir en ligne.  C’est pourquoi, a concédé M. Fathalla, « nous n’avançons pas » et qu’il y aura un retard supplémentaire dans la présentation des rapports.  Ces difficultés viennent s’ajouter à celles rencontrées par le Comité pour examiner les communications individuelles au cours de ses sessions.  L’arriéré ne cesse en effet de croître, le nombre des affaires pendantes étant passé de 746 fin  2018 à 1 178 à la fin de l’année dernière.  

Face à ces contraintes logistiques, techniques et financières, le Président du Comité a invité les États Membres à s’acquitter de leurs responsabilités au titre des traités qu’ils ont ratifiés, tout en veillant à ce que les organes conventionnels soient correctement financés par le budget ordinaire de l’ONU.  Un appel repris à son compte par le Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels selon lequel la poursuite du travail des comités pour la promotion et la protection des droits de l’homme dépend de ces ajustements budgétaires.  

Confronté lui aussi à une situation générale de non-présentation ou de présentation tardive des rapports, M. Renato Zerbini Ribeiro Leao a souhaité que des moyens soient trouvés pour faciliter ce processus.  Quant à la méthode de travail pendant la pandémie, il a estimé que, si les cadres virtuels ne peuvent remplacer les réunions en personne, l’outil numérique doit être adapté aux besoins des organes afin qu’ils puissent en faire bon usage.  

La Troisième Commission poursuivra l’examen de la promotion et de la protection des droits de l’homme mercredi 14 octobre à partir de 10 heures.  

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Déclarations liminaires de hauts fonctionnaires du Secrétariat, suivies d’une séance de questions-réponses

Mme ANA MARÍA MENÉNDEZ, Conseillère principale pour les questions politiques, a présenté un rapport du Secrétaire général portant sur les mesures du système des Nations Unies destinées à assurer l’intégration des personnes handicapées.  Il s’agit de prêter main forte aux États Membres pour les aider à réaliser les objectifs de développement durable et à mettre en œuvre la Convention relative aux droits des personnes handicapées, a-t-elle précisé.  À cette double fin, le Secrétariat a mis en place une stratégie ad hoc pour veiller à ce que les Nations Unies puissent donner l’exemple sur la question de l’inclusion des personnes handicapées, et ce, sans faire de laissés-pour-compte.

Depuis le lancement de cette stratégie, a poursuivi Mme Menéndez, 57 entités du système de l’ONU ont fait rapport sur sa mise en œuvre, de même que 7 missions des Nations Unies qui participent à la première phase d’application des cartes de performance.  Le rapport présente la « raison d’être » de la stratégie et commence seulement à rendre compte de l’intégration des personnes handicapées de manière holistique, a expliqué la Conseillère.  Elle a par ailleurs indiqué qu’un certain nombre d’entités ont commencé à se doter de politiques consacrées au handicap.  Toutefois, a-t-elle relevé, à 48% nous ne respectons pas encore les exigences.  Il reste donc encore un long chemin à parcourir, notamment en matière de consultations des organisations représentant les personnes handicapées.  Mais les premiers retours sont encourageants, a-t-elle estimé, ajoutant que des directives de communication à l’échelle du système onusien sont en train d’être rédigées.  À ses yeux, les rapports des États Membres restent fondamentaux dans le cadre de la stratégie, laquelle vise à faire qu’un système et un monde inclusifs deviennent la réalité pour tous, y compris les personnes handicapées.

La Nouvelle-Zélande a exprimé son plein appui à la stratégie présentée par Mme Menéndez, tandis que l’Arménie a rappelé que les personnes handicapées sont victimes de la politique azerbaïdjanaise dans le territoire du Haut-Karabakh.  Quelles mesures envisagées pour atteindre les personnes handicapées dans les zones de conflit, a demandé la délégation.

En réponse à ces prises de position, la Conseillère principale a reconnu que la pandémie de COVID-19 a de grandes retombées sur la question du handicap.  Dès le mois de mai, le Secrétaire général a publié un document important sur cette question, qui a donné lieu à une mise en œuvre par les États Membres.  De plus, un groupe de travail interinstitutions a été créé pour lancer des mesures concrètes.  Nous avons donc maintenant un travail opérationnel à mener, a souligné la Conseillère, précisant que le système de l’ONU se concentre aujourd’hui sur plusieurs fronts, en particulier les questions de financement et d’assistance humanitaire ainsi que les conséquences de la COVID-19.  Affirmant que la continuité des opérations sera assurée en dépit de la pandémie, elle a ajouté que, sur un plan technique, la priorité est d’étendre la coordination et d’améliorer les performances.  Pour ce qui est des retombées des conflits armés pour les personnes handicapées, le Conseil de sécurité a déjà adopté une résolution sur ce sujet, la toute première du genre, a-t-elle rappelé.  Elle a enfin précisé que, dans un cadre du volet humanitaire de la stratégie déployée, le Secrétariat travaille en étroite collaboration avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA). 

M. CRAIG MOKHIBER, Directeur du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a présenté 10 rapports du Secrétaire général et du Haut-Commissaire aux droits de l’homme consacrés à la promotion et la protection des droits de l’homme.  

Le rapport sur la question des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés (A/75/262) suggère d’intensifier les efforts pour s’attaquer à ce problème en fixant l’âge minimum légal du mariage à 18 ans et en criminalisant et en incorporant des ordonnances de protection dans la législation pour les filles et les femmes à risque.  Il illustre également comment les chefs religieux, les travailleurs sociaux et des secteurs tels que l’éducation peuvent contribuer à résoudre ce problème.  Ce document recommande de réviser la législation qui tolère ou encourage le mariage des enfants, ainsi que les dispositions discriminatoires en matière d’héritage, de nationalité, de travail, d’accès au crédit, de statut juridique, et d’accès aux services de santé sexuelle et reproductive qui aggravent la situation des filles et des femmes mariées. 

Le rapport du Secrétaire général sur les personnes disparues (A/75/306) note en particulier le nombre élevé d’enfants portés disparus et l’impact sur les enfants dont les membres de la famille ont disparu.  Il recommande de donner la priorité à la prévention, à la préparation et à l’action rapide, y compris par le biais de la coopération internationale.

Le rapport sur la question des droits de l’homme dans l’administration de la justice (A/75/327) se concentre, pour sa part, sur la situation des personnes handicapées et traite notamment de leur accès à la justice, du droit à un procès équitable, et de la nécessité de prévoir les aménagements nécessaires pour les personnes handicapées. Il examine également les droits des personnes handicapées privées de liberté, en abordant les questions de l’institutionnalisation et de la détention des personnes souffrant d’un handicap psychologique ou intellectuel.  Il encourage les États à élaborer des stratégies de désinstitutionalisation qui prévoient des services de proximité. 

Un autre rapport (A/75/223) traite des défis à relever pour réaliser le droit au développement dans les pays les moins avancés (PMA) et recommande que les mécanismes des droits de l’homme prennent en compte les défis spécifiques rencontrés par les PMA.  Il encourage toutes les parties prenantes concernées à tenir compte de l’appel lancé par le groupe des pays les moins avancés en faveur d’un plan de relance mondial pour relever les défis croissants que pose à ces pays la pandémie de COVID-19.  Il recommande également aux PMA de mieux intégrer le droit au développement et les autres droits de l’homme dans leurs plans nationaux de développement et autres programmes et politiques. 

De son côté, le rapport sur le moratoire sur l’application de la peine de mort porte sur les progrès accomplis vers l’abolition de la peine de mort et l’instauration de moratoires sur les exécutions.  Il met en lumière les tendances en matière de recours à la peine de mort, notamment l’application des normes internationales relatives à la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, les conditions de détention des condamnés à mort et l’application de la peine de mort aux ressortissants étrangers.  Le document traite également de son application disproportionnée et discriminatoire envers les femmes et les personnes pauvres ou économiquement vulnérables. 

Le rapport sur le rôle de l’ombudsman, du médiateur et des autres institutions nationales de défense des droits de l’homme dans la promotion et la protection des droits de l’homme (A/75/224) met l’accent, pour sa part, sur les obstacles rencontrés par les États dans la création d’institutions de médiateurs et d’ombudsman, ainsi que sur les meilleures pratiques en matière de travail et de fonctionnement de ces institutions. 

Le rapport sur la lutte contre l’intolérance, les stéréotypes négatifs, la stigmatisation, la discrimination, l’incitation à la violence et la violence contre les personnes, fondée sur la religion ou la conviction (A/75/369) fournit des informations sur les cadres constitutionnels et législatifs ainsi que sur les mesures pratiques prises pour traiter cette question.  Le rapport encourage les États à utiliser les mécanismes existants, tels que le Processus d’Istanbul et l’Examen périodique universel, pour mettre en œuvre le plan d’action décrit dans la résolution 74/137.  Il les invite également à envisager de rationaliser les processus parallèles actuels de présentation de rapports au Conseil des droits de l’homme et à l’Assemblée générale. 

Passant aux situations de pays, M. Mokhiber a présenté le rapport sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (A/75/271).  Ce rapport met en évidence la répression continue des droits civils et politiques ainsi que les conditions et les traitements infligés dans les lieux de détention.  Il traite notamment des violations spécifiques auxquelles sont confrontées les femmes détenues, y compris les fouilles corporelles dégradantes et invasives de celles qui sont rapatriées de force.  Bien que la RPDC n’ait pas reconnu l’existence de cas de COVID-19, le rapport indique que des préoccupations existent concernant l’impact négatif de la réponse du Gouvernement à la pandémie, les nouvelles restrictions à la liberté de mouvement à l’intérieur du pays et à travers les frontières risquant d’exacerber une situation économique déjà difficile. 

Le rapport sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran (A/75/287) traite de la répression violente des manifestations nationales de novembre 2019 et de janvier 2020, notamment l’absence d’enquêtes et de redevabilité concernant les allégations d’usage excessif et meurtrier de la force.  Il souligne que l’application de la peine de mort reste élevée et demande au Gouvernement de commuer les peines des 85 enfants qui se trouvent actuellement dans le couloir de la mort.  Le rapport met en lumière la pratique persistante d’imposer de longues peines de prison à des personnes exprimant des opinions dissidentes, notamment des défenseurs des droits de l’homme, des avocats, des journalistes et des manifestants pacifiques.  Le rapport note par ailleurs que l’Iran est confronté à des défis socioéconomiques supplémentaires en raison de l’imposition de sanctions, de la chute des prix du pétrole et des effets de la pandémie de COVID-19, et appelle à la levée des sanctions pour permettre une meilleure réponse. 

Le rapport consacré au Myanmar (A/75/288) souligne que de graves violations des droits de l’homme et des abus continuent d’être perpétrés en toute impunité dans diverses parties du pays, notamment dans le contexte des affrontements armés en cours entre la Tatmadaw et les groupes armés ethniques, en particulier dans les États rakhine et chin.  Le rapport souligne qu’il y a eu peu de progrès substantiels en matière de redevabilité, malgré les mesures prises en vue des procédures de la Cour internationale de Justice (CIJ). 

Enfin, le rapport sur la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine)(A/75/334) met en évidence les conséquences, sur les droits de l’homme, de l’application du cadre juridique de la Fédération de Russie en Crimée, la situation des détenus ukrainiens en Crimée et dans la Fédération de Russie, la conscription forcée, les transferts illégaux de population et les atteintes aux libertés fondamentales et au droit à la propriété.  Enfin, le rapport sur la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) (A/75/334 met en évidence les conséquences, sur les droits de l’homme, de l’application du cadre juridique de la Fédération de Russie en Crimée, la situation des détenus ukrainiens en Crimée et dans la Fédération de Russie, la conscription forcée, les transferts illégaux de population et les atteintes aux libertés fondamentales et au droit à la propriété. 

Dialogue interactif

La Fédération de Russie a décrié une approche politisée s’agissant notamment du rapport concernant la Crimée et a affirmé ne pas reconnaître le mandat lié à ce document.  Elle a souligné que la République de Crimée et la ville de Sébastopol sont des sujets de la Fédération de Russie conformément à la volonté des habitants et à toutes les normes du droit international.  Concernant les visites en Crimée et à Sébastopol, son pays est prêt à collaborer si « toutes les mesures sont respectées ».

À ce sujet, l’Ukraine a exhorté à ce que la mission d’établissement des faits puisse accéder au territoire occupé, dénonçant par ailleurs le manque de volonté persistant de la Russie au regard de ses obligations.  Les populations autochtones en Crimée sont prises pour cible et l’emprisonnement est devenu le lot quotidien de nombreuses personnes.  La délégation a par ailleurs fait savoir qu’elle présenterait un projet de résolution sur cette question en temps voulu.

Les États-Unis ont dénoncé les représailles dont sont l’objet les défenseurs des droits de l’homme lorsqu’ils cherchent à témoigner dans le cadre de l’Examen périodique universel de leur pays à Genève ou des travaux d’autres institutions des droits de l’homme de l’ONU.  La délégation a voulu savoir quels étaient les défis les plus importants en matière de représailles.

L’Arménie a souligné que la question des personnes disparues est une question humanitaire, jugeant inacceptable de la politiser.

L’Éthiopie s’est interrogée, pour sa part, sur les mesures à prendre pour combler la précarité des ressources qui est souvent à l’origine des mariages précoces.  En la matière, le Directeur du Bureau de New York du Haut-Commissariat aux droits de l’homme a préconisé que les budgets prévoient d’octroyer des ressources conséquentes pour lutter contre ce phénomène.  Des mesures appropriées s’imposent au risque de voir un accroissement de la vulnérabilité pour les filles et les enfants, a-t-il notamment souligné.

À son tour, la RPDC a affirmé que les allégations contenues dans le rapport qui la concerne sont le fait d’une « poignée de déserteurs ».  Cela est l’exemple même du type de sélectivité en matière des droits de l’homme, a-t-elle déploré, avant de recommander que le nom du Secrétaire général soit retiré de ce genre de documents « dénués d’objectivité ».  « Nous agirons face à toute campagne attaquant notre pays », a-t-elle en outre averti.

La République islamique d’Iran a, elle aussi, regretté les allégations contenues dans le rapport sur la situation des droits de l’homme en Iran, tout en se déclarant déterminée à collaborer avec les organes des droits de l’homme de manière objective et non politisée.

La Syrie s’est élevée contre les mesures unilatérales qui entravent le développement économique et a décrié l’usage des mécanismes des droits de l’homme pour déstabiliser les pays.

Le Directeur du Bureau de New York du Haut-Commissariat aux droits de l’homme a par ailleurs indiqué que les perturbations liées à la pandémie de COVID-19 a rendu difficile l’obtention d’informations ainsi que le dialogue avec l’ONU et ses mécanismes, tout en préconisant une véritable transparence et coopération.

M. AHMED AMIN FATHALLA, Président du Comité des droits de l’homme, a indiqué que, dans le cadre de sa procédure de présentation de rapports, l’instance a examiné 16 rapports d’États parties.  Le Comité a formulé des recommandations sur les défis identifiés à la fois dans les rapports des États parties et au cours des dialogues constructifs.  En outre, il a adopté 9 listes de questions relatives aux rapports initiaux ou périodiques reçus des États parties et 10 listes de questions avant de présenter un rapport dans le cadre de la procédure simplifiée de présentation de rapports.  Conformément à la « vision » des présidents, adoptée en juin 2019 en vue de donner plus d’effet à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité a également décidé de simplifier la procédure de rapport.  L’objectif du cycle d’examen prévisible est d’améliorer la prévisibilité des rapports et d’assurer la présentation de rapports réguliers par tous les États parties, a-t-il expliqué.

M. Fathalla a noté avec satisfaction qu’un certain nombre d’États continuent de bénéficier du programme conçu par l’Assemblée générale pour les aider à renforcer leurs capacités à s’acquitter de leurs obligations conventionnelles.

En ce qui concerne les communications individuelles au titre du Protocole facultatif, le Comité a adopté 136 décisions pendant la période de présentation de rapports, ce qui témoigne de ses efforts croissants dans l’examen des cas au cours de ses sessions.  Le Président du Comité a précisé à cet égard que 101 affaires ont été conclues en 2018 et 134 en 2019.  Cependant, malgré cette productivité accrue, l’arriéré des communications individuelles ne cesse de croître.  C’est ainsi que le nombre d’affaires pendantes devant le Comité est passé de 746 fin 2018 à 1 178 à la fin de l’année dernière.  Bien que le Comité soit disposé à examiner davantage de communications au cours de ses sessions, il reste confronté au défi des ressources du Secrétariat, a fait valoir M. Fathalla.  Selon lui, il convient d’augmenter sensiblement la capacité du Secrétariat à appuyer le Comité dans le traitement des communications, faute de quoi il ne pourra faire face à cet arriéré.

Évoquant ensuite la suspension de sa cent-vingt-huitième session, en mars dernier, en raison de la pandémie de COVID-19, M. Fathalla a assuré que le Comité a poursuivi ses travaux par télétravail et procédé à l’adoption d’observations finales, d’une liste de points à traiter avant l’établissement de rapports ainsi que des communications individuelles.  Pour la première fois de son histoire, le Comité a tenu en juillet sa cent-vingt-neuvième session sur une plateforme en ligne.  Et si rien ne peut remplacer les réunions en personne, le Comité a relevé le défi afin de faire progresser son mandat, a souligné son Président.

Tout au long de la pandémie, les organes conventionnels mènent la plupart de leurs activités en ligne, à l’exception des dialogues constructifs, pour éviter une lacune de protection pour les titulaires de droits, a fait remarquer M. Fathalla.  Le Comité des droits de l’homme a ainsi tenu des sessions en ligne, malgré des limitations logistiques, techniques et financières.  Conscient de la difficulté de la situation financière, le Président du Comité a appelé les États Membres à s’acquitter de leurs responsabilités au titre des traités des droits de l’homme qu’ils ont ratifiés, tout en veillant à ce que les organes conventionnels soient correctement financés par le budget ordinaire de l’ONU.  Ces organes représentent un forum pour la promotion et la protection des droits de l’homme dont l’importance n’a jamais été aussi grande, a-t-il conclu.

Dialogue interactif

Interpellant M. Fathalla, la Fédération de Russie a estimé que les dispositions du Pacte international sur les droits civils et politique doivent servir de base aux travaux du Comité.  Les dispositions qui n’existent pas dans le Pacte ne peuvent être utilisées par le Comité, a-t-elle fait valoir, en se disant préoccupée par le niveau très élevé de politisation s’agissant notamment de l’examen des communications individuelles et des décisions sur des affaires particulières.  La délégation s’est également étonnée que le Comité reconnaisse certains États coupables de violations alors que ce n’est pas le cas ou que ces violations sont anciennes.  Elle a par ailleurs regretté que, ces dernières années, le nombre de plaintes à l’encontre de la Russie augmente pour des questions qui ne sont pas examinées à Strasbourg mais le sont à Genève.  Enfin, elle a souhaité savoir comment le Comité trouve des financements pour aborder des questions qui ne relèvent pas de son mandat.  

Le Mexique a observé que les mesures prises par les États pour répondre à la pandémie ont entrainé la suspension de plusieurs libertés fondamentales.  Quel est l’avis du Comité sur les pratiques optimales recensées pour faire en sorte que cette suspension soit équilibrée et pertinente, en vertu du Pacte international sur les droits civils et politiques?

La pandémie de COVID-19 ne saurait servir d’alibi pour réduire l’espace des libertés civiles et politiques, a renchéri l’Union européenne, qui a voulu savoir comment le Comité entend s’adapter à cette situation et reprendre ses dialogues constructifs avec les États parties aujourd’hui suspendus.   

À son tour, l’Égypte a noté que l’assistance est nécessaire pour aider les pays en développement à respecter les normes du Pacte et a appelé à soutenir davantage les États en leur fournissant un financement au titre de l’aide technique.  Quels défis voyez-vous dans le cadre de votre mandat et comment entendez-vous les surmonter, a-t-elle ensuite demandé à M. Fathalla. 

Le Président du Comité des droits de l’homme a alors rappelé à l’Égypte que son Comité est confronté à un double défi: le retard pris dans l’examen des communications et la suspension du dialogue avec les États parties.  S’agissant du retard enregistré pour les communications, plus de 1 000 sont aujourd’hui en attente, ce qui représente un doublement des arriérés, a-t-il précisé.  Il a également signalé qu’il est actuellement difficile d’entretenir un dialogue avec les États parties pour des raisons techniques.  Lorsque que nous dialoguons, il y a tous les membres du Comité et les membres des délégations et le faire en ligne est très difficile, a-t-il concédé.  C’est pourquoi nous n’avançons pas et qu’il y aura un retard supplémentaire dans la présentation des rapports, ce qui rendra le respect du calendrier impossible.  À la question de l’Union européenne, il a reconnu que le Comité n’a pas été en mesure de trouver une solution de rechange compte tenu des limitations imposées par le travail en ligne.  En dépit du retard accumulé en raison de la pandémie, il a assuré que le Comité s’emploie à finaliser les communications et s’occupe des recommandations de son groupe de travail. 

Répondant au Mexique, M. Fathalla a indiqué que son Comité a adopté une déclaration sur le Pacte et la pandémie.  Il a rappelé à cette occasion qu’il y avait des conditions à respecter pour déclarer l’état d’urgence.  Pour qu’une dérogation soit acceptée, il faut qu’il y ait conformité avec les obligations internationales et éviter toute forme de discrimination, a-t-il souligné.

À la Fédération de Russie, enfin, M. Fathalla a répondu que son Comité ne se livre à aucune activité politisée mais s’efforce au contraire de rester indépendant dans le cadre du mécanisme existant.  Nous sommes là pour aider les États Membres, pas pour les juger, a-t-il dit.  À ses yeux, les procédures sont claires et rien n’est caché à quiconque.  Il a par ailleurs indiqué qu’il importe d’inclure dans le Pacte de nouveaux développements, tels que les changements climatiques, qui ne figuraient pas dans le document adopté il y a plus de 50 ans.

M. RENATO ZERBINI RIBEIRO LEAO, Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a axé son intervention sur certains aspects du travail du Comité en 2020, ainsi que sur des questions liées au renforcement du système des organes de traités.

Il s’est préoccupé de l’impact dévastateur de la pandémie de COVID-19, imputant le fait que le virus soit hors de contrôle à une absence de préparation mondiale, de coopération et de solidarité internationales.  La solidarité internationale est cruciale pour lutter contre la pandémie et les pays doivent coopérer pour faire face à ce problème mondial, a-t-il insisté.

Il a également relevé que la COVID-19 a exacerbé les inégalités existantes et affecté de manière disproportionnée les plus défavorisés et les plus marginalisés de toutes nos sociétés.  « Cela doit changer, nous devons penser et agir globalement.  La seule solution est globale, car le virus ne s’arrêtera pas aux frontières », a martelé M. Ribeiro Leao.

Il a qualifié de particulièrement opportune, aujourd’hui, l’observation générale sur la science et les droits économiques, sociaux et culturels adoptée par le Comité en mars 2020.  En effet, a-t-il poursuivi, le Comité a souligné l’importance de partager les meilleures connaissances scientifiques et leurs applications pour accélérer la découverte de traitements et de vaccins efficaces en cas de pandémie.

Poursuivant, M. Ribeiro Leao a indiqué qu’en ce qui concerne la présentation des rapports des États parties, le Comité continue de faire face à une situation générale de non-présentation et de présentation tardive des rapports, précisant que de nombreux États ont plus de 10 ans de retard.  Tout en se félicitant des rapports reçus à ce jour en 2020, il a souhaité trouver des moyens pour encourager tous les États à présenter leurs rapports et faciliter le processus autant que possible.  « Nous chercherons également des moyens d’encourager les États à s’engager avec nous dans la procédure de suivi, qui est également un aspect important de la fonction de surveillance continue de ce Comité », a-t-il poursuivi.

Le Président du Comité a également évoqué les défis auxquels est confronté le système des organes des traités, et a appelé les États Membres à veiller à ce qu’il soit suffisamment financé par le budget ordinaire de l’ONU afin de permettre aux Comités de poursuivre leur important travail de promotion et de protection des droits de l’homme.  « Nous sommes également convaincus que le financement doit s’inscrire dans un cycle prévisible, tourné vers l’avenir, basé sur des plans plutôt que sur des schémas historiques », a-t-il préconisé.  Il a ensuite appelé la Troisième Commission à rechercher des solutions en coordination avec la Cinquième Commission afin de permettre aux organes de traités de travailler de manière plus prévisible.

Dialogue interactif

Le Portugal a voulu savoir quelles étaient les mesures prises par le Comité pour assurer la mise en œuvre du Pacte et de ses protocoles.  Par ailleurs, comment les États peuvent-ils agir pour assurer un accès sûr et généralisé au remède à la COVID-19, s’est-elle enquise.

Cette pandémie sans précédent aura certainement des conséquences durables et de grande envergure sur nos droits économiques, politiques, sociaux et culturels, a commenté l’Union européenne qui a insisté sur la nécessité d’une coopération et d’une solidarité internationales plus étroites et plus ciblées.  La COVID-19 a mis en évidence nos limites en matière de protection des personnes en situation de vulnérabilité, et il nous appartient maintenant de reconstruire des sociétés plus égales, plus inclusives et plus résistantes, a insisté la délégation.

À son tour, la Fédération de Russie a dénoncé la prolifération des sanctions unilatérales qui violent les droits des personnes, alertant des conséquences négatives de ces mesures en pleine période de lutte contre la pandémie.  Elle a aussi voulu savoir si le Comité subissait une quelconque pression extérieure dans l’exercice de son mandat.

Suite à cette intervention, le Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels a indiqué que son Comité est, d’ores et déjà, à pied d’œuvre pour examiner les retombées négatives des mesures coercitives unilatérales. Pour ce qui est de la question de savoir si le Comité est soumis à des pressions pour unir ses efforts avec le Comité des droits de l’homme, il a affirmé que ce n’était « absolument pas » le cas.  Nous répondons simplement à la résolution qui demande aux organes conventionnels d’unir leurs efforts et de travailler en synergie.  Il s’agit donc d’un travail coordonné entre notre Comité et d’autres organes de promotion et de défense des droits de l’homme, a-t-il expliqué.

La couverture de cette séance a été compromise par des problèmes techniques qui ont provoqué un son défaillant et une traduction parcellaire.

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