Trente et unième session extraordinaire,
Dialogues interactifs & 2e séance (reprise), Matin, après-midi & soir
AG/12294

Session extraordinaire de l’Assemblée générale sur la COVID-19: l’ONU tire le bilan de neuf mois d’efforts et se projette vers l’avenir

Quelles formes a pris la riposte du système de l’ONU à la COVID-19?  Doit-on considérer le vaccin comme un « bien public mondial »?  Comment reconstruire en mieux?  Au deuxième jour de sa session extraordinaire consacrée à la pandémie, l’Assemblée générale a entendu les principaux acteurs onusiens, mais aussi des experts et des chercheurs, dialoguer avec les États Membres sur les grandes questions posées par cette crise qui, de l’avis du docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a démontré la nécessité de changer de modèles et d’investir dans la préparation, la couverture sanitaire universelle et l’action multilatérale. 

Aucun des défis auxquels a été confrontée l’ONU depuis sa création n’a été aussi « immense » que cette pandémie, qui a mis à mal le tissu même du multilatéralisme, a observé le chef de l’OMS en introduction aux tables rondes.  Si elle a montré « ce dont était capable l’humanité », la crise actuelle a aussi fait apparaître « des signes troublants d’intérêts étroits et de division », a-t-il pointé, avant de fustiger les « théories du complot » qui visent la science et font prospérer le virus. 

Alors que plus de 70 millions de cas de COVID-19 ont déjà été signalés dans le monde et que plus de 1,4 million de personnes ont succombé à la maladie, il a mis l’accent sur quatre investissements essentiels pour « reconstruire un monde meilleur ».  Les vaccins, tout d’abord, alors que des « nouvelles positives » permettent d’entrevoir « la lumière au bout du tunnel ».  Toutefois, a-t-il soutenu, ces « solutions » doivent être partagées afin que nul ne soit laissé pour compte.  En créant l’Accélérateur ACT, l’OMS a souhaité que les vaccins soient alloués de manière équitable. 

Pour le docteur Tedros, il convient aussi d’investir dans la préparation aux autres pandémies, afin de renforcer le contrôle et l’atténuation de telles crises sanitaires.  Réaffirmant l’importance du Règlement sanitaire international (RSI), instrument juridique visant à éviter la propagation des maladies, il s’est prononcé pour la création d’un nouveau mécanisme pilote d’examen périodique qui aurait pour but de faciliter l’élaboration de mesures médicales relevant de « biens publics mondiaux ». 

Avant de céder la parole aux panélistes, M. Volkan Bozkir, Président de l’Assemblée générale, a fait valoir à son tour que, face à un virus qui ne connaît pas de frontières, l’approche multilatérale s’avère essentielle.  Beaucoup a déjà été fait par l’ONU pour renforcer la riposte des gouvernements, soutenir les efforts humanitaires et veiller à la solidité des chaînes d’approvisionnement, a pour sa part souligné Mme Amina Mohammed, Vice-Secrétaire générale.  Mais il faut « tourner une nouvelle page » et réunir pour cela les 28 milliards de dollars que nécessitent l’accès au vaccin et l’appui aux stratégies de relèvement. 

Cette question a dominé la première table ronde de la journée, qui portait sur la riposte du système des Nations Unies.  L’échange a permis aux responsables de l’OMS, du Programme alimentaire mondial (PAM), du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) de faire le point sur la réponse apportée par leur agence ces neuf derniers mois. 

Il ressort de ce dialogue qu’en dépit d’un élan de solidarité sans précédent depuis 30 ans, la famille onusienne s’est trouvée contrainte par un manque de financement pour ses appels humanitaires.  Comme l’a noté le chef du HCR, M. Filippo Grandi, cette assistance vitale dépendra en 2021 de la mise en place des plans de relance.  S’il a été possible d’éviter des famines, le pari n’est pas gagné pour l’an prochain, a renchéri son homologue du PAM, M. David Beasley, lui aussi dans l’attente de fonds d’urgence.  « Être pauvre, ça coûte cher en pleine pandémie », a résumé le patron du PNUD, M. Achim Steiner, tandis que la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, relevait que ce constat s’applique à tous les groupes vulnérables. 

De son côté, le docteur Mike Ryan, Directeur exécutif du Centre stratégique d’opérations sanitaires de l’OMS, a fait état d’une situation « toujours très, très difficile », quatre millions de nouveaux cas de COVID-19 et environ 70 000 morts étant dénombrés chaque semaine, alors que certaines zones géographiques enregistrent encore des taux de transmission très élevés, notamment l’Europe et les États-Unis.  « Nous espérons pouvoir ajouter les vaccins aux mesures de contrôle actuelles mais, pour le moment, la vaccination ne veut pas dire que nous allons éliminer le virus », a-t-il ajouté. 

Centrée sur le développement du vaccin contre la COVID-19, la deuxième table ronde a réuni virtuellement le couple de scientifiques Uğur Şahin et Özlem Türeci, cofondateurs de BioNTech et développeurs du vaccin de Pfizer, la professeure Sarah Gilbert, de l’Université d’Oxford, à l’origine du vaccin d’AstraZeneca, et le docteur Soumya Swaminathan, Directrice exécutive de l’OMS.  Pour ces quatre chercheurs, les succès engrangés depuis l’apparition du nouveau coronavirus en Chine, fin 2019, tiennent au fait que la communauté scientifique a su partager ses données, ce qu’a salué le docteur Sahin.  Le docteur Swaminathan a quant à elle applaudi l’élaboration d’un vaccin en 320 jours, un « record » auquel l’OMS a pris part.  En réponse aux craintes exprimées par plusieurs États Membres quant à la distribution équitable des vaccins, elle s’est voulue rassurante, rappelant qu’il s’agit d’un objectif clef du Mécanisme COVAX de l’OMS. 

La troisième et dernière table ronde s’est intéressée aux voies et moyens de la relance post-COVID-19.  « Nous espérons voir la lumière au bout du tunnel en 2021 », a confié Mme Zsuzsanna Jakab, Directrice générale adjointe de l’OMS, non sans rappeler la « tâche herculéenne » qui consistera à vacciner 20% de la population mondiale d’ici à la fin de l’an prochain. 

De l’avis de Mme Natalia Kanem, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), il faudra avant tout disposer de davantage de matériel médical pour servir les plus vulnérables.  Aider ces personnes « laissées pour compte depuis des années » doit être la priorité du relèvement, a abondé M. Guy Ryder, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), parlant de « catastrophe » pour le monde du travail.  Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, Secrétaire générale adjointe de l’ONU et Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a souhaité que les femmes puissent reprendre leurs activités « à des niveaux prépandémiques ».  Elle a également mis en garde contre les « solutions court-termistes » dans les plans de relance, appelant les États à prendre en compte le secteur informel.  « Il faut rectifier le tir pour éviter davantage de souffrances », a conclu Mme Mari Pangestu, Directrice générale pour les politiques de développement et les partenariats à la Banque mondiale. 

Cette trente et unième session extraordinaire de l’Assemblée générale a été suspendue après la reprise du débat général interrompu la veille.  Le débat sera achevé à une date ultérieure.

SESSION EXTRAORDINAIRE CONSACRÉE À LA PANDÉMIE DE MALADIE À CORONAVIRUS (COVID-19) - A/RES/75/4

Déclarations d’ouverture des dialogues interactifs

M. VOLKAN BOZKIR (Turquie), Président de l’Assemblée générale, a souligné la nécessité d’une approche multilatérale pour lutter contre une maladie « qui ne reconnaît aucune frontière ».  Les dialogues interactifs organisés ce jour vont permettre d’entendre des experts, des parties prenantes et d’apprendre des expériences de ceux qui travaillent pour créer un monde meilleur, a-t-il déclaré. 

Trois dialogues sont organisés sur les thèmes suivants : La riposte du système des Nations Unies à la COVID-19 ; Sur la voie d’un vaccin contre la COVID-19, un bien public mondial ; Renforcer la résilience et reconstruire en mieux après la COVID-19.  Il s’agit de lutter contre les conséquences socioéconomiques de cette crise, a ajouté M. Bozkir.  Nous devons œuvrer en faveur d’une paix pérenne, durable, et de la protection des droits de la personne si nous voulons créer le monde que nous voulons, a-t-il conclu. 

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a indiqué que la riposte de l’ONU s’est concentrée sur l’apport d’un soutien aux gouvernements sur le terrain.  Elle a précisé que l’action de l’ONU a veillé à préserver le bon acheminement des services et des biens, dont les équipements de protection personnelle, à soutenir les efforts humanitaires et à renforcer la riposte des gouvernements face à la pandémie.  L’ONU a également appuyé les entreprises dans ce contexte et veillé à la solidité des chaînes d’approvisionnement.  La riposte onusienne a été conduite dans le respect des droits de la personne, en appui à 71 pays. 

Mais nous devons aller plus loin dans notre riposte, a poursuivi Mme Mohammed.  Elle a appelé à « tourner une nouvelle page » en insistant sur les décisions cruciales qui devront être prises dans les 12 prochains mois en vue d’éliminer la pauvreté, de défendre les droits des femmes ou bien encore de promouvoir « une économie verte ».  « Ce ne sera pas une tâche aisée. »

La Vice-Secrétaire générale a ensuite mentionné les 28 milliards de dollars nécessaires pour l’accès au vaccin, ajoutant que les équipes de l’ONU sont prêtes à l’appuyer dès que les ressources auront été fournies.  Elle a ensuite insisté sur la contribution de l’ONU aux gouvernements pour renforcer leurs stratégies de relèvement postpandémie, avant de souligner l’importance de prendre des mesures robustes pour protéger l’environnement.  L’ONU entend réunir en 2021 les différents acteurs concernés dans des domaines de l’alimentation, des transports, de l’éducation ou bien encore des océans pour répondre aux défis, a assuré Mme Mohammed.  Enfin, la Vice-Secrétaire générale a souligné la nécessité de fournir des ressources aux pays qui en ont le plus besoin et de réaliser le Programme d’action d’Addis-Abeba.  Nous devrons retrouver en 2021 la voie du développement durable pour tous, dans une planète en bonne santé, a-t-elle conclu. 

M. TEDROS ADHANOM GHEBREYESUS, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a estimé qu’aucun des défis auxquels a été confrontée l’ONU depuis sa création voilà 75 ans n’a été aussi « immense » que la pandémie de COVID-19, qui a mis à mal le tissu même du multilatéralisme.  Cette crise, a-t-il dit, a mis l’Organisation à l’épreuve mais a aussi montré ce que peuvent faire les Nations Unies lorsqu’elles agissent au mieux.  Dès les premiers jours, a rappelé le docteur Tedros, l’OMS a créé une équipe de gestion de la crise qui a travaillé avec toute la famille onusienne et un grand nombre de pays.  La collaboration avec le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’UNICEF a, par exemple, permis de renforcer les chaînes d’approvisionnement et d’envoyer plusieurs millions de tests à 171 pays et territoires.  « La pandémie a montré ce dont était capable l’humanité », au prix de grands sacrifices et d’efforts d’innovation et de solidarité.  « Mais elle a aussi fait apparaître des signes troublants d’intérêts étroits et de division », a-t-il déploré.  Rappelant que plus de 70 millions de cas de COVID-19 ont déjà été signalés et que plus de 1,4 million de personnes ont succombé au virus, il a relevé que tous les pays n’ont pas riposté de la même façon.  Certains ont réussi grâce à des outils sanitaires éprouvés et pas à la faveur d’un « coup de chance ».  Ils ont prouvé que, grâce à la science et aux sacrifices, il est possible d’endiguer ce virus.  En revanche, « là où la science est mise à mal par des théories du complot ou des intérêts particuliers, le virus prospère ». 

Le Directeur général de l’OMS a ensuite mis l’accent sur quatre domaines essentiels, sur lesquels les Nations Unies comptent s’appuyer pour « reconstruire un monde meilleur ».  Le monde doit, en premier lieu, investir dans les vaccins, a-t-il souligné, faisant état de « nouvelles positives » qui permettent d’entrevoir « la lumière au bout du tunnel ».  Toutefois, si la fin de ce combat est en vue, nous ne pouvons accepter un monde où les plus pauvres seraient écrasés par les plus riches dans cette course au vaccin, a-t-il fait valoir.  Dans cette crise mondiale, les solutions doivent, selon lui, être partagées comme des « biens publics mondiaux » et ne laisser personne pour compte.  Réduire les inégalités entre les personnes et entre les nations n’est pas une tâche à laquelle nous devons nous attaquer après la pandémie mais pendant la riposte, a martelé le docteur Tedros, y voyant le seul moyen d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD).  C’est pourquoi l’OMS a créé l’Accélérateur ACT, fruit d’un partenariat sans précédent destiné à élaborer des vaccins et outils de diagnostic et à les allouer de façon équitable.  Cette initiative a déjà généré des résultats, avec quelque 120 millions de tests rapides distribués et des doses de dexaméthasone fournies à plus de 4,5 millions et personnes dans le monde.  Mais elle se heurte à des difficultés de financement, 4,3 milliards de dollars étant nécessaires pour lancer les achats de masse et l’approvisionnement en vaccins, et 23 milliards de dollars pour mener à bien les opérations l’an prochain. 

Il convient également d’investir dans la préparation d’autres pandémies, a prévenu le Chef de l’OMS.  De nombreux pays n’étaient pas prêts à affronter la COVID-19, certains pensaient que leur solide système de santé les protégerait.  Or tous doivent se doter de cette même « mémoire des muscles » et investir dans le contrôle et l’atténuation des crises, a-t-il plaidé.  À cette fin, le Règlement sanitaire international (RSI) est un outil juridique puissant, que les pays doivent utiliser de manière plus efficace, a-t-il affirmé.  Le RSI doit jouir de plus de transparence et de légitimité politique, a estimé le docteur Tedros, indiquant avoir chargé un comité de formuler des recommandations.  Il a notamment évoqué la création d’un nouveau mécanisme pilote d’examen périodique qui, à l’image de l’Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme, aurait pour but de faciliter l’élaboration de mesures médicales relevant de « biens public mondiaux ».  

Il faut, d’autre part, investir dans la santé, qui est « le socle de la paix et de la prospérité », a encore préconisé le Directeur général de l’OMS.  Alors que l’économie mondiale a connu son plus fort déclin depuis la Grande Dépression, que les écarts géopolitiques se sont creusés et que le système multilatéral est remis en cause, le sous-investissement actuel est préoccupant.  La santé représente en effet un investissement dans les sociétés et permet aux nations de prospérer, a-t-il souligné.  Si le monde consacre environ 10% de son PIB à la santé, ces dépenses visent plus à traiter qu’à prévenir, a-t-il observé, annonçant la création d’un nouveau Conseil sur l’économie de la santé pour tous.  Se félicitant de la Déclaration politique de haut niveau de l’an dernier sur la couverture sanitaire universelle, il a jugé que la pandémie ne fait que souligner l’importance d’un tel dispositif.  Nombre de pays ont ainsi donné un accès gratuit aux tests et prévoient de faire de même avec le vaccin.  Cela ne devrait-il pas s’appliquer également aux cancers, à la tuberculose, au paludisme, à la prise en charge des grossesses et à la lutte contre le tabagisme? s’est-il interrogé.  Selon lui, trop de pays ont négligé d’investir dans les fonctions les plus essentielles qui nécessitent des investissements modestes mais sont la pierre de touche de tout système de santé.  « Si le monde veut éviter d’autres crises de cette ampleur, il doit investir dans la prise en charge primaire », a-t-il insisté.  

Le docteur Tedros a, enfin, appelé à investir dans le multilatéralisme pour préserver notre avenir commun, relevant qu’il n’existe pas de vaccin contre la pauvreté, les inégalités et les changements climatiques.  En 2015, a-t-il rappelé, la communauté internationale s’est dotée des ODD et de l’Accord de Paris sur le climat, convergeant ainsi vers un avenir commun.  Depuis, des divergences dangereuses sont apparues, les ambitions de Paris ont été remises en cause et les dispositions d’Addis-Abeba sont restées lettre morte, a-t-il regretté, avant d’appeler les pays à faire le « choix de la collaboration et de la solidarité ».  Nous devons, ensemble, répondre à l’appel du Secrétaire général à réaliser les ODD avec encore plus de détermination et appuyer le Plan d’action mondial pour une vie saine et le bien-être, a lancé le Directeur général de l’OMS.  Ce type de coopération doit caractériser l’ère postpandémie, a-t-il dit, souhaitant que le monde agisse maintenant, sans revenir aux mêmes modèles de production, aux mêmes cycles de panique et de divergences.  Cette pandémie nous a menés à un carrefour : « derrière, il y a le statu quo, et devant, un nouveau chemin dans lequel les pays ne sont pas des rivaux à somme nulle mais des compagnons de route qui partagent une même vision », a-t-il conclu. 

Table ronde 1: La riposte du système des Nations Unies à la COVID-19

La première table ronde de la journée portait sur la riposte du système des Nations Unies à la COVID-19.  Modérée par la Secrétaire générale adjointe à la communication globale, Mme Melissa Fleming, ce dialogue a été l’occasion pour les hauts responsables de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), du Programme alimentaire mondial (PAM), du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) de faire le point sur les neuf derniers mois et sur la réponse que leurs agences ont apporté à une pandémie qui a pris le monde par surprise et à laquelle personne n’était suffisamment préparé selon eux.

Des ONG partenaires de l’ONU sur le terrain, Save the Children, la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (IFCR) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), ont également apporté leur point de vue à ce débat, avant d’engager une discussion avec les États Membres.

Ce qui est ressorti de ce bilan c’est qu’il y a eu un élan de solidarité sans précédent depuis 30 ans, et que la seule contrainte à laquelle la famille de l’ONU ait eu à faire face et qui l’a empêchée de faire davantage, c’est un manque de financement de ses appels humanitaires.

« La situation actuelle est toujours très, très difficile et dangereuse », a d’emblée déclaré M. MIKE RYAN, Directeur exécutif du Centre stratégique d’opérations sanitaires de l’Organisation mondiale de la Santé.  Chaque semaine on dénombre 4 millions de nouveaux cas de COVID-19 et environ 70 000 morts, et certains pays connaissent encore des taux de transmission très élevés, notamment en Europe et aux États-Unis.  La situation épidémiologique n’est pas stabilisée, a-t-il souligné.  Et les pays ou les régions qui ont réussi à stabiliser la transmission pourraient perdre le contrôle rapidement.  Il va être difficile de sortir de cette situation sans mesures ou stratégies qui soient aptes à contrôler la transmission tout en tenant compte des systèmes économiques et sociaux, a-t-il indiqué.

« Nous espérons pouvoir ajouter les vaccins aux mesures de contrôle actuelles, mais pour le moment, la vaccination ne veut pas dire que nous allons éliminer le virus », a enchaîné M. Ryan.  Le vaccin signifie juste que nous pourrons reprendre le contrôle sur la transmission et peut-être l’arrêter, a-t-il signalé.  Pour revenir à une nouvelle normalité, des efforts énormes vont être nécessaires.  Il a en outre souligné que disposer d’un vaccin est une chose, mais que vacciner les populations et veiller à la disponibilité équitable des vaccins est un tout autre défi.  Les Nations Unies ont un rôle très important à jouer à cet égard, notamment face à la défiance des populations envers le vaccin, a-t-il estimé.

M. Ryan a par ailleurs salué les efforts déployés pour mettre de côté les rivalités, relevant que la riposte mondiale à la pandémie avait démontré l’étendue de ce qui peut être accompli lorsque l’on travaille ensemble, mais également que lorsque la clarté et l’unité font défaut « nous ne faisons pas bien ».

M. DAVID BEASLEY, Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM), a alerté que la COVID-19 a fait passer le nombre de personnes souffrant de la faim de 135 millions à 270 millions de personnes.  L’année 2021 va littéralement être catastrophique, a-t-il affirmé.  La contraction économique est réelle et les besoins ne cessent d’augmenter.  Mais si nous réagissons de façon stratégique nous pourrons éviter la déstabilisation, les migrations et les famines, a-t-il affirmé en se basant notamment sur les leçons déjà tirées de la crise.  Il a également insisté sur l’importance de fournir au PAM les fonds dont il a besoin.

Il a rappelé que le PAM s’était mobilisé pour assurer la livraison de l’aide humanitaire dans le monde lorsque l’industrie aérienne avait été stoppée au début de la pandémie et que d’autres agences, notamment l’OMS et le PNUD, fournissent un soutien nécessaire sur le terrain, en particulier aux pays qui n’avaient pas accès au secteur privé pour se procurer des tests de dépistages ou des équipements de protection personnelle, entre autres.

Pour le Directeur exécutif du PAM, 2021 risque d’être l’année de la pire crise humanitaire depuis la création de l’ONU et il va falloir faire une hiérarchisation stratégique des priorités notamment pour ce qui est de l’allocation des fonds.  Face à la limite des ressources, « il faut donner la priorité aux icebergs qui se trouvent devant le Titanic », va-t-il estimé.  M. Beasley reste cependant optimiste que le pire peut être évité à condition de travailler main dans la main et de débloquer les fonds nécessaires.  Il a conclu par un vibrant plaidoyer pour mettre fin aux conflits qui rendent la donne impossible dans le contexte de la pandémie.

M. ACHIM STEINER, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a déclaré que les objectifs de développement durable, même en pleine pandémie, restent essentiels.  « Ils sont notre boussole. »  Cette pandémie a des conséquences terribles pour les individus, les pays et les ODD, a-t-il dit, en indiquant que l’indice de développement humain devrait reculer l’année prochaine.  Il a insisté sur les choix fondamentaux qui attendent l’humanité, en insistant sur la notion de vulnérabilité, essentielle pour le PNUD.

M. Steiner a ensuite alerté que la moitié de la population mondiale n’a aucune forme de protection sociale et nombre de personnes tirent leurs revenus du secteur informel.  Le PNUD a été un filet de sécurité important cette année, puisqu’en moins de 100 jours, dans plus de 100 pays, à la demande du Secrétaire général, le PNUD a mobilisé son réseau pour aider les pays à faire face à la pandémie.  « C’est une chose extraordinaire. »  L’Administrateur a indiqué que dans sa riposte, le PNUD a dû remédier à deux défis: le manque de données et le genre.  S’agissant du genre, il a précisé que le PNUD a corrigé le tir afin de prendre pleinement en compte cette question, en ajoutant que 117 plans de riposte nationaux incluent un élément relatif à l’égalité entre les sexes.

Il a insisté sur l’énormité des choix à faire, en soulignant les pressions immenses pesant sur les pays en développement qui ont perdu une grande partie de leurs revenus.  « Serons-nous capables de répondre? »  M. Steiner a déclaré que le G20 a fait montre de leadership plus tôt dans l’année, en gelant le service de la dette.  « Mais soyons honnêtes, la riposte de la communauté internationale n’est pas du tout suffisante. »  Il a indiqué que les plans de relance des pays riches équivalent à 20% de leur PIB, ceux des pays émergents à 6% et ceux des pays pauvres à 2% seulement.  « Il est très cher d’être pauvre en pleine pandémie. »  Enfin, M. Steiner a indiqué qu’il est encore temps d’agir pour éviter qu’un milliard de personnes ne sombrent dans la pauvreté extrême d’ici à 2030.  C’est en effet l’un des scenarii possibles si nous ne faisons rien, a conclu M. Steiner.

Mme ASHA MOHAMMED, Secrétaire générale de la Croix-Rouge du Kenya, intervenant au nom de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (IFRC) et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a déclaré que la Croix-Rouge, qui s’est beaucoup investie dans la lutte contre la COVID-19, se trouve aux avant-postes de la riposte.  Au Kenya nous avons travaillé dans les camps de réfugiés et en prison, et nous avons distribué de l’aide alimentaire notamment à ceux qui travaillent dans le secteur informel, entre autres.  Elle a indiqué que l’un des facteurs essentiels pour l’IFRC et le CICR est de savoir comment intégrer la riposte à la COVID-19 tout en continuant leurs autres activités et services.  Elle a rendu hommage aux bénévoles qui se sont impliqués, soulignant que ce sont eux les véritables acteurs locaux.

Mme Mohammed a expliqué qu’il a été compliqué pour le CICR et l’IFRC de pérenniser une riposte dans les zones de conflits.  La COVID-19 a chamboulé notre organisation, et c’est la première fois que nous avons lancé un plan de riposte de cette ampleur, a-t-elle dit.  Et nos partenariats, en tant que réseaux, ont été cruciaux.

Elle a ensuite appelé à veiller à ce que le vaccin contre la COVID-19 soit disponible pour tous.  Il faudra veiller à ce que les régions les plus reculées soient fournies en vaccin, les personnes vivant dans des zones non contrôlées par des gouvernements représentant entre 70 et 80 millions de personnes.  Pour finir, elle a souligné que les autres catastrophes ne se sont pas arrêtées avec la COVID-19.  L’urgence climatique est sûrement un défi encore plus important que la pandémie de COVID-19 qui vient souligner la nécessité de changement systémique, a-t-elle déclaré.

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a braqué les projecteurs sur l’urgence humanitaire qui résulte de la pandémie de COVID-19.  Il a notamment signalé que la pauvreté dans le monde avait augmenté pour la première fois en 30 ans et que l’espérance de vie avait baissé.  Si nous finissons 2020 en évitant une famine, ce sera un acquis énorme, a-t-il dit.  Il s’est également alarmé de la « conséquence choquante » de la pandémie qui se manifeste dans le fléau de la violence à l’égard des femmes et des filles, y voyant l’expression du stress et de la frustration des hommes canalisées contre les femmes et les filles dans le monde.

S’agissant de la réponse d’OCHA à la crise, il a expliqué qu’à peine deux semaines après la déclaration par l’OMS de la pandémie mondiale, un plan de riposte humanitaire a été lancé et mis à jour deux fois depuis.  En tout, ce sont 4 milliards de dollars qui ont été levés pour ce plan qui a investi dans des campagnes visant à assurer que chaque personne ait accès aux informations nécessaires pour se protéger du virus.  Ce plan cible aussi la prise en charge des paiements de protection sociale, la mise à niveau de système de santé publique, l’assainissement et la prise en charge de réfugiés en partenariat avec le Haut- Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

Se tournant vers l’avenir, M. Lowcock a appelé la communauté internationale à se concentrer sur cinq priorités à commencer par la levée de fonds auprès des États Membres, des milliardaires et d’autres partenaires pour pouvoir financer le programme humanitaire qui permettra d’atteindre 600 millions de personnes et éviter des fléaux terribles que la famine.  Il a également encouragé les pays du G20, à travers les institutions financières internationales notamment, à venir en aide aux pays les plus pauvres dans le financement de leurs plans de relance post-COVID-19.  Par ailleurs il faut veiller à ne pas financer le vaccin aux dépens des programmes humanitaires, et se concentrer sur le déploiement du vaccin via des systèmes de santé faibles.

Enfin M. Lowcock a appelé à protéger les femmes et les filles pendant cette crise de la COVID-19 en regrettant que les programmes à leur intention sont les moins financés à ce jour.  Avant de conclure le Chef d’OCHA a mis en garde contre le risque de voir un « asséchement des ONG ».  En effet, plus de 1 000 ONG africaines ne savent pas si elles vont survivre cette année et il en est de même ailleurs.  Il a demandé aux dirigeants du monde de penser aux types d’institutions qu’ils souhaitent voir survivre et d’investir dans ces institutions.

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a rappelé qu’il y a dans le monde 80 millions de déplacés et de réfugiés.  La grande majorité de ces personnes se trouvent dans des pays pauvres et sont confrontées au choc de la pandémie, à l’instar des communautés hôtes.  Le HCR a coopéré avec les acteurs locaux pour éviter des catastrophes majeures dans les endroits de forte concentration de réfugiés.  Nous étions très préoccupés au début de la pandémie de ce qui allait se passer à Cox’s Bazar, au Bangladesh, ou dans les îles grecques, mais grâce à une action humanitaire généreuse, nous avons été en mesure d’éviter des catastrophes majeures, a-t-il dit.  M. Grandi a déclaré que les crises se sont néanmoins poursuivies comme au Venezuela, dans la région du Tigré en Éthiopie, ou encore au Nagorno-Karabakh. « Partir est devenu un risque alors que c’est aussi un moyen de sauver sa vie ».

S’agissant des restrictions de déplacements liées à la pandémie, le Haut-Commissaire a salué le fait qu’une centaine de pays ont prévu des mesures d’exception pour les demandeurs d’asile.  Ces restrictions doivent être temporaires et si vous les assouplissez pour votre population, alors vous devez le faire aussi pour les réfugiés, a-t-il lancé aux gouvernements.  Il s’est inquiété des conséquences catastrophiques du confinement et les risques accrus de pauvreté, qui pourraient jeter davantage de personnes sur les routes.  Nous devons faire en sorte que les réfugiés et les personnes déplacées soient pris en compte dans les programmes d’assistance et les campagnes de vaccination des pays, a-t-il dit, en reconnaissant les difficultés politiques d’une telle prise en charge.

La pandémie de la COVID-19 est une crise des enfants, a déclaré à son tour Mme INGER ASHING, Directrice générale de Save the Children International.  Les progrès sur la voie des ODD et les progrès sur le front du droit des enfants risquent d’être mis en périls, voir détruits.  La pauvreté augmente et la pandémie risque de mettre à mal des décennies de progrès.  Il y a les conséquences d’aujourd’hui pour les enfants, mais il y a aussi les conséquences pour leur avenir, donc pour notre humanité, a-t-elle rappelé.  C’est la première fois que nous rencontrons une telle urgence sur le plan éducatif à l’époque moderne.  Des millions d’enfants ne retourneront jamais à l’école et ils sont plus vulnérables face à la faim, aux violences, et aux mariages précoces.  Selon les prévisions faites avec l’UNICEF, le nombre d’enfants vivant dans des familles pauvres pourrait augmenter de 15%.  Elle a ajouté qu’un milliard d’enfants de 2 à 17 ans sont victimes de violence physique, sexuelle ou émotionnelle chaque année.  C’était donc un problème majeur même avant la COVID-19, mais qui risque de s’aggraver.

En ce qui concerne les filles, le recueil d’informations sur le terrain indique que la fermeture des écoles et le confinement ont des conséquences très graves pour elles.  Nous craignons que les risques de violence sexuelles et sexistes augmentent: chaque mois de confinement est égal à 15 millions de violences sexistes dans le monde, a signalé Mme Ashing.  Et 500 000 fillettes de plus devaient être mariées de force cette année, ce qui s’ajoute aux 12 millions de mariages forcés déjà existants.  Cela annihile tous nos efforts, a–t-elle déploré.  S’ajoutent à cela les risques de grossesses et d’accouchement.  En outre, à cause des restrictions mises en place, les efforts de prévention de la violence sont plus difficiles à mener.  L’accès était déjà difficile avant la pandémie, mais la situation s’est empirée depuis.

En ce qui concerne la question du financement, Mme Ashing a appelé à mieux financer les appels humanitaires.  Les budgets nationaux doivent aussi prévoir des programmes de prises en charge dans le domaine des violences sexuelles et sexistes.  C’est malheureusement un des domaines où les financements sont les moins importants.  Par ailleurs, nous avons besoin de davantage de données pour bien cerner la situation, car il y a beaucoup de lacunes dans nos connaissances au sujet de la réaction face à la COVID-19.  Elle a aussi insisté sur l’importance d’impliquer les populations, notamment les femmes et les filles qui doivent pouvoir s’exprimer en toute sécurité.  Ce sont ces groupes qui connaissent le mieux la réalité qui est leur quotidien, a-t-elle dit.  Enfin, il faut renforcer les efforts de sensibilisation.

« Le monde a changé, nous ne reviendrons pas à ce monde et nous ne le voulons pas, car le monde d’avant était un monde d’inégalités », a déclaré Mme MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire aux droits de l’homme.  Selon elle, les pays qui ont le mieux fait face à la pandémie sont ceux où la confiance dans les institutions étaient fortes et les filets de protection sociale robustes.  Pour sa part, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a veillé à élaborer des recommandations, en attirant l’attention sur les vulnérabilités de certains groupes face au virus.  Elle a indiqué que les plans de relèvement sont souvent basés sur des données ou des ventilations de données insuffisantes sur cette question-là.  Certains groupes ne sont pas davantage vulnérables au virus en raison de prédispositions génétiques mais en raison des discriminations qui les frappent, a expliqué Mme Bachelet, en mentionnant les réfugiés, les déplacés, les minorités ou bien encore les personnes LGBT.  Ces personnes, a-t-elle alerté, sont les plus vulnérables et n’ont pas accès aux services essentiels.

Mme Bachelet a aussi indiqué que les femmes ont été particulièrement touchées, en raison des violences domestiques liées au confinement, mais aussi en raison du fait qu’un grand nombre d’entre elles tirent leurs revenus du secteur informel ou de secteurs touchés de plein fouet par la crise, comme le tourisme et la restauration.  Les femmes n’ont pas souvent été incluses dans les commissions nationales chargées des stratégies de relèvement et il est probable que leurs besoins ne seront pas pris en compte car elles n’ont pas été conviées à la table, a-t-elle déploré.  Mme Bachelet a salué dans le même temps l’excellent travail abattu par des dirigeantes femmes face à la pandémie.  Enfin, elle a appelé à se « relever mieux » afin que la démocratie prévale.

Tour de table

À l’issue des interventions des panélistes, la modératrice de cette table ronde, Mme MELISSA FLEMING, Secrétaire générale adjointe à la communication globale, leur a demandé de préciser quel avait été le plus grand enseignement tiré de la pandémie de COVID-19 pour le système des Nations Unies et ses partenaires.

La réponse a été unanime pour M. Amir Abdulla, du PAM, le Coordonnateur des secours d’urgence, et le Haut-Commissaire pour les réfugiés qui ont tous salué la solidarité dont le système a fait preuve pour agir ensemble.  « En 30 ans, je n’ai jamais vu une riposte aussi solidaire », s’est félicité le représentant du PAM.  Le Coordonnateur des secours d’urgence a ajouté que cette collaboration s’est traduite par les 19 réunions qui se sont tenues depuis le mois de mars, alors qu’en « temps normal » il n’y en a que deux par an.  Pour le Chef d’OCHA, la seule véritable contrainte qui a empêché le système de l’ONU de faire plus et de réduire davantage les souffrances, c’est le manque de ressources.  Le Haut-Commissaire pour les réfugiés a renchéri en martelant que si les ressources sont essentielles cette année, elles le sont également pour l’année prochaine parce que l’assistance humanitaire va devoir combler les lacunes en attendant de pouvoir mettre en place des ripostes post-COVID-19 au niveau des pays.

De son côté, la représentante de l’IFRC et du CICR a retenu de cette année la place cruciale des communautés dans la riposte.  À l’avenir, il faudra leur donner plus de pouvoir pour leur permettre d’agir car les communautés doivent être au cœur de l’action, a-t-elle martelé.  Elle a appelé ses collègues à réfléchir aux moyens de garantir l’accès aux communautés, en particulier aux plus marginalisées d’entre elles, et d’optimiser l’action au niveau local.  Allant dans le même sens, la Directrice générale de Save the Children, a souligné qu’il va falloir travailler « avec » et pas seulement « pour » les communautés, et qu’il est inquiétant de constater qu’un nombre significatif d’ONG risquent de disparaître faute de ressources.

Quelles mesures privilégier pour avoir le plus d’impact à l’avenir? a alors demandé la Secrétaire générale adjointe à la communication globale.

Pour le représentant de l’OMS, c’est la pérennisation des mesures prises pour empêcher la propagation du virus, et l’adoption, par les gouvernements de stratégies informées et basées sur la science.  Ces derniers doivent aussi miser sur la décentralisation de la riposte et apporter une information claire aux citoyens partout dans le monde.  L’autre volet est bien sûr de réussir à vacciner tout le monde, a ajouté le représentant de l’OMS, qui a souligné que le vaccin contre la COVID-19 mettra soit en exergue les inégalités dans le monde ou deviendra au contraire le symbole de la solidarité à l’échelle mondiale.

On ne peut pas non plus se permettre de sombrer dans une amnésie après la pandémie, a-t-il poursuivi, en insistant sur les liens entre l’impact de la pandémie et les injustices sociales.  Pour l’OMS, la leçon à tirer de cette pandémie c’est qu’il faut redécouvrir l’écoute, le respect mutuel et la diplomatie pour pouvoir aller de l’avant.  La Haute-Commissaire aux droits de l’homme a ajouté qu’il faut des « dirigeants transparents » qui jouissent d’une confiance au sein de leur population.  La protection sociale des populations du monde est également nécessaire.

Pour sa part, l’Administrateur du PNUD a retenu des derniers mois qu’en dépit de toutes les analyses et des faits, il n’est pas toujours facile de faire vibrer « notre corde d’humanité commune » et que bien souvent ce ne sont pas les plus riches qui sont les plus généreux.  « Pensez au Liban, à la Jordanie, ou encore à la Turquie qui ouvrent leurs portes aux réfugiés alors même qu’ils connaissent de grandes difficultés ».  Pour le Chef du PNUD, il est impératif de retrouver cette solidarité.  S’adressant à ses collègues de la famille onusienne, il a estimé qu’ils avaient aussi le devoir de prendre soin de leurs personnels et de ceux de leurs partenaires.

Dialogue interactif

Dans un premier temps, la Barbade a signalé que pour les petits États insulaires en développement (PEID), notamment ceux de la Communauté des caraïbes (CARICOM), les fonds prévus pour la lutte contre le réchauffement climatique et à la réalisation des ODD ont dû être alloués à la lutte contre la COVID-19.  Que compte faire l’ONU pour que les PEID puissent continuer de mettre en œuvre les ODD, en particulier à la lumière de la crise de l’endettement, sachant que ces pays ne bénéficient pas de la suspension de la dette à l’initiative du G20?

L’Administrateur du PNUD a alors reconnu que l’échelle utilisée par l’ONU permettant de classer les pays crée une catégorisation qui n’est pas adéquate pour évaluer les besoins en aide internationale et qui ne reflète pas adéquatement la réalité.  Le PNUD tente donc de mettre en place une nouvelle catégorisation qui tienne compte des vulnérabilités, a indiqué l’Administrateur, qui a par ailleurs relevé que les PEID ont subi certaines des baisses de revenus les plus fortes au cours des 10 derniers mois, en raison de la baisse du tourisme notamment.

Étant donné la complexité de la crise actuelle, quel nouveau modèle pourrait être adapté aux nouveaux défis afin de réaliser les ODD, a demandé à son tour la Turquie.  Quand il y a une crise majeure, on se concentre sur les mesures d’urgence pour sauver des vies, mais que la seule façon de sortir de la crise humanitaire, c’est le développement, a souligné le Coordonnateur des secours d’urgence.  Lui emboîtant le pas, l’Administrateur du PNUD a rappelé que « ne pas avoir de nourriture, ça donne faim, mais surtout ça vous met en colère ».  Il faut comprendre l’intensité de la souffrance de ceux qui ont faim, a-t-il souligné, notant que cette crise demande aux acteurs humanitaires de repenser leur action.

À leur tour, les États-Unis ont voulu connaître le pourcentage de transmission du virus par des sujets asymptomatiques.  Ce mode de transmission va-t-il évoluer depuis le début de la pandémie?  Y a-t-il des variances selon l’âge ou les régions ?  La délégation a par ailleurs relevé que les données et les outils utilisés pour effectuer des évaluations lors des pandémies précédentes n’ont pas vraiment fonctionné dans le contexte de la COVID-19.  Notant que certains pays à revenu intermédiaire ne sont pas éligibles pour l’Alliance du Vaccin, elle a voulu savoir si la Banque mondiale prévoit de leur fournir une dérogation.

Le représentant de l’OMS a alors expliqué que 80% des personnes qui transmettent le virus sont asymptomatiques en faisant les principaux responsables de la propagation du coronavirus.  Il est donc essentiel que chacun continue de porter un masque, qu’on manifeste des symptômes ou non.

S’agissant du vaccin, le Coordonnateur des secours d’urgence a noté que certains pays vont être plus à même de pouvoir financer la vaccination de leur population que d’autres.  La Banque mondiale a déjà débloqué 12 milliards de dollars pour soutenir les pays qui vont avoir le plus de mal à financer leurs campagnes de vaccination.  Le mandat d’origine était de financer les pays qui avaient le plus grand mal à mobiliser des fonds à cette fin mais, a reconnu M. Lowcock, il faut à présent réévaluer cette catégorie car certains pays qui parvenait autrefois à financer leur propre campagne de vaccination ne peuvent plus le faire.

Notant que selon la Banque mondiale, il y aura 150 millions de personnes supplémentaires qui seront dans le besoin, la majorité dans les pays à revenu intermédiaire, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme a, elle aussi, reconnu l’importance de changer notre façon de mesurer.

Que peut faire le système de l’ONU pour promouvoir l’assainissement qui représente un des meilleurs moyens de lutter contre la pandémie? a demandé l’Équateur.

L’eau est un des meilleurs exemples du dilemme que rencontrent beaucoup de pays aujourd’hui pour répondre aux besoins immédiats et à long terme, a indiqué l’Administrateur du PNUD.  Nous devons réagir à cette crise mais il faut aussi investir dans l’avenir que ce soit pour l’eau ou pour l’accès au numérique.  Le système de l’ONU doit aider les gouvernants à prendre des décisions difficiles, car la plupart d’entre eux n’ont pas les moyens de faire face à cette crise, d’où la nécessité d’impliquer le secteur privé qui détient le plus d’argent dans le monde.

« Comment l’ONU a-t-elle aidé les pays africains pour faire face à la pandémie? » a demandé le Maroc.  La délégation a aussi demandé comment mieux lutter contre la désinformation et la véritable guerre qui semble être livrée à la science aujourd’hui.  Le représentant de l’OMS a souligné l’étroite coopération nouée entre l’OMS et les pays africains, en vue d’augmenter les capacités de dépistage des pays africains qui étaient très faibles.  Au début de la pandémie, seuls deux pays africains avaient ces capacités, a-t-il rappelé.  L’OMS s’attaque aussi au problème de l’« infodémie » et veille à ce que les populations aient accès à des informations sanitaires fiables, en adaptant ses messages aux contextes locaux en vue de stopper la transmission.  La Haute-Commissaire aux droits de l’homme a, elle, mentionné l’action de son Bureau pour répondre aux discours de haine visant des minorités ethniques et religieuses.

« Quels sont les enseignements tirés de l’opérationnalisation du nouveau système de développement face à la pandémie? » a demandé l’Afrique du Sud.  Le Coordonnateur des secours d’urgence a rappelé que tous les pays ont été touchés quasiment en même temps et que la riposte de l’ONU a été menée selon plusieurs phases, avec d’abord une phase de conseil et orientation au début de la pandémie sur, notamment, l’acquisition d’équipements de protection personnelle et les capacités de dépistage.  Puis, en avril et mai, l’ONU est entrée dans une phase de réponse aux conséquences économiques sévères de la pandémie.  De son côté, le représentant du PAM a détaillé la riposte apportée au niveau régional, avant d’insister sur l’importance des liens transversaux entre les entités du système onusien en vue de permettre une riposte collective.

Dans ce droit fil, l’Administrateur du PNUD a indiqué que l’action de l’ONU face à la pandémie a suivi trois axes en Afrique du Sud: humanitaire, sanitaire et développement.  Un secrétariat interinstitutionnel a été mis en place pour un déploiement de toutes les composantes du système, a-t-il dit, en insistant sur l’importance des ponts aériens en Afrique au début de la pandémie.  La représentante de la FIRC et du CICR a d’ailleurs loué l’excellente coordination nouée avec l’ONU au Kenya, l’Organisation ayant joué un rôle central.

De son côté, la Directrice générale de Save the Children a reconnu que la pandémie a pris tout le monde par surprise et qu’il convient d’en tirer les enseignements pour être mieux préparés à la prochaine crise.  Pour Mme Ashing, le système des Nations Unies, les gouvernements nationaux et la société civile ont cherché à apporter leur pierre à l’édifice et fait montre d’une mobilisation et solidarité sans précédent.

Table ronde 2: Sur la voie d’un vaccin contre la COVID-19; un bien public mondial

La science

Retraçant son expérience cruciale au cours des derniers mois, M. UĞUR ŞAHIN, Cofondateur de BioNTech, laboratoire allemand, a expliqué qu’il travaillait à un vaccin contre le cancer pour lequel de nouvelles technologies sont nécessaires, ainsi qu’à la préparation très rapide des vaccins.  Il a appris qu’une épidémie s’était déclarée à Wuhan en janvier, qu’il a suivie avec un certain intérêt, mais sans implication personnelle au départ.  Mais il a été alarmé par une publication chinoise laissant entendre qu’il s’agissait d’un nouveau coronavirus, contre lequel l’humanité n’avait aucune immunité.  En fait, il s’est avéré que c’était une forme grave de pneumonie qui fait que les personnes infectées étaient contagieuses, a poursuivi M. Şahin.  Il a souligné que Wuhan a un aéroport international et un système ferroviaire très avancé, et qu’en conséquence, c’est l’une des villes les plus connectées en Chine.

Le chercheur a alors contacté son épouse Özlem Türeci, cofondatrice de BioNtech, pour l’alerter sur la gravité de l’épidémie.  Ils ont décidé ensemble de modifier leurs projets pour se concentrer exclusivement sur l’élaboration d’un vaccin contre la maladie à coronavirus (COVID-19).  Les deux médecins se sont mis en relation avec plusieurs candidats et ont réuni d’autres scientifiques pour la recherche.  L’une des conditions, a précisé M. Sahin, était que les équipes acceptent des coupes de salaires.  Ils ont fait passer le message qu’il n’y avait pas de temps à perdre et qu’il fallait aussi créer des partenariats.  Cela a permis d’avancer rapidement, de développer le produit et de montrer que le vaccin obtenu était sûr et très efficace, s’est félicité M. Sahin.  S’agissant de l’approbation d’urgence, il a rappelé que le Royaume-Uni a été le premier pays à reconnaître ce vaccin développé avec la compagnie américaine Pfizer.

Mme SARAH GILBERT, professeure à l’Université d’Oxford, a dit avoir réagi dès les premiers rapports sur un nouveau type de pneumonie apparu en Chine.  Nous avions déjà travaillé sur les maladies émergentes et savions qu’il était nécessaire de créer une plateforme initiale qui soit applicable à différentes pathologies pour éviter d’avoir à réinventer la roue, en établissant des outils génériques, a-t-elle expliqué, mais nous ne disposions pas de fonds suffisant pour des vaccins.  La chercheuse a précisé que l’OMS et le monde de la recherche s’attendaient plutôt à l’apparition d’une bactérie et non d’un virus, et envisageaient plus des « flambées » qu’une pandémie.

Mme Gilbert a souligné qu’il faut normalement deux à trois ans pour arriver à un vaccin, et qu’un catalogue était prêt depuis 18 mois sans disposer de financement suffisant.  Des centres de fabrications étaient prêts au Royaume-Uni mais l’épidémie est arrivée trop vite.  « Nous ne disposions pas de vaccins contre les coronavirus et nous nous sommes basés sur des vaccins de coronavirus sur les animaux », a-t-elle témoigné.  Le 23 avril, a-t-elle ajouté, nous disposions d’un lot de vaccins mais pas assez pour des essais cliniques, d’où la nécessité d’un partenariat avec AstraZeneca, afin de créer des centres de productions à l’échelle mondiale, particulièrement en Inde, pour rendre ce vaccin accessible.  Mme Gilbert a aussi insisté sur la nécessité d’informer la population pour vaincre le scepticisme envers les vaccins et rassurer le public sur les ingrédients du vaccin.  Elle s’est réjouie de la collaboration avec AstraZeneca pour l’échelle de production et de distribution et des caractéristiques du vaccin qui, conservé entre 2 et 8 degrés centigrades, présente des avantages logistiques pour les pays.

Comme Mme Gilbert, Mme ÖZLEM TÜRECI, Cofondatrice de BioNTech, a jugé que la distribution du vaccin doit se faire à l’échelle mondiale, d’où l’importance d’un partenariat capable de réaliser cet objectif.  Nous travaillons avec tous ceux qui nous contactent dans tous les pays du monde et avec diverses organisations tout en étant confrontés à une situation tout à fait nouvelle, a-t-elle souligné.  Les stratégies doivent être élaborées dans le respect des règles en la matière, avec les Nations Unies et d’autres partenaires, comme AstroZeneca ou Pfizer.  La chercheuse a prôné un « nouveau modèle de coopération entre les scientifiques » au lieu d’une relation fondée sur la concurrence, compte tenu de l’envergure de la pandémie et des risques qu’elle engendre. 

Mme SOUMYA SWAMINATHAN, Directrice exécutive et scientifique en chef de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a soutenu que l’élaboration du vaccin en 320 jours constitue « un record » dans lequel l’OMS a joué un rôle important.  Elle a rappelé qu’après l’épidémie de la maladie à virus Ebola, l’OMS avait créé un cadre pour la prévention de flambées pathogènes et multiplié les préparatifs après avoir tiré les leçons de la désorganisation lors de la riposte à cette maladie.   Mme Swaminathan s’est félicitée que, dès février 2020, une réunion de haut niveau a réuni 400 chercheurs et autorités diverses pour établir une feuille de route et surtout pour harmoniser leurs données et les rendre comparables.  Cela explique le succès actuel, fruit de huit plateformes initiales, avec des vaccins dont l’efficacité dépasse de loin les espérances d’un taux de 70%, et suscite l’optimisme quant aux quantités disponibles pour la population.

La Directrice exécutive de l’OMS s’est aussi inquiétée du danger de la désinformation.  Il est normal que les scientifiques débattent et se contredisent, et cela ne doit pas inquiéter le public, mais, a-t-elle prévenu, les scientifiques doivent avoir une politique de communication transparente et crédible pour assurer la confiance des citoyens dans leurs autorités sanitaires.  Mme Swaminathan a fait part de son optimisme pour l’accessibilité du vaccin grâce au Mécanisme COVAX.  En conclusion, elle a rappelé que les 35 à 40 milliards de dollars nécessaires au lancement du vaccin ne représentent que 1,1% des sommes investies dans la relance économique des États.

Reprenant la parole, le chercheur Uğur Şahin a fourni des explications d’ordre scientifique, et expliqué qu’un vaccin est une exposition à un pathogène, pour une prévention à la fois contre une infection et contre la maladie.  Répondant à la question de savoir comment faire entrer le vaccin dans le corps humain, il a évoqué une nouvelle approche avec un vecteur viral.  Il s’agit de comprendre ce qui fonctionne le mieux et quelle est la partie du système immunitaire la plus à même de confronter le virus, a-t-il élaboré.  L’une des leçons apprises les plus importantes est que la communauté scientifique a partagé ses données, a indiqué M. Sahin, en signalant qu’un service d’échange a été créé à cet effet, ce qui aide à se mettre au courant des progrès et à avancer en tant que communauté scientifique, car « disposer du vaccin ne veut pas dire que le travail est terminé ».  Il faudra en effet veiller à préparer les doses et à déterminer qui en seront les premiers bénéficiaires.

La modératrice, Mme LYSE DOUCET, de la BBC, a félicité les deux scientifiques pour leur performance « historique » qui a consisté à mettre au point un vaccin en moins de 10 mois alors qu’en règle générale, il faut 10 ans en moyenne.  Elle s’est demandé s’il fallait différents vaccins dans chaque partie du monde, en fonction des facteurs locaux, ce à quoi Mme Türeci a répondu en invitant à la prudence: il faut procéder à des évaluations de données, certains sérums ayant la possibilité de neutraliser d’autres mutations d’ores et déjà connues.  La journaliste a mentionné à son tour le refus de certains parents de vacciner leurs enfants contre des maladies infantiles, en s’interrogeant sur les conséquences potentielles si des individus refusent que le vaccin contre la COVID-19 leur soit administré.

L’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a déclaré aux deux scientifiques que leur découverte était inestimable et que « le monde ne les oubliera pas ».  Après le développement du premier vaccin, nous en sommes encore aux phases expérimentales et certains pays ont déjà conclu des accords bilatéraux pour acquérir ces vaccins, a fait remarquer la délégation, en se demandant comment s’assurer que le Mécanisme COVAX, par exemple, aide tous les pays à disposer du vaccin, et comment les entités onusiennes et autres pourront aider à le stocker de manière sûre.  Dans le même esprit, Mme Doucet a ajouté que les vaccins ont été déjà achetés et qu’il semble qu’il n’y ait pas de place pour les pays pauvres.  Pour Mme Türeci, il faut appréhender cette problématique comme on aborde un problème technique à régler.  L’ONU et l’OMS doivent être à la tête de ces efforts, a-t-elle voulu.

D’ici à la fin de 2021, plusieurs vaccins auront achevé la période de tests, a souligné pour sa part Mme Gilbert, avant d’encourager les scientifiques à poursuivre leur coopération, car « plus il y aura de vaccins, plus il y aura de doses ».

Tous les panélistes ont affiché leur optimisme tant pour les vaccins que pour leur distribution, Mme Swaminathan rappelant que 35 à 41 milliards de dollars sont cependant nécessaires.  Il est dans l’intérêt de tous les pays d’aider à la vaccination de tous et pas seulement de leurs propres citoyens, a préconisé la responsable de l’OMS.

Les scientifiques, en particulier le couple fondateur de BioNTech sont « les héros de notre époque », a conclu la modératrice à la fin de la première partie de la table ronde qui s’est achevée par une vidéo de l’UNICEF, le plus grand acheteur de vaccins au monde.

Des vaccins pour tous

Cette table ronde, qui a réuni Coalition et Alliance pour veiller à ce que les vaccins soient à la fois disponibles et accessibles pour tous à un prix abordable, représente une collaboration sans précédent, a relevé la modératrice Mme LYSE DOUCET, correspondante internationale en chef de la BBC, avant de s’inquiéter du manque de moyens.  « Il n’y a pas assez d’argent » pour l’achat de ses ces vaccins, s’est-elle inquiétée en s’adressant au docteur SETH BERKLEY, Directeur général de l’Alliance du Vaccin (GAVI).

Deux milliards de doses sont d’ores et déjà disponibles pour ceux qui n’ont pas accès au vaccin, soit certains pays à faible revenu ou revenu intermédiaire ou même, parfois, à revenu élevé.  C’est la raison d’être du Mécanisme COVAX, a expliqué M. Berkley.  Il s’agit de s’assurer que les vaccins achetés soient distribués justement aux populations les plus vulnérables.  Nous avons mis en place un fonds avec l’aide des institutions financières internationales à destination des pays à revenu inférieur, a-t-il précisé.  Pour l’heure, nous disposons de 2 milliards de dollars pour commencer, a-t-il poursuivi, reconnaissant que 5 milliards supplémentaires seront nécessaires pour avancer.  Le Conseil de GAVI va décaisser 150 millions de dollars pour travailler avec les pays pour la planification en prévision de l’arrivée de ces vaccins, notamment mettre en place la chaîne de froid et d’approvisionnement.  Au-delà des beaux discours, a demandé Mme Doucet, qu’en est-il de l’accessibilité?  C’est vrai, a répondu le responsable de GAVI, « j’ai l’impression de vendre du rêve mais notre objectif est 2 milliards de doses de vaccins et nous pensons que cela sera possible avant la fin de 2021 ».

S’adressant ensuite à Mme HENRIETTA FORE, Directrice exécutive de l’UNICEF, la modératrice s’est enquise du sort de certains pays comme le Yémen, dont la situation humanitaire est alarmante.  Mme Fore a reconnu que le marché est en effet « très complexe et mouvementé ».  Il est vrai que certains pays s’adressent au marché privé qui peut être parfois trop cher.  Souvent les produits ne seront pas disponibles, c’est là qu’intervient le Mécanisme COVAX dont la tâche est de coordonner un accès mondial équitable et juste aux vaccins.

L’UNICEF tire également parti de ses atouts uniques en matière d’engagement communautaire et d’approvisionnement en vaccins pour s’assurer que les pays participant au Mécanisme COVAX aient un accès sûr, rapide et équitable au vaccin.  Il s’agit d’une entreprise énorme et de nombreux défis restent à relever, a témoigné Mme Fore.  En effet, a-t-elle insisté, il faut associer les communautés dont le rôle est essentiel pour promouvoir la confiance auprès des populations.  Elle a encouragé l’utilisation des plateformes Internet qui peuvent aider en termes de préparation des communautés.

En tant que « premier acheteur de vaccins au monde », avec plus de deux milliards de doses acquises chaque année pour la vaccination de routine et la lutte contre les épidémies dans près de 100 pays, l’UNICEF coordonne et soutient l’achat, le transport international et la distribution dans les pays des vaccins contre la COVID-19 pour le Mécanisme COVAX.

M. RICHARD HATCHETT, Directeur général de la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI), a dit que COVAX est plus qu’un mécanisme pour rendre les vaccins accessibles ; c’est une solution intérimaire qui assure une coordination entre diverses organisations comme la CEPI, l’UNICEF et l’OMS, et qui s’avère précieuse pour les multiples aspects réglementaires.  « Nous avions subi une pandémie il y a 11 ans et nous savions qu’il y aurait une véritable course pour l’élaboration des vaccins », a rappelé le médecin.  Or, grâce au Mécanisme COVAX et à nos investissements, nous nous trouvons en tête de la file d’attente pour être les premiers sur le marché, s’est-il félicité.

Nous savons que les pays font face à des incertitudes énormes et pensent avant tout à leur population, ce qui implique un risque de concentration dans certains pays, c’est pourquoi nous devons axer le dialogue sur le projet d’un accès équitable, a recommandé M. Hatchett.  Il a ajouté que le défi serait avant tout de rassembler les outils nécessaires pour assurer les volumes de production.  C’est la clef de l’équité, a-t-il dit, car « la pénurie c’est la quintessence de l’iniquité ».  M. Hatchett a indiqué que COVAX permettra la distribution de deux milliards de doses de vaccin en 2021, sans nier les difficultés liées à la production et aux essais cliniques à grande échelle.  S’il a aussi abordé les difficultés des petits pays qui dépendent de produits conçus ailleurs, il a fait part de son optimisme en raison des caractéristiques révolutionnaires des nouveaux vaccins comme celui de Pfizer.  « Ces vaccins marquent le passage du processus de la biotechnologie, si coûteuse, à celui de la simple chimie, beaucoup plus facile à effectuer à petite échelle et avec moins de ressources, donc un avantage certain pour les pays moins riches. »

M. ANDREW WITTY, Envoyé spécial de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour l’Accélérateur ACT, a informé que le dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 enregistre 4,3 milliards de dollars de déficit.  Il a chiffré le budget nécessaire à 30 ou 35 milliards de dollars pour les mois à venir, une somme qui reflète les besoins du monde entier et de l’économie mondiale.  Comparée aux sommes dépensées rien que pour réparer les dégâts déjà causés par la pandémie, cette somme se révèle minime, c’est un investissement rentable, a assuré M. Witty.  Il s’est toutefois félicité du rythme de la levée de fonds.  Cinq milliards de dollars ont déjà été reçus, alors qu’un montant de ce niveau requiert en général plusieurs années.  L’Accélérateur ACT essaie de trouver une solution équilibrée, car « il est impossible de vacciner toute la planète en 2021 », a-t-il averti.  Saluant les aides déjà fournies par des acteurs comme la Fondation Gates ou l’Alliance du Vaccin (GAVI), il a recommandé de promouvoir la collaboration public/privé.

S’il existait heureusement des capacités de production prêtes avant l’épidémie, il reste nécessaire de maintenir des capacités excédentaires, a fait valoir M. Witty.  De même, les innovations doivent se poursuivre, par exemple pour les anticorps monoclonaux qui peuvent être utilisés pour les patients qui ne peuvent supporter le vaccin.  Il s’agit d’un « double défi d’ingénierie et de distribution » qui implique une mobilisation mondiale.  Si le multilatéralisme fonctionne dans le cadre du Mécanisme COVAX qui permet de nouer des contacts entre une vaste gamme de fabricants, il est important, selon l’intervenant, d’assouplir les réglementations au niveau mondial.  « Les productions de masse de vaccins ne peuvent être bloquées par un simple problème de réglementation sur leur emballage! »

Répondant ensuite à une question concernant l’Afrique, l’Envoyé spécial de l’OMS a salué les énormes avancées des chercheurs africains depuis 15 ans, en particulier sur le paludisme, mais il a ajouté qu’à l’avenir les chaînes de production devront être renforcées dans les pays du continent.  M. Witty a assuré que le vaccin est un bien commun de l’humanité.  « Quel que soit son processus de création, tous les humains y ont droit. »  « Son prix ne doit pas être un obstacle mais il faut aussi motiver ceux qui le fabriquent », a-t-il conclu.

Le monde se trouve aujourd’hui à un tournant dans la lutte contre la COVID-19, comme l’ont montré les discussions entre États Membres et la communauté scientifique.  Des vaccins très prometteurs sont en train de voir le jour.  Dès lors, se sont interrogées plusieurs délégations, comment faire de ce vaccin « pour tous » un bien commun?  Comment atteindre un tel objectif ? a voulu savoir le Cameroun, au nom du Groupe des États d’Afrique.  D’abord, « le prix ne doit pas être un obstacle », a répondu M. Witty, Envoyé spécial de l’OMS pour l’Accélérateur ACT.  En même temps, a-t-il poursuivi, il faut pousser les acteurs qui créeront ce bien à le produire et cela doit être notre aspiration à tous.  Un accès juste au vaccin demande de la transparence, comme l’ont souligné à maintes reprises les différents panélistes.

Alors comment éviter les risques de fraude pour garantir la qualité du produit ? a interrogé la Suède au nom des pays nordiques.  C’est là qu’intervient le Mécanisme COVAX, a expliqué Mme Fore, Directrice exécutive de l’UNICEF, en établissant notamment un cadre d’évaluation des produits.   Singapour a demandé ce que pouvaient faire les petits États vulnérables pour se préparer à la réception du vaccin et sa distribution.  Comment assurer la vaccination, vers la fin de 2021, une part minimale significative de leur population?  Pour M. Hatchett, Directeur général de laCoalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies(CEPI), l’objectif du Mécanisme COVAX est de distribuer deux milliards de doses de vaccins minimum et d’essayer d’atteindre environ 20% de la population de différents pays.  Il faut pouvoir protéger les travailleurs sanitaires et les membres des populations les plus vulnérables dans le contexte de chaque pays.   De plus, les petits pays doivent compter sur des produits mis au point ailleurs, alors que nous essayons de lutter contre les iniquités en matière de distribution, a-t-il continué.  Cependant, a-t-il nuancé, le vaccin de Pfizer, par exemple, implique l’utilisation d’une technologie révolutionnaire inédite et exigeante, mais cette production passe à un autre stade, celui de la chimie, un travail qui peut être réalisé à plus petite échelle et donc plus accessible pour les petits États disposant de moindres ressources.

Une autre question qui a retenu l’attention des panélistes est de savoir comment les pays de la Communauté des Caraïbes(CARICOM), qui dépendent entièrement du tourisme, pourront bénéficier d’un accès équitable à ce vaccin, synonyme de reprise économique pour eux.  Pour le docteur Berkley, Directeur général de l’Alliance du Vaccin (GAVI), il appartient aux différents pays d’établir leurs priorités en termes d’octroi des vaccins.  Pour finir, tous sont conscients que cette pandémie est une épreuve pour toutes les nations, mais les efforts colossaux consentis par tous les acteurs produiront sûrement les objectifs que nous voulons en atteindre en 2021.  « Pour que nous puissions tous prendre des vacances bien méritées et pourquoi pas à Sainte-Lucie », a souri la modératrice Lyse Doucet.

Table ronde 3: Renforcer la résilience et reconstruire en mieux après la COVID-19

Après une courte vidéo de deux minutes produite par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), consacrée aux conséquences économiques de la COVID-19 sur les travailleurs migrants originaires des pays en développement, Mme FEMI OKE, journaliste et modératrice, a demandé aux panélistes quelles actions concrètes pouvaient être prises pour renforcer la résilience et reconstruire en mieux après la COVID-19.

Pour Mme NATALIA KANEM, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), il faut avant tout disposer de davantage de matériel médical pour servir les populations les plus vulnérables, à savoir les personnes âgées, les enfants, les adolescents, les communautés afro-descendantes ainsi que les femmes, qui représentent 70% de la main-d’œuvre médicale.

« Il faut rectifier le tir pour éviter davantage de souffrances », a lancé la Directrice générale pour les politiques de développement et les partenariats à la Banque mondiale, Mme MARI PANGESTU, en faisant part de ses « prédictions sombres ». 

« Ne jamais gaspiller une bonne crise », a scandé la modératrice, paraphrasant une déclaration prononcée en juillet dernier par la Secrétaire générale adjointe de l’ONU et Directrice exécutive d’ONU-Femmes, qu’elle avait trouvée très à propos.  Sollicitée de nouveau, Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA a insisté sur les inégalités de genre: « il faudra bien veiller à ce que les femmes puissent reprendre leurs activités à des niveaux prépandémiques », a prévenu la Secrétaire générale adjointe.  Les secteurs des services et les secteurs informels doivent être pris en compte dans les plans de relance nationaux.  Mme Mlambo-Ngcuka a aussi appelé à « éviter les solutions court-termistes » dans les plans de relance. 

M. GUY RYDER, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a parlé de « catastrophe » pour le monde du travail, et tiré de l’année 2020 cet enseignement: la crise a touché les plus vulnérables.  « Des personnes laissées pour compte depuis des années à cause des échecs de nos politiques.  Pouvons-nous mettre en place des mesures pour lutter contre ces vulnérabilités?  Si oui, peut-être que quelque chose de positif sortira de cette crise », a-t-il espéré.

« Ne pas gaspiller une bonne crise » signifie pour M. ROBERT PIPER, Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement, de veiller à ce que la reconstruction rende le monde « plus inclusif » mais aussi « plus sûr » en termes de gestion des risques.  « Aujourd’hui, le monde fait face à une pandémie; demain, ce sera peut-être une crise climatique ou un tremblement de terre.  Nous devons nous préparer à d’autres crises », a prévenu M. Piper.

Les « dégâts incommensurables causés par l’homme sur la nature » ont d’ailleurs inquiété M. PAVAN SUKHDEV, Président de la World Wildlife Federation et ambassadeur de bonne volonté du PNUE, qui a conseillé dans ce contexte de ne pas trop se féliciter de la découverte d’un vaccin par le secteur privé.  « En l’espace de 28 ans, c’est-à-dire un clin d’œil pour l’histoire de la Terre, nous avons perdu 10% de la couverture forestière en Amérique du Sud », et plusieurs virus sont apparus (SARS, grippe aviaire), a-t-il rappelé. 

Les investissements dans le secteur de la santé sont néanmoins très importants, ils sont « l’alpha et l’oméga », selon Mme ZSUZSANNA JAKAB, Directrice générale adjointe de l’OMS.  Aucune croissance ne sera possible si les systèmes sanitaires ne sont pas résilients, a-t-elle estimé, en prévenant que cela vaut aussi pour les pays développés. 

Interrogée sur la situation des femmes et des filles face à la pandémie, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a exhorté à inclure les femmes dans les processus de prise de décisions: « si les femmes ne sont pas présentes aux tables des négociations, alors les politiques mises en place ne leur seront pas favorables », a-t-elle appuyé. 

La Directrice exécutive du FNUAP a abondé en ce sens.  « Nous devons garder à l’esprit l’aspect intersectionnel », a-t-elle déclaré.  « Ces femmes et ces filles dont nous parlons ont plusieurs casquettes »; elles peuvent être chargées de la désinfection dans un hôpital, donner des soins quand elles rentrent chez elles, donner la vie...  Mme Kanem a profondément regretté que la question de la contraception soit politisée, et a appelé à penser à ceux qui prodiguent les soins dans les hôpitaux, c’est-à-dire les femmes.  Elle a remercié les hommes qui défendent les femmes, mais regretté qu’« ils ne soient pas la majorité ».  Elle a en outre évoqué le problème de la répartition des tâches domestiques et du manque de protection sociale dont les femmes souffrent.

« Comment reconstruire mieux? »  Répondant à cette question, la Directrice générale à la Banque mondiale a indiqué que celle-ci avait d’abord dû faire face à l’urgence en débloquant 12 milliards de dollars pour les activités de subsistance et les programmes de protection sociale mis à rude épreuve par la pandémie.  Notant la complémentarité des ripostes sanitaire et économique, elle a rappelé que la pandémie n’était pas terminée et qu’il fallait se concentrer sur le dépistage, l’isolement et le traitement.  « S’adapter rapidement est fondamental et pour ce faire, nous devons mesurer ‘qui a besoin de quoi’ avant de pouvoir veiller à ce que notre action ait l’impact escompté », a-t-elle indiqué. 

« Nous payons le prix de décennies d’inaction », a constaté le Directeur général de l’OIT.  « Cette crise nous pendait au nez », a-t-il dit, car nous n’avons pas su régler la question de la protection sociale ni des inégalités sociales.  Il a indiqué que 6 personnes sur 10 vivent de l’économie informelle, des personnes qui n’ont aucun filet de sécurité. 

Mettant l’accent sur la contradiction consistant à devoir débloquer des moyens considérables pour la relance alors que les économies se contractent, le Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement des Nations Unies a estimé que la clef sera, dans les mois à venir, de trouver les bonnes coalitions d’investissement pour régler les problèmes existants. 

« Nous espérons voir la lumière au bout du tunnel en 2021 », a déclaré la Directrice générale adjointe de l’OMS, avant de citer la « tâche herculéenne » qui consistera à vacciner 20% de la population mondiale d’ici à la fin 2021 et de trouver les 23,9 milliards de dollars nécessaires à cette fin.  En 2021, ce sont 35 millions de femmes et de filles qui vont tomber dans la pauvreté à cause de la pandémie, a enchaîné la Directrice exécutive d’ONU-Femmes pour faire comprendre l’ampleur des conséquences.  Son homologue du FNUAP a ajouté qu’avec les contraintes liées à six mois de confinement, 47 millions de femmes ont perdu la capacité de contrôler leur fertilité, ce qui se traduit par sept millions de grossesses non désirées.

Le Directeur général de l’OIT a, lui, demandé d’utiliser cette phase de relèvement pour réfléchir aux moyens d’aider les petits exploitants.  Sachant que sur les cinq milliards de ruraux à travers le monde, 1,2 milliard travaillent et vivent sur des exploitations de moins de 2 hectares, il a recommandé de trouver les moyens de les aider à vivre dans de bonnes conditions « là où ils sont » plutôt que de les voir obligés de migrer vers les villes. 

Après le dialogue entre experts, les États Membres ont posé leurs questions sur le relèvement post-COVID, notamment pour savoir comment réaliser le Programme 2030 malgré la pandémie. 

Comment faire en sorte, a d’abord demandé la Chine, que la réalisation du Programme contribue vraiment à améliorer la situation des populations les plus vulnérables et à les protéger.  Le Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement a répondu que la question de vulnérabilité n’était pas un problème nouveau et que les orientations politiques pour y remédier étaient nombreuses.  C’est qu’il faut, a ajouté le haut responsable, c’est mesurer et évaluer « les grandes données assommantes » et comprendre pourquoi les choses ne marchent pas.  Ensuite, il faut donner la parole aux personnes vulnérables et savoir à quel moment elles doivent intervenir dans la réalisation des politiques.  Ce qu’il faut aussi, a-t-il insisté, c’est mesurer les progrès réalisés. 

Les marginalisés doivent participer à l’élaboration des politiques et des stratégies, a acquiescé la Directrice exécutive du FNUAP.  Elle a ajouté à cela la nécessité de placer l’argent là où c’est utile et nécessaire.  Le FNUAP a consacré 30% de son budget pour ceux qui en ont réellement besoin, a-t-elle dit ajoutant que c’est la clef pour reconstruire en mieux. 

L’importance de la couverture sanitaire universelle a été mise en avant par la Directrice générale adjointe de l’OMS qui a rejeté la faute des revers actuels sur le manque d’investissements dans la préparation.  Pourtant, investir dans la préparation d’un individu ne coûte que 5 dollars par an, a-t-elle dit.  Si l’on maintient le niveau actuel d’investissement dans la préparation, il faudra 500 ans pour y arriver.

Dénonçant les mesures coercitives unilatérales, le Fédération de Russie a regretté que ces sanctions touchent 20% des Membres de l’ONU.  Que font les institutions pour combattre les mesures coercitives unilatérales?  La Directrice générale adjointe de l’OMS a répondu que, dans le contexte humanitaire, l’OMS continue son travail avec tous ses partenaires, y compris la société civile, comme en Syrie.  C’est le seul moyen d’atteindre les endroits les plus reculés et les populations isolées.  Il faut placer les choses dans le contexte humanitaire, a-t-elle insisté.  Le Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement a répondu que les agences des Nations Unies fonctionnent conformément aux décisions des États Membres.  « C’est un dilemme et on préfère que de telles situations ne se posent pas. »  En tant qu’acteurs du Secrétariat, les agences acceptent les contraintes et continuent de mener à bien leur travail sur le terrain.  La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a ajouté que, en ces temps difficiles, les agences de l’ONU travaillent d’arrache-pied pour que tous les pays s’en sortent. 

Le Chili a voulu savoir quels sont les domaines prioritaires pour veiller à ce que la riposte accorde suffisamment d’attention aux femmes et aux filles dans le contexte de la relance de l’économie?  Pour la Directrice exécutive du FNUAP, il faut se montrer innovant pour avoir des informations correctes, surtout en temps de pandémie, en faisant appel notamment aux jeunes qui sont bien informés alors que bon nombre d’entre eux sont au chômage.  La COVID-19 nous ramène aussi au fossé numérique qu’il faudra combler.  Concernant les femmes, y compris les femmes âgées, il faut tenir compte de leur dignité, combattre leur solitude, entretenir les liens intergénérationnels en ligne ou face-à-face en respectant la distanciation sociale, a suggéré la Directrice exécutive. 

La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a souligné l’importance d’investir dans une éducation résiliente et moderne ainsi que dans la santé des populations vulnérables.  Il faut tout mettre en œuvre pour que ces deux secteurs soient abordables et accessibles, a-t-elle conseillé.  La Directrice à la Banque mondiale a rappelé que son institution avait pris depuis longtemps l’engagement de tenir compte, dans ses programmes, du paradigme homme-femme.  Mais c’est aux gouvernements d’avoir la volonté politique de s’y atteler, a-t-elle ajouté.  Il faut traiter les filles dès leur naissance sur un même pied d’égalité que les garçons, améliorer la connaissance juridique des femmes dont beaucoup ignorent leurs droits.  Les solutions de microfinances sont aussi très efficaces, a-t-elle assuré avant de prôner l’entraide communautaire pour que les collectivités renforcent mutuellement leurs capacités. 

Pour reconstruire en mieux, il faut impérativement parler du travail des femmes, a renchéri le Président de la World Wildlife Federation.  Le secteur de l’agriculture est celui qui emploie le plus de monde avec cinq milliards de personnes qui y travaillent, dont 2,3 milliards dans des fermes de moins de 2 hectares, a-t-il ajouté en recommandant de donner à ces dernières les moyens de prospérer.  Ce modèle agricole des petites exploitations est d’ailleurs positif pour le climat, car il consomme moins d’eau.  L’expert a donc suggéré d’aider les petits exploitants agricoles à réussir là où ils sont plutôt que de les encourager à migrer vers les villes. 

Le problème de résilience des travailleurs non qualifiés a été soulevé par le Canada, au nom d’un groupe de pays, alors que les situations économique et sanitaire sont désastreuses.  Cette même délégation a demandé à ce propos à la représentante de la Banque mondiale, comment elle évaluait l’attitude de la communauté internationale face au niveau d’endettement croissant.

L’oratrice de la Banque mondiale a reconnu que les niveaux d’endettement de nombreux pays étaient déjà très inquiétants avant que la pandémie ne survienne.  Point positif, les pays du G20 ont accepté un système de suspension de la dette: il concerne 44 des pays les plus endettés de la planète.  Ce mécanisme reste cependant une bouffée d’oxygène temporaire: davantage de créanciers non traditionnels doivent participer, sans quoi la crise ne se terminera pas, a prévenu l’oratrice.  Les crises d’endettement passées ont montré qu’elles étaient longues à disparaître, durant parfois plus de 10 ans, comme l’exemple de l’Amérique latine l’a montré.  Il faut donc agir en amont et en temps voulu, le gros point d’interrogation restant la participation du secteur privé.

Interrogé sur la manière d’éviter une prochaine pandémie, l’ambassadeur de bonne volonté du PNUE a attiré la discussion sur le terrain de l’environnement: il faut selon lui commencer par mettre fin à la déforestation, au commerce illégal de vie et de faune sauvages, et changer nos régimes alimentaires, particulièrement la consommation de viande.  Il a aussi donné des recommandations aux marchés financiers, qui décident du cap de l’économie mondiale: ils doivent impérativement changer la manière dont ils opèrent ainsi que leurs critères de performance. Tels sont les grands axes pour éviter une prochaine pandémie, selon lui.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, la Sierra Leone a prévenu que les politiques d’allégement de la dette soulageaient les pays sur le court terme mais étaient délétères à moyen terme, car elles l’alourdissaient.

Elle a demandé comment éviter ce cercle vicieux, et comment alléger véritablement la dette.

La représentante de la Banque mondiale a reconnu que le problème allait s’aggraver tant que les recettes fiscales étaient insuffisantes.  Elle a qualifié « l’épongement » de la dette de question cruciale, tout comme le rôle du secteur privé.  Elle a aussi évoqué le concept de « transparence de l’endettement », soit veiller à que les pays aient « la viabilité nécessaire » pour qu’ils puissent se lancer dans une « restructuration saine », « transparente » de la dette, afin que les parties prenantes aient toutes les cartes en main pour régler les crises.  Le G20 a élaboré une approche commune, mais celle-ci n’a pas encore été mise en œuvre; or, il s’agit d’une question urgente pour la Banque mondiale.  Mais elle a prévenu qu’il fallait faire attention à ne pas faire dégringoler sur les marchés financiers la notation du pays dont on allège la dette.

Le Kenya, parlant lui aussi au nom du Groupe des États d’Afrique, a demandé des précisions au sujet des plans de relance.  L’oratrice de la Banque mondiale a expliqué que cette crise, davantage que les précédentes, avait touché de nouvelles cibles de population, au-delà des publics très pauvres habituellement touchés par les crises.  Il faudra donc élargir les cibles de ces plans.  D’autre part, il faudra prendre en compte, dans les efforts de reconstruction, la possibilité de l’apparition d’une nouvelle zoonose.  Il faudra renforcer les systèmes de santé et d’éducation, construire des infrastructures vertes et réhabiliter les côtes ou les terres dégradées.  À moyen terme, cette dernière mesure soulagera des populations telles que les agriculteurs.  Emploi, réduction de la pauvreté et amélioration de l’environnement: il faut toujours essayer d’agir en respectant ce triptyque, a-t-elle expliqué.  

Le représentant de l’OIT a, quant à lui, jugé que l’occasion de réformes présentée par la crise financière de 2008 avait été « totalement gâchée ».

La Barbade, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a déplacé le débat sur les changements climatiques, faisant valoir que les petits États insulaires en développement (PEID), très peu émetteurs, sont pourtant les plus vulnérables aux émissions de gaz à effet de serre.  Or « certains pays ont de façon délibérée, ou du fait de la COVID-19, réduit leurs engagements en matière d’aide publique au développement », a déploré la CARICOM.  « Comment veiller à ce que la lutte contre les changements climatiques ne soit pas mise à mal par la lutte actuelle contre la COVID? »

L’ambassadeur de bonne volonté du PNUE a d’abord estimé qu’on devrait rebaptiser les petits États insulaires en développement en « immenses pays océaniques », en raison de leur superficie marine incroyable, et donc de leur rôle important dans la sauvegarde des écosystèmes de la planète.  Le Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement a opiné sur l’immense risque que ce groupe de pays courait, et a appelé la communauté internationale à ne pas se détourner de cette aide publique au développement.

Ce panéliste a aussi répondu à l’Union européenne (UE) qui voulait connaître les mesures pratiques imaginées pour inclure le numérique dans la réalisation des objectifs de développement durable.  Il a répondu que la numérisation était l’une des manières de progresser dans plusieurs objectifs, mais que ces débats devaient être menés pays par pays.

En conclusion, les panélistes ont été d’accord pour protéger tout à la fois « les individus, la planète et la biodiversité » sans laisser aucun de ces aspects de côté.  La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a réclamé davantage de services publics pour les populations vulnérables.

Suite du débat général

M. FILIPE JACINTO NYUSI, Président du Mozambique, qui s’exprimait au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a souligné que la sous-région a été durement touchée par la pandémie de COVID-19.  Deux tiers des décès en Afrique ont eu lieu dans cette région où les États n’ont eu de cesse de préserver la vie des citoyens et des systèmes de santé, parfois à travers des mesures contraignantes comme le confinement ou la limitation de la circulation des biens et personnes.  Ces mesures ont durement impacté nos économies, aggravant notamment l’inflation et les inégalités.  Se référant à un rapport d’évaluation de la SADC, il a indiqué qu’il s’agit maintenant de se mobiliser pour la reconstruction et la relance de l’économie.  De plus, s’est-il inquiété, la deuxième vague qui frappe la partie occidentale de la sous-région est une source de préoccupation.  La région place son espoir dans l’obtention d’un vaccin, mais on ne sait pas si ce vaccin sera distribué de manière équitable, a-t-il dit, avant d’exhorter à adopter une riposte mondiale face à cette pandémie globale.  Les défis sont certes immenses, c’est pourquoi, a-t-il conclu, nous ferons en sorte que la paix et la sécurité continuent de l’emporter afin de bâtir un monde commun.

M. DATO ERYWAN PEHIN YUSOF, Ministre des affaires étrangères du Brunéi Darussalam, a expliqué que, dès le début de la pandémie, en mars dernier, le pays a agi rapidement et pris la difficile décision de fermer les frontières et de limiter les déplacements pour prévenir et contrôler la propagation du virus.  Aujourd’hui, le Brunéi Darussalam a mis en œuvre un vaste programme de tests et un mécanisme de traçage des contacts grâce à l’application mobile BruHealth qui identifie les foyers du virus, tant pour les cas importés que transmis localement.  M. Yusof a expliqué que le Ministre de la santé a tenu des points de presse quotidiens via les médias traditionnels et sociaux.  Une ligne téléphonique verte informe l’opinion publique et permet aux citoyens de poser des questions et faire part de leurs préoccupations.  Le Ministre des affaires étrangères a encore mis l’accent sur la responsabilisation et la sensibilisation des citoyens à l’importance de la distanciation sociale, de l’isolement volontaire et du respect des règles d’hygiène, grâce à quoi aucun cas n’a été détecté depuis début mai.  Le pays s’est aussi efforcé de procurer des outils électroniques aux élèves pour éviter « une génération perdue » en termes d’éducation.  Au niveau international, M. Yusof a loué le Mécanisme COVAX et l’Accélérateur ATC, qu’il a jugés indispensables pour garantir une distribution équitable des tests et des médicaments, ainsi que pour des traitements abordables et accessibles pour tous.

M. ANŽE LOGAR, Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, a estimé qu’il faut collaborer avec l’OMS qui aide les États Membres en élaborant, diffusant et mettant à jour des outils, des données et des preuves sur l’évolution de la COVID-19.  En outre, il a souligné qu’il faut encourager les innovations permettant de renforcer les systèmes de santé et d’améliorer les réponses aux défis à venir.  La santé doit appartenir à tous et ne pas être le privilège de quelques-uns, a-t-il noté.  Nous devons travailler dur pour garantir l’accès à la couverture sanitaire universelle dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs de développement durable, a-t-il déclaré.  La crise a un impact dévastateur sur les droits des groupes les plus vulnérables et aggrave les inégalités structurelles des sociétés, ce qui se manifeste par une augmentation de la violence domestique.

M. Logar a souligné que la Slovénie fait partie de l’initiative Team Europe qui vise une reprise mondiale durable dans l’esprit de « reconstruire mieux et plus vert », notamment en mettant en œuvre les objectifs du Programme 2030 et de l’Accord de Paris.  Il a souligné que la reprise ne peut que passer par l’innovation, la transformation numérique et des solutions vertes.  Ainsi, la Slovénie s’est engagée à mettre l’intelligence artificielle au service de l’humanité, en accueillant, sous les auspices de l’UNESCO, le Centre international de recherche sur l’intelligence artificielle (IRCAI) qui a lancé la Corona Virus Media Watch pour surveiller l’évolution de la pandémie dans le monde.

M. ALEX AZAR, Secrétaire d’État à la santé et aux services sociaux des États-Unis, a reconnu le défi sanitaire sans précédent auquel est confronté le monde et a assuré que les États Membres peuvent compter sur la coopération des États-Unis pour vaincre cette crise.  Il s’est félicité du fait que nous disposons aujourd’hui, contrairement à l’époque de la grippe espagnole de 1918, des outils pour lutter contre cette pandémie.  À ce titre, il a notamment cité l’initiative américaine Warp Speed qui a appuyé la création de pas moins de six vaccins potentiels.  Grâce à l’ingéniosité des entreprises américaines et d’autres, M. Azar s’est dit optimiste que la fin de la pandémie est proche.

Il a regretté que toutes les données sur la pandémie n’aient pas été partagées de manière transparente dès le départ et a affirmé que ce « manquement de devoir » a été dévastateur pour le monde entier.  Qui plus est, s’est-il indigné, cela continue puisque l’enquête demandée à l’OMS sur les origines du virus ne sera publiée que l’année prochaine, ce qui est inacceptable.  Pour leur part, les États-Unis ont été entièrement transparents et partageront leurs outils, une fois qu’ils se seront occupés de leur citoyens.  M. Azar a espéré qu’en œuvrant ensemble il sera possible de vaincre la COVID-19 et de revenir à la normalité d’ici à quelques mois.

M. NASSER BOURITA, Ministre des affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger du Maroc, a déclaré que la COVID-19 avait pris de cours nos systèmes de santé, nos économies et notre protection sociale.  La pandémie, a-t-il ajouté, induit aujourd’hui des choix difficiles, car à l’urgence de sauver des vies, s’ajoute celle de relancer les économies, en particulier dans les pays africains.  Cette situation implique l’abandon des vieilles recettes et le recours à des moyens plus innovants, un multilatéralisme fondé sur la responsabilité qui oriente l’action des Nations Unies vers le concret et vers les résultats.  Au vu des inégalités exacerbées par la pandémie, il a appelé à redoubler d’efforts, notant que la restructuration de la dette annoncée au G20 est un pas positif.  Le Ministre a par ailleurs décrit les mesures mises en œuvre au Maroc, tel un fonds social pour les plus vulnérables doté de 3,5 milliards de dollars, une injection de fonds dans l’économie équivalant à 11% du PIB, un fonds d’investissement stratégique pour les grands projets et une couverture santé généralisée pour tous les Marocains, accompagnés d’une aide médicale solidaire à 20 pays africains.  Il a enfin appelé la communauté internationale à prendre en compte l’impact qu’aura la pandémie sur les systèmes nationaux et internationaux à l’avenir et plaidé pour un monde plus juste et solidaire.

M. CHRISTOPHER TUFTON, Ministre de la santé et du bien-être de la Jamaïque, a indiqué que les stratégies qui ont guidé la Jamaïque au cours des derniers mois sont le fruit d’une réorientation du plan de préparation à une pandémie de grippe.  Grâce à l’OMS, à l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) et à plusieurs partenaires, le pays a pu renforcer les capacités de test de telle sorte qu’il peut désormais se vanter d’un délai de 24 à 48 heures pour obtenir les résultats de tests PCR.  Mais la COVID-19 a mis en évidence plusieurs lacunes dans le système de santé, a reconnu le Ministre, expliquant que le Gouvernement avait saisi l’occasion pour renforcer ses capacités.  Par ailleurs, au cours des neuf derniers mois, la Jamaïque a connu une baisse massive de son PIB - au moins 14% en un seul trimestre.  Plus de 100 000 emplois ont été perdus et de nombreuses personnes se sont retrouvées aux prises avec de l’anxiété et des problèmes mentaux.  Mais il faut continuer de répondre à la pandémie, tout en maintenant des fonctions sanitaires essentielles.  « L’avenir n’est pas clair, mais ce qui est clair, c’est que nous nous rétablirons plus forts et que la Jamaïque, comme plusieurs autres petits États insulaires en développement, a bénéficié de partenariats, à la fois internes et externes. »  En tant que monde globalisé, nous avons appris à dépendre les uns des autres en temps de crise, a conclu le Ministre.

M. TANDI DORJI, Ministre des affaires étrangères du Bhoutan, a souligné que la pandémie avait révélé et exacerbé les fragilités existantes et mis à nu l’absence de couverture sanitaire inadéquate dans beaucoup de pays.  Les acquis du développement risquent aussi d’être remis en question, a-t-il craint.  Le Bhoutan n’a enregistré aucun mort et a réussi à restreindre le nombre de cas, a fait valoir le Ministre, car le pays a mis l’accent sur les secteurs les plus vulnérables de la société.  D’autre part, la résilience et la solidarité ont primé malgré de graves conséquences.  Il a exhorté à aider les pays pauvres en ressources et s’est dit préoccupé sur les répercussions économiques des mesures de confinement.  L’ONU et les partenaires de développement devront assister le Bhoutan pour qu’il puisse se relever économiquement et réaliser les objectifs de développement durable, a-t-il conclu.

M. SIMON COVENEY, Ministre des affaires étrangères et Ministre de la défense de l’Irlande, a d’entrée souligné l’importance de la coopération, un élément déterminant, à ses yeux, pour l’élaboration de stratégies de santé publique.  L’Irlande a bénéficié des conseils d’experts et du leadership multilatéral de l’ONU et de l’OMS et a également cherché à aider les autres.  Elle a ainsi participé à hauteur de plus de 150 millions de dollars à la riposte mondiale à la pandémie de COVID-19 et quadruplé sa contribution financière à l’OMS.  M. Coveney a aussi énuméré différentes actions entreprises par son pays, notamment le Mécanisme COVAX dans le cadre de l’Union européenne, afin d’assurer un accès équitable aux vaccins.

Il a également indiqué que son gouvernement avait établi une stratégie solide de dépistage et de traçabilité « complète, fiable et réactive ».  M. Coveney a ensuite parlé des mesures prises pour limiter la transmission du virus.  « Il y a eu des choix difficiles à faire et les restrictions imposées par le Gouvernement ont eu des effets majeurs sur la vie économique et sociale de notre pays », a-t-il reconnu.

M. ZBIGNIEW RAU, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a d’entrée souligné le rôle de l’OMS qui, avec son expertise et ses atouts uniques, devrait rester l’autorité directrice chargée de renforcer le système de santé mondial.  Elle doit être soutenue par toutes les entités concernées du système des Nations Unies et la Pologne est prête à engager des discussions sur la manière d’y parvenir.  Il a fait valoir que son pays a été l’un des premiers à soutenir les efforts de l’ONU pour gérer la pandémie.  Dans un esprit de solidarité, la Pologne a notamment déployé un certain nombre de missions médicales en Italie, au Bélarus et en Ukraine, et envoyé du matériel médical dans les Balkans occidentaux, dans le Caucase, au Moyen-Orient et en Afrique.  Dans un esprit de responsabilité collective, elle a également contribué au programme « Team Europe » de l’Union européenne, qui aide les pays partenaires à faire face aux conséquences humanitaires, sanitaires et socioéconomiques de la pandémie.  M. Rau a par ailleurs exhorté à assurer l’accès universel à une vaccination efficace et abordable contre la COVID-19, se disant soulagé de pouvoir bientôt bénéficier des premiers vaccins contre le coronavirus.  Cependant, a-t-il ajouté, tout en nous concentrant sur la pandémie, nous ne devons pas oublier les autres défis auxquels le secteur de la santé doit faire face.

M. DMYTRO KULEBA, Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a tout d’abord rendu hommage aux professionnels de la santé de par le monde.  Il a noté que la crise sanitaire de la COVID-19 s’est transformée en une véritable crise humanitaire, socioéconomique et sécuritaire.  Les PIB ont chuté, a-t-il indiqué, ce qui a une incidence directe sur des millions de personnes et risque d’entraîner la faim dans le monde.  Pour sa part, l’Ukraine fera tout son possible pour assurer la sécurité alimentaire de ses citoyens et la mise en place des technologies novatrices pour leur apporter des services et des ressources pertinents, notamment pour lutter contre « l’infox » au sujet de la maladie.  Pour le Ministre, les pays devront sortir « par le haut » de cette épreuve, grâce au multilatéralisme.  Il a reproché à un petit groupe d’état d’avoir cherché à exploiter cette situation au profit d’intérêts politiques étroits.  L’Ukraine compte sur l’unité et la solidarité mondiales comme seule voie de sortie de la pandémie.

M. PAUL OQUIST KELLEY, Secrétaire privé pour les politiques nationales du Président du Nicaragua, a rappelé les propos du Président Roosevelt qui disait « nous n’avons à craindre que la peur elle-même », et noté que la crise de 1929 avait débouché sur de grands efforts pour une redistribution sociale et des réformes économiques.  Il a déploré que les États-Unis ne prennent pas de telles mesures aujourd’hui et persistent dans l’imposition de mesures unilatérales contre le Nicaragua qui, a-t-il ajouté, constituent des crimes contre l’humanité, car ils nuisent à l’effort contre la COVID-19.  Le Secrétaire a regretté que la planète compte deux milliards de victimes de mesures unilatérales imposées par des pays qui se prétendent supérieurs.  Il a aussi évoqué les changements climatiques qui ont ajouté, avec deux récents ouragans, aux difficultés subies par son pays et demandé un accès équitable aux vaccins, condition d’un relèvement inclusif de son pays.

Mme MARTA TEMIDO, Ministre de la santé du Portugal, s’est inscrite en faveur d’une riposte internationale coordonnée à la pandémie de COVID-19, dirigée par l’OMS et soutenue par le système de l’ONU, et a appuyé les « travaux importants » qui ont été menés avec persévérance par l’OMS.  La Ministre a ensuite insisté sur l’importance de la santé et l’objectif d’une couverture sanitaire universelle en tant que droit de l’homme.  Elle a d’ailleurs appelé à saisir l’occasion de cette crise sanitaire pour « redéfinir les fondements mêmes » de nos systèmes de santé.

La Ministre a également appelé à une gestion efficace de l’infodémie et de la désinformation qui y est associée, car la désinformation « coûte des vies ».  Dans ce contexte, et avec l’arrivée d’un vaccin potentiellement efficace, il est crucial, a-t-elle préconisé, de renforcer collectivement les efforts pour combattre ce phénomène.

M. BOGDAN LUCIAN AURESCU, Ministre des affaires étrangères de la Roumanie, a détaillé les grands axes de la politique roumaine de lutte contre la pandémie: prévention de la propagation, renforcement des capacités du système de santé, développement de la coopération avec les partenaires de l’UE et sensibilisation de la population aux risques du virus.  Dans les prochains mois, ces mesures politiques seront complétées par des activités liées à la campagne de vaccination, considérée comme une question de sécurité nationale, a-t-il expliqué.  La Roumanie a aussi réorienté plus de la moitié de son budget de coopération au développement international pour répondre à la pandémie de COVID-19, en mettant l’accent sur la consolidation des systèmes de santé et sur la lutte contre les fausses nouvelles liées à l’épidémie.

M. Aurescu a ajouté que la pandémie de COVID-19 avait montré, une fois de plus, que les défis mondiaux nécessitaient une action commune, de la solidarité et de la coopération.

M. MOHAMED T. H. SIALA, Ministre des affaires étrangères de la Libye, a estimé qu’il n’y a pas d’autre choix que celui de sauver tout le monde, sans discrimination aucune, et ce, par le biais d’une stratégie globale humaine, rapide et résolue, dans le respect de la dignité de chacun et du droit à la vie.  Il convient dès lors que « les armes pour combattre la pandémie » soient à la portée de tous, a-t-il réclamé.  Avec la production d’une dizaine de vaccins, il incombe maintenant à l’OMS de garantir leur distribution à tous les pays et à un prix abordable, a-t-il espéré.  Il a appelé les autres parties au conflit en Libye à respecter le cessez-le-feu auquel le Secrétaire général de l’ONU a appelé.  La Libye savait qu’elle n’était pas à l’abri dès le début de la pandémie alors même qu’elle était en proie à une agression, a expliqué le Ministre, en disant que son pays n’avait d’autre choix que celui de repousser l’agresseur, ce à quoi il est parvenu, et de procéder à la protection rapide de la population.  L’ampleur des défis dépasse largement les moyens à notre disposition, a-t-il déploré, avant d’énumérer les principales mesures prises comme la mise en place d’unités de quarantaine et la fourniture de matériel de dépistage.  Il a espéré recevoir plus de matériel médical pour lutter contre un virus qui s’est infiltré jusque dans les camps d’accueil des migrants.  Il a demandé à l’ONU de fournir aux migrants une assistance alimentaire et les moyens de retourner dans leur pays.  Il a aussi demandé la restitution des biens et ressources libyennes usurpés.

M. DJACOBA OLIVA TEHINDRAZANARIVELO, Ministre des affaires étrangères de Madagascar, a déclaré que son gouvernement avait fait le choix de prioriser la protection de la population, en instaurant, dès l’apparition des premiers cas de COVID-19, l’état d’urgence dans la capitale, puis progressivement dans les autres régions touchées.  En parallèle, les ressources humaines, financières et sanitaires du secteur médical ont été renforcées.  De cette initiative est née le CovidOrganics ou CVO, un remède de plantes médicinales à vocation préventive et curative contre le Coronavirus, a fait valoir le Ministre.  Les autorités ont en outre pris l’initiative « inédite » de faire rechercher, produire et distribuer à la population un remède traditionnel amélioré.  Grâce à ces mesures, le nombre de cas s’est maintenant stabilisé, avec un nombre de guérisons largement supérieur, depuis trois mois, à celui des nouvelles contaminations, a assuré le Ministre.

M. DINESH GUNAWARDENA, Ministre des affaires étrangères de Sri Lanka, a indiqué que son pays a géré la propagation de la COVID-19 en respectant strictement les précautions sanitaires universelles et en adoptant une approche pangouvernementale, visant la transmission zéro.  Un centre national d’opérations pour la prévention de l’épidémie a été créé et une plateforme numérique facilite l’engagement du public pour la recherche des contacts, a-t-il précisé, ajoutant que les soins de santé gratuits fournis à la population ont également permis de réduire la propagation du virus.  Pour faire face à l’impact socioéconomique de la pandémie, le Gouvernement a accordé une aide financière et des rations sèches à plus de six millions de familles et groupes vulnérables, tout en créant un fonds COVID-19 pour la santé et la sécurité sociale.  S’agissant de la vaccination à venir, le Ministre a fait état de la nomination d’un comité de coordination au sein du Ministère de la santé et de l’obtention de fonds d’aide pour l’entretien des chaînes du froid des vaccins.  Appelant l’ONU à mobiliser toutes ses ressources pour que le vaccin soit un « bien public mondial », gratuit et accessible à tous, il a également plaidé pour un financement international accru et un moratoire sur la dette des pays en développement en cette période de crise.  Selon lui, une attention particulière devrait être accordée aux pays à revenu intermédiaire afin qu’ils soient éligibles à l’Initiative de suspension du service de la dette du G20.

M. E. FEDERICO ALBERTO GONZÁLEZ FRANCO, Ministre des relations extérieures du Paraguay, a énuméré les actions menées par son pays pour renforcer la protection et la promotion des droits des femmes, des enfants et des adolescents et mettre en œuvre des programmes sociaux pour répondre aux besoins des plus défavorisés dans le contexte de la crise.  Pour répondre à la nécessité d’apporter des réponses économiques et sociales structurelles à grande échelle, son pays a lancé le plan de relance économique « Ñapu’ã Paraguay » (Relevons le Paraguay), qui comprend un ensemble de mesures dans des domaines stratégiques: protection sociale, investissement public pour l’emploi et crédit pour le développement.  À cet égard, il a estimé que les institutions financières multilatérales devraient s’attaquer aux vulnérabilités des pays et appuyer leurs stratégies de relance économique.  Il s’agit également, a-t-il poursuivi, d’assurer la chaîne d’approvisionnement, de renforcer les mesures de facilitation du commerce extérieur et de l’accès à un crédit à visage plus humain.

M. MATTHEW JOHN DAVID HANCOCK, Secrétaire d’État à la santé et aux affaires sociales du Royaume-Uni, a constaté que le coronavirus se joue des frontières.  « Il nous prend pour cible en tant qu’êtres humains et cette humanité commune doit nous rassembler », a-t-il souligné.  Dans la lutte contre la COVID-19, le Royaume-Uni a appuyé la mobilisation mondiale, augmentant notamment de 30% sa contribution à l’OMS.  Le Secrétaire d’État, saluant les mesures prises par le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus pour renforcer l’efficacité de son agence, a indiqué avoir levé de près de 9 milliards de dollars, en juin dernier, pour contribuer à l’immunisation contre la pandémie.  Sur le plan intérieur, le pays a lancé son essai clinique pour le relèvement, ce qui a permis d’identifier des traitements et de sauver de nombreuses vies, a poursuivi le Secrétaire d’État.  Il a ajouté que la présidence du G7, l’an prochain, sera l’occasion pour le Royaume-Uni de soumettre une nouvelle approche en matière de sécurité sanitaire basée sur un plan en cinq points destiné à prévenir toute nouvelle pandémie.  Ce plan visera notamment à augmenter la recherche-développement dans les vaccins, à renforcer l’action sur les données, à poursuivre le travail sur les résistances antimicrobiennes et à protéger les chaînes d’approvisionnement en levant les contrôles à l’exportation.  Enfin, évoquant l’enjeu mondial que constitue la mise en place d’un vaccin sûr et efficace contre la COVID-19, M. Hancock a réitéré l’engagement de son gouvernement en faveur d’un accès pour tous.  Le vaccin développé par l’Université d’Oxford et la société AstraZeneca coûtera seulement 4 dollars et pourra être stocké à des températures de réfrigérateur, a-t-il précisé, estimant que cet élan permet d’espérer une vaccination mondiale. 

M. GINÉS GONZÁLEZ GARCÍA, Ministre de la santé de l’Argentine, a déclaré que la pandémie constitue une occasion unique de réaffirmer les valeurs de solidarité dans les politiques de relance de l’économie.  Le Ministre a décrit les mesures de protection des personnes et groupes les plus vulnérables et les efforts de la première heure déployés dans son pays pour renforcer le système de santé, doubler la production de respirateurs mécaniques, reconvertir une partie de l’industrie textile dans la production d’équipements de protection, bâtir 12 hôpitaux préfabriqués en un temps record et créer un fonds national d’équité qui assure la couverture intégrale de la population.  Il a aussi mentionné l’Unité Coronavirus qui a présenté des innovations technologiques en matière de tests.  L’Argentine participe aux recherches « Solidarity I et III » de l’OMS pour les vaccins et traitements, au dispositif visant à accélérer l’accès aux outils de lutte contre ‎la COVID-19 (Accélérateur ACT) et au Groupement d’accès aux technologies contre la COVID-19.  Le pays a, ainsi déjà procédé à l’achat anticipé de 9 millions de doses de vaccins suffisants pour 10% de la population argentine, et mène la phase d’essais cliniques de trois vaccins de Pfizer, SInofarm et Janssen, et collaborera avec le Mexique pour la production de 150 à 250 millions de doses du vaccin de l’université d’Oxford destinées aux pays d’Amérique latine.  En outre, le Ministre a rappelé l’engagement du Président argentin, lors du G20, à participer au comblement du déficit de 4,5 milliards de dollars de l’Accélérateur ACT, afin de faciliter l’accès des pays les moins favorisés aux vaccins.

Mme SIGRID KAAG, Ministre du commerce étranger et de la coopération pour le développement des Pays-Bas, a appelé à s’engager sur un nouveau chemin.  Le relèvement doit pouvoir nous lancer sur une trajectoire menant à un monde plus transparent, plus résilient et plus équitable.  Il faut que le respect et l’appui à la coopération multilatérale guident nos pas.  Notant que l’OMS n’a ni les moyens ni le mandat de répondre aux attentes immenses qui sont placées sur elle, la Ministre a appelé à trouver des solutions structurelles.  Il faut également un meilleur mécanisme de contrôle afin de mieux détecter les prémices de nouvelles flambées.  Pour finir, elle a engagé tous les pays à participer à l’Accélérateur ACT.

M. DAVID ZALKALIANI, Ministre des affaires étrangères de Géorgie, a déclaré que son pays, comme il l’a déjà fait « en 30 siècles d’histoire marqués par les guerres et les turbulences », va surmonter, grâce à son unité, le défi inédit de la COVID-19 et poursuivre ses efforts en vue d’un développement inclusif et durable.  Le Ministre a félicité le personnel de santé et le Bureau régional OMS de l’Europe pour leur aide face à la pandémie, et salué la coopération internationale sans précédent engagée pour la fabrication d’un vaccin, dont il espère qu’il sera équitablement distribué et universellement accessible.

Exhortant les Nations Unies à contribuer à cette coopération, M. Zalkaliani a vivement critiqué la Fédération de Russie qui, en occupant les régions d’Ossétie du Sud, nuit, selon lui, gravement à la sécurité et à la situation humanitaire des populations affectées par le conflit.  Ce pays poursuit également sa « propagande médiatique agressive » contre le Centre Richard Lugar de recherche en santé publique si crucial pour la riposte de la Géorgie au virus et empêche les résidents de la zone occupée de bénéficier de soins sur le territoire contrôlé par la Géorgie.  Le Ministre a ensuite indiqué que la Géorgie, dont l’économie connaissait une croissance de 5% avant la pandémie, se prépare déjà à une reprise qui requiert une aide internationale.

Mme SHIRLEY AYORKOR BOTCHWEY, Ministre des affaires étrangères et de l’intégration régionale du Ghana, a indiqué que, dans l’esprit du multilatéralisme nécessaire face à la COVID-19, le Ghana s’était joint à cinq autres pays pour rédiger une résolution sur la lutte contre la pandémie.  Le Ghana a également accepté d’accueillir le centre humanitaire régional des Nations Unies pour la COVID-19, qui est utilisé par l’OMS et le PAM pour assurer des services d’évacuation médicale et des opérations aériennes à l’appui de la réponse humanitaire mondiale des Nations Unies à la pandémie en Afrique de l’Ouest et centrale.  Sur le plan national, le Ghana a mis en place des politiques et procédures pour, entre autres, limiter et arrêter l’importation du virus, contenir la propagation nationale, fournir des soins adéquats aux malades, renforcer la gouvernance et la coordination de la riposte à la COVID-19, limiter l’impact du virus sur la vie sociale et économique, et étendre les capacités nationales, a précisé la Ministre.  À ce jour, le pays a enregistré un total de 51 667 cas positifs dont 323 décès, le nombre de cas actifs étant estimé à 797.  La Ministre a également fait état des mesures prises pour contenir l’impact sur le plan socioéconomique, dont l’accès gratuit à l’eau pour tous les ménages jusqu’à fin décembre 2020, la prise en charge de 50% des factures d’électricité par le Gouvernement, des incitations financières pour motiver les agents de santé de première ligne ainsi qu’un programme de réduction du coronavirus et de revitalisation des entreprises (CARES).  Avant de conclure, la Ministre a exhorté les institutions financières et de développement internationales à soutenir les interventions des gouvernements dans la lutte contre les effets économiques négatifs de la pandémie.

Mme WILHELMINA JALLAH, Ministre de la santé du Libéria, a salué les efforts de l’ONU tendant à préserver des vies, protéger les sociétés et les personnes les plus vulnérables en leur sein, et aider le monde à s’en relever.  En se fondant sur l’expérience acquise dans la lutte contre le virus de l’Ebola au cours des six années écoulées, le Libéria a réussi à « éviter le pire » avec le nouveau coronavirus, a-t-elle souligné, ajoutant que le pays comptait, à ce jour, 1 637 cas, dont 1 354 sont guéris et 83 décès, dont 13 seulement en milieu médical.  Elle a évoqué « une spirale de cas de viol » durant la pandémie qui a conduit à déclarer ce crime comme une urgence nationale, avec la nomination d’un procureur spécial pour le viol et la création d’un registre national de prédateurs sexuels et une équipe spéciale de sécurité sur la violence sexuelle et sexiste.  Le Libéria s’efforce également de répondre aux besoins des personnes handicapées, notamment par la mise sur pied d’un secrétariat chargé de cette question.  Le pays a dit avoir sollicité l’assistance internationale en vue du renforcement des capacités de prévention, d’identification et de riposte aux cas de COVID-19.  Il a anticipé que cette capacité d’assistance ciblera les travailleurs de la santé pour qu’ils soient mieux préparés à fournir l’aide nécessaire.  La Ministre a également fait état du plan de redressement économique qui privilégie les mesures et investissements à court terme dans des secteurs prioritaires comme l’agriculture et le tourisme.

M. GEOFFREY ONYEAMA, Ministre des affaires étrangères du Nigéria, a réaffirmé son engagement en faveur du multilatéralisme, en particulier pour endiguer la COVID-19 et lutter contre les effets négatifs de la pandémie sans discrimination.  Le Nigéria est d’avis que les moyens les plus efficaces pour lutter contre le virus sont la solidarité mondiale et la coopération.  À cet égard, le Ministre a salué le rôle de premier plan de l’OMS, avant de faire part de ses préoccupations par rapport au fait que les pays en développement risquent d’être laissés pour compte dans l’accès aux vaccins.  Pour de nombreux pays, la voie du relèvement post-COVID-19 sera difficile, a noté le Ministre.  Par conséquent, le Nigéria a demandé aux institutions financières internationales d’accorder des prêts concessionnels et un rééchelonnement de la dette des pays en développement.

Déclarations de clôture

M. JERRY MATTHEWS MATJILA, Président du Conseil de Sécurité, a déclaré que la pandémie avait ébranlé les bases de nos systèmes politiques économiques et sociaux et imposé d’énormes pressions aux systèmes de santé nationaux.  Il a rappelé qu’il n’y a pas de meilleur moyen de vaincre la pandémie que de renforcer nos capacités multilatérales face aux crises sanitaires mondiales.  Il a aussi réaffirmé le rôle essentiel de l’ONU pour la coordination de la riposte mondiale à la pandémie.  Déplorant ses conséquences pour la paix et la sécurité mondiales, le Président a souligné l’impact disproportionné de l’épidémie sur les femmes et les filles, les réfugiés et personnes déplacées, les personnes âgées et handicapées, confiant sa crainte de voir les progrès réalisés par les pays en transition ou sortis de conflits effacés par la pandémie.

Néanmoins, a-t-il déclaré, la COVID-19, défi pour la paix et la sécurité, apporte aussi une opportunité d’en finir avec les violences et les hostilités, comme le démontre la résolution 2532 (2020) adoptée en juillet dernier qui soutenait l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu général et plaçait les humains au cœur de la riposte à la COVID-19.  Si cet appel à l’arrêt des hostilités a été entendu, le Président du Conseil a regretté que certaines parties à des conflits n’aient pas saisi cette occasion.  La pandémie nous a rappelé à quel point nous sommes interconnectés, a-t-il dit, et nous devons continuer à coopérer pour que personne ne soit laissé pour compte.

M. VOLKAN BOZKIR, Président de l’Assemblée générale, a clos cette session extraordinaire consacrée à la COVID-19 en se félicitant du haut niveau de représentation au débat général, ce qui démontre, selon lui, l’engagement de tous les États Membres face au défi mondial de la pandémie.  En outre, a-t-il noté, les dialogues interactifs ont rappelé le grand nombre des parties prenantes qui œuvrent sans relâche à la lutte contre le virus.  Ils ont permis de prendre connaissance des travaux pionniers de la recherche et de membres de la société civile, qui ne représentent qu’une partie des efforts planétaires visant à protéger l’humanité et à reconstruire en mieux.  Pour M. Bozkir, la distribution prochaine d’un vaccin suscite l’espoir que, dans un avenir proche, chacun puisse être protégé de la COVID-19.  Pendant la prochaine session de l’Assemblée générale, a-t-il ajouté, nous poursuivrons ces efforts avec la volonté de ne faire aucun laissé-pour-compte.  2021 sera l’année de l’intensification des efforts, après une année 2020 qui a vu la société civile s’adapter à la menace.  C’est en restant forts ensemble que nous lutterons contre la COVID-19, a-t-il conclu. 

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