Assemblée générale: la procédure d’approbation tacite et le vote électronique, points d’achoppement du débat sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée
L’Assemblée générale peut-elle demeurer productive dans des circonstances exceptionnelles, comme la crise sanitaire actuelle. Peut-elle maintenir ses méthodes de travail dont sa procédure de vote? C’est ce dont les délégations ont discuté aujourd’hui, lors du débat annuel sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée.
Ce débat porte traditionnellement sur le rôle et l’autorité de l'Assemblée; ses méthodes de travail; la sélection et la nomination du Secrétaire général et des autres chefs exécutifs; et le renforcement de la mémoire institutionnelle du Bureau de son Président.
Mais cette soixante-quinzième session a été bouleversée par la pandémie de COVID-19, qui a presque interrompu les activités de l’Assemblée générale. Or « une organisation immobile ne peut maintenir sa pertinence », a prévenu le Président de l’Assemblée, M. Volkan Bozkir, qui a refusé l’idée que les délégations demeurent inactives « pendant que le monde tente de relever l’un des plus grands défis de notre génération ».
Les yeux se sont donc tournés vers le projet de résolution présenté par le Liechtenstein sur la « Procédure de prise de décision à l’Assemblée générale, lorsqu’il n’est pas possible de se réunir en présentiel »*. Mais le projet, qui consoliderait la procédure d’approbation tacite et instituerait le vote électronique, a conduit Cuba à présenter un projet d’amendement**, limitant cette nouvelle procédure aux décisions relatives aux budgets de l’ONU, à l’élargissement des mandats et au changement de calendrier des réunions. Jugeant sans doute ce projet d’amendement insuffisant, la Fédération de Russie a déposé une motion d’ordre, proposant de soumettre d’abord le projet de résolution du Liechtenstein à l’examen de la Sixième Commission chargée des questions juridiques. Mise aux voix, la motion a été rejetée par 85 voix contre, 33 voix pour et 35 abstentions.
En tant qu’organe intergouvernemental le plus important, l’Assemblée doit être « opérationnelle » à tous moments, même en temps de crise, a insisté le Costa Rica, au nom de 25 États membres du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT) dont fait partie le Liechtenstein. L’Assemblée, a-t-il ajouté, doit se préparer à l’idée que d’autres crises rendront impossibles les réunions en présentiel. La possibilité de voter par voie électronique est donc un élément « indispensable » puisqu’elle garantit à tous les États Membres l’exercice de leurs droits, au titre de la Charte et du règlement intérieur, « et ce, à tout moment ».
L’absence de consensus sur la procédure de vote équivaut à donner à tous les États Membres « un droit de veto » et à condamner l’Assemblée à la paralysie, a opiné le Qatar. L’Assemblée générale doit « vivre avec son temps », a ajouté l’Ukraine, avant que l’Inde ne pose tout de même la question de la sécurisation des plateformes virtuelles.
Que se passerait-il, s’est demandé la Fédération de Russie, si le système de vote faisait l’objet « d’une ingérence extérieure », si les États choisissaient de donner leurs voix à « des acteurs extérieurs non autorisés », ou si la connexion Internet sautait au moment du vote? Le Liechtenstein s’est voulu rassurant: le projet de résolution prend dûment en compte des capacités technologiques limitées des « petits » États et donne un mandat clair au Secrétariat de l’ONU pour les aider.
Entre le mois de mars et le mois de septembre, l’Assemblée générale a adopté « plusieurs documents importants », comme l’a rappelé l’Ukraine, par la procédure d’approbation tacite selon laquelle, si aucune opposition n’est faite dans les 72 heures, un projet de résolution ou de décision est considéré comme adopté. Mais rien n’était prévu pour le vote, une lacune que le projet de résolution présenté par le Liechtenstein tente de combler.
Mais cela veut dire, s’est indignée la Fédération de Russie, qu’une seule délégation peut déclencher un vote électronique sur n’importe quel point à l’ordre du jour. Il est temps, a martelé le Liechtenstein que l’Assemblée fasse comme le Conseil de sécurité et se dote d’une nouvelle procédure de vote. Oui mais le Conseil de sécurité l’a fait par consensus, a fait observer la Fédération de Russie. Laissez-nous le temps, a-t-elle donc lancé au Président de l’Assemblée générale, de nous mettre d’accord sur une question aussi importante, celle de la faculté de l’Assemblée de prendre des décisions lorsqu’il n’est pas possible de se réunir en présentiel.
REVITALISATION DES TRAVAUX DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Déclaration liminaire
M. VOLKAN BOZKIR (Turquie), Président de l’Assemblée générale, a rappelé aux délégués que l’Assemblée, en tant qu’organe le plus représentatif des Nations Unies, a un pouvoir de convocation sans égal. « C’est ici que tous les États Membres peuvent discuter des questions et des solutions qui dépassent les frontières nationales. » Jugeant le renforcement de l’Assemblée générale « essentiel » pour améliorer l’efficacité des Nations Unies et que le processus de revitalisation a effectivement renforcé l’Assemblée, M. Bozkir a encouragé les délégations à identifier et à mettre des pratiques pour augmenter l’efficacité car « une organisation immobile ne peut maintenir sa pertinence ».
M. Bozkir a dit attendre avec impatience le rapport du Secrétaire général sur l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les travaux de l’Assemblée générale et a voulu que l’on réfléchisse aux mesures prises pour s’adapter aux problèmes inattendus découlant de la pandémie. Les méthodes de travail doivent être suffisamment solides pour que l’on puisse poursuivre notre tâche, a-t-il fait observer, refusant l’idée que l’Assemblée générale reste inactive « pendant que le monde tente de relever l’un des plus grands défis de la génération ».
Les consultations intergouvernementales sur l’alignement des ordres du jour de l’Assemblée générale, du Conseil économique et social (ECOSOC) et des organes subsidiaires sont une occasion cruciale d’aller de l’avant. Le Président a plaidé pour « une vision globale et holistique des ordres du jour ».
Présentation des projets de résolution et d’amendement sur la procédure de prise de décision de l’Assemblée générale lorsqu’il n’est pas possible de se réunir en présentiel (A/75/L.7/Rev.1) et (A/75/L.15)
Présentant le projet de résolution, M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a prévenu qu’après une année difficile, le moment est venu de se préparer à des moments plus difficiles encore. Il a pointé du doigt le manque de préparation de l’Assemblée pendant le confinement, ce qui l’a rendue moins productive et l’a même plongée dans la paralysie et l’impasse puisqu’elle a été incapable d’adapter son règlement intérieur. La résolution omnibus sur la pandémie de COVID-19, a rappelé le représentant, n’a pu être adoptée qu’après le retour des réunions en présentiel. Reproduire une telle erreur serait « impardonnable », a-t-il martelé. Nous voulons travailler en personne mais nous devons aussi nous préparer au pire, a-t-il répété. Le Conseil de sécurité s’est doté, à juste titre, d’une nouvelle procédure de vote et il est temps que l’Assemblée générale fasse de même, a estimé le représentant.
Il a souligné que la procédure proposée, dans le projet de résolution, se limite aux circonstances les plus exceptionnelles, lesquelles ne se sont d’ailleurs produites qu’une seule fois en 75 ans. La procédure n’aurait cours que si l’Assemblée générale ne peut pas se réunir pendant une période prolongée et elle laisse le choix aux auteurs des projets de résolution et de décision à refuser le vote électronique.
Le but, a expliqué le représentant, est de permettre à l’Assemblée générale d’être en mesure de réagir aux situations de crise et de prendre les mesures qui s’imposent. Personne ne veut voir tous les textes de l’Assemblée générale adoptés selon la procédure proposée mais il faut se ménager une certaine marge de manœuvre. Le projet de résolution prend d’ailleurs dûment compte des capacités technologiques limitées des « petits » États et donne un mandat clair au Secrétariat de l’ONU pour les aider. Certains États ne seront « jamais convaincus », s’est résigné le représentant, mais il est important que l’Assemblée générale se prépare à toute éventualité. Ne reportez pas la décision sur ce texte, a dit le représentant au Président de l’Assemblée générale.
Présentant le projet d’amendement, M. PEDRO LUIS PEDROSO CUESTA (Cuba) a dit ne voir aucune contradiction avec le projet de résolution. Nous voulons tout simplement, a expliqué le représentant, assurer la participation la plus large possible au travail de l’Assemblée et donc limiter la procédure proposée à des projets essentiels pour la vitalité et le bon fonctionnement de cet organe, à savoir les questions budgétaires, l’élargissement des mandats et les changements du calendrier de telle ou telle réunion. Insistant sur le caractère « exceptionnel » de la procédure proposée, ce que selon lui le projet de résolution ne fait pas suffisamment, le représentant a regretté le manque de souplesse des coauteurs dudit projet qui l’a obligé à présenter un amendement.
Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. MOHAMMED BESSEDIK (Algérie) a insisté sur le strict respect du règlement intérieur de l’Assemblée générale, y compris pendant la pandémie de COVID-19. Il a attiré l’attention sur la résolution 74/341 et les résolutions précédentes sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, avant de réclamer la préservation de la nature démocratique, inclusive et intergouvernementale de l’ONU et le respect des prérogatives que la Charte confère aux principaux organes des Nations Unies dont l’Assemblée générale.
Il faut, a convenu le représentant, rationaliser l’ordre du jour de l’Assemblée générale et tenir, par exemple, le strict minimum des réunions de haut niveau et des manifestations parallèles pendant le débat général pour en préserver la pertinence. Le représentant a souligné aussi la nécessité d’améliorer l’efficacité et l’efficience du Bureau du Président de l’Assemblée générale, un objectif particulièrement pertinent à la lumière de la pandémie de COVID-19. C’est bien le renforcement du rôle de ce Bureau qui a permis l’adaptation des méthodes de travail et la poursuite des fonctions essentielles pendant le confinement.
S’agissant du processus de sélection et de nomination du Secrétaire général, le délégué a appelé au respect du mandat de l’Assemblée générale conformément à l’Article 47 de la Charte et des résolutions 69/321 et 70/305. Les acquis en termes de transparence, de démocratie et d’inclusivité qui ont marqué l’élection de l’actuel Secrétaire général doivent s’appliquer à la sélection et la nomination du prochain Secrétaire général, a voulu le représentant.
Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a salué la résolution adoptée par consensus le 4 septembre dernier sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale qui, s’ajoutant aux précédentes, forme une base utile pour avancer vers une plus grande efficacité l’Organisation « pour les peuples que nous servons, dans les limites prévues par la Charte ». Organe le plus représentatif de l’Organisation, l’Assemblée est la plateforme idoine pour s’attaquer aux causes et conséquences des conflits et accompagner la réalisation des objectifs de développement durable. Le représentant a tout de même appelé à la simplification de l’ordre du jour et à l’élimination des chevauchements, en gardant à l’esprit la priorité que constitue pour l’ASEAN, la pleine mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. À n’en pas douter, a-t-il conclu, la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale articulée autour des quatre grandes thématiques, ne peut que faire évoluer l’ONU, tout en adaptant son mode de fonctionnement au monde post-COVID-19.
Au nom de 25 États membres du Groupe « Responsabilité, cohérence et transparence » (ACT), M. RODRIGO A. CARAZO (Costa Rica) a déclaré que son Groupe cherche à promouvoir plus d’efficacité et de transparence dans les travaux des Nations Unies, et le processus de revitalisation des travaux de l’Assemblée générale est un pas important en ce sens. Le représentant a donc salué la procédure de vote proposée aujourd’hui, arguant que la pandémie de COVID-19 a placé l’Assemblée générale devant un défi sans précédent, y compris pour la continuité de ses travaux. Or, en tant qu’organe intergouvernemental le plus important, l’Assemblée doit être « opérationnelle » à tous moments, même en temps de crise. Elle se doit de prendre toutes les mesures nécessaires pour mieux se préparer à l’idée que d’autres crises rendent impossibles les réunions en présentiel. La possibilité de voter par voie électronique est donc un élément « indispensable » de cette démarche puisqu’elle garantit à tous les États Membres l’exercice de leurs droits, au titre de la Charte et du règlement intérieur, « et ce, à tout moment ».
Le représentant a une nouvelle fois salué la résolution 74/303 sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, même si son Groupe aurait préféré davantage de « négociations de fond », ce qui aurait permis de faire fond sur les progrès acquis dans les précédentes résolutions. Pour autant, mon Groupe s’est rallié au consensus et il continuera à travailler en étroite coopération avec les autres États Membres. Nous chercherons, a indiqué le représentant, à renforcer le Groupe de travail spécial, en tant que plateforme unique de promotion de l’efficacité, de la cohérence et de l’inclusivité des Nations Unies.
Mon Groupe, a poursuivi le représentant, attache une grande importance à la transparence dans les processus de sélection et de nomination du Secrétaire général et des autres hauts fonctionnaires des Nations Unies. Il a répété que les résolutions 73/341, 69/321 et 70/305 sont les cadres pertinents de cette transparence.
Revenant au projet de résolution, le représentant a tenu à dire que, selon son entendement, la procédure proposée ne serait valable que lorsque l’Assemblée générale est dans l’incapacité de se réunir, et qu’elle ne se substitue en rien aux procédures normales. Ne pas voter, y compris par voie électronique, c’est donner le droit de veto à certains États et c’est tout simplement « inacceptable », a martelé le représentant.
M. SILVIO GONZATO, Chef de délégation adjoint de l’Union européenne (UE), a appelé à mieux coordonner les travaux de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC). Il s’est dit disposé à travailler sur la question et à trouver des moyens de revitaliser et « d’aligner » les travaux des deux organes, à la prochaine session.
« Tous les yeux sont rivés sur nous », a prévenu le représentant. Les gens se demandent si l’ONU peut avoir un impact direct et positif sur eux. Ils se demandent si l’Assemblée générale, seul organe intergouvernemental à caractère universel et doté d’un rôle « sans pareil », peut se réformer.
Lorsque les réunions en présentiel ne sont pas possibles, la capacité de se faire entendre est extrêmement restreinte, a souligné le représentant qui, à son tour, a voulu que l’Assemblée générale se préparer mieux à toute éventualité. Il a vu dans le projet de résolution un moyen d’y parvenir et a insisté sur l’importance qu’il y a à garder les portes ouvertes à la société civile.
Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (Groupe CANZ), M. MITCHELL FIFIELD (Australie) a estimé qu’améliorer l’efficacité et l’efficience de l’Assemblée générale, notamment en rationnalisant l’ordre du jour, est, dans le contexte de la pandémie, « plus pertinent que jamais ». Nous avons tous été, a-t-il souligné, contraints de faire preuve de « pragmatisme » pour travailler. Il a encouragé toutes les délégations à garder cela à l’esprit maintenant qu’elles s’attaquent à la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale. Le représentant a dit attendre avec intérêt la séance d’information du Secrétaire général sur les conséquences de la pandémie sur les travaux de l’Assemblée, laquelle « doit pouvoir continuer à travailler en temps de crise ». Le représentant a donc appuyé le projet de résolution sur la procédure de vote virtuelle, en cas de circonstances exceptionnelles.
Au nom d’un groupe de pays, M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est déclaré « en profond désaccord » avec le projet de résolution. Nous sommes en faveur de la continuité des travaux de l’Assemblée générale mais l’adoption d’un tel texte aurait des conséquences « contraires et négatives » même sur l’autorité et la légitimité des décisions de l’Assemblée générale, a-t-il affirmé. Une seule personne pourrait interrompre les réunions, suspendre le règlement intérieur et instaurer un vote électronique sur tout point à l’ordre du jour, a-t-il averti. En outre, le lancement de ces mesures extraordinaires reste « extrêmement flou ». S’opposer à ce texte, a souligné le représentant, ce n’est pas s’opposer à la poursuite de travaux de l’Assemblée générale. C’est refuser l’imposition de modalités qui, au contraire, devraient être acceptables par tous les États.
Que se passerait-il, s’est demandé le représentant, si le système de vote faisait l’objet « d’une ingérence extérieure », si les États choisissaient de donner leurs voix à « des acteurs extérieurs non autorisés » ou bien si la connexion Internet sautait au moment du vote, annihilant l’exercice du droit de vote? Le projet de résolution, a tranché le représentant, est tout simplement « surréaliste ». Il nous demande de passer nos journées, collés à nos écrans d’ordinateur alors que toutes les délégations ne sont pas toutes techniquement équipées de la même façon. Le représentant a fustigé le processus « non inclusif et dénué de transparence » des négociations qui ont abouti au projet de résolution. Ce processus a été « irrespectueux » à l’égard de certaines délégations. La date du vote a été présentée comme un ultimatum, si bien que nous nous demandons quelles sont véritablement les raisons de cet empressement, s’est agacé le représentant. L’approche visant à décider de la continuité des travaux de l’Assemblée générale, en temps de crise, doit être une approche sérieuse et allant dans le sens de l’intérêt légitime de tous les États lesquels devant être en mesure d’apporter leurs propres contributions.
Si les coauteurs du projet de résolution l’emportent, leur victoire sera celle d’une stratégie de communication qui aboutira à la division et non au consensus. Avec la Chine, a dit le représentant, nous nous proposons de tout faire pour que les réunions importantes aient lieu en présentiel, en temps de crise, réunions à l’issue desquelles il serait possible de voter par bulletin. Toutes les mesures que nous préconisons seraient prises avec l’assentiment des États, qui pourraient aussi présenter leurs idées. Laissez-nous, a dit le représentant au Président de l’Assemblée générale, le temps de nous mettre d’accord sur une question aussi importante, celle de la faculté de l’Assemblée de prendre des décisions lorsqu’il n’est pas possible de se réunir en présentiel.
Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a souligné l’importance de renforcer le rôle et les compétences de l’Assemblée générale, en réexaminant la procédure de prise de décisions qui doit reposer sur la transparence et la coordination. Rappelant que le Qatar fait régulièrement des contributions financières au Bureau de la présidence de l’Assemblée générale, la représentante a estimé que l’impact de la pandémie de COVID-19 nécessite des mesures nouvelles. Pour elle, l’absence de consensus à l’Assemblée générale sur la procédure de vote, pendant des circonstances exceptionnelles, équivaut à donner à tous les États Membres « un droit de veto » et donc à condamner l’Assemblée à la paralysie. Le projet de résolution présenté aujourd’hui nous aidera à réagir aux situations de crises, s’est réjouie la déléguée, encourageant les délégations à anticiper les moments difficiles.
M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) a appuyé le principe d’avancer dans le traitement de dossiers importants en temps de crise. Mais, il s’est dit préoccupé par le processus ayant présidé à l’élaboration du projet de résolution, qui revient sur le système de vote de l’Assemblée générale, au risque de saper l’autorité de cette dernière. À son tour, le représentant a demandé du temps au Président de l’Assemblée pour poursuivre les discussions. Nous faisons plus que dire « oui, non ou abstention » devant un texte. Nous nous positionnons en personne sur des décisions importantes et adoptées par un consensus qui assure depuis toujours la légitimé de l’Organisation, a dit le représentant
M. BILAL MAHMOOD CHAUDHARY (Pakistan) a estimé que le travail de l’Assemblée générale représente la volonté des peuples, et qu’il faut en renforcer l’efficacité. Le rôle de l’Assemblée est large et a une vaste portée importante, a-t-il rappelé, et ses délibérations sont principalement politiques. Une Assemblée générale revigorée rendrait les Nations Unies plus effectives, ce qui est crucial au moment où la Décennie d’action vient d’être lancée. C’est pourquoi, a estimé le représentant, il faut se concentrer sur les mécanismes de mise en œuvre des résolutions.
Nous devons, a insisté le représentant, réaffirmer le rôle essentiel de l’Assemblée générale dans le processus de prise de décisions de l’ONU. C’est pourquoi ce rôle doit être renforcé s’agissant du financement et de la gestion administrative de l’Organisation. Le représentant a estimé que le Secrétaire général devrait consulter l’Assemblée avant de nommer les envoyés spéciaux ou les groupes de travail de haut niveau et que ladite Assemblée devrait avoir un droit de regard sur les décisions que prend le Conseil de sécurité, en vertu du Chapitre VII de la Charte. L’Assemblée, a-t-il ajouté, doit aussi se montrer plus déterminante dans la sélection et la nomination du Secrétaire général. La façon dont nous allons décider d’avancer sur ces points va modeler « l’avenir que nous voulons », a conclu le représentant.
M. AHMED NASIR (Maldives) a déclaré qu’afin de surmonter les plus grands obstacles à la réalisation de nos idéaux communs, y compris la lutte contre la pandémie de COVID-19 et les changements climatiques, l’Assemblée générale doit travailler sur la base de l’unité et non de la division. Les États Membres ont le devoir de veiller à ce que l’Assemblée générale puisse déployer tout son potentiel pour contribuer à la réalisation des objectifs partagés de paix et de prospérité. Le représentant a salué les progrès faits jusqu’ici autour des quatre thèmes de la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale. Il a soutenu les efforts visant à rationaliser les ordres du jour de l’Assemblée et de ses Commissions, grâce par exemple au regroupement et à la suppression de certains points. Le représentant a réitéré de n’adopter que tous les deux ou tous les trois ans certaines résolutions. À son tour, il a prôné la réduction du nombre des manifestations parallèles et des réunions « non obligatoires ».
M. ANDRES FERNANDO FIALLO KAROLYS (Équateur) a déclaré que les Nations Unies continueront de traverser des « moments difficiles », ce qui justifie l’adoption de « moyens sophistiqués » pour garantir leur fonctionnement. Nous appuyons donc « sans réserve » le projet de résolution, a dit le représentant, en ajoutant qu’il faut aussi se pencher sur le dédoublement de travaux au sein des grandes commission de l’Assemblée générale, afin de rationaliser le travail. On a beaucoup parlé et peu agi, a vertement lancé le représentant.
M. NAGARAJ NAIDU KAKANUR (Inde) a estimé que le soixante-quinzième anniversaire de l’ONU est le jalon indiqué pour avancer sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, principal organe délibératif de l’ONU devant, à ce titre, être pleinement respecté dans le fond et la forme. Malgré les difficultés techniques et juridiques, nous avons pu, tout au long de la crise sanitaire et sans réunion en présentiel, prendre des décisions importantes, s’agissant du budget et des élections, s’est réjoui le représentant. Le fait que les procédures mises en place, pendant la crise, ont permis d’adopter toute une série de résolutions sur différents points à l’ordre du jour, explique l’adhésion de mon pays au projet de résolution présenté aujourd’hui, a déclaré le représentant. Il a néanmoins estimé que certaines mesures proposées « mériteraient un examen plus approfondi ». Il a notamment attiré l’attention sur l’importance de la sécurisation des plateformes virtuelles de concertation et de prise de décisions évoquées dans le projet de résolution.
Selon M. OLEKSIY ILNYTSKYI (Ukraine), les restrictions dues à la COVID-19 pourraient contribuer à améliorer la coopération internationale et, une fois la crise passée, l’ONU ne devrait pas revenir à ses maux du passé. Les États Membres ont pris des mesures provisoires et leurs efforts conjoints ont permis à l’ONU de travailler pendant la pandémie. Mais, a prévenu le représentant, la situation demeure imprévisible et l’Assemblée générale ne doit perdre aucune occasion de réviser ses méthodes de travail. L’Assemblée, s’est-il expliqué, devrait utiliser plus efficacement les technologies de l’information et des communications (TIC).
Le représentant a salué la possibilité d’utiliser des discours préenregistrés lors des réunions, ce qui a permis de sauver des vies à New York et ailleurs. La procédure d’approbation tacite a permis d’adopter plusieurs documents importants, alors que la situation sanitaire se détériorait rapidement. Certes ces mesures provisoires ne sont pas prévues dans le règlement intérieur, mais, a dit le représentant, nous les avons approuvées car il était manifeste que les circonstances appelaient à « des mesures exceptionnelles ».
L’Assemblée générale doit vivre avec son temps et autoriser les délégations à voter par voie électronique, a plaidé le représentant, en ajoutant « si le vote n’est pas à bulletin secret ». S’agissant du rôle et de l’autorité de l’Assemblée, il s’est dit le témoin d’un « travail de sape », comme l’illustre la question des « territoires occupés ukrainiens ». L’Assemblée générale, a-t-il martelé, est tenue par la Charte d’examiner toutes les questions, y compris celles liées au maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a donc espéré que cette question importante pour l’Ukraine sera de nouveau examinée le plus tôt possible par l’Assemblée générale.
Mme AAHDE LAHMIRI (Maroc) a dit qu’une Assemblée générale revitalisée contribue à renforcer le multilatéralisme et a réitéré l’appui de sa délégation aux réformes lancées par le Secrétaire général depuis son élection. Pour ce qui est de la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, elle a invité les États Membres à préserver les acquis des sessions précédentes. Pour ce faire, a-t-elle déclaré, il faut mettre en œuvre les recommandations formulées et accroître la synergie et l’alignement de l’ordre du jour de l’Assemblée générale avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030. La représentante a également mis l’accent sur l’importance de la parité entre les sexes à l’ONU et a salué le processus transparent et inclusif de la sélection du Secrétaire général. Elle a dit, en conclusion, soutenir le projet de résolution présenté aujourd’hui.
M. ANDREAS D. MAVROYIANNIS (Chypre) s’est dit fermement convaincu que les principaux organes des Nations Unies doivent être en mesure de s’acquitter pleinement de leur mandat et, ce, sans interruption, quelles que soient les circonstances et sans restreindre ni la portée de leur travail ni les droits de leurs membres. Mon expérience en tant que Président de la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires m’a appris, a confié le représentant, que l’Organisation peut se retrouver à tout moment dans une position difficile, sans mécanisme de prise de décisions. Or, il est inconcevable de « fermer » cette organisation.
Le représentant a déploré qu’alors que le monde attend qu’elle apporte des solutions à une crise mondiale comme la COVID-19, l’Organisation a été en quasi-paralysée. « Cette organisation, c’est nous tous et nous pouvons faire mieux », a-t-elle plaidé. Nous ne voulons pas appliquer la procédure proposée, mais nous n’hésitons pas non plus à nous attaquer à un problème lorsqu’il apparaît. Le représentant a tout simplement refusé d’envisager l’idée que les États Membres ne puissent exercer leur droit de vote à cause d’une crise.
La procédure proposée, a-t-il estimé, s’apparente à une méthode de vote à distance respectueuse des droits des États Membres, conformément à la Charte et au règlement intérieur. Le projet de résolution est le résultat d’un compromis qui ne devrait être jugé qu’en fonction de l’intérêt général de sauvegarder la crédibilité et l’intégrité de l’Assemblée générale, a conclu le représentant.
M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a souligné qu’il a eu l’honneur de guider les négociations relatives à la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale au cours des deux dernières années, et qu’il est toujours Coprésident du Groupe de travail. Avec ma collègue d’El Salvador, nous continuerons de faire de notre mieux pour orienter les États Membres dans leurs efforts, a-t-il dit, appelant ces derniers à déployer des efforts conjoints pour atteindre les résultats escomptés. Le représentant a indiqué que la réflexion sur la rationalisation des méthodes de travail de l’Assemblée générale ou encore le mode de désignation du Secrétaire général a progressé au rythme. Toutefois, a-t-il nuancé, les résolutions pertinentes n’ont pas toujours été mises pleinement en œuvre. Nous devons combler le retard à ce niveau, avant d’élaborer de nouvelles mesures, en répétant chaque année les mêmes négociations sur le même sujet. Tenons compte, a encouragé le représentant, du rôle croissant des grandes commissions, qui nécessite un rapprochement accru entre leurs présidents et celui de l’Assemblée générale. Tirons les leçons de la conduite de nos travaux pendant la crise sanitaire pour aller de l’avant et rendre plus efficaces encore les décisions de l’Assemblée en temps de crise comme en temps normal, a enfin enjoint le représentant.
Mme RABAB FATIMA (Bangladesh) a appelé les délégations à s’adapter à la nouvelle réalité de la COVID-19. Puisque les circonstances « exceptionnelles » ne sont pas encore reléguées dans le passé, il faut faire preuve de « souplesse » face aux exigences actuelles. La représentante a par ailleurs estimé qu’il n’y a pas « d’autres choix » que de renforcer le Bureau de la présidence de l’Assemblée générale. Elle a aussi estimé que les avancées sur la sélection du Secrétaire général devraient être exigées pour d’autres procédures de sélection et de désignation. Elle a conclu en plaidant pour la rationalisation des ordres du jour et des méthodes de travail des grandes commissions, pour éviter les chevauchements. S’agissant en particulier de la plénière, elle a voulu que l’on renforce le « débat général » et que l’on renonce à la multiplication des manifestations parallèles.
Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a dit que la pandémie de COVID-19 a mis en exergue l’importance de la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale. Il serait « irresponsable », a-t-elle martelé, de ne pas tirer de leçons de ce qui s’est passé ces derniers mois et de ne pas adopter de nouvelles méthodes pour que l’Assemblée générale reste pertinente et puisse continuer de travailler. Il faut des méthodes différentes pour poursuivre le travail, a insisté la représentante, qui a souligné la nécessité d’un mécanisme de vote électronique lorsque la présence physique n’est pas possible.
M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a estimé que la décision qu’il faut prendre aujourd’hui n’est pas une simple décision de plus, il s’agit d’un document crucial permettant de veiller à ce que le rôle central de l’Assemblée générale soit préservé en toutes circonstances. Comme l’a montré la pandémie de COVID-19, en cas de crise, nous avons encore plus besoin des Nations Unies qu’en temps normal, et pour pouvoir agir il faut pouvoir voter, a-t-il expliqué.
Il y a deux mois, juste après le confinement des Nations Unies, l’Assemblée générale a adopté la résolution omnibus sur la riposte complète à la COVID-19. Il n’aurait pas été possible d’adopter ce document crucial si nous n’avions pas eu la possibilité de nous réunir en personne, a-t-il noté. D’une certaine façon, accorder le droit de veto aux 193 États ne peut que nuire à l’Assemblée générale et aux Nations Unies, alors que le monde en a désespérément besoin.
Le consensus sur la faculté de l’Assemblée de voter en toutes circonstances grandit, a-t-il déclaré. Le vote électronique n’est pas idéal mais il serait limité aux périodes rares et extraordinaires. Si ces circonstances sont si rares et si extraordinaires, espérons que nous n’aurons jamais à nous en servir, a-t-il dit. Et si nous ne trouvons pas une autre solution, nous aurons tout de même cette solution en attendant, a-t-il conclu.
Mme EGRISELDA ARACELY GONZALEZ LOPEZ (El Salvador) a déclaré que la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale doit aller de pair avec une meilleure cohérence et une meilleure synergie avec les travaux des autres organes des Nations Unies. La revitalisation doit viser à ce que l’Assemblée générale réponde, « à temps », aux préoccupations et aspirations des peuples. Pour y parvenir, il faut améliorer la participation à ses travaux des autres parties prenantes intéressées. S’agissant de la question du vote par voie électronique, la représentante a argué qu’il faut pouvoir utiliser les outils les plus modernes.
Dans une déclaration très brève, M. JAMES PAUL ROSCOE (Royaume-Uni) a estimé que l’heure est « venue » de prendre des décisions sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, dont il faut réduire le champ par une bonne rationalisation.
M. YAO SHAOJUN (Chine) a expliqué que face aux nouveaux défis à la sécurité et à la prospérité, qui s’entremêlent dans un contexte de remise en cause des processus multilatéraux en cours, l’Assemblée générale reste le principal organe de contrôle. Sa portée sans pareille intéresse l’ensemble des États Membres ayant à cœur de renforcer la crédibilité et l’efficacité de l’ONU. Cette dernière doit pourvoir mettre l’accent sur le développement socioéconomique de tous, en tirant parti de chacun de ses organes. Revenant sur le projet de résolution, le représentant a estimé que ce texte controversé « nous divise au lieu de nous rassembler en ce qu’il porte atteinte, techniquement et juridiquement, au système de vote équitable et à la conduite efficace et transparente des travaux de l’Assemblée générale ». Les coauteurs de ce projet de résolution, a-t-il encore estimé, n’ont rien moins que court-circuité l’examen de la Chine et de la Fédération de Russie mais aussi celui d’autres pays, « qui ont été purement et simplement ignorés ».
Le représentant a déploré une situation injuste à laquelle aboutit la présentation d’un texte dont le processus d’élaboration sape la solidarité entre États Membres et l’autorité de l’Assemblée générale, en exploitant le caractère exceptionnel de la crise sanitaire. Il s’est dit favorable à des discussions « approfondies » à la Sixième Commission chargée des questions juridiques sur le vote électronique. En attendant, il a demandé aux délégations de ne pas appuyer le projet de résolution.
M. E. COURTENAY RATTRAY (Jamaïque) a estimé qu’il est trop tôt pour exiger l’unanimité sur cette question. La recherche du consensus est le « pain quotidien » des diplomates. Voulant tout de même dissiper la suspicion de certaines délégations quant aux risques d’attaques cybernétiques contre le vote électronique, le représentant a dit que, depuis juin, la procédure de vote enregistré a bénéficié de mesures supplémentaires de sécurité tout comme la publication des textes électroniques ou « estatements ».
M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a souligné que tout doit être fait pour que l’Assemblée générale puisse assumer ses fonctions quelles que soient les circonstances. Nous apportons donc notre soutien total au projet de résolution, a souligné le représentant. Mais, a-t-il nuancé, c’est parce que la résolution revêt une telle portée que nous jugeons « indispensable » que la décision soit prise par consensus et non par mise aux voix. Pourquoi ne pas nous laisser un temps « raisonnable » pour poursuivre les négociations? a plaidé le représentant. Pourquoi mettre ce projet aux voix aujourd’hui? Pourquoi se dépêcher? Qu’est-ce que cela cache? Est-ce que d’ici à la fin du mois nous ne pourrons pas prendre une décision consensuelle sur ce sujet « capital »? Le représentant a insisté sur des consultations pour lever « quelques doutes », d’autant que ce projet a de grandes implications pour les États Membres.
En sa capacité nationale, M. MOHAMMED BESSEDIK (Algérie) a souligné que les projets de résolution liés à la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale ont toujours été proposés sur la base du consensus. Or, le projet actuel est en contradiction avec cette règle. Toutes les décisions portant sur la revitalisation ont été adoptées par consensus, tout comme les règles du Conseil de sécurité, a insisté le représentant. Sommes-nous prêts à déroger à cette règle? Car « à ma connaissance, on n’a jamais voté sur une résolution relative à la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale ».