Conseil de sécurité: multiplication des appels pour préserver le Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien
À quelques semaines du quatrième anniversaire du Plan d’action global commun, les appels se sont multipliés, aujourd’hui, au Conseil de sécurité, pour préserver cet accord sur le nucléaire iranien, entériné par la résolution 2231 (2015) et considéré par beaucoup comme un des outils les plus importants de non-prolifération et un instrument essentiel pour prévenir une escalade des tensions au Moyen-Orient. La décision des États-Unis de se retirer du Plan d’action a été une nouvelle fois décriée, de même que celle de l’Iran de renoncer à certains de ses engagements.
Nous sommes peut-être aujourd’hui à un tournant critique pour l’avenir du Plan d’action, a dit craindre l’Union européenne, qui a décrit le Plan d’action comme un accord nucléaire réalisant les objectifs fixés. Il n’y a aucune autre alternative « crédible et pacifique », a-t-elle asséné. Le Plan est le résultat de 12 années de diplomatie intense et de négociations techniques, a rappelé la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix. Mais après leur retrait, s’est inquiétée Mme Rosemary DiCarlo, les États-Unis ont en outre décidé de ne pas prévoir d’exceptions en ce qui concerne le commerce de pétrole avec l’Iran et de ne pas renouveler les dérogations aux fins de projets de non-prolifération nucléaire.
Par réaction, a-t-elle aussi regretté, l’Iran a décidé de ne plus respecter les restrictions imposées sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde si les autres participants ne tiennent pas compte de ses exigences dans les secteurs bancaire et pétrolier dans un délai de 60 jours. Cette décision, a argué l’Iran, est pleinement conforme aux paragraphes 26 et 36 du Plan d’action qui stipulent qu’en cas de réimposition de sanctions, nous avons le droit de mettre un terme, entièrement ou en partie, à nos obligations.
Les États-Unis, a-t-il accusé, nous demandent de mener des négociations sans condition préalable. Mais pour eux, cela veut dire se retirer d’un accord considéré comme un succès majeur du multilatéralisme, réimposer des sanctions, punir les États qui mettent en œuvre la résolution 2231, appliquer une politique de pression maximale, imposer sanctions sur sanctions, punir toute une nation, mener une guerre économique d’envergure, se livrer à du terrorisme économique et à l’aventurisme militaire, envoyer des drones dans l’espace aérien iranien, renforcer la présence militaire dans le golfe Persique, fomenter des plans pour diviser les pays et aviver les tensions pour vendre plus d’armes dans la région.
Nous n’allons pas, et ce Conseil ne devrait pas non plus, rester les bras ballants alors que l’Iran s’attaque à nos partenaires dans la région et aux navires commerciaux dans le Golfe, ont rétorqué les États-Unis. Les groupes soutenus par l’Iran parlent ouvertement de l’aide militaire qu’ils continuent de recevoir de Téhéran, et le coordonnateur de l’appui militaire aux terroristes et aux hommes de main se déplace librement, en violation de l’embargo sur les armes et de l’interdiction de voyager, ont-ils argué. Le défi que l’Iran lance au Conseil et son comportement « irresponsable » ne doivent pas être minimisés au nom d’un accord qui ne lui barre pas vraiment la route aux armes nucléaires.
La majorité des délégations a rappelé l’Iran à son obligation de respecter pleinement la résolution 2231. La Belgique, facilitatrice de la mise en œuvre de la résolution, a en effet évoqué les activités de l’Iran relatives aux missiles et aux lanceurs d’engins spatiaux, que certains États Membres décrivent comme des activités « en contradiction » avec l’annexe B de la résolution. Elle a aussi fait référence aux contre-arguments de l’Iran basés sur une différente interprétation du paragraphe 3 de la même annexe. D’autres informations, a-t-elle dit, mentionnent les transferts d’armes iraniennes dans la région, « une autre source de désaccord ».
Exprimant, comme d’autres, son attachement au Plan d’action tant que l’Iran respectera ses engagements, la France a prévenu que la disparition de cet accord marquerait un dangereux retour en arrière, « porteur d’incertitudes et potentiellement de lourdes conséquences pour la région, pour le régime de non-prolifération et pour notre sécurité collective ». La Fédération de Russie a également dit craindre « un point de non-retour », s’inquiétant du « double langage » et des signaux « très difficiles à interpréter, même pour un spécialiste de la cryptologie ». Elle a refusé l’idée que les accords internationaux soient pris en otage par la « cuisine interne » de certains pays et a dit comprendre la « grande déception » de l’Iran à qui l’on demande de respecter strictement le Plan d’action sans pouvoir en tirer les bénéfices. L’Iran, a-t-il plaidé, a le droit d’attendre des participants restants qu’ils lui démontrent l’intérêt qu’il y a à rester attaché au Plan.
Ceux qui sont restés fidèles au Plan d’action, a souligné l’Union européenne, savent qu’aux côtés de la mise en œuvre par l’Iran de ses engagements, la levée des sanctions permettant la normalisation du commerce et des relations économiques avec ce pays constitue une partie essentielle de l’arrangement. L’Union européenne a promis de faire tout pour que le peuple iranien tire les dividendes du Plan d’action. Elle a parlé de l’opérationnalisation prochaine de l’INSTEX, « Instrument in Support of Trade Exchanges », un véhicule qui conduira à des canaux financiers efficaces et qui permettra un commerce légitime avec l’Iran, conformément aux lois et règlementations européennes et internationales. Les États-Unis y ont vu une tentative de « contourner » les prescrits de l’annexe B de la résolution 2231.
NON-PROLIFÉRATION (S/2019/488, S/2019/492, S/2019/514)
Déclarations
Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a d’abord rappelé que le Plan d’action global commun sur la question nucléaire iranienne, approuvé par la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité, est le résultat de 12 années de diplomatie intense et de négociations techniques. Le Plan et la résolution ont été durement gagnés. Ils doivent être vus comme le succès du multilatéralisme, de la non-prolifération nucléaire, du dialogue et de la diplomatie. La Secrétaire générale adjointe a attiré l’attention sur le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) qui déclare que l’Iran continue à honorer ses engagements.
Dans le même temps, a-t-elle poursuivi, nous sommes préoccupés par les derniers développements. Les États-Unis ont décidé de ne pas prévoir d’exceptions, en ce qui concerne le commerce de pétrole avec l’Iran, et de ne pas renouveler les dérogations aux fins de projets de non-prolifération nucléaire dans le cadre du Plan d’action. Ces actes peuvent entraver la capacité de l’Iran d’appliquer certaines dispositions du Plan d’action, a prévenu la Secrétaire générale adjointe.
Il est tout aussi regrettable d’entendre l’Iran proclamer, le 8 mai 2019, son intention de ne plus respecter les restrictions imposées sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde, et qu’il s’affranchira des limites et des mesures de modernisation du réacteur à eau lourde d’Arak si les autres participants ne tiennent pas compte de ses exigences dans les secteurs bancaire et pétrolier dans un délai de 60 jours.
Il faut aussi regretter l’annonce, faite le 17 juin 2019, que l’Iran pourrait dépasser le 27 juin la limite de ses stocks d’uranium enrichi au titre du Plan. L’Iran doit continuer de mettre en œuvre tous ses engagements en dépit des défis considérables auxquels il est confronté, a encouragé la Secrétaire générale adjointe.
Elle a salué les initiatives des autres participants dont la pleine mise en œuvre doit être une priorité. Il est essentiel que le Plan d’action fonctionne, y compris qu’il génère des bénéfices économiques concrets pour le peuple iranien. Les États Membres et les autres acteurs pertinents devraient également travailler avec les participants au Plan d’action pour le préserver. Dans le même temps, l’Iran doit répondre aux préoccupations exprimées par les États Membres concernant ses activités relatives aux restrictions prévues dans l’annexe B de la résolution 2231.
Les derniers événements dans le Golfe rappellent que nous sommes à la croisée des chemins. Elle a appelé tous les États Membres à éviter les actions qui pourraient détériorer la situation. Elle a exhorté toutes les parties à dialoguer et recourir à la diplomatie pour rapprocher leurs points de vue, à désamorcer les tensions pour éviter les mauvais calculs et les accidents. « S’il est une chose que le monde ne peut s’offrir, c’est une confrontation majeure dans la région du Golfe », a dit la Secrétaire générale adjointe en paraphrasant le Chef de l’Organisation.
Pour ce qui est de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015), en particulier son annexe B, Mme DiCarlo a indiqué que sur les dispositions relatives au nucléaire, elle n’a pas reçu des nouvelles informations sur l’approvisionnement, le commerce ou le transfert vers l’Iran. La filière d’approvisionnement créée pour le transfert de matériels nucléaires vers l’Iran reste un important mécanisme de transparence. Tous les États et le secteur privé sont encouragés à la mettre pleinement en œuvre et à la soutenir. Le Secrétaire général a pris note de l’annonce du 3 mai par les États-Unis selon laquelle l’implication des États dans certaines activités prévues au paragraphe 2 de l’annexe B peut désormais être exposée à des sanctions.
Deuxièmement, concernant les dispositions sur les missiles balistiques, la France, l’Allemagne, l’Iran, Israël, la Fédération de Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont transmis leurs points de vue sur les tirs d’essai de missiles balistiques à moyenne portée, le 1er décembre 2018, les vols d’essai, entre décembre 2018 et février 2019, et le lancement de lanceurs spatiaux, entre janvier et février 2019. Les informations reçues reflètent des opinions divergentes sur la conformité de ces initiatives avec le paragraphe 3 de l’annexe B qui appelle l’Iran à n’entreprendre aucune activité relative aux missiles balistiques capables de porter des armes nucléaires, y compris les lancements utilisant la technologie des missiles balistiques.
Le rapport parle également de l’analyse des pièces retirées des missiles balistiques lancés en Arabie saoudite par les houthistes entre mars et juin 2018. Ces pièces ont été fabriquées entre 2000 et 2010, et d’autres ont été vendues aussi récemment qu’en 2012. Dans l’analyse, les dates de production et de vente sont incompatibles avec les missiles Scud dont on sait qu’ils se trouvaient dans les stocks yéménites avant le déclenchement du conflit actuel au début de 2015.
Troisièmement, s’agissant des dispositions sur les armes, le rapport donne des informations sur les personnes inculpées au Royaume-Uni pour avoir exporté des pièces d’avions de combat des États-Unis vers l’Iran par des entreprises localisées dans divers pays.
Le Secrétariat a aussi examiné un certain nombre d’armes et de matériels militaires trouvés au Yémen, dont un deuxième missile sol-air, des ailes d’un nouveau type de drone, et un nouveau type de navire de surface chargé d’explosifs. Le Secrétariat est certain que ces armes et matériels sont de fabrication iranienne. Mais il n’est pas en mesure d’affirmer qu’ils ont été exportés de l’Iran après le 16 janvier 2016.
Le rapport fait état aussi d’un discours du dirigeant du Hamas et d’une déclaration du porte-parole de la brigade Al-Qods, en mai, qui a mis en exergue le soutien de l’Iran au Hamas et au Jihad islamique à Gaza. Toute exportation iranienne d’armes après le 16 janvier 2016 est une violation de l’annexe B de la résolution 2231 (2015). Le rapport souligne également la participation d’entités iraniennes dans les expositions organisées à l’étranger sur les armes de défense.
Enfin, le rapport donne des informations supplémentaires sur les anciens et les nouveaux voyages qu’aurait effectué le général Qasem Soleimani. Il donne aussi des informations sur une personne et plusieurs entités figurant sur la liste de la résolution 2231 (2015) qui auraient violé les mesures d’interdiction de voyager et de gel des avoirs. Pour faciliter la mise en œuvre de ces mesures, les informations relatives aux personnes et entités de la liste doivent être mises à jour par le Conseil, a conclu la Secrétaire générale adjointe.
M. JOÃO PEDRO VALE DE ALMEIDA, de l’Union européenne, a parlé au nom de la Haute Représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, en sa qualité de Coordonnatrice de la Commission conjointe établie par le Plan d’action global commun. Nous ne sommes, a-t-il rappelé, qu’à quelques semaines du quatrième anniversaire de l’adoption « historique » du Plan d’action, élément phare de l’architecture mondiale de la non-prolifération nucléaire qui offre à la communauté internationale les garanties nécessaires sur le programme nucléaire iranien. Comme l’a confirmé l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), dans son quinzième rapport, l’Iran a continué d’honorer ses engagements. Il doit continuer à le faire, a prévenu le représentant.
Ceux qui sont restés fidèles au Plan d’action, a-t-il poursuivi, savent qu’aux côtés de la mise en œuvre par l’Iran de ses engagements, la levée des sanctions permettant la normalisation du commerce et des relations économiques avec ce pays constitue une partie essentielle de l’arrangement. L’Union européenne et ses 28 États membres regrettent profondément que les États-Unis se soient retirés du Plan d’action. Le fait qu’ils aient « réimposé » des sanctions unilatérales, qu’ils n’aient pas prorogé les dérogations sur la vente du pétrole et qu’ils n’aient pas renouvelé celles sur les projets liés à la non-prolifération a un impact « significatif » sur l’économique iranienne, a souligné le représentant.
La Haute Représentante, a-t-il dit, continuera à faire tout pour que le peuple iranien voit des résultats et tire les dividendes du Plan d’action. L’opérationnalisation de l’INSTEX, « Instrument in Support of Trade Exchanges », un véhicule qui conduira à des canaux financiers efficaces, avance. Elle permettra un commerce légitime avec l’Iran, conformément aux lois et règlementations européennes et internationales.
Mais dans le même temps, a poursuivi le représentant, l’Union européenne note avec préoccupation l’annonce que l’Iran a faite le 8 mai dernier. Nous l’avons dit, a rappelé le représentant: l’Union européenne n’accepte aucun ultimatum et elle évaluera le respect du Plan d’action à l’aune de ce que fera l’Iran par rapport à ses engagements liés au nucléaire et au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
Un certain nombre de projets sont mis en œuvre en appui à l’annexe II du Plan d’action sur la coopération nucléaire civile. Créé en vertu de l’annexe IV, le Groupe de travail sur l’approvisionnement demeure un instrument « unique » de non-prolifération, de transparence et d’établissement de la confiance. Nous reconnaissons, a insisté le représentant, les problèmes résultant du retrait des États-Unis et de la réimposition des sanctions. Toutefois, le Groupe de travail sur l’approvisionnement demeure un mécanisme du Conseil de sécurité et toute demande de transfert est approuvée par tous ses 15 membres.
En dehors du Plan d’action, l’Union européenne ne cesse d’appeler à l’apaisement et à la fin des initiatives militaires dans la région. Elle n’a d’ailleurs cessé d’exhorter l’Iran à s’abstenir de toute activité qui pourrait approfondir la méfiance comme les tests de missiles balistiques qui sont contraires à la résolution 2231 (2015). Grâce au Plan d’action, a martelé le représentant, l’Union européenne a pu avoir des discussions avec l’Iran sur les questions régionales. C’est grâce à ce Plan d’action que le dialogue et les autres canaux de communication ont pu être mis en place et fournir une plateforme « utile » pour les discussions.
Nous sommes peut-être aujourd’hui à un tournant critique pour l’avenir du Plan d’action, a dit craindre le représentant, décrivant le Plan comme un accord nucléaire qui fonctionne et qui réalise les objectifs fixés. Il n’y a aucune autre alternative « crédible et pacifique » et avec ses partenaires, l’Union européenne continuera à travailler sans relâche pour préserver le Plan d’action aussi longtemps que l’Iran honorera ses engagements.
M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), parlant en sa qualité de facilitateur de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015), a cité le rapport du Secrétaire général qui voit le Plan d’action global commun comme un achèvement majeur dans le domaine de la non-prolifération nucléaire, ainsi que dans le dialogue et la diplomatie. Rappelant avoir endossé le rôle de facilitateur depuis janvier, pour une durée de deux ans, il a assuré de son intention de soutenir et améliorer la mise en œuvre de la résolution au nom du Conseil de sécurité, en suivant les directives établies par son prédécesseur. Ce ne sera pas chose facile, a-t-il reconnu, en soulignant les difficultés que rencontre actuellement la mise en œuvre du Plan d’action global commun.
En présentant le septième rapport du facilitateur, tel qu’approuvé par le Conseil de sécurité, il a indiqué ne pas vouloir entrer dans les détails, qui sont très techniques, mais a présenté trois points.
Le premier a porté sur les deux réunions du Conseil tenues dans le format 2231, les 3 avril et 24 juin, la dernière ayant permis aux membres de discuter des recommandations figurant dans le septième rapport du Secrétaire général avant sa publication. En deuxième lieu, il a indiqué avoir tenu, en tant que facilitateur, des consultations bilatérales avec les États Membres et leurs représentants, y compris l’Iran, pour discuter de questions relatives à la mise en œuvre de la résolution 2231. Son troisième point a porté sur les deux derniers rapports de l’AIEA concernant la période février-mai 2019, le dernier assurant que, pour la quinzième fois, l’Iran tient ses engagements pris dans le Plan d’action global commun. À cette occasion, M. Pecsteen de Buytswerve a salué le rôle central -impartial, factuel et professionnel- joué par l’Agence dans la mise en œuvre du Plan.
Le facilitateur a ensuite abordé, « en toute impartialité », les points de désaccord, dans la perspective de trouver des solutions qui agréent les parties. Il a évoqué les différentes lettres envoyées dans le cadre du processus de la 2231. En ce qui concerne les activités de l’Iran relatives aux missiles et aux lanceurs d’engins spatiaux, il a noté les lettres envoyées par les États Membres qui décrivent des activités « en contradiction » avec l’annexe B. Il a aussi fait référence aux contre-arguments de l’Iran basés sur une différente interprétation du paragraphe 3 de la même annexe (interdiction à l’Iran de mener des « activités liées aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires »). Les divergences sur ce texte constituent un point litigieux récurrent, a-t-il observé. D’autres lettres mentionnent les transferts d’armes iraniennes qui auraient lieu dans la région, une autre source de désaccord.
Abordant par ailleurs le « recul » dans la mise en œuvre et le respect du Plan d’action global commun, le facilitateur a noté les inquiétudes exprimées après le renforcement des sanctions économiques imposées par les États-Unis depuis leur retrait du Plan, ainsi que, plus récemment, la fin de certaines exemptions pour des projets de non-prolifération nucléaire, ce qui affecte le respect de la résolution 2231. Il a aussi noté les préoccupations quant aux récentes annonces faites par l’Iran sur le non-respect de certains engagements. Une autre inquiétude exprimée par certains États Membres, et par la Commission conjointe, concerne l’impact des sanctions imposées à nouveau par les États-Unis sur les travaux du Groupe de travail sur l’approvisionnement et les éventuelles difficultés de mise en œuvre et sur ceux de la Commission conjointe. Or, M. Pecsteen de Buytswerve a fait remarquer que les procédures d’approvisionnement sont au cœur du mécanisme du Plan d’action global commun.
En conclusion, le facilitateur a regretté la détérioration du contexte actuel, qui nuit au respect de la résolution 2231 et au Plan d’action global commun. Celui-ci jouit d’un très large soutien de la part de la communauté internationale, a-t-il rappelé.
Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a confirmé l’attachement de son pays au Plan d’action, « la meilleure façon de prévenir l’apparition des armes nucléaires en Iran ». Ce plan, a-t-elle dit, est essentiel pour assurer notre sécurité. Elle a donc regretté une nouvelle fois la décision des États-Unis de s’en retirer et de réimposer des sanctions. Tant que l’Iran respectera pleinement le Plan, le Royaume-Uni fera tout son possible pour l’appuyer, a-t-elle indiqué, signalant que les derniers rapports de l’AIEA confirment que l’Iran respecte bien ses engagements. La représentante s’est toutefois inquiétée de la menace de l’Iran de cesser de respecter le Plan et de dépasser les limites imposées à ses stocks d’uranium enrichi. Elle a exhorté l’Iran à ne pas agir de la sorte.
Elle a également relevé que l’Iran « prétend » ne pas mettre de charges nucléaires sur les missiles. Or, ces missiles sont conçus pour cela, « ce qui signifie que l’intention est là ». Le Royaume-Uni, a-t-elle indiqué, procède à une évaluation de la situation dans le cadre du Régime de contrôle de la technologie des missiles (RCTM I). La représentante a aussi dénoncé les transferts d’armes effectués par l’Iran, en violation des résolutions du Conseil de sécurité, s’appuyant sur les faits relayés dans le rapport. La technologie des missiles employée par l’Iran est « déstabilisatrice » pour la région, a-t-elle insisté, ajoutant que « le comportement de l’Iran représente un danger grave pour la paix et la stabilité de la région ».
Au début de la semaine, lors des consultations du Conseil de sécurité, nous avons dit, a-t-elle rappelé, que nous sommes « presque certains » que ce sont bien les Gardiens de la révolution islamique qui ont mené, au mois de mai, les attaques contre des pétroliers et « presque convaincus » que ces Gardiens sont également à l’origine de l’attaque du 13 juin dans la mer d’Oman. La représentante a appelé au dialogue pour apaiser les tensions.
M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a constaté que quatre années après sa conclusion, le Plan d’action global commun est « plus que jamais » à la croisée des chemins, pointant notamment une « série d’évènements défavorables », à commencer par le retrait unilatéral d’un des acteurs clefs et la montée des tensions dans le golfe Persique. Voyant dans ce plan un cadre inclusif susceptible d’aider à tempérer les ambitions nucléaires militaires iraniennes, le représentant a estimé qu’il est nécessaire de conjuguer les efforts pour prévenir le délitement du consensus actuel autour du Plan d’action. Il a souhaité que les réponses aux insuffisances potentielles du Plan soient élaborées dans le cadre de la Commission conjointe.
Convaincu que le maintien de l’accord sur le nucléaire iranien est tributaire de l’engagement des parties signataires, M. Adom a exhorté les parties concernées à la retenue et à s’abstenir de tout acte hostile. Il a condamné les récentes attaques dans le détroit d’Ormuz et a appelé à une enquête « impartiale » afin d’en identifier les auteurs. Il a également fait savoir que la Côte d’Ivoire souhaite vivement que les autorités iraniennes renoncent à toute décision de se retirer du Plan d’action.
« Les défis qui nous mobilisent au Conseil sont plus nombreux et plus graves que jamais, et nos responsabilités sont immenses, sur les enjeux de la non-prolifération comme sur l’ensemble des dossiers régionaux dont nous avons à traiter », a déclaré d’emblée M. FRANÇOIS DELATTRE (France). Notre responsabilité est dans ce contexte d’être pleinement mobilisés pour trouver une issue aux crises susceptibles d’émerger, a-t-il poursuivi. C’est précisément cet engagement et cette mobilisation collective qui ont permis dès 2003, à l’initiative des E3, et avec le soutien du Conseil, de tracer le chemin vers des négociations avec l’Iran qui ont mené à l’adoption du Plan d’action global commun en 2015. Cet accord a été scellé par l’adoption de la résolution 2231, « une résolution portée par les cinq membres permanents de ce Conseil », reflet de leur unité sur les enjeux de la non-prolifération, a rappelé M. Delattre. La France, a-t-il dit, reste résolument attachée à la préservation de ce cadre. Elle continuera activement ses efforts pour mettre en œuvre ses obligations au titre du Plan d’action global commun, avec ses partenaires de l’Union européenne, tant que l’Iran respectera ses engagements nucléaires.
Le Plan d’action global commun, a poursuivi le représentant, est un instrument de non-prolifération « indispensable » et « une pierre angulaire » pour la stabilité au Moyen-Orient. Il a appelé chacun à s’abstenir d’annonces et de mesures susceptibles de l’affaiblir et de précipiter une escalade des tensions dans la région. Pour la France, le retrait des États-Unis de l’accord l’an dernier, et les sanctions adoptées depuis par eux, ont ouvert une phase d’incertitude très préoccupante. La France est également préoccupée par les récentes annonces iraniennes quant au non-respect des dispositions du Plan d’action. Notre position reste claire, a martelé le représentant: l’Iran doit impérativement continuer à mettre en œuvre pleinement ses obligations nucléaires. Au-delà des annonces, l’Iran doit s’abstenir de toute mesure qui le placerait en violation de ses engagements. Le représentant a souligné que le Plan d’action résulte d’un équilibre « fragile ». Toute cessation, même partielle, des engagements iraniens aurait des conséquences en termes de risque de prolifération nucléaire et déstabiliserait plus encore la région.
Le représentant a également fait part de ses préoccupations par rapport au non-respect continu par l’Iran des dispositions de la résolution 2231, notamment sur ses activités balistiques et sur les transferts d’armes diverses vers d’autres acteurs au Moyen-Orient. Il est « indispensable » que l’Iran cesse ces activités et se conforme pleinement aux résolutions adoptées par ce Conseil, a exigé M. Delattre avant de lancer « un appel urgent au pragmatisme et à la lucidité ».
Face au risque d’escalade causé par les incidents dans le golfe d’Oman, il importe que l’ensemble des acteurs concernés fassent preuve de la plus grande retenue, privilégient la voie du dialogue et du règlement pacifique, et contribuent ainsi à une désescalade régionale. La France encourage et soutient à cet égard, tous les efforts de médiation entre les parties. Cette crise doit être aussi l’occasion de s’engager dans la recherche de mécanismes régionaux de stabilisation et de sécurité, alors que la disparition du Plan d’action global commun marquerait un dangereux retour en arrière, porteur d’incertitudes et potentiellement de lourdes conséquences pour la région, pour le régime de non-prolifération et pour notre sécurité collective, a mis en garde M. Delattre. Nous devons tous œuvrer pour éviter un tel scénario, dont nous paierions tous le prix, a averti le représentant, en appelant chacun « autour de cette table du Conseil » à se rallier à l’objectif de préserver l’accord nucléaire.
Nous sommes, a estimé, M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne), à un moment clef de la mise en œuvre du le Plan d’action global commun que nous devons tous préserver, tant que l’Iran respectera pleinement ses engagements. Regrettant la décision américaine de se retirer du Plan et de ne pas renouveler les dérogations aux fins de projets de non-prolifération nucléaire qui sont pourtant essentielles, le représentant s’est dit préoccupé de la réponse de l’Iran de ne plus respecter les restrictions sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde. L’Allemagne veut travailler avec les autres parties pour aider l’Iran à bénéficier des allègements prévus par l’accord, a assuré le représentant, en attirant l’attention sur l’opérationnalisation prochaine du système « INSTEX ».
Il a encouragé tous les États, y compris l’Iran, à respecter les dispositions de l’annexe B de la résolution 2231. Les questions qui ne sont pas liées au Plan d’action doivent être traitées à part, a-t-il estimé, avant d’exprimer sa préoccupation face aux transferts d’armes par l’Iran « qui ont des effets négatifs sur la sécurité européenne ». Inquiet de la précision croissante des missiles iraniens, il a exhorté l’Iran à cesser ses essais de tirs balistiques. Le représentant s’est particulièrement dit préoccupé par les transferts de la technologie des missiles balistiques au houthistes au Yémen et dans la bande de Gaza « qui sont une violation des résolutions 2231 (2015) et 2216 (2015) ». Il a insisté sur l’interdiction de tout transfert d’armes vers des acteurs non étatiques. « Ces activités sont troublantes », a-t-il déclaré à l’adresse de l’Iran.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a tout simplement estimé que le retrait des États-Unis du Plan d’action est « contraire » aux objectifs fixés. Le Plan, a-t-il rappelé à son tour, a été adopté à l’unanimité par le Conseil de sécurité et représente un « véritables succès » de la diplomatie multilatérale. Ce plan est un des plus importants outils de non-prolifération au monde. L’Iran, qui est le pays le plus contrôlé de la planète, respecte à la lettre toutes ses obligations, comme l’indique le rapport du Secrétaire général, a fait observer le représentant.
Il a refusé l’idée que les accords internationaux soient pris en otage par la « cuisine interne » de certains pays. Les États-Unis sont devenus « un pays nuisible » qui tente de punir tous ceux qui cherchent à mettre en œuvre les dispositions du Plan. Nous exhortons l’Iran à rester attaché à ses engagements envers la communauté internationale, a conseillé le représentant qui s’est inquiété du « double langage » et des signaux « très difficiles à interpréter, même pour un spécialiste de la cryptologie ». Le représentant a dit craindre « un point de non-retour ».
Il faut dépasser les intérêts égoïstes, a-t-il encouragé, et veiller au respect du Plan. Faire monter les enchères et multiplier les provocations ne sert à rien. On ne peut pas régler tous les problèmes par les sanctions militaires et économiques, a-t-il estimé. Le représentant a dit comprendre la « grande déception » de l’Iran à qui l’on demande de respecter strictement le Plan d’action sans pouvoir en tirer les bénéfices. L’Iran, a-t-il plaidé, a le droit d’attendre des participants restants qu’ils lui démontrent l’intérêt qu’il y a à rester attaché au Plan.
Quant aux armes et matériel connexe, retrouvés au Yémen, qui seraient de fabrication iranienne, le représentant russe a insisté sur le « problème de la compétence » des inspecteurs. L’origine iranienne de ces armes n’a pas été prouvée, et sans certitude, pourquoi continuer à aborder cette question dans les rapports du Secrétaire général? s’est-il demandé. On attise la situation de manière artificielle dans le golfe Persique, a-t-il mis en garde, se disant peu convaincu des « preuves » de la culpabilité de l’Iran. Il a rappelé les événements qui ont précédé l’invasion de l’Iraq et a plaidé pour une architecture inclusive de sécurité impliquant tous les pays de la région. Il a appelé à des mesures de désescalade, arguant le compromis et les efforts collectifs coordonnés sont la seule voie à suivre.
M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a estimé que le Plan d’action global commun est la plus grande réalisation diplomatique dans le domaine de la non-prolifération nucléaire depuis la signature du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) en 1996. Il a dit partager l’avis du Secrétaire général qui indique, dans son rapport, que ces efforts diplomatiques sont une « réalisation durement gagnée » qui doit être préservée et servir d’inspiration. Le représentant a salué le fait que l’Iran ait respecté ses engagements, comme en témoigne le quinzième rapport de l’AIEA soumis au Conseil de sécurité le 31 mai dernier. Il a donc invité les autres parties au Plan d’action à respecter leurs engagements.
Le représentant a regretté à son tour la décision des États-Unis de se retirer de l’accord. L’élimination complète des armes nucléaires, a-t-il souligné, est la seule garantie qui vaille. Le représentant a rappelé que le désarmement nucléaire et la non-prolifération sont deux processus qui se renforcent mutuellement. Il a plaidé pour le droit inaliénable des parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. Fervent défenseur des zones exemptes d’armes nucléaires, l’Afrique du Sud, a-t-il dit, plaide pour que la création d’une zone au Moyen-Orient. Le représentant a salué la résolution 73/546 de l’Assemblée générale sur la convocation en 2019 d’une conférence chargée d’examiner la création d’une telle zone. Le représentant a conclu en exprimant sa préoccupation face à la montée des tensions dans le golfe Persique et de son impact sur la paix et la sécurité internationales.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déploré le retrait des États-Unis du Plan d’action et la décision de l’Iran de ne plus respecter les limites imposées sur les réserves d’uranium enrichi et d’eau lourde. Il a appelé au strict respect de toutes les restrictions prévues dans l’annexe B de la résolution 2231. Il a engagé les autorités iraniennes à ne mener aucune activité en lien avec les missiles balistiques et les a appelées à faire preuve de prudence et de modération. Le développement du programme de missiles balistiques pourrait être considéré comme « une provocation ou une escalade » et attiser les tensions dans une région particulièrement instable, a-t-il prévenu.
Selon l’AIEA, a indiqué Mme JOANNA WRONECKA (Pologne), l’Iran a honoré ses engagements en vertu du Plan d’action global commun. L’Agence, a-t-elle poursuivi, a confirmé l’absence d’activités nucléaires de l’Iran. Elle s’est dite tout de même préoccupée par l’annonce du pays de ne plus respecter les restrictions imposées sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde. Elle a appelé l’Iran à rester attaché au Plan d’action et à la résolution 2231. Elle a aussi appelé la communauté internationale à trouver une solution pacifique aux conflits régionaux car un conflit au Moyen-Orient pourrait avoir des conséquences dangereuses même au-delà de la région. Elle a appelé l’Iran à coopérer avec la communauté internationale pour désamorcer les tensions et à mettre un terme à ses activités balistiques. Au Moyen-Orient, les tensions et la méfiance ne sont pas tenables. L’Iran doit s’abstenir de toute rhétorique incendiaire.
Pour M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie), il ne fait aucun doute que tout le monde est d’accord pour dire que le Plan d’action a été un succès « historique » du multilatéralisme. Il a exprimé son attachement à la pleine mise en œuvre du Plan et à la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité. Il s’est félicité du respect par l’Iran de ses engagements, comme cela a du reste été confirmé dans les 15 rapports de l’AIEA. Il a regretté le fait que le retrait des États-Unis pourrait saper la mise en œuvre du Plan et s’est, dans le même temps, inquiété de la décision de l’Iran de réduire ses engagements en vertu du Plan. Le représentant a appelé tous les signataires du Plan à y rester attachés et recourir au dialogue pour régler les divergences sur l’interprétation du Plan et de la résolution 2231 (2015). Il a appelé l’Iran à tenir compte des préoccupations internationales pour préserver la stabilité de la région.
Les questions qui ne sont pas liées au Plan d’action et à la résolution devraient être examinées de manière distincte, a tout de même souligné le représentant, tout en reconnaissant que la situation qui prévaut dans la région influence d’une manière ou d’une autre la mise en œuvre du Plan et de la résolution. Il a appelé les parties à faire preuve de retenue et à s’abstenir d’actions qui pourraient envenimer la situation. L’objectif global, a-t-il rappelé, est d’assurer un usage pacifique de l’énergie nucléaire par l’Iran.
M. WU HAITAO (Chine) a indiqué que le Plan est d’une importance cruciale pour préserver la non-prolifération et la stabilité au Moyen-Orient. L’AIEA a indiqué 15 fois de suite que l’Iran respecte bien ses obligations. La Chine, a dit le représentant, espère que l’Iran continuera de le faire et que les autres parties prendront des mesures positives. Il a regretté le retrait des États-Unis et les sanctions unilatérales qu’ils imposent à l’Iran. Il a plaidé pour un commerce juste avec l’Iran et estimé que le rapport du Secrétaire général devrait aussi refléter les préoccupations « légitimes » de ce pays. À son tour, il s’est inquiété de l’escalade des tensions au Moyen-Orient et a appelé au calme et à la retenue. Il a prôné le dialogue pour dissiper les tensions et appelé les parties concernées à prendre des mesures concrètes pour préserver le Plan d’action.
Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a jugé le rapport du Secrétaire général « équilibré et complet » et souligné le respect par l’Iran des dispositions du Plan d’action et de la résolution 2231 (2015). À son tour, elle s’est dite préoccupée par l’impact du retrait des États-Unis et a prié l’Iran de continuer à honorer ses obligations. Le Plan d’action n’est qu’une partie de la résolution 2231, a rappelé la représentante, pour qui le non-respect de certaines dispositions de l’annexe B de ladite résolution suscite des inquiétudes. Elle a encouragé l’Iran à tenir compte de ces préoccupations, le mettant en garde contre sa décision de dépasser les limites relatives à l’uranium enrichi et à l’eau lourde. Elle a encouragé toutes les parties à créer les conditions nécessaires pour que le Plan d’action reste en vigueur.
Le septième rapport du Secrétaire général reflète le même « sentiment de préoccupation » que de nombreux États partagent depuis plusieurs semaines, a estimé M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis). Le rapport paraît alors que l’Iran continue de déstabiliser le Moyen-Orient non seulement en appuyant les groupes terroristes et ses hommes de main, mais aussi en s’attaquant désormais aux navires commerciaux. Les conclusions du rapport du Secrétaire général ajoutent une couche au tableau déjà troublant du comportement de l’Iran, a poursuivi le représentant. Le rapport, a-t-il précisé, détaille l’inspection sur les armes et le matériel connexe retrouvés au Yémen et dit qu’ils sont « clairement » de fabrication iranienne. L’enquête rejette l’excuse que l’Iran n’a cessé de répéter: cet arsenal était au Yémen bien avant l’adoption de la résolution 2231. « C’est manifestement faux », a martelé le représentant.
Les groupes appuyés par l’Iran parlent ouvertement de l’aide militaire qu’ils continuent de recevoir de Téhéran en violation de l’embargo sur les armes. Le rapport du Secrétaire général cite en effet le discours du chef du Hamas et les propos du porte-parole des brigades Al-Qods. Celui qui coordonne l’appui militaire de l’Iran, c’est le général Qasem Soleimani, et selon le rapport, il continue à voyager librement dans tout le Moyen-Orient malgré l’interdiction imposée par la résolution 2231. Il n’est pas le seul à voyager, s’est impatienté le représentant, dénonçant le « laxisme » dans la mise en œuvre de la résolution.
Il a ensuite attiré l’attention du Conseil sur les derniers exemples concrets de la manière dont l’Iran déstabilise la région: menaces contre les navires étrangers et l’espace aérien international, prolongation de la violence au Yémen et contribution à l’expansion des groupes terroristes et des hommes de main dans tout le Moyen-Orient. Ces informations, a-t-il noté, montrent bien que l’Iran continue à envoyer des armes dans toute la région, en violation flagrante des résolutions du Conseil. Le 8 mai, a dit à son tour le représentant, l’Iran a décidé de renoncer à certains de ses engagements nucléaires, une menace qui risque de compromettre la paix et la sécurité régionales et internationales. L’AIEA, a-t-il affirmé, a déjà indiqué que l’Iran a installé de nouvelles centrifugeuses sophistiquées dont le nombre est une violation des limites imposées.
Mais, s’est emporté le représentant, l’Iran continue de nier qu’il cachait et gardait des archives secrètes sur ses armes nucléaires. Si Israël ne les avait pas subtilisées, les scientifiques iraniens aurait pu s’en inspirer pour relancer un autre programme. Les actes de l’Iran sont profondément contreproductifs et ne font que l’isoler. Le défi que l’Iran lance au Conseil et son comportement irresponsable ne doivent pas être minimisés au nom d’un accord qui ne lui barre vraiment la route aux armes nucléaires.
L’Iran doit assumer ses responsabilités et attribuer ses problèmes économiques à sa mauvaise gestion, à sa corruption et à l’affectation de ses ressources à ses opérations militaires dans la région. C’est son comportement qui est la cause de son déclin économique, pas les États-Unis, a tranché le représentant, condamnant les efforts des autres gouvernements pour « contourner » l’annexe B de la résolution 2231. Y a-t-il quelqu’un ici qui croit sincèrement que l’Iran n’est pas derrière les transferts d’armes dans les zones de conflit dans la région? Nous l’avons dit clairement, a conclu le représentant: nous voulons dialoguer avec l’Iran pour négocier un accord qui servirait vraiment la paix et la sécurité internationales. Mais, a-t-il prévenu, nous n’allons pas, et ce Conseil ne devrait pas non plus, rester les bras ballants alors que l’Iran s’attaque à nos partenaires dans la région et aux navires commerciaux dans le Golfe. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour faire cesser le comportement « diabolique » de l’Iran, y compris par des mises à jour régulières du régime des sanctions.
Pour M. PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), le Plan d’action global commun est une « œuvre maitresse » du multilatéralisme et l’une des grandes réussites de la non-prolifération nucléaire. Rappelant qu’il garantit, depuis son entrée en vigueur il y a trois ans, le caractère exclusivement pacifique du programme iranien, ce qui a été à nouveau confirmé par l’AIEA pour la quinzième fois, M. Pecsteen de Buytswerve a estimé qu’au-delà d’être un accord nucléaire, ce plan est un outil de construction de la confiance.
Partageant les inquiétudes de ses partenaires européens quant aux activités balistiques iraniennes, il a appelé l’Iran à s’abstenir de ces activités, en particulier les lancements de missiles balistiques qui contreviennent à la résolution 2231. Préoccupé également par les activités iraniennes qui contribuent à l’instabilité régionale, y compris les transferts de missiles et d’armes aux acteurs étatiques et non étatiques, notamment aux houthistes au Yémen, il a demandé à l’Iran le respect de toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. L’Iran doit engager un dialogue sérieux sur ces préoccupations, notamment avec les autres acteurs de la région.
Revenant à l’accord nucléaire, M. Pecsteen de Buytswerve a regretté le retrait des États-Unis, la réimposition de sanctions unilatérales américaines et la levée des exemptions dans le domaine du nucléaire qui empêchent, non seulement l’Iran, mais les autres États Membres des Nations Unies -parties et non parties au Plan d’action– de mettre en œuvre leurs engagements au titre de la résolution 2231, agréée par tous les membres du Conseil et soutenue par la communauté internationale.
Cependant, tout en comprenant la difficile position économique et politique de l’Iran, la Belgique, a dit le représentant, tout comme ses partenaires européens, rejette l’approche du « less for less » et appelle l’Iran à respecter la résolution 2231 dans son intégralité, y compris les mesures restrictives qui figurent à l’annexe B.
En conclusion, M. Pecsteen de Buytswerve a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue. Démanteler un accord nucléaire qui fonctionne ne nous placerait pas en meilleure position pour discuter des questions régionales ou apporter une solution immédiate aux risques auxquels il répond, a-t-il mis en garde. « Il n’y a pas d’alternative crédible au Plan d’action et notre devoir est de le préserver », a-t-il tranché.
M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a appuyé la mise en œuvre du Plan d’action global commun et a salué la détermination des parties à le préserver. Cet accord a atteint les objectifs fixés en dépit du retrait des États-Unis, a-t-il affirmé, notant que tous les rapports de l’AIEA indiquent que l’Iran, « soumis au régime de contrôle le plus strict au monde », respecte ses engagements. Il s’est inquiété des allégations selon lesquelles l’Iran violerait certaines dispositions du paragraphe 3 de l’annexe B de la résolution 2231. Il a appelé l’Iran à s’abstenir de toute activité ou rhétorique déstabilisatrice, parlant de l’intention de ce dernier de ne plus respecter les limites imposées aux stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde. Le représentant a conclu en appelant les signataires du Plan d’action à poursuivre leur coopération et a salué l’engagement des Européens à poursuivre les relations économiques et commerciales avec l’Iran. L’échec du Plan d’action aurait un impact dévastateur, a-t-il souligné.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit que la paix et la sécurité internationales ne sont pas possibles tant que des armes nucléaires existent. Le représentant a apporté son appui au Plan d’action global commun et la résolution 2231 (2015) car nous sommes attachés à toutes les résolutions du Conseil de sécurité, surtout celles qui visent la sécurité et la paix au Moyen-Orient. Il a condamné les dernières attaques contre les navires pétroliers. Préoccupé par les activités dans les eaux internationales et par l’origine des missiles tirés contre l’Arabie saoudite, il a condamné ce type d’attaques qui mettent en péril la vie des civils. Il a rappelé les résolutions de la Ligue des États arabes demandant à l’Iran de mettre fin à ses activités qui menacent les pays voisins. Il a réaffirmé l’importance pour la Conseil de sécurité de faire un suivi de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015) « pour que l’Iran et les autres États respectent leurs obligations ».
M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a souligné que le Plan d’action global commun repose sur deux piliers: les engagements de l’Iran relatifs au nucléaire et les engagements des autres relatifs aux retombées économiques pour le peuple iranien. Il a souligné que les 15 rapports consécutifs de l’AIEA confirment que son pays a continué de respecter pleinement ses engagements. « Le premier pilier est donc entièrement respecté. »
Le deuxième pilier est composé de deux engagements complémentaires: la levée des sanctions et la normalisation des relations économiques et commerciales. Par la résolution 2231, le Conseil de sécurité avait levé l’ensemble des sanctions contre l’Iran et en vertu du Plan d’action, l’Union européenne et les États-Unis se sont engagés à s’abstenir de toute mesure conçue de manière intentionnelle pour avoir un effet négatif sur la normalisation des relations économiques et commerciales et de toute mesure pouvant saper le succès du Plan. Le Plan engage aussi les États-Unis à éviter toute ingérence dans les bénéfices tirés de la levée des sanctions.
Mais que s’est-il passé dans la pratique? Les États-Unis, a rappelé le représentant, se sont retirés du Plan et ont réimposé des sanctions. Ils continuent de menacer de manière éhontée de contraindre les États à violer la résolution 2231 sous risque de punitions.
C’est un comportement « irresponsable », sans précédent dans l’histoire du Conseil de sécurité, a tranché le représentant. Les États-Unis ne respectent pas leurs obligations découlant de la résolution 2231, ne permettent pas à l’Iran de mettre en œuvre certaines parties du Plan et empêchent d’autre États d’honorer leurs obligations découlant de la résolution.
Un an après le retrait des États-Unis, la seule réaction de l’Iran a été d’offrir de nouvelles chances aux parties restantes, notamment aux E3, pour compenser les conséquences de ce retrait, a affirmé le représentant. À cause de notre « politique de patience stratégique » pour préserver le Plan, nous avons payé le prix d’une guerre économique imposée par les États-Unis et de leur politique de pression maximale, à commencer par la tentative de réduire à zéro les exportations de pétrole et de perturber le libre-échange.
Pour protéger la sécurité et les intérêts nationaux et apporter un équilibre au Plan, l’Iran, a indiqué le représentant, a décidé, le 8 mai, de limiter la mise en œuvre de ses engagements concernant le niveau des réserves d’uranium enrichi et d’eau lourde. Cette décision, a-t-il ajouté, est pleinement conforme aux paragraphes 26 et 36 du Plan qui stipulent qu’en cas de réimposition de sanctions, l’Iran a le droit de mettre un terme, entièrement ou en partie, à ses obligations.
M. Takht Ravanchi a ajouté que si des mesures pratiques ne sont pas prises dans les 60 prochains jours par les autres participants au Plan, l’Iran sera contraint de suspendre ses engagements sur les limites de l’uranium enrichi et la modernisation du réacteur à eau lourde d’Arak. Il a appelé les E3 à prendre des mesures adéquates, sérieuses et pratiques pour préserver le Plan ou assumer, comme les États-Unis, la pleine responsabilité des conséquences éventuelles.
L’Iran, a-t-il poursuivi, est déterminé à faire front contre le terrorisme économique des États-Unis et la communauté internationale doit elle aussi savoir résister au harcèlement et au mépris des lois qu’affichent les États-Unis. Nous ne devons pas laisser les inventions, la désinformation et la manipulation des États-Unis dicter l’ordre du jour. Le représentant a pointé du doigt la « campagne de désinformation » sur le programme de missiles balistiques de l’Iran dont les engins, a-t-il insisté, sont uniquement conçus pour porter des ogives classiques car ils ne sont pas capables de transporter des armes nucléaires.
Il a aussi récusé l’affirmation des États-Unis selon laquelle les sanctions ne touchent pas la population. C’est tout le contraire, s’est-il indigné, avertissant que ce sont les plus vulnérables qui en souffrent le plus, à commencer par les personnes gravement malades qui nécessitent des médicaments et des équipements médicaux de l’étranger. Toutes les importations de médicaments sont bloquées, malgré les affirmations des États-Unis qui prétendent qu’il existe des exceptions. « Quelle hypocrisie! »
Les États-Unis « militarisent » les vivres et les médicaments, ce qui revient à punir collectivement toute une nation et à constituer un crime contre l’humanité. Les États-Unis, a-t-il encore accusé, nous demandent de répondre « à la diplomatie par la diplomatie » et de mener des négociations sans condition préalable. Mais pour eux, cela veut dire se retirer d’un accord considéré comme un succès majeur du multilatéralisme, réimposer des sanctions, punir les États qui mettent en œuvre la résolution 2231, appliquer une politique de pression maximale, imposer sanctions sur sanctions, punir toute une nation, mener une guerre économique d’envergure, se livrer à du terrorisme économique et à l’aventurisme militaire, envoyer des drones dans l’espace aérien de l’Iran, renforcer la présence militaire dans le golfe Persique, fomenter des plans pour diviser les pays et aviver les tensions pour vendre plus d’armes dans la région.
Tant que les sanctions « illégales » seront appliquées, a-t-il prévenu, nous ne pourrons pas croire à l’offre d’un dialogue « honnête et authentique ». Tout le monde sait, a dit M. Takht Ravanchi, que le drone abattu le 20 juin dernier survolait l’espace aérien iranien. Il a conseillé aux États-Unis d’accepter la responsabilité de cet acte « illégal », rejetant accusations fallacieuses et campagnes de désinformation. Leurs dires, a-t-il ajouté, n’ont même pas été confirmés par leurs alliés les plus proches dont l’un d’eux a même déclaré aujourd’hui ne pas avoir de preuves suffisantes, a-t-il fait observer. Les États-Unis, a-t-il conclu, doivent cesser « leur aventurisme » dans le golfe Persique.