Conseil de sécurité: la Somalie sur une « trajectoire positive », malgré la menace des Chabab et des tensions avec les États fédérés
Après un début d’année marqué par une crise sécuritaire et une crise politique, la Somalie est restée sur une « trajectoire positive », a, cet après-midi, déclaré au Conseil de sécurité le Représentant spécial par intérim du Secrétaire général, M. Raisedon Zenenga, en saluant les efforts de réforme du Gouvernement fédéral, malgré une résistance « inévitable » parmi les États fédérés et un différend régional.
« La dynamique positive qui règne dans la Corne de l’Afrique offre de grandes possibilités à la Somalie de réaliser son potentiel stratégique et économique. Cependant, la détérioration actuelle des relations entre la Somalie et le Kenya, résultant du conflit sur la délimitation de la frontière maritime, est préoccupante », a observé le haut fonctionnaire, venu présenter au Conseil de sécurité le dernier rapport en date du Secrétaire général sur l’exécution du mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) et du Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS).
M. Zenenga dirige ces deux organes par intérim depuis le 1er janvier, date à laquelle le Ministère somalien des affaires étrangères a informé le Représentant spécial, alors en fonctions, M. Nicholas Haysom, « qu’il n’était plus le bienvenu en Somalie », rappelle le rapport. Depuis, le Gouvernement fédéral et l’ONU ont publié une déclaration conjointe indiquant qu’ils avaient examiné des mesures concrètes devant permettre à la MANUSOM et au Gouvernement fédéral de collaborer plus étroitement, un réchauffement confirmé aujourd’hui par M. Zenenga.
Reste que l’environnement sécuritaire continue d’être perturbé par la menace asymétrique représentée par le mouvement des Chabab: « En mars et avril, une importante multiplication des attaques a été enregistrée à Mogadiscio, des incidents faisant intervenir des engins explosifs improvisés étant survenus presque tous les jours. Les attentats-suicides au véhicule piégé, les attaques aux engins explosifs improvisés télécommandés ou placés sous des véhicules, les attaques au mortier et les assassinats ciblés se sont poursuivis. »
Parallèlement à cette vague d’attentats, le Gouvernement fédéral de transition a poursuivi la réforme du secteur de la sécurité, avec l’enregistrement biométrique de tous les soldats de l’Armée nationale somalienne, qui s’est achevé le 3 mars. Les 16 000 soldats inscrits reçoivent désormais leurs salaires directement sur leurs comptes bancaires, ce qui ouvre la voie au « redimensionnement » de l’appareil militaire, a précisé le haut fonctionnaire.
Parallèlement, les États fédérés ont lancé des opérations militaires dans la région du Bas-Chébéli pour y promouvoir le plan de transition, déloger les Chabab de ses places fortes contiguës à Mogadiscio et mettre ainsi fin à la récente hausse des attaques dans la capitale. « Dans un développement sans précédent, les opérations militaires en cours, soutenues par la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), le BANUS et des partenaires internationaux ont catalysé la planification conjointe et la création systématique d’unités capables de l’Armée nationale somalienne. » Elles ont également démontré la valeur d’une approche globale de la sécurité en incorporant des éléments de stabilisation et de maintien de l’ordre dans les opérations militaires, s’est félicité le Représentant spécial.
Le Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Somalie et Chef de l’AMISOM, M. Francisco Caetano Jose Madeira, a confirmé aujourd’hui que les forces armées somaliennes, appuyées par cette Mission, étaient parvenues à déloger les Chabab de la ville de Sabiib, qui fut longtemps une plaque tournante pour le trafic d’armes utilisées pour commettre des attaques à Mogadiscio. De même, l’organisation d’opérations militaires par le Gouvernement fédéral contre les Chabab dans le Bas-Chébéli est à mettre au compte de la planification conjointe des interventions militaires et civiles, s’est-il félicité. « Une approche qui doit, à présent, être rendue pérenne pour que d’autres villes qui seront libérées ne retombent aux mains d’extrémistes. »
Il n’est pas possible de mettre en œuvre efficacement le plan de transition en ayant les pieds et les poings liés, « en raison de l’embargo sur les armes qui s’éternise », a dénoncé pour sa part le représentant somalien, regrettant les décisions prises depuis le Siège de l’ONU, qui entravent selon lui la capacité des forces de sécurité somaliennes à lutter contre le terrorisme des Chabab, au profit de ces derniers.
« La Somalie semble croire que le Conseil de sécurité lèvera éventuellement les sanctions malgré un manque d’engagement avec le Groupe d’experts chargé de surveiller leur mise en œuvre. Les États-Unis n’appuieront pas ce point de vue, qui ne résout en rien les problèmes que le régime de sanctions avait pour objet de résoudre et qui, en réalité, mine les actions du Conseil », a prévenu quant à lui le délégué des États-Unis.
Dans ce contexte sécuritaire tendu, la situation humanitaire en Somalie demeure une « des crises prolongées les plus longues au monde », selon la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires, Mme Ursula Mueller. Or, les indicateurs actuels font état d’une détérioration rapide de la situation en raison de la gravité de la sécheresse. À ce stade, toute précipitation serrait insuffisante à inverser son impact, a prévenu l’intervenante, en précisant que depuis le mois de février, l’insécurité alimentaire aigüe avait déjà augmenté de 10% et que d’ici le mois de juillet, « 5,4 millions de personnes ne sauront pas comment se procurer leur prochain repas ».
Le Représentant spécial par intérim s’est félicité par ailleurs de l’avancée prise par les préparatifs techniques en vue des élections au suffrage universel de 2020. Relevant que les projets de loi sur les partis politiques et sur les élections restent controversés auprès des États fédérés, M. Zenenga a considéré que leur adoption est absolument essentielle pour que la feuille de route politique reste sur la bonne voie.
LA SITUATION EN SOMALIE (S/2019/393)
Déclarations
M. RAISEDON ZENENGA, Représentant spécial par intérim du Secrétaire général pour la Somalie, a rappelé que la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) avait commencé l’année par une crise sécuritaire consécutive à un tir de mortier effectué contre les locaux de l’ONU le 1er janvier 2019, et une crise politique liée à l’expulsion du Représentant spécial Nicholas Haysom. « Ces deux incidents ont gravement perturbé l’engagement de la Mission auprès du Gouvernement fédéral de Somalie à mettre en œuvre son mandat, tout en élevant le risque sécuritaire pour le personnel de l’ONU, qui est profondément démoralisé », a-t-il dit. Si la MANUSOM a pris, avec le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie et l’Équipe de pays des Nations Unies, des mesures pour mieux sécuriser les locaux et espaces de travail de leurs personnels, reste qu’une solution durable dépend de la capacité à empêcher les Chabab de préparer et de lancer des attaques. Nous sommes aujourd’hui certainement dans une meilleure situation qu’en début d’année, y compris dans la relation que la Mission entretient avec le Gouvernement fédéral, a-t-il reconnu.
En dépit d’un environnement sécuritaire qui pose des défis, et des crises politiques récurrentes, ainsi que des contraintes en matière de capacité et de gestion des obstacles politiques, la Somalie est restée sur une trajectoire positive, a analysé M. Zenenga. Au cours de la période à l’examen, le pays a accompli des progrès considérables dans ses réformes économiques et du secteur de la sécurité. « Il y a eu aussi des progrès dans les domaines de la révision constitutionnelle et des préparatifs des élections au suffrage universel », a-t-il poursuivi. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont salué au printemps les progrès sur le plan économique. Le Gouvernement fédéral a décidé d’appliquer la même approche rigoureuse consistant à faire prévaloir la responsabilité et la transparence dans le secteur de la sécurité. « Ainsi, l’enregistrement biométrique de tous les soldats de l’Armée nationale somalienne s’est achevé le 3 mars. Les 16 000 soldats inscrits reçoivent désormais leurs salaires directement sur leurs comptes bancaires. Cela a éliminé les intermédiaires, réduit la consommation et garantit le paiement régulier des salaires aux militaires. Il ouvre également la voie au redimensionnement de l’Armée nationale », a précisé le haut fonctionnaire.
Parallèlement, les gouvernements fédéraux ont lancé des opérations militaires dans la région du Bas-Chébéli pour y promouvoir le plan de transition, déloger les Chabab de ses places fortes contiguës à Mogadiscio et mettre ainsi fin à la récente hausse des attaques des Chabab à Mogadiscio. « Dans un développement sans précédent, les opérations militaires en cours, soutenues par la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS)et des partenaires internationaux ont catalysé la planification conjointe et la création systématique d’unités capables, responsables, acceptables et bon marché de l’Armée nationale somalienne. Elles ont également démontré la valeur d’une approche globale de la sécurité en incorporant des éléments de stabilisation et de maintien de l’ordre dans les opérations militaires et relancé la mise en œuvre du plan de transition », s’est félicité le Représentant spécial.
Par ailleurs, les préparatifs techniques en vue des élections au suffrage universel de 2020 progressent. « Le processus d’identification des sites potentiels d’inscription des électeurs a débuté ce mois-ci. La Commission électorale nationale indépendante a ouvert des bureaux dans la plupart des États membres fédéraux. Les projets de loi sur les partis politiques et sur les élections ont été approuvés par le Cabinet fédéral et soumis au Parlement, a encore fait valoir le haut fonctionnaire. Cependant, a-t-il relevé, ils restent controversés avec les États membres fédéraux. L’adoption de ces projets de loi est absolument essentielle pour que la feuille de route politique reste sur la bonne voie, a rappelé M. Zenenga, en exhortant toutes les parties prenantes à œuvrer en vue de la conclusion d’un accord pouvant être approuvé au Parlement dans les prochains mois.
« Une révision technique de neuf des 15 chapitres de la Constitution fédérale provisoire a été entreprise. C’est une réalisation importante. Mais, en définitive, les progrès seront mesurés par rapport aux accords politiques conclus entre le Gouvernement fédéral et les dirigeants des États membres fédéraux sur des domaines clefs de la constitution, notamment le partage du pouvoir et des ressources », a analysé le Représentant spécial. Des progrès importants ont également été réalisés dans le domaine des droits de l’homme. À la suite des violences qui ont fait des victimes civiles lors des élections dans le sud-ouest de l’État de décembre dernier, le Gouvernement fédéral et les autorités du sud-ouest de l’État ont achevé leurs enquêtes sur les meurtres de civils, a poursuivi M. Zenenga.
La Somalie continue de faire face à des défis importants. Les efforts de réforme du Gouvernement fédéral se sont heurtés à une résistance inévitable. Les réformes économiques et du secteur de la sécurité, en particulier, impliquent le démantèlement d’une « économie de guerre en plein essor » depuis des décennies, a plaidé le Représentant spécial. Pour faire face aux « intérêts acquis », il faut non seulement la détermination dont le Gouvernement fédéral a fait preuve, mais également une approche inclusive visant à établir des relations avec toutes les parties prenantes afin de démontrer que les réformes apporteront des avantages à l’ensemble du pays. L’application intégrale et durable de la Somalie dépend du rétablissement de la coopération entre le Gouvernements fédéral et les États fédérés. Bien qu’il s’agisse d’un pas important vers la reprise du dialogue, la réunion consultative qui s’est tenue à Garoowe du 5 au 10 mai avec les dirigeants du Gouvernement fédéral n’a pas abouti à un accord sur les questions de fond et sur la date, le lieu et le format de la prochaine réunion.
« La dynamique positive qui règne dans la Corne de l’Afrique offre de grandes possibilités à la Somalie de réaliser son potentiel stratégique et économique. Cependant, la détérioration actuelle des relations entre la Somalie et le Kenya, résultant du conflit sur la frontière maritime, est préoccupante », a noté le Représentant spécial. « Cela a des conséquences sur les efforts de la Somalie en matière de renforcement de l’État et de consolidation de la paix. Le dialogue, non seulement entre le Kenya et la Somalie, mais également avec d’autres États membres de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), est essentiel pour réduire les tensions et résoudre les problèmes fondamentaux qui ont créé les tensions persistantes », a-t-il ajouté.
M. FRANCISCO CAETANO JOSE MADEIRA, Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Somalie et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), a fait état d’une évolution positive de la situation politique, citant notamment l’investiture, en janvier, du nouveau Président du Puntland, M. Said Abdullahi Mohamed Deni, et son appel au pardon et à la réconciliation. Il a appelé la communauté internationale à continuer d’encourager les efforts des parties prenantes à poursuivre la coopération. De plus, le 11 mars, le Premier Ministre, M. Hassan Ali Khayre, s’est rendu à Kismayo sur invitation du Président régional pour discuter de la question du consensus. Malgré les divergences d’opinion sur l’issue de cette réunion, elle n’en demeure pas moins un pas dans la bonne direction, a-t-il estimé. Il a aussi salué les efforts déployés lors de la réunion de Djibouti ainsi que le projet de législation électoral. Les parties ont renforcé leur interaction afin de parvenir à l’adoption finale de ce texte important au cours des prochains mois, s’est-il félicité.
De son côté, a poursuivi le Représentant spécial, la Commission électorale indépendante a progressé dans la cartographie de sites d’enregistrements des électeurs. En appui au processus, l’Union africaine (UA) prévoit des mesures pour l’établissement de la sécurité électronique, le règlement des différents et la formation des formateurs, entres autres.
M. Madeira a ensuite indiqué que les forces armées somaliennes, appuyées par la Mission, étaient parvenues à déloger les Chabab de la ville de Sabiib qui, a-t-il expliqué, a longtemps été une plaque tournante pour le trafic d’armes utilisées ensuite pour commettre des attaques à Mogadiscio. Cette plateforme leur a été retirée, s’est-il félicité, et 90% de la population qui avait fui est de retour. La situation dans le Bas-Chébéli est en train de changer la donne: un gouvernement en partenariat avec l’AMISOM et d’autres entités est en train de mettre en œuvre des mesures de sécurité. Pour M. Madeira, la clef de ce succès aura été la planification conjointe des interventions militaires et civiles. Cette approche doit à présent être rendue pérenne pour que d’autres villes qui seront libérées ne retombent pas aux mains d’extrémistes.
L’intervenant a aussi salué l’annonce du Gouvernement fédéral d’aligner les activités militaires à Sabiib sur les activités de police. Les Somaliens, a-t-il souligné, ont la capacité d’assumer la sécurité de leur propre pays, citant de nouveau les actions à Sabiib. Il a cependant alerté que les Chabab demeurent une menace de taille, en dépit du ralentissement de leurs activités, avertissant en outre que Daech pourrait tenter de prendre les zones précédemment contrôlées par les Chabab. Des mesures sont prises pour contrôler l’action des Chabab dans d’autres zones du pays.
S’agissant du plan de transition, M. Madeira a indiqué que l’AMISOM avait réduit de 1 000 hommes ses effectifs et que des opérations de transfert clef avaient été menées à Sabiib. Il a cependant fait observer que le Gouvernement fédéral aura besoin d’une aide supplémentaire pour renforcer les troupes en vue d’assurer la sécurité du pays. La transition exigera aussi un règlement politique accéléré entre les clans, notamment en ce qui concerne le partage des ressources et du pouvoir, a-t-il ajouté.
Poursuivant, M. Madeira a indiqué qu’une conférence tenue en févier avait permis de jeter les bases de la reconfiguration des effectifs de l’AMISOM. Il a expliqué que trois secteurs de l’AMISOM avaient été reconfigurés avec la création de forces de réaction rapide et de forces mobiles. Des opérations sont menées dans le secteur 1 jusqu’au secteur 6, une base a été transférée aux autorités somaliennes et des discussions sont en cours sur le transfert de compétences dans le secteur 5. L’AMISOM a progressé de manière significative dans la mise en œuvre du plan de transition, moyennant notamment le déploiement d’équipes civiles dans le but d’améliorer la stabilisation. Ces nouveaux efforts sur le plan civil doivent être pérennisés afin d’appuyer, comme il se doit, la transition, a-t-il estimé. Il a aussi fait savoir que la composante police de la Mission avait renforcé sa présence et offrait une formation aux forces fédérales et régionales.
M. Madeira a ensuite appelé le Conseil à tenir compte de « l’option 1 de l’examen conjoint » avant d’envisager une réduction des effectifs de l’AMISOM. Cette option, a-t-il estimé, permettrait de créer un environnement propice au processus politique.
Mme URSULA MUELLER, Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, a indiqué que la situation humanitaire en Somalie demeure une des crises prolongées les plus longues au monde, alimentée par les conflits armés et la violence ainsi que par la récurrence de chocs climatiques. Elle a rappelé le lancement, en janvier, du Plan de réponse humanitaire 2019, qui indiquait que 4,2 millions de Somaliens, soit un tiers de la population, avait besoin d’aide et de protection. Or, a-t-elle poursuivi, les indicateurs actuels font état d’une détérioration rapide de la situation humanitaire en raison de la gravité des conditions de sécheresse. À ce stade, toute chute de pluie ne suffirait pas à inverser son impact. Elle a fait savoir que depuis le mois de février, l’insécurité alimentaire aigüe avait déjà augmenté de 10% et que d’ici le mois de juillet, 5,4 millions de personnes ne sauront pas comment se procurer leur prochain repas.
Mme Mueller a aussi expliqué que les projections avaient été faites sur la base d’une reprise des pluies en mai et juin, mais que celles-ci ne s’étaient pas matérialisées. Le taux de malnutrition aigüe chez les enfants augmente rapidement, notamment parmi les populations déplacées. Elle a appelé à agir dès à présent pour éviter une crise humanitaire d’envergure, avertissant que les manques de financement entravent la réponse et ont pour conséquence de réduire l’aide dans des domaines critiques comme la santé, l’alimentation, l’eau et l’hygiène. Le plan de réponse à la sécheresse a été lancé le 20 mai afin de récolter 710 millions de dollars pour répondre aux besoins jusqu’en décembre, tandis que le Plan de réponse humanitaire est en train d’être révisé. Elle a précisé que celui-ci a été financé à hauteur de 20%, et qu’au mois d’avril, le Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF) et le Fonds humanitaire pour la Somalie avaient alloué près de 46 millions de dollars pour appuyer la livraison de l’aide.
Compte tenu du risque élevé d’une grave crise humanitaire, Mme Mueller a insisté sur le fait qu’un renforcement immédiat de la réponse humanitaire est essentiel pour atténuer les impacts de la sécheresse et prévenir toute fracture supplémentaire des communautés déjà fragilisées par la sécheresse de 2017. La nature répétitive des chocs climatiques est un rappel brutal que la Somalie est en train de devenir de plus en plus vulnérable aux changements climatiques, a-t-elle relevé.
La Sous-Secrétaire générale a en outre signalé que le pays compte 2,6 millions de personnes déplacées, avertissant du risque accru d’une augmentation des déplacements provoqués par la sécheresse et d’une détérioration des défis de protection. Lorsque cela est possible, des structures ont été mises en place afin de pouvoir rapidement renforcer la réponse dans les régions les plus durement touchées, a-t-elle expliqué. Elle a aussi prévenu que les personnes déplacées encourent un risque accru d’être expulsées de force des zones de peuplement par les propriétaires terriens. En 2018, plus de 300 000 personnes déplacées ont ainsi été chassés de force, une augmentation de 36% comparé à l’année précédente, et ce rythme devrait se poursuivre cette année.
La Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence a également évoqué l’augmentation des risques en matière de protection en raison de la réforme sécuritaire et de la mise en œuvre du plan de transition, du fait notamment des modifications apportées à la force et à la posture de la Mission d’observation militaire de l’Union africaine en Somalie (AMISOM). Elle a appelé le Gouvernement somalien à développer les capacités suffisantes pour pouvoir assurer la protection des civils, mettre en œuvre des structures et mécanismes de gouvernance appropriés et renforcer les autorités civiles pour assurer la livraison des services de base.
Mme Mueller a, en outre, attiré l’attention sur les difficultés rencontrées dans l’environnement opérationnel des organisations humanitaires, pointant notamment l’insécurité, les contraintes bureaucratiques et la limitation des infrastructures logistiques. Des mesures s’imposent pour répondre aux attaques contre les entités dotées de mandats politique, de développement ou humanitaire. Elle a notamment déploré les 18 attaques qui ont eu cette année un impact sur les organisations humanitaires, avec 3 morts, 2 blessés et 7 enlèvements. Elle a encouragé le Gouvernement somalien à déployer les efforts nécessaires pour faciliter la livraison de l’aide. Elle n’en a pas moins souligné que les vulnérabilités chroniques qui caractérisent la crise somalienne ne sauraient être résolues par la livraison de l’aide humanitaire.
Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a considéré que 2019 serait une année cruciale pour la Somalie, « au point de déterminer son avenir ». La reprise de la coopération de l’ONU avec le Gouvernement fédéral de la Somalie est essentielle, celui-ci devant pouvoir compter sur les capacités techniques et l’expérience de l’ONU. Nous savons tous, a-t-elle dit, que l’accord politique entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés sera d’une importance capitale. Sur le plan humanitaire, les systèmes d’alerte précoce sont dans un état plus préoccupant qu’il y a deux ans, a reconnu la délégation britannique, avant d’annoncer que Londres consentirait un effort financier supplémentaire pour les renforcer.
M. TANANA JOHANNES MPANYANE (Afrique du Sud) a déploré le fait que les Chabab et d’autres groupes armés continuent d’être une source d’instabilité dans certains endroits de la Somalie, y compris Mogadiscio. Il a demandé la condamnation des atrocités commises par les Chabab, avant de souligner que même s’il est acquis que sur le long terme la Somalie devrait prendre en main ses défis sécuritaires, il n’en demeure pas moins que pour le moment, le Gouvernement fédéral ne peut le faire à cause des capacités limitées des forces de sécurité. D’où l’importance d’un soutien durable et coordonné de la communauté internationale.
En outre, l’Afrique du Sud a insisté sur un dialogue inclusif entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés, afin de résoudre leurs différends en vue de poursuivre la construction du pays et le processus de paix. Le délégué a également plaidé pour la résolution des différends entre les deux chambres du Parlement afin de poursuivre avec le plan de transition. De même, la consolidation de la paix et des institutions nationales doit se faire d’une manière inclusive, notamment en impliquant les femmes et les jeunes. L’Afrique du Sud invite le Gouvernement somalien à résoudre toutes les questions en suspens afin d’adopter la nouvelle constitution du pays avant les élections à venir. Enfin, l’Afrique du Sud invite la communauté internationale à soutenir le Plan d’aide humanitaire de 2019 pour la Somalie.
Il est clair que la Somalie continue de faire face à des défis importants sur la voie de la construction d’un État sûr, stable et prospère, a reconnu M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis). Il s’est félicité des progrès accomplis grâce aux efforts en matière de sécurité politique et de réformes constitutionnelles soutenus par l’ONU, l’Union africaine et des partenaires internationaux. « Faire progresser la mise en œuvre de ces réformes offre au pays le plus grand espoir de stabilité durable et de croissance économique », a-t-il dit. Le transfert des responsabilités en matière de sécurité de l’AMISOM aux forces de sécurité nationales somaliennes est une « priorité absolue » selon la délégation américaine. Aussi, a-t-il souligné la nécessité pour toutes les parties de se coordonner étroitement pour éviter les lacunes en matière de sécurité qui pourraient être exploitées par des « acteurs malveillants ». « En ce qui concerne les élections 2020/2021 en Somalie, nous exhortons le Gouvernement à finaliser son projet de loi électorale afin de définir un système électoral juste et transparent », a préconisé le représentant.
S’agissant de la réforme constitutionnelle, M. Cohen a souligné que la stabilité politique à long terme dépend de la définition des relations et de la division des pouvoirs et des responsabilités entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés. « À ce titre, nous exhortons toutes les parties prenantes gouvernementales à se réunir et à finaliser cette réforme cruciale. En ce qui concerne l’embargo sur les armes, nous avons encouragé la Somalie à s’engager de manière productive avec le Groupe d’experts et continuerons de le faire. La Somalie semble croire que le Conseil de sécurité lèvera éventuellement les sanctions malgré un manque d’engagement du groupe. Les États-Unis n’appuieront pas ce point de vue, qui ne résout en rien les problèmes que le régime de sanctions avait pour objet de résoudre et qui, en réalité, mine les actions du Conseil », a précisé le représentant. Il a conclu en ajoutant que, depuis 2018, les États-Unis ont fourni une aide humanitaire de plus de 487 millions de dollars à la Somalie.
M. YAO SHAOJUN (Chine) a salué les progrès réalisés par le Gouvernement somalien pour renforcer ses capacités sécuritaires et a appelé à se fonder sur les pratiques optimales pour fournir un meilleur appui au pays. Il a aussi soutenu les efforts d’appropriation du Gouvernement pour créer un État fédéral opérationnel. Il a appelé à continuer d’appuyer les efforts de l’Union africaine afin de renforcer la stabilité dans le pays. Face aux menaces que représentent les Chabab, la MANUSOM doit maintenir sa présence dans le pays, a-t-il estimé, pour ensuite engager la communauté internationale à fournir un appui financier durable et prévisible afin d’éradiquer les Chabab. Le représentant a aussi jugé nécessaire de renforcer l’aide humanitaire et au développement et a appelé les bailleurs de fonds à honorer leurs promesses.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) se félicitant des récentes initiatives visant à relancer le processus politique et de réconciliation entre le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la Fédération, a invité les parties concernées à maintenir cette dynamique positive et à accélérer la mise en œuvre de la feuille de route. En outre, il a encouragé le Gouvernement à redoubler d’efforts, dans le cadre de la mise en œuvre du programme de référence du Fonds monétaire international (FMI), afin de consolider la croissance économique et d’améliorer les conditions de vie de la population. Préoccupé par la situation sécuritaire, le délégué a encore appelé le Gouvernement somalien à intensifier, avec le soutien de la communauté internationale, ses efforts afin de dissiper la menace posée par les Chabab.
Sur le plan humanitaire, la Côte d’Ivoire note avec inquiétude que la persistance du conflit, l’insécurité alimentaire provoquée par une faible pluviométrie et l’augmentation du nombre de déplacés accroîtront les besoins d’aide et de protection qui concerneront 4,2 millions de personnes cette année. Le représentant a donc jugé impérieux de répondre promptement à l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur du financement du plan de réponse humanitaire 2019, dont les besoins pour les six prochains mois sont estimés à 674 millions de dollars. Il a exhorté toutes les parties prenantes à protéger le personnel humanitaire et à favoriser le passage de l’aide.
M. JUAN MBOMIO NDONG MANGUE (Guinée équatoriale) a invité les dirigeants somaliens à concrétiser les mesures de réconciliation adoptées le 26 janvier dernier à Garoowe. Il a également appelé les membres des deux chambres du Parlement fédéral à reprendre leur coopération afin d’approuver les lois urgentes dont le peuple et divers secteurs de la société somalienne ont besoin. Le représentant a, par ailleurs, encouragé les autorités fédérales et régionales à accroître la participation des femmes aux processus de prise de décisions. Au niveau sécuritaire, la Guinée équatoriale déplore les attentats perpétrés par les Chabab qui représentent « une menace susceptible de semer le chaos en Somalie et dans la Corne de l’Afrique ». Son représentant a salué le renforcement des relations entre la Somalie et ses voisins, y compris la volonté des Présidents somalien et kenyan d’entamer le processus de normalisation de leurs relations.
M. NAWAF A. S. A. ALAHMAD (Koweït) a constaté que l’insécurité alimentaire touche une large partie de la population somalienne. La résolution 2461 (2019) démontre que l’ONU soutient le Gouvernement fédéral de transition dans ses efforts pour rétablir la stabilité dans le pays et progresser dans sa réforme du secteur de la sécurité. Sur le plan sécuritaire, justement, le mouvement des Chabab demeure la principale menace, a observé le représentant, en faisant état de la série d’attaques récentes, dont celle qui a coûté la vie au Vice-Ministre des affaires étrangères de la Somalie. Il est donc nécessaire que l’État rétablisse son autorité dans l’ensemble du territoire somalien, a poursuivi le représentant, qui a reconnu que cette année sera décisive pour aider les États fédérés à mettre en œuvre les accords politiques conclus.
M. SAMER MELKI (France) s’est dit préoccupée par l’absence de progrès dans la mise en œuvre du plan de transition et des engagements pris dans le Pacte de sécurité de 2017 ainsi que dans l’intégration des forces régionales dans le cadre de l’architecture nationale de sécurité. Le Conseil de sécurité, a-t-il estimé, doit saisir l’occasion du renouvellement du mandat de l’AMISOM pour rappeler clairement ses attentes. Le représentant a aussi appelé à la reprise d’un dialogue constructif entre le Gouvernement fédéral somalien et les États fédérés afin de faire aboutir au plus vite les chantiers du fédéralisme, de la révision constitutionnelle et des élections prévues entre 2020 et 2021. Pour que la transition sécuritaire réussisse, a-t-il poursuivi, il est nécessaire que l’AMISOM poursuivre sa reconfiguration en soutien au plan de transition. Il faut une réduction modérée du plafond des troupes afin de continuer à encourager les autorités somaliennes à mettre en œuvre cette transition. Il s’agit de retirer des troupes des zones plus stables.
Le représentant a d’ailleurs estimé essentiel que de nouveaux partenaires participent au financement de la Mission. L’Union européenne, a-t-il prévenu, ne peut pas continuer à financer, seule, les primes des soldats de la Mission. Le représentant a dit attendre une pleine coopération des autorités fédérales somaliennes avec les Nations Unies. Il a posé deux questions aux intervenants: quelles sont les perspectives de reprise de la mise en œuvre du plan de transition et de l’intégration des forces régionales dans l’architecture nationale de sécurité? L’Union africaine compte-t-elle entreprendre des démarches pour solliciter l’appui de nouveau donateurs pour le financement de l’AMISOM?
M. GUATAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a espéré que le programme de réforme sécuritaire du Gouvernement somalien pourra être mis en œuvre. Il s’est inquiété de la prévalence de l’insécurité alimentaire, du fait que 90% des ménages n’ont pas accès aux services de base, de la persistance de l’extrémisme violent et des attaques imputables aux Chabab. Il a salué les ouvertures au dialogue, évoquant notamment la réunion de Garoowe et a espéré que cette tendance ouvrira la voie à un dialogue politique durable afin d’avancer dans l’organisation d’élections, le processus de révision constitutionnelle et la réconciliation. Il a aussi insisté sur l’importance de la promotion de la participation active des femmes à la vie politique du pays et a espéré que les réformes du Gouvernement porteront sur cette question.
Le représentant s’est ensuite inquiété de la gravité de la situation humanitaire et jugé indispensable que la communauté internationale renforce son appui financier. Il a aussi appelé à préserver les effectifs de l’AMISOM, estimant par ailleurs que le transfert de sites aux institutions somaliennes doit se faire en tenant compte des conséquences humanitaires et du bien-être de la population civile.
Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué les progrès réalisés en Somalie en termes de pérennisation de la paix et de consolidation de l’État ainsi que les réformes ambitieuses que le Gouvernement fédéral a l’intention de lancer. Parallèlement, la Pologne reste profondément préoccupée par le nombre croissant des attaques des Chabab et de la présence accrue de Daech en Somalie. Une autre source de préoccupation reste, pour la délégation, l’impasse politique entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés ainsi que la suspension de la coopération entre les deux chambres du Parlement fédéral, ce qui représente un risque pour les acquis actuels. La Pologne exhorte tous les acteurs politiques en Somalie à se réconcilier et à s’engager dans un dialogue constructif pour le bien du pays. De plus, les acteurs régionaux devraient apporter un soutien impartial au processus de réconciliation national, a ajouté la représentante.
Mme Wronecka a également encouragé les autorités somaliennes à coopérer avec les Nations Unies, dans un contexte de confiance mutuelle et sur la base du respect du droit international. Soulignant que la protection des droits de l’homme et des libertés fait intrinsèquement partie de la démocratie, elle a exprimé ses inquiétudes face aux allégations de violations de ces droits à la fois par les Chabab, mais également par le Gouvernement, les forces régionales et les milices en présence, en citant en particulier les recrutements d’enfants par les forces armées somaliennes. S’agissant du renouvellement du mandat de l’AMISOM et de son plan de retrait graduel, la Pologne insiste sur le fait que cela doit se faire sur la base d’étapes spécifiques et d’un calendrier réaliste de transfert des responsabilités de la mission aux forces armées nationales.
Mme MORRISON (République dominicaine) s’est dite préoccupée par « l’impasse » dans laquelle se trouvent les relations entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés en Somalie, ainsi que par la situation sécuritaire fragile en raison des attaques perpétrées par les Chabab. Elle a cependant salué les progrès réalisés en matière de réforme constitutionnelle et les efforts du Gouvernement pour faire avancer l’adoption du projet de réconciliation nationale, notamment dans le cadre de la révision constitutionnelle et du projet de loi électorale basé sur le principe de représentation proportionnelle et d’ouverture. La représentante a appelé à redoubler d’efforts pour améliorer la participation politique des femmes, notamment via l’augmentation des quotas de femmes dans la future loi électorale, afin d’atteindre le seuil minimum de 30% d’élues. La représentante a, par ailleurs, rappelé que la Somalie, dont 70% de la population a moins de 30 ans, était l’un des pays les plus jeunes au monde. Elle a mis en garde contre le risque de radicalisation idéologique des jeunes en raison du manque d’accès à des opportunités d’emploi et à des activités sociales et récréatives.
M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) s’est félicité de l’engagement du Gouvernement fédéral à mettre en œuvre ses réformes économiques et de ses progrès accomplis dans l’enregistrement biométrique des soldats de l’Armée nationale somalienne. Les questions électorales demeurent malheureusement une source de tensions et de divisions, a constaté à regret le représentant, avant de juger primordial que tous les partenaires travaillent de concert dans la même direction.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a relevé que la situation en Somalie demeure difficile, un pays dont les Chabab continuent de contrôler plusieurs régions. C’est pourquoi la lutte antiterroriste doit demeurer une priorité. L’AMISOM continuant de jouer un rôle clef dans la stabilisation du pays, il ne serait pas raisonnable de procéder à une diminution du nombre de soldats déployés, a estimé le représentant. La Corne de l’Afrique est traversée par de nombreux changements positifs, a noté le représentant, qui a souhaité que l’action du prochain Représentant spécial soit guidée par un certain nombre de principes, dont celui de « ne pas s’ingérer dans les affaires internes des pays ».
M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a noté la démoralisation du personnel de l’ONU après l’expulsion du Représentant spécial, M. Nicholas Haysom, et a espéré que la coopération s’améliore. Il a insisté sur le fait qu’un gouvernement fédéral fort n’exclut pas d’avoir des États fédérés forts, citant en exemple son propre pays. Déplorant que la réunion de Garoowe n’ait pas été couronnée de succès, il a voulu savoir si une deuxième réunion était prévue. Le représentant a ensuite insisté sur la réforme constitutionnelle et du secteur de sécurité, de même que sur le processus électoral. Il a aussi appelé à veiller à la protection des femmes et des enfants, dénonçant notamment le fléau des violences sexuelles. Il a appelé le Gouvernement à renforcer son cadre juridique en la matière et a estimé que cette question doit aussi être reflétée dans le mandat de l’AMISOM.
Une approche globale conjointe et coordonnée s’impose, a poursuivi le représentant, avant de demander des précisions sur la situation dans le Bas-Chébéli. Il a aussi insisté sur l’importance d’une force de police opérationnelle afin d’améliorer les relations entre le Gouvernement et la population. Enfin, le délégué a appelé à tenir compte de l’impact des changements climatiques lors de la révision des mandats.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a salué l’engagement de l’ONU et du Gouvernement somalien à renforcer leur coopération et a appuyé le rôle « essentiel » joué par l’AMISOM pour promouvoir le processus de règlement politique inclusif, l’avènement d’un État fédéral fonctionnel et la mise en œuvre du plan de transition. Il s’est aussi félicité du renforcement du mandat de la Mission pour appuyer les élections de 2020-2021. Le représentant s’est ensuite dit gravement préoccupé par la menace continue et les activités déstabilisatrices des Chebab, notant l’augmentation, ces deux derniers mois, des attaques à Mogadiscio. Leur capacité à fabriquer des engins explosifs artisanaux démontre leur capacité à inventer d’autres manières de commettre des atrocités, s’est-il alarmé.
Au vu de ce contexte, M. Djani a insisté sur l’importance de la présence continue de l’AMISOM et d’un financement prévisible et durable. Il a également appelé à veiller à ce que toute reconfiguration du mandat de l’AMISOM ne crée pas de vide sécuritaire. De plus, les forces de sécurité somaliennes qui assumeront des responsabilités sécuritaires doivent bénéficier d’une formation et d’équipements adéquats. Il s’est par ailleurs inquiété de la détérioration de la situation humanitaire et du fait que le Plan de réponse humanitaire pour la Somalie demeure gravement sous-financé. Il a exhorté les parties à lever les obstacles qui entravent l’acheminement de l’aide.
M. ABUKAR DAHIR OSMAN (Somalie) a souligné l’ampleur des progrès accomplis par son pays au cours des deux dernières années, comme en témoigne selon lui le niveau record de la dernière collecte de l’impôt sur le revenu, grâce à la mise en œuvre d’un processus automatisé et de diverses réformes économiques. « Cependant, toute réforme a un coût », a déclaré le représentant, indiquant que le Gouvernement avait épuisé une part importante de son « capital politique » dans le cadre du processus de réforme.
Sur le plan sécuritaire, a poursuivi M. Osman, les autorités somaliennes se sont notamment efforcées de procéder à l’enregistrement biométrique des officiers dans le cadre de la réforme du paiement électronique, qui vise à lutter contre la corruption et à faire en sorte que les officiers soient payés en temps voulu, comme c’est le cas depuis les 25 derniers mois. Le représentant a indiqué que ces mesures devraient garantir la stabilité de l’Armée somalienne, ainsi que la mise en œuvre d’une architecture nationale de sécurité ambitieuse et d’un plan de transition. Malgré ces évolutions, le représentant a indiqué que les Chabab constituaient toujours une menace pour la sécurité du pays. Certes, a-t-il indiqué, le Gouvernement a enregistré des avancées significatives contre le groupe terroriste au cours des huit dernières semaines. « Mais nous ne pouvons pas mettre en œuvre efficacement le plan de transition avec les pieds et poings liés, en raison de l’embargo sur les armes qui s’éternise », a dénoncé le représentant, regrettant « les décisions prises depuis le Siège de l’ONU », qui entravent. selon lui, la capacité des forces de sécurité somaliennes à lutter contre le terrorisme des Chabab, au profit de ces derniers.
Parallèlement, le représentant a indiqué que la Somalie avait fait des progrès dans l’instauration d’un cadre politique ouvert, comme en témoigne selon lui l’adoption récente par le Parlement fédéral d’une loi sur le partage des revenus pétroliers, ainsi que l’approbation par le Cabinet du Premier Ministre d’un nouveau projet de loi électorale. Il a ajouté que les autorités somaliennes s’attachaient également à promouvoir les droits de l’homme et à investir dans la jeunesse du pays, pour éviter qu’elle ne soit tentée par l’idéologie des Chabab.
Toutefois, M. Osman a tiré la sonnette d’alarme face à la situation humanitaire du pays. Ces trois derniers mois, le manque de précipitations a donné lieu à des pénuries d’eau et à une détérioration des récoltes agricoles, a-t-il mis en garde, de sorte que 3,4 millions de personnes sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire. Il a appelé la communauté internationale à agir de manière urgente pour éviter que la situation ne dégénère en catastrophe humanitaire. Le représentant a, enfin, appelé les Nations Unies à renforcer leur appui envers le Gouvernement fédéral somalien, qui se trouve à un « moment charnière en matière de construction de l’État, de fédéralisation et de démocratisation ».
Reprenant la parole, la Sous-Secrétaire générale pour les affaires humanitaires, Mme MUELLER, a salué les appels lancés au renforcement de l’aide humanitaire.
Le Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Somalie, M. MADEIRA a ensuite relevé que la Somalie avait répondu aux questions de l’Allemagne sur les mesures sécuritaires, insistant sur la nécessité de garantir la capacité de l’armée à constituer ses forces et à verser des salaires. Mais plus que tout, il faut une armée renforcée en nombre qui ne se borne pas à édifier des barrages routiers, a-t-il commenté, saluant ensuite le fait que le Gouvernement soit parvenu à maintenir les zones récupérées. S’agissant des perspectives de mise en œuvre du plan de transition, M. Madeira a appelé à établir une corrélation entre les acquis et le calendrier. Il a, en outre, relevé que les villes récupérées l’avaient été grâce à une force somalienne intégrée. Il faut cependant éviter que les forces régionales de sécurité ne soient intégrées de manière clanique et établir une bonne chaîne de commandement et un bon mécanisme de contrôle afin de constituer une force harmonisée, a-t-il conclu.
Le Représentant spécial par intérim, M. ZENENGA, a indiqué qu’un comité préparatoire était en train d’être formé pour la préparation des élections. « Il ne faut pas échouer face aux priorités » qui attendent la Somalie. Il convient, a-t-il dit, de garantir la coopération, la révision de la Constitution, la réforme de la législation. S’agissant du moral des troupes, les conditions de sécurité demeurent extrêmement difficiles, mais le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS) fait des efforts pour réinstaller son personnel dans des locaux sécurisés et être à l’écoute de ses attentes, a précisé le haut fonctionnaire.