Venezuela: le Conseil de sécurité est appelé à séparer les objectifs politiques et humanitaires
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a appelé le Conseil de sécurité, ce matin, à renforcer le respect de l’action humanitaire au Venezuela, tout en insistant sur la nécessité de séparer les objectifs politiques et humanitaires, au cours d’une réunion marquée par l’appel du Vice-Président des États-Unis à reconnaître le « Président Guaidó ».
« L’aide humanitaire doit être fournie sur la seule base des besoins », a souligné dans un premier temps M. Mark Lowcock, qui a appelé à prendre des mesures supplémentaires en dépit de celles prises récemment par le Gouvernement vénézuélien. Il a averti que les ressources disponibles sont « extrêmement modestes » par rapport aux besoins recensés.
M. Lowcock, qui est aussi Coordonnateur des secours d’urgence, a alerté sur le fait que la situation s’est détériorée depuis la fin février. Il a évoqué les coupures de courant généralisées, qui entravent le fonctionnement des hôpitaux, ainsi que l’interruption des systèmes d’eau et d’assainissement, le déclin économique et la baisse du pouvoir d’achat.
Selon les estimations de l’ONU, sept millions de personnes -soit 25% de la population- ont besoin d’une aide humanitaire. Dans un pays qui importe jusqu’à 75% de sa nourriture, celle-ci est de moins en moins disponible et abordable. En 2018, 3,7 millions de personnes souffraient de malnutrition, un problème qui aurait triplé en l’espace de cinq ans.
De plus, les pénuries de médicaments ont entraîné une augmentation du risque de morbidité et de mortalité spécifique liées au diabète, à l’hypertension, au cancer et au VIH/sida, tandis que des maladies évitables, comme la tuberculose, la diphtérie, la rougeole et le paludisme, ont refait surface. Mme Kathleen Page, professeure à la faculté de médecine de l’Université Johns Hopkins, a d’ailleurs présenté un rapport qui met en lumière le poids qui pèse actuellement sur le système de santé au Venezuela.
En présence du Secrétaire général de l’ONU, les membres du Conseil de sécurité ont également entendu un exposé centré sur la question des déplacements de population, par le Représentant spécial conjoint du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) pour les réfugiés et les migrants vénézuéliens. M. Eduardo Stein a expliqué que la situation au Venezuela avait provoqué des déplacements d’une magnitude sans précédent dans l’histoire moderne de la région: 3,7 millions de Vénézuéliens sont partis vivre dans un autre pays, dont 80% depuis 2015. À ce rythme, ce chiffre pourrait dépasser cinq millions d’ici à la fin de cette année.
Intervenant au nom des pays membres du Groupe de Lima, le Pérou a appelé à canaliser l’assistance humanitaire par le biais du système des Nations Unies et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Cette réponse urgente ne doit cependant pas faire oublier le véritable problème, a mis en garde le représentant pour qui le risque est une menace à la paix et à la sécurité de la région. Dénonçant le « régime illégitime et oppressant de Nicolás Maduro », il a plaidé pour une solution qui passe par le rétablissement de la démocratie et de l’état de droit au Venezuela.
« L’heure est venue de reconnaître l’échec que représente Maduro et de constater que le Venezuela est un État en déroute », a estimé pour sa part le Vice-Président des États-Unis. M. Mike Pence a déclaré que « Maduro est un dictateur qui n’a pas droit au pouvoir et qui doit être éliminé », allant jusqu’à conseiller au Représentant permanent vénézuélien de rentrer au Venezuela « pour dire à Maduro que son temps est compté ». Le Vice-Président a aussi réclamé l’adoption d’une résolution reconnaissant la légitimité du Président Guaidó. « La lutte pour la liberté au Venezuela ne fait que commencer », a lancé M. Pence.
« Nous assistons à un nouvel épisode du spectacle en plusieurs actes destiné à renverser le pouvoir au Venezuela », a rétorqué la Fédération de Russie, qui a accusé les États-Unis de tenir d’une main, le Venezuela à la gorge pour l’empêcher de se développer, et de s’atteler, de l’autre, à « faire les poches » du pays en expropriant ses avoirs dans les banques internationales.
« Le Venezuela n’est qu’un prétexte pour les États-Unis de reprendre la main sur toute la région, en droite ligne de la ‘doctrine Monroe revitalisée’, a encore accusé la délégation russe qui, à l’instar de la Chine, a appelé les États-Unis à reconnaître que le Venezuela et son peuple ont le droit de déterminer leur propre avenir. « Si vous souhaitez vraiment faire revivre la grandeur de l’Amérique, alors il est temps d’arrêter d’interférer dans les affaires intérieures des autres peuples », a encore lancé la Fédération de Russie pour qui la solution à la crise au Venezuela repose sur un dialogue.
Le doctrine de Monroe était également dans le viseur du représentant du Venezuela, qui a, lui aussi, affirmé que la situation au Venezuela est due à un « plan d’étranglement de l’économie nationale mené par les États-Unis, le but étant d’arriver à l’implosion de l’économie, afin de permettre une intervention militaire étrangère drapée sous le principe de la responsabilité de protéger pour enfin imposer un gouvernement à leur solde ».
Dénonçant une « gigantesque expérience inhumaine », le délégué vénézuélien a notamment voulu savoir sur quelle base juridique les États-Unis pouvaient menacer d’utiliser la force contre le Venezuela. La délégation a appelé à mettre fin à la « guerre de Trump » et au double blocus économique et financier dont son pays est victime.
LA SITUATION DANS LA RÉPUBLIQUE BOLIVARIENNE DU VENEZUELA
Déclarations
« Il y a un problème humanitaire très concret au Venezuela », a déclaré d’emblée M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, qui a alerté que la situation s’était détériorée depuis le 26 février, marquée notamment par des coupures de courant généralisées, qui entravent le fonctionnement des hôpitaux, et par l’interruption des systèmes d’eau et d’assainissement, ainsi que par la poursuite du déclin économique et du pouvoir d’achat de la population. L’échelle des besoins est « significative » et en augmentation, a-t-il averti, précisant que les Nations Unies œuvrent pour élargir la portée de l’aide humanitaire au Venezuela.
Selon les estimations de l’ONU, sept millions de personnes -soit 25% de la population- ont besoin d’une aide humanitaire, des besoins qui sont particulièrement pressants dans les trois États du sud du pays, ainsi que dans les États de Zulia et Lara, situés à l’ouest. Le contexte, a-t-il poursuivi, est marqué par une contraction économique sévère et incessante, accompagnée par une augmentation dramatique de l’inflation à une échelle jamais vue ces dernières années.
M. Lowcock a indiqué que le Venezuela importe jusqu’à 75% de sa nourriture. En raison de la crise, la nourriture est de moins en moins disponible et abordable, conséquence de la faiblesse des importations, de la réduction de la production locale et du déclin du pouvoir d’achat. Six millions de familles dépendraient des vivres distribués par le Gouvernement. En dépit de ces efforts, la malnutrition est en hausse, notamment dans les régions marquées par les taux les plus élevés de pauvreté. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en 2018, 3,7 millions de personnes souffraient de malnutrition, un problème qui aurait triplé en l’espace de cinq ans. De plus, 1,9 million de personnes ont besoin d’une aide alimentaire, dont 1,3 million d’enfants de moins de 5 ans.
De son côté, le système de santé vénézuélien pâtit du manque de personnel, de fourniture, d’équipements et d’électricité. Les pénuries de médicaments ont notamment entraîné une augmentation du risque de morbidité et de mortalité liée au diabète, à l’hypertension, au cancer et au VIH/sida, tandis que des maladies évitables, comme la tuberculose, la diphtérie, la rougeole et le paludisme ont refait surface. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a d’ailleurs enregistré plus de 400 000 cas de paludisme en 2017, une augmentation de 70% par rapport à l’année précédente et la plus importante au monde. En tout, 2,8 millions de personnes ont besoin d’une aide médicale, dont 1,1 million d’enfants de moins de 5 ans.
M. Lowcock a aussi indiqué que les problèmes sanitaires étaient exacerbés au Venezuela en raison du manque d’accès à l’eau propre et de la vétusté des systèmes d’assainissement. Ainsi, 17% des personnes vivant dans la pauvreté n’ont pas accès à l’eau propre, ou n’y ont accès que tous les 15 jours, une situation aggravée par les récentes coupures de courant. Selon les estimations, 4,3 millions de personnes ont besoin d’une assistance pour bénéficier des services en eau et en assainissement.
De plus, a poursuivi le Coordonnateur des secours d’urgence, la crise a interrompu la scolarisation de plus d’un million d’enfants, car de nombreuses familles ne peuvent plus couvrir les frais de transport ou acheter les vêtements nécessaires. Les populations en déplacement sont particulièrement vulnérables, les femmes et les filles représentant 72% des récentes victimes de la traite. En tout, plus de 3,4 millions de personnes ont déjà quitté le pays et, selon les estimations, 2,7 millions de personnes qui demeurent au Venezuela nécessitent des services de protection.
Passant à l’action de l’ONU, M. Lowcock a indiqué que depuis 2017, son personnel sur le terrain était passé de 210 à près de 400, sachant aussi que les agences de l’ONU travaillent dans les 24 États que compte le pays, les efforts étant particulièrement concentrés dans les États frontaliers vulnérables de Zulia, Táchira et Bolivar. Il a aussi expliqué avoir débloqué 9 millions de dollars au Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF) à la fin 2018. À ce jour, a-t-il précisé, l’ONU a traité 189 000 enfants souffrant de malnutrition, distribué 74 000 trousses sanitaires pour la santé maternelle et infantile, fait don de 10 générateurs électriques, et installé des citernes d’eau pour les hôpitaux. L’ONU a aussi distribué 10 millions de comprimés à 50 000 personnes pour le traitement du VIH et livré 176 000 doses de vaccins contre la rougeole, la rubéole et les oreillons pour les nourrissons et les enfants en bas âge.
Une équipe de coopération et de coordination de l’aide a récemment été mise sur pied, à Caracas, pour réunir les agences de l’ONU, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et les ONG.
M. Lowcock a appelé le Conseil de sécurité à axer ses efforts sur le renforcement du respect de l’action humanitaire, insistant sur la nécessité de séparer les objectifs politiques et humanitaires. L’aide humanitaire doit être fournie sur la seule base des besoins, a-t-il souligné. Il a également appelé le Conseil à assurer que l’aide humanitaire parvienne régulièrement et de manière sûre aux personnes dans le besoin. En dépit des récentes mesures prises par le Gouvernement du Venezuela pour faciliter l’arrivée de membres supplémentaires du personnel de l’ONU dans le pays, des mesures supplémentaires s’imposent, a-t-il exigé. Il a aussi plaidé pour que davantage d’organisations humanitaires capables de répondre aux besoins d’urgence puissent établir une présence dans le pays, avant de demander aussi des informations et des données supplémentaires, pour veiller à ce que l’aide réponde à l’évolution de la situation. M. Lowcock a aussi averti que les ressources disponibles sont « extrêmement modestes » par rapport aux besoins recensés.
M. EDUARDO STEIN, Représentant spécial conjoint du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) pour les réfugiés et les migrants vénézuéliens, a déclaré que la situation au Venezuela s’est traduite par un déplacement de populations d’une magnitude sans précédent dans l’histoire moderne de la région. À ce jour, nous estimons à 3,7 millions le nombre de ceux qui vivent en dehors de leur pays, dont 80% ont fui depuis 2015, a-t-il précisé. « Bien que la vaste majorité des Vénézuéliens qui se sont exilés se soient réfugiés dans les pays voisins et dans d’autres régions d’Amérique du Sud, il importe de noter que plus de 20 pays sont touchés par ces afflux de migrants, dans l’hémisphère Sud et au-delà. » L’an dernier, les Vénézuéliens ont quitté le pays au rythme de 5 000 par jour et ils continuent de le faire en dépit de la fermeture des frontières côté Venezuela. « Si cette tendance se poursuit, nous estimons que le nombre total de Vénézuéliens vivant à l’extérieur de leur pays aura dépassé cinq millions d’ici à la fin de cette année », a mis en garde le haut fonctionnaire. Les raisons du départ sont à mettre sur le compte de l’insécurité et de la violence, du manque d’accès à la nourriture, aux médicaments et aux services de base, ainsi que d’une perte de revenus et de l’insuffisance des systèmes de protection nationaux efficaces.
La fermeture des frontières rend nécessaire pour la majorité des personnes le départ du pays de manière illégale et dans des conditions fort dangereuses, les exposant à des risques d’exploitation et d’abus, notamment la traite humaine, a relevé M. Stein. « La présence d’acteurs armés illégaux dans de multiples zones frontalières et les risques saisonniers de crues constituent des défis supplémentaires », a-t-il prévenu. Dans ce contexte, le Représentant spécial conjoint a tenu à saluer la générosité des pays d’accueil et de transit, qui ont largement maintenu ouvertes leurs frontières et qui, dans le cadre du Processus de Quito, privilégient toujours des approches humaines. Lors de la troisième Réunion de Quito sur la mobilité des Vénézuéliens en Amérique latine, les pays participants ont souligné comme priorité l’urgente nécessité d’une plus grande coopération internationale et d’une implication des acteurs du développement multilatéral pour résoudre cette crise humanitaire régionale. Un soutien additionnel est nécessaire pour les États qui ouvrent leurs frontières aux Vénézuéliens, a-t-il plaidé. Ce soutien additionnel doit s’étendre aux communautés d’accueil locales et prendre la forme de contributions plus nombreuses et généreuses de la part des bailleurs de fonds internationaux, a insisté en conclusion le haut fonctionnaire.
Mme KATHLEEN PAGE, professeure à la faculté de médecine de l’Université Johns Hopkins, a présenté un rapport établi conjointement par son institution et l’organisation Human Rights Watch. Le rapport conclut que la combinaison entre le manque sévère de médicaments, de consommables médicaux et de nourriture, et la propagation des épidémies dans le pays et au-delà de ses frontières, avait pesé gravement sur le système de santé du Venezuela. Étant donné que la situation dans le pays répond aux critères des situations humanitaires d’urgence complexes, elle a invité le Secrétaire général de l’ONU à la déclarer formellement comme telle afin de déclencher une réponse des Nations Unies à grande échelle, laquelle devra être « neutre, indépendante et impartiale », a-t-elle précisé.
Mme Page a expliqué que le rapport dont elle présente les conclusions fait suite à des recherches menées aux frontières du Venezuela avec la Colombie et le Brésil. Plus de 150 personnes ont été interviewées parmi des professionnels de la santé, des acteurs humanitaires, des membres du personnel onusien et des autorités locales, ainsi que des dizaines de Vénézuéliens qui ont quitté leur pays. L’étude a également examiné des données du Gouvernement vénézuélien, des organisations internationales, des hôpitaux vénézuéliens et d’autres sources. Toutes ces données laissent croire que le système de santé du pays ne fonctionne pas et que les taux de mortalité et de morbidité ne cessent de croître. Les coupures générales d’électricité ont contribué à saper les capacités des hôpitaux publics à répondre aux besoins médicaux des Vénézuéliens, a-t-elle ajouté.
Mme Page a ensuite présenté des chiffres qui laissent voir l’augmentation des taux de mortalité et de morbidité liée à certaines maladies. Le taux de mortalité maternelle, par exemple, a augmenté de 65% entre 2015 et 2016, alors que celui des enfants a grimpé de 30%. En outre, le Venezuela est le seul pays de la région où le taux de mortalité infantile a augmenté et est même revenu à des niveaux comparables à ceux des années 1990. Malgré le fait que les autorités vénézuéliennes ont arrêté de publier les données sur la nutrition en 2007, Mme Page a estimé que les indications laissent croire que la famine, la malnutrition et le manque sévère de nourriture se répandent. Elle a également affirmé que les autorités vénézuéliennes menacent de représailles les personnels de la santé qui tiennent des statistiques ou parlent du manque de médicaments. Elle a souligné l’importance de disposer de données objectives et vérifiables qui sont cruciales pour évaluer la situation, suivre les développements et apporter une réponse humanitaire efficace.
Alors que l’aide internationale a commencé à entrer dans le pays, la réponse est encore insuffisante et il y a toujours des obstacles, a poursuivi Mme Page. Selon elle, bien que les autorités vénézuéliennes soient en droit de rejeter les offres d’assistance, elles sont également responsables de la prise en charge des besoins humanitaires urgents du pays. C’est donc pour protéger le droit à la santé et à la nutrition du peuple vénézuélien que le rapport conjoint demande au Secrétaire général de l’ONU de déclarer l’état de crise humanitaire urgente et complexe au Venezuela. Pour Mme Page, cette crise figure au rang des priorités de l’ONU, en vue de la plus large mobilisation possible de l’assistance humanitaire. Le Secrétaire général, a-t-elle ajouté, devrait demander aux autorités vénézuéliennes de donner aux agences onusiennes un accès total aux données de santé, de nutrition et de sécurité alimentaire, et leur permettre de procéder à une évaluation de la situation humanitaire dans tout le pays. Elle a expliqué qu’une telle réponse serait crédible, neutre, indépendante et impartiale, puisque menée sous les auspices des Nations Unies.
Mme Page a par ailleurs demandé que la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme puisse documenter les violations des droits à la santé et à la nutrition dans son prochain rapport sur le Venezuela. Elle a plaidé également pour que le Conseil des droits de l’homme continue de suivre la situation dans le pays et adopte une résolution qui porte création d’une commission internationale d’enquête sur les violations des droits de la santé et de la nutrition.
M. MIKE PENCE, Vice-Président des États-Unis, a prié le Conseil de sécurité de défendre la démocratie et l’état de droit au Venezuela. Depuis six longues années, s’est-il inquiété, le peuple de ce pays est sous le joug de l’oppression, tandis que les politiques économiques « socialistes » ont réduit en peau de chagrin le pouvoir d’achat dans un pays qui était le plus riche d’Amérique latine. En moyenne, les Vénézuéliens ont perdu 10 kilogrammes en raison de la malnutrition et les gens meurent par manque d’accès aux soins les plus essentiels, a-t-il déploré.
Le Vice-Président américain a aussi accusé le « régime vénézuélien » de faire usage de l’intimidation et de la violence, précisant qu’à ce jour, 1 250 personnes ont été emprisonnées sans respect des procédures et 40 autres ont été tuées. Le « régime Maduro » n’est pas seulement une menace pour les Vénézuéliens, mais aussi pour la paix et la sécurité dans la région, a-t-il estimé. Il a parlé de l’exode sans pareil de trois millions de personnes, alertant que trois millions d’autres devraient les suivre d’ici à la fin de l’année. Il a raconté avoir pu constater de visu le désespoir de la population, lors d’un déplacement dans la région. Il a relaté notamment le récit d’une grand-mère, réfugiée à Carthagène, qui lorsqu’elle était encore au Venezuela, voyait ses petits enfants se lever à 4 heures du matin dans l’espoir de pouvoir acheter un simple quignon de pain à 16 heures.
Poursuivant, M. Pence a alerté sur le fait que le Venezuela est « un État en déroute », et qu’il n’y a pas de limite à ce type de situation, avertissant en outre que des gangs profitent de la situation pour semer le chaos dans le pays. C’est une lutte entre la dictature et la démocratie, a-t-il affirmé. « Maduro est un dictateur qui n’a pas droit au pouvoir et qui doit être éliminé », a-t-il asséné, avant d’ajouter que la « lutte pour la liberté au Venezuela ne fait que commencer ».
M. Pence a rappelé la reconnaissance du Président intérimaire Juan Guaidó, ajoutant que pas plus tard qu’hier, l’Organisation des États américains avait voté pour le reconnaître en tant que véritable représentant du peuple du Venezuela. Le Président Donald Trump est fier de compter parmi les premiers à l’avoir reconnu en tant que tel, a indiqué M. Pence. « L’heure est à présent venue pour les Nations Unies de s’exprimer clairement », a-t-il ajouté.
Le Vice-Président des États-Unis a rappelé la présentation d’un projet de résolution sur le rétablissement de la démocratie au Venezuela, déplorant que celle-ci n’avait pu être adoptée en raison du veto de « deux États », nommant ensuite précisément « la Fédération de Russie et la Chine qui continuent à faire obstruction au Conseil de sécurité ». Il a aussi pointé la République islamique d’Iran et Cuba, des « États voyous » qui, a-t-il dénoncé, font leur possible pour renforcer le « régime Maduro ». Il a aussi accusé Cuba d’ « exporter la tyrannie dans le monde et de former la police secrète du Venezuela ». Il a fait savoir que la semaine dernière, les États-Unis avaient sanctionné des navires transportant du pétrole vénézuélien vers Cuba, et que de nouvelles sanctions contre Cuba étaient également prévues en raison de la mauvaise influence de ce pays. M. Pence a aussi fait savoir que Caracas avait reçu une délégation iranienne pour lancer un service aérien entre les deux pays avec une compagnie qui, a-t-il dénoncé, transporte les membres d’une unité tout juste déclarée comme terroriste par l’Administration américaine. « C’est là le type de personnes que consulte Maduro et qui continuent de le défendre », s’est insurgé le Vice-Président américain. Il a ensuite fait savoir que les États-Unis avaient imposé des sanctions à plus de 50 individus, une liste qui ne fera qu’augmenter, a-t-il prédit. Venant à l’aide humanitaire, il a précisé que des milliers de tonnes de vivres avaient été placés le long de la frontière et que le Président Trump avait promis 60 millions de dollars de plus pour financer l’aide humanitaire.
Poursuivant, M. Pence a assuré que les États-Unis feraient tout pour assurer un transfert démocratique du pouvoir au Venezuela. Il a déploré le « refus » du Conseil de sécurité d’agir. « L’heure est venue de reconnaître le Président intérimaire Guaidó en tant que Président légitime du Venezuela », a-t-il déclaré, avant d’exiger que l’ONU révoque les pouvoirs du représentant actuel du Venezuela. « Malgré tout le respect que je vous dois, Monsieur l’Ambassadeur, vous ne devriez pas être ici », a-t-il lancé à l’adresse du Représentant permanent du Venezuela en lui conseillant de rentrer au Venezuela « pour dire à Maduro que son temps est compté ». M. Pence a ensuite appelé à l’adoption d’une résolution reconnaissant la légitimité du Président Guaidó.
Le Vice-Président américain a ensuite longuement salué le peuple vénézuélien qui s’élève contre l’intimidation et la violence et qui, avec détermination, continue de faire montre de courage et de force pour marcher vers la liberté. Citant Bolivar, il a aussi affirmé qu’un « peuple épris de liberté connaîtra la liberté ». Les Nations Unies doivent agir et le monde doit être aux côtés du peuple vénézuélien dans sa marche vers la liberté, a-t-il aussi recommandé. « L’heure est venue de reconnaître l’échec que représente Maduro. »
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit être heureux de voir le Vice-Président américain mais a regretté qu’il n’ait « pas voulu écouter ce que les autres membres du Conseil de sécurité pensent de la situation au Venezuela ». Cette situation, a-t-il affirmé, n’est pas une menace à la paix et la sécurité internationales, mais selon lui « ce sont des acteurs extérieurs qui essayent de déstabiliser le pays ». S’adressant à Mme Page qui a présenté le rapport commun de l’Université John Hopkins et de Human Rights Watch, il a dénoncé « des chiffres et témoignages qui sont tirés de sources hors du pays ». Au sujet des chiffres évoqués sur la rougeole au Venezuela, il a rappelé que « même ici à New York, à quelques pas du Siège des Nations Unies dans le quartier de Brooklyn », sévit en ce moment une épidémie de rougeole.
Selon M. Nebenzia, les autorités vénézuéliennes ne nient pas que la situation dans le pays soit inquiétante, mais ces dernières veulent être consultées et impliquées dans toute initiative d’aide concernant le pays. Le représentant a ensuite décrié le rapport publié par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), parlant d’un rapport « mitigé » basé sur des données « collectées et publiées sans accord du Gouvernement ». Ce constat a fait dire au délégué russe que l’on est revenu à « une époque glorieuse quand l’OCHA collectait des données sans les vérifier ».
Le représentant a dit rejeter catégoriquement les méthodes américaines utilisées contre le Venezuela. Il a expliqué que les États-Unis tiennent, d’une main, le Venezuela à la gorge pour l’empêcher de se développer, alors que l’autre main, s’attèlent à « faire la poche » du pays en expropriant ses avoirs dans les banques internationales. Ce ne sont pas moins de 30 milliards de dollars qui sont ainsi bloqués depuis le début de l’année, a-t-il avancé, alors que le préjudice total se chiffre en centaines de milliards de dollars depuis 2013. Le représentant a ensuite rappelé que les États-Unis ont aussi des problèmes humanitaires, notamment à Porto Rico depuis le passage en 2017 de l’ouragan Maria. Il a rappelé que Washington avait toujours refusé toute aide internationale, y compris celle proposée par le Venezuela et Cuba.
M. Nebenzia a affirmé que seul un dialogue direct au Venezuela permettra de régler la situation du pays. Il a accusé les États-Unis de s’ingérer dans les affaires intérieures vénézuéliennes dans le but de renverser le président légitime et de mettre en place « leur protégé ». S’adressant ensuite aux voisins du Venezuela, il leur a demandé si l’histoire ne leur avait rien appris, ajoutant que « le Venezuela n’est qu’un prétexte pour les États-Unis de reprendre la main sur toute la région », en droite ligne de la « doctrine Monroe revitalisée ». Pour la Fédération de Russie, la solution à la crise au Venezuela repose sur un dialogue, mais « le Président autoproclamé n’y est pas disposé car n’ayant pas reçu d’autorisation à ce propos ». Parmi les diverses initiatives internationales de médiation, la Fédération de Russie privilégie celle dite de Montevideo qui, au contraire des autres, n’insiste pas sur des conditions préalables.
M. Nebenzia a par ailleurs dit se garder de faire un commentaire sur « le ton utilisé par le Vice-Président américain », avant de rappeler que le représentant du Venezuela avait été envoyé par les autorités du pays et avait été confirmé à sa fonction par l’Assemblée générale. Pour lui donc, le concept d’ordre international fondé sur les règles ne peut permettre « ce genre de banditisme ». Les États-Unis, a-t-il lancé, doivent reconnaître enfin que le Venezuela et les autres peuples ont le droit de déterminer leur propre avenir. S’adressant à la délégation américaine, il a dit: « Si vous souhaitez vraiment faire revivre la grandeur de l’Amérique (“Make America Great Again ”), alors il est temps d’arrêter d’interférer dans les affaires intérieures des autres peuples. »
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou), qui parlait également au nom des pays membres du Groupe de Lima (Argentine, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Honduras, Panama et Paraguay), a exprimé son inquiétude face à la grave crise humanitaire et à l’effondrement économique des services publics au Venezuela, une situation qui est selon lui « sans précédent en Amérique latine ». Il a cité les estimations du Fonds monétaire international (FMI) selon lesquelles le Venezuela a connu en 2018 une inflation de 1,5 million%, avec une chute du PIB de 44% depuis 2013. Des enquêtes sur les conditions de vie menées en 2018 démontrent aussi que 94% des citoyens se trouvent actuellement en situation de pauvreté et 60% de pauvreté extrême, dont 80% exposés au risque d’insécurité alimentaire parce qu’ils n’ont pas les moyens d’acheter de l’alimentation.
Alors que le « régime illégitime de Nicolás Maduro masque ces chiffres » et se vante que le Venezuela n’a pas besoin d’aide humanitaire, a poursuivi le représentant, les hôpitaux s’écroulent, les maladies qui avaient été éradiquées réapparaissent, le chômage augmente de façon « vertigineuse », les villes connaissent la violence, les services d’électricité et d’eau s’effondrent, tandis que la fuite des talents laisse augurer un avenir sombre pour le pays. Le représentant a imputé tout cela à « un régime qui a été déclaré illégitime » par l’Organisation des États américains, « un régime autoritaire qui réduit au silence les moyens de communication, réprime et emprisonne l’opposition, et abuse de sa puissance totale ».
Citant ensuite les 3,5 millions de personnes qui, dans ce contexte, ont migré depuis le Venezuela, avec 5 000 nouveaux cas chaque jour, il a souligné le défi sans pareil que cela pose pour les pays d’accueil et leurs services de santé, d’éducation, de logement, d’emploi et d’intégration. Le représentant a fait valoir que les pays de la région avaient dû consacrer, de manière imprévue, d’importantes ressources intérieures pour fournir ces services sociaux aux centaines de milliers de Vénézuéliens accueillis, parfois en dépassant leurs propres capacités.
« Comment en sommes-nous arrivés à cette situation? » La réponse est claire, a dit le représentant. « Cette crise sans précédent est le fait de la nature illégitime et oppressante d’un régime qui a ajouté à l’effondrement de l’ordre constitutionnel et de l’état de droit, une incompétence en matière de gestion économique, une corruption et le détournement des ressources, transformant ainsi un pays prospère et en plein essor comme le Venezuela en un pays où sévissent la pauvreté, l’insécurité et le désespoir. »
Le représentant a souligné le besoin pressant de surmonter la crise humanitaire, tout en prévenant qu’il n’était « pas possible de faire confiance à ce régime ». Il a appelé à canaliser l’assistance humanitaire par le biais du système des Nations Unies et de la CICR, avec éventuellement l’appui des organisations non gouvernementales locales et internationales présentes sur le terrain. Cette réponse urgente ne doit cependant pas faire oublier que ce ne serait qu’un palliatif au véritable problème, a mis en garde le représentant, qui a insisté sur l’impact de ce problème sur la région susceptible de menacer la paix et la sécurité. Il a plaidé pour une solution qui passe par le rétablissement de la démocratie et de l’état de droit au Venezuela, conduite par les Vénézuéliens de manière pacifique, dans le respect de la Constitution et du droit international, appuyée par des moyens politiques et diplomatiques, et sans usage de la force. Il a réaffirmé l’appui des pays du Groupe de Lima à « l’Assemblée nationale, au Président par intérim du Venezuela, Juan Guaidó, et à ses représentants ». Il a demandé à la communauté internationale et au Conseil de sécurité d’accompagner ces pays dans leur engagement à aider au rétablissement de l’ordre constitutionnel au Venezuela, pour régler la cause profonde de la grave situation humanitaire.
M. JOSE SINGER RATZINGER (République dominicaine) s’est dit préoccupé par la détérioration de l’aide humanitaire au Venezuela. Citant les chiffres avancés par la FAO, le représentant a rappelé que 11,7% de la population du pays était sous-alimentée et que des millions de Vénézuéliens éprouvaient les pires difficultés à s’approvisionner en eau et en électricité, ainsi qu’à se procurer des services de santé et d’éducation. Les coupures d’électricité à répétition de ces dernières semaines sur la quasi-totalité du territoire, dont certaines ont duré jusqu’à plusieurs jours, n’ont fait qu’aggraver la situation, a-t-il ajouté.
Le représentant a toutefois estimé que l’aide humanitaire ne suffirait pas à résoudre la crise au Venezuela. Il a appelé les parties à entamer des négociations en vue de parvenir à une sortie de crise aboutissant à un processus électoral « juste, libre et équitable » sous les auspices de la communauté internationale. Ce processus, a-t-il insisté, devra être mené par les Vénézuéliens eux-mêmes.
Parallèlement, le représentant a exhorté les parties à faciliter l’arrivée de l’aide humanitaire dans le pays, pour autant que cette dernière soit conforme aux principes d’humanité, d’impartialité, de neutralité et d’indépendance. Il a estimé que l’action humanitaire devait se centrer sur les priorités de la population, dans la perspective du retour des près de 3,4 millions de réfugiés vénézuéliens ayant fui le pays. Dans le même temps, le représentant a appelé les pays de la région à assouplir les mécanismes d’entrée sur leur territoire pour continuer d’accueillir ces réfugiés. Il a également exhorté la communauté internationale à mettre à disposition les ressources nécessaires pour financer l’aide humanitaire au Venezuela.
M. ZHAOXU MA (Chine) a espéré que le problème du Venezuela puisse être traité de manière indépendante par sa population. Il a appelé à trouver une solution politique à la crise, tout en engageant à défendre l’esprit de la Charte de l’ONU dans l’optique de déboucher sur une issue pacifique. Le représentant s’est opposé à toute ingérence et à toute intervention militaire dans le pays, critiquant également « l’utilisation du problème humanitaire pour atteindre des objectifs politiques ». Il a aussi alerté sur le fait que les sanctions unilatérales ne font que compliquer la situation. Ces sanctions ne permettront pas de trouver une solution aux problèmes du pays, a-t-il ajouté, se préoccupant en outre du fait que ce sont les citoyens lambda qui en subissent de plein fouet les conséquences. Il a annoncé que la Chine avait décidé d’octroyer une aide d’urgence au pays et qu’une première cargaison de fournitures humanitaires avait été livrée le 21 mars.
La paix et la stabilité du Venezuela sont dans l’intérêt de toutes les parties, a fait valoir le représentant en disant espérer que la communauté internationale agisse de manière à assurer la stabilité économique du Venezuela et ce, dans le respect de sa souveraineté. Il a aussi espéré que les États concernés lèveraient les sanctions unilatérales imposées au Venezuela. Le représentant de la Chine a ensuite dénoncé « les accusations infondées proférées par les États-Unis », et a les a fermement réfutées. « Nous ne nous ingérerons jamais dans les affaires intérieures du pays », a-t-il assuré avant d’appeler la communauté internationale à respecter les choix des peuples qui optent pour un développement progressif.
M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a considéré qu’il est urgent, pour alléger les souffrances du peuple vénézuélien, de garantir et de faciliter l’accès des agences humanitaires et des organisations non gouvernementales, dans le plein respect des principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance. « Les limites de la cruauté semblent sans cesse être repoussées lorsque nous constatons que les affidés du régime sont prêts à détourner l’aide humanitaire », a-t-il dénoncé. La France, a annoncé le représentant, a, à titre national et via l’Union européenne (UE), préparé une réponse à la hauteur de cette crise. Il a mentionné à cet égard que l’UE avait annoncé le 27 mars une aide humanitaire supplémentaire pour le Venezuela de 50 millions d’euros.
Par ailleurs, il est urgent de prêter assistance aux 3,5 millions de Vénézuéliens qui ont dû prendre le chemin de l’exil du fait du chaos et de la violence, a poursuivi M. Delattre. Il a salué tout particulièrement la Colombie, le pays qui paie le plus lourd tribut en ce qu’il accueille près de 1,4 million de réfugiés et de migrants. Enfin, a ajouté le délégué, il est urgent de lancer une transition politique et pacifique au Venezuela sous la forme d’une élection présidentielle libre, crédible et transparente observée par la communauté internationale. « En voulant s’accrocher au pouvoir, en organisant un simulacre d’élection présidentielle, en réprimant l’opposition et les voix dissidentes, en s’accaparant les richesses du Venezuela, le régime actuel a précipité tout un pays au bord du gouffre », a accusé la France.
Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a souligné que les chiffres entendus aujourd’hui sur la crise au Venezuela et les conséquences sur leurs voisins confirment bien que le Conseil de sécurité doit traiter de cette question. Elle a notamment remercié le professeur Page pour les chiffres fournis sur certaines maladies qui ont court au Venezuela. Elle a aussi évoqué la situation des réfugiés, affirmant que la communauté internationale ne peut s’en remettre uniquement aux pays de la région.
Le Royaume-Uni estime qu’un nouveau départ est nécessaire au Venezuela. La délégation a insisté sur la démocratie et l’état de droit. Elle a appelé l’ONU à organiser une réponse humanitaire, avant de demander au « régime Maduro » de donner un accès sans entrave à cette assistance. Son pays a alloué près de 9 millions de dollars pour répondre aux besoins humanitaires, au Venezuela et dans les pays voisins. Elle a dit que M. Juan Guaidó mérite le soutien de la communauté internationale. Il est important que des élections soient rapidement organisées dans le pays, a-t-elle conclu.
« Il est évident que la situation au Venezuela constitue une crise humanitaire », a affirmé M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), précisant qu’environ un quart des Vénézuéliens ont actuellement besoin d’une assistance humanitaire, à commencer par les personnes atteintes de problèmes de santé chroniques, les femmes enceintes, les jeunes enfants et les populations autochtones. Le délégué a appelé tous les acteurs à autoriser et faciliter un accès « sûr, rapide et sans entrave » pour les fournitures et le personnel humanitaire dans le pays. Il a rappelé la nécessité de respecter les « principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance » de l’aide humanitaire, afin que celle-ci ne soit pas instrumentalisée à des fins politiques.
Le représentant a par ailleurs appelé à lancer rapidement un processus politique pacifique capable d’ouvrir la voie à une élection présidentielle libre et transparente. De ce point de vue, il a estimé que le scrutin de mai dernier n’était « ni libre, ni équitable, ni crédible », au point de « priver » le Gouvernement de Nicolás Maduro de sa légitimité démocratique. Dans ce contexte, le délégué s’est dit préoccupé par les rapports faisant état d’une augmentation de l’aide militaire étrangère au « régime de Maduro », dont l’objectif est « loin d’être clair » selon lui. Enfin, le représentant a appelé à protéger les citoyens vénézuéliens contre toute forme de violence. Le peuple vénézuélien a le droit de s’exprimer sans crainte de persécution politique, a-t-il déclaré, jugeant inacceptable l’intimidation des représentants de la presse et de la société civile.
M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a condamné tous les actes portant atteinte au respect des droits de l’homme au Venezuela, y compris la liberté d’expression et le droit de manifester pacifiquement. Par ailleurs, il a dit partager les préoccupations du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) concernant la détérioration de la situation humanitaire dans le pays. Face à cette situation, il a jugé nécessaire que la dizaine d’États voisins, qui accueillent actuellement 3,5 millions de réfugiés vénézuéliens, maintiennent leurs frontières ouvertes et diminuent les restrictions à l’entrée sur leur territoire. Il a également appelé la communauté internationale à se mobiliser davantage, dans le cadre du Pacte mondial sur les réfugiés, afin d’augmenter l’appui à ces derniers et aux pays d’accueil. De plus, le représentant a exhorté les parties à faciliter l’arrivée de l’aide humanitaire dans le pays, pour autant que cette aide soit conforme aux normes du droit international et soit distribuée à toutes les personnes dans le besoin, « sans discriminations, ni distinctions quelles qu’elles soient ».
Sur le plan politique, le représentant a appelé les parties à s’assoir à la table des négociations, sous les auspices « impartiales » de l’ONU et des organisations régionales et sous-régionales. Dans cette perspective, il a encouragé les parties à s’abstenir de toute menace d’usage de la force susceptible d’envenimer encore davantage les tensions actuelles. Il a enfin appelé tous les acteurs pertinents, tant nationaux qu’internationaux, à « faire passer l’intérêt des Vénézuéliens avant tout autre « intérêt personnel ou partisan ».
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a estimé que la crise humanitaire au Venezuela est des plus inquiétantes, avertissant de ses répercussions négatives sur la région. Il a parlé des déplacements importants de population qui ont exercé des pressions économiques notables sur les pays voisins. Il a exhorté le Gouvernement du Venezuela à ouvrir les points de passage aux frontières pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire. Le représentant a ensuite appelé les parties à lancer un dialogue pour endiguer le bain de sang et trouver un règlement pacifique à la crise que traverse le pays.
M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a présenté la situation au Venezuela comme la résultante d’une myriade de facteurs, y compris des « dynamiques géopolitiques conflictuelles ». Il a donc demandé au Conseil de se focaliser sur la crise humanitaire, demandant que l’assistance soit apportée au pays dans le respect des principes des actions humanitaires que sont l’humanité, la neutralité, l’impartialité et l’indépendance. De plus, toute assistance humanitaire doit se faire en coordination avec les autorités vénézuéliennes, dans le respect du principe de la souveraineté nationale contenu dans la Charte des Nations Unies.
M. Matjila a aussi demandé que l’assistance humanitaire soit basée sur une évaluation précise de la situation, appelant à « éviter toute intervention humanitaire qui serait le prétexte pour faire augmenter les tensions et éventuellement des enchevêtrements militaires ». Pour assurer que l’assistance au Venezuela soit neutre et impartiale, l’Afrique du Sud a demandé qu’elle soit menée par l’ONU et ses partenaires, ou par le biais d’organisations internationales reconnues comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a appuyé les efforts déployés par l’ONU pour venir en aide au peuple vénézuélien et a appelé les États à faire parvenir leur aide par l’intermédiaire de l’Organisation. Ce qui importe le plus, c’est que l’aide parvienne à ceux qui en ont besoin, a-t-il souligné. Il a appelé au respect des principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, insistant sur le fait que l’octroi de l’aide doit être libre de tout objectif politique.
Le représentant a ensuite exhorté les parties à privilégier le dialogue et à accepter les bons offices du Secrétaire général pour trouver une issue à la crise. Pour leur part, les pays exerçant une influence sur ces parties doivent jouer un rôle « positif ». Il a aussi appelé le Conseil de sécurité à ouvrir des voies capables de résoudre de manière constructive et pacifique la situation actuelle. Le Conseil doit faire preuve d’unité, a-t-il insisté, soulignant que pour répondre aux défis humanitaires provoqués par les « difficultés » économiques et politiques, le Conseil doit savoir surmonter ses divergences.
M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a estimé que cette crise créée de main d’homme est aggravée par le refus du « régime de Nicolás Maduro » de permettre que l’aide humanitaire entre dans le pays. Il a relevé que le Venezuela est le seul pays au monde où les gens infectés par le VIH/sida sont obligés de mettre fin à leur traitement à cause du manque d’antirétroviraux, selon un rapport de Human Rights Watch. Il a aussi déploré le fait que la crise actuelle ait un impact particulier sur les femmes et les enfants, puisque le trafic des femmes à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé augmente dans toute la région. Pour la Pologne, il revient au régime vénézuélien de reconnaître le problème et de permettre une vaste opération humanitaire dans le pays. De même, a-t-il ajouté, le Conseil de sécurité ne peut rester calme face à une telle crise qui a un effet néfaste sur la paix et la sécurité de la région.
La Pologne, pour sa part, reconnaît l’Assemblée nationale comme le seul pouvoir ayant un mandat démocratique au Venezuela. Le représentant a aussi plaidé pour le respect du mandat et de l’immunité des membres de l’Assemblée nationale, y compris son Président. De plus, la Pologne se range du côté des initiatives de l’Union européenne et du Groupe de Lima pour une sortie de crise.
M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a noté avec regret l’impasse politique et institutionnelle qui prévaut au Venezuela, qui exacerbe une crise humanitaire marquée par la détérioration constante de la situation sanitaire et alimentaire dans le pays, une situation qui affecte en outre le reste de la sous-région. En effet, a-t-il rappelé, la FAO révélait déjà en 2018, qu’environ 12% des Vénézuéliens, soit 3,7 millions de personnes étaient sous alimentées entre 2015 et 2017. « Au total, ce sont sept millions de Vénézuéliens, soit près du quart de la population, qui ont besoin de nourriture et de soins médicaux, dont 3,4 millions ont trouvé refuge dans les pays voisins », a précisé le représentant. Cette situation d’urgence humanitaire appelle de la part du Conseil de sécurité une plus grande implication pour apporter une réponse appropriée aux besoins actuels des millions de personnes en souffrance, a estimé le représentant.
Face à cette situation, le délégué a estimé que l’ONU devrait jouer un rôle de premier plan, en termes de mobilisation de ses agences spécialisées et de coordination de l’assistance de la communauté internationale. Dans cette perspective, il est nécessaire selon la délégation ivoirienne que s’établissent « une étroite collaboration et une synergie d’actions » entre les autorités du Venezuela, les agences spécialisées des Nations Unies et tous les partenaires internationaux. Cela permettrait à son avis de mobiliser les moyens indispensables à la prise en charge des besoins et d’assurer un accès humanitaire sûr et sans entrave aux populations en détresse.
M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) s’est dit confiant qu’il serait possible de faire plus sur le front humanitaire après cette réunion. Évoquant les propos de la Fédération de Russie, il a demandé à M. Lowcock de préciser d’où proviennent les chiffres utilisés par l’ONU. Commentant la référence de la délégation russe à l’épidémie de rougeole dans l’État de New York, il a fait observer que les parents américains qui souhaitent faire vacciner leurs enfants n’ont qu’à se rendre dans une pharmacie pour se procurer un vaccin, ce qui est impossible pour les parents au Venezuela.
Il a appelé le Venezuela à reconnaître l’ampleur de la crise, s’inquiétant par ailleurs de la politisation de la livraison de l’aide humanitaire. Celle-ci ne doit pas être instrumentalisée à des fins politiques, a-t-il demandé. La population ne doit pas être transformée en otage, a-t-il ajouté. M. Heusgen a aussi estimé que l’exode massif des Vénézuéliens et le fardeau que cela fait peser sur les pays voisins, illustrent l’urgence qu’il y a à trouver une solution durable à la crise.
Il a souligné que les racines de la crise sont politiques et que, par conséquent, seule une solution politique permettra de la résoudre. M. Heusgen a appelé dans la foulée les acteurs à faire preuve de retenue, à s’abstenir de tout usage de la force et à respecter les droits de l’homme. Il s’est prononcé en faveur de la tenue d’une élection présidentielle libre, transparente et crédible, « organisée sous Guaidó ».
Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a souligné que le Gouvernement du Venezuela était prêt à acheter des vaccins, mais que l’argent qui était le sien et qui était déposé dans des banques à l’étranger, au Royaume-Uni notamment, lui avait été volé. « Vous créez un problème au lieu de le régler », a-t-il dénoncé.
Réagissant, la représentante du Royaume-Uni a affirmé qu’aucun argent se trouvant dans les banques de son pays n’avait été volé.
M. SAMUEL MONCADA (Venezuela) a souhaité d’abord réagir aux « mensonges du Vice-Président américain ». Il a ainsi relevé que l’Organisation des États américains (OEA) n’avait pas rejeté le représentant du Venezuela. « Elle a plutôt violé sa propre Charte afin d’accréditer non pas le représentant de l’État, mais plutôt un membre de l’Assemblée nationale. » Pour le représentant, c’est ce genre de mensonges qui laisse penser que l’ONU est « un club d’amis des États-Unis ». Il a souligné que les États-Unis avaient menacé le Venezuela de guerre, estimant que le Conseil devrait se saisir de cette question.
Le représentant a ensuite demandé de ne point se tromper de diagnostic si l’on veut trouver le bon médicament à la crise dans son pays. Il a affirmé que cette crise était effectivement créée par des hommes, reprochant ainsi aux membres du Conseil de sécurité d’avoir omis de dire que la situation que connaît son pays est due à un « plan d’étranglement de l’économie nationale » mené par les États-Unis. Le but des États-Unis est, selon lui, d’arriver à l’implosion de l’économie, afin de permettre une intervention militaire étrangère drapée sous le principe de la responsabilité de protéger pour enfin imposer un gouvernement à leur solde. Comme preuves de ces propos, le délégué a demandé de se référer aux dires des autorités américaines elles-mêmes. Ainsi, il a indiqué que le Département d’État avait publiquement noté que la campagne internationale contre le Venezuela portait ses fruits et que l’économie du pays était à l’agonie. De même, selon M. Moncada, le Sénateur de la Floride, M. Marco Rubio, a affirmé que dans les prochaines semaines, le Venezuela serait confronté à des souffrances indicibles. Il a aussi parlé de M. John Bolton, Conseiller à la sécurité des États-Unis, qui évoquait un scénario semblable à celui de la guerre des étoiles, notamment quand le personnage Dark Vador étrangle ses ennemis.
Toutes ces déclarations ont fait dire au représentant vénézuélien qu’il s’agit d’« une destruction délibérée et bien préparée » de l’économie de son pays, déplorant que même les agences onusiennes soient mises à contribution pour isoler le pays du système financier international et des banques. Il a aussi accusé le Représentant spécial des États-Unis pour le Venezuela, M. Elliott Abrams, qui a parlé des pressions de son pays sur les partenaires économiques et financiers du Venezuela. Il a accusé le Trésor américain d’endetter le peuple vénézuélien, alors même que la Banque d’Angleterre a confisqué 1,2 milliard de dollars d’or de son pays sous prétexte d’origine douteuse. Il a affirmé que cet or était pourtant dans les coffres de la Banque depuis 30 ans, avant de conclure que « la crédibilité de la Banque d’Angleterre est désormais réduite à zéro ».
Il y a des vaccins au Venezuela grâce à un partenariat du Gouvernement avec l’Organisation panaméricaine de la santé, a-t-il ensuite affirmé, avant de dire, à l’endroit du Conseil, que « si vous étiez mieux informés, vous sauriez que la situation sanitaire s’est améliorée ». Il a aussi évoqué une rencontre tenue hier entre le Président Maduro et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en vue d’envisager une assistance humanitaire qui soit neutre.
Le représentant a également salué la résistance du peuple vénézuélien et l’unité des forces armées nationales. Ainsi, même si le peuple souffre, ce n’est pas la situation de guerre civile que les détracteurs du pays souhaitaient voir naître au Venezuela. « Nous avons de l’argent, mais le Gouvernement Trump terrorise nos partenaires économiques pour qu’ils ne fassent pas affaire avec nous », a déploré le délégué avant d’égrainer quelques questions posées au Conseil de sécurité. Il a voulu savoir sur quelle base légale les États-Unis et le Royaume-Uni appliquent des sanctions économiques sans autorisation du Conseil de sécurité. Ensuite sur quelle base juridique les États-Unis appliquent-ils des sanctions secondaires à des pays et entités faisant affaire avec le Venezuela? De même, sur quelle base juridique les États-Unis peuvent-ils menacer d’utiliser la force contre le Venezuela? Pourquoi les deux pays précités s’approprient-ils de force les avoirs du pays? Enfin, sur quelle base légale les États-Unis peuvent-ils s’immiscer dans les affaires intérieures du Venezuela? Pour le représentant, il faudrait tout simplement « rendre l’argent volé au peuple vénézuélien » et mettre fin au double blocus économique et financier dont le pays est victime. Il a demandé au Conseil de sécurité de prendre ses responsabilités et de garantir la paix au Venezuela.
La représentante du Royaume-Uni a vivement fustigé les allégations proférées par le Venezuela au sujet de la Banque d’Angleterre. Elle a rappelé que le représentant vénézuélien les avait déjà proférées par le passé, avant d’annoncer qu’elle ferait circuler une fois de plus la lettre qu’elle avait rédigée à l’époque sur cette question. La Banque d’Angleterre est une institution indépendante, a-t-elle insisté.
Le représentant du Pérou a précisé qu’il ne répondait pas au représentant d’un pays, mais à celui d’un gouvernement illégitime. Il a insisté sur le fait que son pays accueille 750 000 Vénézuéliens et a fait observer que le représentant du Venezuela ne parlait jamais de cette situation tragique. « À en croire ses propos, on pourrait penser que tout est normal et que tout le monde se prépare pour le carnaval. » La crise économique est d’origine interne, a-t-il insisté.
À son tour, le représentant du Venezuela a indiqué qu’il distribuerait les preuves de la véracité de ses propos au sujet de la Banque d’Angleterre, qui, a-t-il insisté, n’est pas indépendante mais suit les sanctions imposées par les États-Unis. « Lorsque l’occasion lui est donnée, cette banque saisit des fonds. » « Elle suit cette nouvelle politique qui reconnaît un gouvernement qui ne contrôle même pas une seule rue du Venezuela », a-t-il lancé.
S’adressant ensuite à la délégation du Pérou, le représentant a insisté sur sa propre légitimité à représenter le Venezuela au sein de l’ONU. Il a souligné que les raisons de la « migration » sont économiques, jugeant « ridicule » de parler de « réfugiés ». Au Venezuela, tous ceux qui veulent revenir au pays peuvent revenir et ils sont des milliers à le faire chaque jour, a-t-il affirmé. « Ce ne sont pas des réfugiés, mais des migrants économiques », a-t-il insisté, accusant ensuite le Pérou de chercher à faire des « migrants » vénézuéliens un problème de sécurité, tout en ignorant l’action du Gouvernement Trump qui brandit le spectre d’une invasion à sa frontière avec le Mexique.
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a indiqué qu’il transmettrait par écrit des précisions sur les données utilisées par l’ONU. Il a expliqué que l’action humanitaire de l’ONU se fondait sur toutes les données disponibles permettant d’évaluer les besoins humanitaires. À mesure que la situation évolue, il faut évaluer avec sérieux les besoins, a-t-il expliqué.
Le Représentant spécial conjoint du HCR et de l’OIM pour les réfugiés et les migrants vénézuéliens a insisté sur la légitimité des données sur les réfugiés, ajoutant que si on tenait compte de toutes les vidéos de franchissement aux points de passage transfrontaliers, on dépasserait de loin le chiffre de quatre millions. Mais, a-t-il ajouté, nous avons choisi de ne pas tenir compte des passages irréguliers. Il a ensuite expliqué avoir été invité l’an dernier par le Gouvernement vénézuélien et a indiqué qu’il avait rencontré le Ministre des affaires étrangères. Il a assuré n’avoir jamais donné la moindre indication qu’il ne serait pas disposé à se rendre à Caracas, mais qu’il avait simplement demandé qu’un programme de travail soit préparé, « ce que j’attends toujours », a-t-il précisé.
À son tour, la professeure à la faculté de médecine de l’Université Johns Hopkins a expliqué que les données avaient été compilées sur la base de visites sur le terrain, entres autres. Elle a souligné que la mortalité maternelle et infantile avait augmenté de manière significative avant même l’imposition des sanctions économiques, précisant que ces données avaient été fournies par le Gouvernement vénézuélien lui-même
Reprenant la parole, le représentant du Venezuela a ensuite affirmé que son gouvernement était en possession d’un courrier signé par M. Stein dans lequel ce dernier indiquait qu’il ne pouvait pas se rendre au Venezuela. « Nous avons la preuve », a-t-il dit.