Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour la RCA salue la signature de l’Accord de paix du 6 février, mais avertit que la situation reste grave
Le Représentant spécial du Secrétaire général pour la République centrafricaine a déclaré, ce matin, devant le Conseil de sécurité, que la signature, le 6 février, de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine pourrait marquer un tournant décisif dans l’histoire de ce pays, « même si les dangers demeurent nombreux ». « Il y a aujourd’hui une opportunité réelle de tourner le dos, définitivement, à une histoire douloureuse », a notamment déclaré M. Parfait Onanga-Anyanga, qui intervenait pour la dernière fois devant le Conseil, deux semaines après la signature de l’Accord dans le cadre de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine et sous les auspices de l’Union africaine (UA).
La Ministre des affaires étrangères de la RCA a, elle aussi, qualifié cet Accord de « symbolique » et d’« historique » de par la présence aux pourparlers, à Khartoum, des chefs et leaders des 14 groupes armés, et par la signature de l’accord à Bangui, en terre centrafricaine. Même si un grand pas vers la paix et la réconciliation nationale a été fait, Mme Sylvie Valérie Baïpo-Temon n’en a pas moins estimé que « ce pas reste fébrile car conditionné par la mise en application des engagements des uns et des autres ».
Le Représentant spécial a également avoué avoir des sentiments mitigés, « la satisfaction du devoir accompli mêlée d’une certaine appréhension », avant d’expliquer point par point en quoi cet accord diffère de ceux qui ont été précédemment signés en RCA. Le Gouvernement centrafricain et les groupes armés ont en effet pris des engagements concrets, dont la mise en œuvre sera supervisée par un certain nombre de mécanismes de suivi inclusifs, sur les plans sécuritaire, politique et juridique, tant à l’échelon national que préfectoral et local. Des décrets présidentiels ont déjà été publiés pour créer certains de ces mécanismes.
« Fait peu anodin », a souligné le Représentant spécial, l’Accord du 6 février conforte la vision du Secrétaire général qui promeut « le primat du politique » qui doit sous-tendre toute opération de paix. Il a cependant appelé à demeurer lucide et vigilant « car la situation reste grave », évoquant notamment l’« insupportable sort » des personnes déplacées et des réfugiés ainsi que les scènes de violence « insensée ».
Pour autant, l’importance du résultat obtenu à Bangui, le 6 février dernier, n’a cessé d’être soulignée tout au long de la réunion, notamment par le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, qui y a vu un « exemple parfait » du partenariat entre l’ONU et l’UA et une réussite du multilatéralisme. Alors que les parties intéressées doivent se réunir demain, à New York, pour réfléchir aux moyens de renforcer le soutien à la République centrafricaine, M. Smail Chergui a notamment salué l’engagement des pays de la région, pour que, par exemple, les mesures relatives à la transhumance soient mises en œuvre de manière satisfaisante.
Renchérissant, le Président de la formation RCA de la Commission de consolidation de la paix a appelé le Conseil de sécurité à donner un signal fort pour l’accompagnement de l’Accord, notant que la fenêtre d’opportunité risque de se refermer rapidement, en raison de la proximité des élections présidentielle et législatives, en 2020 et en 2021. M. Omar Hilale a également appelé les partenaires de la RCA à faire preuve de flexibilité dans l’exécution de leurs programmes, avertissant que sans un décaissement rapide, la mise en œuvre de l’Accord, notamment son volet économique, pourrait être compromise.
Mais pour l’Union européenne (UE), dont la mission militaire de formation dans le pays -l’EUTM RCA- joue un rôle de chef de file sur le plan de la réforme du secteur de la défense, les véritables défis à l’Accord de paix sont d’ordre politique, « et pas nécessairement une question de budget supplémentaire ». La délégation de l’Union européenne a ainsi recommandé en priorité d’établir les mécanismes de suivi de l’Accord, d’informer les populations au sujet de celui-ci, et de rendre le Gouvernement plus inclusif. « Collectivement, nous devons nous impliquer davantage, pas moins », a aussi demandé l’UE, appuyée en ce sens par la France.
La Côte d’Ivoire et l’Afrique du Sud ont plus particulièrement appelé à accélérer la réalisation du programme de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement (DDRR), y voyant un élément clef de sortie de crise. L’utilité des unités mixtes d’intervention rapide en tant que mesures temporaires de rétablissement de la confiance, notamment dans les couloirs de transhumance, a aussi été mentionnée à plusieurs reprises.
À l’instar de nombreuses délégations, les États-Unis ont souligné l’importance des éléments de langage, dans l’Accord, qui se rapportent à la justice et à l’établissement des responsabilités, saluant notamment l’engagement des parties signataires de mettre sur pied une commission vérité, justice, réparation et réconciliation.
Ils se sont également dits extrêmement « perturbés » par les allégations d’actes de torture qui auraient été commis par des troupes centrafricaines et leurs formateurs russes à Bambari. La délégation russe a fustigé ces « infox », avant que l’Allemagne ne regrette de n’avoir pu obtenir plus d’informations sur les activités du Groupe Wagner en RCA.
LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE (S/2019/147 )
Exposés
Venu présenter pour la dernière fois le rapport du Secrétaire général sur la République centrafricaine, M. PARFAIT ONANGA-ANYANGA, Représentant spécial du Secrétaire général pour la République centrafricaine, a avoué avoir des sentiments mitigés, « la satisfaction du devoir accompli mêlée d’une certaine appréhension ». Il est revenu sur la signature, le 6 février à Bangui, de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine, « l’aboutissement d’un long processus ». Cet accord, a-t-il affirmé, pourrait marquer un tournant décisif dans l’histoire de ce pays, même si les dangers demeurent nombreux. Il a ensuite indiqué que cet accord diffère sur plusieurs points des précédents accords signés en République centrafricaine (RCA), expliquant notamment qu’il réaffirme d’emblée l’attachement des parties signataires à des principes fondamentaux, ceux issus notamment de la Constitution du pays, et il a été voulu et signé par un gouvernement légitime. Ensuite, parce que le Gouvernement centrafricain et les groupes armés ont pris des engagements concrets, prenant à témoin leurs concitoyens, la région et le monde.
En outre, a-t-il poursuivi, la mise en œuvre desdits engagements sera supervisée par un certain nombre de mécanismes de suivi inclusifs, sur les plans sécuritaire, politique, juridique, tant à l’échelon national, préfectoral, que local. Des décrets présidentiels portant création de certains de ces mécanismes ont déjà été publiés. Cet accord reflète aussi l’engagement de l’Union africaine (UA) de faire taire les armes sur le continent africain.
Enfin, « fait peu anodin », a souligné le Représentant spécial, l’Accord du 6 février conforte la vision du Secrétaire général qui promeut « le primat du politique » qui doit sous-tendre toute opération de paix. Dans cet esprit, l’Accord du 6 février exprime clairement la volonté des Centrafricaines et des Centrafricains de renouveler leur contrat social, de réaffirmer leur profonde aspiration à vivre ensemble et en paix dans leur riche diversité, à faire baisser les tensions et à créer les conditions d’un relèvement de leur pays sur des bases saines.
Poursuivant, M. Onanga-Anyanga a estimé que le succès de l’Accord politique du 6 février est « d’abord et avant tout » l’expression d’une aspiration profonde de la nation centrafricaine de reprendre en main son destin, dans l’équité, la justice, la réconciliation et la réparation due aux victimes. Il a aussi fait observer que ce succès est également l’aboutissement d’un long processus porté par l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine et soutenu par les Nations Unies.
Le Représentant spécial a ensuite appelé à demeurer lucide et vigilant « car la situation reste grave ». Il a notamment évoqué l’« insupportable sort » des personnes déplacées et des réfugiés ainsi que les scènes de violence insensée et les nombreuses victimes. « Nous savons tous, et les Centrafricains sans doute les premiers, qu’à travers la signature de cet accord, le pays n’a fait que franchir une étape. Une étape nécessaire et décisive, certes, mais une étape seulement », a-t-il indiqué.
Le Représentant spécial a averti que le plus dur reste à venir et que le vrai test sera dans la mise en œuvre intégrale et de bonne foi de l’Accord. Il a appelé toutes les parties à honorer scrupuleusement tous les engagements qu’elles ont pris au titre de l’Accord, les exhortant en outre à ne pas trahir leur parole, ni la confiance qu’ont placée en elles les populations centrafricaines. « Il y a aujourd’hui une opportunité réelle de tourner le dos, définitivement, à une histoire douloureuse », a-t-il lancé, avant d’exhorter les parties à toujours privilégier le dialogue pour pérenniser le nouveau consensus politique et social promu par l’Accord du 6 février.
« Ce qui est en jeu, c’est bien le devenir de toute la nation centrafricaine, qui est en droit de voir en cet accord l’aube d’une nouvelle ère », a-t-il déclaré. M. Onanga-Anyanga a également souligné que le rôle des garants, surtout des pays voisins et de la région, et celui des facilitateurs seront déterminants pour permettre la pleine réalisation de cet accord.
Le Représentant spécial a également salué l’initiative conjointe de l’ONU et de l’Union africaine de tenir, dès demain, une réunion du Groupe international de soutien à la République centrafricaine (GIS-RCA), « car le temps presse et il nous faudra rester mobilisés, agir vite et de façon concertée ». Il a aussi appelé le Conseil de sécurité à apporter son « indispensable appui politique » à l’Accord.
M. Onanga-Anyanga a ensuite rendu hommage aux Casques bleus qui ont perdu la vie en aidant et en protégeant la population centrafricaine. Il a invité cette population à transformer ses griefs en une puissante force permettant d’espérer un avenir meilleur. Enfin, le Représentant spécial a souligné le besoin crucial d’appui politique unifié de la part du Conseil de sécurité, des pays de la région et de la communauté internationale, pour assurer la mise en œuvre réussie de l’Accord du 6 février.
M. SMAIL CHERGUI, Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, s’est félicité de l’importance du résultat obtenu à Bangui, le 6 février dernier, exemple parfait, selon lui, du partenariat entre l’ONU et l’UA. Il y avait un terrain favorable pour réunir tous les protagonistes de la crise, a-t-il expliqué. « Du 24 janvier au 5 février, nous nous sommes réunis à Khartoum, en présence des 14 groupes armés et du Gouvernement centrafricain pour discuter des contentieux. » Il a notamment mentionné la question du partage équitable des ressources naturelles du pays, certains éléments à la table des négociations faisant état du fait qu’« ils buvaient la même eau que les animaux » dans certaines régions.
M. Chergui a indiqué qu’il avait été décidé de mettre en place un processus de suivi robuste pour que chacun puisse mettre en œuvre les obligations qui sont les siennes dans le cadre de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine. Dans cet accord, figurent aussi des dispositions à caractère sécuritaire, pour lesquelles « nous demandons la modification du mandat de la MINUSCA en conséquence, pour éviter les incidents inutiles sur le terrain ». Le Commissaire a salué l’engagement des pays de la région, qui explique en quoi l’accord actuel se distingue des précédents, pour que par exemple les mesures relatives à la transhumance soient mises en œuvre de manière satisfaisante. « Demain, ici même à New York, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix et moi-même, a déclaré M. Chergui, avons décidé de réunir toutes les parties intéressées pour réfléchir aux moyens de renforcer le soutien à la République centrafricaine. »
Le représentant de l’Union européenne (UE), M. KOEN VERVAEKE, Directeur principal pour l’Afrique, Service européen pour l’action extérieure, a déclaré que l’Accord de paix signé le 6 février, à Bangui, représente une chance véritable de sortir la RCA de la crise. Cet accord, a-t-il souligné, est fondé sur la feuille de route de Libreville. Il suit les recommandations du Forum de Bangui sur la réconciliation nationale et reconnaît les institutions et les autorités légitimes du pays. En outre, la justice et la lutte contre l’impunité, considérées comme des moyens de réaliser la réconciliation nationale, figurent au centre de cet Accord qui prévoit aussi un mécanisme de suivi et des sanctions en cas de violation.
Il a parlé de l’appui fourni par l’Union européenne au processus de paix, estimant que celui-ci sera capital en ce qu’il permettra d’établir une base solide pour faire avancer le processus de réconciliation et appuyer la justice transitionnelle. Toutefois, le représentant a prévenu que l’Accord de paix ne doit pas être une raison de prendre du recul. « Collectivement, nous devons nous impliquer davantage, pas moins », a-t-il affirmé, rappelant la responsabilité des partenaires de la RCA à promouvoir la réconciliation nationale et à réaliser une paix durable et stable.
Passant à la mise en œuvre du l’Accord, « qui est avant tout la responsabilité des signataires », M. Vervaeke a indiqué que la première des priorités sera d’établir des mécanismes de suivi. Il s’est félicité du fait que le Président Touadéra a déjà signé des décrets pour établir des comités exécutifs et consultatifs. Il a aussi insisté sur la priorité urgente d’informer les populations au sujet de cet accord.
Le représentant a également appelé à rendre le Gouvernement plus inclusif, mais sans que cela se fasse au détriment de l’efficacité, de la compétence et de sa capacité à honorer ses engagements envers le peuple. En ce qui concerne l’Assemblée nationale et la société civile, elles auront également des rôles clefs à jouer, de même que la justice et la réconciliation. Sur ce dernier point, il a appelé à travailler rapidement, notamment dans le cadre de la commission vérité, justice, réparation et réconciliation.
Sur le plan sécuritaire, M. Vervaeke a parlé de l’utilité des unités mixtes en tant que mesures temporaires de rétablissement de la confiance, notant qu’elles sont dotées de mandats clairs et d’une zone d’opération clairement définie sur le plan géographique, comme les couloirs de transhumance. Pour autant, a-t-il poursuivi, l’Accord de paix ne doit pas occulter la situation sur le terrain, marquée par les faiblesses structurelles de l’État, la fragilité et l’instabilité, ainsi qu’une crise humanitaire prolongée.
Le représentant a ensuite indiqué que les partenaires de la RCA se réuniront demain, à New York. Il a aussi fait savoir que la mission militaire de formation de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM RCA) continue de jouer un rôle de chef de file sur le plan de la réforme du secteur de la défense. La mission est également en train d’être élargie pour inclure une composante civile et améliorer l’interopérabilité avec les Forces de sécurité intérieure.
De plus, plus de 240 millions d’euros ont été engagés dans le cadre du Fonds fiduciaire Bêkou de l’Union européenne qui appuie des programmes de services sociaux et d’infrastructure, notamment dans les zones vulnérables. Évoquant le rôle des pays voisins, M. Vervaeke a aussi estimé que le rétablissement des commissions bilatérales conjointes permettrait de contribuer à la sécurisation d’un cadre dans les domaines de la transhumance, de la sécurité et des questions transfrontalières. Il a en outre affirmé que les véritables défis à l’Accord de paix sont d’ordre politique, « et pas nécessairement une question de budget supplémentaire ».
M. OMAR HILALE, Président de la formation RCA de la Commission de consolidation de la paix, a estimé que la visite qu’il a effectuée à Bangui, du 13 au 15 février dernier, se démarque des visites antérieures, compte tenu de la présence des Sous-Secrétaires généraux des Nations Unies pour l’Afrique et la consolidation de la paix ainsi des représentants de la formation, à savoir la Chine, la Fédération de Russie, la France, l’Italie et la République de Corée. La visite, a-t-il rappelé, s’est déroulée au lendemain de la signature, le 6 février à Bangui, de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation entre le Gouvernement centrafricain et les 14 groupes armés. Le Président centrafricain, a rapporté M. Hilale, a exprimé son souhait de voir le Conseil de sécurité ajuster le mandat de la MINUSCA afin de permettre un soutien adéquat au déploiement des « patrouilles mixtes ». M. Hilale a dit avoir remis au Président une invitation au segment humanitaire du Conseil économique et social (ECOSOC) qui se tiendra en juin à Genève. Ce sera l’occasion, s’est-il expliqué, de plaider la cause de la RCA.
Le Président de la formation a ensuite fait part de ses six principales observations. La RCA, a-t-il commencé, a besoin plus que jamais du soutien du Conseil de sécurité qui doit donner un signal fort pour l’accompagnement de l’Accord d’autant que la fenêtre d’opportunité risque de se refermer rapidement, en raison de la proximité des élections présidentielle et législatives, en 2020 et en 2021. La MINUSCA, a-t-il ajouté, doit pouvoir communiquer rapidement sur les actions qu’elle compte entreprendre pour soutenir l’Accord. La communication sur le contenu et les défis de l’Accord est très importante, a-t-il insisté. Une première mesure serait de le traduire en sango, la langue nationale, afin d’en faciliter l’appropriation par la population. Les partenaires de la RCA, a-t-il poursuivi, doivent faire preuve de flexibilité dans l’exécution de leurs programmes car sans un décaissement rapide, la mise en œuvre de l’Accord, notamment son volet économique, pourrait être compromise. Quant aux pays voisins, ils sont appelés à accompagner la RCA dans cette mise en œuvre. Comme la MINUSCA n’a pas vocation à rester indéfiniment en RCA, a-t-il conclu, il est permis d’envisager qu’une contribution calibrée à la mise en œuvre de l’Accord serait de nature à la rapprocher du succès et, partant, conforter la stratégie de sortie.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO, (Côte d’Ivoire), Président du Comité du Conseil de sécurité créé en vertu de la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine, a indiqué que depuis son dernier exposé, en octobre 2018, son Comité a tenu quatre réunions dans le but de faire avancer l’application des sanctions et de collaborer plus étroitement avec les principaux partenaires et parties prenantes. Il a aussi parlé de la visite qu’il a effectuée en République centrafricaine du 2 au 5 octobre, qui lui a permis de poursuivre les discussions avec les autorités nationales sur bon nombre de questions importantes. Une des principales préoccupations du Gouvernement centrafricain, a-t-il indiqué, demeure l’embargo sur les armes dont il exige la levée. Le Gouvernement demande que l’importation d’armements et de matériels connexes ne soit plus soumise à l’aval du Comité.
Le 21 janvier, le Président a dit avoir convoqué une réunion pour discuter des préoccupations relatives à l’embargo. Les représentants du Gouvernement ont insisté, à cette occasion, sur les difficultés que cet embargo créait pour le pays, souligné les progrès accomplis dans la gestion des armes et des minutions et de nouveau demandé que leur gouvernement soit exempté de l’embargo afin de pouvoir protéger la population. Le 31 janvier, a rappelé le Président du Comité, le Conseil a adopté la résolution 2454 dans laquelle il exprime son intention de réexaminer, avant le 30 septembre 2019, les mesures d’embargo sur les armes, à la lumière des objectifs de référence à définir et des évaluations qui seront menées. Il a annoncé son intention de se rendre en République centrafricaine cette année afin d’engager directement un dialogue « franc et ouvert », de communiquer sur l’importance de la pleine application des sanctions, de souligner que tout régime de sanctions devrait être réexaminé et adapté périodiquement, en fonction de la situation sur le terrain, et de définir les procédures d’exemption applicables.
Déclarations
M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a salué la signature de l’Accord politique pour la paix entre le Gouvernement centrafricain et les 14 groupes armés qui a eu lieu le 6 février dernier, après deux semaines de négociations à Khartoum conduites dans le cadre de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine et sous les auspices de l’Union africaine. Tous les efforts doivent maintenant se concentrer sur la mise en œuvre de cet accord, a souhaité le représentant en énonçant trois priorités immédiates. Le premier test sera l’arrêt des violences commises par des groupes armés contre les populations civiles, les personnels humanitaires et la MINUSCA. « Les exactions commises par ces groupes depuis le mois d’octobre dernier et qui ont fait plus de 1 000 morts à Alindao, Bakouma ou encore Ippy, sont inacceptables. Les attaques menées contre les Forces de défense et de sécurité centrafricaines et la MINUSCA à Bambari, au cours desquelles les forces françaises ont été amenées à réaliser une démonstration de force à la demande de l’ONU, sont tout autant injustifiables », a déclaré M. Delattre.
Les groupes armés doivent donc déposer les armes et savoir qu’ils devront répondre des violences, y compris sexuelles, devant la justice, notamment la Cour pénale spéciale. Le représentant a également souhaité que la mise en œuvre de l’Accord permette de répondre aux aspirations exprimées par le peuple centrafricain à l’occasion du Forum de Bangui de mai 2015, en particulier en ce qui concerne les exigences de justice, d’inclusivité et de réconciliation nationale. Enfin, la France a estimé que le rôle de la communauté internationale pour soutenir la mise en œuvre de cet accord sera décisif, que ce soit sur le plan politique ou sur le plan financier et technique. La délégation a, en conclusion, réitéré le soutien de son gouvernement à la MINUSCA.
M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a salué la signature de l’Accord de paix et fait observer que les conversations d’aujourd’hui auraient été inimaginables il y a encore un an. Cet accord trouve son fondement dans la confiance entre parties signataires, mais surtout dans la confiance que le peuple centrafricain accorde à ses dirigeants pour mettre un terme aux cycles de violence abominables que connaît le pays depuis trop longtemps, a-t-il dit. Indiquant que cette confiance est des plus limitées, puisque, par le passé, des accords de paix sont restés lettre morte, il a appelé les signataires à mettre ce nouvel accord pleinement en œuvre. Le délégué a souligné l’importance des éléments de langage, dans l’Accord, qui se rapportent à la justice et à l’établissement des responsabilités, car ces dispositions sont cruciales pour l’instauration d’une paix durable dans le pays. Il a ainsi salué l’engagement des parties signataires de mettre sur pied une commission vérité, justice, réparation et réconciliation.
M. Cohen s’est ensuite dit extrêmement « perturbé » par les allégations d’actes de torture commis par des troupes centrafricaines et leurs formateurs russes à Bambari. « C’est absolument inacceptable. » Le délégué a exhorté les autorités centrafricaines à faire la lumière sur ces allégations et à punir les responsables, rappelant que son pays avait déjà lancé un appel similaire après le meurtre de trois journalistes russes en août 2018. Tout appui international à la République centrafricaine doit être transparent, dûment coordonné et conforme aux normes les plus élevées régissant les activités militaires, ainsi qu’à la loi centrafricaine, a rappelé M. Cohen.
M. MA ZHAOXU (Chine) s’est félicité de la signature de l’Accord de paix, résultat d’une médiation impliquant plusieurs parties prenantes. Il a toutefois alerté de la situation humanitaire grave et d’autres difficultés qui pourraient représenter des obstacles à la mise en œuvre dudit accord. Il a appelé à mettre en place les mécanismes de suivi dès que possible, insistant par ailleurs sur l’importance de la réforme du secteur de la sécurité et du programme DDRR. Il s’est dit confiant en la capacité de la MINUSCA à s’acquitter de son mandat.
Le représentant a ensuite souligné que la paix en RCA ne sera pas possible sans un soutien continu de l’ONU et des pays de la région. Il a appelé le Conseil de sécurité à rester uni et à fournir les conditions nécessaires pour que la situation en RCA puisse s’améliorer. L’imposition de sanctions, a-t-il rappelé, a pour but de ramener la stabilité dans le pays. Dès que la situation se sera améliorée, il faudra adapter les sanctions, a conclu le délégué.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a estimé que la signature, le 6 février à Bangui, d’un accord de paix global, est une réelle source d’espoir dans le règlement durable de la crise dans ce pays. La Côte d’Ivoire appelle toutes les parties à honorer leurs engagements dans la mise en œuvre effective des dispositions de cet accord, en vue d’une paix et d’une stabilité durables en RCA. Et l’esprit de transparence et d’inclusivité qui a prévalu lors des négociations de cet accord devra être perpétué au cours de sa mise en œuvre, a ajouté le représentant. Il a prôné, à cet égard, une véritable appropriation dudit accord par toutes les composantes de la société centrafricaine.
La Côte d’Ivoire, a-t-il poursuivi, appelle les autorités centrafricaines à accélérer la réalisation du programme de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement (DDRR) qui demeure un élément clef de sortie de crise. Enfin, le représentant a exhorté la communauté internationale à continuer d’appuyer le processus de restauration complète de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire centrafricain.
M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a salué la signature du nouvel Accord de paix, le 6 février dernier, dans le cadre de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine. De son point de vue, la paix et la stabilité dans la sous-région sont cruciales si le continent veut réaliser l’Afrique « que nous voulons » prévue par l’Agenda 2063. Le représentant s’est ensuite dit préoccupé par la crise humanitaire aiguë en RCA, où plus de 25% de la population est déplacée avec des millions de personnes qui nécessitent une assistance. L’Afrique du Sud a ensuite souligné l’importance de mettre en œuvre le programme de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement ainsi que la réforme du secteur de la sécurité, à laquelle la MINUSCA devra prêter son concours.
La délégation a en même temps exprimé son inquiétude devant les violences ciblées commises par des groupes armés et des groupes criminels contre des civils vulnérables en République centrafricaine. « L’ampleur des défis qui se posent dans le pays souligne la nécessité pour ce Conseil de veiller à ce qu’un financement adéquat prélevé sur le budget de l’ONU soit alloué à la Mission pour permettre à celle-ci de s’acquitter pleinement de son mandat », a ajouté la délégation.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué la signature de l’Accord de paix, à la suite du dialogue lancé à Khartoum en janvier, y voyant la preuve de la détermination des Centrafricains à mettre fin à plus de cinq années de conflit. Il a toutefois averti que sa bonne mise en œuvre dépend notamment de l’amélioration de la situation sécuritaire et humanitaire du pays. Il a appelé à accélérer le programme désarmement, démobilisation, rapatriement et réintégration (DDRR), à établir des brigades mixtes et à réintégrer d’anciens éléments armés dans les forces nationales.
Le représentant a aussi souligné la nécessité de rendre la justice pour les crimes commis et l’importance de la réconciliation nationale, insistant notamment sur le lancement de travaux de la commission Vérité et réconciliation. Celle-ci, a-t-il précisé, doit se pencher sur la question des enfants soldats et des violences sexuelles. Le représentant a par ailleurs appelé le Gouvernement à lancer un processus progressif de décentralisation afin d’appuyer le développement du pays. Enfin, il a appelé la communauté internationale à maintenir son engagement à soutenir la RCA.
M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a invité à saisir la chance qu’offre l’Accord de paix du 6 février. Il a appelé l’Union africaine, l’ONU et les partenaires régionaux et internationaux à poursuivre leur soutien à la RCA, notamment dans le cadre du comité exécutif de suivi créé par ledit accord. L’Accord du 6 février sera vraiment historique à condition que toutes les parties s’investissent « sincèrement, entièrement et sans délai » dans sa mise en œuvre, a souligné le représentant, notant que le pays devra se doter d’une administration « inclusive », ainsi que de forces de défense et de sécurité « qui le sont tout autant ». La RCA devra aussi évoluer vers davantage de décentralisation, a-t-il ajouté. Le représentant a aussi insisté sur l’importance de la lutte contre l’impunité et a espéré que le Cour pénale spéciale serait bientôt en mesure de commencer ses travaux.
Le représentant a ensuite appelé la MINUSCA à continuer, dans cette phase précoce de mise en œuvre de l’Accord de paix, à exécuter pleinement les tâches de son mandat, notamment en protégeant les civils et en assurant des conditions favorables à l’acheminement de l’aide humanitaire. Appuyée par la mission de formation de l’Union européenne, la MINUSCA doit aussi continuer à accompagner la réforme du secteur de la sécurité, l’extension de l’autorité de l’État, et le programme de DDRR « qui doivent à présent s’accélérer ».
M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a salué l’accord conclu par le Gouvernement de la République centrafricaine et les groupes armés le 6 février, un accord dont il a demandé la mise en œuvre par les parties au conflit, dans la transparence et avec la participation de la société civile, des jeunes et des femmes. Il s’est également réjoui des préparatifs des élections prévues pour 2020-2021, pour lesquelles il a demandé le concours de la MINUSCA et de la communauté internationale sur les plans logistique et financier. Après avoir demandé aux groupes armés opérant en RCA de renoncer à toute forme de violence et de déposer les armes, il a apporté son soutien au programme national de DDRR lancé par le Gouvernement.
Par ailleurs, alors que les groupes armés continuent de tirer des revenus conséquents de l’exploitation des ressources naturelles, en particulier l’or et les diamants, M. Singer Weisinger a considéré que le programme de désarmement devrait être épaulé par un contrôle renforcé des frontières, afin d’éviter la fuite de minerais à l’étranger, et par le respect du Système de certification des diamants bruts du Processus de Kimberley. Condamnant enfin les violations des droits de l’homme commises sur le territoire centrafricain par les groupes armés, le représentant a estimé que la communauté internationale devrait également soutenir Bangui dans la consolidation de son appareil judiciaire pour lui permettre de poursuivre la lutte contre l’impunité, indépendamment des activités menées par la Cour pénale spéciale.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a salué la signature de l’Accord de paix, signé sous les auspices de l’Union africaine, et a espéré qu’il permettrait de tourner la page des conflits armés. Il s’est aussi félicité des dispositifs visant à créer un mécanisme de suivi. Il a salué les « vents favorables » qui soufflent sur l’ensemble du continent africain, citant notamment l’évolution de la situation dans la Corne de l’Afrique, en République démocratique du Congo ou encore dans le nord de la Libye. Il a espéré que ces efforts perdureraient jusqu’à l’établissement d’une paix pérenne à l’échelle du continent.
Le représentant a noté que des défis de taille doivent cependant être surmontés en RCA, s’inquiétant notamment de la situation sécuritaire et des propos belliqueux de différents groupes armés extrémistes et de leurs attaques contre les Casques bleus ou le personnel humanitaire. Il a aussi insisté sur l’importance, pour le Gouvernement, de combattre l’impunité. Enfin, le représentant s’est soucié de la crise humanitaire qui sévit dans le pays, notant que 2,9 millions de personnes ont actuellement besoin d’aide, dont la moitié sont des enfants.
Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué l’Accord de paix en souhaitant qu’il facilite le processus de paix en RCA et conduise à une stabilité durable dans le pays. Elle a appelé les signataires à respecter leurs engagements et à faire en sorte que la mise en œuvre de l’Accord se fasse dans le respect des aspirations du peuple. De ce fait, les élections prévues en 2020 et 2021 seront l’occasion de vérifier les engagements pris, a estimé la délégation, avant de souligner que le processus de réconciliation doit aller de pair avec l’extension de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du pays. Une stabilité durable, a-t-elle ajouté, doit s’appuyer sur une plus grande présence des institutions étatiques au-delà de Bangui.
Par ailleurs, la délégation a rappelé que la lutte contre l’impunité devait passer par la justice transitionnelle, afin de favoriser la réconciliation nationale. Si les partenaires internationaux ont été décisifs pour parvenir à l’Accord de paix, la Pologne a également rendu hommage aux voisins de la RCA qui sont confrontés à des défis transfrontaliers inhérents à la crise centrafricaine, notamment le trafic d’armes et de ressources naturelles -dont l’or et le diamant-, le braconnage ou encore les migrations irrégulières, autant de défis qui ont des conséquences importantes sur toute la région.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a estimé que la tenue à Khartoum, sous les auspices de l’Union africaine, des pourparlers directs entre les groupes armés et le Gouvernement centrafricain, le 6 février, a constitué un évènement fondamental dans l’histoire de ce pays. Le représentant a déclaré que son pays continuerait de fournir une aide à la RCA pour la réforme du secteur de la sécurité avant de rendre hommage aux Casques bleus qui ont donné leur vie pour le pays. Il a estimé que le Conseil de sécurité devait soutenir les accords précédemment conclus avec l’Union africaine et d’autres pays africains. La voie vers la réconciliation nationale passera par une coopération constructive avec tous les partenaires internationaux, a-t-il avancé. Aussi s’est-il senti contraint de réagir à des propos qu’aurait tenus le représentant des États-Unis.
Tout d’abord, s’agissant des journalistes russes morts en RCA, il a affirmé qu’ils avaient été envoyés dans ce pays sans la protection nécessaire et assuré que la Russie n’avait pas été informée de leur départ pour la RCA. « En coopération avec les autorités centrafricaines, nous continuons de mener une enquête dont les conclusions seront rendues publiques », a indiqué le représentant. Par ailleurs, le 12 février, le siège de la RFI à Bangui s’est livré, d’après M. Polyanskiy, à une « interprétation déformée » d’un rapport de l’ONU selon lequel des mercenaires russes se livreraient à des activités illicites, notamment de la « traite », des informations dont il a déclaré qu’elles avaient été discréditées depuis. Le représentant a fustigé les « insinuations » et « infox » disséminées au Conseil de sécurité par ses « collègues occidentaux ».
M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a vu dans la signature de l’Accord de paix une réussite du multilatéralisme, citant notamment l’implication de l’Union européenne et des pays de la région. Il a souligné qu’une mise en œuvre « intégrale et sincère » dudit accord s’impose à présent, citant notamment l’importance de mener des patrouilles mixtes et de mettre un terme au recrutement d’enfants soldats. Il a aussi appelé à élaborer un processus de suivi robuste et sans exclusive, insistant notamment sur le rôle des femmes et de la société civile.
Le représentant a par ailleurs noté que de nombreuses rumeurs courent dans le pays, d’où l’importance de bien communiquer sur l’Accord. Il a aussi insisté sur l’importance de la lutte contre l’impunité et sur la nécessité d’établir, à cette fin, des cours pénales spéciales. Il a ensuite salué le sacrifice des Casques bleus de la MINUSCA, déplorant par ailleurs les nombreuses victimes civiles, notamment à Batangafo. Il a d’ailleurs insisté sur le mandat de protection des civils de la Mission. Évoquant par ailleurs l’intervention de la Fédération de Russie, le représentant allemand a indiqué qu’il aurait aimé en apprendre davantage sur les activités des mercenaires russes du Groupe Wagner qui opèrent en RCA.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a plaidé pour la mise en œuvre d’un mécanisme de suivi de l’application du nouvel accord de paix signé à Bangui. Il a mis l’accent sur la situation humanitaire dans le pays, exhortant les États à poursuivre leur soutien et à respecter leurs engagements pris envers la RCA. Le représentant a salué le succès du programme de DDRR, notamment le désarmement de 137 combattants et la séparation de 923 enfants des groupes armés.
L’Indonésie estime également que le rôle de la MINUSCA de formation des Forces armées centrafricaines est crucial dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité. Selon la délégation, le rôle de la Mission s’étend également dans les domaines de la justice et de l’état de droit, à travers notamment un soutien technique aux autorités locales en matière d’enquête. M. Djani a enfin appelé à optimiser le travail de la Mission, notamment par le biais de formations et par la mise à disposition d’équipements appropriés. Il a également souligné la responsabilité de la Mission, qui est « le visage de l’ONU sur le terrain ».
M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) s’est dit encouragé par les résultats tangibles obtenus sous les auspices de l’Union africaine, lors des pourparlers de Khartoum entre le Gouvernement centrafricain et les groupes armés. Tout en soulignant l’importance de la mise en œuvre de l’Accord de paix, le représentant a estimé que celle-ci ne devrait toutefois pas se faire au détriment de la confiance. Il s’est ensuite déclaré préoccupé par les violences commises récemment à travers le pays et par la présence en République centrafricaine de « formateurs » russes, accusant Moscou de déstabilisation sur plusieurs théâtres de conflit, y compris en Crimée. L’embargo sur les armes actuellement en vigueur sur le territoire centrafricain continuera d’être un outil important pour empêcher les « saboteurs de la paix » de remettre en cause la viabilité de l’Accord du 6 février, a ajouté la délégation britannique.
Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a rendu un hommage soutenu au Représentant spécial pour son engagement sans faille en faveur de la paix en RCA. Elle s’est félicitée de la signature, le 6 février, de l’Accord de paix, y voyant un exemple d’excellente coopération entre l’Union africaine et l’ONU, et saluant un processus qui donne une lueur d’espoir aux Centrafricains. La représentante a insisté sur la responsabilité principale qui revient aux signataires pour assurer son application, les appelants à respecter les délais du calendrier de mise en œuvre et à cesser tout acte de violence, notamment envers les populations civiles. Elle a aussi parlé de l’importance du pardon et de la réconciliation nationale, saluant l’établissement de la commission vérité, justice, réparation et réconciliation et le lancement du processus de DDRR en décembre 2018. Elle a aussi insisté sur l’importance du retour des communautés musulmanes contraintes de fuir en 2017.
La représentante a relevé que les autorités entendent mettre en place un système pour assurer la bonne gestion de la transhumance, ainsi que les projets d’établissement, à cette fin, d’unités mixtes pour une période initiale de 24 mois. Elle s’est aussi préoccupée des risques et besoins de protection des femmes et des jeunes filles. En outre, elle a insisté sur le rôle « fondamental » de la communauté internationale, à commencer par l’ONU et les organisations sous-régionales. Évoquant la tenue prochaine d’élections en RCA, elle a espéré que la région de l’Afrique centrale pourrait enfin réaliser son plein potentiel.
Mme SYLVIE VALÉRIE BAÏPO-TEMON, Ministre des affaires étrangères de la République centrafricaine, a déclaré que l’Accord de paix, entre les autorités centrafricaines et 14 groupes armés, a vu le jour après avoir parcouru ensemble un long chemin au nom de la paix. Elle a remercié un ensemble d’acteurs qui ont contribué à ce résultat, mentionnant notamment le Président Touadéra « pour sa ferme volonté à ne recourir qu’au dialogue comme solution de résolution de la crise centrafricaine ». La Ministre a qualifié cet accord de paix de « symbolique » et d’« historique » du fait de la présence aux pourparlers, à Khartoum, des chefs et leaders des 14 groupes armés, et de la signature de l’accord à Bangui, en terre centrafricaine. Même si un grand pas vers la paix et la réconciliation nationale a été fait, elle a estimé que « ce pas reste fébrile car conditionné par la mise en application des engagements des uns et des autres ».
Mme Baïpo-Temon a ensuite évoqué les progrès réalisés par le Gouvernement, avec le soutien de la MINUSCA et de l’Union européenne dans le cadre de l’extension de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire national. Ainsi, elle a cité le redéploiement des préfets et sous-préfets dans les préfectures; la mise en œuvre de réformes dans les secteurs de la sécurité et de la défense nationale; la formation de 500 policiers et gendarmes; ou encore le lancement par le Président du pays du programme de DDRR. La Ministre a souligné que la lutte contre l’insécurité est un défi permanent, « notre défi permanent », a-t-elle insisté en notant que cela nécessite plus d’efficacité et de mutualisation d’efforts de la part de son gouvernement. Elle a ajouté que « pour la République centrafricaine, l’objectif est la restauration d’un État de droit ».
En outre, la RCA a pris acte du calendrier se trouvant dans la dernière résolution du Conseil de sécurité renouvelant le régime de sanctions, notamment l’exigence de la publication, fin avril prochain, d’une feuille de route qui ouvrira la voie, au regard des efforts consentis, à un assouplissement de l’embargo sur les armes. La Ministre des affaires étrangères a tenu à rappeler que le régime de sanctions, avec l’embargo sur les armes et le Processus de Kimberley, ne doivent ni limiter ni restreindre les efforts et l’élan entrepris par la RCA dans sa quête de la paix, la restauration de l’autotrié de l’État sur toute l’étendue du territoire et son développement économique. Elle a rappelé que « comme tous les États, l’État centrafricain a pour mission et devoir la protection de sa population et de son territoire, ainsi que l’assurance du bien-être social de sa population ». Enfin, Mme Baïpo-Temon a rendu hommage à M. Parfait Onanga-Anyanga, qui quitte le pays après « plus de trois ans de travail bien accompli », lui qui aura été « l’un des artisans de l’Accord de paix ». Elle n’a pas manqué de souhaiter la bienvenue à M. Mankeur Ndiaye, le nouveau Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en République centrafricaine et Chef de la MINUSCA.