La Troisième Commission confrontée aux préoccupations de certains États sur le recul des droits des femmes
La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a entamé, aujourd’hui, l’examen de la question de la promotion de la femme, l’occasion pour plusieurs délégations d’exprimer leurs vives préoccupations à la perspective d’un recul des acquis obtenus par les femmes, parfois « même au sein des Nations Unies ». L’émergence de nouvelles formes de violence sexiste a également suscité de nombreuses inquiétudes.
Relevant la tendance, notamment dans les enceintes internationales, d’un nouveau discours qui cherche à défaire les progrès sociaux et normatifs des dernières décennies, le Luxembourg a indiqué que d’ici les 10 prochaines années, les droits des femmes et des filles auront régressé, au lieu de progresser. « Pire, au regard du rythme de progression actuel, il faudra 108 ans pour arriver à la parité entre les sexes! » a prévenu la délégation, appuyé par le Royaume-Uni.
Les pays nordiques, par la voix de la Finlande, se sont plus particulièrement inquiétés de la remise en question de la reconnaissance des droits à la santé sexuelle et reproductive et des acquis internationaux en la matière, une tendance notamment observée, a relevé la Suisse, lors des négociations sur la Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle.
Les voix qui s’élèvent pour nier aux femmes le contrôle de leurs corps et de leur sexualité sont inconcevables, alors qu’un « nombre atterrant » de femmes continuent de perdre ou de risquer leur vie à cause de leur manque d’accès à ces droits, s’est alarmé le Mexique.
Nombre de délégations se sont également souciées de l’apparition de nouvelles formes de violence à la faveur des avancées technologiques, à commencer par le harcèlement sur Internet et autres formes de violence en ligne. Plusieurs intervenants ont encouragé les femmes et les filles à diffuser des messages de nature à déconstruire les clichés et stéréotypes et ont, d’une manière plus générale, insisté sur la nécessité d’associer les hommes et garçons au combat en faveur de la parité.
La problématique de la violence en ligne a également été soulignée par la Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, Mme Hilary Gbedemah, dans sa réponse aux critiques de la Fédération de Russie qui a pointé les « tentatives » du Comité d’imposer « unilatéralement » de nouvelles obligations aux États parties. Mme Gbedemah a notamment fait observer que lors de la naissance de la Convention, il y a 40 ans, certaines problématiques n’existaient pas, à commencer par le harcèlement en ligne, les changements climatiques et les questions liées à la migration.
Au cours de cette session, les États Membres ont également dialogué avec la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, Mme Dubravka Šimonović, qui a présenté un rapport consacré à la violence obstétricale et pendant l’accouchement.
« Les femmes sont soumises à de mauvais traitements et à la violence même au cours des moments les plus délicats de leur vie, notamment lorsqu’elles ont un enfant », a-t-elle déploré, relevant que les actes de violence commis dans le cadre de soins de santé obstétrique sont souvent tus en raison du « tabou et du silence qui entourent cette question ».
Les délégations ont aussi entendu la Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, souligner que les préparatifs du vingt-cinquième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, prévu en 2020, exige une volonté politique renouvelée pour honorer les engagements pris à l’occasion de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.
« Face à la recrudescence des menaces, il est indispensable de progresser dans l’élimination de toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des femmes et des filles partout dans le monde. Il faut faire entendre leurs voix, et appuyer leur participation et leadership », a-t-elle insisté.
La Troisième Commission poursuivra son débat sur la promotion de la femme le lundi 7 octobre, à partir de 10 heures.
PROMOTION DES FEMMES
Promotion des femmes (A/74/38, A/74/137, A/74/224, A/74/235)
Suite donnée aux textes issus de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes et de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale (A/74/220, A/74/222)
Déclarations liminaires, suivies d’une séance de questions-réponses
Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a déclaré que face à la remise en question de leurs acquis des femmes en termes de leurs droits, les préparatifs du vingt-cinquième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, prévu en 2020, exigent une volonté politique renouvelée pour honorer les engagements pris à l’occasion de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, le Programme 2030 et la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.
Face à la recrudescence des menaces, a-t-elle dit, il est indispensable de progresser dans l’élimination de toutes les formes de discriminations et de violence à l’égard des femmes et des filles partout dans le monde. Il faut, a-t-elle insisté, faire entendre leurs voix, et appuyer leur participation et leadership.
Annonçant que les préparatifs pour le vingt-cinquième anniversaire vont bon train, la Directrice exécutive a indiqué avoir reçu 158 rapports nationaux tandis que les cinq commissions régionales veillent au processus d’examen régional conduisant aux réunions intergouvernementales de fin octobre et début novembre prochains. Elle a félicité l’Assemblée générale pour avoir convenu des modalités de sa réunion de haut niveau Beijing+25 qui se tiendra le 23 septembre 2020.
La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a également évoqué le Forum de la société civile « Génération égalité » conjointement présidé par la France et le Mexique qui débutera à Mexico, en mai 2020, pour s’achever à Paris en juillet dans le but d’appuyer la nécessité urgente d’action et d’obligation redditionnelle dans le domaine de l’égalité des sexes. Le Forum « célébrera le pouvoir du militantisme, de la solidarité féministe et du leadership des jeunes pour opérer un changement transformateur », a-t-elle commenté. Elle a précisé que le Forum débouchera sur une série de coalitions pour l’action, qui sont des partenariats novateurs de la société civile, des États Membres, des business et d’autres parties prenantes.
Mme Mlambo-Ngcuka a ensuite présenté quatre rapports dont est saisie la Troisième Commission au titre du point 26 sur la Promotion des femmes. Le rapport sur les Mesures prises et progrès réalisés dans le cadre du suivi et de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et des textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale (A/74/222) montre que 72% des rapports du Secrétaire général soumis à l’Assemblée générale contiennent une perspective de genre, ce qui est un nouveau record, a-t-elle opiné. Le pourcentage des résolutions de l’Assemblée générale incluant une telle perspective demeurant cependant en-dessous de 50%, elle a appelé cet organe à une intensification des efforts pour faire figurer des recommandations sensibles à l’égalité des sexes dans toutes ses résolutions.
Quant au rapport du Secrétaire général « Amélioration de la situation des femmes dans les organismes des Nations Unies » (A/74/220), il révèle que la proportion de ces dernières au niveau professionnel et des hauts fonctionnaires est passée de 42,8% en 2015 à 44,2% deux ans plus tard. Des défis persistent néanmoins aux niveaux P5, D1 et D2, ainsi que dans les opérations de maintien de la paix.
D’autre part, un sondage mené auprès des points focaux pour le genre a révélé que les principaux obstacles à la parité sont notamment l’évolution professionnelle inadéquate pour le personnel aux échelons moyens; l’absence de reddition de comptes pour les décisions relatives au recrutement; des questions liées à la culture institutionnelle; et le manque de mesures spéciales.
« Dans le souci d’une amélioration durable du statut de la femme au sein du système onusien, il est indispensable de transformer la culture institutionnelle de sorte qu’elle embrasse l’égalité, supprime les stéréotypes et soit inclusive pour l’ensemble du personnel », a voulu la Directrice exécutive. À cet égard, elle a invité à consulter les bonnes pratiques figurant dans les Lignes directrices pour la création d’un environnement porteur dans le système des Nations Unies (Enabling Environment Guidelines for the United Nations System Directives), lancées par le Secrétaire général en mars 2019.
Le rapport du Secrétaire général « Violence à l’égard des travailleuses migrantes » (A/74/235) met l’accent sur le potentiel de la migration dans la promotion de l’autonomisation économique des femmes mais confirme que l’absence de processus de migration sûrs et réguliers et l’existence de mesures législatives restrictives peuvent accroître les risques de violence, parfois multiples, à l’encontre des travailleuses migrantes, s’agissant en particulier de la migration irrégulière.
Mme Mlambo-Ngcuka a ensuite présenté le rapport du Secrétaire général « Amélioration du sort des femmes et des filles en milieu rural » (A/74/224) qui met l’accent sur les impacts significatifs des changements climatiques sur les femmes rurales et sur leurs communautés, exacerbés par les inégalités fondées sur le sexe. Ce document passe aussi en revue les efforts déployés pour renforcer la résilience et les capacités adaptives des femmes et des filles rurales face aux changements climatiques. Il fait également la lumière sur les écarts significatifs dans la disponibilité de financement climatique sexospécifique et de données sur les femmes et filles rurales.
La Directrice exécutive a en outre attiré l’attention sur l’Étude mondiale sur le rôle des femmes dans le développement (A/74/111), qui sera examiné en octobre par la Deuxième Commission, et qui porte sur l’importance de la lutte contre la pauvreté de revenu et la pauvreté en temps des femmes au regard du développement durable.
Elle a aussi cité le rapport d’ONU-Femmes sur les progrès des femmes dans le monde consacré en 2019 aux « Familles dans un monde en pleine évolution ».
Dialogue interactif
Le Japon a salué la récente campagne sur l’égalité générationnelle lancée par ONU-Femmes et a souhaité connaître l’élément clef pour travailler avec les militants des droits des femmes de la nouvelle génération.
À son tour, le Guatemala s’est préoccupé du sort des femmes appartenant à des minorités, constatant en outre que les femmes font souvent face à la violence du fait de leurs origines sociales ou ethniques. De son côté, la Colombie a déploré l’inégalité entre les hommes et les femmes dans l’accès aux ressources naturelles et aux biens de production. Elle s’est, en revanche, félicitée de figurer dans le rapport du Secrétaire général s’agissant de l’intégration des perspectives sexospécifiques dans l’approche de phénomènes comme les changements climatiques.
Soulignant que l’inclusivité est synonyme d’harmonie et qu’elle ne peut, par conséquent, exclure la moitié de sa population des processus de prise de décisions, la Namibie a fait part de son action pour promouvoir la parité jusqu’au plus haut niveau de l’État.
Enfin, le Libéria a attiré l’attention de la Directrice exécutive d’ONU-Femmes sur le manque de capacité du pays pour intégrer des perspectives liées à la parité et a appelé à une plus forte assistance en matière d’expertise technique.
Réagissant à ces observations, Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka a souligné que l’action de la nouvelle génération de militants sur le chemin de l’égalité homme-femme est « cruciale », notamment à l’approche du vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration de Beijing. C’est pour cela, qu’en plus des États Membres, nous travaillons avec la société civile, a-t-elle expliqué. Nous mettons également en exergue l’importance de la participation des jeunes aux fora des parties prenantes afin d’encourager la coopération intergénérationnelle.
Elle a ensuite indiqué que la session de l’année prochaine permettra d’examiner la mise en œuvre de la plateforme de Beijing et sera l’occasion pour les jeunes de travailler avec leurs aînés. Pour elle, les jeunes sont d’ores et déjà des moteurs du changement. Il y a 25 ans, le monde a été témoin de la naissance d’une génération de militants qui se sont engagés pour faire avancer la condition de la femme et, aujourd’hui, une nouvelle génération va reprendre le relais pour terminer le travail entamé, a-t-elle affirmé.
Mme Mlambo-Ngcuka s’est également félicitée de l’accent mis par les États Membres sur les changements climatiques dans le traitement de cette problématique et la nécessité de lutter contre les discriminations. Elle a aussi évoqué le Plan d’action à l’échelle du système des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’avancement des femmes (SWAP).
Mme HILARY GBEDEMAH, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a rappelé que cette année marque le quarantième anniversaire de l’adoption de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, « seul traité international quasi universel qui protège les droits des femmes ». Si cette Convention a été un vecteur de changement dans presque toutes les sociétés du monde, Mme Gbedemah a rappelé qu’il reste un long chemin à parcourir pour atteindre une égalité réelle des femmes et des hommes dans tous les domaines de la vie.
Les femmes continuent d’être sous-représentées dans les organes de décision nationaux et gouvernements locaux, dans les parlements et dans le secteur privé, a-t-elle déploré. L’accès à la santé et aux droits sexuels et reproductifs restent limité pour la plupart des femmes et des filles. Et la violence sexiste à l’égard des femmes et des filles, notamment les pratiques néfastes et la violence sexuelle en période de conflits, se poursuit sans relâche dans de nombreuses régions du monde, tandis que les auteurs de ces crimes vivent en toute impunité.
Mme Gbedemah a ensuite indiqué qu’au cours de l’année écoulée, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a continué d’encourager les États parties à produire un rapport sur les mesures prises pour atteindre les objectifs de développement durable. Il a également poursuivi ses travaux relatifs à une recommandation générale sur la traite des femmes et des filles dans le contexte de la migration mondiale. En novembre 2019, le Comité mettra en ligne le premier projet de recommandation générale invitant les États parties et autres parties prenantes à présenter leurs observations. Il est également envisagé de mener de nouvelles consultations au niveau régional, a-t-elle ajouté.
Mme Gbedemah a également informé la Troisième Commission que le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a pu, au cours de l’année écoulée, renforcer ses partenariats avec d’autres mécanismes de protection des droits de l’homme, citant tout particulièrement la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, et le Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. Il a aussi publié une déclaration conjointe sur les droits de l’homme et les changements climatiques avec le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, le Comité pour les travailleurs migrants, le Comité des droits de l’enfant et le Comité des droits des personnes handicapées.
En ce qui concerne le renforcement des organes de traités, le Comité a adopté une décision en juillet 2019 levant l’obligation faite aux États souhaitant bénéficier des procédures simplifiées de soumissions de rapports, de présenter un document commun. Mme Gbedemah a également rappelé que la résolution 68/268 de l’Assemblée générale condamne fermement tous les actes d’intimidation et de représailles contre des individus et des groupes en raison de leur contribution au travail des organes traitant des droits de l’homme.
La Présidente du Comité a par ailleurs évoqué les avantages considérables à mener des dialogues avec les États sur le plan régional par l’intermédiaire de petites équipes d’experts du Comité. Elle a également insisté sur l’importance de disposer de ressources adéquates et de bénéficier de l’appui des États Membres.
Elle a indiqué avoir été informée, le 30 avril, de la décision de l’Assemblée générale de réduire de 25% les frais de déplacement des experts de haut niveau, ce qui aurait contraint le report des travaux des Comités qui ont une troisième session. Fort heureusement, une solution provisoire a pu être trouvée, a-t-elle indiqué. Mais tel report aurait représenté une grave menace pour la crédibilité des organes de traités des droits de l’homme car les comités auraient été contraints de reporter l’examen de 68 plaintes individuelles alléguant de graves violations. Elle a appelé à trouver une solution durable au problème pour permettre aux sessions du Comité et aux visites de pays du Sous-Comité sur la prévention de la torture de se dérouler comme prévu. Évoquant les problèmes de liquidités de l’ONU, elle a appelé les États Membres à honorer leurs responsabilités.
Dialogue interactif
L’Union européenne a pris note de la proposition du Comité d’associer la société civile à l’élaboration des rapports et a souhaité savoir comment le Comité prévoyait d’assurer la participation des ONG et des défenseurs des droits à ses travaux.
L’Allemagne s’est inquiétée, dans un premier temps, des attaques subies par le Comité de la part de « certains États Membres. La délégation a ensuite relevé la persistance de nombreuses discriminations et stigmatisations s’agissant de la menstruation et de l’hygiène menstruelle et voulu savoir comment la Présidente du Comité entendait traiter de la santé menstruelle dans le cadre de ses travaux.
Le Japon s’est interrogé sur les difficultés rencontrées par la Présidente pour assurer la bonne mise en œuvre de son mandat, tandis que le Libéria a assuré qu’il respectera ses obligations en matière de suivi.
La Fédération de Russie a jugé inacceptables les tentatives du Comité d’imposer « unilatéralement » de nouvelles obligations aux États parties. Elle a également fustigé la pratique « viciée » des commentaires généraux et des procédures de suivi qui, a-t-elle affirmé, ne sont pas stipulées par la Convention. Elle a appelé le Comité à mettre un terme aux « dérives » existantes, pointant notamment l’écart grandissant entre la présentation des rapports et la défense des États qui est actuellement de plus d’un an. Elle lui a demandé de faire la lumière sur les possibilités de révisions de ces modalités.
La Norvège a considéré de la plus haute importance que les efforts des pays en matière de respect des conventions soient supervisés par des organes indépendants ayant une haute expertise dans leur domaine. Enfin, elle a voulu savoir quelles étaient les mesures prises par le Comité pour répondre au paragraphe 38 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale qui encourage les organes conventionnels à renforcer le rôle de leurs présidents en matière de procédure, notamment dans la formulation de conclusions sur des questions relatives aux méthodes de travail.
Préoccupé par les tentatives visant à faire reculer les droits des femmes « durement acquis », observées ces derniers mois au sein d’instances multilatérales, dont les Nations Unies, le Royaume-Uni a demandé quel rôle le Comité comptait jouer pour lutter contre ces discours.
S’agissant de l’interaction du Comité avec les ONG, Mme HILARY GBEDEMAH, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a indiqué qu’elle veillait à ce que ces organisations puissent travailler de manière novatrice avec lui et a insisté sur l’importance de leur contribution. « Nous nous assurons que les ONG travaillent dans un espace sûr », notamment en ayant recours aux technologies. Elle a également indiqué, en ce qui concerne le problème de la traite des femmes et des filles, que le Comité avait travaillé dans toutes les régions du monde et écouté les observations de sorte à identifier les particularités régionales et en comprendre les répercussions. Il s’agit également pour elle de s’assurer que les défenseurs des droits des femmes ne paient pas le tribut pour leur travail.
Pour ce qui est des stigmatisation et intimidation des femmes et des filles en période menstruelle, Mme Gbedemah a fait observer que de tels actes d’intimidation étaient courants à l’école et dans le milieu universitaire, et a précisé que la Convention contient une disposition à ce sujet. La question de l’hygiène menstruelle ne devrait pas être un obstacle à l’éducation, c’est pourquoi nous sensibilisons les « établissements scolaires » sur cette question.
La Présidente du Comité a ensuite expliqué que les principaux défis rencontrés dans l’exercice de son mandat étaient liés aux ressources. Un autre défi, a-t-elle relevé, est lié à un certain recul vis-à-vis des droits des femmes. Dans ce contexte, « nous engageons un dialogue interactif avec tous les acteurs et poursuivrons cette démarche jusqu’à ce que tous les droits des femmes soient respectés dans leur entièreté ».
Mme Gbedemah a aussi dit avoir pris « bonne note » des remarques de la Fédération de Russie, tout en faisant observer que certaines problématiques n’existaient pas lors de la naissance de la Convention, il y a 40 ans. Elle a notamment cité la violence en ligne, les changements climatiques et les questions liées à la migration. Elle a également estimé important que les États Membres « nous donnent des lignes directrices » sur ces questions. À la Norvège, elle a souligné que le Comité œuvre à rationaliser les procédures pour simplifier l’action des divers acteurs et éviter tout « doublon superflu ».
Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIĆ, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, a tout d’abord jugé nécessaire d’établir au niveau institutionnel la plateforme des mécanismes régionaux indépendants de droits des femmes sur l’élimination de la violence faite aux femmes (Plateform of UN regional independent women’s human rights mechanisms on the elimination of violence against women, MEVAW).
Elle a ensuite présenté son rapport thématique consacré à l’adoption d’une approche basée sur les droits de l’homme pour faire face à la maltraitance et à la violence à l’égard des femmes dans les services de santé reproductive, lequel met l’accent sur la violence obstétricale et pendant l’accouchement.
« Les femmes sont soumises à de mauvais traitements et à la violence même au cours des moments les plus délicats de leur vie, comme lorsqu’elles ont un enfant », a dénoncé Mme Šimonović. Elle a indiqué que depuis la publication, en 2015, d’une déclaration de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur les mauvais traitements lors de l’accouchement dans des établissements de soins, de nouveaux mouvements sociaux ont démontré que la maltraitance et la violence pendant l’accouchement sont répandues et enracinées dans les systèmes de santé du monde entier. Il est donc nécessaire, non seulement de parler de cette question, mais aussi que les États agissent, a-t-elle affirmé.
Elle a expliqué que la violence à l’égard des femmes pendant l’accouchement ne doit pas être considérée comme un épisode sporadique, mais que cela fait partie d'un continuum de la violence sexiste qui se produit dans le contexte plus large de l’inégalité structurelle, de la discrimination et du patriarcat. Cette forme de violence résulte également d’un manque d’éducation et de formation, ainsi que d’un manque de respect pour la dignité des femmes, l’égalité et les droits humains.
Face à ces formes de maltraitance et de violence, les femmes deviennent les victimes de systèmes de santé défaillants confrontés à des contraintes de temps et des réductions budgétaires, ainsi que des conditions de travail des agents de santé. Des lois discriminatoires et des stéréotypes sexistes nuisibles sur le rôle « naturel » des femmes dans la société et la maternité jouent un rôle au cours de l’accouchement et contribuent à limiter l’autonomie des femmes. Ces stéréotypes nuisibles sont en outre justifiés par la conviction que l’accouchement est un événement qui exige de la souffrance de la part de la femme ce qui, a-t-elle expliqué, conduit à une « normalisation » de la maltraitance. Elle a également vu dans la relation praticien-patient une autre cause fondamentale de la maltraitance et de la violence, tout comme la doctrine de la nécessité médicale, qui est souvent utilisée pour justifier les mauvais traitements durant l’accouchement.
Mme Šimonović a appelé aux États à respecter la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, qui appelait les États à poursuivre une politique d’élimination de la discrimination et la violence basée sur le genre à l’égard des femmes, y compris dans le domaine de la santé. La Rapporteuse spéciale a également expliqué avoir recommandé aux États de développer des stratégies nationales de santé reproductive appropriées, et de mener des enquêtes indépendantes sur les allégations de maltraitance et de violence basée sur le genre dans les établissements de soins. Elle a rappelé qu’en vertu du droit international, les États ne peuvent échapper à leur responsabilité de s’attaquer aux violations commises par des institutions de santé. Elle a également recommandé aux États Membres d’établir des mécanismes de redevabilité fondés sur les droits de l’homme pour garantir une réparation aux victimes de maltraitance et de violence.
Poursuivant, Mme Šimonović a indiqué que la maltraitance et la violence à l'égard des femmes dans les centres de santé reproductive et pendant l’accouchement peuvent laisser des cicatrices durables sur une femme. Le tabou et le silence qui entourent cette question ont permis à des violations de perdurer, a-t-elle déploré.
Elle a également évoqué le phénomène mondial du féminicide, et a engagé les États à établir des mécanismes de surveillance et à collecter des données sur le féminicide.
La Rapporteuse spéciale a ensuite fait état d’un manque d’harmonisation entre le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et son mandat et a appelé à une meilleure coopération, citant notamment la résolution 41/17 adoptée en juillet 2019 par le Conseil des droits de l’homme.
Dialogue interactif
L’Argentine a appuyé la proposition d’établir des observatoires du féminicide sur le plan international, appelant ensuite les États à prendre les problèmes de maltraitance dans les services de santé à bras le corps, notamment au moment de la grossesse et de l’accouchement.
En la matière, la Suisse a pointé la surreprésentation des hommes dans les services de gynécologie obstétrique et les lois et pratiques discriminatoires. Elle a demandé à la Rapporteuse spéciale de fournir des exemples de bonnes pratiques en matière de récolte de données pour hisser ce type de violences au rang de priorité.
Déterminé à lutter contre la violence obstétricale, le Brésil a expliqué avoir une loi et un programme pour l’humanisation des soins prodigués à la mère et à l’enfant pendant tout le cycle de la maternité.
« Nous sommes également en train de faire tomber des tabous sur ces questions », a renchéri l’Irlande, qui a voulu pour preuve la stratégie nationale de 2016 pour la santé maternelle qui met l’accent sur le respect et le droit de décision éclairée des femmes. Un système de prise en charge des femmes qui ont été victimes d’épisiotomie a aussi été mis sur pied.
Le Mexique s’est dit alarmé par les données fournies par Mme Šimonović et a appelé à adopter des mesures urgentes, en particulier en matière de violence obstétricale. Il a également mis l’accent sur l’importance de disposer de données ventilées pour mieux apprécier l’augmentation des violences faites aux femmes.
Le Liechtenstein a appelé tous les acteurs institutionnels à intervenir pour éliminer la traite des êtres humains, fléau lucratif qui génère 150 milliards de dollars chaque année. Il a aussi voulu savoir dans quelle mesure Mme Šimonović compte travailler avec d’autres acteurs que les gouvernements sur ce dossier et quel est le potentiel du secteur privé pour lutter contre ce fléau.
Cuba a regretté l’absence d’une analyse plus exhaustive des effets du manque de développement sur les services de santé. À cet égard, elle a voulu en savoir plus sur l’influence de la pauvreté extrême sur ces violences.
L’Union européenne a relevé que les mauvais traitements contre les femmes pendant l’accouchement se produisent dans le monde entier et dans tous les contextes, et a voulu savoir comment renforcer le mandat de la Rapporteuse pour améliorer la compréhension de ces violations des droits de l’homme.
Faisant état de son arsenal législatif en matière de protection des droits de femmes, la Slovénie a voulu obtenir d’autres exemples de lutte contre les violences subies pendant les soins, tandis que l’Afrique du Sud a demandé des précisions sur les stratégies nationales spécifiques mises en place dans le cadre de la santé génésique.
Le Maroc a voulu connaître les propositions de la Rapporteuse spéciale pour accroître cette participation et obtenir des exemples de bonnes pratiques applicables pour améliorer la collecte des données afin de lever certains tabous dans le monde médical.
« La femme doit être libre de disposer de son corps et de sa vie », a plaidé la Nouvelle Zélande, qui a voulu connaître le principal défi devant la levée des barrières sociales contre les droits des femmes.
Le Qatar a expliqué que les soins des femmes qataries sont entièrement couverts, de la gestation jusqu’à l’accouchement.
Le Royaume-Uni a mis en évidence la prévalence de la violence à l’égard des femmes et des jeunes filles, en particulier de la part des partenaires intimes, et lors des conflits, pour ensuite interroger la Rapporteuse pour savoir quelle était son approche dans le traitement des différentes initiatives nationales et régionales visant la parité.
L’Australie a estimé que la question des complications durant l’accouchement ne devrait pas compromettre le bien-être physique et mental des femmes. Les Pays-Bas se sont interrogés sur les conséquences du manque de consentement plein et éclairé, y compris une éducation sexuelle complète. De son côté, la Norvège a appelé à pénaliser la violence domestique et à combattre les violences à l’égard des personnes handicapées.
La Fédération de Russie s’est opposée aux accouchements à domicile, estimant que c’est à l’État de les encadrer, car disposant de soins médicaux et de personnels de qualité. À leur tour, les États-Unis ont appelé à la garantie de la sécurité de la mère et de l’enfant avant et après l’accouchement, mettant en garde contre les complications liées aux accouchements à domicile. La délégation a également interrogé la Rapporteuse sur les garanties d’accès aux soins des femmes handicapées sur un même pied d’égalité que leurs congénères. Le Canada a fait part de ses préoccupations sur les violences à l’égard des femmes, notamment en matière de santé génésique et sexuelle.
En réponse aux questions des délégations, Mme Dubravka Šimonović a insisté sur l’importance de briser les tabous et de promouvoir la protection des droits des femmes, en particulier pendant la période de maternité.
S’agissant de la création d’observatoires des féminicides, la Rapporteuse spéciale a concédé que ces mesures prendront du temps pour se concrétiser. « À l’ONU, les choses sont compliquées », a-t-elle commenté. À ses yeux, « il est important que nous envisagions les défis communs auxquels nous sommes confrontés », appelant de ses vœux une coopération accrue avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) afin d’extraire les meurtres familiaux et les féminicides des données dont il dispose. Sur la base de ces données, il sera alors possible d’analyser les relations entre les victimes et les auteurs, par exemple pour les crimes intimes, a-t-elle expliqué, y voyant aussi un moyen d’identifier les lacunes et de les combler.
Évoquant les questions liées aux violences obstétriques, elle a déclaré que, dans le cadre de son mandat, elle s’employait à établir de nouvelles relations entre les défenseurs des droits de l’homme et les services de santé, avec notamment l’aide du Fonds des Nations Unies pour les activités en matière de population (FNUAP). « Nous devons continuer à travailler ensemble », a-t-elle plaidé, jugeant utile de fusionner la protection des droits humains et le travail dans le domaine de la santé. Elle a observé, à ce sujet, que la situation n’est pas la même dans tous les pays, relevant que dans un certain nombre d’États, on tolère des formes de maltraitance au moment de l’accouchement. S’il existe des exemples de bonnes pratiques, les recommandations de l’OMS ne sont pas toujours respectées, a-t-elle regretté, citant en exemple la proportion des épisiotomies pratiquées.
Elle a par ailleurs noté que nombre d’ONG se plaignent de ne pas être écoutées sur ces questions. De l’avis de la Rapporteuse spéciale, il est important de lancer le dialogue entre les gouvernements, les ONG, les universités et tous ceux qui expriment des préoccupations sur les violences à l’égard des femmes. Mme Šimonović a lancé un appel en faveur d’un soutien accru à son mandat, notamment financier. Elle a aussi souhaité que l’Assemblée générale s’inspire du fonctionnement du Conseil de l’Europe, dont l’assemblée parlementaire a adopté de recommandations sur ces questions à l’adresse des États.
Enfin, en réponse à la Fédération de Russie, Mme Šimonović a assuré que son rapport ne faisait pas de recommandations types, mais se concentrait sur la violence obstétrique et appelait les États à permettre l’accouchement à domicile. Pour la Rapporteuse spéciale, il faudrait donc que les États envisagent cette possibilité.
Débat général
Mme NADYA RIFAAT RASHEED, de l’État de Palestine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a indiqué que la transversalité de l’approche genre dans tous les efforts de développement, et la réalisation de la pleine participation des femmes dans les sphères de la vie politique, économique et socioculturelle est cruciale pour la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Malgré les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et l’intégration de l’approche genre dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, de nombreux défis et lacunes persistent, et de nombreuses promesses et des engagements pris sont restés lettre morte, a-t-elle déploré.
Mme Rasheed a relevé que la violence à l’encontre des femmes et des filles continue d’être un obstacle de taille à l’effectivité de l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes et filles. Elle a demandé que des mesures soient prises afin d’éliminer toutes formes de violence sexiste, en particulier les féminicides, et d’assurer que les femmes handicapées, les filles, les jeunes, les autochtones, les afrodescendantes et les femmes âgées, ne soient plus l’objet de plusieurs formes aggravées de discrimination.
Il est tout aussi important de procéder à une collecte de données ventilées en tenant compte de plusieurs facteurs dont le sexe, le revenu, l’âge, la race, l’ethnicité, le statut migratoire, le handicap et bien d’autres, a poursuivi la représentante. De plus, la discrimination, la violence, les difficultés d’accès aux soins de santé primaires et à l’éducation et à la protection sociale sont parmi les obstacles majeurs des femmes et filles vivant dans des pays affectés par les conflits armés, en situation d’occupation étrangère, ou encore dans des pays en proie à des mesures coercitives unilatérales.
Le Groupe des 77 a ensuite plaidé pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’encontre des femmes en milieu professionnel, y compris l’accès inégal au marché du travail, l’inégalité salariale, ainsi que l’adéquation entre vie professionnelle et vie privée pour les femmes et les hommes. Enfin, le G77 a dit espérer que la commémoration du vingt-cinquième anniversaire du Programme d’action de Beijing, prévue le 23 septembre 2020, sera couronnée de succès et que tous les gouvernements prendront des mesures idoines en ce sens.
Mme RITA MWALE (Zambie), au nom du Groupe des États d’Afrique, s’est inquiétée de la situation des femmes en zone rurale qui assument seules le fardeau de leur vulnérabilité. Pour elle, le Programme 2030 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine sont des projets ambitieux et novateurs conçus justement pour répondre aux besoins de ces personnes les plus vulnérables.
Mais il est difficile d’atteindre cet objectif sans volonté politique, sans financement et sans l’égalité des sexes et encore moins sans l’inclusion des femmes et filles vivant en milieu rural. Celles-ci doivent être associées à tout le processus décisionnel, a-t-elle martelé. Cela exige un engagement renouvelé et davantage d’investissements, a-t-elle souligné avant d’appeler les partenaires à débloquer des ressources supplémentaires.
L’Afrique est un continent en grande partie rural, a-t-elle poursuivi, et il reste beaucoup à faire au regard des inégalités en termes des revenus et d’accès au marché du travail. La représentante a notamment expliqué que la femme rurale est très active dans l’informel et ne bénéficie pas, par conséquent, de protection sociale. Ces inégalités se manifestent également au niveau des outils de production, dans l’accès à la terre ainsi qu’au recours au crédit. « Il faut autonomiser la femme rurale en lui permettant, notamment, de rester à l’école et de bénéficier de formations grâce à l’adoption de cadres ambitieux et transformateurs », a-t-elle affirmé. C’est la voie idoine, selon elle, pour aller vers une agriculture et une pêche durables.
Au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), M. COLLEN VIXEN KELAPILE (Botswana) a souligné que l’égalité entre les sexes est un droit fondamental et un axe de l’intégration régionale, de la croissance économique et du développement social. L’un des objectifs directeurs de la SADC est d’intégrer la question du genre dans le processus d’édification des communautés, a-t-il ajouté. Autonomiser les femmes donnerait plus de poids à nos communautés car elles ont un rôle essentiel à jouer dans nos sociétés et nos économies, a fait valoir le représentant.
M. Kelapile a cependant reconnu que les inégalités entre les sexes restent fortes en Afrique australe en raison de l’accès encore limité des femmes aux moyens de production, à l’éducation formelle et au marché de l’emploi. De plus, les femmes sont surreprésentées dans le secteur informel, où les revenus sont extrêmement faibles et les moyens de subsistance très précaires, a-t-il constaté, reconnaissant que « cette réalité hypothèque la contribution des femmes à notre développement ». Pour répondre à ces inégalités, ce qui passe selon lui par l’élimination de toutes les violences liées au genre, la SADC a adopté différents instruments juridiques et programmatiques, notamment la Déclaration de 1997 sur le genre et le développement et son plan de développement stratégique régional révisé 2015-2020.
Il s’est dit soucieux de faciliter la protection constitutionnelle et juridique des hommes comme des femmes, à un niveau égal, d’augmenter la participation et la représentation des femmes à tous les niveaux de décision, d’autonomiser les femmes économiquement et de prévenir les violences sexistes. La SADC souhaite également réduire l’inégalité entre les sexes en matière de lutte contre le VIH/sida et entend accroître la participation des femmes aux efforts de maintien de la paix.
Il a affirmé que la SADC avait fait des progrès remarquables en matière de promotion des droits des femmes dans la région, comme l’atteste sa ratification de textes cadres comme la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’encontre des femmes et du Programme d’action de Beijing. Plusieurs de ses États membres ont également amendé leur constitution et adopté de nouvelles lois pour garantir des droits égaux aux femmes, a-t-il indiqué, concédant toutefois que la région reste confrontée à des défis importants comme les mariages précoces, l’impact de la pandémie de VIH/sida, les maladies transmissibles et non transmissibles ainsi que la traite des personnes. Il dit compter sur le partenariat international en plus des efforts déployés par l’Union africaine dans le cadre de son Agenda 2063.
M. SUPARK PRONGTHURA (Thaïlande), qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a indiqué que malgré les progrès significatifs réalisés par les pays de la région pour réduire la pauvreté, l’ASEAN doit renforcer davantage l’égalité des sexes, l’autonomisation ainsi que la participation des femmes dans les sphères décisionnelles. La communauté de l’ASEAN s’efforce de promouvoir l’égalité des chances en faveur de la femme, en plus de protéger ses droits. Il a particulièrement mis l’accent sur le soutien aux femmes en situation de vulnérabilité ou celles exposées à la violence.
Soulignant le rôle des femmes dans la consolidation et le maintien de la paix ainsi que dans la résolution des conflits, il a cité la convention de l’ASEAN contre la traite des personnes, notamment des femmes et des enfants, entrée en vigueur en 2017.
Il a également parlé de l’autonomisation de la femme dans le cadre du réseau des femmes entrepreneurs (AWEN) établi en 2014, une plateforme inclusive au bénéfice de la femme œuvrant dans les micro, petites et moyennes entreprises. L’objectif est de lui permettre de tirer avantage des opportunités offertes par l’économie digitale, a-t-il expliqué. L’égalité de participation des femmes au-delà de la sphère économique est essentielle au développement durable dans la région, a-t-il dit. Pour finir, il a appelé à plus de coordination dans la mise en œuvre des politiques en faveur de la femme à l’échelle de l’ensemble de la région.
M. RUDOLPH MICHAEL TEN-POW (Guyana), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a indiqué que sa région a besoin de l’aide internationale pour appuyer la collecte de données fiables permettant de mesurer les progrès accomplis dans l’autonomisation des femmes et des filles. Il a noté que si les femmes et les filles des Caraïbes ont davantage accès que les hommes à une éducation secondaire et universitaire, elles font face en revanche à une situation plus défavorable sur le marché du travail avec des salaires moins élevés. Bien que la parité homme-femme ne soit pas encore atteinte, les femmes de la région jouent un plus grand rôle dans les processus de prise de décisions, en particulier sur le plan politique, a-t-il dit.
Le délégué a ensuite mentionné les mesures prises par les gouvernements de la CARICOM pour lutter contre les violences faites aux femmes, les arsenaux législatifs nationaux ayant été notamment renforcés afin de punir les auteurs de telles violences. Plusieurs séminaires se sont tenus par ailleurs dans la région dont le thème était « Repenser la masculinité, comprendre l’égalité de genre comme moyen de mettre fin à la violence sexiste dans les écoles caribéennes. » La CARICOM soutient l’engagement des hommes et des garçons en vue de l’élimination des violences contre les femmes et les filles, y compris le harcèlement sexuel. Enfin, le délégué a rappelé que des ressources insuffisantes sont l’un des éléments majeurs entravant les efforts des États membres en vue de l’autonomisation des femmes.
M. JULIEN BOURTEMBOURG, de l’Union européenne (UE), a souligné qu’honorer les engagements en faveur de la promotion des droits des femmes et des filles et réaliser l’égalité des sexes et l’émancipation de toutes les femmes sont des conditions sine qua non pour des progrès dans la paix et la sécurité, la stabilité et la prospérité. Investir dans l’égalité des sexes n’est pas seulement une bonne chose, c’est aussi la chose la plus intelligente à faire. Tout le monde tire un avantage quand les femmes et les filles sont éduquées et en bonne santé et qu’elles peuvent influer sur les politiques, les services et les infrastructures qui ont un impact non seulement sur elles mais aussi sur tous. Les sociétés s’épanouissent avec une confiance renouvelée dans les institutions et un esprit plus fort de solidarité quand elles s’attaquent aux racines des inégalités et promeuvent les droits de l’homme pour tous sans discrimination aucune.
Le monde change, a poursuivi le représentant, et le mouvement mondial pour l’égalité des sexes gagne en vigueur. Il a illustré ses propos en citant l’Alliance globale des réseaux régionaux des femmes médiatrices qui, créée la semaine dernière, est un exemple concret du rôle vital des femmes dans l’avancement des sociétés. La lutte contre les inégalités entre les sexes est inscrite dans l’ADN normatif et institutionnel de l’Union européenne, s’est enorgueilli le représentant. L’UE, s’est-il expliqué, est un acteur de taille sur la scène internationale, le premier investisseur dans le développement et le premier donateur de l’assistance humanitaire pour la promotion et la protection des droits des femmes et des filles. Au fil des ans, l’Union européenne a pris des initiatives « significatives » par leurs objectifs ambitieux, le nombre de femmes et de filles qui en ont bénéficié, l’appropriation partagée avec les partenaires, l’engagement inclusif de la société civile et des défenseurs des droits des femmes et par la taille des investissements financiers.
Le représentant a attiré « avec fierté » l’attention sur l’initiative « Spotlight » contre la violence à l’encontre des femmes et des filles qui a été lancée, il y a deux ans, ici même au Siège des Nations Unies, à New York. L’année dernière, l’Union européenne a aussi imprimé un nouvel élan à son cadre politique sur les femmes, la paix et la sécurité. Dans ce contexte, elle a renforcé son engagement contre la violence sexuelle dans les conflits, y compris en contribuant au Fonds mondial pour les survivantes dont la création a été proposée par les lauréats du prix Nobel de la paix, Mme Nadia Murad et le docteur Denis Mukwege.
Malgré tous ces efforts, a reconnu le représentant, le rythme des progrès reste lent par rapport à ce que demande le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Tout porte à croire que si l’on ne voit pas d’accélération, l’égalité parfaite des sexes prendra en tout 108 ans. 2019 est une année préparatoire importante qui offre l’occasion unique d’unir nos forces et de réaffirmer notre engagement à renforcer l’action à tous les niveaux, a dit le représentant. Le dialogue, les réseaux forts et les efforts conjoints entre tous les acteurs pertinents, dont les défenseurs des droits de l’homme, sont la clef pour changer les choses pour le mieux, la moindre des choses n’étant pas l’accès universel à des services de santé sexuelle et reproductive et à une éducation complète sur la sexualité.
Intervenant au nom du Groupe des pays nordiques, M. JUKKA SALOVAARA (Finlande) a jugé indispensable de lier les objectifs de développement durable (ODD) aux droits et besoins des femmes et filles. Il a également souligné que le succès de l’action climatique requiert une participation égale des femmes à tous les niveaux politiques et à tous les processus de prise de décisions, avant de rappeler que l’insuffisance d’accès à l’eau et à l’assainissement affectait les filles de manière disproportionnée. Alors que la Déclaration et le Programme d’action de Beijing fêteront leur vingt-cinquième anniversaire en 2020, le représentant a salué le rôle de l’organisation ONU-Femmes qui fête cette année ses 10 ans. Il a aussi cité l’adoption, en 2000, de la résolution 1325 du Conseil de sécurité en mettant l’accent sur l’importance de la participation des femmes à tous les processus de paix.
« Alors que nous célébrons tous ces anniversaires », M. Salovaara s’est dit inquiet des reculs constatés au niveau mondial en matière de parité, en particulier dans le domaine de la santé reproductive et santé sexuelle. Il a appelé à mettre un terme à cette tendance régressive afin que la santé des femmes et des filles puisse être préservée. Il a mis l’accent sur l’importance de l’éducation en précisant que toutes les écoles des pays nordiques dispensaient une éducation sexuelle. Il a jugé indispensable que la société civile puisse apporter sa valeur ajoutée aux travaux de l’ONU en matière de lutte contre la discrimination à l’égard des femmes.
Tout en se félicitant du rythme de développement des technologies observé ces 50 dernières années, M. Salovaara a jugé pertinent d’aborder les incidences négatives des technologies sur les droits et statuts des femmes. Notant que les harcèlements sur Internet sont souvent motivés par le genre, il a encouragé les femmes et les filles à diffuser des messages de nature à déconstruire les clichés et stéréotypes. « Pour réaliser la parité entre les genres, nous avons aussi besoin de l’implication de tous les hommes », a-t-il conclu avant d’exhorter les hommes et les garçons à faire montre de solidarité dans cette lutte.
M. JOHN M. SILK, Ministre des affaires étrangères et du commerce des Îles Marshall, a fait observer que la question essentielle de l’autonomisation des femmes nécessite, au-delà des déclarations dans le cadre de l’ONU, une mise en œuvre et, en fin de compte, une volonté politique à tous les niveaux. Il s’est félicité de faire partie d’un gouvernement dirigé par une femme, tout en notant que l’élection de celle-ci avait suscité quelques réticences, y compris de la part des femmes. Cette année, la Présidente Heine terminera son mandat et le Ministre s’est dit fier des progrès enregistrés en termes de participation des femmes. Ceci dit, a-t-il ajouté, la région reste celle du monde qui a le plus faible taux de femmes parlementaires.
Malgré les récents progrès juridiques et législatifs, les taux de violence domestique aux Îles Marshall restent inacceptables, a reconnu M. Silk. Un meilleur accès à la protection juridique a encouragé les dénonciations mais une meilleure volonté politique, et personnelle, reste nécessaire pour parvenir à une évolution sociale et à un changement de comportement, afin de s’attaquer aux causes profondes de la violence fondée sur le genre. Pour le Ministre, l’autonomisation des femmes doit être renforcée dans tous les secteurs clefs et la communauté internationale doit continuer à faire avancer la volonté politique aux plus hauts niveaux pour que cette question figure au centre de l’action en faveur des droits de l’homme.
Réaffirmant l’engagement de son pays en faveur de l’élimination de toutes les formes de violence basées sur le genre, Mme FRECHIN (Suisse) s’est déclarée convaincue que l’égalité des genres et la réalisation des droits des femmes sont des conditions indispensables pour atteindre les objectifs de développement durable. Le 14 juin, a-t-elle rappelé, femmes et hommes se sont mobilisés en nombre en Suisse pour revendiquer l’égalité, dans la sphère publique comme privée. Parmi les revendications figurait la promotion de la santé sexuelle et reproductive et des droits qui y sont liés, notamment le libre choix dans la reproduction et le droit à l’avortement libre et gratuit, a-t-elle précisé. Pour la représentante, cette manifestation s’inscrit dans la droite ligne de mouvements sociaux au retentissement mondial qui suscitent une attention accrue sur les violences faites aux femmes.
Se disant inquiète de la remise en question de la reconnaissance des droits à la santé sexuelle et reproductive et des acquis internationaux en la matière, une tendance observée, selon elle, lors des négociations de la Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle, la représentante a soutenu que le respect et la promotion de ces droits contribuent à la réduction de la pauvreté, à une croissance économique inclusive ainsi qu’à un développement durable au bénéfice de tous. Après avoir salué le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, qui aborde la problématique spécifique des violences commises pendant l’accouchement et des violences obstétricales, elle a encouragé tous les États Membres à mettre en œuvre les recommandations formulées dans ce document de manière rapide et effective.
Mme AL ABTAN (Iraq) a insisté sur l’importance du rôle de la femme dans le développement du monde rural. L’autonomisation de la femme est un devoir national, a-t-elle poursuivi, soulignant que la femme est un pilier de toute « bonne famille ». Elle a indiqué que son gouvernement avait lancé des programmes et séminaires visant à améliorer les compétences des femmes rurales et à leur permettre d’adopter des méthodes agricoles scientifiques pour améliorer les rendements. De plus, l’Iraq investit dans l’industrie alimentaire pour améliorer les revenus des foyers. Elle a toutefois indiqué que les défis à relever sont majeurs, notamment à cause des changements climatiques et de la désertification.
Mme AL ABTAN s’est enorgueillie des progrès réalisés dans son pays en dépit d’un contexte sécuritaire difficile. Elle a précisé qu’aucun texte juridique en Iraq ne favorise la discrimination, quelle que soit sa forme. Les lois accordent même une priorité aux femmes en ce qui concerne le renforcement de capacités. Elles disposent du droit de vote et d’être candidates et bénéficient des mêmes chances dans l’éducation et l’emploi, a-t-elle dit.
La représentante a par ailleurs indiqué que l’Iraq avait lancé une stratégie nationale pour combattre la violence contre les femmes et que le 17 juin dernier, le Président iraqien avait annoncé la finalisation d’un projet de loi contre la violence domestique.
Mme AKANE MIYAZAKI (Japon) a déclaré que l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes peuvent maximiser leur potentiel et libérer celui des sociétés. C’est fort de cette conviction que le Japon a adopté, au niveau domestique, des mesures significatives. Parmi celles-ci, il y a eu, en mai dernier, la révision de la loi sur la promotion de la participation des femmes et pour l’avancement des carrières en milieu professionnel, suivie, en juin, de celle portant sur la prévention et la protection des femmes contre la violence et la protection des victimes.
Par ailleurs, le Japon, en collaboration avec le G20 et le W20, a accueilli, en mars dernier, la cinquième Assemblée mondiale des femmes, également connue sous le nom de « WAW! ». Au cours de cette rencontre, a indiqué la déléguée, le Premier Ministre du Japon, M. Shinzo Abe, a réitéré l’engagement du Japon à fournir une éducation de qualité et des opportunités de développement à au moins quatre millions de filles et de femmes dans les pays en développement pendant la période 2018-2020.
En plus de ces efforts, le Japon a versé 24 millions de dollars l’an dernier à ONU-Femmes et soutient systématiquement le travail de la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. Le pays a également contribué à hauteur de 11 millions de dollars aux efforts visant à soutenir l’autonomisation des femmes dans les zones de conflits, en Afrique et au Moyen-Orient. La ville de Tokyo accueillera en outre, les 3 et 4 avril 2020, le sixième symposium WAW!, a indiqué la délégation.
Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) a fait part de l’engagement de son pays à éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, y compris en durcissant le Code pénal, et de l’établissement de centres de crise et des abris offrant des services complets aux survivants de violence domestique et de la traite d’êtres humains. La Hongrie, a poursuivi la représentante, a renforcé ses politiques familiales et sociales afin d’épauler les femmes dans leurs différents rôles et de leur permettre d’exceller dans leurs carrières sans compromettre leurs vies familiales et privées, ou de mères à plein temps.
Mme Bogyay a expliqué que ces objectifs sont consolidés par l’octroi d’une pension alimentaire à l’accouchement, un congé parental payé de trois ans et des services gratuits de garde d’enfants, ainsi que des emplois flexibles. De plus, les politiques familiales sont conçues pour éliminer l’insécurité de revenu des femmes souhaitant avoir des enfants et un nouveau plan d’action complet en matière de politique familiale a été lancé cette année. Dans le cadre de ce plan, a-t-elle précisé, les femmes ont droit à un prêt subventionné de 33 000 dollars au mariage, qui est remis à la naissance du troisième enfant. Les jeunes couples mariés qui s’engagent à avoir deux ou plus enfants ont droit à des subventions de logement d’un montant de 72 000 dollars. Enfin, reconnaissant que les parents célibataires, et en particulier les mères célibataires, sont particulièrement à risque de marginalisation socioéconomique, le Gouvernement a soutenu la création d’un centre pour les parents uniques à Budapest, qui octroie des formations, des interventions et des conseils en cas de crise, ainsi que le mentorat et la garde d’enfants.
Mme OPPERMANN (Luxembourg) a regretté le climat politique répressif dans de nombreux pays, avec un nombre croissant d’attaques contre les droits humains, y inclus les droits des femmes et des filles, ce qui est « très inquiétant ».
Sur le terrain, ces attaques sont non seulement verbales mais également physiques, a-t-elle précisé. Elle s’est aussi inquiétée de la tendance, notamment dans les enceintes internationales, d’un nouveau discours qui cherche à défaire les progrès sociaux et normatifs des dernières décennies. Reprenant à son compte les craintes de la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, elle a indiqué que d’ici les 10 prochaines années, les droits des femmes et des filles auront régressé, au lieu de progresser. Pire, au regard du rythme de progression actuel, il faudra 108 ans pour arriver à la parité entre les sexes! « Nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre aussi longtemps », a-t-elle martelé.
Le Luxembourg travaille dans cette optique et s’engage, dans sa politique étrangère, à renforcer la représentation et la participation des femmes à tous les niveaux, afin de contribuer au renforcement de la paix, de la sécurité et de la démocratie dans le monde. De même, la coopération luxembourgeoise a soutenu l’initiative « She decides » (elle décide), dès ses débuts, et continue de financer le Fonds des Nations Unies pour la population, ONU-Femmes, ainsi que d’autres agences onusiennes afin de promouvoir l’autonomisation des femmes.
Pour finir, elle a appelé à mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles. Ce fléau sociétal est non seulement une violation des droits humains mais va également à l’encontre d’une véritable égalité des sexes, a-t-elle souligné.
« La Nouvelle-Zélande est le premier pays du monde où les femmes ont obtenu le droit de vote et nous en sommes fiers. Mais nous ne devons pas verser dans l’autosatisfaction. Il nous reste encore beaucoup de chemin à faire », a estimé Mme BUIST-CATHERWOOD (Nouvelle-Zélande). Elle a notamment précisé que les violences familiales et les violences faites aux femmes demeurent élevées, l’égalité salariale est loin d’être acquise et les femmes sont encore peu nombreuses aux positions de pouvoir dans le secteur privé.
La représentante s’est alarmée de constater que partout dans le monde, beaucoup de femmes étaient encore laissées pour compte à mi-parcours du Programme 2030. Elle s’est aussi inquiétée des « efforts déployés, notamment cette année lors des travaux de la Commission sur la condition de la femme, pour revenir en arrière en ce qui concerne le droit à disposer de son corps, l’éducation sexuelle, la santé sexuelle et reproductive, et les violences faites aux femmes. « Nous sommes inquiets de constater une politisation grandissante de ces questions », a-t-elle dit.
Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a déploré que l’inégalité entre les sexes demeure l’un des défis majeurs de notre temps. Elle a recommandé, pour y remédier, « de se préoccuper des barrières structurelles, telles les normes sociales, les attitudes et les stigmatisations injustes, et d’élaborer un cadre légal progressiste pour l’égalité des sexes ». Elle a dénoncé l’esclavage moderne et le trafic d’êtres humains qui touchent 40 millions d’individus, dont une écrasante majorité de femmes, victimes d’exploitation sexuelle, de mariages forcés, et contraintes à la servitude domestique ou à la mendicité.
Ces abus constituent des phénomènes complexes qui exigent une stratégie diversifiée et globale, a-t-elle souligné, citant en exemple la résolution 73/146 de l’Assemblée générale qui encourage les États Membres à identifier et perturber les flux financiers provenant du trafic des femmes et des filles, qui génèrent 150 milliards de dollars de revenus chaque année.
Elle a ensuite expliqué que son gouvernement avait lancé l’initiative Liechtenstein, un partenariat public-privé entrepris avec l’Australie et les Pays-Bas, pour la création d’une commission du secteur financier sur l’esclavage moderne et le trafic d’êtres humains. Cette dernière a remis, moins d’un an plus tard, un plan de mobilisation de la finance contre l’esclavage qui combat ces abus par des financements durables et innovants, des prêts et des investissements et promeut le respect des réglementations.
Mme Oehri a par ailleurs relevé que les hommes et les jeunes garçons sont eux aussi victimes d’abus sexuels en particulier lors de leur recrutement militaire et de leur détention durant les conflits armés. Elle a déploré qu’en dépit de la mention spécifique des hommes et des garçons dans la récente résolution 2467 du Conseil de sécurité, on manque toujours d’informations sur ces violences en raison de la faiblesse de cadres juridiques, des tabous et de la crainte de la stigmatisation.
M. RICHARD ARBEITER (Canada) a estimé que la Troisième Commission est, sans nul doute, la commission de l’Assemblée générale la plus proche de la parité. Il s’est aussi félicité de l’importance de ses travaux qui, de façon plus ou moins progressive, ont contribué à améliorer la vie des populations, et notamment celle des femmes. Le représentant a cependant reconnu que la mise en œuvre reste un défi persistant. Dans ce contexte, la contribution du Canada est ancrée dans sa « conviction sans faille » que la promotion des droits des femmes est « nécessaire et juste », a-t-il indiqué. À ses yeux, le monde ne peut que tirer profit d’une situation où les femmes et les filles peuvent librement décider du cours de leur vie, sans subir ni discrimination ni violence.
Évoquant le modèle de politique des Nations Unies sur le harcèlement sexuel et le code de conduite, le représentant a noté que la Convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur le harcèlement dans le monde du travail est une réalisation extraordinaire. Elle reconnaît en effet la protection de tous les travailleurs migrants, y compris les femmes et les travailleurs appartenant à des groupes vulnérables ou en situation de vulnérabilité. Il a également qualifié d’avancées importantes les résolutions de l’Assemblée générale sur les femmes, la paix et la sécurité.
Fier que son pays ait été le premier au monde à avoir une femme premier ministre en 1960, Mme THILAKAMUNI REKHA NISANSALA GUNASEKERA (Sri Lanka) a vu là l’illustration des multiples opportunités qui s’offrent à la gent féminine dans le domaine politique. L’imposition de quotas pour encourager une plus grande participation doit être vue, a-t-elle expliqué, dans le contexte des normes culturelles qui influencent les femmes et leur choix d’entrer en politique ou pas. Les Sri-Lankaises, a-t-elle ajouté, représentent la moitié de la population du pays et elles excellent à l’université. Leur nombre accru à tous les niveaux des secteurs public, privé ou administratif est extrêmement encourageant. Commentant le rapport du Secrétaire général, la représentante a confirmé que les femmes sont les plus touchées par les effets des changements climatiques. Elle a donc plaidé pour la prise en compte de la dimension sexospécifique lorsqu’on s’attaque à ce phénomène. Les femmes étant également disproportionnellement touchées par les conflits, dont celui qui a ravagé Sri Lanka pendant près de 30 ans, un plan d’action national pour les femmes chefs de ménage a été lancé, avec un accent particulier sur la santé, la sécurité des revenus et les services psychosociaux.
La représentante s’est félicitée de la coopération de son pays avec ONU-Femmes qui contribue à l’élaboration d’un plan national sur la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité. Contre la violence à l’égard des femmes et des filles, Sri Lanka a contraint tous ses ministères à tenir compte de la dimension sexospécifique. Des comités ont donc été créés pour budgétiser, intégrer les principes d’équité et d’égalité dans les politiques et sensibiliser l’opinion. Ces comités sont aussi chargés de combattre le harcèlement sexuel sur le lieu travail. Sri Lanka s’est aussi doté d’un plan d’action contre la violence sexuelle et fondée sur le sexe, a adhéré au cercle de dirigeantes et de dirigeants pour la prévention de l’exploitation et des atteintes sexuelles, signé le Pacte volontaire du Secrétaire général et contribué au fonds d’affectation spéciale en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles. Le pays, a conclu la représentante, est également membre du Groupe des Amis de la parité des sexes.
M. SUKHBOLD SUKHEE (Mongolie) a indiqué que l’autonomisation et la protection des droits de toutes les femmes et filles sont des priorités de son gouvernement. La législation sur le genre a été renforcée ces dernières années dans le cadre des lois sur la famille, la violence domestique, la traite des êtres humains, le droit des personnes handicapées, et autres lois et programmes adoptés par le Parlement. Celui-ci a également adopté sa Vision du développement durable 2030 qui s’engage sur la voie de l’égalité des genres et de l’accès aux avantages sociaux. En outre, a poursuivi le délégué, la Commission nationale sur l’égalité des genres travaille sous la houlette du Premier Ministre pour la coordination de la mise en œuvre des politiques de genre et des processus budgétaires.
Le Gouvernement de la Mongolie a également mis en place 12 types de protection sociale, comme les allocations aux femmes enceintes et allaitantes, ainsi qu’une allocation spéciale pour les mères qui s’occupent d’au moins quatre enfants de moins de 3 ans. Malgré tous ces efforts, le taux de femmes et filles victimes de violence basée sur le genre reste élevé, a reconnu le représentant, en exprimant la détermination de son pays à améliorer l’application des politiques et programmes existants. Enfin, il a plaidé en faveur de l’amélioration de la situation des femmes rurales, un problème que sa délégation souligne chaque année dans un projet de résolution qu’elle prépare.
Mme ADELA RAZ (Afghanistan) a exposé les efforts entrepris pour améliorer le sort des femmes: en août le Gouvernement a lancé la seconde phase de son plan national d’action pour la mise en œuvre de la résolution 1325 sur « femmes, paix et sécurité » pour la période 2019-2022. Le plan couvre les quatre axes de la résolution: participation, protection, prévention et secours et prévoit des mesures spécifiques pour promouvoir les femmes au niveau décisionnel dans le secteur de la sécurité. De même dans les efforts de paix: 16 femmes siègent désormais au Haut Conseil pour la paix et représentent 30% des 3 000 participants à l’Assemblée pour la paix, dont elles président 13 des groupes de travail. Le Gouvernement a également pris des mesures pour les aider à devenir financièrement actives et indépendantes notamment en milieu rural, grâce à la création de microentreprises agricoles.
L’Afghanistan, a poursuivi Mme Raz, a simultanément développé une stratégie de prévention de la violence contre les femmes et créé un bureau d’adjoint pour l’élimination de la violence contre les femmes au Bureau du Procureur. Il doit permettre d’améliorer l’accès des femmes à la justice et déjà, près de 10 500 affaires ont été poursuivies, s’est-elle félicitée. Le Gouvernement a également instauré une vingtaine de foyers pour les femmes victimes de violence et leurs témoins afin de les mettre en sécurité. Et pour la première fois, le pays est représenté devant cette commission par une femme, s’est-elle enorgueillie.
Mme TEGAN BRINK (Australie) a constaté que la discrimination et les inégalités de genre sont toujours bien réelles et omniprésentes. La violence à l’encontre des femmes est une réalité inacceptable et l’Australie est déterminée à démonter les inégalités structurelles et à répondre aux attitudes négatives sous-jacentes de cette forme de violence, a affirmé la représentante. Elle a noté que cela signifie des investissements significatifs, une approche coordonnée et une lutte contre des pratiques nuisibles comme les mariages forcés et les mutilations génitales féminines.
Le Plan national pour réduire la violence à l’égard des femmes et des enfants pour la période 2010-2022 est la feuille de route nationale dans ce domaine, et, sur le plan international, l’Australie soutient le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes ainsi que le Programme conjoint sur les services de base à apporter aux femmes et aux fillettes victimes de violence, a précisé la déléguée. Elle a également confié que l’Australie soutient des initiatives visant à remédier à des législations et politiques qui limitent la participation économique des femmes. À cet égard, la représentante a rappelé que l’une des manifestations parallèles du segment de haut niveau de l’Assemblée générale était organisée par l’Australie avec Mme Elizabeth Broderick, l’ancienne Commissaire australienne pour les questions de discrimination sexuelle et Vice-Présidente actuelle du Comité des Nations Unies sur les discriminations sexuelles, dans le but de réfléchir à comment les leaders des milieux d’affaires, du sport et des médias pourraient promouvoir l’égalité de genre et l’autonomisation économique des femmes. La représentante a également souligné l’importance capitale de l’accès et du droit à la santé sexuelle et reproductive pour pouvoir avancer en matière de parité.
Mme AYŞE INANÇ ÖRNEKOL (Turquie) a indiqué que l’égalité hommes-femmes est l’un des principes consacrés par la Constitution turque. Le concept de « discrimination positive » a été récemment introduit par un amendement constitutionnel au bénéfice de groupes vulnérables tels que les femmes, les enfants et les personnes handicapées. S’agissant des violences contre les femmes, la déléguée a indiqué que son pays a mis en place un arsenal répressif conséquent et contribué à la Convention d’Istanbul sur la lutte contre la violence domestique négociée sous les auspices du Conseil de l’Europe. « Nous avons par ailleurs créé des abris pour femmes afin de protéger les victimes de violence. » Enfin, la déléguée a indiqué que son pays veille à répondre aux besoins humanitaires, éducatifs et sanitaires des femmes ayant trouvé refuge en Turquie, notamment en provenance de Syrie.
M. GONZALO ARNALDO RIVERA ROLDAN (Pérou) a indiqué que son gouvernement avait approuvé, en avril dernier, une politique nationale d’égalité des sexes, principal instrument d’orientation pour combler le fossé et proposer des modèles de comportements exempts de discrimination.
Le Pérou a également choisi de combattre la violence à l’égard des femmes et des filles à partir d’une démarche préventive pour inciter à des changements de comportements socioculturels. Il a indiqué qu’un pouvoir inégal et des différences hiérarchiques légitiment et exacerbent la violence fondée sur le sexe au sein de la famille, de la société et des institutions publiques et privées. Des centres d’urgence pour les femmes ont également été établis sur tout le territoire péruvien dont 378 sont à présent opérationnels, a-t-il ajouté.
Le représentant a aussi indiqué que son gouvernement offre aux femmes de toutes les régions du pays des outils les aidant à exercer une véritable autonomie économique. Il s’agit notamment de réduire les écarts dans le domaine de l’emploi et sur le lieu de travail et à favoriser un partage équitable des responsabilités professionnelles et au foyer, a-t-il expliqué. L’égalité salariale et la non-discrimination sont également les maîtres mots dans les politiques publiques actuelles, notamment avec l’approbation de la loi prohibant la discrimination salariale entre hommes et femmes.
Dans la sphère politique, des mécanismes sont mis en place pour garantir la participation accrue des femmes, y compris dans les processus électoraux et pour occuper des postes publics. De la même façon, la sélection des ministres d’État promeut l’équilibre des sexes au plus haut niveau de la prise de décisions.
M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a estimé que la reconnaissance des capacités des femmes et de leurs contributions « indispensables » à la société exige que les systèmes législatifs, les institutions et politiques nationales et les modèles culturels reconnaissent et appliquent l’égalité des droits et l’accès des femmes à la propriété, au contrôle des ressources vivrières, aux semences, aux outils agricoles, aux marchés, aux crédits, aux prêts et aux subventions.
Préconisant un « monde de valeurs », où tous les êtres sont en mesure de tirer parti du meilleur d’eux-mêmes pour créer les conditions d’un développement juste, durable et souverain, il a souligné que les femmes au Nicaragua jouent un rôle central et prennent les décisions à tous les niveaux et dans toutes les instances. Le représentant a souligné que le Nicaragua occupe la cinquième place mondiale dans l’indice d’égalité des genres, le premier dans les Amériques, le cinquième pour ce qui est de la participation des femmes au Parlement et le premier à des postes ministériels. Les femmes représentent 59,7% dans l’appareil judiciaire, 56% dans l’exécutif, 45,7% à l’Assemblée nationale, 46% des maires, 60% des maires adjoints et 60% des conseillers municipaux, s’est-il félicité.
Mme AURRECOECHEA DURAN (Mexique) a rappelé qu’en 1975, son pays avait accueilli la première Conférence mondiale de la femme, qui avait ouvert la voie, quatre ans plus tard, à la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes, puis 20 ans plus tard, au Programme d’action de Beijing.
Elle a ensuite indiqué que le Mexique avait atteint, pour la première fois dans son histoire, la parité au sein de son Congrès, et qu’une réforme constitutionnelle garantissant cette même parité dans toutes les branches du gouvernement avait récemment été approuvée. Elle s’est cependant déclarée préoccupée par l’ambiance de polarisation dans les forums internationaux, facteur de ralentissement des progrès pour les femmes et les filles, en particulier pour les plus vulnérables d’entre elles. Elle a jugé « inconcevable » à cet égard, les voix qui s’élèvent pour nier aux femmes le contrôle de leurs corps et de leur sexualité.
De plus en plus de pays mettent entre parenthèses les droits sexuels et reproductifs des femmes, alors qu’un « nombre atterrant » de femmes continuent de perdre ou de risquer leur vie à cause de leur manque d’accès à ces droits, s’est-elle alarmée. Elle s’est également préoccupée des mauvais traitements et les discriminations dans l’accès aux services de santé que subissent les femmes.
Selon Mme Aurrecoechea Duran, la violence envers les femmes est « la manifestation d’une inégalité structurelle issue de l’asymétrie du pouvoir et du patriarcat ». Elle a ensuite mentionné les efforts en cours pour l’interdiction du mariage d’enfants, ainsi que la mise en place de l’initiative « Spotlight » en collaboration avec le système des Nations Unies et l’Union européenne. Le Mexique travaillera également avec la France l’année prochaine au Forum Génération égalité, et y voit l’occasion d’élaborer « une perspective fondée sur des acteurs multiples et soumise à la société civile, dans un programme féministe visant l’égalité des sexes au plus tard en 2030 ».
Mme RITA MWALE (Zambie) s’est attardée sur le programme social de transfert d’argent liquide qui, a-t-elle affirmé, a montré son efficacité dans la réduction de la pauvreté et l’amélioration de la redistribution des revenus, en particulier dans les communautés rurales où le niveau de pauvreté demeure élevé avec 76,6%. À ce jour, 632 020 ménages profitent de ce programme dont 72,2% de femmes. Cette année, l’objectif est de toucher 700 000 ménages et, en conséquence, la part des programmes de protection sociale a été accrue dans le budget 2020. D’autre part, le programme pour les moyens de subsistance des femmes qui vise 75 000 femmes vulnérables mais « viables », âgées de 19 ans à 64 ans, a permis d’offrir une formation en entrepreneuriat et des dons pour booster la productivité à 34 123 femmes. La représentante a aussi parlé du succès du programme contre le décrochage scolaire des filles et du train de mesures pour la sécurité alimentaire. Elle a aussi attiré l’attention sur un projet agricole qui contribue à la création d’emplois et de richesses dans les communautés rurales, en aidant à ce jour 120 coopératives dirigées par des femmes. La représentante a conclu en expliquant les efforts faits par son gouvernement pour réhabiliter les écoles dans le milieu rural ainsi que les centres de santé dont certains seront totalement neufs.
Mme ANEL BAKYTBEKKYZY (Kazakhstan) a relevé que les femmes et les filles sont, dès le plus jeune âge, confrontées à de nombreux défis en matière d’éducation, d’emploi, de mariage, de santé reproductive, de participation politique et de protection contre la violence basée sur le genre. Soulignant que leur autonomisation est une question centrale du Programme des Nations Unies pour le développement, elle a recommandé que les femmes soient intégrées dans les efforts visant à renforcer la paix et la sécurité, le développement durable, l’éradication de la pauvreté, les changements climatiques et la protection des droits de l’homme, notant qu’elles doivent aussi jouer un rôle dans les processus de paix et dans la lutte contre le terrorisme. Il faut continuer, 25 ans après le Programme d’action de Beijing, à forger de nouveaux partenariats et à financer les mécanismes gouvernementaux, a-t-elle ainsi recommandé.
La représentante a indiqué que son pays est engagé dans des programmes et politiques en faveur des femmes, étant déterminé notamment à lutter contre le trafic d’êtres humains et pour la participation des femmes sur les plans économique et politique. Elle a parlé de la stratégie de développement, appelée « Kazakhstan 2050 », qui souligne l’importance de la santé maternelle, de l’autonomisation économique des femmes et des droits sociaux de celles-ci. Les résultats atteints grâce à ce programme sont impressionnants, a-t-elle dit. La représentante a aussi mentionné le fort taux -57%- de femmes qui font des études supérieures au Kazakhstan. Enfin, elle a indiqué que son pays jouait un rôle de leader dans la région en hébergeant par exemple un bureau d’ONU-Femmes.
M. ISNOMO (Indonésie) a détaillé les mesures prises par son pays en matière de santé, d’éducation, de lutte contre les violences faites aux femmes et de participation dans la vie publique. Il a notamment expliqué que l’Indonésie s’est engagée à fournir à chaque femme un accès aux services de santé, ce qui inclut la santé reproductive. Grâce à la mise en place du régime national d’assurance santé en 2014, 222 millions de personnes, soit 83% de la population, sont désormais couvertes. Un cinquième des dépenses du pays sont consacrées à l’éducation, et divers programmes de soutien à la création d’entreprises et d’accès au crédit ont été mis en place en faveur des femmes en milieu rural.
Le délégué a ensuite insisté sur l’importance de protéger les femmes migrantes des violences. Il y a aujourd’hui 20% de femmes au Parlement indonésien, un taux qui devrait augmenter, a-t-il affirmé, car la loi oblige les partis politiques à présenter au moins 30% de femmes candidates aux élections. L’Indonésie s’est aussi engagée à augmenter le nombre de femmes dans ses forces de maintien de la paix: elles sont aujourd’hui 126 sur les 2 900 Indonésiens servant sous les couleurs des Nations Unies.
Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a appelé les États Membres à saisir, en 2020, l’occasion de faire progresser l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles. Elle a indiqué que 80% des femmes africaines résident et contribuent au développement économique et social dans des zones rurales. Elle a prévenu qu’elles subissent de plein fouet les effets des changements climatiques, propices à la perte de récoltes et à la propagation de maladie, cause de déplacement de populations dans lesquelles les femmes et les filles figureront comme les personnes les plus vulnérables.
En Guinée équatoriale, où plus de 60% des femmes résident en zone rurale et vivent de l’agriculture, a poursuivi Mme Mele Colifa, la banque nationale de Guinée équatoriale a créé un programme de crédits bancaires pour les femmes. Elle a ajouté que 95% des routes sont goudronnées, ce qui facilite les échanges commerciaux, et que 85% des villes disposent de plans urbains, des progrès qui, a-t-elle souligné, bénéficient en premier lieu aux conditions sociales et économiques des femmes. De même, une couverture santé est offerte à toute la fonction publique où le nombre de femmes augmente constamment. Un décret assure par ailleurs la gratuité des soins pour la santé maternelle et infantile, et diverses conditions affectant particulièrement les femmes ainsi que le dépistage du VIH et la prise en charge psychiatrique.
Mme GUZAL M. KHUSANOVA (Fédération de Russie) a rappelé que l’an prochain, la communauté internationale célébrera un certain nombre de dates anniversaires dans le domaine de l’amélioration de la condition de la femme: les 25 ans de la quatrième Conférence mondiale des Nations Unies sur la situation des femmes, les 20 ans de l’adoption de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité ou encore les 10 ans de la fondation d’ONU-Femmes. Cette année a-t-elle également souligné, verra en outre la commémoration du vingt-cinquième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.
La représentante s’est ensuite déclarée globalement satisfaite du travail d’ONU-Femmes sur l’année écoulée, mais a toutefois relevé certaines insuffisances, notamment en matière d’efficacité. Elle s’est notamment inquiétée de l’état de la parité au sein de cette agence et a demandé instamment à ses dirigeants de s’attaquer plus activement aux déséquilibres entre les sexes au sein même de l’entité. « Un travail de promotion de la parité ne sera efficace que lorsque la parité sera respectée au sein des Nations Unies », a-t-elle souligné. Elle a estimé que le facteur décisif dans la sélection des candidats ne doit pas être leur sexe, mais leur travail, leurs compétences et leur intégrité, sans oublier le principe de représentation géographique équitable.
M. VIENGKEO KHAOPASEUTH (République démocratique populaire lao) a reconnu le rôle important joué par les femmes dans le développement du pays. Il a expliqué que le Gouvernement promeut l’autonomisation des femmes et l’égalité des genres, et protège les femmes et les filles afin de s’assurer qu’elles puissent jouer leur rôle dans la vie socioéconomique et politique. La Commission pour l’avancement des femmes, des mères et des filles est un organe important à cet égard.
Le nombre de parlementaires femmes a augmenté pour atteindre 27,5%, contre 25% lors de la législature précédente, et elles comptent pour 31,9% des conseils provinciaux; elles dirigent aussi plus de 50% des petites et moyennes entreprises du pays. Il a également indiqué que le projet de loi sur l’égalité de genre a été présenté à l’Assemblée nationale en début d’année, et devrait être approuvé à la fin de cette année.
À l’échelon régional, le pays participe activement au Comité pour la promotion de la femme de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), ainsi qu’à la Commission de l’ASEAN pour la protection et la promotion des droits de la femme et de l’enfant. Aussi, les huitième et neuvième rapports périodiques soumis au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ont été présentés et distribués aux agents du Gouvernement, aux parties prenantes et au grand public en langue lao. Beaucoup de ces réalisations ont été intégrées au Plan national de développement économique et social de 2016-2020, a-t-il précisé.
Mme NOUR ALI (République arabe syrienne) a assuré que, dans son pays, la Constitution et les lois ont amélioré les droits des femmes, qui sont aujourd’hui égales aux hommes dans tous les aspects de la vie économique, politique et sociale. Depuis des centaines d’années, les Syriennes se battent contre l’oppression et l’occupation étrangère, a souligné la représentante, faisant état d’une succession d’acquis obtenus au fil du temps. Les femmes syriennes peuvent voter depuis 1948 et leur pays a été le premier État arabe à accorder aux femmes le droit de siéger au Parlement. En outre, la Constitution de 2012 donne aux femmes le droit de participer à tous les niveaux de la vie politique. Depuis 2016, a poursuivi la déléguée, c’est une femme qui occupe le poste de présidente du Conseil du peuple et une autre dirige la Cour antiterroriste. Une nouvelle loi sur le statut personnel, promulguée cette année, actualise celle de 1953.
Le Gouvernement syrien a pris des mesures importantes pour soutenir les femmes en dépit de la situation de guerre que connaît le pays, confronté aux agressions extérieures et au terrorisme. Cette guerre, a insisté la représentante, a détruit des centaines d’années d’acquis et de développement. Malgré les efforts pour assurer la protection des femmes, les défis liés à la guerre ont changé le cours des choses et la vie des Syriennes. En plus de devoir faire face à la violence des combats et aux menaces de groupes terroristes, les Syriennes se voient souvent refuser le droit à la santé ou à l’éducation. De fait, a-t-elle argué, il faut des efforts intensifs pour défendre leur statut, compte tenu des souffrances qu’elles endurent du fait des actions illégales menées contre leur pays par la coalition internationale.
M. MARIO A. ZAMBRANO ORTIZ (Équateur) s’est prévalu d’une constitution qui mentionne explicitement l’égalité de genre et d’un plan de développement qui inclut cette perspective de manière transversale. En septembre 2018, a-t-il ajouté, l’Équateur est devenu le cinquième pays du monde à ratifier les 18 conventions des Nations Unies sur la protection des droits de l’homme. Le pays a également signé et ratifié toutes les conventions internationales qui garantissent la protection des droits de la femme. Le représentant a expliqué que l’Équateur assume ses responsabilités en présentant des rapports aux comités créés en vertu de ces instruments internationaux ainsi qu’en appliquant leurs recommandations.
Nous nous sommes aussi engagés à mettre en œuvre le Programme 2030 et en particulier l’objectif 5 sur l’égalité de genre, a poursuivi M. Zambrano Ortiz. Si le pays se félicite des progrès accomplis pour garantir les droits des femmes et des filles, il est conscient que les femmes sont confrontées à des diverses formes de discrimination, a-t-il reconnu. Mais il a assuré que les institutions du pays se sont orientées vers le développement formel et concret du pays pour que les personnes jouissent effectivement de leurs droits et de l’égalité.
« La Roumanie se classe pour la deuxième année consécutive en tête des pays de l’Union européenne en termes d’égalité salariale avec une différence de seulement 3% entre hommes et femmes contre une moyenne européenne de 16% », s’est félicitée Mme MARIA-IULIANA NICULAE (Roumanie). Elle a mis en avant le rôle de son pays à la présidence du Conseil européen lors des négociations sur la « directive relative à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée » laquelle a permis l’introduction d’un congé paternité de 10 jours ouvrables avant ou après la naissance. La Roumanie en a profité pour rendre deux des quatre mois de congé paternité non transférables d’un parent à l’autre.
M. ZHANG ZHE (Chine) a rappelé que lors du Sommet de 2015, le Président chinois avait présenté plusieurs propositions, montrant la voie de la promotion des femmes dans le monde. Il avait recommandé d’accélérer la mise en œuvre des objectifs de promotion des femmes et de s’attacher à la Déclaration de Beijing, tout en aidant davantage les pays en développement. La femme chinoise, a affirmé le représentant, est au centre de toutes les politiques nationales. Plus de 100 lois de protection des intérêts de la femme ont été adoptées. En conséquence, les femmes représentent 40% des employés et 55% des entrepreneurs. Elles ont un taux de 24% au Congrès du parti et leur nombre dans le treizième Comité du parti a également augmenté. Sur le plan international, la Chine ne cesse à inviter des femmes du monde entier pour leur offrir des formations. Elle entend poursuivre sur cette voie, a promis le représentant.
Mme COURTNEY NEMROFF (États-Unis) a rappelé que son pays a une longue tradition d’appui aux femmes. Une tradition que le Président Donald Trump a intégrée à sa politique nationale. Dans ce cadre, l’accent principal de l’action de son administration est mis sur l’autonomisation des femmes, notamment par le biais de l’initiative Women’s Global Development and Prosperity (WGDP). Il s’agit, a-t-elle indiqué, d’une « assistance intelligente au développement » qui vise à atteindre 16 millions de femmes dans les pays en développement d’ici à 2025. Ses objectifs reposent sur trois piliers: le renforcement de la main d’œuvre, l’accession des femmes au crédit et aux capitaux et l’allégement des réglementations qui entravent l’avancement des femmes, a détaillé la déléguée. Elle a ajouté que l’Administration Trump s’est engagée à hauteur de 300 millions de dollars annuels pour appuyer les trois piliers de cette initiative. De plus, la conseillère présidentielle Ivanka Trump a annoncé qu’elle avait dépassé son objectif visant à mobiliser 500 millions de dollars pour les femmes en Amérique latine, a encore relaté la représentante.
Sur un plan plus institutionnel, elle a rappelé qu’en juin dernier, le Gouvernement américain avait publié la stratégie des États-Unis pour le programme femmes, paix et sécurité. Il redouble en outre d’efforts pour que toutes les femmes soient traitées sur un pied d’égalité, et ce dans tous les domaines, a-t-elle renchéri. Prenant note des rapports du Secrétaire générale sur les questions liées aux femmes, elle a précisé que sa délégation n’en approuvait pas toutes les conclusions, de même qu’elle ne reconnaît pas d’obligation spécifique portant sur l’égalité des sexes. Enfin, pour ce qui est de l’Accord de Paris sur le climat, les États-Unis confirment leur intention de s’en retirer le plus vite possible et ne se considèrent pas liés par les libellés y faisant référence.
Mme AL SULAITI (Qatar) a déclaré que grâce aux efforts nationaux, la femme qatarie a occupé des positions ministérielles, diplomatiques et autres, marquant sa présence dans les domaines de l’éducation, de la santé ou encore de l’industrie. Des femmes siègent au Conseil de l’Assemblée du peuple et le nombre d’entre elles qui ont une éducation du troisième cycle, dans le pays, a augmenté de 75%. La politique du Qatar est de reconnaître l’importance des femmes sur le marché du de l’emploi dans lequel elles représentent 52%. La représentante a donné l’exemple selon lequel l’Institut du Qatar pour la science et l’éducation comprends 50% de femmes. Elle a insisté sur l’agenda « femmes, paix et sécurité » et annoncé pour 2020 un sommet sur la participation des femmes dans les processus de paix.
M. LUIS ANTONIO LAM PADILLA et Mme LIBNA ELUBINA BONILLA ALARCÓN (Guatemala) ont affirmé que la promotion et l’autonomisation des femmes figurent à titre prioritaire dans les politiques publiques. Le Secrétariat présidentiel de la femme (SEPREM) veille au développement intégral des femmes ainsi qu’au renforcement institutionnel du système d’égalité hommes-femmes en vue de l’autonomisation politique et socioéconomique des femmes. D’un autre côté, le Guatemala est pionnier dans le traitement judiciaire des féminicides et autres formes de violence à l’égard des femmes. En effet, neuf juridictions spécifiquement consacrées à ces délits ont été mises sur pied. Le Secrétariat de la femme et d’analyse du genre a été également créé pour se charger de la coordination, l’évaluation et l’orientation sur des aspects liés à la sexospécificité. Il identifie les besoins en matière de sensibilisation et de formation et assure le suivi des accords et engagements internationaux et nationaux.
Le Bureau du Défenseur de la femme autochtone s’occupe, quant à lui, de faire des propositions de politiques publiques, des plans et des programmes de prévention et de défense pour toutes les formes de discrimination à l’encontre des femmes autochtones. La délégation a aussi mis en exergue l’importance de l’accès des femmes à la justice, préalable à la jouissance de tous leurs droits et élément fondamental de l’état de droit et de la bonne gouvernance. « Il est de notre ressort, nous les États Membres, de donner une voix à celles qui ne sont pas écoutées, et d’autonomiser ceux qui ont été marginalisés », a conclu la délégation.
Mme SIMONA DE MARTINO (Italie) a appelé à faire respecter l’objectif de parité des sexes. « Pourquoi devrions-nous nous priver de la moitié de la population pour l’avancement de nos sociétés », a-t-elle interrogé.
Elle a ensuite souligné que l’Italie est opposée aux pratiques néfastes des mutilations génitales féminines et des mariages forcés. Mme De Martino a par ailleurs expliqué que la protection des droits des femmes est une priorité des programmes de coopération pour le développement de son gouvernement. Les femmes sont des moteurs du changement pour l’Italie, a-t-elle affirmé.
La représentante a également souligné que les processus de paix auxquels les femmes ont participé ont plus de chance de tenir. Aussi a-t-elle appuyé l’Alliance globale des réseaux régionaux des femmes médiatrices qui a été lancé le 26 septembre dernier. Les femmes peuvent changer la donne, a déclaré Mme De Martino. Mais nous avons cependant besoin des hommes dans cette bataille.
M. STANLEY RALPH CHEKECHE (Zimbabwe) a rappelé l’attachement de son pays à la parité, malgré les défis à surmonter pour y parvenir. Assurant que l’éducation reste prioritaire au Zimbabwe, il a noté que son gouvernement a garanti des allocations budgétaires pour permettre de progresser vers la parité. Il a aussi consenti d’importants efforts en faveur de l’alphabétisation, dont le taux figure aujourd’hui parmi les plus élevés en Afrique. Selon le représentant, l’égalité des sexes constitue une des grandes avancées constitutionnelles de son pays. En outre, il est illégal, depuis 2016, au Zimbabwe, de se marier à une femme de moins de 18 ans, l’objectif du Gouvernement étant de prévenir le mariage des enfants, notamment dans les zones rurales. Un autre de ses objectifs est de permettre l’accès aux terres pour les femmes. C’est pourquoi, a relevé le délégué, une réforme territoriale a été menée ces dernières années. Elle permet aujourd’hui à 29% des femmes d’accéder à des terres et de pouvoir les exploiter. Dans un souci d’inclusion, le Gouvernement a par ailleurs lancé en 2018 une banque de microfinance en direction des femmes et des jeunes, qui permet l’octroi de prêts à des conditions favorables. Enfin, il accorde une grande attention aux membres les plus vulnérables de la société zimbabwéenne auxquels il apporte toutes sortes d’aides et de services. Le Zimbabwe propose aussi des services de maternité gratuits aux femmes enceintes, a indiqué le représentant.