En cours au Siège de l'ONU

Soixante-quatorzième session,
Réunion de haut niveau sur le Programme d’action de Vienne, Matin & après-midi
AG/12222

Assemblée générale: l’examen à mi-parcours du Programme d’action de Vienne s’achève par des appels à « agir pour nos frères et sœurs » des pays enclavés

« Agissons dans la solidarité avec nos frères et sœurs » des pays en développement sans littoral, a lancé, ce soir, le Président de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad-Bande, en mettant un terme à la réunion de haut niveau, commencée hier, avec l’adoption de la Déclaration politique pour accélérer la mise en œuvre du Programme d’action de Vienne en faveur des pays en développement sans littoral 2014-2024. 

Dans ce document (A/74/L.7) qui « nous interpelle » pour aider ces pays à se relier à la prospérité et aux opportunités, selon les mots du Secrétaire général de l’ONU, les chefs d’État et de gouvernement, les ministres et hauts-représentants reconnaissent les lacunes et les difficultés auxquelles se heurtent ces pays mais énumèrent aussi les mesures pour accélérer la mise en œuvre du Programme d’action.

Comme « nous sommes définis par nos actes, alors agissons », a lancé le Président de l’Assemblée en invitant les États Membres à saisir l’élan de cet examen à mi-parcours pour redoubler d’efforts dans la mise en œuvre du Programme d’action de Vienne, tout en travaillant à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, puisque nous entrons dans la Décennie d’action.  Le Président a invité tous les États Membres à soutenir « nos frères et sœurs » des pays en développement sans littoral, ce qui implique une collaboration de tous les partenaires, dont le secteur privé et la société civile.

Le Programme 2030 a en effet été conçu pour que tous les pays progressent, indépendamment de leur produit intérieur brut ou de leur emplacement géographique, a rappelé le Vice-Ministre des affaires étrangères du Paraguay et Président du Groupe des pays en développement sans littoral au cours de la première des trois tables rondes organisées aujourd’hui. 

Le développement des pays sans littoral, a renchéri la Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), sera une composante essentielle de la Décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable, adoptée en septembre dernier pour marquer le quinquennat du Programme 2030.  La Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement a demandé une meilleure cohérence dans les mises en œuvre du Programme d’action de Vienne, du Programme 2030, du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement, du Cadre de Sendai sur la réduction des risques de catastrophe et de l’Accord de Paris sur le climat.  Elle a insisté sur la mise en œuvre, la surveillance et le suivi du Programme d’action et de la Déclaration politique dont l’appel à l’action doit nous guider vers des mesures ciblées et accélérées pour mettre pleinement en œuvre le Programme d’action, pendant les cinq prochaines dernières années.

Au titre des bonnes nouvelles, l’Accord sur la facilitation des échanges (AFE), adopté en 2013 par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a une nouvelle fois été salué pour sa faculté à réduire les coûts commerciaux de 14,3% en moyenne et à faire grimper le commerce international de 1 000 milliards de dollars par an.  Les opportunités du commerce en ligne ont été mises en lumière ainsi que le potentiel de la Zone de libre-échange continentale africaine qui ouvre la voie à l’union douanière la plus importante au monde et est susceptible de générer 250 milliards de dollars de revenu par an et de créer au moins 1,5 million d’emplois, en doublant le commerce intra-africain, en stimulant les capacités de production et en boostant la diversification des économies.

La Haute-Représentante a lancé un appel à des financements substantiels et un renforcement des capacités pour soutenir les priorités des pays en développement sans littoral dans plusieurs domaines, dont celui du transport que les pays en développement sans littoral paient 50% de plus que les autres.  Les coûts du transport, ce sont les « bakchich », a tranché le Secrétaire général de l’Union internationale des transports routiers.  « Quand un chauffeur de poids lourd est pris en otage entre deux pays, sans toilette, il paie », a-t-il avoué, en reprochant à l’ONU d’ignorer le système des Transports Internationaux Routiers (TIR).  À ce jour, a-t-il souligné, seuls 11 pays en développement sans littoral sont parties au système, ils avancent plus vite que les autres.  Selon une analyse de l’Union africaine, le commerce africain doublerait si tous les pays du continent mettaient en place un système TIR.

L’Assemblée générale se réunira de nouveau lundi 9 décembre, à partir de 10 heures, pour examiner les points relatifs au sport au service du développement et de la paix et à la prévention des conflits.

RÉUNION PLÉNIÈRE INFORMELLE DE HAUT NIVEAU DE L’ASSEMBLÉE CONSACRÉE À L’EXAMEN À MI-PARCOURS DE LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE VIENNE POUR LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT SANS LITTORAL POUR LA DÉCENNIE 2014-2024

Table ronde sur les défis et les opportunités du Programme d’action de Vienne et ses corrélations avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030

En toile de fond sur la situation des 32 pays en développement sans littoral, les participants à la table ronde ont visionné une courte vidéo qui présente un rapide historique de la problématique ayant mené à l’adoption, en 2014, du Programme d’action de Vienne, plan sur le renforcement des partenariats entre les pays sans littoral, les pays de transit et leurs partenaires au développement. 

La Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, Mme FEKITAMOELOA KATOA ‘UTOIKAMANU, a déclaré que depuis le début de la mise en œuvre du Programme d’action et de ses six priorités dégagées, il est chaque fois plus évident qu’il va de pair avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Cet examen à mi-parcours, a-t-elle estimé, est l’occasion idéale de faire le bilan et de réfléchir à d’autres moyens de s’attaquer aux problèmes identifiés.  En cinq ans, a-t-elle souligné, des progrès ont été accomplis s’agissant de la croissance économique, du développement social, des infrastructures routières, ferroviaires et aériennes ou encore de l’intégration régionale. 

Mais, malgré ces signes encourageants, les pays en développement sans littoral payent plus du double des prix de transport, par rapport aux pays de transit, leurs infrastructures de transport et de connectivité demeurent faibles, leur compétitivité est limitée à cause des coûts commerciaux élevés, leurs exportations et importations prennent plus de temps et leur économie est toujours trop dépendante des produits de base, à faible valeur ajoutée.  L’aide publique au développement (APD) a augmenté mais les investissements étrangers directs (IED) ont chuté, a souligné la Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), Mme MONA JUUL. 

Renforcer les partenariats, aller plus loin dans l’intégration régionale et bâtir des économies et des sociétés résilientes, c’est ce qu’il faut prescrire aux pays en développement sans littoral pour qu’ils soient « désenclavés », vibrants, prospères et viables.  La facilitation des échanges, dont la bonne application des accords signés, l’accès aux nouvelles technologies, sans oublier l’intelligence artificielle, le recours plus systématique aux énergies renouvelables sont aussi à conseiller, a ajouté la Haute-Représentante, en parlant de pays souvent vulnérables à la désertification, à la sécheresse et autres catastrophes naturelles dues aux changements climatiques.  Les besoins financiers étant importants, il est impératif de mobiliser une large gamme d’acteurs, y compris le secteur privé, les banques et autres institutions financières régionales et internationales.  Le Programme d’action de Vienne, le Programme 2030, le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, l’Accord de Paris sur le climat et le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement sont intrinsèquement liés, a martelé la Haute-Représentante.  Le développement des pays sans littoral, a renchéri la Présidente de l’ECOSOC, sera une composante essentielle de la Décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable, adoptée en septembre dernier pour marquer le quinquennat du Programme 2030. 

Mme Juul a annoncé qu’en 2020, l’ECOSOC offrira plusieurs occasions de se focaliser sur les priorités des pays en développement sans littoral, d’abord au Forum sur le financement du développement, en avril, et puis à celui sur la coopération pour le développement, en mai.  En juillet, quelque 50 pays, dont 13 sans littoral, se soumettront à l’examen volontaire du Forum politique sur le développement durable, « une belle occasion d’apprendre les uns des autres ».

Le Programme 2030 a en effet été conçu pour que tous les pays progressent, indépendamment de leur produit intérieur brut ou de leur emplacement géographique, a rappelé le Vice-Ministre des affaires étrangères du Paraguay et Président du Groupe des pays en développement sans littoral.  Tous les pays n’ont pas les mêmes besoins en matière de développement, a souligné M. JOSÉ ANTONIO DOS SANTOS: chacun part d’une situation différente dictée par son potentiel et sa place dans le monde.  Il a plaidé pour des programmes « taillés sur mesure » comme le Programme d’action de Vienne, lequel doit être soutenu par une meilleure gouvernance mondiale pour que chaque pays puisse s’attaquer à la pauvreté et relever les défis de l’éducation, de la santé et de la sécurité alimentaire.  Il faut que l’Europe et la Chine travaillent « main dans la main », a conseillé le Directeur du Centre des Nations Unies pour des solutions durables et du Centre pour le développement durable de la « Columbia University ».  M. JEFFREY SACHS a fait valoir ses 34 ans d’expérience avec les pays en développement sans littoral, qu’il a démarrée en Bolivie.  Parlant en particulier de l’Asie centrale, il a insisté pour que l’Europe et la Chine aident les pays « du milieu » à créer de vastes systèmes de liaisons ferroviaires, routières et aériennes.  Il a donné l’exemple de l’initiative chinoise « une Ceinture et une Route » qui montre clairement que c’est possible. 

Quant au Sahel, région la plus pauvre et la plus difficile au monde en termes de développement, affligée par un relief aride et nécessitant des investissements massifs, M. Sachs a plutôt vu « une bénédiction ».  Le Sahel, s’est-il expliqué, peut par son climat devenir une source de l’énergie solaire dont l’Europe deviendrait le marché.  L’exploitation de la large bande de terre sèche du Sahel exige des fonds mais le retour sur investissement est prometteur.  L’importance des données a été soulignée par le Vice-Ministre des affaires étrangères du Paraguay qui a dit l’évidence: quand un État ne connaît pas ses réalités, par manque de statistiques, il ne peut pas élaborer des politiques adaptées à ses besoins.  Il a saisi l’occasion de la table ronde pour fustiger ces groupes internationaux aux ramifications locales qui propagent « un discours anti-ONU » et « s’escriment à diaboliser le travail de l’Organisation ».  Il est temps de contrecarrer ces attaques avec un plan de communication efficace pour « réduire à néant » les arguments fallacieux de ces opposants aux nobles objectifs des États qui se servent des outils précieux de l’ONU pour avancer sur la voie du développement. 

Débat interactif sur le thème « Promouvoir le commerce, la facilitation du commerce et la transformation structurelle de l’économie dans les pays en développement sans littoral »

Les ambitions commerciales du Programme d’action de Vienne n’ont pas été atteintes, a diagnostiqué la Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement.  Le commerce international et la facilitation du commerce sont une des six priorités du Programme d’action.  Il s’agit de réduire les coûts des transactions commerciales et les coûts de transport et d’améliorer les services liés au commerce international par la simplification et la normalisation de la réglementation, de façon à accroître la compétitivité des exportations des pays en développement sans littoral et à réduire le coût des importations, et favoriser ainsi un développement économique rapide qui profite à tous. 

Au titre des bonnes nouvelles, un Accord sur la facilitation des échanges (AFE) a été adopté en 2013 à la Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), avant d’entrer en vigueur le 22 février 2017.  La mise en œuvre intégrale de l’AFE pourrait réduire les coûts commerciaux de 14,3% en moyenne et accroître le commerce international de 1 000 milliards de dollars par an; les pays les plus pauvres devant enregistrer les gains les plus importants.  Mais il faut d’abord que ces pays intègrent les politiques commerciales dans leurs plans de développement, a souligné le Directeur général adjoint de l’OMC, M. YONOV FREDERICK AGAH.

L’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), M. ACHIM STEINER, a fait part des efforts de son Programme pour renforcer les capacités nationales dans le domaine du commerce.  La Directrice à l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), Mme FATOU HAIDARA, a fait de même.  Aujourd’hui, ces efforts sont compliqués, a fait observer le Directeur général adjoint de l’OMC, par la « guerre commerciale ».  L’OMC essaye d’en protéger les petits pays en promouvant des mécanismes de coopération. 

Les opportunités du commerce en ligne ont été mises en lumière aujourd’hui.  Pour les pays en développement sans littoral, ce commerce ne doit pas se réduire aux achats sur « Amazon » ou sur « Alibaba », a fait remarquer le Directeur pour l’Afrique, les pays les moins avancés et des programmes spéciaux de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED).  Ces pays, a encouragé M. PAUL AKIWUMI, peuvent aussi proposer leurs produits au reste du monde.  Pour l’instant, s’est plainte la représentante de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), ce sont surtout les produits étrangers qui envahissent les marchés des pays en développement sans littoral.  Cela vaut aussi pour les produits agricoles, a renchéri la déléguée de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Ce qu’il faut, a estimé l’Administrateur du PNUD, c’est mobiliser les ressources pour financer de meilleurs systèmes de stockage et les infrastructures de transport.  Il faut aussi des « garde-fous », a ajouté le Directeur adjoint de l’OMC, au nom d’une organisation qui contribue à la mise en place de systèmes nationaux de gestion des importations, déterminant par exemple la taille et les besoins du marché. 

L’Organisation mondiale des douanes (OMD) apporte aussi sa pierre à l’édifice.  Son Secrétaire général, M. KUNIO MIKURIYA, a expliqué les efforts pour simplifier les procédures douanières; le but étant de faire en sorte que les frontières qui séparent soient des frontières qui unissent et facilitent les échanges.  Les technologies de l’information et des communications sont mises à contribution pour gérer les mégadonnées collectées aux frontières, lesquelles données doivent être partagées entre les différentes administrations nationales pour maximiser les bénéfices tirés des guichets uniques.  L’OMD a d’ailleurs prêté main-forte au développement de modèles de gestion des données dont la plupart des États se servent.  Le renforcement des capacités des agents de la douane et la bonne volonté politique constituent la formule pour faciliter le transit des biens, a souligné le Secrétaire général.

Oui, mais quels biens?  M. Akiwumi, de la CNUCED, a conseillé aux pays en développement sans littoral de diversifier leur économie, craignant une impasse dans une trop grande dépendance aux produits de base.  C’est un changement structurel qu’il faut, a insisté M. Akiwumi, qui a prôné la promotion des petites et moyennes entreprises.  La transformation structurelle passe par la spécialisation et des structures d’exportation à forte valeur ajoutée, a-t-il martelé.  L’ONUDI, a témoigné Mme Haidara, a mis en place des programmes dont bénéficient des pays comme l’Éthiopie, la Zambie, le Rwanda ou encore le Kirghizistan.  Elle les a encouragés à miser aussi sur une transition technologique guidée par le numérique.  C’est ce pari qu’a fait le Kenya avec des résultats « fabuleux », a relevé M. Steiner, du PNUD, vantant les mérites de son Centre de promotion des « startups ».  Le PNUD compile les enseignements tirés de l’économie numérique pour en faire profiter les pays en développement.  Diversification économique, transition technologique, oui.  Mais il ne faut pas non plus oublier, a ajouté l’Administrateur du PNUD, la transition vers l’économie verte.  Pourquoi l’énergie solaire ne décolle-t-elle pas dans des régions comme le Sahel? a d’ailleurs demandé l’Irlande.  Parce que, a estimé M. Akiwumi, de la CNUCED, les pays en développement sans littoral n’ont pas encore créé des systèmes de gestion intégrée des ressources énergétiques. 

Débat interactif sur le thème « Intégration régionale et l’interconnexion des infrastructures » 

Les 32 pays en développement sans littoral sont en moyenne à 1 370 kilomètres de la mer, a décrit le Directeur des programmes de pays du Centre du commerce international et animateur de la table ronde, M. ASHISH SHAH.  Le transport leur coûte 50% de plus que les autres pays et leur enclavement réduit de 30% les volumes commerciaux.  Leurs coûts commerciaux sont environ de 40% supérieurs à ceux des membres de l’Union européenne et pour chaque dollar payé par un pays de l’OCDE, un pays sans littoral doit débourser 1,45 dollar.  L’amélioration des infrastructures, a rassuré le Directeur, peut diviser par deux les désavantages de l’enclavement.  Mais, avec la crise du multilatéralisme et la baisse de la croissance économique, certains pays risquent tout simplement de disparaître de la carte économique mondiale, a-t-il tout de même mis en garde, insistant sur le caractère « incontournable » de la connectivité, y compris numérique compte tenu des opportunités du commerce en ligne.  En 2019, les ventes en ligne ont augmenté de 13% et concerné une personne sur quatre dans le monde.  Ici aux États-Unis, le « Black Friday » a généré à lui seul des revenus de plus de 10 milliards de dollars, et ce, en un jour.

Sur le front de l’intégration régionale, M. Shah a salué la création de la Zone de libre-échange continentale africaine qui ouvre la voie à l’union douanière la plus importante au monde.  La Zone, a commenté la Conseillère spéciale de l’ONU pour l’Afrique, Mme BIENCE GAWANAS, change « entièrement la donne » et avec elle, l’Afrique lance un message fort au monde: elle est ouverte au commerce et aux échanges.  Cette Zone va doubler le commerce intra-africain, stimuler les capacités de production et pousser la diversification économique.  Sans elle, a-t-elle déclaré, nous ne faisons « qu’exporter des emplois » sans véritablement mettre à profit nos ressources naturelles, mais grâce à elle, nous générerons des revenus de 250 milliards par an et créerons au moins 1,5 million d’emplois.  En attendant, a reconnu la Représentante permanente du Rwanda, Mme VALENTINE RUGWABIZA, les coûts du commerce, du transport des biens et de la logistique sont beaucoup trop élevés, ce qui rend « bien ardue toute compétitivité ».  Si le Rwanda est le premier pays africain au classement « Doing Business » de la Banque mondiale, a-t-elle expliqué, c’est simplement parce qu’il s’est efforcé d’investir dans les plateformes logistiques, dont des ports secs.  Nous avons pu enregistrer une croissance moyenne de 8% par an et faire reculer la pauvreté, il est donc tout à fait possible pour les autres d’en faire autant.

À titre d’exemple, la frontière à Goma avec la République démocratique du Congo (RDC) est traversée par des centaines de commerçants grâce au guichet unique.  Après avoir constaté qu’un appel téléphonique entre pays africains coûte plus cher qu’un appel de l’Afrique aux États-Unis, le Rwanda a négocié avec l’industrie de la téléphonie qui est restée sourde.  Six mois après les mesures de rétorsion, les prix ont été réduits, au grand soulagement des petits commerçants.  La connectivité numérique a besoin de beaucoup moins d’infrastructures physiques, a-t-elle fait remarquer: il a suffi de relier plusieurs pays dans le cadre du projet « Smart Africa ».  Se réjouissant de l’image positive de l’Afrique dans la mise en œuvre du Programme d’action de Vienne, la Conseillère spéciale de l’ONU pour l’Afrique, qui a mis l’accent sur le « cadre ambitieux » du développement du continent, comme en témoigne la Vision 2063 de l’Union africaine, a insisté sur le fait que l’intégration régionale ne consiste pas seulement à « établir des passerelles » mais surtout à « relier les Africains ».  La Conseillère spéciale a évoqué le projet de liaison ferroviaire entre les grandes capitales africaines, ce qui ne manquera pas de générer des opportunités commerciales, en particulier pour les femmes entrepreneurs.  Elle s’est félicitée de l’avancement d’un continent où les peuples demandent des comptes à leurs gouvernants et les somment d’expliquer les avantages de tel ou tel accord ou arrangement.

L’Économiste en chef du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, M. ELLIOTT HARRIS, a dégagé des dénominateurs communs avec les pays en développement sans littoral: le casse-tête que sont les coûts de transport et la complexité des réglementations commerciales.  Des accords communs sur la mise en place et l’entretien des couloirs de transit ont été perçus comme fondamentaux dans ce contexte.  Le renforcement de la résilience engendrant des coûts, des appels du pied ont été faits en direction du secteur privé.  M. Harris a dit sa préférence pour des arrangements régionaux, bien plus faciles à négocier et plus susceptibles d’obtenir l’assentiment des banques régionales de développement. 

Seul représentant du secteur privé, le Secrétaire général de l’Union internationale des transports routiers, M. UMBERTO DE PRETTO, a appelé à la prudence quand on parle d’intégration régionale.  Aujourd’hui, s’est-il expliqué, le commerce n’est pas régional, il est « mondialisé ».  Faut-il tourner le dos au commerce international?  La fragmentation des systèmes commerciaux, des puissances économiques et commerciales, a répondu la représentante du Rwanda, est le plus grand défi de notre ère.  Les grandes puissances travaillent pour leurs intérêts propres et « non pour la convergence ou l’intégration ».  Il faut des politiques communes et des réglementations harmonisées, a acquiescé le représentant de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).  M. RICARDO SÁNCHEZ SANTOS a présenté deux projets stratégiques: la connexion du Brésil vers l’ouest à travers la construction d’un pont au Paraguay pour relier l’est et l’ouest, soit le Brésil, le Paraguay, l’Argentine et le nord du Chili, et l’amélioration de la navigation fluviale en Amérique du Sud sur les fleuves Parana et Rio de la Plata.  Le Turkménistan a indiqué qu’il abritera, en mars 2020, la Conférence mondiale sur le transport durable.  Le Secrétaire général de l’Union internationale des transports routiers a d’ailleurs reproché à l’ONU d’ignorer le système des Transports Internationaux Routiers (TIR).  À ce jour, seuls 11 pays en développement sans littoral sont parties au système, ils avancent plus vite que les autres.  Selon une analyse de l’Union africaine, le commerce africain doublerait si tous les pays du continent mettaient en place un système TIR.  Quant aux coûts du transport, ce sont, a-t-il dit, les « bakchich » qu’il faut payer aux frontières: quand un chauffeur de poids lourd est pris en otage entre deux pays, sans toilette, il paie.

Déclarations de clôture

Le Président de l’Assemblée générale, M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, a voulu que l’on saisisse l’élan de cet examen à mi-parcours pour redoubler d’efforts dans la mise en œuvre du Programme d’action de Vienne, tout en travaillant à la mise en œuvre du Programme 2030, puisque nous entrons dans la Décennie d’action.  Il a invité tous les États Membres à soutenir « nos frères et sœurs » des pays en développement sans littoral, ce qui implique une collaboration de tous les partenaires, dont le secteur privé et la société civile.  Nous sommes définis par nos actes.  Alors agissons, a lancé le Président.  Agissons dans la solidarité avec « nos frères et sœurs » des pays en développement sans littoral.  N’oubliez aucune mesure pour mettre en œuvre le Programme d’action de Vienne et sachez que je serai votre partenaire tout au long de cette soixante-quatorzième session, a conclu le Président. 

À son tour, la Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement a fait le bilan de ces deux jours de travaux, avant de présenter six messages clefs.  Premièrement, Mme ‘UTOIKAMANU a salué les succès de la première phase de mise en œuvre du Programme d’action de Vienne et voulu qu’on les exploite.  Il faut aussi identifier, a-t-elle poursuivi, les lacunes et les difficultés: un tiers de la population des pays en développement sans littoral vit dans l’extrême pauvreté, l’insécurité alimentaire persiste et la connectivité est incomplète.  Il y a aussi des obstacles persistants dans la mise en œuvre des accords et conventions sur le commerce et le transport, et la transformation structurelle des économies reste limitée, sans oublier l’absence de données fiables, actualisées et comparables, la faiblesse des capacités et l’impact de plus en plus ressenti des changements climatiques, de la désertification, de la déforestation, de la dégradation des terres, de la perte de la biodiversité et de la fonte des glaciers. 

Troisièmement, a-t-elle estimé, il faut des financements substantiels et un renforcement des capacités pour soutenir les priorités des pays en développement sans littoral dans les domaines des transports, de l’énergie, des technologies de l’information et des communications, de la facilitation du commerce, de l’industrialisation et de l’intégration régionale.  La mobilisation des ressources doit être nationale et internationale et se faire auprès des secteurs public et privé. 

Quatrièmement, la Haute-Représentante a plaidé pour des partenariats multipartites véritables, efficaces et durables pour faire des pays en développement sans littoral des États prospères reliés aux autres.  Cinquièmement, elle a demandé une meilleure cohérence dans les mises en œuvre du Programme d’action de Vienne, du Programme 2030, du Programme d’action d’Addis-Abeba, du Cadre de Sendai et de l’Accord de Paris.  Elle a enfin insisté sur la mise en œuvre, la surveillance et le suivi du Programme d’action et de la Déclaration politique dont l’appel à l’action doit nous guider vers des mesures ciblées et accélérées pour mettre pleinement en œuvre le Programme d’action, pendant les cinq prochaines dernières années.

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