Assemblée générale: « il ne peut y avoir de développement là où les conflits, les atrocités et la peur règnent en maître », souligne le Président de la CPI
Le Président de la Cour pénale internationale (CPI), qui a mis le Statut de Rome au service du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a prévenu aujourd’hui l’Assemblée générale qu’« il ne peut y avoir de développement là où les conflits, les atrocités et la peur règnent en maître ». L’Assemblée a entendu une quarantaine d’intervenants avant d’adopter sa résolution annuelle sur le rapport de la Cour.
À un an du renouvellement du mandat des juges de la CPI, son Président, M. Chile Eboe-Osuji, a dit qu’en 17 ans d’existence, l’institution a fait bien plus qu’on ne l’imaginait à sa création. La Cour, a-t-il affirmé, a fondamentalement changé la manière dont le monde voit l’établissement des responsabilités pour les crimes les plus graves. Même les gens les plus puissants ne sont plus sûrs d’échapper à la justice s’ils commettent des crimes qui relèvent de la compétence de la Cour. Il peut y avoir des résistances, voire des menaces mais tant que la Cour existera, la question de la responsabilité finira toujours par être posée, a-t-il martelé.
Le Président a aussi mis l’accent sur le caractère dissuasif de la Cour, illustrant son propos par le fait que la violence électorale, qui a tant été utilisée en Afrique, a diminué depuis l’avènement de la CPI. Cet effet dissuasif est un « retour sur investissement » précieux, s’est félicité le Président. Toutefois, la valeur de la Cour va bien au-delà, a-t-il poursuivi, soulignant qu’« il ne peut y avoir de développement là où les conflits, les atrocités et la peur règnent en maître ». Le juge a déploré que plus de 70 États Membres de l’ONU n’aient pas signé le Statut de Rome, alors que l’objectif 16 du Programme de développement durable à l’horizon 2030 consacre le droit de tous à la justice.
Aujourd’hui, a fait observer la Pologne, 122 États parties regardent la CPI « avec espoir » et les autres, « avec un certain malaise ». Dans la résolution de laquelle se sont dissociés les États-Unis, la Fédération de Russie, le Myanmar, les Philippines et la Syrie, l’Assemblée générale invite les États du monde entier, qui ne sont pas encore parties au Statut de Rome, à envisager de le ratifier, de l’accepter, de l’approuver et d’y adhérer sans tarder. Le Président de la CPI ayant déploré l’absence d’une coopération « aboutie », comme en attestent les huit mandats d’arrêt en souffrance, l’Assemblée générale souligne, dans sa résolution, l’importance de cette coopération. Les Pays-Bas, qui ont présenté la résolution, ont en effet refusé l’idée de laisser les États non parties au Statut de Rome « bloquer la quête de l’établissement des responsabilités » pour les crimes les plus graves.
La Grèce a rappelé que la Cour a adressé en vain au Conseil de sécurité 15 notifications de non-coopération. Il faut, a-t-elle réclamé, un dialogue plus structuré sur le suivi des situations que le Conseil renvoie à la Cour, sans oublier, a ajouté le Liechtenstein, que ce même Conseil a failli dans sa responsabilité de saisir la CPI de la situation en Syrie et qu’il n’a même pas « discuté » du Myanmar et du Yémen. Quant au renvoi des situations au Darfour et en Libye, le Liechtenstein a décrié une absence flagrante d’appui politique et de mesures concrètes pour assurer la coopération des États concernés. Les retards pris dans le jugement des auteurs présumés de crimes graves résultent de la situation sécuritaire, s’est défendue la Libye.
Nulle part dans le Statut de Rome, a en revanche argué le Myanmar, il n’est écrit que la Cour exerce sa compétence sur un État non partie. La Chambre préliminaire de la CIP ayant autorisé la Procureure à ouvrir une enquête sur les allégations de crimes contre l’humanité contre le peuple rohingya, le Myanmar a rejeté cette décision comme le fruit d’une procédure « discutable » à la valeur juridique « douteuse », une violation flagrante de la Charte fondée sur la politisation et l’émotion. C’est cette politisation des droits de l’homme que les Philippines ont invoquée pour expliquer leur retrait du Statut de Rome. Il est pour le moins curieux, a renchéri la Syrie, de voir que certains États parties appellent au renforcement de la CPI, par l’élargissement de son mandat, tout en signant des accords bilatéraux pour protéger leurs forces armées de toute poursuite pénale. Les États-Unis ont d’ailleurs nié à la CPI le droit d’enquêter sur le comportement des militaires américains en Afghanistan. Il faut se rendre à l’évidence, a estimé la Fédération de Russie, et reconnaître que la Cour n’est pas l’instrument idoine pour véritablement lutter contre les crimes les plus graves. Jusqu’à quand, s’est-elle demandé, l’Assemblée générale se bercera-t-elle de l’illusion que la CPI est une bonne institution?
Le Statut de Rome fait de notre monde, un monde meilleur, en accentuant le risque de poursuites judiciaires quand des crimes graves sont commis, a plaidé le Président de la CPI. La Suisse a réitéré sa proposition de compléter ce Statut par l’inclusion du fait d’affamer les civils, comme méthode de guerre dans les conflits armés internes. Cet amendement, s’est-elle expliquée, comblerait une lacune juridique et répondrait à une « urgente nécessité » car les conflits actuels sont presque tous de nature interne. Le Nigéria a milité pour l’inclusion de la corruption transfrontière, « un crime aussi grave que le génocide, le crime contre l’humanité et le crime d’agression et qui fait davantage de victimes ».
L’Assemblée générale se réunira de nouveau mercredi 6 novembre, à partir de 10 heures, pour examiner la question du blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par les États-Unis.
RAPPORT DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE (A/74/324), (A/74/325) ET (A/74/326)
Déclarations
La promotion de la justice et du droit international a, de tout temps, été fondamentale dans le travail de l’Assemblée générale, a souligné M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, Président de l’Assemblée générale. Par les activités dictées par son mandat, la Cour pénale internationale (CPI) contribue à la promotion de la paix et du développement durable et fait réfléchir à ce qui a été fait et reste à faire.
S’il s’est félicité de la coopération de l’ONU et de nombreux États avec son institution, M. CHILE EBOE-OSUJI, Président de la Cour pénale internationale (CPI), a néanmoins déploré un domaine, l’exécution des mandats d’arrêt, où le manque d’une coopération « aboutie » constitue un obstacle majeur à la capacité de la Cour de s’acquitter de son mandat. Huit mandats d’arrêt en souffrance, a-t-il précisé, ont trait à des situations renvoyées au Procureur de la CPI par le Conseil de sécurité. Il a exhorté ce dernier à prendre des mesures concrètes afin de faire en sorte que les autorités libyennes et soudanaises accèdent aux demandes de coopération qui leur ont été adressées, s’agissant notamment de l’arrestation et du transfèrement des suspects actuellement en fuite. Il a jugé « inacceptable » que les allégations de conduite criminelle concernant ces affaires ne soient pas entendues devant un tribunal. « C’est inacceptable du point de vue des victimes, inacceptable du point de vue de la communauté internationale et inacceptable du point de vue de l’état de droit. »
Au cours de l’année écoulée, a-t-il rappelé, la Chambre de première instance a déclaré Bosco Ntaganda coupable de 18 chefs de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, commis en Ituri en 2002 et 2003. La défense a interjeté appel. La Chambre de première instance a aussi acquitté Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé de toutes les allégations de violence électorale, en Côte d’Ivoire en 2010 et 2011. Cette fois-ci, c’est la Procureure qui a interjeté appel. Le procès de M. Domici Ongwen se poursuit pour des allégations de crimes commis dans le nord de l’Ouganda et les accusations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, commis à Tombouctou au Mali, par M. Al Hassan ont été confirmés. Le procès pourrait s’ouvrir l’année prochaine, à moins que l’issue de l’appel interjeté par la défense n’en décide autrement. La Cour a aussi lancé ses premiers mandats d’arrêt dans une seconde situation en République centrafricaine, dans le cadre de laquelle MM. Alfred Yekatom et Patrick-Edouard ont été transférés à La Haye.
De son côté, la Chambre d’appel a rendu un jugement sur l’échec de la Jordanie à exécuter le mandat d’arrêt contre l’ancien Président soudanais Omar Al-Bashir. La Chambre a estimé que, compte tenu des circonstances particulières de l’affaire, le droit international ne reconnaît aucune immunité à l’ancien Président. La Procureure a demandé l’autorisation d’ouvrir une enquête sur des allégations de crimes contre l’humanité commis contre les Rohingya du Myanmar, un État non partie au Statut de Rome. En revanche, la Chambre préliminaire a rejeté la demande de la Procureure d’autoriser l’ouverture d’une enquête en Afghanistan. La Procureure a achevé l’examen préliminaire de la situation au Gabon et estimé que les informations à sa disposition ne permettent pas d’établir une base raisonnable pour conclure à la Commission des crimes relevant de la compétence de la Cour. Son Bureau effectue en ce moment des examens préliminaires sur 8 situations potentielles et des enquêtes sur 11 situations. Le Président s’est ensuite attardé sur la question des réparations aux victimes dont le nombre dépasse les 10 000.
En 17 ans d’existence, a souligné le Président, la CPI a fait bien plus qu’on ne l’imaginait à l’époque de sa création. Elle a, a-t-il affirmé, « fondamentalement » changé la manière dont le monde voit l’établissement des responsabilités pour des crimes atroces. Même les gens les plus puissants ne sont plus sûrs d’échapper à la justice s’ils commettent des crimes qui relèvent de la compétence de la Cour. Il peut certes y avoir de la résistance voire des menaces mais tant que la Cour existera, la question de la responsabilité finira toujours par être posée. Le Président a aussi mis l’accent sur le caractère dissuasif de la Cour. Il a illustré son propos par le fait que la violence électorale, qui a tant été utilisée en Afrique, a diminué depuis l’avènement de la Cour. Cet effet dissuasif est un « retour sur investissement » précieux, a commenté le Président. Mais la valeur de la Cour va bien au-delà, a-t-il poursuivi: il ne peut y avoir de développement durable là où les conflits, les atrocités et la peur règnent en maître ».
Le Président a rapporté les propos du Ministre libyen de l’économie qui décrivait comment le conflit dans son pays a gravement détruit les infrastructures et fait perdre au pays plus de 40 milliards de dollars de réserves de devises. Le Président a aussi convoqué le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale qui disent que le coût moyen d’une guerre civile est équivalent à plus de 30 années de croissance du PNB d’un pays à économie moyenne et que les échanges commerciaux mettent 20 ans à se remettre des épisodes de violence. Le coût total des Première et Seconde Guerres mondiales, a-t-il fait observer, serait de 20 000 milliards de dollars actuels, soit 25% du PNB mondial. Que serait-il arrivé si l’on avait investi cette somme dans la recherche contre le cancer du sein ou dans d’autres maladies qui « brisent le cœur de l’humanité »?
Instrument multilatéral, a conclu le Président, le Statut de Rome fait de notre monde, un monde meilleur, en punissant les crimes d’agression et en accentuant le risque de poursuites judiciaires quand des crimes graves sont commis dans les conflits armés. Tout le monde doit avoir accès à la justice, comme le dit l’objectif 16 du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Pourtant, plus de 70 États Membres de l’ONU ne sont toujours pas parties au Statut de Rome et cela veut dire que certains des conflits tragiques qui heurtent l’attention, la conscience et la morale du monde échappent à la CPI. Leurs victimes sont abandonnées « en dehors de la zone créée par le système du Statut de Rome », doublement victimisées par les crimes qu’elles ont subis et par l’impunité de leurs auteurs.
M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a regretté que l’établissement des responsabilités et le droit pénal international subissent, de nos jours, une « très forte pression », une « résistance politique ». Le Conseil de sécurité, qui se voit bien souvent « bloqué » par ces questions, n’a pas réussi à faire en sorte que les criminels répondent de leurs actes, la Syrie étant le premier exemple. Le représentant a déploré le fait que tous les États n’aient pas la même disposition à se joindre au combat contre l’impunité. Pourtant, a-t-il plaidé, la CPI est l’illustration concrète de l’idée que les crimes les plus graves sont le problème de la communauté internationale tout entière et qu’ils ne doivent en aucun cas rester impunis. Encourageant la Cour à résister aux pressions, en particulier celles des États non parties au Statut de Rome, le représentant a refusé l’idée de laisser ces États « bloquer la quête de l’établissement des responsabilités » pour les crimes les plus graves.
Il a demandé à l’Assemblée des États parties à renforcer la Cour par une meilleure sélection de ses juges et par l’examen par des experts indépendants du fonctionnement global de la CPI. Il convient aussi, a-t-il ajouté, d’analyser de manière plus critique la coopération des États et des organes onusiens. Il est temps que les États exécutent dans les délais les mandats d’arrêt lancés par la CPI, a-t-il martelé. La coopération des États est « vitale » pour un fonctionnement efficace de la Cour. Il a aussi appelé le Conseil de sécurité à assurer le suivi des situations qu’il a renvoyées à la Cour. L’Assemblée des États parties doit se prononcer sur ces questions, en 2020, au moment où elle doit élire un nouveau procureur et six juges. Le représentant a conclu en présentant le projet de résolution sur le rapport de la CPI (A/74/L.8).
Au nom des pays nordiques, Mme ANNA-KARIN ENESTRÖM (Suède) a insisté sur l’importance de promouvoir l’universalité du Statut de Rome et fait part de l’engagement des pays nordiques à nouer un dialogue constructif au sujet des défis rencontrés par certains États dans leur relation avec la CPI. L’efficacité de la Cour dépend largement de la coopération des États, des autres parties prenantes et des organisations internationales, a-t-elle dit. Elle a appelé à une coopération renforcée entre la Cour et le Conseil de sécurité, s’agissant notamment des cas de non-coopération et du suivi des situations que le Conseil lui a renvoyées. La Cour a fait part au Conseil de 15 cas de non-coopération s’agissant des situations en Libye et au Soudan mais le Conseil n’a pas répondu de manière substantielle, a-t-elle regretté.
Elle a en outre déploré que le Conseil n’ait pas renvoyé à la CPI la situation en Syrie et exhorté ses membres à y remédier. Elle a aussi estimé que le renvoi de la situation au Myanmar demeure le moyen le plus sûr d’assurer l’établissement des responsabilités dans ce pays. La défense des droits des victimes est cruciale pour continuer d’assurer la réussite et la pertinence de la Cour, a-t-elle dit, en louant le travail du Fonds au profit des victimes. La déléguée a plaidé pour un financement adéquat de la Cour, tout en appelant celle-ci à se montrer efficace. Elle a conclu en indiquant que les pays nordiques demeureront « des fervents partisans » de la CPI et veilleront à assurer son indépendance, son efficacité et son intégrité.
M. ERIC CHABOUREAU, de l’Union européenne (UE), a exprimé son soutien sans faille à la CPI, qui demeure un garant important du respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme et qui exerce un puissant rôle de dissuasion. Le champ géographique de l’activité de la Cour et le nombre croissant de communications à la CPI démontrent que la majorité des États continuent de la considérer comme un point de référence pour la justice et la mise en cause de la responsabilité. Le représentant a soutenu tous les efforts visant à réviser et rationaliser les processus administratifs et judiciaires de la Cour et à optimiser l’utilisation des ressources disponibles.
Préoccupé par le défi de l’arrestation et du transfèrement des personnes visées par un mandat d’arrêt de la Cour, il a demandé instamment à tous les États d’agir pour favoriser une coopération totale avec la CPI, y compris par la conclusion d’accords de coopération volontaire. La faculté dont dispose le Conseil de sécurité de saisir la Cour peut contribuer à promouvoir l’établissement des responsabilités. Le Conseil doit assurer un suivi rigoureux, a-t-il dit, à son tour, avant d’insister sur la détermination de l’Union européenne à promouvoir l’universalité du Statut de Rome et à préserver son intégrité. Il s’est dit fermement convaincu de la légitimité de la Cour et confiant dans l’impartialité et l’indépendance des juges et de la Procureure. L’UE reste engagée à défendre la Cour contre toute ingérence extérieure visant à faire obstacle à l’exercice de la justice et à porter atteinte au système pénal international, a conclu le représentant.
Le monde regarde la CPI avec « espoir et malaise », a avoué M. MICHAL WECKOWICZ (Pologne), notant que la Cour n’occupe pas encore la place envisagée par les signataires du Statut de Rome. Les États parties la regardent « avec espoir » alors que les États non parties l’approchent « avec un certain malaise ». C’est la qualité du travail de la CPI qui convaincra les récalcitrants, a-t-il dit, au nom d’un pays qui axe sa présidence du Conseil de sécurité sur la promotion du droit international. Un ordre mondial fondé sur des règles exige des institutions fortes pour l’application de la loi et c’est bien l’objectif visé lors de la création de la CPI, a souligné le représentant.
Il a dit suivre avec intérêt le processus d’évaluation en cours et d’élection des futurs procureur et juges. La Cour opère dans un climat international complexe et il faut lui garantir la confiance des États dont le soutien est une condition préalable au succès de son travail. Il a insisté sur la coopération des États et des organisations internationales sans laquelle la Cour n’a virtuellement aucune chance d’être pleinement efficace.
M. METOD ŠPAČEK (Slovaquie) a estimé que ces milliers de victimes qui ont pris part aux travaux de la CPI au cours de l’année écoulée témoignent de leur confiance dans la Cour. La Cour, a-t-il prévenu, ne pourra pleinement remplir son rôle de mettre fin à l’impunité pour les crimes les plus graves que lorsqu’elle sera universelle. Tous les États doivent ratifier le Statut de Rome pour combler le vide juridique qui permettrait aux auteurs de crimes d’échapper à la justice. Le représentant a aussi demandé au Conseil de sécurité de suivre de près les situations qu’il renvoie à la CPI pour s’assurer, entre autres, de la coopération des États. La jurisprudence de la CPI, s’est réjoui le représentant, peut clarifier des questions de droit pénal international, mais pour que ce potentiel se matérialise, il faut que la CPI présente un raisonnement clair, détaillé et motivé.
M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a estimé qu’au vu du rapport, la Cour pénale internationale continue à démontrer qu’elle est un instrument fondamental de la lutte contre l’impunité, la promotion des droits de l’homme et la consolidation de l’état de droit. L’appui de l’Argentine se décline de différentes manières dont la plus importante est d’avoir été le premier État partie à conclure les quatre accords de coopération suggérés par la Cour. Parlant de la prochaine élection des juges, le représentant a jugé crucial d’identifier les candidats jouissant d’une large expérience et disposant d’un parcours reconnu, dans le respect de la parité, l’équilibre géographique et une représentation adéquate des principaux systèmes juridiques du monde. Il a également loué les progrès de l’audit externe indépendant qui sera l’occasion d’opérer les ajustements nécessaires au fonctionnement de la Cour. Ce processus, a-t-il prévenu, n’aura la légitimité nécessaire, gage de sa réussite, que s’il est transparent et ouvert à tous.
Au titre de ses préoccupations, le représentant argentin a réitéré sa position sur le coût des saisines du Conseil de sécurité qui sont exclusivement à la charge des États parties au Statut de Rome, en dépit des normes qu’il énonce clairement et de l’Accord régissant les relations entre l’ONU et la CPI. Il a conclu sur la marge de manœuvre qui existe encore pour améliorer les relations entre la Cour et le Conseil de sécurité, en particulier les Comités de sanctions ou le Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a salué l’initiative de la Cour de faire évaluer son fonctionnement afin de juger de son efficacité. Il a appuyé l’initiative suisse visant à inscrire « le crime de famine » dans le droit international et salué les propositions de la CPI pour renforcer le système pénal international, sans manquer de saluer la collaboration entre la CPI et l’ONU.
En tant que représentant d’un des États fondateurs de la CPI, M. PHILIP FOX-DRUMMOND GOUGH (Brésil) a voulu que l’on célèbre des victoires comme les réparations aux victimes et le succès des activités de proximité. La CPI, s’est-il réjoui, est l’« instrument de la justice et de la paix » car, depuis le début, elle a contribué à un ordre mondial plus stable, plus juste et plus démocratique. L’activation de sa compétence sur le crime d’agression donne un sens nouveau au non-recours à la force. Le représentant a passé en revue les dernières activités de la Cour, se félicitant du transfèrement de deux suspects comme d’un exemple positif de coopération. Il a salué le travail du Fonds au profit des victimes, avant de faire observer que tous les États d’Amérique latine et des Caraïbes sont parties au Statut de Rome, représentant le deuxième groupe régional d’États parties, après l’Afrique.
M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) ‘est rappelé que son pays est le premier contributeur du budget de la CPI, qui est « une tentative audacieuse » de rendre justice. Toute institution a ses hauts et ses bas et la CPI ne pas une exception, a-t-il déclaré, en appelant les États parties à réaffirmer leurs responsabilités. Ces États doivent continuer de mener des discussions constructives sur les moyens de renforcer la Cour. « Son avenir est entre nos mains », a souligné le représentant en voyant un renforcement en trois points: universalité, robustesse et complémentarité. Nous sommes plus forts ensemble, a-t-il dit, sur le premier point, en appelant les pays qui ne l’ont pas fait à adhérer au Statut de Rome. Il a prôné une approche de « petits pas » pour s’assurer de la coopération des États avec la CPI. La Cour est encore une organisation relativement jeune et la recherche précipitée de résultats pourrait compromettre nos efforts contre l’impunité, a-t-il préconisé pour renforcer la robustesse de la Cour.
Enfin, s’agissant du dernier point, le délégué a tenu à rappeler que l’existence de la Cour ne diminue en rien le rôle des juridictions nationales. « Consacrer ce principe dans les activités de la Cour contribuera à son universalité », a-t-il assuré.
M. CARY SCOTT-KEMMIS (Australie) a précisé que la responsabilité première d’enquêter et de poursuivre les responsables de crimes de guerre revient aux États. La CPI, a-t-il rappelé, est une juridiction de dernier ressort et cette complémentarité est cruciale pour le succès de l’institution. L’élection du Président et du Procureur, l’année prochaine, sera une étape importante. Il a voulu que l’ONU fasse en sorte que la Cour reçoive le soutien nécessaire. Les deux institutions ont les mêmes objectifs de base, puisque l’un des buts de la Charte est le maintien de la paix et la sécurité internationales, ce qui est en droite ligne avec le Statut de Rome.
M. EDGAR DANIEL LEAL MATTA (Guatemala) a salué le travail du Fonds au profit des victimes et souligné l’importance de renforcer le dialogue entre la Cour et l’ONU, pour renforcer l’autorité de la première. Le représentant a insisté sur le principe de complémentarité, avant d’avertir que le manque de ressources met en péril le bon fonctionnement de la Cour. Il a, à son tour, plaidé pour l’universalisation du Statut de Rome, car plus les pays se joindront aux 122 États parties, plus la lutte contre l’impunité sera renforcée.
Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie) estime qu’un appui accru à la justice pénale internationale et à la CPI est essentiel, en particulier face à la résistance à ses efforts. Il a appelé le Conseil de sécurité et la CPI à des relations efficaces permettant à la fois à la Cour d’intensifier la lutte contre l’impunité et au Conseil, celle pour la paix et la sécurité internationales. Elle a également appelé les États à coopérer avec la Cour. Dans la lutte contre l’impunité, il est essentiel d’avoir une CPI forte mais aussi des tribunaux nationaux qui jouent leur rôle et ont les outils nécessaires pour poursuivre les auteurs des crimes les plus graves.
À cet égard, la représentante a réitéré la proposition de son pays d’élaborer une convention internationale sur l’entraide judiciaire et l’extradition. À ce jour, a-t-elle affirmé, 69 États ont exprimé leur soutien à l’initiative. La représentante s’est dite convaincue qu’avec des efforts communs et un soutien sans faille de tous les principaux acteurs du système du Statut de Rome, tous les obstacle au bon fonctionnement de la Cour pourront être surmontés.
M. MOHAMED A. M. NFATI (Libye) a affirmé que les retards pris dans le jugement des auteurs présumés de crimes graves résultent de la situation sécuritaire dans le pays. Le système judiciaire a jugé certains d’entre eux mais la Libye a besoin du soutien international pour le renforcement des capacités judiciaires. Du point de vue sécuritaire, le représentant a attiré l’attention de la communauté internationale sur les flux d’armes et la prolifération des groupes terroristes et criminels.
Mme GABRIELLE RUSH (Nouvelle-Zélande) a salué la contribution « inestimable » de la CPI, seul tribunal pénal international permanent. La Cour et son Statut ont progressivement introduit un « nouveau paradigme » dans la justice pénale internationale, en vertu duquel la responsabilité pour les crimes graves fait désormais partie intégrante de la règle de droit. Toutefois, la représentante a tenu à rappeler que la responsabilité première pour juger les crimes internationaux incombe aux États. La Cour est un tribunal indépendant de dernier recours. La représentante s’est dite favorable à l’idée d’une réforme visant à renforcer la Cour et sa performance. En attendant, elle a appelé les États parties à prendre des mesures pratiques pour veiller à ce que la Cour soit en mesure de jouer pleinement son rôle, en coopérant plus activement avec elle. Dans la perspective de la prochaine Assemblée des États parties au Statut de Rome, elle a invité les participants à entretenir un débat « ouvert, respectueux et centré sur les objectifs communs », concernant la façon dont la CPI doit s’acquitter de son mandat, et ce, dans le respect de son indépendance et se son impartialité.
M. IGOR BONDIUK (Ukraine) a indiqué que son pays a été l’un des premiers États non parties à ratifier l’accord sur les privilèges et immunités de la CPI. Le 17 avril 2014, le Gouvernement ukrainien a déposé une déclaration en vertu de l’article 12 (3) du Statut de Rome consentant à la compétence de la Cour sur les crimes commis sur son territoire entre le 21 novembre 2013 et le 22 février 2014. Il a déposé une seconde déclaration consentant à la compétence de la Cour sur les crimes commis en Ukraine depuis le 20 février 2014, soit le début de l’agression militaire russe. Ces déclarations ont une durée indéfinie. La CPI pourra exercer sa compétence indépendamment de la nationalité des personnes incriminées, y compris les étrangers. Les agences ukrainiennes du maintien de l’ordre continuent de soumettre à la CPI des informations, faits et preuves sur la nature du conflit armé en Ukraine, causé par une agression armée étrangère. La CPI a reçu des informations, a précisé le représentant, sur les nombreux crimes de guerre commis par les forces armées de l’État agresseur et sur les autorités d’occupation, son personnel et ses affidés dans les territoires temporairement occupés.
Mme LOUISE BLAIS (Canada) s’est dite préoccupée par l’impunité au Myanmar mais satisfaite que la Cour examine les allégations de crimes contre l’humanité commis contre le peuple rohingya. Reconnaissant les limites des compétences de la Cour, la déléguée a demandé au Conseil de sécurité le renvoi de la situation au Myanmar à la CPI, qui obtiendrait ainsi compétence pour enquêter sur ces crimes. Le délégué a voulu un dialogue plus structuré entre la CPI et le Conseil de sécurité pour améliorer la mise en œuvre des résolutions du Conseil et peut-être garantir un niveau de financement suffisant pour les affaires renvoyées. Le représentant a appuyé les discussions visant le renforcement de la CPI et a encouragé les efforts en vue d’une plus grande diversité et un meilleur équilibre entre les genres à la CPI. La représentante a insisté à son tour sur l’universalisation du Statut de Rome et déploré que les mandats d’arrêt lancés contre 15 personnes ne soient toujours pas exécutés.
Nous pensons que les grands pouvoirs accordés au Conseil de sécurité par l’article 16 du Statut de Rome rogne sur l’indépendance de la Cour, a estimé Mme ANET PINO RIVERO (Cuba). Cette situation viole non seulement le principe fondamental d’indépendance des institutions judiciaires mais aussi ceux de transparence et d’impartialité. Quand le Conseil saisit la CPI, c’est le droit international qui est violé puisque ce sont toujours les pays en développement qui sont attaqués au nom d’une prétendue lutte contre l’impunité. Nous voulons, a dit la représentante, une cour « impartiale, efficace et équitable, pleinement indépendante et non soumise à des intérêts politiques ». Elle s’est également dite gravement préoccupeé par le précédent créé par les poursuites lancées contre des ressortissants d’États non parties au Statut de Rome. Le Statut de Rome n’a pas été créé pour remplacer les tribunaux nationaux, a-t-elle martelé.
Notant les efforts constants de la CPI dans le domaine des enquêtes, des procès et des réparations aux victimes, M. LIU LIANG (Chine) a néanmoins douté de l’autorité et de la crédibilité de la Cour qui n’a pas répondu aux préoccupations de certains États parties et dont le traitement du principe d’immunité a créé des controverses telles que la Cour internationale de Justice (CIJ) a dû être saisie. Le représentant a reproché à la Cour de brouiller les limites entre État partie et État non partie et de ne pas avoir de critères et de conditions fixes pour autoriser le Procureur à ouvrir une enquête. Le représentant s’est offusqué du cas d’un juge nommé ambassadeur alors qu’il était encore affecté à des procès. C’est une situation qui ne doit jamais se reproduire dans une Cour, dont « la raison d’être » n’est autre qu’indépendance et impartialité.
Le représentant est ensuite revenu sur l’appel interjeté par la Jordanie. Le fait que la Cour ait estimé que, compte tenu des circonstances particulières, le droit international ne reconnaît aucune immunité à l’ancien Président soudanais se fonde, a dit comprendre le représentant, sur la pratique de tribunaux pénaux internationaux. Mais la Cour, a-t-il relevé, n’a pu fournir de motifs convaincants. Les statuts de ces tribunaux comportent en effet des dispositions explicites et la pratique d’une vaste majorité d’États est que les chefs d’États et autres dirigeants de haut rang ont, sans exception, droit à l’immunité. La Cour, a conseillé le représentant, doit tenir compte de ces préoccupations et exercer son pouvoir « avec prudence », dans le strict respect de son Statut.
La Cour pénale internationale (CPI) est un des plus grands accomplissements de la communauté internationale » s’est félicité M. CARLOS JIMÉNEZ PIERNAS (Espagne), avant de reconnaître qu’elle fait face aujourd’hui à une série de problèmes qui entravent l’administration de la justice. Il a dénoncé les menaces contre la Procureure, les qualifiant d’intimidations « inacceptables ». Il s’est aussi inquiété du manque de coopération de la part de certains États.
Mme KIRA CHRISTIANNE DANGANAN AZUCENA (Philippines) a, après s’être dissociée de la résolution, réexpliqué le retrait de son pays du Statut de Rome relève d’une position de principe contre ceux qui politisent les droits de l’homme. Les Philippines, a-t-elle argué, disposent d’une législation punissant les crimes les plus graves et il ne faut pas oublier que le Statut de Rome est ancré dans le principe de complémentarité et non celui de substitution. Ce sont les États qui ont la responsabilité première de poursuivre les crimes internationaux. Nous pouvons et voulons le faire, a martelé la représentante, illustrant ses propos par le fait qu’un tribunal philippin a condamné, au début de cette année, un membre du groupe terroriste Maute affilié à Daech, pour violations du droit international humanitaire.
M. HAU DO SUAN (Myanmar) a précisé d’emblée que la participation de son pays à cette séance ne signifie aucunement qu’il reconnaît la CPI ou sa compétence sur le Myanmar qui n’est pas partie au Statut de Rome. Le représentant a noté que le rapport annuel de la Cour parle de la tentative « illégitime » de la Procureure d’ouvrir une enquête sur la déportation présumée des « soi-disant » populations rohingyas du Myanmar au Bangladesh. Mon gouvernement, a-t-il dit, rejette catégoriquement la décision de la CPI qui est le résultat d’une procédure « discutable » et qui a une valeur juridique « douteuse ». Le Myanmar, a-t-il asséné, n’a aucune obligation de respecter les décisions d’un tribunal qui n’a aucune autorité sur lui. Nulle part dans le Statut de Rome, il n’est écrit que la Cour exerce sa compétence sur un État non partie.
Il est clair, a relevé le représentant, que la Procureure refuse de voir les efforts du Myanmar pour résoudre les problèmes humanitaires actuels de l’État rakhine, en particulier le rapatriement des déplacés. Ce que la Procureure veut faire, a-t-il accusé, c’est outrepasser les principes de souveraineté nationale, d’intégrité territoriale et de non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Elle agit, a-t-il ajouté, dans une violation flagrante des principes de la Charte et a fondé cette affaire sur la politique et l’émotion. La demande d’enquête, a encore fait remarquer le représentant, exclut les crimes commis par l’Armée du salut des Rohingya de l’Arakan (ARSA), alors même qu’il est clair que c’est elle qui a provoqué les déplacements. La Procureure s’est largement appuyée sur les rapports des ONG des droits de l’homme qui contiennent des erreurs factuelles et des informations infondées, a taclé le représentant.
La question de l’État rakhine, a-t-il argué, est une question politique et économique marquée par une migration transfrontalière qui dure depuis l’époque coloniale quand les Britanniques avaient ramené des gens du Bengale. Il n’y a jamais eu de déportation et ARSA est la seule coupable des déplacements massifs, a affirmé le représentant. Le Gouvernement, a-t-il assuré, travaille avec le Bangladesh, le PNUD, le HCR, l’ASEAN et tous les autres amis de la région au rapatriement volontaire des déplacés, lequel n’est empêché jusqu’ici que par les agissements de l’ARSA. Nous rejetons, a conclu le représentant, les tentatives de certains États Membres de renvoyer la situation au Myanmar à la CPI, en soutenant une Procureure qui fait elle-même l’objet d’une plainte visant à la suspendre de ses fonctions pour des allégations de violations graves des droits de l’homme et de crimes contre l’humanité commis pendant la dictature militaire, en Gambie, entre 1994 et 2002. Le Myanmar, a précisé le représentant, se dissocie du projet de résolution dont l’Assemblée générale est saisie aujourd’hui.
M. ION I. JINGA (Roumanie) a fait l’éloge de la Cour, notant qu’elle a joué un rôle de catalyste pour les législations nationales et pour la consolidation des mécanismes nationaux de justice. La Cour, a-t-il poursuivi, a soutenu la paix et la réconciliation, en marginalisant ceux qui nuisent aux processus de paix et en offrant une nécessaire reconnaissance aux souffrances des victimes. Le délégué a toutefois déploré l’écart croissant entre les aspirations des pères fondateurs et les résultats, une source d’incertitudes qui rend la Cour vulnérable aux attaques et sapent son autorité, dans un contexte politique volatile et empreint de populisme et de xénophobie. Le délégué a rappelé les compétences limitées de la Cour et sa dépendance au soutien opérationnel, politique et financier des États. Dépassons, a-t-il encouragé, les discours idéalistes et pensons plutôt à la capacité de la Cour de relever les défis actuels et à la nécessité de réexaminer son fonctionnement et sa gestion.
M. LUIS XAVIER OÑA GARCÉS (Équateur) a réitéré son soutien à la CPI en tant que mécanisme aux caractéristiques uniques pour lutter contre l’impunité et a appelé les États Membres à en faire de même afin que la Cour puisse, de manière effective et concrète, exercer sa juridiction sur les personnes et sa compétence sur les crimes les plus graves. Pour l’Équateur, l’universalisation progressive du Statut de Rome et de la compétence de la Cour est un objectif inébranlable, car il est indispensable d’avancer vers une authentique justice pénale universelle. L’Équateur a d’ailleurs intégré dans sa Constitution de 2008 et dans sa législation pénale, l’imprescriptibilité des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre, des disparitions forcées et des crimes d’agression. Enfin, le représentant a jugé indispensable que la Cour dispose des financements nécessaires pour remplir les objectifs de son Statut.
Mme MARIANA DURNEY (Chili) a salué l’impartialité de la CPI dont la norme supérieure est l’administration de la justice au niveau international sur la base de procédures équitables et du principe d’égalité. Elle a fermement appuyé le principe de complémentarité et souligné l’importance de la coopération des États. Quant à celle avec le Conseil de sécurité, elle a estimé qu’il est d’une importance « transcendantale » de faire avancer le dialogue, la coordination et l’action conjoint. Elle a recommandé au Conseil de sécurité de veiller au suivi des situations qu’il renvoie à la Cour. Ayant ratifié, en 2016, les amendements à l’article 8 du Statut de Rome et à l’ajout d’un article 8 bis après la Conférence de Kampala (2010), le Chili, a dit la représentante, est en passe d’adopter un projet de loi visant à aligner la législation nationale avec ces amendements. Elle a conclu sur le Fonds au profit des victimes, en encourageant davantage de contributions financières.
M. JÜRG LAUBER (Suisse) a remarqué une multiplication des attaques, ces dernières années, contre les institutions internationales et le multilatéralisme. La CPI n’est pas épargnée alors qu’elle constitue une réalisation majeure de la diplomatie multilatérale qui a marqué une grande avancée dans le développement du droit international. La CPI est plus que jamais nécessaire face aux atrocités commises dans le monde et aux difficultés qu’ont les États à lutter vigoureusement contre l’impunité pour les crimes les plus graves. Le représentant a attribué la virulence des attaques dont fait l’objet la CPI à sa mission-même, celle de faire répondre de leurs actes les puissants. Il a insisté sur le principe de complémentarité, soulignant que les États ont la responsabilité première de poursuivre et de punir les auteurs des crimes les plus graves. La CPI ne le fait quand les États ne peuvent ou ne veulent pas le faire. Avant de critiquer la Cour, assumez vos responsabilités, a taclé le représentant.
Il a salué le fait que des experts indépendants vont bientôt examiner le fonctionnement de la Cour, appelant les États au respect de l’indépendance de cette institution et à la nomination des individus les plus qualifiés. Le représentant a réitéré la proposition de son pays de compléter le Statut de Rome par l’inclusion du fait d’affamer les civils, comme méthode de guerre dans les conflits armés internes. Cet amendement, s’est-il expliqué, comblerait une lacune juridique et répondrait à une « urgente nécessité » car les conflits actuels sont presque tous de nature interne.
M. PARK CHULL-JOO (République de Corée) a indiqué que le fonctionnement pérenne de la Cour dépend de la coopération active des États parties. Il a insisté sur l’importance de promouvoir l’universalité du Statut de Rome, ajoutant que sa ratification ne veut pas dire abandon de la souveraineté nationale, puisque ledit Statut a, en son cœur, le principe de complémentarité. Le délégué a insisté sur l’importance du choix du prochain Procureur de la CPI l’année prochaine. Un processus consultatif sera notamment conduit par le Président de la Cour, en relation avec le Bureau, afin d’identifier le candidat du consensus.
Ce fut une année difficile pour la CPI en raison du volume de travail mais surtout des attaques dont elle a été l’objet tant du point de vue de sa juridiction que de la légalité de ses actes, a constaté M. CHRISTIAN GUILLERMET-FERNANDEZ (Costa Rica), qui a également pointé les mesures à l’encontre de certains de ses fonctionnaires. Certaines activités de la Cour, a-t-il avoué, ont laissé un « goût amer » et provoqué des critiques. Mettant en garde contre toute tentative d’affaiblir le rôle fondamental de la Cour dans la lutte contre l’impunité, le représentant s’est réjoui de l’évaluation que devrait mener un groupe d’experts indépendants chargé de signaler, de façon objective et professionnelle, les domaines qui exigent une amélioration et de proposer des changements, le cas échéant, dans le cadre du Statut de Rome et sans affecter le rôle des États parties et leur organe décisionnel qu’est leur Assemblée.
Il faut, a conseillé le représentant, écouter la voix de la société civile et des organisations non gouvernementales (ONG). Il a jugé utile d’avoir les résultats préliminaires de l’évaluation avant l’élection, en 2020, des juges, du nouveau procureur et du président de l’Assemblée des États parties. Le Costa Rica, a-t-il annoncé en conclusion, a approuvé la loi sur la coopération avec la CPI qui entrera en vigueur en février prochain.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a parlé des Rohingya au Myanmar et des conflits en Syrie et au Yémen pour fustiger les crimes contre l’humanité et le mépris criant pour le droit humanitaire international, à l’origine de nombreux crimes de guerre. Il s’est aussi félicité de ce que les deux tiers des États Membres de l’ONU aient adhéré au Statut de Rome, ce qui constitue un espoir pour les victimes. Le représentant a néanmoins regretté que le Conseil de sécurité ait failli dans sa responsabilité de saisir la CPI, notamment pour la Syrie, et qu’il n’ait même pas « discuté » du Myanmar et du Yémen. Quant au renvoi par le Conseil des situations au Darfour et en Libye, le représentant a décrié une absence flagrante d’appui politique et de mesures concrètes pour assurer la coopération des États concernés.
La Cour, a-t-il relevé à son tour, subit des attaques et fait les frais de la tendance à affaiblir ou même défaire les grands succès du multilatéralisme et d’un ordre international fondé sur les règles. Il en a voulu pour preuve le choix qu’ont fait certaines grandes puissances de rester en dehors du Statut de Rome. Reconnaissant tout de même les frustrations suscitées par la performance de la Cour, le représentant a voulu une CPI plus efficace, mieux gérée et mieux à même de communiquer le message puissant du Statut de Rome. Le manque d’universalité de ce Statut rendant difficile la lutte contre l’impunité, il a estimé que des solutions alternatives comme les mécanismes impartiaux et indépendants peuvent contribuer à l’établissement des responsabilités. Il a appelé les États à plus de créativité.
Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a déclaré, concernant le Fonds au profit des victimes, que le rapport reflète bien les trois types de réparations. S’agissant des réparations individuelles, elle a mis l’accent sur la création d’un mécanisme de contrôle administratif ainsi que d’identification des bénéficiaires. Elle a appuyé d’autre part les initiatives prises, au niveau international, visant à la réalisation de l’objectif 16 de développement durable, notamment la campagne « L’Humanité contre les crimes ». Elle a en outre lancé un appel aux États pour qu’ils adhèrent aux amendements de Kampala. El Salvador, a-t-elle conclu, entend ratifier l’Accord sur les privilèges et immunités de la Cour.
Mme POLLY IOANNOU (Chypre) a indiqué que la CPI demeure la pierre angulaire du système pénal international et une institution essentielle de promotion d’un ordre international basé sur le droit. Parmi les améliorations souhaitées, la représentante a dit soutenir l’amendement visant à inclure le fait d’affamer les populations dans les crimes de guerre. Elle a appelé la Cour à maintenir un standard élevé dans son travail, insistant sur son indépendance et son intégrité. Il revient aussi aux États parties au Statut de Rome de contribuer à la crédibilité de la Cour, notamment en élisant des juges aux capacités et qualités exceptionnelles.
M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a rappelé que le rôle de la CPI est de compléter, plutôt que de remplacer, les juridictions nationales qui ont la responsabilité première de poursuivre les crimes les plus graves. Il a salué les efforts de la Cour en vue d’enquêter sur les crimes commis dans le contexte de la situation en Géorgie. Nous avons fourni les éléments matériels pertinents et nous continuerons de le faire, a assuré le représentant. Il a indiqué que son pays et la CPI ont signé, en janvier 2019, un accord sur l’exécution des peines, en vertu duquel les personnes condamnées par la CPI pourraient purger leurs peines en Géorgie, si la Cour en décide ainsi et que le Gouvernement géorgien l’accepte. Enfin, il a remercié la CPI pour avoir ouvert un bureau à Tbilissi, le premier hors d’Afrique. L’enquête de la CPI sur les crimes commis en Géorgie durant l’agression russe, en 2008, est un test cardinal de la capacité de la CPI de défendre les valeurs contenues dans le Statut de Rome, a conclu M. Imnadze.
Mme MARIA ANGELA ZAPPIA (Italie) a réitéré le soutien résolu de son pays à la Cour et souligné l’importance des principes du Statut de Rome, parmi lesquels l’impartialité et l’indépendance de la Cour. Notant que le rapport de cette année reflète la solidité de l’institution et les progrès accomplis dans de nombreux dossiers, la représentante a néanmoins tenu à rappeler que la Cour est une institution judiciaire de dernier recours qui n’officie que lorsque les juridictions nationales ne peuvent ou ne veulent pas poursuivre. Il revient donc aux États de renforcer leurs capacités, leur entraide technique et autres formes de coopération afin d’exercer leur fonction primordiale, celle de rendre justice aux victimes des crimes les plus graves. La déléguée a donc rappelé son appui au travail de la Commission du droit international sur une convention relative aux crimes contre l’humanité. Elle a aussi réitéré l’appui de son pays aux efforts internationaux pour faciliter « la coopération judiciaire horizontale entre États ».
M. JHON GUERRA SANSONETTI (Venezuela) s’est félicité de la reconnaissance de la compétence de la Cour pour le crime d’agression. Il a insisté sur le principe de complémentarité et la primauté des tribunaux nationaux et exhorté les États parties et les autres à coopérer avec la Cour. Les activités de cette dernière ne doivent en aucun cas être instrumentalisées à des fins contraires au Statut de Rome, a prévenu le représentant. La justice doit être dépolitisée, transparente et non sélective, a-t-il martelé, avant de rejeter l’ouverture d’une enquête préliminaire contre le Président constitutionnel du Venezuela à la demande d’un groupe de pays ayant déclaré clairement que son objectif est de renverser le Président, sous le prétexte fallacieux qu’il aurait commis des violations systématiques des droits de l’homme durant les manifestations violentes de l’opposition en avril 2017. Le représentant a vu là une « aberration juridique » visant à nier le travail des tribunaux nationaux.
Il a toutefois promis la coopération de son pays avec le Bureau de la Procureure. Nous fournirons les informations requises pour que le Bureau se rende compte à quel point le système judiciaire vénézuélien fait le nécessaire depuis le début. Le représentant a d’ailleurs jugé ironique que le groupe de pays qui accuse aujourd’hui le Venezuela soit celui-là même qui se tait devant les « pratiques d’agression et d’intimidation » constantes des États-Unis contre d’autres nations et contre les magistrats de la CPI. Les États-Unis, a-t-il accusé, traitent la CPI d’illégitime et menacent ses magistrats de sanctions si jamais ils s’avisent d’entamer des procédures contre leurs soldats et leurs alliés.
M. JAMES KINGSTON (Irlande) a déclaré que son pays s’est engagé en faveur de la CPI et de son développement. Il a appuyé le Fonds au profit des victimes. Le délégué a appelé à une coopération renforcée entre la Cour et le Conseil de sécurité, demandant à ce dernier d’user de sa prérogative de saisir la Cour. Il a défendu l’idée de suspendre le droit de veto en cas d’atrocités de masse et insisté sur l’importance de promouvoir l’universalité du Statut de Rome.
M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a rappelé qu’il avait conseillé à l’Assemblée des États parties de recourir aux moyens judiciaires pour résoudre les différences d’interprétation du Statut de Rome, afin de préserver l’intégrité et l’indépendance de la Cour. Une décision judiciaire apporte toujours une certaine clarté même si elle n’est pas acceptée par tous. Dans cet ordre d’idées, le représentant a dit suivre de près l’évolution de l’appel à la décision de rejeter la demande de la Procureure qui voulait l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en Afghanistan. Le représentant a noté avec satisfaction la publication du plan stratégique de la Cour pour la période 2019-2021 et des plans stratégiques du Bureau de la Procureure et du Greffe. Il a dit attendre avec impatience la pleine réalisation des 10 objectifs stratégiques.
Mme MERJE MÄGI (Estonie) a déclaré que la CPI est un instrument essentiel de la lutte contre l’impunité qui jouit d’une large confiance, comme en atteste le nombre d’affaires et de situations dont elle est saisie. Elle a exhorté les États parties à doter la CPI de ressources suffisantes et à renforcer son efficacité. Elle a appelé à un dialogue structuré entre la Cour et le Conseil de sécurité en vue d’une meilleure mise en œuvre des résolutions sur le renvoi de certaines situations à la Cour. Le Conseil, a-t-elle dit, a la responsabilité de répondre aux violations graves du droit international. La représentante a conclu en rappelant que son pays a augmenté sa contribution au Fonds au profit des victimes.
M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a pris note du plan stratégique du Bureau de la Procureure pour 2019-2021 qui répertorie les bonnes pratiques, les défis et fixe des objectifs stratégiques d’optimisation du travail. La recherche de la vérité par la collecte des éléments de preuve et des témoignages dans des contextes culturels très divers est une tâche « complexe », a reconnu le représentant. Cette tâche exige la pleine coopération des États et des Nations Unies pour les situations renvoyées par le Conseil de sécurité. Le représentant a, à son tour, appelé le Conseil à assurer le suivi de ses saisines. Il s’est félicité qu’au fil du temps, la CPI ait fait la preuve de sa grande capacité à résoudre « des affaires complexes dans des scénarios sensibles ». Il a promis de suivre avec intérêt les recommandations que fera le Groupe d’experts indépendants sur des sujets aussi délicats que la gouvernance, la complémentarité, l’efficacité des enquêtes et l’indépendance judiciaire. Il a souligné l’importance de la réflexion sur les aspects liés à l’intégrité des fonctionnaires et ex-fonctionnaires élus, à la conduite et à la déontologie, aux procédures disciplinaires et aux mécanismes alternatifs garantissant l’indépendance et l’intégrité de la fonction judiciaire.
Mme MARIA TELALIAN (Grèce) a réaffirmé combien son pays est attaché à l’indépendance de la CPI. La Cour doit en effet être à l’abri des pressions et ingérences extérieures et il va sans dire que pour réaliser cet objectif, elle doit avant tout devenir véritablement universelle, a estimé Mme Telalian. La représentante a en effet regretté que près d’un tiers des États Membres de l’ONU ne soit toujours pas partie au Statut de Rome. Elle a aussi souligné que les États parties sont collectivement responsables du succès de la CPI. On ne saurait sous-estimer la nécessité d’une coopération pleine et entière avec la Cour, a-t-elle précisé. Elle a donc déploré le nombre de mandats d’arrêt non exécutés et le fait que la Cour a adressé en vain au Conseil de sécurité 15 notifications de non-coopération. Elle a donc appelé la CPI et le Conseil à entretenir un dialogue plus structuré pour améliorer le suivi des situations renvoyées à la Cour. Mon pays, a-t-elle conclu, est prêt à coopérer de quelque façon que ce soit dans le cadre du processus d’examen complet de la Cour et du Statut de Rome, en vue de les renforcer.
M. SAMSON SUNDAY ITEGBOJE (Nigéria) a insisté sur l’importance « critique » de la coopération des États pour assurer un bon fonctionnement de la Cour. Il a aussi salué le travail du Fonds au profit des victimes, avant d’en venir aux succès énormes de la Cour, malgré plusieurs périodes difficiles et les nombreux problèmes qui ont menacé jusqu’à son existence. Mais, a-t-il dit, la lutte contre l’impunité et les crimes odieux est loin d’être gagnée. Les tâches qui attendent la Cour sont considérables. Le représentant a rappelé, dans ce cadre, que la Cour est en train d’examiner six affaires potentielles contre Boko Haram et deux contre des militaires nigérians. Mon pays, a-t-il assuré, a dûment coopéré avec la Cour dans ses efforts pour établir les faits, conformément au principe de complémentarité. Le Nigéria, a insisté le représentant, a démontré sans équivoque qu’il est capable et soucieux d’arrêter, d’enquêter, de poursuivre et de condamner les auteurs de crimes graves. Plusieurs réunions ont eu lieu entre les membres du Gouvernement et l’équipe du Bureau de la Procureure durant lesquelles toutes les questions ont reçu des réponses et les documents, mêmes classés, ont été remis, conformément à l’obligation découlant de l’article 86 du Statut de Rome.
Nous tenons tout de même à souligner, a dit le représentant, que contrairement aux guerres classiques où l’ennemi est facilement identifiable, au moins par son uniforme, la lutte contre le terrorisme est inconventionnelle et asymétrique. Le terrorisme, c’est des attaques surprises, un militantisme brutal et la clandestinité, a rappelé le représentant. Beaucoup de soldats nigérians ont payé le prix fort et consentent toujours à des sacrifices. Mais le Gouvernement prend toutes les allégations de violations des droits de l’homme au sérieux. Il ouvre des enquêtes et juge les militaires inculpés. Champion de la croisade anticorruption en Afrique, le Nigéria, a conclu le représentant, plaide pour que la corruption transfrontière soit inscrite parmi les crimes repris dans le Statut de Rome. La corruption transfrontière est un crime aussi grave que le génocide, le crime contre l’humanité et le crime d’agression. Davantage de personnes ont été tuées par cette corruption que par les autres crimes du Statut de Rome.
M. AMMAR AL ARSAN (Syrie) s’est dissocié de la résolution dont est saisie l’Assemblée générale. On est aujourd’hui, s’est-il expliqué, devant une situation où la CPI, créée pour faire appliquer la justice pénale internationale, s’acharne plutôt sur les faibles, tout en épargnant les forts. La plupart des affaires concerne un seul continent, a dénoncé le représentant, avant de rejeter toute idée de politiser l’objectif 16 de développement durable. Il est pour le moins curieux, a-t-il poursuivi, de voir que certains États parties au Statut de Rome appellent au renforcement de la CPI, par l’élargissement de son mandat, tout en signant des accords bilatéraux pour protéger leurs forces armées de toute poursuite pénale. Mon pays, a rappelé le représentant, a officiellement protesté, auprès du Secrétaire général, contre le Mécanisme international chargé d’enquêter sur les violations les plus graves commises en Syrie. Ce Mécanisme, dont le mandat n’est ni limité dans le temps ni dans sa portée géographique, ne saurait servir de base pour une éventuelle action pénale. Que les États épris de justice viennent chercher leurs ressortissants qui combattent en Syrie et les traduisent en justice.
M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a dit prendre note de l’ouverture d’une enquête concernant le Myanmar, rappelant que le Bangladesh accueille 1,1 million de Rohingya qui ont été forcés de fuir les atrocités dont ils étaient victimes. Alors que la crise est à sa troisième année, aucun de ces réfugiés n’est retourné chez lui, compte tenu de la situation sécuritaire et de l’environnement global dans l’État rakhine. L’établissement des responsabilités pour les crimes dont ils ont été victimes pourrait leur donner confiance en un retour sûr, volontaire et durable. Le Bangladesh, en tant que partie au Statut de Rome, souffre de la situation des Rohingya. Nous avons signé un mémorandum d’entente avec la CPI pour le lancement de l’enquête sur les déportations et nous déplorons que le Myanmar s’obstine à rejeter la compétence de la CPI, a conclu le représentant.
Dans un contexte marqué par les conflits et les situations d’urgence humanitaire, la CPI requiert, plus que jamais, le ferme appui de la communauté internationale et la coopération résolue des États parties, a déclaré M. PAUL DUCLOS (Pérou). Fort de cette conviction, il a justifié la demande faite par son pays et cinq autres, en vertu de l’article 4 du Statut de Rome, visant à ouvrir une enquête sur les crimes contre l’humanité commis au Venezuela depuis le 12 février 2014. Il s’agit, a-t-il martelé, d’établir les responsabilités. Le représentant a aussi fait valoir le travail de son pays pour favoriser une coopération plus étroite avec le Conseil de sécurité, étant donné que le mandat de ce dernier et celui de la Cour doivent être exécutés de façon complémentaire et interdépendante. Il a regretté un manque d’engagement constant, cohérent et systématique à suivre les situations renvoyées à la CPI. Il a donc salué les propositions tendant à établir des procédures particulières de suivi et plaidé pour un financement prévisible de la Cour.
M. MAJED S. F. BAMYA, de l’État de Palestine, a lancé un cri de ralliement autour de la CPI car autrement, a-t-il dit: comment expliquer aux générations futures que nous avons vécu une époque où les juges sont attaqués et les criminels de guerre protégés. Nous ne pouvons pas et nous devons agir en conséquence pour défendre la Cour et son indépendance afin qu’imperturbable face aux menaces, elle puisse poursuivre son noble objectif. Il serait inexplicable, a poursuivi le représentant, qu’à une époque où les technologies de l’information et des communications ont atteint un niveau de sophistication sans précédent, l’on continue à ignorer les crimes atroces commis aux quatre coins du globe.
Le représentant a donc estimé qu’il faut à tout prix promouvoir l’adhésion universelle au Statut de Rome, dont les amendements de Kampala sur le crime d’agression. Il faut aussi accélérer le rythme et renforcer l’efficacité des enquêtes préliminaires, des enquêtes et des poursuites car il est difficile de justifier les retards de la justice devant ceux qui l’attendent alors que, chaque jour, de nouveaux crimes font d’autres victimes. Cinq ans après l’enquête préliminaire sur la situation en Palestine, aucune véritable enquête n’a encore été ouverte, en dépit du nombre « incroyable » d’informations disponibles sur les crimes qui exigeaient une attention « immédiate et pas tardive ». L’État de Palestine poursuivra sa coopération avec la CPI car il ne connaît que trop le « coût de l’impunité », un coût que la population subit dans sa chair. Nous nous sommes joints à la CPI pour obtenir la justice et pas la vengeance mais aussi pour préserver les autres. Le représentant a conclu en exhortant la communauté internationale à ne jamais s’habituer à l’horreur.
Adoption de la résolution sur le Rapport de la Cour pénale internationale (A/74/L.8)
Se dissociant du consensus, les États-Unis ont réitéré qu’ils ne reconnaissent pas la compétence de la CPI, n’ayant pas adhéré au Statut de Rome. Dès lors, nous nions à la Cour le droit d’enquêter sur le comportement des soldats américains en Afghanistan, ont-ils martelé.
La Fédération de Russie, qui s’est également dissociée du consensus, a fait une évaluation très pessimiste de la situation de la CPI. Face à une résolution qui n’ajoute rien de nouveau à ce qui a été fait l’année dernière, elle a cité l’exemple de la Libye, en se demandant dans quelle mesure les activités de la CPI ont contribué à résoudre les problèmes. D’où vient la décision de s’attaquer un chef d’État, contrairement aux préceptes du droit? Ni les limites budgétaires ni la non-coopération des États ne semblent gêner la Cour, s’est étonnée la Fédération de Russie, en se demandant jusqu’à quand l’Assemblée générale va se bercer de l’illusion que la CPI est une bonne institution? Il faut, a dit la Fédération de Russie, se rendre à l’évidence et reconnaître que la Cour n’est pas l’instrument idoine pour véritablement lutter contre les crimes les plus graves. Balayant d’un revers de main les « accusations absurdes » de l’Ukraine contre elle, la Fédération de Russie a dénoncé, en revanche, les crimes commis contre la population dans l’Est ukrainien, et a conseillé à la CPI de se concentrer plutôt sur les crimes commis par la Géorgie contre les populations pacifiques de l’Ossétie du Sud.
Droit de réponse
Le représentant de la Géorgie a, à son tour, prodigué un conseil à la Fédération de Russie: coopérez avec le Bureau de la Procureure, conformément aux décisions de la Cour.