En cours au Siège de l'ONU

8395e séance – matin
CS/13570

Face aux défis posés par un monde multipolaire, les appels à un « multilatéralisme en réseau » et « inclusif » se multiplient au Conseil de sécurité

À l’initiative de la Chine, qui en préside les travaux ce mois-ci, le Conseil de sécurité s’est aujourd’hui réuni pour réfléchir aux moyens de renforcer le multilatéralisme dans un monde polarisé et marqué par l’inflation des conflits.  Un monde qui ne semble pas toujours avoir tiré les leçons des deux Guerres mondiales ayant endeuillé le XXe siècle, a estimé le Secrétaire général de l’ONU, avant de céder la parole à près de 80 orateurs.  À quelques jours seulement du centième anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale, M. António Guterres a rappelé qu’« en l’absence de mécanismes de résolution internationale », « la guerre avait éclaté et duré des années ».  « Il a fallu un deuxième cataclysme mondial pour enclencher les accords multilatéraux que nous connaissons aujourd’hui, pour éviter de sombrer dans une troisième guerre mondiale », a-t-il analysé.

Face à l’« anxiété », aux « incertitudes », à l’« imprévisibilité » et au « déficit de confiance » de l’opinion publique dans les institutions politiques, une approche globale est plus que jamais nécessaire selon le Chef de l’ONU, qui a plaidé pour un « système multilatéral réformé, revigoré et renforcé », avec pour boussole la Charte des Nations Unies.  Mais pour être couronné de succès, ce retour aux sources doit puiser à de nouveaux affluents: organisations internationales et régionales, mais aussi société civile et autres parties prenantes, pour réaliser un « multilatéralisme en réseau » et « inclusif ». 

Un appel repris à son compte par la France, qui a estimé plus facile de se livrer au « UN bashing », que de rénover le système multilatéral et de se réengager en faveur de l’Organisation, y compris en élargissant le Conseil de sécurité dans ses deux catégories de membres.  Mettant en garde contre les « tentations du repli et de l’unilatéralisme », le représentant a annoncé que son gouvernement organiserait, du 11 au 13 novembre prochain, le Forum de Paris sur la paix, « qui rassemblera tous les acteurs de la gouvernance mondiale », et parmi eux de simples « citoyens ».  Son homologue des États-Unis a, en revanche, considéré que le multilatéralisme en soi n’était « ni bon ni mauvais », mais au contraire tributaire de l’usage qui en est fait.  Elle l’a dénoncé lorsqu’il est mis au service de causes comme la défense par l’Assemblée générale du « régime barbare » de Cuba ou d’auteurs patents de violations graves des droits humains et des libertés fondamentales, comme le ferait le Conseil des droits de l’homme.

La déléguée américaine a en outre considéré que Washington, principal contributeur au budget ordinaire de l’Organisation et au budget des opérations de maintien de la paix, est en droit d’attendre un « retour sur investissement » et une « répartition plus équitable » de ce fardeau financier.  « Les contribuables de l’Oklahoma, de l’Idaho, et du Minnesota assument 25% d’un budget de 7 milliards de dollars pour financer des opérations basées à Kinshasa, Djouba, ou encore Pristina », a-t-elle observé, en assurant que les Américains se posent de sérieuses questions sur « leur généreux soutien » à l’ONU.

Si la Chine a estimé qu’elle assume sa part, avec le déploiement de 2 500 Casques bleus chinois dans diverses opérations onusiennes de maintien de la paix, la Fédération de Russie a quant à elle fustigé les États Membres qui, d’après elle, prétendent appuyer le multilatéralisme, tout en « imposant des sanctions, s’ingérant dans les affaires des autres et contournant l’ONU ».  Il n’y a qu’à regarder du côté du processus de paix au Moyen-Orient, du Programme d’action commun sur le nucléaire iranien, de l’Accord de Paris sur les changements climatiques ou des accords stratégiques sur les armements nucléaires pour s’en convaincre.  Un multilatéralisme à la carte en somme, qui ne correspondrait qu’à « leurs conditions préétablies », à en croire le délégué russe, qui s’en est pris à ses « collègues occidentaux », lesquels taxeraient de « révisionnisme » tous ceux qui seraient en désaccord avec eux.

Les résolutions de l’ONU sont « foulées aux pieds », a renchéri le Pakistan, en relevant que « le jusqu’au-boutisme politique et les jeux de pouvoir menacent de transformer des intérêts stratégiques en ambitions rivales, accentuant ainsi les multiples lignes de fracture internationales existantes ».

À la suite du Secrétaire général, les Présidentes de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC) ont été formelles: seul le multilatéralisme est de nature à relever des défis interdépendants les uns des autres, comme les changements climatiques et l’insécurité.  La première, Mme Alya Ahmed Saif Al-Thani, a jugé crucial d’autonomiser les femmes et les jeunes pour accroître leur participation politique, y compris aux processus de paix.  Comme elle, la Présidente de l’ECOSOC, Mme Inga Rhonda King, a plaidé pour des synergies renforcées avec le Conseil de sécurité, considérées par M. Antònio Guterres comme le « garant de la réputation générale de l’ONU ».

« Rappelons-nous que la Charte confère au Conseil une stature, des pouvoirs et des responsabilités particuliers », a souligné M. Guterres.  Aussi a-t-il encouragé le Conseil de sécurité à faire davantage pour « surmonter les divisions », adopter les programmes de prévention et de consolidation de la paix, et recourir à la médiation et autres outils énoncés dans le Chapitre VI de la Charte des Nations Unies pour parvenir à un règlement pacifique des différends.  Le Royaume-Uni a indiqué que si certains pays ne tentaient pas de détourner l’attention du Conseil de situations relevant du Chapitre VI, et si l’on utilisait plus rapidement les dispositions qu’il prévoit, « on ne serait pas contraint de recourir brutalement au Chapitre VII », qui légitime l’usage de la force.

« Anachronique » et doté d’organes subsidiaires au fonctionnement « byzantin », selon le représentant de l’Inde, le Conseil est confronté à des crises de « performance », de « crédibilité », de « légitimité » et de « pertinence ».  Aux yeux de sa délégation, « faire porter au multilatéralisme la responsabilité de la situation déplorable du Conseil reviendrait à accuser le Madison Square Garden de l’échec des « Knicks » de New York, année après année, et ce, depuis des décennies », a-t-il déclaré en recourant à une analogie sportive. 

Le Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Abdulqawi Ahmed Yusuf, a vanté le rôle joué par les juridictions comme la sienne, dont les décisions et la jurisprudence dissipent les incertitudes qui subsistent dans le droit international et clarifient le droit des traités, qui sont au fondement du multilatéralisme.  Pour le représentant du Liechtenstein, le Conseil de sécurité, « gardien de la Charte », dispose avec la Cour pénale internationale (CPI) d’un instrument additionnel pour s’assurer de la légalité de l’usage de la force, à laquelle il a parfois été fait appel unilatéralement et en l’absence d’autorisation préalable, a-t-il rappelé.

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES             

Renforcement du multilatéralisme et rôle de l’ONU (S/2018/982)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé que ce débat a eu lieu quelques jours seulement avant le centième anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale.  « Ce conflit fut une tragédie colossale et le signe annonciateur effrayant de décennies sanglantes à venir.  L’Europe était multipolaire à cette époque, mais cela n’était pas suffisant pour contenir la violence. » 

En l’absence de mécanismes de résolution internationale des problèmes, la guerre a éclaté et duré des années », a rappelé le chef de l’Organisation.  Il a fallu, a-t-il rappelé, un deuxième cataclysme mondial pour enclencher les accords multilatéraux que nous connaissons aujourd’hui, lesquels ont fait leurs preuves en matière de sauvetage de vies humaines, de progrès économiques et sociaux et d’évitement d’une troisième descente dans la guerre mondiale.

Les dernières années ont été marquées par des réalisations inspirantes en matière de diplomatie internationale, notamment le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques, a observé M. Guterres.  « Les opérations de paix autorisées par ce Conseil sont également des expressions importantes du multilatéralisme en action.  Le maintien de la paix a aidé un grand nombre de pays à se relever d’un conflit armé.  Nos missions sont souvent des remparts déterminants contre le chaos et les effusions de sang », s’est félicité le Secrétaire général.  C’est la raison pour laquelle il s’est déclaré heureux que 151 pays, ainsi que quatre grandes organisations internationales et régionales, aient exprimé leur soutien à l’initiative Action pour le maintien de la paix, qui vise à renforcer ces partenariats collectifs. 

Dans d’autres domaines, cependant, les efforts multilatéraux sont soumis à d’immenses mises à l’épreuve.  C’est une période de multiplication des conflits, de lutte contre les changements climatiques, d’aggravation des inégalités et de tensions grandissantes dans le domaine commercial.  Voici une période au cours de laquelle un nombre sans précédent de personnes franchissent les frontières à la recherche de sécurité ou d’opportunités.  Nous sommes toujours aux prises avec le risque de prolifération des armes de destruction massive et commençons seulement à prendre en compte les dangers potentiels posés par les nouvelles technologies.  « Il y a de l’anxiété, de l’incertitude et de l’imprévisibilité dans le monde actuel.  La confiance est en déclin, au sein des nations et entre elles.  Les gens perdent confiance dans les institutions politiques, qu’elles soient nationales ou internationales.  Les hypothèses clefs ont été renversées, les principaux efforts fragilisés et les principales institutions remises en cause.  Il semble souvent que plus la menace est mondiale, moins nous sommes capables de coopérer.  C’est une situation très dangereuse face aux défis d’aujourd’hui, pour lesquels une approche globale est essentielle », a encore analysé M. Guterres. 

Dans ce contexte difficile, nous devons inspirer un retour à la coopération internationale, a-t-il exhorté.  Nous avons besoin d’un système multilatéral réformé, revigoré et renforcé, et en fin de compte, « le multilatéralisme n’est rien d’autre que des pays qui se réunissent, se respectent et établissent les formes de coopération qui garantissent la paix et la prospérité pour tous sur une planète en bonne santé ».  À cette fin, nous avons besoin d’un engagement plus vigoureux en faveur d’un ordre fondé sur des règles, avec les Nations Unies en son centre, les différentes institutions et traités qui donnent vie à la Charte des Nations Unies, a plaidé le haut fonctionnaire.

Mais il ne suffit pas d’avoir des lois et des conventions internationales, aussi vitales soient-elles, a-t-il mis en garde.  Selon lui, nous avons besoin de nouvelles formes de coopération avec d’autres organisations internationales et régionales, « un multilatéralisme en réseau ».  Et nous avons besoin de liens plus étroits avec la société civile et les autres parties prenantes, « un multilatéralisme inclusif ». 

Le Conseil de sécurité a un rôle central à jouer à cet égard pour montrer l’importance de la coopération internationale.  Rappelons-nous que la Charte confère au Conseil une stature, des pouvoirs et des responsabilités particuliers.  C’est pourquoi cet organe assume non seulement la charge qui est la sienne, « mais également de la réputation générale de l’ONU ».  « Je pense que nous pouvons tous convenir que les crises en Syrie, du processus de paix au Moyen-Orient et ailleurs ont ébranlé la confiance populaire dans le potentiel de la communauté internationale pour apporter des solutions », a estimé le Secrétaire général. 

Aussi a-t-il encouragé à faire davantage pour surmonter les divisions, adopter les programmes de prévention et de consolidation de la paix et recourir davantage à la médiation et autres outils énoncés dans le Chapitre VI de la Charte des Nations Unies pour parvenir à un règlement pacifique des conflits.  M. Guterres s’est dit convaincu de la nécessité d’une montée en puissance de la diplomatie, avant de souligner qu’il tire ses propres forces des exemples récents de solutions politiques négociées à des problèmes qui semblaient « auparavant sans espoir ».

Dans le même esprit, il a encouragé tous les États Membres à investir davantage dans la construction d’une mondialisation juste, qui fonctionne pour tous, et dans la cohésion sociale, conformément au Programme 2030.  « Il ne devrait pas y avoir de place pour diaboliser les minorités, les migrants et les réfugiés, ni pour étouffer la diversité qui enrichit les sociétés », a affirmé le haut fonctionnaire.  Alors que nous célébrons le centenaire de la Première Guerre mondiale, nous devons en tirer les leçons et conforter notre pratique du multilatéralisme, face aux épreuves et aux menaces d’aujourd’hui et de demain, a-t-il insisté.  Et, alors que les défis du XXIe siècle menacent de dépasser les institutions et les mentalités du XXe siècle, « réaffirmons les idéaux de l’action collective tout en recherchant une nouvelle génération d’approches et d’architecture à leur hauteur ». 

La réforme de l’Organisation des Nations Unies a une contribution cruciale à apporter à cet égard, a reconnu le Secrétaire général, pour qui c’est la Charte des Nations Unies qui montre la voie: « renforcer le multilatéralisme signifie renforcer notre engagement envers la Charte.  Un tel engagement est nécessaire plus que jamais », a-t-il ajouté en conclusion.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar), qui s’est exprimée au nom de la Présidente de l’Assemblée générale des Nations Unies, Mme MARIA FERNANDA ESPINOSA GARCÉS, a déclaré que le multilatéralisme était actuellement secoué par des vents contraires, alors même que c’est le seul choix possible dans un monde de plus en plus interconnecté.  Le Conseil de sécurité, dans sa propre expérience et son histoire a montré que la résolution des conflits exige une approche multilatérale, montrant de fait la nécessité de le renforcer.  « Faire avancer le multilatéralisme sera au cœur de ma présidence », a assuré Mme Al-Thani.

Elle a également déclaré être profondément convaincue que le dialogue et la coopération internationale sont les seules approches à tester pour répondre aux grands défis du monde.  Cela est particulièrement important, s’agissant des questions relatives à la paix et à la sécurité qui ne peuvent être résolues par les seuls pays concernés.  C’est pour cela que les États Membres doivent réaffirmer leurs engagements à respecter les principes et piliers inscrits dans la Charte des Nations Unies, à renforcer le cadre international légal et à maintenir le cadre de coopération internationale contraignant, a-t-elle encore plaidé. 

Mme Al-Thani a également jugé « cruciale » l’inclusion des femmes et les jeunes, en tant qu’un des objectifs du multilatéralisme et si l’on veut réussir en matière de paix et de sécurité.  Il faut donc collectivement travailler à leur autonomisation, y compris en leur garantissant des opportunités, des emplois décents, une protection sociale et une plus grande participation politique, y compris dans les processus de paix. 

Le renforcement du multilatéralisme implique également de travailler à une meilleure coordination des efforts au sein du système des Nations Unies, entre ses différents organes.  L’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et les autres organes, tous jouent un rôle crucial et complémentaire dans leurs mandats, a-t-elle encore déclaré, assurant que la Présidente de l’Assemblée générale continuerait de chercher à faciliter les synergies au sein de ces organes. 

Pour Mme INGA RHONDA KING, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), seul un dialogue inclusif a permis l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Elle s’est dite « troublée » par la remise en question du multilatéralisme, qui a favorisé une longue période de croissance économique depuis la Seconde Guerre mondiale et la réduction de moitié de la pauvreté depuis 2000.  Les défis les plus importants de notre époque, notamment les changements climatiques, les migrations et les échanges commerciaux, nécessitent une réponse globale, a insisté Mme King.  À cet égard, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, sous l’égide de l’ECOSOC, a permis la création d’un espace propice à un véritable dialogue et au partage des connaissances, a-t-elle relevé. 

Mme King a rappelé la coopération entre l’ECOSOC et le Conseil de sécurité, notamment au sein de groupes consultatifs sur les conflits en Afrique et d’un programme conjoint d’appui à Haïti.  Afin de renforcer le dialogue avec le Conseil tout en assurant une plus grande cohérence entre les piliers des Nations Unies, Mme King a souligné le renforcement de la coopération de l’ECOSOC avec la Commission de consolidation de la paix (CCP) et le Conseil des droits de l’homme. 

M. ABDULQAWI AHMED YUSUF, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a estimé que la technologie a besoin des rênes du multilatéralisme pour emmener l’humanité dans la bonne direction, comme en témoigne par exemple le câblage d’Internet sous les mers et les océans.  Nous célébrons actuellement la fin de la Première Guerre mondiale, a-t-il rappelé, en soulignant que la paix avait donné un nouvel élan au multilatéralisme, « la seule voie que nous pouvons emprunter ».  Si les accords bilatéraux peuvent donner naissance à des tribunaux d’arbitrage, ceux-ci ne peuvent cependant supplanter des juridictions internationales comme la CIJ.  Ses décisions mettent fin aux incertitudes qui subsistent dans le droit international en les interprétant et en fixant une jurisprudence, a expliqué le magistrat. 

Les décisions de la Cour ont contribué au multilatéralisme, a assuré son Président, en expliquant qu’elles avaient clarifié le droit des traités qui rend possible le multilatéralisme.  La CIJ, a poursuivi M. Yusuf, a également rendu des avis consultatifs qui ont permis d’établir une distinction entre la personnalité juridique internationale et celle des États Membres.  Cette juridiction, a-t-il ajouté, a également contribué à l’émergence du concept d’erga omnes, qui est le droit que toute nation peut revendiquer dans certaines circonstances, indépendamment des traités qu’ils auraient pu signer. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a déclaré que la réunion de ce jour revêt une « importance historique », car les chefs des principaux organes des Nations Unies sont réunis ici avec les États Membres à qui ils demandent de renforcer le multilatéralisme.  « Les Nations Unies incarnent les aspirations des peuples pour la paix et le développement, et dans le même temps le multilatéralisme essuie des attaques.  Or, la nécessité de renforcer ce cadre fait l’objet d’un consensus », a relevé le représentant en observant, tout comme le Secrétaire général et la Présidente de l’Assemblée générale, que le multilatéralisme est la seule voie pour résoudre les problèmes du monde.  « Il faut donc le renforcer », a-t-il tranché.

En tant que membre fondateur des Nations Unies, le premier à avoir signé la Charte, la Chine est déterminée à jouer son rôle dans le processus de renforcement du multilatéralisme, a assuré M. Ma tout en se demandant comment le renforcer dans un tel climat de menace.  De son point de vue, il faut respecter tous les principes de la Charte des Nations Unies et promouvoir des échanges qui soient « gagnant-gagnant » pour tous.  Le représentant a également souhaité que le dialogue et la coopération l’emportent sur la violence.  « Tous les États sont égaux, qu’ils soient petits ou grands, et tous ont le droit à ce que leur souveraineté et leur intégrité territoriale soient respectées », a encore déclaré le représentant chinois. 

La Chine est d’avis que, en tant que garant de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de sécurité doit jouer son rôle et faire preuve d’unité et de sagesse, tout en promouvant le dialogue entre les nations.  La Chine assume sa part, a fait valoir le délégué en mentionnant qu’elle a déployé 2 500 Casques bleus chinois dans diverses opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  En tant que plus grand pays en développement, la Chine, a-t-il ajouté, met pleinement en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et s’attache à soutenir le développement des autres pays.  Le représentant a cité le projet de la nouvelle route de la soie qui, bien que ce soit une initiative chinoise, appartient à tous.  La Chine souhaite que tous les pays y prennent part, a-t-il conclu.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI(Suède) a observé qu’un ordre international s’appuyant sur des règles et une coopération multilatérale, avec l’ONU en son cœur, n’ont peut-être jamais été aussi importants.  Ils constituent le fondement de la politique étrangère de la Suède mais aussi de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne, a-t-il rappelé.  Or, le multilatéralisme et les Nations Unies font face à des pressions croissantes.  Des intérêts à courte vue se tiennent prêts à exploiter les défauts de l’Organisation.  Ne pas honorer nos engagements en matière de paix, de sécurité et de développement fait courir le risque d’en faire de vains mots, ouvrant la voie au cynisme et à la polarisation, a averti le représentant.  Qu’il s’agisse des changements climatiques, des armes de destruction massive, du terrorisme et de l’extrémisme violent, ces menaces rendent nécessaire une coopération multilatérale, a-t-il insisté.  « Nous disposons déjà des normes et des structures, il est temps à présent de passer à l’action à la mise en œuvre. » 

Pour la déléguée, le Conseil se doit d’être mieux à même d’identifier les risques et les causes profondes des conflits.  Il doit aussi s’assurer que sa réponse est globale.  Dans ce cadre, les normes contre l’usage d’armes de destruction massives sont des piliers indispensables du régime mondial de désarmement et de non-prolifération qui nous protègent des dangers liés aux armes nucléaires, biologiques et chimiques.  Les sauvegarder doit être une priorité absolue et demeurer une composante cruciale de la prévention, a souligné le délégué.  À cette fin, tout doit être fait pour assurer le succès de la Conférence des parties chargée de l’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020, a-t-elle ajouté, enjoignant le Conseil à soutenir le Programme de désarmement lancé cette année par le Secrétaire général. 

Elle a également émis le souhait que la Charte des Nations Unies et le droit international restent au cœur de la coopération.  Dans le contexte de la prévention, a-t-elle relevé, les dispositions relatives aux règlements des différends, comme énoncées au Chapitre VI de la Charte des Nation Unies, contiennent des instruments puissants basés sur l’état de droit qui permettent de résoudre les crises avant qu’elles ne dégénèrent, a noté la représentante, citant le rôle fondamental joué par le Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI). 

Soulignant qu’il n’y a pas de moyen plus efficace de maintenir la confiance dans le multilatéralisme que d’apporter des résultats concrets dans les domaines de la paix, de la sécurité et du développement, la représentante a jugé impératif de continuer à soutenir la réforme du système de l’ONU initiée par le Secrétaire général.  En tant que membres de ce Conseil, a-t-elle dit, nous devons nous employer à surmonter nos différends et à apporter des réponses unifiées, tout en veillant à ce que nos méthodes de travail aient pour finalité la prise de décisions significatives, avec des résultats sur le terrain.  Elle a pour cela appelé à de nouvelles discussions sur la limitation de l’usage du droit de veto et à une représentation plus large de l’Afrique, mais aussi de l’Asie et de l’Amérique latine au sein du Conseil, encourageant le Secrétaire général à poursuivre son ambitieux programme de réformes. 

Après avoir réaffirmé l’attachement de son pays à promouvoir le multilatéralisme, M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a souligné l’importance d’adhérer ensemble aux principes et buts de la Charte des Nations Unies.  Il a également encouragé les États Membres à mettre en œuvre les décisions issues des documents finaux d’Addis-Abeba, Sendai, Paris et bientôt Marrakech.  Le représentant a ensuite plaidé en faveur de partenariats étroits entre l’ONU et les organisations régionales telles que l’Union européenne, l’Union africaine, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’Organisation internationale du commerce (OIC) ou encore l’Organisation de Shanghai pour la coopération.

La délégation kazakhe a par ailleurs cité un exemple à suivre, à savoir la stratégie à trois volets dont elle a eu l’initiative.  Celle-ci consiste à renforcer les liens entre sécurité et développement, à revitaliser l’approche régionale et à agir dans le cadre de l’initiative Unis dans l’action.  En outre, a rappelé le représentant, son gouvernement a lancé, le 28 septembre dernier un « code de conduite visant à réaliser un monde exempt de terrorisme », lequel a pour objectif de fédérer les États Membres dans la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a jugé « pertinent » le thème débattu ce matin, dans le contexte où certains États ont la volonté d’aller contre les aspirations des autres.  « Ils disent qu’ils appuient le multilatéralisme, mais imposent des sanctions, s’ingèrent dans les affaires des autres et contournent les Nations Unies.  À leurs yeux, le multilatéralisme ne doit correspondre qu’à leurs conditions préétablies », a-t-il dit.

« Pour trouver ces États, il ne faut pas aller très loin », a poursuivi le représentant russe, précisant qu’il suffit de regarder du côté du processus de paix au Moyen-Orient, de l’Accord global sur le nucléaire iranien, de l’Accord de Paris sur les changements climatiques ou des accords stratégiques sur les armements nucléaires.  Il suffit aussi de regarder du côté des mesures coercitives unilatérales « imposées par nos collègues occidentaux contre des États qui ne font pas ce qu’ils veulent ».  Le représentant a remarqué que « quand on n’est pas d’accord avec eux, on est révisionniste ».  « Il n’est même plus utile de présenter des preuves.  L’avis de l’accusé, n’intéresse plus les accusateurs », a-t-il encore déclaré.

Le délégué russe a encore observé que ces États, non contents de désigner les autres, n’hésitent pas non plus à employer la violence et à s’ingérer dans les affaires des États, comme en 1999 avec le bombardement de la Serbie, la guerre et l’occupation de l’Iraq en 2003 ou encore les manipulations des résolutions du Conseil de sécurité en 2011 lors de l’intervention en Libye.  Parfois, a-t-il ajouté, ils forcent des pays, contre l’avis de leurs populations, à rejoindre leurs alliances militaires, comme ils le font dans les Balkans.  Cette tendance est préoccupante car elle pousse à la confrontation, a encore déclaré le représentant russe, rappelant que c’est précisément la confrontation qui a mené aux guerres mondiales.  Il a conclu en émettant l’espoir que le débat d’aujourd’hui permettrait de rappeler le rôle de l’ONU, née après la Seconde Guerre mondiale.

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) s’est dite heureuse de pouvoir débattre du multilatéralisme avant son départ prochain des Nations Unies, à la fin de l’année.  Elle a rappelé que son pays est le plus important contributeur au budget ordinaire de l’Organisation, financé par les contribuables américains à hauteur de 35% pour le Programme alimentaire mondial (PAM), de 13% pour le budget du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICF), ou encore de 42% pour le budget du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR).

Parfois cependant, le peuple américain s’interroge sur l’appui généreux qu’il prête à l’ONU, et estime que le multilatéralisme n’est pas forcément le bon choix.  « Ce n’est pas que nous manquons la générosité », s’est-elle justifiée, en relatant le fait que le représentant d’un pays africain lui aurait fait récemment la leçon en citant la Bible.  Si nous ne nous attendons pas toujours à ce que nos choix prévalent, nous attendons en revanche des « retours sur investissement », a clarifié Mme Haley, qui a rappelé que les États-Unis ne sont pas une « organisation caritative ».  Nous travaillons de façon partiale, a-t-elle insisté, en estimant que le multilatéralisme « n’est ni bon ni mauvais », ce sont nos objectifs qui sont bons ou mauvais.

Lorsque, par exemple, l’Assemblée générale accorde son soutien au « régime barbare de Cuba », c’est un mauvais usage du multilatéralisme qui est fait, a argué Mme Haley, pour qui protéger les auteurs les plus patents de violations des droits de l’homme constitue aussi un échec du multilatéralisme. 

Le mois prochain, a-t-elle prévenu, nous allons prendre une décision majeure dans la manière dont nous contribuons au budget du maintien de la paix, dont nous assumons 25%, une part « disproportionnée ».  Elle a annoncé que son pays ne pourra appuyer des actions collectives si les tâches ne sont pas réparties équitablement.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déclaré que les menaces actuelles ne cessent de s’accroître, comme au Moyen-Orient où nombre d’États sont confrontés au terrorisme.  Aujourd’hui, les situations de guerre, de crises humanitaire ou migratoire d’un pays peuvent être répercutées dans d’autres, peu importe leur niveau de sécurité.  C’est pour cela qu’il faut travailler ensemble, a dit le représentant.

Il a également déclaré que la Charte des Nations Unies, outil par excellence du multilatéralisme, est plus actuelle que jamais.  Même si beaucoup a été fait pour la mettre en œuvre et réaliser ses principes et pilier, il reste encore à faire en matière de paix, de sécurité, de respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États. 

L’expérience du Koweït, victime en 1990 de l’invasion de l’Iraq, est un bon exemple du rôle de la Charte et du Conseil de sécurité, qui dans sa résolution 678 (1990) avait demandé à l’Iraq de se retirer du Koweït.  Cela montre que les petits États, nombreux aux Nations Unies peuvent être protégés, a dit le représentant, exprimant sa préoccupation quant aux sanctions qui leur sont souvent imposées.  « On peut résoudre les différends d’une autre manière », a déclaré le représentant, appelant le Conseil de sécurité à insister sur le rôle du multilatéralisme. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a déclaré que le renforcement du multilatéralisme et la promotion d’un ordre international basé sur des règles constituent les priorités de son pays, comme le démontre sa participation active aux débats du Conseil de sécurité.  La Pologne accueillera, en décembre de cette année, la conférence de Katowice sur les changements climatiques afin d’assurer la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, a-t-elle rappelé.  La coopération avec les organisations régionales est essentielle au succès du multilatéralisme, a estimé Mme Wronecka, citant en exemple les réalisations de l’Union européenne.  Elle s’est félicitée du renforcement du partenariat stratégique entre l’ONU et l’Union africaine en matière de paix et de sécurité. 

Mme Wronecka a appelé à l’adoption de réformes afin de faire en sorte que les membres du Conseil de sécurité disposent de compétences et de droits égaux.  Selon elle, le Conseil de sécurité ne peut demeurer passif lorsque sont bafoués les droits de l’homme et les libertés fondamentales.  Estimant en outre que les défis de notre époque ne peuvent être résolus de façon unilatérale, elle a appelé à l’intensification des efforts de prévention et de médiation des conflits. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France), faisant valoir que « le socle du multilatéralisme, c’est le droit international », a invité à respecter le droit qui est à la base de la Charte des Nations Unies, avec au premier rang les droits de l’homme, le droit international humanitaire, toutes les obligations nées des traités et des autres sources du droit international, en particulier les résolutions du Conseil de sécurité.  Au niveau de la pratique, il a vu le multilatéralisme comme une « approche collective » et la « conviction fondée sur l’expérience que tout est plus que la somme de ses parties ».  Or aujourd’hui, le multilatéralisme et les Nations Unies sont à la croisée des chemins et les menaces qui pèsent sur lui se nourrissent des échecs de la communauté internationale et de la contestation des principes juridiques fondamentaux et politiques, a-t-il remarqué. 

Dans ce contexte, M. Delattre a appelé à un sursaut collectif et plaidé pour un renforcement des coopérations régionales, notamment avec l’Union européenne et l’Union africaine, et pour un soutien aux opérations de maintien de paix africaines, comme le G5 Sahel.  La France plaide également pour un renforcement de l’ONU, qui doit toutefois se réformer.  Mais la France ne peut pas accepter que la légitimité de certains de ses organes, comme la CIJ, le Conseil des droits de l’homme ou encore l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) soient remis en cause par des approches idéologiques. 

La France défend l’élargissement du Conseil de sécurité, dans ses deux catégories de membres, afin que cet organe reste légitime aux yeux de tous, a ajouté M. Delattre.  Elle porte notamment l’initiative, aujourd’hui soutenue par 101 États, qui vise à suspendre l’utilisation du droit de véto en cas d’atrocités de masse.  Face à la multiplication des crises, il ne faut pas céder à la tentation de l’unilatéralisme ni tomber dans le « UN Bashing », a déclaré le représentant pour qui « il est plus facile de critiquer les limites du système, voire de le saper, que de le renforcer ».  Il a observé que le multilatéralisme est un bien commun dont les effets positifs ne sont pas toujours directement perçus.  Enfin, il a signalé que la France accueillera, du 11 au 13 novembre, le Forum de Paris sur la paix.

À l’approche des commémorations de la fin de la Première Guerre mondiale, Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a déclaré que les leçons tirées des conflits du XXe siècle constituent le fondement de notre effort commun de prévention des conflits.  Pour elle, le multilatéralisme représente la « seule réponse crédible » aux défis de notre temps tels que les changements climatiques, les migrations et le terrorisme.  Elle s’est inquiétée de la tendance récente à miner les fondements du multilatéralisme, y compris au sein du Conseil de sécurité.  En l’absence d’action du Conseil, les innocents souffrent et l’impunité règne, a prévenu Mme Gregoire van Haaren, en donnant l’exemple du Yémen et du Myanmar.  La situation en Syrie est le signe d’une « crise de non-respect du droit international », a poursuivi la représentante, alors que les Conventions de Genève, la Charte des Nations Unies l’ONU et la Convention sur les armes chimiques sont violées par les belligérants. 

Pour remédier à ces problèmes, Mme Gregoire van Haaren a exprimé son appui aux réformes entreprises par le Secrétaire général afin de renforcer le rôle des Nations Unies, notamment celui du Conseil de sécurité.  Elle a également appelé à l’intensification de la coopération avec les organisations régionales telles que l’Union européenne et l’Union africaine.  Le respect de l’état de droit, du droit international humanitaire et des droits de l’homme est « vital » au maintien de la légitimité de l’ONU et du multilatéralisme, a-t-elle conclu. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé que le multilatéralisme doit non seulement montrer sa capacité à coordonner des politiques entre plus de deux pays, il doit aussi préserver le dialogue, la non-ingérence dans les affaires intérieures, l’égalité internationale des États, le respect mutuel, la juste répartition des bénéfices de tâches menées en commun et le respect de la biodiversité.  En ce sens, la communauté internationale doit permettre que tout le système de l’ONU, du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale, de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), des organisations gouvernementales régionales et sous-régionales fonctionnent de manière démocratique et transparente.  Un tel changement de mentalité permettrait d’apporter une réponse efficace à nombre de défis auxquels le système international est confronté, a fait valoir la délégation, citant la reconfiguration des forces militaires, la recomposition de l’économie mondiale et la question du poids de certains pays disposant du droit de veto.  Aussi a-t-elle plaidé pour une réforme urgente pour que l’ONU exerce avec objectivité et efficacité son rôle central dans les relations internationales. 

À cet égard, la délégation a déploré que plusieurs pays considérés comme des puissances fassent preuve d’unilatéralisme plutôt que de multilatéralisme, soulignant qu’elles ont toujours tenté de placer les affaires d’intérêt international à l’aune de leurs intérêts nationaux particuliers par le recours à des coalitions, ce qui a eu pour conséquence davantage de conflits régionaux.  La délégation a suggéré que ces pays, conscients de leur capacité militaire et technologique, fassent le pari de la paix et fondent leurs relations internationales sur des bases amicales, objectives, égalitaires et pacifiques.

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a exprimé sa préoccupation devant l’érosion progressive de l’ordre multilatéral qui hypothèque la paix et la sécurité internationales, appelant les États Membres à réhabiliter l’esprit de la Charte des Nations Unies qui consacre le multilatéralisme comme approche par excellence de « notre quête commune de solutions aux défis contemporains ».  Il a ainsi lancé un appel aux États Membres pour qu’ils privilégient les cadres de coopération concertée et coordonnée, où s’élaborent les stratégies consensuelles pour relever les défis actuels et futurs.  La multiplicité et la complexité des défis actuels à la paix, à la sécurité et au développement durable, requièrent, de l’avis du représentant, la mutualisation des efforts et une mise en synergie des actions menées par les États Membres et les organisations régionales et sous-régionales.

À cet égard, le « Cadre conjoint pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, entre les Nations Unies et l’Union africaine », signé le 19 avril 2017 par le Secrétaire général de l’ONU et le Président de la Commission de l’Union africaine, apparaît comme un exemple vertueux de multilatéralisme entre l’ONU et une organisation régionale: le partenariat entre l’ONU et l’UA est ainsi passé d’une approche ad hoc à une démarche commune plus structurée et prévisible.  M. Ipo a saisi cette occasion pour saluer les progrès « remarquables » accomplis dans l’opérationnalisation de ce Cadre conjoint, de même que les consultations régulières entre le Conseil de sécurité des Nations Unies et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur du multilatéralisme, du droit international et du principe de règlement pacifique des conflits, soulignant l’importance d’un renforcement du système de l’ONU pour répondre aux défis que le monde contemporain fait peser sur la communauté internationale.  Se disant profondément préoccupé par la prolifération des conflits et l’émergence de nouvelles menaces pour la paix et la sécurité internationales, il a observé que le monde est aujourd’hui interconnecté et interdépendant, ce qui signifie que la pauvreté et la vulnérabilité d’une large part de la population mondiale ont des effets directs sur la sécurité et le bien-être de tous. 

Pour faire face à ces réalités, nous devons nous employer à renforcer la coopération internationale afin de réaliser les principes et les buts consacrés dans la Charte des Nations Unies, a-t-il dit, plaidant pour un soutien au système de sécurité collective et à un ordre international fondé sur des règles.  À cette fin, a poursuivi le représentant, il convient de faire progresser la réforme du Conseil de sécurité pour le faire correspondre aux réalités contemporaines et, comme le propose le Groupe ACT (Groupe Responsabilité, cohérence et transparence), et le rendre plus cohérent, transparent et redevable. 

De plus, la responsabilité du Conseil en matière de paix et de sécurité doit s’exercer dans le plein respect du droit et de la justice, a soutenu le délégué, appelant à une interaction plus systématique avec la Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI). 

Il a d’autre part souligné la responsabilité du Conseil s’agissant de la préservation du régime de non-prolifération des armes de destruction massive et de la lutte contre le terrorisme.  De telles menaces imposent l’unité de ses membres, a-t-il affirmé. 

Réitérant son soutien aux réformes engagées par le Secrétaire général, le représentant a aussi fait valoir que le multilatéralisme supposait de travailler de manière proactive et inclusive avec des entités comme l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les institutions financières internationales, les organisations régionales et sous-régionales ainsi qu’avec la société civile, le secteur privé et les groupes de femmes et de jeunes. 

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a estimé que le multilatéralisme est le meilleur moyen de faire face aux grands défis auxquels l’humanité fait face, à savoir les changements climatiques, la crise des réfugiés et des migrants, la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, la menace nucléaire, l’utilisation d’armes de destruction massive, le terrorisme, la criminalité transnationale organisée et la rhétorique extrémiste, entre autres.  La communauté internationale devrait donc renouveler son engagement envers les buts et principes de la Charte des Nations Unies et condamner le multilatéralisme à la carte, en vertu duquel certains pays choisissent les aspects du système international qui les intéressent. 

Par exemple, a dit la délégation, on ne peut pas plaider pour les droits de l’homme et dénoncer le principal organe de l’ONU sur cette question.  On ne peut pas non plus considérer les réfugiés et les migrants comme un problème et ne pas participer au plus grand effort collectif de l’histoire en faveur d’une migration ordonnée, sûre et régulière.  On ne peut pas faire face aux changements climatiques si le principal pollueur se retire de l’accord le plus pertinent de l’histoire en la matière. 

Pour ce qui concerne les questions de paix et de sécurité, la Bolivie reconnaît que les défis auxquels le Conseil est confronté sont complexes.  Cependant, elle considère que ceux qui sapent les efforts du Conseil n’appliquent pas suffisamment les mécanismes prévus par la Charte et mènent des actions unilatérales, en particulier les grandes puissances, ce qui a affaibli les gouvernements et forces de paix et de sécurité.  La Bolivie rejette catégoriquement l’utilisation de la force et de mesures coercitives en violation flagrante du multilatéralisme. 

Elle a également fait part de sa préoccupation au sujet de l’instrumentalisation du système et de la confusion entre les mandats et prérogatives des organes de l’ONU.  Ces organes doivent agir selon les principes de complémentarité et de coordination, et non en pratiquant l’ingérence et les doublons, a précisé la délégation.  Elle a considéré qu’il est indispensable de travailler à la réforme de l’ONU pour renforcer le multilatéralisme, y compris du Conseil.  Celui-ci doit être plus efficace, inclusif et surtout démocratique, et le nombre de ses membres doit être l’expression légitime des 193 pays qu’il représente.  Pour la Bolivie, il devrait éviter la sur représentation régionale qui « perpétue une sorte de néocolonialisme institutionnel » et éliminer le droit de veto, « anachronique et inacceptable au XXIe siècle ». 

M. TAYE ATSKE SELASSIE AMDE (Éthiopie) a estimé que l’ONU continuait d’être le « réacteur du multilatéralisme », mais invité la communauté internationale à tirer les leçons des échecs passés de l’Organisation.  L’horizon politique et géopolitique mondial a considérablement évolué depuis sa création, a souligné le représentant, qui a considéré que les États Membres ont plus que jamais besoin d’elle, à condition qu’elle sache faire face à ses propres « faiblesses ».  C’est la raison pour laquelle la réforme de l’ONU est si importante, a-t-il souligné.

Pour l’Éthiopie, cette réforme doit être mise au service des peuples du monde entier.  Le représentant a réaffirmé qu’il fallait revenir aux principes et aux buts de la Charte des Nations Unies, dont les Chapitres VI, VII et VIII qui offrent des orientations très claires à cet égard.  Nous avons toutes les raisons d’insister sur la nécessité d’une réforme, a poursuivi M. Selassie, qui a demandé aux délégations de faire preuve de « courage » et d’« inspiration », avant d’assurer que son pays, « un important fournisseur de contingents », continuera d’honorer ses obligations. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a déclaré que depuis sa création, l’ONU n’a pas toujours réussi à combler le fossé entre les attentes et les blocages.  Elle a cité l’ancien Secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, qui avait déclaré que son travail, c’était de « pousser de lourds rochers vers le haut de la montagne, même si certains nous ont échappé et sont redescendus ».  En dépit de cet échec, tous les défis qui pèsent sur le monde ne peuvent être résolus que par le dialogue, a plaidé Mme Pierce. 

Cela dit, il est inacceptable de penser que les situations ne doivent pas être abordées en cas de non consensus, a jugé la représentante.  Faisant une analyse juridique des Chapitres VI et VIII de la Charte des Nations Unies, Mme Pierce a déclaré que si certains pays ne tentaient pas de détourner l’attention du Conseil de sécurité sur des situations relevant du Chapitre VI, et si l’on n’utilisait pas plus rapidement les dispositions de ce Chapitre, on ne serait pas contraint de recourir brutalement au Chapitre VII. 

M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a tout d’abord rappelé que ce mois de novembre marquera le centième anniversaire de la fin de ce qui devait être « la guerre pour mettre un terme à toutes les guerres ».  Or d’autres guerres ont suivi, donnant lieu à d’autres dévastations et à de nouveaux changements géopolitiques, a-t-il constaté.  Dans ce contexte, le multilatéralisme, en tant que principe directeur de la coopération internationale, a survécu à l’échec de la Ligue des nations établie à l’issue de la Première Guerre mondiale. 

Depuis lors, les ajustements internationaux qui ont pris la forme de l’ordre actuel, avec le Conseil de sécurité à sa tête pour ce qui est des questions ayant trait à la sécurité mondiale, maintiennent le cap.  Pourtant, a relevé le représentant, le Conseil est confronté à des crises de performance, de crédibilité, de légitimité et de pertinence.  À ses yeux, « faire porter au multilatéralisme la responsabilité de la situation déplorable du Conseil reviendrait, pour prendre une analogie sportive, à accuser le Madison Square Garden, de l’échec des Knicks de New York, année après année, et ce, pendant des décennies ». 

Si le Conseil a étendu ses attributions en élargissant la définition des conflits violents, en traitant les questions de prolifération nucléaire, en fournissant un accès humanitaire et en reconnaissant une nouvelle génération de défis liés au terrorisme, aux drones, aux armes semi-automatiques et aux changements climatiques, il est resté ancré dans les événements historiques qui lui ont donné naissance, a observé M. Akbaruddin.  Cette dépendance à l’histoire se reflète dans son aversion à se réformer et dans ses méthodes de travail, a-t-il souligné. 

À cet égard, la composition « anachronique » du Conseil ne correspond pas à la distribution des pouvoirs mondiaux et est incapable d’intégrer les réalités contemporaines, a insisté le délégué.  De surcroît, le fonctionnement de « l’univers souterrain » des organes auxiliaires se révèle « byzantin », a-t-il poursuivi, citant en exemple le fait que les 15 membres du Comité des sanctions disposent du droit de veto et n’informent pas le Conseil s’ils décident de ne pas sanctionner une entité ou un individu proposé par un État Membre, en cas de vote négatif de l’un d’eux.  Dans ces conditions, a-t-il conclu, il est temps de rénover et de réformer le multilatéralisme tel qu’il est pratiqué par le Conseil, faute de quoi nous risquons de voir un ordre mondial en morceaux plutôt qu’un monde en paix. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a fait valoir que les Nations Unies sont l’expression ultime de l’état de droit au niveau international.  À cet égard, a-t-il dit, un aspect essentiel de la Charte des Nations Unies et, par voie de conséquence, une tâche fondamentale du Conseil de sécurité est de faire exécuter les règles gouvernant l’usage de la force.  La Charte rend ce recours à la force illégal, à deux exceptions près: l’autodéfense, en vertu de l’Article 51, et l’autorisation de l’usage de la force par le Conseil.  Ces dernières années, des interprétations diverses ont été apportées à la notion d’autodéfense, sans grandes conséquences. 

Malheureusement, nous avons aussi assisté à des usages unilatéraux de la force sans autorisation préalable du Conseil et à des tentatives d’élargissement des règles consacrées par la Charte, a déploré le représentant.  Si ces discussions se sont révélées opaques et limitées à un petit nombre d’États, le processus de codification des lois et des normes sur l’usage de la force a, lui, été inclusif et transparent, s’est-il félicité.  Dans le cadre du système du Statut de Rome, il a permis de parvenir à une définition juridiquement contraignante d’un acte et d’un crime d’agression. 

Différents États, dont certains sont représentés aujourd’hui, ont contribué à cet effort et soutenu le consensus sur ces deux définitions avant la Conférence d’examen de la Cour pénale internationale (CPI) en 2010 à Kampala.  Ces définitions établissent un seuil élevé pour déterminer qu’un acte d’agression a été commis: il doit constituer une violation manifeste de la Charte, de par son caractère, sa gravité et son échelle.  Autrement dit, être en violation avec les règles gouvernant l’usage de la force, en vertu de la Charte, ne constitue pas automatiquement un acte d’agression et, donc, ne conduirait pas à une responsabilité pénale individuelle.  Le crime d’agression, conformément au Statut de Rome, est quant à lui défini comme un crime de dirigeants, ces derniers seulement, qu’ils soient militaires ou politiques, pouvant être reconnus responsables pénalement.

Après s’être entendus sur ces définitions, les États Membres ont aussi trouvé un consensus sur les conditions d’exercice de la juridiction de la CPI sur les crimes d’agression, a poursuivi M. Wenaweser, soulignant le rôle crucial joué par le Conseil, dont l’Article 59 de la Charte reconnaît la compétence pour déterminer qu’un acte d’agression a été commis.  Au terme du processus de ratification, le Conseil s’est doté, le 17 juillet, d’un nouvel outil pour mettre en application les dispositions de la Charte sur l’usage de la force: la capacité de saisir la CPI en cas de violation manifeste de ces règles. 

Se disant conscient des relations agitées entre le Conseil et la CPI, le représentant a néanmoins soutenu que le Conseil, en tant que gardien de la Charte, dispose là d’un instrument additionnel pour s’assurer de la légalité de l’usage de la force. 

M. JOÃO PEDRO VALE DE ALMEIDA de l’Union européenne a fait valoir qu’un ordre international est une protection pour tous et non une contrainte, permettant à toutes les nations, les petites et les grandes de profiter d’un monde plus durablement sûr.  Dans un monde multipolaire, le multilatéralisme n’est pas seulement la voie la plus démocratique pour traiter des affaires internationales, c’est aussi la seule façon réaliste de protéger ses intérêts nationaux.  Aucun État n’est assez puissant pour relever seul les défis de notre temps a-t-il poursuivi, aussi a-t-on besoin d’un système multilatéral fort avec les Nations Unies en son cœur.  L’alternative conduirait au chaos.  La mondialisation rend l’action isolée impossible.

Mais la sécurité, pour être durable, doit être fondée sur les droits humains, la bonne gouvernance, l’inclusion sociale et une bonne compréhension des conséquences des défis globaux comme les changements climatiques.  Quant à la paix, pour être durable, elle requiert une solution politique négociée dans un cadre multilatéral.  Les exemples dans lesquels la diplomatie multilatérale seule peut venir à bout des nouvelles menaces abondent: commerce, cyberespace, changements climatiques, objectif de développement durable (ODD), gouvernance des océans ou accord sur le nucléaire iranien, pour n’en nommer qu’une poignée. 

Aujourd’hui, a poursuivi le représentant, les menaces et les défis au système multilatéral s’accumulent mais ils ne constituent pas un désaveu, bien au contraire: ils doivent être perçus comme une raison supplémentaire de renforcer le système, car les Nations Unies sont loin d’être parfaites mais sans elles, le monde serait bien pire.  Aussi, a-t-il appelé à soutenir l’ensemble des réformes ambitieuses proposées par le Secrétaire général: c’est la seule façon de sauvegarder le multilatéralisme, a-t-il souligné. 

Pour M. KORO BESSHO (Japon), les conflits ethniques et régionaux, la pauvreté, les changements climatiques et le terrorisme ont ceci en commun qu’ils ne peuvent être résolus par un seul pays.  La mondialisation, les échanges commerciaux et l’innovation technologique qui ont permis l’avènement d’un monde prospère et interconnecté dépendent de la paix et de la stabilité, a-t-il rappelé.  Pour sa part, le Japon entend demeurer « proactif », notamment en appuyant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et la Commission de consolidation de la paix. 

M. Bessho a souligné l’importance d’un espace maritime ouvert et du respect de l’état de droit en tant que fondements de la paix et de la prospérité internationales.  À cette fin, il a réitéré son appui à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, notamment dans la région Indopacifique. 

Afin de relever les défis de notre époque, le représentant a exprimé son soutien « ferme » aux réformes des Nations Unies et du Conseil de sécurité.  Pour que les Nations Unies demeurent pertinentes à l’avenir, le Conseil doit être en mesure de « maintenir le rythme » du XXIe siècle et de refléter les réalités d’aujourd’hui, a-t-il prévenu. 

Selon M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique), le conflit entre souveraineté ou nationalisme, d’une part, et multilatéralisme, d’autre part, est « un faux dilemme ».  En tant que nations, a-t-il dit, « nous faisons valoir notre souveraineté à travers le nationalisme ».  Comme toute réalisation humaine, le multilatéralisme est perfectible.  Toutefois, a poursuivi le représentant, il faut éviter que les attaques contre le multilatéralisme et contre l’ONU en particulier ne créent la méfiance. 

En tant qu’organe principalement responsable du maintien de la paix et de la sécurité internationales, et partant du multilatéralisme, le Conseil de sécurité doit être renforcé par une réforme correspondant aux valeurs du XXIe siècle, a fait valoir M. Mendiolea.  En ce sens, il a considéré que la proposition du mouvement « Union pour le consensus » est la plus démocratique, réalisable, réaliste et complète.  Opposer son veto à l’action du Conseil face aux crimes les plus atroces va à l’encontre du multilatéralisme, a-t-il dénoncé.  Plus généralement, il s’est dit préoccupé par la prolifération dans le monde multilatéral de ladite « règle du consensus », qui, déformée, devient « comme une espèce de veto, au lieu d’être une aspiration », ce qui empêche les forums multilatéraux de fonctionner et réduit les progrès aux plus petits dénominateurs communs.

Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie) a regretté qu’après 70 ans d’efforts pour construire un système de gouvernance établissant une égalité de droits entre les pays, ce système soit en train de s’éroder; surtout face à la multiplication rapide des menaces et des défis, plus complexes et multidimensionnels.  Face aux menaces à la paix et la sécurité provenant d’acteurs non étatiques, mais aussi à la dégradation de l’environnement, à l’instabilité économique et financière, et en raison d’une interdépendance de plus en plus étroite, aucune nation ne peut seule apporter de réponse a-t-elle fait valoir.

Pour promouvoir le rôle des Nations Unies, elle a jugé prioritaire d’insister sur un système démocratique international fondé sur le droit, le respect de la Charte des Nations Unies et la bonne gouvernance, l’égalité des genres et le respect de l’état de droit en toutes circonstances et par tous.  L’ONU dispose d’outils uniques pour mener cette tâche sur le terrain, là où elle est le plus efficace et au plus près des populations.  Elle doit pour ce faire pouvoir compter sur des partenaires fiables au sein des organisations régionales. 

Enfin, la complexité des défis impose à tous de travailler plus étroitement ensemble, a-t-elle estimé en défendant l’importance de la diplomatie préventive et de la médiation pour dénouer les crises.  Mais seule une organisation bien gérée et financièrement stable pour être assez forte et efficace pour mener à bien le mandat qui lui est confiée.

S’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, M. SAMUEL MONCADA (Venezuela) a réaffirmé son engagement en faveur du multilatéralisme, de la Charte des Nations Unies et du droit international en tant qu’instruments indispensables au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il s’est inquiété de la tendance croissante de certains États à imposer des mesures unilatérales à des fins politiques nationales, soulignant l’importance du rôle des organisations multilatérales telles que les Nations Unies dans la résolution des problèmes qui affectent l’humanité, notamment par le dialogue et la coopération. 

Le représentant s’est dit préoccupé du sort des victimes civiles découlant du recours à la force ou de l’imposition de sanctions par le Conseil de sécurité.  Il a appelé les États Membres à promouvoir le règlement pacifique des différends afin d’assurer la sécurité collective de l’ensemble de la communauté internationale, notamment par le recours à la Cour internationale de Justice (CIJ). 

Mme MARIA ANGELA ZAPPIA (Italie) a noté que le creusement des inégalités économiques et sociales a sapé la confiance du public en des règles communes et des principes partagés.  Selon elle, le multilatéralisme est vu comme incapable de trouver des solutions aux problèmes mondiaux et loin des préoccupations quotidiennes.  Par conséquent, les institutions multilatérales sont souvent perçues comme distantes, inefficaces et donc sans pertinence, malgré les résultats positifs qu’elles ont obtenus. 

Pour l’Italie, il est nécessaire de réformer le système multilatéral pour en améliorer l’efficacité et la pertinence pour les peuples du monde entier.  Convaincue de l’importance d’un ordre international fondé sur des règles avec l’ONU en son centre, elle a estimé qu’une organisation réformée doit continuer à opérer dans une logique de responsabilité partagée entre ses États Membres et les organisations régionales.  L’essence du multilatéralisme repose sur la capacité à atteindre le consensus le plus large possible par le biais d’un véritable dialogue inclusif et ouvert, a précisé Mme Zappia. 

Quant à la réforme du Conseil de sécurité, elle implique qu’il soit vraiment représentatif, redevable, démocratique, transparent et effectif.  Il est grand temps de donner une chance concrète à tous les États Membres de s’asseoir à la table du Conseil, a conclu Mme Zappia, en particulier aux régions qui sont sous-représentées.

Aujourd’hui, a regretté M. JORGE SKINNER-KLEÉ ARENALES (Guatemala), les relations internationales sont marquées par des atteintes à la paix, caractérisées par la méfiance, l’action unilatérale et « une réalité relative ou alternative qui se construit sur la base d’un révisionnisme postfactuel ».  Le Conseil de sécurité, a-t-il estimé, ne doit pas renoncer à sa responsabilité principale et devenir un spectateur passif quand des populations entières sont en danger.  Au contraire, a recommandé le représentant, il nous faut promouvoir la confiance mutuelle, à partir d’un ordre international fondé sur des règles ayant pour objectif le bien commun et le développement durable. 

Notre destin commun et la survie de l’espèce humaine, a insisté M. Skinner-Kleé, demandent le respect des droits de l’homme, le respect réciproque entre les nations, le progrès économique et la coopération internationale.  Il a défendu la valeur pratique du multilatéralisme, notamment le maintien de la paix et la prévention des conflits tels que pratiqués par l’ONU, qui a une incidence claire sur la vie de tous. 

Pour M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran), le multilatéralisme doit se fonder sur l’inclusion plutôt que l’exclusion, sur la coopération plutôt que la confrontation, et sur l’égalité de toutes les nations, au lieu de l’inégalité.  Les problèmes transnationaux ne connaissent pas de frontières, et aucun pays, aussi puissant soit-il, ne peut les résoudre seul, a fait valoir le représentant, donnant pour exemple les changements climatiques.  Selon lui, le respect du droit international et le bon fonctionnement des institutions internationales sont essentiels au maintien d’un ordre international basé sur des règles. 

Le représentant a réaffirmé son appui à la proposition du Mouvement des pays non alignés de désigner une « journée internationale du multilatéralisme et de la diplomatie de la paix », afin de discuter des défis au multilatéralisme et du retrait « d’un membre du Conseil » des institutions internationales, notamment du Conseil des droits de l’homme, de l’Accord de Paris et du Plan d’action global commun sur le programme nucléaire iranien. 

Le Plan d’action, a rappelé le représentant, est le fruit de négociations visant à résoudre une « crise manufacturée » et a fait l’objet d’une résolution unanime du Conseil de sécurité.  Le retrait des États-Unis de ce traité constitue donc une violation du droit international, a martelé le représentant, ajoutant que les États-Unis s’affairent maintenant à punir les nations qui respectent les décisions du Conseil.  Le monde ne doit pas permettre aux États-Unis de mettre à place un ordre international fondé sur la puissance plutôt que sur le droit, a-t-il conclu. 

Mme TEGAN BRINK (Australie) a insisté sur le fait que le monde est plus sûr et prospère lorsque les différences et les défis sont gérés sur la base d’une juridiction commune plutôt que par le seul exercice de la force.  Voyant peu de sujets aussi importants aujourd’hui que la continuité de l’ordre international fondé sur des règles, l’Australie a jugé qu’il en allait de l’intérêt de tous les États.  Selon la déléguée, ce n’est que lorsque les pays reconnaissent des normes internationales, acceptent les règles d’un marché ouvert, respectent les droits à la liberté de navigation et de survol, mais aussi quand les différends sont résolus pacifiquement, que la prospérité et la sécurité sont possibles. 

« En tant que nation insulaire située à la confluence des océans Indien et Pacifique, nous accordons une importance particulière à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS), a précisé la déléguée qui a cité le traité des frontières maritimes établi entre l’Australie et le Timor-Leste, en 2018, comme exemple de renforcement de la stabilité.  Cet ordre international fondé sur des règles est aussi celui qui encadre l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et tous les efforts en faveur des droits de l’homme, a-t-elle ajouté.  Exhortant la communauté internationale à protéger et renforcer ce système, elle a conclu en rappelant que le renfort des organisations multilatérales est l’affaire de tous.

« Aujourd’hui, le multilatéralisme est assailli de toutes parts », a déclaré Mme MALEEHA LODHI (Pakistan).  « Propulsé par les forces de l’anti-libéralisme et du protectionnisme, le chauvinisme est en train de l’emporter sur la raison, l’intolérance l’emporte sur l’acceptation et le sectarisme sur l’humanité. » Elle a regretté que certains voient la recherche du consensus comme un signe de faiblesse et non de force, avant de fustiger l’érosion de normes juridiques bien établies.  Les résolutions de l’ONU sont foulées aux pieds, a-t-elle déploré en relevant que « le jusqu’au-boutisme politique et les jeux de pouvoir menacent de transformer des intérêts stratégiques en ambitions rivales, accentuant ainsi les multiples lignes de fracture internationales existantes ».

Face à ces défis, Mme Lodhi a jugé impérieuse la coopération internationale, et s’est félicitée que le multilatéralisme ait été consacré avec éclat lors du débat général de l’Assemblée générale.  Elle a défendu un ordre reposant sur des règles, avec l’ONU en son centre, et rappelé l’importance de la Charte, en particulier le Chapitre VI.  Enfin, la déléguée a indiqué qu’il n’y a pas de meilleur instrument que l’ONU pour faire avancer la civilisation moderne et l’amener « à un niveau plus haut encore ». 

M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) a assuré qu’un engagement collectif renouvelé en faveur du multilatéralisme et du droit international est plus nécessaire que jamais.  Aucun État ne peut ni ne doit se soustraire à ses obligations en vertu de la Charte des Nations Unies et face au reste de la communauté internationale et, a lancé le représentant, les solutions partielles ou unilatérales n’ont pas leur place. 

Il a par ailleurs insisté sur la lutte contre l’impunité, rappelant que la communauté internationale dispose en la Cour pénale internationale d’une institution essentielle et lançant un appel à son universalité et au respect de son indépendance.  Pour lui, renforcer le multilatéralisme passe par une réforme du Conseil de sécurité, pour qu’il soit plus démocratique, plus représentatif et plus transparent.

M. SABRI BOUKADOUM (Algérie) a déclaré qu’il n’existe pas de meilleur exemple de succès du multilatéralisme que les Nations Unies.  Toutefois, il semble évident que l’ONU doit adapter ses structures afin de les rendre « plus efficaces, plus pertinentes et plus respectées ».  Selon lui, la réforme de l’ONU doit être au cœur du renforcement du multilatéralisme, y compris la réforme du Conseil de sécurité. 

Il a appelé au renforcement de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine, notamment afin de résoudre les conflits régionaux.  Les questions des migrations, du climat et du terrorisme constituent des défis globaux pour lesquels des solutions multilatérales sont nécessaires, a-t-il conclu. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a estimé que les aspirations de la Charte des Nations Unies sont plus importantes que jamais au vu des menaces contre le multilatéralisme qui ne font qu’augmenter.  Il a rappelé que son pays avait bénéficié du soutien de l’ONU pour isoler le régime raciste qui l’opprimait et pour y mettre un terme, ce dont il reste reconnaissant.  Le représentant a fait observer que pour de nombreux peuples dans des situations vulnérables ou de conflit, l’Organisation est peut-être la seule chance qui s’offre à eux.

M. Matjila a rappelé que le Sommet de la paix Nelson Mandela, qui a eu lieu il y a deux mois, a été l’occasion de lancer un appel fort à la sauvegarde du multilatéralisme face aux nouvelles menaces, qui peuvent toucher n’importe quel pays, même stable et prospère, et requièrent une réponse collective.  Quant au mandat du Conseil de sécurité, il a estimé qu’il ne devrait pas être mis à mal par des intérêts étroits.  Le Conseil, à son avis, devrait travailler en étroite collaboration avec les organisations régionales, en vertu du Chapitre VIII de la Charte.  Il devrait aussi être réformé pour refléter les réalités géographiques et être tout à fait représentatif, notamment pour les 1,2 milliard d’Africains, a-t-il ajouté.

Face à un contexte régional « complexe et difficile », M. MOHAMED KHALED KHIARI (Tunisie) a estimé que nous sommes à la croisée des « destinées ».  « Plus que jamais, le multilatéralisme incarné par les Nations Unies est de rigueur », a dit le représentant, pour qui l’ONU doit maintenant être entendue « plus que les pays ». 

Il a soutenu « fermement » à cet effet la réforme de l’Organisation proposée par le Secrétaire général.  Selon lui, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et les objectifs de développement durable représentent le « catalyseur principal d’une paix pérenne », indissociable du multilatéralisme. 

M. Khiari s’est félicité de la tenue du dialogue annuel entre l’ONU et l’Union africaine instauré en 2017, et de la mise en place d’une équipe conjointe chargée des questions de paix et de sécurité.  Estimant que la démarcation entre la paix et la sécurité régionales et internationales n’est plus de mise, il a noté que la paix au Moyen-Orient est un facteur déterminant d’une paix globale. 

M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse) a jugé essentiel de ne pas tourner le dos aux institutions multilatérales, qu’il s’agisse du Conseil des droits de l’homme, de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou de la Cour pénale internationale (CPI).  Œuvrer en faveur d’institutions fortes, c’est aussi faire en sorte que l’ONU soit forte et pleinement opérationnelle, capable de répondre aux crises actuelles, a assuré la délégation. 

Elle s’est dite convaincue que les réformes du Secrétaire général aideront l’ONU à travailler de manière plus intégrée à travers ses trois piliers: paix et sécurité, développement et droits de l’homme.  Quant au Conseil de sécurité, la Suisse est déterminée à continuer à le soutenir dans l’utilisation aussi efficace que possible des outils offerts par le Chapitre VI de la Charte des Nations Unies.

Dénonçant la multiplication des conflits, du terrorisme, de la traite des personnes et des violations des droits de l’homme dans le monde, M. CHO TAE-YUL (République de Corée) s’est inquiété de la remise en question croissante du multilatéralisme et des Nations Unies.  « Ce dont nous avons besoin n’est pas d’une ONU parfaite, mais bien d’une ONU plus pertinente », a-t-il argué, tout en réaffirmant son appui aux réformes entreprises par le Secrétaire général. 

Selon lui, l’ONU est la seule organisation dotée de la légitimité et de la capacité nécessaire pour mobiliser les ressources et les connaissances de la communauté internationale afin de relever ces défis.  Nous devons identifier et promouvoir les succès du multilatéralisme tels que l’Accord de Paris ou le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a déclaré le représentant.  Il a souligné le rôle essentiel joué par le Conseil de sécurité dans les efforts de paix dans la péninsule coréenne. 

La République de Corée n’aurait jamais vu le jour sans les Nations Unies, a noté le représentant, en réitérant l’engagement de son pays à rétablir la confiance dans les principes du multilatéralisme. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a apporté son soutien aux efforts du Secrétaire général pour rendre l’ONU plus réactive, efficace et moderne, afin d’être mieux capable de faire face aux défis d’aujourd’hui, qui sont devenus plus complexes, transnationaux et multidimensionnels. 

Le représentant a également plaidé pour une augmentation de la transparence et de la redevabilité du système des Nations Unies ainsi que pour un renforcement de la légitimité et de la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité. 

Toutefois, pour que le Conseil remplisse son objectif de maintenir la paix et la sécurité internationales, ses pratiques doivent être mises à jour afin qu’elles ne soient plus paralysées par l’utilisation du veto, notamment dans le cas de crimes atroces. 

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a relevé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales est de plus en plus menacé par de nouveaux défis, tels que le crime organisé, la cybercriminalité et le terrorisme, qui exigent des réponses efficaces fondées sur le dialogue, le consensus, la coopération et le multilatéralisme, ce qu’aucun État n’est en mesure d’assumer seul.  Le représentant a voulu souligner la puissance de l’Assemblée générale, « organe le plus démocratique et le plus représentatif » de l’ONU, pour faire des recommandations pour le maintien de la paix et de la sécurité, et l’importance du mandat du Secrétaire général pour s’interposer comme médiateur ou exercer ses bons offices.

Par ailleurs, M. García Moritán a estimé que la Cour pénale internationale était l’une des plus grandes réalisations du multilatéralisme.  Elle constitue un élément essentiel de l’état de droit sur le plan international, a-t-il ajouté.  Pour l’Argentine, la mise en œuvre de la responsabilité partagée de renforcer le multilatéralisme doit inclure la réforme du Conseil de sécurité, afin qu’il soit plus démocratique, représentatif, transparent et effectif, a conclu le représentant.

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a considéré approprié et opportun de discuter du multilatéralisme au Conseil de sécurité, à qui il incombe d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Les membres permanents du Conseil ont le devoir de renforcer le multilatéralisme et non de l’affaiblir, a-t-il argué, tout en reconnaissant que le multilatéralisme est confronté à une « crise de confiance ».  Le manque de confiance et la polarisation auxquels nous assistons au sein du Conseil de sécurité interviennent au moment où nous devons travailler ensemble afin de résoudre des problèmes transnationaux.  Le manque de confiance entre ses membres les plus importants affecte également le système d’échanges commerciaux basé sur des règles, tels que l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a relevé M. Gafoor. 

L’ASEAN, a poursuivi le représentant, est « vivement préoccupée » par le spectre d’une guerre commerciale prolongée qui pourrait causer des dommages importants aux perspectives économiques.  Pour lui, l’ASEAN et les autres organisations régionales viennent compléter et renforcer le travail de l’ONU en matière de paix, de sécurité et de développement durable.  Les membres de l’ASEAN appuient « fermement » les réformes entreprises par le Secrétaire général afin d’adapter l’ONU aux réalités d’aujourd’hui.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, représentante de la Commission de l’Union africaine, a souligné le niveau de graves menaces sans précédent à l’ordre multilatéral, alimentées par la montée du nationalisme, l’émergence d’initiatives unilatérales et les tranchées qui se creusent dans les relations internationales.  Cette tendance s’accompagne d’engagements toujours moins tenus des États envers les Nations Unies et leurs différentes agences en particulier les engagements financiers, significatifs du désordre actuel dans le multilatéralisme.

Elle a assuré que l’Union africaine, qui reste profondément attachée au multilatéralisme et au respect du droit international, n’épargnera pas ses efforts pour surmonter cette crise et préserver le système.  Elle a appelé à renforcer le rôle moteur de l’ONU dans la coordination des ripostes internationales aux défis les plus pressants; à accélérer les réformes de l’Organisation en particulier celle, attendue depuis longtemps, du Conseil de sécurité et salué les réformes engagées par le Secrétaire général. 

Pour sa part, a-t-elle rappelé, l’UA vient de renforcer son partenariat avec l’ONU par la conclusion de deux accords en matière de paix et de sécurité d’une part, de développement durable, de l’autre.

Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) a relevé que l’ordre international et l’ONU subissent de nombreuses pressions et doivent être adaptés.  Elle s’est d’ailleurs félicitée que certains éléments du programme ambitieux de réforme du Secrétaire général aient déjà commencé à être mis en œuvre.  Les États Membres doivent, eux aussi, être prêts à s’adapter à cette évolution, et une coopération plus étroite est nécessaire. 

Pour la Hongrie, le multilatéralisme doit consister à parvenir à l’inclusion et la contribution des femmes doit être reconnue.  La représentante a fait savoir que la Hongrie défend le Conseil des droits de l’homme, mais a estimé qu’il est de moins en moins capable de s’acquitter de ses missions en raison d’une surpolitisation et de sélectivité.  Dans le monde interdépendant d’aujourd’hui, il n’existe aucune alternative aux solutions multilatérales, a-t-elle conclu.

Partisan d’un système multilatéral renforcé et saluant les efforts de réforme du Secrétaire général et sa détermination à contribuer à la prévention des conflits, M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a estimé que les États doivent se conformer à leurs obligations internationales, notamment celles liées à la souveraineté et à l’intégrité territoriale des États, ainsi qu’à l’inviolabilité de leurs frontières internationalement reconnues.  L’objectif visant à garantir un monde pacifique, juste et prospère ne pourra, selon lui, être atteint si les principes fondamentaux universellement acceptés sont négligés afin de blanchir les agressions et les actions illégales.  À cet égard, a-t-il poursuivi, il convient d’appliquer sans conditions le principe de l’inadmissibilité de l’usage de la force pour l’acquisition d’un territoire et l’obligation de non-reconnaissance de situations résultant de graves violations du droit international.  Dans ce cadre, le non-respect apparent de résolutions du Conseil contenant des demandes contraignantes ne peut être accepté, au risque de décharger le Conseil de sa responsabilité première qui est de maintenir la paix et la sécurité internationales. 

Ces dernières années, a relevé le représentant, d’importants progrès ont permis de renforcer la coopération entre les Nations Unies et les partenaires régionaux, en vertu du Chapitre VIII de la Charte de l’ONU, dans un grand nombre de domaines, du maintien de la paix et de l’assistance humanitaire au développement et à la protection des droits de l’homme.  Pourtant, des défis importants subsistent.  Toutes les organisations régionales ne sont pas en mesure de faire respecter aux États Membres leurs obligations statutaires.  Certains arrangements régionaux sont parfois détournés par des transgresseurs du droit international aux fins de consolider des gains militaires et de saper les efforts destinés à permettre le règlement de conflits, a-t-il déploré.  M. Aliyev a conclu son propos en estimant que des réponses mondiales cohérentes et des efforts communs, sous l’égide des Nations Unies, sont les moyens les plus efficaces pour traiter les défis contemporains. 

M. MARC-ANDRÉ BLANCHARD (Canada) a déclaré que « le défi à venir du multilatéralisme sera de déterminer si nous choisissons de nous montrer à la hauteur de nos obligations », si chacun accepte de faire sa juste part.  « Nous devons écouter les voix de ceux qui ont été laissés-pour-compte », a-t-il prescrit.  Il a déploré que le multilatéralisme soit trop souvent associé à une bureaucratie inefficace, déconnectée de la réalité des personnes qu’il vise à aider.  « Nous ne devons pas balayer ces critiques sous le tapis et nous devons nous attaquer au déficit de confiance, tant au sein de l’ONU que dans le contexte multilatéral plus large. » Le délégué a en outre souhaité une réforme de l’ONU et de « nos propres institutions » afin de les rendre plus transparentes, inclusives, efficaces et responsables.  Le multilatéralisme ne consiste pas à faire du cabotinage et à prêcher, mais à s’écouter les uns les autres, a-t-il conclu. 

Mme KATRIN BRAUN (Allemagne) a dénoncé le « picorage » de certains pays qui choisissent de respecter de façon sélective l’ordre international fondé sur des règles et les principes du multilatéralisme.  « Nous bénéficions tous de ce système », a poursuivi la représentante, pour qui cet ordre international est source de prévisibilité et d’acceptation.  Reconnaissant que son pays s’est rendu coupable, au cours du XXe siècle, de certains des crimes les plus atroces au regard du droit international, elle a plaidé en faveur du respect des décisions de la Cour pénale internationale (CPI).  Nous devons prendre nos responsabilités au sérieux, a-t-elle lancé, évoquant les victimes innocentes de conflits, et appelant à placer les individus au cœur de nos préoccupations. 

Mme Braun a appelé à une réforme des organes et des méthodes de travail des Nations Unies, comme l’a proposée le Secrétaire général.  Elle a également plaidé en faveur d’une réforme du Conseil de sécurité, afin d’en préserver la légitimité.  Alors que l’Allemagne s’apprête à devenir membre du Conseil de sécurité, à compter de janvier 2019, la représentante a fait part de son intention de mettre l’accent sur la prévention des conflits. 

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé que le multilatéralisme ne peut pas se fonder sur une fausse impression de sécurité, telle que la menace de destruction mutuelle ou d’équilibre des pouvoirs.  À ses yeux, un multilatéralisme sain et universel est nécessairement bâti sur la justice, le développement, le respect des droits de l’homme, le respect de l’environnement ou encore la confiance entre les peuples et l’accès à l’éducation.  À cet égard, il a jugé que la récente discussion de haut niveau entre les Présidents de l’Assemblée générale, du Conseil économique et social (ECOSOC) et du Conseil de sécurité, était un pas important en direction d’un engagement renouvelé envers le multilatéralisme et les Nations Unies.

L’Observateur permanent du Saint-Siège a identifié deux perspectives opposées.  La première est basée sur la conviction que la volonté de dialoguer sur la base du droit constitue le meilleur moyen de régler les conflits.  La seconde maintient que la force est le meilleur rempart contre les menaces à la paix et à la sécurité. 

Cette dernière, a-t-il ajouté, compromet évidemment la coopération et se répercute négativement sur le multilatéralisme.  L’interdépendance entre les nations et le risque de destruction réciproque doivent nous pousser à mettre l’accent sur le multilatéralisme, a-t-il jugé, et non à privilégier le rapport de force.  « Du débat ouvert que nous venons d’avoir, doit ressortir un soutien clair de la force de la loi plutôt que du droit de la force », a-t-il résumé.

En appelant à la responsabilité de chacun, l’Observateur a condamné l’isolationnisme et le protectionnisme.  À contrario, il a vanté la noble vocation des Nations Unies en tant qu’institution multilatérale destinée à défendre les droits de l’homme et le développement.  Il a plaidé pour qu’on réaffirme la conviction commune que l’humanité est connectée et que prendre soin de sa propre vie devrait se traduire par davantage de fraternité et de justice entre les nations.  Il appartient à cette « famille de nations », comme l’Observateur l’a appelée, de poursuivre un idéal du bien commun. 

Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a réitéré son ferme engagement envers les buts et principes de la Charte des Nations Unies, ainsi qu’envers les principes du droit international consacrés par la Charte, à savoir l’égalité souveraine entre les États, le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique des États, la non-intervention dans les affaires intérieures des États, le non-recours à la menace et à l’usage de la force et le règlement pacifique des différends.  Les tentatives d’appliquer des lois extraterritoriales, comme le blocus économique, commercial et financier imposé par les États-Unis à Cuba depuis près de 60 ans ou d’autres manipulations par le Gouvernement de ce pays, ainsi que ses pressions et chantages financiers contre l’ONU, sont des atteintes au multilatéralisme. 

Mme Rodríguez Camejo a condamné fermement les déclarations de la représentante des États-Unis à l’encontre de Cuba au cours de ce débat, estimant que le Gouvernement des États-Unis n’a pas la moindre autorité morale pour critiquer Cuba ni personne en matière de droits de l’homme.  Elle l’a accusé, entre autres, d’être responsable de crimes contre l’humanité, d’avoir utilisé l’arme nucléaire contre des civils et d’avoir installé des dictatures en Amérique latine, ce qui ne fait pas honneur au multilatéralisme.  Elle s’est prononcée pour une réforme de l’ONU et notamment du Conseil de sécurité, pour qu’il soit transparent et démocratisé.

M. ROBERT KAYINAMURA (Rwanda) a déclaré que la gouvernance mondiale est marquée par une interdépendance politique et sécuritaire reposant sur la coopération multilatérale.  Les fondateurs de l’ONU ont estimé avec justesse que le multilatéralisme était le seul moyen de sauver l’humanité de la destruction, a-t-il noté.  Alors que l’histoire est en constante évolution, nous devons nous adapter aux défis émergeants; pour ce faire, nous devons prendre appui sur nos aspirations communes, a suggéré le représentant, en appelant au renforcement de la coopération régionale, notamment entre l’ONU et l’Union africaine. 

M. Kayinamura a plaidé pour que soit menée à bien la réforme de l’ONU lancée par le Secrétaire général.  Selon lui, le Conseil de sécurité doit être plus représentatif et doit aussi étendre le droit de veto à de nouveaux États Membres.  L’ONU doit également intensifier son appui à la médiation et aux efforts de paix menés sur le plan régional, comme l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) au Soudan du Sud. 

M. JASSIM SAYAR A. J. AL-MAAWDA (Qatar) a estimé que la diplomatie multilatérale devait permettre de relever les défis et de renforcer les relations internationales.  Reconnaissant que l’ordre international soit dans une phase particulièrement délicate, avec des défis que les pères fondateurs des Nations Unies n’auraient jamais pu imaginer, il a conseillé d’aller de l’avant et de déployer les efforts nécessaires pour y faire face.  Il a ajouté qu’aucun État ne peut travailler seul à la réalisation de ces objectifs et que les intérêts des États Membres sont interdépendants, raison pour laquelle il faut travailler ensemble, conformément aux résolutions et accords contraignants internationaux.  Le Qatar croit fermement dans le principe de coopération internationale et dans le partage des responsabilités, a-t-il conclu. 

Selon M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie), les trois piliers adoptés il y a 73 ans par les Nations Unies, ont mené à la mise en place d’institutions qui ont permis d’établir des règles destinées à faire face aux défis mondiaux.  L’unilatéralisme, c’est l’abandon des responsabilités des États, a estimé le représentant, tout en reconnaissant que le système de l’ONU doit être plus réceptif.  À cette fin, il a appelé à la réforme de l’Organisation afin de la rendre plus efficace.  De même, le Conseil de sécurité doit être plus démocratique, transparent et redevable, afin d’être en mesure de répondre aux défis d’un monde de plus en plus complexe. 

« Pour assurer la consolidation de la paix, nous devons nous attaquer aux causes profondes des confits », a continué le représentant, qui a aussi invité à promouvoir le respect des droits de l’homme et de l’état de droit.  Il a appelé à la mobilisation des ressources et à l’implication de toutes les composantes de la communauté internationale, citant en exemple les négociations ayant mené à l’adoption du pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.

M. MAURO VIEIRA (Brésil) a reconnu que l’architecture institutionnelle mondiale n’est pas bien équipée pour répondre aux défis actuels et a regretté que des régions entières et des pays soient toujours privés de représentation permanente au Conseil de sécurité.  Ainsi, si la grande majorité des situations examinées par le Conseil concerne des pays africains, le continent n’a pas de représentation permanente.  Le représentant a plaidé pour une hausse du nombre de membres permanents et non permanents. 

Le Brésil est convaincu que le Conseil est l’organe adéquat pour traiter des menaces à la paix, mais que « l’heure est venue de mener une réforme en profondeur » afin de renforcer sa légitimité et d’éviter qu’il n’empiète sur le mandat d’autres organes de l’ONU, a insisté le délégué.  La sélectivité mine également le multilatéralisme car il sape la confiance, comme le montre le désarmement nucléaire, qui fait l’objet d’un traité mais que l’opposition de certains pays remet en cause. 

Le débat d’aujourd’hui illustre le fait que la communauté internationale est parvenue à un seuil où la coopération multilatérale devient davantage une aspiration qu’une réalité, a relevé Mme AUDRA PLEPYTĖ (Lituanie).  « Se lamenter sur l’état du multilatéralisme est une hypocrisie », a-t-elle estimé: les conséquences d’une Charte ayant failli sont connues de tous –les longs conflits en Syrie, au Yémen, en Ukraine et ailleurs, et les pires crises humanitaires depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale nous le rappellent, a-t-elle déclaré, avant de citer comme préalables indispensables pour changer l’état actuel du multilatéralisme les valeurs de responsabilité, la volonté politique, la volonté de réforme et le compromis.

La représentant a soutenu sans réserve le programme de réforme du Secrétaire général, dans toutes ses dimensions.  Blâmant l’inaction du Conseil de sécurité et de la communauté internationale, qui, directement ou indirectement, « encourage l’agression, l’usage de la force et menace tout le système », la représentante a appelé à restreindre le droit de veto des membres permanents, notamment en cas d’atrocités de masse, de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, dans la ligne de l’initiative franco-mexicaine, que la Lituanie soutient.  « On ne peut opposer un veto à la justice », a-t-elle conclu.

M. NUNO VAULTIER MATHIAS (Portugal) a rappelé que le Portugal était fermement engagé dans le système multilatéral basé sur le droit international et les principes et les valeurs de la Charte.  Déplorant que plusieurs organes internationaux fassent face à des coupes budgétaires profondes, il a remarqué que « le manque de financement et de soutien politique entrave la mise en œuvre des réformes nécessaires pour améliorer leur efficacité au service de tous ».  Recommandant que soit renforcée la prévention des conflits, en développant des systèmes d’alerte précoce pour une réponse immédiate de la communauté internationale, il a soutenu les réformes actuelles visant à améliorer les piliers paix et sécurité de l’ONU. 

Conscient de l’interdépendance entre sécurité et développement, le Portugal est convaincu qu’une paix durable ne sera acquise que si les causes sous-jacentes des conflits sont traitées, les plus évidentes étant le sous-développement et le déséquilibre de la distribution des richesses.  M. Mathias a enfin jugé important d’intégrer la perspective de la parité des sexes et de la contribution des jeunes dans la prévention et la résolution des conflits. 

M. MOHAMED FATHI AHMED EDREES (Égypte) a déclaré que ce débat reflète la prise de conscience commune devant la nécessité de relever, à l’aide de mécanismes de sécurité collective, les défis auxquels est confronté le multilatéralisme.  Il a critiqué le Conseil de sécurité pour son « approche sélective » de certaines questions et pour sa politique de deux poids, deux mesures dans la mise en œuvre de ses résolutions, qui a conduit par exemple à une détérioration de la situation au Moyen-Orient. 

Le représentant a évoqué les « irrégularités structurelles » au sein de ce Conseil, en citant comme contre-exemple l’unité qu’y démontre le Groupe des États d’Afrique.  Puis il a dénoncé le « multilatéralisme de façade » ou « semi-multilatéralisme » en vogue au sein de l’Organisation, en affirmant que celle-ci ne pouvait pas se contenter de délibérations ou de déclarations.  Le délégué a en outre mis en garde contre les dangers posés par le système de contributions volontaires, avant d’annoncer que l’Égypte, lors de sa présidence l’an prochain de l’Union africaine, mettra l’accent sur le réengagement en faveur de la relation tripartite entre cette organisation régionale, les pays fournisseurs de contingents et l’ONU en ce qui concerne les opérations de paix sous la conduite africaine. 

M. ROBERT MARDINI, représentant du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a rappelé que, de par son travail humanitaire dans les conflits armés à travers le monde, son organisation mesure l’importance de la coopération entre les États dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Rappelant à cet égard que les Conventions de Genève célébreront leur soixante-dixième anniversaire l’an prochain, il a déclaré voir dans ces traités la preuve que le multilatéralisme peut fonctionner mais aussi le fait qu’ils sont essentiels à son fonctionnement. 

Pour le représentant, le droit international humanitaire (DIH) apporte des solutions pour le renforcement du multilatéralisme.  C’est ainsi, a-t-il fait valoir, qu’un soutien accru des États à la mise en œuvre et au respect du DIH peut contribuer à prévenir et réduire les souffrances humaines dans les conflits armés.  De surcroît, le DIH permet de réguler et de limiter les méthodes et moyens de la guerre, moyennant le respect de règles que les États ont élaborées et qu’ils se sont engagés à appliquer. 

Enfin, a poursuivi M. Mardini, le DIH est centré sur les personnes.  De fait, une coopération multilatérale respectant les principes d’humanité, d’impartialité, de neutralité et d’indépendance est nécessaire pour mener une action humanitaire efficace et faire en sorte que les civils reçoivent le soutien auquel ils ont droit en vertu des Conventions de Genève.  Dans ce cadre, a-t-il conclu, le CICR appelle le Conseil de sécurité à renouveler son engagement en faveur des personnes, du DIH et du multilatéralisme. 

Pour Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande), les défis qui guettent le monde sont tellement immenses qu’il est impossible pour quiconque d’envisager une approche unilatérale sur le long terme.  L’Histoire a montré que ceux qui ont opté pour cette démarche ont vite repris le chemin du multilatéralisme pour partager à la fois le fardeau et les solutions.  Mais pour elle, le débat se situe à un autre niveau, car il ne s’agit pas uniquement de s’interroger sur l’efficacité du multilatéralisme, mais bien de « sauver le système multilatéral ».  De fait, a-t-elle expliqué, il faut pouvoir séparer les questions de sécurité traditionnelle des questions non traditionnelles, invitant, à cet égard, à reconnaître collectivement la pertinence de facteurs tels que les changements climatiques et la migration. 

C’est pourquoi Mme Byrne Nason a appelé à la mise en œuvre des accords multilatéraux tels que l’accord de Paris sur les changements climatiques ou encore les objectifs de développement durables.  Faire en sorte que les questions relatives à la femme et aux jeunes occupent une place centrale dans l’agenda multilatéral et engager l’ONU dans les partenariats, à travers la coopération avec les partenaires locaux, régionaux et internationaux: voilà pour elle quelques pistes de réflexion.  Un autre facteur qui revêt une grande importance à ses yeux est la nécessité d’une réforme politique de l’ONU, en particulier dans la composition du Conseil de sécurité pour qu’il reflète ce « sentiment d’implication » de la part des États Membres.  Pour finir, elle a exhorté à lutter contre cette idée galvaudée que « l’engagement collectif fragilise notre souveraineté ». 

« Je suis triste de constater que le multilatéralisme est plus que jamais sous pression », a regretté M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie), tout en notant la complexité grandissante des défis mondiaux: du terrorisme aux changements climatiques, en passant par les pandémies, les conflits dans des zones reculées, les armes de destruction massive et l’extrême pauvreté.  A ses yeux, le « manque de performance » de la communauté internationale sur ces différentes questions nourrit un « déficit de confiance » envers l’ONU, comme en témoigne selon lui le recours de plus en plus fréquent à l’unilatéralisme et l’isolationnisme.

Le représentant a appelé les États Membres à renouveler leur engagement en faveur du multilatéralisme et à renforcer leur appui à l’ONU.  C’est d’autant plus important que nous avons entamé un processus de réformes de l’Organisation « ouvert et transparent », a-t-il ajouté.  À leur tour, ces réformes doivent faire en sorte que l’ONU appuie davantage la mise en œuvre du développement durable et d’une paix durable.  « Ce n’est que comme ça que nous pourrons restaurer la foi de la communauté internationale dans les Nations Unies », a-t-il affirmé. 

M. TORE HATTREM (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a déclaré qu’alors que le multilatéralisme est sous pression, des efforts supplémentaires doivent être déployés pour prévenir et limiter les conflits et pour bâtir des infrastructures économiques et sociales pour toutes les sociétés, en particulier pour les plus vulnérables.  Ces efforts doivent de façon cruciale, intégrer une perspective de genre, a dit le représentant.

Dans la même optique, les pays nordiques encouragent le Conseil de sécurité à promouvoir et soutenir les efforts de médiation, comme il l’a fait dans le cas de la Colombie.  Ces pays reconnaissent aussi le rôle des organisations régionales dans ces processus de médiation.  C’est pour cela qu’ils appuient la relation entre l’Union européenne et l’Union africaine, mais aussi celle entre le Conseil de sécurité et la Commission de paix et de sécurité de l’Union africaine.

Les pays nordiques sont, en outre, d’avis que l’Organisation mondiale du commerce (OMC) est un outil essentiel du multilatéralisme.  Ils estiment donc qu’il faut le défendre et le réformer, car ils pensent que les accords commerciaux ont contribué à la croissance économique, à la réduction de la pauvreté et à la baisse de la mortalité infantile, a conclu le représentant. 

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a déclaré que, lorsque l’on parle de bouleversement de l’ordre fondé sur des règles, la région dont il vient « ne fait pas exception ».  Il a dénoncé le rôle destructeur joué par un membre permanent du Conseil de sécurité, en accusant la Fédération de Russie d’une « agression militaire à grande échelle » il y a tout juste 10 ans, laquelle s’est traduite par l’« occupation illégale de 20% » du territoire géorgien.  « Il y a quelques années, l’Ukraine a également été victime du même agresseur », qui a, selon le représentant, porté atteinte à la sécurité européenne et à l’ordre international.  Alors que nous sommes fermement engagés à poursuivre la politique de résolution des conflits à l’œuvre pour mettre fin à l’occupation de « deux régions de la Géorgie », a assuré le représentant, le « régime d’occupation russe » à Tskhinvali continue de renforcer la ligne adjacente au village d’Atotsi dans la municipalité de Karesi. 

Au vu des « enlèvements, actes de torture et assassinats » perpétrés, il a exigé la création immédiate de « mécanismes de sécurité internationale » sur le terrain, et le déploiement d’observateurs des droits de l’homme en Abkhazie et à Tskhinvali.  M. Imnadze s’est enfin élevé contre l’exercice du droit de veto par la Fédération de Russie, en août 2008, pour mettre fin à la Mission d’observation des Nations Unies en Géorgie (MONUG), une décision en violation de l’Article 27 de la Charte des Nations Unies, selon lui.  En effet, a-t-il argué, lorsqu’un membre du Conseil de sécurité est partie à un différend, il est tenu de s’abstenir de voter au Conseil de sécurité.

M. FRANCISCO ALBERTO GONZALEZ (Colombie) a déclaré que face aux défis que le monde connaît aujourd’hui, le renforcement des instances multilatérales est une exigence qui permet une gestion facilitée des affaires du monde.  Ce renforcement favorise en outre une meilleure symétrie dans les relations internationales, contribuant ainsi à la consolidation des capacités des États. 

La Colombie plaide également pour un équilibre entre les organes des Nations Unies.  C’est une nécessité, a dit le représentant, indiquant que sa délégation, avec le groupe « Unis pour le consensus », a fait des propositions pour réformer le Conseil de sécurité et accroître la participation démocratique de tous les États.  Cette proposition demande l’augmentation du nombre de membres non permanents, la création d’une nouvelle catégorie de membres et la possibilité de réélection. 

M. ANDREJS PILDEGOVICS (Lettonie) a mis l’accent sur la prévention, qui doit rester au centre de l’agenda des Nations Unies, et sur une action rapide de l’ONU dans les situations critiques.  Il a plaidé en faveur du respect des droits de l’homme et de l’état de droit, ainsi que pour la bonne gouvernance, recommandant d’agir rapidement et efficacement lorsque de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire ont lieu.  Ils peuvent être un signe précoce d’une descente dans le conflit ou d’une escalade dans le conflit, a-t-il relevé.  Cependant, le potentiel de l’ONU pour empêcher le déclenchement, la poursuite ou la résurgence de conflits n’a pas été utilisé efficacement, a estimé M. Pildegovics. 

Il a ainsi remarqué que, trop souvent, l’ONU n’a pas été en mesure de prévenir les conflits ou de rétablir la paix pour mettre fin aux atrocités; trop souvent, les ressources sont consacrées à la gestion des crises au lieu de les prévenir.  Il a souligné la responsabilité particulière des membres permanents du Conseil, dotés du droit de veto, d’utiliser ce pouvoir dans l’intérêt de la paix et de la sécurité communes.  La réforme du Conseil de sécurité est attendue depuis longtemps et nous devrions tous viser à renforcer la légitimité de cet organe important, a-t-il ensuite lancé.  Le délégué a enfin déclaré que si la diplomatie multilatérale peut être difficile, de grands compromis ont quand même pu être réalisés sous forme d’accords internationaux.

Face aux défis communs de l’humanité, M. LAZARUS OMBAI AMAYO (Kenya) a mis l’accent sur la coopération, la collaboration et la construction de partenariats, y voyant l’évidente expression du multilatéralisme.  Il a toutefois estimé que la déconnexion entre les défis mondiaux et l’inadéquation des structures de règlement des problèmes internationaux impose de jeter un regard nouveau sur les 70 ans d’existence de l’ONU et sur ce que réserve l’avenir.  « Nous devons nous demander pourquoi la mondialisation a conduit à la perte d’élan du multilatéralisme », a-t-il dit, plaidant pour plus de réactivité et d’adaptabilité de la part des gouvernements. 

Alors que les Nations Unies devraient être en pointe dans la recherche d’un équilibre entre multilatéralisme et mondialisation, la question se pose de savoir si l’Organisation peut réduire le fossé qui les séparent afin de léguer un monde de paix aux générations futures, a souligné le représentant.  Des solutions sont pourtant à portée de main, a-t-il poursuivi, notant que les défis les plus insolubles de notre temps nécessitent une action concertée et consensuelle, basée sur le respect du droit international et non sur des décisions unilatérales.  De fait, a-t-il conclu, l’adhésion par consentement mutuel aux normes et pratiques internationales devrait être la voie menant à un rétablissement du multilatéralisme. 

Aux dires de Mme SOFYA SIMONYAN (Arménie), le multilatéralisme n’est pas une fin en soi, mais une nécessité si l’on veut parvenir aux objectifs communs de paix et de sécurité.  De façon collective, la communauté internationale doit faire davantage pour modérer les situations de crise dans lesquelles les droits fondamentaux de l’homme sont menacés, dont le droit à la vie.  C’est pour cette raison que la délégation voit en l’adoption de la résolution de l’Assemblée générale faisant du 9 décembre la Journée internationale de commémoration des victimes du crime de génocide, d’affirmation de leur dignité et de prévention de ce crime, un signe fort du multilatéralisme, a dit la représentante.

Concernant les défis qui menacent le multilatéralisme, la représentante a jugé primordial de rappeler la « centralité » d’une coopération forte avec les organisations et plateformes régionales, sans double emploi.  Car de son point de vue, des mandats régionaux bien élaborés et internationalement soutenus ont le potentiel et la capacité de s’attaquer aux défis complexes, en particulier dans les situations de conflit.  C’est pour cette raison que l’Arménie se réjouit du soutien continu du système des Nations Unies aux efforts de médiation du Groupe de Minsk de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), coprésidé par la France, les États-Unis et la Fédération de Russie, et visant à régler pacifiquement le confit du Nagorno-Karabakh, a dit la représentante. 

M. KHALIFA ALI ISSA AL HARTHY (Oman) a déclaré croire en l’ONU pour mettre en œuvre le multilatéralisme souhaité par la communauté internationale.  Mais cela exige que l’on réforme les méthodes de travail de l’Organisation et que l’on évite les deux poids, deux mesures.  Il faut également que l’on renonce aux mesures coercitives unilatérales, qui sont contraires à la Charte des Nations Unies.  Oman espère que l’ONU pourra faire en sorte que les États qui appliquent de telles mesures y renoncent, a dit son représentant. 

M. MOHAMMED ATLASSI (Maroc) a déclaré que son pays se prête volontiers aux efforts visant à la réconciliation et au règlement des différends, à l’image de l’action de médiation menée par le Roi Mohammed VI dans le règlement de la crise dans la région du fleuve Mano, ainsi que le soutien au Mali et à la Libye pour surmonter leurs crises respectives, a-t-il observé.  Le Maroc, a-t-il ajouté, a accueilli les pourparlers de paix inter-libyens, sous l’égide de l’ONU, et qui ont été couronnés de succès par la signature, le 17 décembre 2015, de l’accord politique de Skhirat. 

En outre, le Maroc s’est engagé, dès 1960, dans les efforts de l’ONU pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, notamment en participant aux opérations de maintien de la paix en Somalie, en République démocratique du Congo, en Côte d’Ivoire et au Mali, ainsi qu’aux opérations de l’OTAN et de l’Union européenne, mandatées par le Conseil de sécurité.  Le représentant a rappelé que les 10 et 11 décembre prochain, son pays accueillera la Conférence internationale au cours de laquelle sera adopté un pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. 

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a déclaré que depuis leur création, les Nations Unies ont montré que les mesures multilatérales, basées sur les principes du droit international et enracinées dans la Charte des Nations Unies, sont cruciales pour résoudre les défis globaux posés à la sécurité internationale.  Mais alors qu’aujourd’hui ces défis sans précédents se complexifient, il faut plus que jamais renforcer le multilatéralisme, pour notamment aider les États qui ne le peuvent pas à s’attaquer aux défis transfrontaliers, a recommandé le représentant.

Le Viet Nam est en outre d’avis que, pour renforcer ce multilatéralisme, il faut que les États les plus capables s’engagent politiquement à prendre toutes les mesures pertinentes.  Les instances des Nations Unies doivent également se montrer plus efficaces, plus transparentes et responsables devant les États Membres.  Pour cette raison, le Viet Nam soutient l’initiative de réforme présentée par le Secrétaire général et souligne qu’il est essentiel de prendre des mesures pour la mettre en œuvre, a conclu le représentant. 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a relevé que les principes du multilatéralisme étaient attaqués de toute part, en se disant préoccupé de voir les atteintes portées aux régimes de désarmement et de non-prolifération.  Il a pris pour exemples les récents développements relatifs au Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire et au Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien.  Le renforcement des principes du multilatéralisme par le Bélarus a été récemment illustré par la tenue de la réunion du groupe restreint de la Conférence de Munich sur la sécurité, qui s’est tenue à Minsk le 31 octobre dernier, avec un panel de discussion sur les relations entre l’Est et l’Ouest, auquel ont participé nombre de pays européens.  Il a en conclusion cité le Président de son pays, M. Alexandre Loukachenko, pour qui « mieux vaut des années de négociations qu’un seul jour de guerre ». 

Les Nations Unies constituent le cadre idéal du multilatéralisme et de la coopération entre les peuples du monde, a affirmé M. ISSA KONFOUROU (Mali).  Face aux nouvelles menaces auxquelles le monde est confronté, notamment le terrorisme et autres formes de crime organisé, le Mali reste convaincu que seule une approche multilatérale, faite de coopération entre les pays concernés, est à même de relever durablement ces défis.  Cet engagement, a-t-il rappelé, s’est traduit par la participation de citoyens maliens au processus de règlement politique de conflits dans le monde et de déploiement de troupes maliennes dans les missions de paix de l’ONU, de l’Union africaine, de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et du G5 Sahel. 

Aujourd’hui, les Maliens sont très heureux de bénéficier en retour de la solidarité internationale, marquée par la présence des forces et du personnel de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), de l’Union africaine, de la CEDEAO et de l’Union européenne et plusieurs « autres nations amies » afin d’aider le Mali à rétablir son autorité sur l’ensemble du territoire national, a précisé M. Konfourou.  Cependant, a-t-il conclu, « nous avons la responsabilité collective d’imprimer un nouveau souffle au cadre multilatéral des Nations Unies » et d’accepter d’aller de l’avant pour la réforme de certains organes principaux, en particulier le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, y compris dans leur composition et leur méthode de travail. 

Profondément convaincu de l’utilité des Nations Unies, M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a estimé que cette conviction devait se traduire en actions multilatérales concrètes.  Il a mis l’accent sur la prévention, en partenariat étroit avec les organisations régionales et sous-régionales, et la lutte contre l’impunité.  La protection aussi, en premier lieu celle des civils, hommes, femmes et enfants, avec un accent particulier mis sur les enfants dans les conflits armés.  La performance enfin, en renforçant l’efficacité des opérations de maintien de la paix, avec une priorité donnée à l’appui aux solutions politiques et à la protection des civils.

M. Pecsteen de Buytswerve a invité à veiller à ce que les règles internationales soient respectées de manière cohérente, et à ce que les actions des membres permanents du Conseil ne contribuent pas de manière directe ou indirecte aux violations du droit international humanitaire, des droits de l’homme ou encore des régimes de non-prolifération.  Il a aussi plaidé pour tirer parti des instruments multilatéraux existants pour développer des solutions concrètes et renforcer l’action du Conseil de sécurité, comme l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) en Syrie ou le Traité d’interdiction complète des armes nucléaires (TICE) dans le cadre d’un accord commun avec la République populaire démocratique de Corée.  Il a enfin appelé à ce que ces règles soient vraiment respectées grâce à des instruments tels que la CIJ, la CPI et la Cour permanente d’arbitrage, sans compter un éventail d’instruments de vérification et d’attribution.

En tant que Membre fondateur de l’ONU, son pays a toujours promu le multilatéralisme, a assuré M. ARIEL PENARANDA (Philippines).  Sur les questions économiques et sociales, les Philippines coordonnent les efforts sur les questions qui les intéressent en premier lieu, à savoir la migration et le développement, la traite des êtres humains, les personnes handicapées ou la biodiversité.  Dans le domaine de la paix et de la sécurité, le pays s’est fait le champion de l’interdiction des armes nucléaires.  De plus, il coopère avec l’ONU en matière de contre-terrorisme et, depuis 2004, il parraine avec le Pakistan la résolution sur la culture de la paix.

Cela dit, le représentant, tout en soutenant le multilatéralisme au sein de l’ONU, a été d’avis que l’Organisation et ses agences sont « une somme de souverainetés, et non une souveraineté en soi ».  Il faut donc toujours veiller à ce que la souveraineté des États soit respectée.  Aucune agence ni groupe ne peut remplacer l’État.  « Si dans certains cas l’État est le problème, il est aussi en meilleure position pour résoudre le problème », a conclu le représentant. 

Mme HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur) a déclaré qu’aucune paix durable n’est possible si l’établissement des responsabilités n’est pas de mise.  Après avoir plaidé pour la réforme du Conseil de sécurité, elle a estimé que la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 constitue un exemple précis de multilatéralisme.  La représentante s’est enfin félicitée de la réunion récemment organisée au plus haut niveau par son pays et Saint-Vincent-et-les-Grenadines le 31 octobre dernier, afin de réfléchir aux moyens de rénover le multilatéralisme.  Cette réunion a compté avec la présence des Présidentes de l’Assemblée générale et de l’ECOSOC et du Président du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre, a-t-elle précisé.

M. KENNEDY MAYONG ONON (Malaisie) a déclaré qu’en dépit des efforts déployés, l’ONU n’a pas réussi à mettre fin au plus long conflit de l’histoire, à savoir le conflit israélo-palestinien, qui dure depuis sept décennies maintenant.  De son point de vue, l’approche du Conseil de sécurité sur cette question est un exemple de l’inaction sélective dans la mise en œuvre des buts et principes des Nations Unies.  Mais, a ajouté le représentant, « nous sommes tous coupables de ne pas avoir réussi à faire respecter la Charte ».  C’est donc pour cette raison et pour que le multilatéralisme soit efficace que la Malaisie soutient tous les efforts visant à réformer l’Organisation et encourage fortement tous les États à travailler en ce sens. 

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a déclaré que ceux qui émettent des doutes quant aux vertus du multilatéralisme devraient peut-être examiner le cas du Bangladesh.  « En grande partie, grâce à ce concept, une nation née avec une économie ravagée par la guerre, et considérée comme un pays sinistré, a réussi contre toute attente à tracer son chemin comme l’une des économies à la croissance la plus rapide dans le monde, sortant de la pauvreté plus de trois millions de personnes. »  Le multilatéralisme, a-t-il ajouté, a toujours figuré au cœur de la politique étrangère de son pays et continuera de le rester.  Évoquant la crise humanitaire des Rohingya, le représentant a déclaré que son gouvernement n’avait pas d’autre option que de se tourner vers l’ONU et en particulier ce Conseil, jusqu’à ce qu’une solution pacifique et durable soit trouvée.

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