En cours au Siège de l'ONU

8368e séance – matin
CS/13532

Colombie: sans la réinsertion économique et la sécurité des ex-combattants FARC-EP, l’Accord de paix est menacée

En Colombie, deux ans après l’Accord de paix, « la réintégration économique des anciens combattants demeure un sujet de préoccupation majeure », dans le contexte où la vaste majorité des ex-combattants concernés par la réintégration n’a toujours pas de perspective économique claire.

Il existe en outre, des disparités dans la sécurité des anciens combattants, entre ceux qui bénéficient des mesures de protection et de sécurité, et les autres.  Depuis la signature de l’Accord de paix, 74 membres de l’ex-FARC vivant en dehors de la protection du Gouvernement ont été tués.  À cela s’ajoute le sentiment d’incertitude qui découle de la controverse entourant l’Accord de paix et des atermoiements des débats constitutionnels sur l’établissement de la Juridiction spéciale pour la paix.

C’est, en résumé, le contenu du rapport du Secrétaire général présenté, ce matin, devant le Conseil de sécurité par le Représentant spécial et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, M. Jean Arnault.

Le Ministre des affaires étrangères de la Colombie, M. Carlos Holmes Trujillo, a lui-même reconnu des problèmes dans la mise en œuvre de cet accord et assuré que des aménagements y seront apportés.  Il a demandé aux anciens dirigeants des Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP) qui ont abandonné le processus de réintégration de revenir et de ne pas se retrouver à nouveau dans l’illégalité.

Les membres du Conseil ont partagé l’analyse du Représentant spécial.  De façon unanime, ils ont salué l’engagement de la Colombie manifesté par la volonté du Président Iván Duque de mettre en œuvre l’Accord de paix.  À ce jour, toutes les mesures prises par le Gouvernement colombien « vont dans le bon sens », s’est félicité le « pays frère » du Pérou, ajoutant que le processus de réinsertion économique doit maintenant s’accompagner des ressources nécessaires. 

En effet, la réussite de la mise en œuvre de l’Accord de paix dépendra des succès en matière de réintégration économique, a souligné la France, observant que trop de projets générateurs de revenus lancés par d’anciens combattants n’ont pu aboutir faute de moyens. 

Les chiffres sont même « un peu décourageants », a poursuivi son homologue de la Bolivie: sur les quelques 17 projets approuvés à ce jour, deux seulement sont actuellement financés.  Il est « urgent de travailler à la réinsertion économique de ces anciens combattants », a insisté, en écho, le représentant du Royaume-Uni.

Mais en plus de cette insertion économique, encore faut-il que la sécurité de ces anciens combattants soit assurée et que les autres processus de négociations aboutissent, a nuancé la délégation de la Suède.  Or, la plupart des anciens FARC vivent avec un sentiment de crainte, a observé la Bolivie, notant comme d’autres délégations, que les assassinats de dirigeants de la société civile, des défenseurs des droits de l’homme et des membres de familles des anciens combattants des FARC-EP se poursuivent en Colombie.

Aujourd’hui, environ 10% de ces anciens rebelles ayant rallié l’Accord de paix au début, s’en éloignent maintenant.  Parmi eux, on compte cinq des plus hauts gradés de l’ancienne guérilla, sans compter les commandants sur le terrain, a rappelé le représentant russe.  Cette situation est de nature à mettre en danger l’Accord de paix, a prévenu le représentant des Pays-Bas, rejoint par celle de la Pologne pour qui, « si l’on ne règle pas ces problèmes, la paix continuera d’être menacée ».

Les États-Unis ont, de leur côté, affirmé que le processus de paix dépendra aussi de la capacité de la Colombie à gérer l’afflux de réfugiés en provenance du Venezuela.  Il n’y aura de solution à ce problème que lorsque le « régime de Maduro » tombera, dit son représentant.

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53) (S/2018/874)

Déclarations

M. JEAN ARNAULT, Représentant spécial et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, a déclaré que, depuis la parution du rapport du Secrétaire général, les mécanismes clefs de mise en œuvre de l’Accord de paix, en particulier les dispositions relatives à la réintégration et la sécurité des anciens membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP) avaient repris leurs travaux pour la première fois depuis l’entrée en fonctions du nouveau Gouvernement.  Il s’agit de la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’application de l’Accord de paix, du Conseil national de réintégration, du Conseil technique chargé de superviser les anciens combattants et du groupe de travail sur les garanties juridiques. 

La Mission, a affirmé le haut fonctionnaire, participe à plusieurs de ces mécanismes « dans un esprit de coopération », sachant que la question de la réintégration est un défi considérable, et que les deux parties ont un rôle important pour le relever. 

S’agissant de la participation politique –une aspiration centrale des FARC– la situation se présente sous un jour positif, puisque 8 des 10 représentants occupent des sièges dans les deux chambres du Congrès et contribuent aux débats législatifs, dans un esprit « collégial », en dépit de divergences politiques très nettes. 

En ce qui concerne la sécurité physique, il existe des disparités évidentes entre la situation des anciens combattants bénéficiant de mesures de protection et de sécurité, et les autres: bien que non exempts d’incidents, les périmètres de sécurité autour des secteurs territoriaux de formation et de réintégration ont été efficaces, de même que la protection étroite fournie par l’Unité nationale de protection à des centaines d’anciens FARC et résidents des zones concernées, a constaté le Représentant spécial, qui s’est félicité que l’objectif de 1 200 gardes du corps fixé dans l’Accord de paix soit atteint, « une première dans l’Unité nationale de protection ».  

Pour répondre aux risques sécuritaires qui se posent en dehors des secteurs territoriaux de formation et de réintégration, la police entraîne les anciens membres des FARC à assurer leur propre défense.  « Alors que le nombre de FARC tués en dehors de la protection du Gouvernement est maintenant de 74 depuis la signature de l’Accord de paix, il est impératif que ces mesures fassent rapidement une différence », a exhorté M. Arnault.

« La réintégration économique demeure aujourd’hui un sujet particulièrement préoccupant », a poursuivi le haut fonctionnaire, en expliquant que la vaste majorité de ceux qui sont concernés par la réintégration n’ont toujours pas de perspective économique claire en dehors de leur allocation mensuelle, qui prendra fin en août 2019.  « Le Conseil national de réintégration a par conséquent une tâche colossale devant lui, en raison de la dispersion géographique des anciens membres des FARC-ENL.  Pour réussir, il aura besoin d’un consensus solide dans l’approche à mettre en œuvre pour des projets productifs, pour les terres et pour le mélange adéquat de réintégrations collectives et individuelles », a souligné le Chef de la Mission de vérification.  Il s’est félicité à cet égard de la proposition de budget du Gouvernement pour 2019, qui reconduit le même plafond que l’an dernier pour les dépenses publiques consacrées à la réintégration.

Un autre sujet de préoccupations aux yeux de M. Arnault, c’est le sentiment d’incertitude juridique qui persiste parmi les anciens FARC-ENL, lequel découle de la controverse entourant l’Accord de paix et des atermoiements des débats constitutionnels sur l’établissement de la Juridiction spéciale pour la paix.  « Ce n’est pas une question qui se pose seulement en Colombie.  Partout, la réconciliation de la paix et de la justice est un sujet âprement discuté et sensible », a-t-il reconnu. 

Pour surmonter cet obstacle, le processus de paix colombien a cherché à innover en appréhendant ensemble garanties complètes de procédure régulière, participation des victimes, et avantages de justice réparatrice.  Les magistrats qui assument aujourd’hui la plus lourde responsabilité d’offrir réparation et vérité aux victimes, ainsi que de ménager un accès à la justice transitionnelle aux participants aux conflits, méritent le respect et le soutien des institutions de l’État, a estimé le Représentant spécial, qui s’est donc félicité de la mise à disposition récentes des fonds nécessaires au fonctionnement de la Juridiction. 

Malheureusement, a-t-il ensuite déploré, les tragiques assassinats de leaders communautaires se poursuivent, le dernier en date étant le coordonnateur du Comité de substitution de la culture de coca dans le département de Cauca.   Pour répondre efficacement aux formes de violence recensées dans les zones de conflit, M. Arnault a placé ses espoirs dans l’opérationnalisation prochaine du plan d’action déployé à l’échelle de l’État.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a dit se féliciter de l’engagement de la Colombie manifestée par la volonté du Président Iván Duque de mettre en œuvre l’Accord de paix.  Le Royaume-Uni se dit satisfait aussi des efforts déployés pour la réinsertion des anciens combattants et pour les réparations aux victimes. 

Mais la délégation reste toutefois préoccupée par certains faits, relayés également par le Secrétaire général, notamment le départ d’anciens commandants ayant abandonné les camps de réinsertion.  Il est urgent de travailler à la réinsertion économique de ces anciens combattants, a demandé le représentant, assurant de la disposition de son pays à aider la Colombie à mettre en œuvre cet accord.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déclaré que son pays suivait de très près les progrès en Colombie, ce « pays frère ».  C’est pour cette raison que sa délégation salue l’engagement du Président, M. Iván Duque, et des autres partenaires à mettre en œuvre cet accord de paix et à lutter contre la corruption.  Le Pérou pense que toutes les évolutions notées par le Secrétaire général vont dans ce sens, notamment la nomination des hauts fonctionnaires chargés de mettre en œuvre l’Accord, et la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’application de l’Accord de paix.

En ce qui concerne la sécurité, l’Accord de paix est un bon outil, notamment pour éloigner les groupes armés des zones civils, a estimé le représentant.  Le Pérou pense également que la reconversion des FARC-EP en parti politique est une bonne chose, mais que le processus de réinsertion économique doit s’accompagner des ressources nécessaires à cette fin.  La juridiction spéciale de paix est par ailleurs un outil efficace pour promouvoir la justice et la paix sociale en Colombie, s’est réjoui le représentant.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a commencé par attirer l’attention du Conseil de sécurité sur la question de la juridiction spéciale pour la paix, pilier de la justice transitionnelle en Colombie.  « Cette juridiction autonome a en effet la responsabilité d’apporter des garanties aussi bien aux victimes qu’aux participants au conflit dans le cadre d’un système intégral de justice, de vérité, de réparation et de non répétition. 

Le choix audacieux des signataires de l’Accord nécessite néanmoins de laisser les magistrats mener leurs instructions en toute indépendance et sans interférence, et surtout de ne pas altérer les règles de fonctionnement de cette juridiction, a mis en garde la représentante.   Elle est également revenue sur la dégradation de la situation sécuritaire dans les anciennes zones de conflit, un défi majeur que le nouveau Gouvernement colombien devra relever pour « récolter les dividendes de la paix ». 

Enfin, a observé Mme Gueguen, une mise en œuvre réussie de l’Accord de paix dépendra des succès enregistrés en matière de réintégration économique, alors que trop de projets lancés par d’anciens combattants et générateurs de revenus n’ont pu aboutir.

M. OLOF SKOOG (Suède) a déclaré qu’alors que trop de conflits perdurent encore à travers le monde, la Colombie fait figure d’exemple et montre que l’unité du Conseil de sécurité peut permettre de parvenir à ce genre de résultats.  La transformation des FARC-EP en partie politique est un des éléments centraux du processus de paix colombien. 

Mais pour que ce processus demeure crédible, encore faut-il que la sécurité de ces anciens combattants soit assurée et que les autres processus de négociations aboutissent, en particulier celui mené entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale, a estimé la délégation, avant de se féliciter de l’engagement du Président Iván Duque en ce sens.  

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) s’est félicité de la nomination de hauts fonctionnaires afin de revitaliser le Mécanisme tripartite de sécurité et de protection par le nouveau Gouvernement et de l’adoption, le 23 août dernier, d’un pacte pour la vie et la protection des figures de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme.  Il est néanmoins nécessaire d’insister sur la bonne volonté de toutes les parties pour mettre en œuvre l’Accord de paix, a fait observer le représentant.

En outre, la vulnérabilité des anciens membres des FARC et les difficultés auxquelles se heurte leur réintégration soulèvent des préoccupations.  C’est dans ce contexte qu’il faut, a-t-il dit, promouvoir les liens entre état de droit et développement, en privilégiant une agriculture de substitution. 

Le délégué a exhorté la communauté internationale à soutenir la Colombie, avant de dire qu’il lui tardait de voir la conclusion d’un cessez-le-feu bilatéral avec l’ELN pour réaliser une paix durable. 

Mme MAGDALENA SKOWRONSKA (Pologne) a dit être heureuse que des mesures positives aient été prises par le Gouvernement colombien notamment l’activation de la Commission de suivi de l’Accord de paix et le Conseil national pour la réintégration.  Bien que la mise en œuvre de cet accord ait connu des difficultés, il semble que le processus avance maintenant, s’est réjouie la représentante.  

Cependant d’autres questions continuent d’être sources de préoccupations, notamment les assassinats de dirigeants de la société civile, des défenseurs des droits de l’homme et des membres de familles des anciens combattants des FARC-EP.  À côté de cela, il y a les risques d’insécurité que cause la culture de la coca, en particulier le long des routes stratégiques de cette culture.  Si l’on ne règle pas ces problèmes, la paix continuera d’être menacée, a prévenu la représentante.

M. JONATHAN COHEN (États-Unis) a estimé que le succès de l’Accord de paix en Colombie dépendra avant tout des progrès réalisés dans les domaines de la relance de la croissance économique, de l’expansion des infrastructures civiles dans les zones rurales, et de la lutte efficace contre l’impunité. 

Le processus de paix dépendra aussi, a-t-il affirmé, de la capacité de ce pays à gérer l’afflux de réfugiés en provenance du Venezuela, alors qu’il a déjà fait preuve d’une générosité considérable à leur égard. 

Pour la délégation américaine, il ne saurait y avoir de solution à ce problème que lorsque le « régime de Maduro » tombera.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a déclaré que la mise en œuvre de l’Accord de paix reste difficile.  Elle ne pourra aboutir sans le plein engagement du Gouvernement colombien.  C’est pour cette raison, que les Pays-Bas lancent un appel à l’inclusion et appelle le Gouvernement colombien à ouvrir des consultations avec la société civile, les communautés autochtones, les Colombiens d’ascendance africaine et les personnes lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels et intersexués (LGBTI), a dit le représentant.

Il a également déclaré que l’intégration économique des anciens combattants est un autre pilier de la paix.  Il est donc essentiel que le Gouvernement colombien et les FARC-EP mettent tout en œuvre pour la réinsertion de ces personnes.  

Par ailleurs, et alors que la situation sécuritaire de ces personnes se dégrade avec les assassinats d’anciens combattants et des membres de leurs familles, le Gouvernement doit garantir leur sécurité, au risque de mettre en danger l’Accord de paix, a prévenu le représentant.

Concluant son propos, il a dit que le cas colombien est un succès et un exemple dans le monde.  Mais la paix est plus qu’un accord.  Elle requiert un engagement de longue haleine.  Le Royaume des Pays-Bas, voisin de la Colombie, avec les territoires maritimes de Aruba et Curaçao, entend aider la Colombie à mettre en œuvre entièrement cet accord de paix, a assuré son représentant. 

Mme EDJANG (Guinée équatoriale) a déclaré que les événements politiques de cette année en Colombie inspirent la confiance dans le processus de paix dans ce pays.  Elle s’est félicitée des récentes nominations au sein de la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’application de l’Accord de paix, au Conseil national de réintégration, et à la Commission nationale des garanties de sécurité, ainsi que des déclarations récentes faites par le Président Iván Duque, qui s’est engagé en faveur de la mise en œuvre de l’Accord de paix. 

Néanmoins, la représentante a exprimé sa préoccupation devant le départ de plusieurs anciens commandants des FARC-EP des secteurs territoriaux de formation et de réintégration, dans la région du sud-est, certains disant les avoir quittés parce qu’ils craignaient pour leur sécurité physique et juridique. 

Après avoir dénoncé les assassinats extrajudiciaires, la déléguée a rappelé que, d’après le rapport du Secrétaire général, l’économie illicite alimente toujours l’insécurité en Colombie, constituant une menace pour la paix.  Elle a enfin regretté que la sixième série de pourparlers, cet été à la Havane, entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale n’ait pas permis de parvenir à des accords définitifs jusqu’à présent.

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a déploré que la réintégration socioéconomique des anciens FARC-EP n’ait pas encore vu le jour, mettant en péril la mise en œuvre de cet accord, comme on le voit avec la tentation d’anciens combattants de s’en retirer, a-t-il dit. 

La situation sécuritaire qui prévaut dans le pays, notamment les violences visant les membres de la société civile, les défenseurs des droits de l’homme et les chefs autochtones est un autre risque pour l’Accord de paix, a encore déclaré le représentant, appelant le Gouvernement à assurer la sécurité de ces personnes. 

Après s’être félicité des mesures prises par l’ancien Président comme par le nouveau à l’appui du processus de paix en Colombie, M. ZHANG DIANBIN (Chine) a déclaré qu’il reste à mettre en œuvre cet accord, alors que ce pays est toujours fragilisé par la criminalité et le trafic de stupéfiants.

Le processus de paix en cours est pour sa délégation un exemple de coopération internationale, qui nécessite plus que jamais le soutien de la Mission de vérification.  La Chine, pour sa part, continuera de contribuer à cet effort, a ajouté le représentant.

M. IPO (Côte d’Ivoire) a salué l’engagement et les mesures prises par le Gouvernement colombien pour mettre en œuvre l’Accord de paix avec les FARC-EP.  Cependant la Côte d’Ivoire déplore la persistance de la violence sur l’ensemble du territoire, et notamment l’insécurité dans les zones abritant les centres de formation et de réinsertion des ex-combattants, les obligeant à déserter lesdits centres.  

Cette question, en plus de celles relatives aux droits des victimes, de l’expansion des économies illégales ou de l’indépendance et de l’autonomie financière de la Juridiction spéciale pour la paix appelle des actions urgentes des autorités colombiennes, a déclaré le représentant.  La Côte d’Ivoire les incite donc à redoubler d’efforts dans la mise en œuvre de l’Accord de paix avec les FARC-EP, notamment en instaurant des mesures de confiance, a-t-il conclu.   

M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie) s’est lui aussi félicité des engagements pris par le Président Iván Duque lors de son investiture, qui a sans aucun doute adressé un message positif à tous ceux qui suivent de près la mise en œuvre l’Accord de paix en Colombie.  Il a en outre salué l’adoption du pacte pour la vie et la protection des figures de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme, qui permettra, selon lui, de relever le principal défi qui se pose dans la mise en œuvre de l’Accord. 

Dans ce contexte, le Conseil de sécurité devrait continuer de prêter le soutien nécessaire aux parties colombiennes pour leur permettre d’appliquer cet accord dans son intégralité, a préconisé la délégation.  Il a également mis en garde contre le départ de plusieurs anciens commandants des FARC-EP des secteurs territoriaux de formation et de réintégration, dans la région du sud-est, un élément préoccupant qui exige de se pencher sur ses causes profondes. 

Le représentant a enfin souligné l’importance de questions telles que la réintégration des anciens combattants et de la place de l’économie illicite dans le pays, de même que des assassinats extrajudiciaires de leaders communautaires et d’anciens membres des FARC.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré que le rapport du Secrétaire général laisse deux sentiments: d’abord que des progrès ont été réalisés, notamment et entre autres, l’intégration politique des anciens FARC-EP.  Ces efforts sont à soutenir.  Le rapport laisse aussi le sentiment que des défis perdurent, en particulier l’absence d’intégration économique des anciens combattants et la violence qui les frappe. 

Aujourd’hui, environ 10% de ces anciens rebelles ayant rallié l’Accord de paix au début, s’en éloignent maintenant.  Parmi eux, on compte cinq des plus hauts gradés de l’ancienne guérilla, sans compter les commandants sur le terrain.  Dans ce contexte, la délégation russe se félicite que le Secrétaire général mette en lumière l’engagement ferme du Président Iván Duque de mettre en œuvre cet accord, le seul qui puisse permettre de parvenir à la paix, a dit le représentant.  

Il a également déclaré qu’à de nombreuses reprises, ici au Conseil de sécurité, il a été observé que l’interaction de ses membres est un bon exemple de la manière dont on peut aider les pays à parvenir à la paix.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) s’est félicité des progrès accomplis jusqu’à présent dans la mise en œuvre de l’Accord de paix, et des nominations de « hautes autorités » au sein de la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’application de l’Accord de paix, du Conseil national de réintégration, et de la Commission nationale des garanties de sécurité. 

Cependant, il est important de garantir l’indépendance de la Juridiction spéciale pour la paix, qui doit pouvoir faire son travail en l’absence de toute interférence, de même qu’il faut « éliminer » ce sentiment de crainte dans lequel vivent la plupart des anciens FARC, a fait observer le représentant, qui s’est dit également préoccupé des groupes criminels qui se disputent le contrôle de zones autrefois placées sous celui des FARC.  Aussi est-il nécessaire d’étendre l’autorité de l’État en dehors des centres urbains, a préconisé M. Solíz. 

De même, il a regretté les chiffres « un peu décourageant » s’agissant de la mise en œuvre des projets économiques des FARC, seulement 17 d’entre eux ayant été approuvés, dont deux seulement sont actuellement financés.  La délégation a par ailleurs salué la proposition de la Vice-Présidente de la Colombie, Mme Marta Lucía Ramírez, qui est responsable du programme pour l’égalité des sexes du Gouvernement, et a annoncé son intention d’entretenir un dialogue avec des groupes de femmes afin de mettre l’accent sur leur autonomisation économique et de mettre fin aux agressions sexuelles.

M. CARLOS HOLMES TRUJILLO, Ministre des affaires étrangères de la Colombie, a déclaré que le Président colombien, M. Iván Duque, avait reçu un mandat démocratique et clair lors des élections de mai dernier pour diriger le Gouvernent national les quatre prochaines années et avancer vers la construction d’un pays qui s’apprête à vivre deux siècles d’indépendance, bâtie sur la légalité, l’équité et l’esprit d’entreprise. 

La fin du conflit avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire offre une occasion dont il faut se saisir.  La paix est un objectif de tous les Colombiens, à condition qu’elle respecte les principes de l’état de droit et de la justice.  Alors que des problèmes dans la mise en œuvre de cet accord se sont faits jour, le Gouvernement entend y apporter des aménagements.  Ces derniers seront publiquement présentés et discutés, a-t-il assuré.

Le Ministre a également déclaré qu’il est regrettable que certains anciens dirigeants des FARC-EP aient abandonné le processus de réintégration en quittant des secteurs territoriaux de formation et de réintégration, dans la région du sud-est.  Ils doivent revenir et ne pas se retrouver à nouveau dans l’illégalité, leur a lancé le Ministre des affaires étrangères colombien.

Il a également affirmé que son Gouvernement est conscient que l’intégration économique des anciens combattants est un des piliers de l’Accord. Il reconnaît par ailleurs que la question de la drogue est un problème de nature à remettre à cause la paix dans le pays.  La Colombie s’emploie à résoudre ces défis et entend conjuguer tous les efforts, politiques et légaux nécessaires, a-t-il assuré.  

à suivre...

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