8254e séance – matin
CS/13335

Kosovo: le Représentant spécial s’inquiète devant le Conseil de sécurité de la détérioration des relations entre Pristina et Belgrade

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, M. Zahir Tanin, a déclaré, ce matin, devant le Conseil de sécurité, que l’arrestation au Kosovo, le 26 mars dernier, du négociateur principal serbe pour le dialogue de l’Union européenne, avait provoqué une détérioration des relations entre Pristina et Belgrade, alors même que l’Union européenne -sous l’égide de laquelle Serbes et Kosovars dialoguent- avait établi un calendrier ambitieux pour la région.

Venu présenter le rapport trimestriel du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) dont il est également le Chef, M. Tanin a expliqué que, le 26 mars, des réunions du dialogue facilité par l’Union européenne avaient été interrompues quand M. Marko Đurić, le Directeur du Bureau du Gouvernement serbe pour le Kosovo-Metohija, avait été interpellé après qu’il fut entré dans le nord du Kosovo sans l’aval des autorités kosovares.  M. Đurić, a-t-il précisé, prenait part à une réunion du dialogue interne sur le Kosovo engagé par le Président serbe.  Après une arrestation qui a fait plusieurs blessés, M. Đurić a été traîné et exhibé le long d’une rue du centre de Pristina, avant d’être refoulé hors du Kosovo. 

« Certains Serbes du Kosovo, déjà affectés par le meurtre non élucidé d’Oliver Ivanović –un dirigeant serbe du Kosovo assassiné le 16 janvier dans la partie nord, à majorité serbe, de la ville de Mitrovica- perçoivent ces événements avec appréhension », a fait valoir M. Tanin.

Le Représentant spécial a toutefois indiqué que les importants efforts consentis par le Premier Ministre kosovar, M. Ramush Haradinaj, et son gouvernement avaient permis de garder ouverts les canaux de communication, tandis qu’un nouvel engagement de Bruxelles avait permis à Pristina et Belgrade de conduire le dialogue vers une nouvelle étape de réels progrès.  Les membres de l’Union européenne ont en outre établi un calendrier ambitieux pour la région, y compris à travers le Sommet sur les Balkans occidentaux, prévu à Sofia à la fin de ce mois, « le plus haut sommet régional depuis 2003 ».

Mme Vlora Çitaku, du Kosovo, a justifié cette arrestation en raison d’« actions intentionnelles » des autorités serbes, menées selon elle en violation des accords passés entre« nos deux pays », en particulier l’accueil d’un événement public au Kosovo au cours duquel M. Marko Đurić aurait usé d’une rhétorique incendiaire.  « Les responsables serbes doivent comprendre que toute entrée au Kosovo ne peut se faire qu’avec l’autorisation des autorités kosovares », a affirmé Mme Çitaku, qui a en outre souligné que la police kosovare avait agi avec professionnalisme, la détention de M. Đurić s’étant faite en conformité avec la loi.

Le Premier Ministre adjoint de la Serbie, M. Ivica Dačić, a au contraire dénoncé un « raid brutal » suite auquel le négociateur serbe a été battu, menotté et traîné dans les rues de Pristina, « un acte d’humiliation sans précédent dans l’histoire de la diplomatie ».  Comment M. Đurić pourrait-il se rasseoir à la table des négociations après un tel traitement? a-t-il lancé, pour ensuite souligner que la visite de ce dernier était conforme à l’accord sur l’organisation des visites officielles, conclu sous les auspices de l’Union européenne.

M. Dačić a jugé l’incident encore plus préoccupant au vu des tentatives de Pristina pour transformer la Force de sécurité du Kosovo en « forces armées du Kosovo », en violation de la résolution 1244 (1999) qui stipule que la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) est la seule force militaire légale au « Kosovo-Metohija ». 

« Cette politique d’intimidation est très dangereuse et risque de déboucher sur de nouveaux affrontements armés au Kosovo », a averti la Fédération de Russie, qui a appelé à mettre un terme à la création de ce « groupuscule qui risque d’être utilisé contre la population serbe ».  À l’instar du Ministre serbe, il a en outre dit ne pas comprendre la « complaisance ouverte » manifestée par la KFOR et la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX) qui se seraient contentées de regarder l’incident sans réagir.

Dans son intervention, M. Dačić a également regretté que Pristina n’ait toujours pas établi l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe, une de ses plus importantes obligations découlant du premier accord sur les principes gouvernant la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina, signé le 19 avril 2013 à Bruxelles, et a exhorté le Conseil de sécurité à appeler à sa mise en place.

En la matière, Mme Çitaku a fait valoir que le groupe de travail pour la création de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe avait été créé, mais qu’en « raison des pressions extraordinaires exercées par Belgrade, la population serbe est réticente à participer à ce processus ».  « Ce que veut Belgrade est très clair, c’est une solution territoriale, alors que nous voulons une solution civile, parce que nous ne croyons pas à la création de frontières ethniques », a-t-elle affirmé.

Face à cette montée des tensions entre Pristina et Belgrade, les membres du Conseil de sécurité ont été nombreux à inviter les deux parties à faire preuve de retenue.  Pour autant, les États-Unis et les différents représentants des États européens ont estimé que la situation au Kosovo ne méritait pas que le Conseil y consacre autant de temps et demandé une nouvelle fois que la périodicité des rapports soit revue à la baisse.  Les États-Unis souhaiteraient voir la MINUK fermée dans un délai maximum d’un an, le Royaume-Uni s’est prononcé pour une réduction des effectifs et un examen stratégique de la Mission et la France souhaiterait un « recentrage » de ses activités, toutes propositions que la Fédération de Russie a jugé déplacées.  La délégation russe s’est aussi inquiétée des pressions de plus en plus importantes exercées sur Belgrade pour la contraindre à reconnaître le Kosovo.  « Le moment est inopportun pour forcer la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina avec l’imposition de calendriers artificiels », a-t-il mis en garde.

Par ailleurs, suite aux inquiétudes suscitées par le peu de progrès réalisés par l’enquête sur le meurtre de l’homme politique serbe du Kosovo, Oliver Ivanović, Mme Çitaku a assuré que Pristina ne ménagerait aucun effort pour en identifier les auteurs, soulignant par ailleurs qu’Oliver Ivanović « s’exprimait ouvertement depuis Pristina contre l’intimidation et en dépit des menaces dont étaient l’objet les Serbes locaux du fait des agissements de Belgrade ».

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ

Rapport du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (S/2018/407)

Déclarations

M. ZAHIR TANIN, Représentant spécial et Chef de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a déclaré que la période dont traite le rapport avait été marquée au Kosovo par le déclin de la qualité des actions et du discours politique entre Pristina et Belgrade.  En mars dernier, des réunions du dialogue facilité par l’Union européenne ont eu lieu, à la fois au niveau technique et politique, mais cette atmosphère de travail a été interrompue quand M. Marko Đurić, le Directeur du Bureau du Gouvernement serbe pour le Kosovo-Metohija et négociateur principal pour le dialogue de l’Union européenne, a été interpellé après qu’il fut entré dans le nord du Kosovo sans l’aval des autorités kosovares.  M. Đurić prenait part à une réunion du dialogue interne sur le Kosovo engagé par le Président serbe, M. Aleksandar Vučić.  Au cours de l’arrestation, des grenades étourdissantes, du gaz lacrymogène et le recours à la force physique ont été utilisés et ont provoqué des blessés, parmi lesquels un ministre du Kosovo, deux maires, des journalistes et d’autres participants.  M. Đurić a été en outre traîné et exhibé le long d’une rue du centre de Pristina, avant d’être refoulé hors du Kosovo.  Certains Serbes du Kosovo, déjà affectés par le meurtre non élucidé d’Oliver Ivanović, perpétré en janvier à Mitrovica-Nord, perçoivent ces événements avec appréhension.

Après l’incident, des responsables politiques des deux bords se sont lancés dans une escalade rhétorique, ce qui a davantage sapé les efforts de dialogue de l’Union européenne, a déploré M. Tanin.  La direction du parti de la Liste serbe a annoncé son intention de se retirer de la coalition au pouvoir au Kosovo, promettant également de lancer unilatéralement les travaux devant mener à la création de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo, au plus tard le 20 avril, avant de se rétracter par la suite.  Quelle que soit la cause ayant conduit à ces provocations réciproques, le Représentant spécial a relevé que le résultat était proche d’un effondrement complet du Gouvernement du Kosovo.  Les eaux ont retrouvé leur calme après des efforts intensifs, dont ceux de parties externes.  D’importants efforts consentis par le Premier Ministre kosovar, M. Ramush Haradinaj, et son gouvernement, dont des discussions avec la Liste serbe et d’autres partis de la coalition et les forces de l’opposition, ont permis de garder ouverts les canaux de communication.

Avec ces récentes tensions, il faudrait une volonté politique ferme des deux parties pour relancer le dialogue, a affirmé M. Tanin, avant de préciser qu’il faudrait pour cela une direction politique à même de relever les défis en faisant fi des conséquences politiques à court terme. 

Un nouvel engagement de Bruxelles, à tous les niveaux, a permis à Pristina et Belgrade de conduire le dialogue vers une nouvelle étape de réel progrès, a relevé le Représentant spécial.  Les membres de l’Union européenne ont établi un calendrier ambitieux pour la région, y compris à travers le Sommet sur les Balkans occidentaux, prévu à Sofia à la fin de ce mois, « le plus haut sommet régional depuis 2003 ».  La réunion cruciale du processus du Forum économique de Berlin de juillet prochain, ainsi que d’autres initiatives au cours de l’année, pourraient aussi aider à naviguer à contre-courant et tirer parti d’un nouvel engagement, a estimé M. Tanin. 

Le Représentant spécial a estimé que, pour créer une atmosphère de compromis, des engagements devaient être pris à tous les niveaux.  Il a dit avoir pris part récemment au forum de confiance tenu du 6 au 8 mai à Ljubljana, en Slovénie.  Plus de 100 leaders communautaires du Kosovo y ont discuté des moyens de faire face à leurs défis communs, provoqués par le manque de confiance et les approches politiques du passé, quelque 20 ans après l’apogée du conflit.  L’objectif du forum était non de réinventer ou de réinterpréter les événements du passé, mais d’illuminer, guider et suivre un chemin plus positif vers l’avenir, a expliqué M. Tanin.  Le Représentant spécial a rappelé que la Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, Mme Bintou Keita, qui y prenait part, avait vu dans le forum une tentative proactive de consolider la paix, de prévenir les conflits au niveau local, et de lier les cadres politique et de développement.  M. Tanin a invité ces leaders communautaires à « préparer l’avenir, au lieu de se lamenter sur le passé », et à « avancer avec compassion, compréhension et clarté vers le renforcement de la confiance dans les domaines identifiés au cours du forum ».

Le Représentant spécial a ensuite présenté comme un élément important pour l’avenir européen du Kosovo la ratification, par l’Assemblée du Kosovo, de l’accord de démarcation des frontières de 2015 avec le Monténégro.  Il a ensuite rappelé que, pour la communauté internationale, le renforcement de l’état de droit et des droits de l’homme, et des progrès tangibles dans la lutte contre la corruption et la criminalité organisée demeuraient des points cruciaux pour respecter les aspirations des populations kosovares à un avenir européen.  Il a également salué l’adoption d’un nouveau Code pénal kosovar, qui introduit des peines plus sévères en cas de corruption et d’abus au cours de fonctions officielles.  Selon lui, cette initiative positive vient compléter les efforts en cours pour « dépolitiser et renforcer la performance du secteur judiciaire ».

En ce qui concerne la protection de l’héritage culturel, M. Tanin a noté la reprise du travail de la mise en œuvre du Conseil d’exécution et de suivi qui a, parmi ses tâches, la surveillance de l’application de la loi sur les zones spécialement protégées autour des sites religieux.  Il a également indiqué que la MINUK continuait d’accorder la priorité aux domaines de renforcement de la confiance, aux droits de l’homme et, dans une moindre mesure, au soutien à l’état de droit et aux institutions judiciaires. 

Un aspect important pour la MINUK est la mise en œuvre du programme relatif aux femmes, la paix et la sécurité et de celui concernant les jeunes, la paix et la sécurité.  C’est pourquoi, le 5 mars dernier, la MINUK a organisé, conjointement avec ONU-Femmes, la Journée internationale de la femme, avec un accent mis sur la participation politique des femmes.  En fin de cette semaine, la Mission, en collaboration avec l’UNICEF et le PNUD, entend tenir la deuxième Assemblée des Nations Unies sur les jeunes au Kosovo; 180 jeunes dirigeants y sont attendus. 

Concernant le mandat de la MINUK, le Représentant spécial a fait observer que la Mission travaillait en droite ligne des principes de base des réformes du Secrétaire général et sous la direction du Conseil de sécurité.  Il a précisé que les efforts de la Mission visaient à consolider la paix; assurer que l’ONU reste en avant-garde du suivi et de l’analyse de la situation; et renforcer la coordination stratégique avec les membres de toutes les entités onusiennes et des partenaires internationaux, afin de compléter les efforts des institutions kosovares.

M. IVICA DAČIĆ, Premier Ministre adjoint et Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a indiqué que si la situation au Kosovo avait certes évolué depuis 1999, elle demeure loin d’être idéale.  Le Kosovo, a-t-il affirmé, n’est pas une « jeune démocratie », ni une « société multiethnique » faisant face à des défis occasionnels.  Et à tous ceux d’entre vous qui appellent à la fin de la Mission ou à la réduction du nombre de réunions du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté, je vais attirer votre attention sur des points importants qui méritent votre attention.

M. Dačić a alors rappelé que la MINUK existait depuis 19 ans et qu’elle avait contribué pour beaucoup à changer la situation sur le terrain.  Mais, a-t-il souligné, sa tâche est loin d’être achevée.  Il a fait observer qu’il avait fallu beaucoup de temps avant de commencer les négociations entre Belgrade et Pristina.  Et même si nous rencontrons d’importants problèmes dans la mise en œuvre des accords par Pristina, la Serbie continue d’estimer que le seul moyen de trouver une solution à long terme est la reprise du dialogue, a-t-il ajouté.  Pour M. Dačić, il est donc du devoir du Conseil de sécurité de contribuer à trouver une solution et de normaliser la situation au Kosovo et Metohija.

Le Ministre a estimé qu’en continuant de répondre aux questions en suspens de manière pacifique, il serait possible de normaliser la situation dans la province et a appelé à ne pas adopter des mesures hâtives qui risqueraient de mettre à mal les efforts déployés jusqu’à présent.  Les appels visant à réduire les effectifs de la MINUK et son budget, à modifier son mandat ou à réduire la fréquence des réunions du Conseil de sécurité ne contribuent en rien à créer une atmosphère propice à la réalisation des objectifs, a-t-il mis en garde.  Il n’y a aucune utilité à débattre de savoir si le Conseil de sécurité devrait consacrer 12 heures par an à cette question, ce qu’il faut, a-t-il martelé, c’est la mise en œuvre des accords, sans l’ajout de condition supplémentaire, et l’identification de solutions par l’intermédiaire du dialogue.

M. Dačić a ensuite rappelé le meurtre d’Oliver Ivanović, le dirigeant de « l’Initiative citoyenne Serbie, démocratie et justice », le 16 janvier dernier, et a déploré qu’en dépit des engagements de Pristina, « on ne connaît rien de l’enquête, hormis le fait qu’elle ne progresse pas ».

Le Premier Ministre adjoint a par ailleurs dénoncé le « raid brutal » commis le 26 mars à Kosovska Mitrovica, lors des pourparlers conduits dans le cadre du dialogue interne sur le Kosovo et Metohija, par « des membres masqués des unités spéciales de la “police du Kosovo” ».  Suite à ce comportement irresponsable des responsables des institutions provisoires d’autogouvernement, a-t-il déploré, 36 personnes ont été blessées, y compris des ministres du Gouvernement provincial du Kosovo.  Qui plus est, M. Marko Đurić, le Directeur du Bureau du Kosovo et Metohija et principal négociateur de la partie serbe pour le dialogue technique avec Pristina, a été battu, menotté et traîné dans les rues de Pristina, « devant une foule orchestrée en haine », un acte d’humiliation sans précédent dans l’histoire de la diplomatie.

Comment M. Durić pourrait-il se rasseoir à la table de négociations après un tel traitement?  Que ressentiriez-vous si vous subissiez un tel traitement? a lancé M. Dačić en s’adressant directement aux représentants au Conseil de sécurité.  Comment sauver la face après un tel acte?  Il a aussi souligné qu’en dépit des arguments avancés par Pristina, la visite de ce dernier était conforme à l’accord sur l’organisation des visites officielles, conclu sous les auspices de l’Union européenne.

Pour M. Dačić, cet incident est une provocation de Pristina qui vient durement mettre à mal le dialogue et qui témoigne de surcroît de l’instabilité qui règne dans la province.  Il a aussi pointé l’absence d’une réponse adéquate de la part de l’Union européenne, d’autant plus que la mission EULEX a pour mandat de faire respecter l’état de droit et de surveiller le comportement de la « police du Kosovo », ainsi que les actions de la KFOR qui, a-t-il affirmé, aurait dû empêcher les membres des unités spéciales de se rendre dans le nord de la province où s’est déroulé l’incident.

Le Ministre a estimé que cet incident était encore plus préoccupant au vu des velléités de Pristina qui, selon lui, cherche à transformer les forces de sécurité du Kosovo en « forces armées du Kosovo ».  Il a rappelé que la résolution 1244 (1999) ne prévoyait pas la création d’une force armée, mais stipulait que la KFOR était la seule force militaire légale au Kosovo et Metohija.  Il a dénoncé le fait que plusieurs pays membres de l’Union européenne et l’OTAN aient accepté les accréditations des « soi-disant attachés militaires du Kosovo », en violation de la résolution.

M. Dačić a ensuite réaffirmé l’engagement de la Serbie en faveur du dialogue et a indiqué qu’en dépit de difficultés, Belgrade avait mis en œuvre pratiquement toutes les obligations découlant du premier accord sur les principes gouvernant la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina, notamment celles relatives à l’intégration de la police et du pouvoir judiciaire.  De son côté, et en dépit de multiples appels, Pristina n’a toujours pas établi l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe, qui était pourtant une de ses plus importantes obligations découlant de l’accord.

La création de cette communauté, a souligné M. Dačić, est d’une importance suprême pour la Serbie et les Serbes du Kosovo et Metohija car elle leur permettrait de préserver leurs intérêts et leur identité.  Et les représentants de Pristina qui affirment que l’établissement de cette communauté dépend de l’octroi d’un siège au sein des Nations Unies démontrent bien que Pristina n’a aucune intention d’honorer l’Accord de Bruxelles, a-t-il prédit, avant d’exhorter le Conseil de sécurité à appeler à son établissement.

Poursuivant, le Ministre de la Serbie a appelé au maintien du niveau actuel des compétences de l’EULEX, avertissant que tout transfert de ses compétences aux institutions provisoires d’autogouvernance, porterait atteinte à la neutralité de la Mission et contribuerait à l’« affirmation de l’État bidon du Kosovo ».

M. Dačić a ensuite relevé que seuls trois retours volontaires de personnes déplacées avaient été enregistrés pendant la période à l’examen.  Est-ce vraiment suffisant pour que la communauté internationale baisse les bras et cesse de créer les conditions propices pour le retour et le respect des droits des personnes déplacées? a-t-il ironisé.  Il a aussi dénoncé les arrestations arbitraires au point de passage de Jarinje, affirmant que des listes secrètes étaient établies sur la base d’informations erronées et de preuves fabriquées pour justifier ces arrestations qui provoquent un climat de peur et d’insécurité pour les Serbes du Kosovo et de Metohija.

M. Dačić a également dénoncé l’impunité pour les crimes commis contre les Serbes et les non-Albanais du Kosovo et Metohija, pointant notamment le fait qu’aucune mise en accusation n’ait été présentée par la Chambre des spécialistes pour les crimes commis par l’Armée de libération du Kosovo, et dont le début du travail ne cesse de surcroît d’être reporté.

Le Ministre a enfin souligné que la Serbie continuerait d’utiliser tous les moyens diplomatiques à sa disposition pour combattre les « tentatives sécessionnistes » de Pristina qui, a-t-il averti, établissent un précédent dangereux pour d’autres mouvements séparatistes dans le monde.  La Serbie, a-t-il assuré, cherche un terrain d’entente commun avec l’Occident.

Mme VLORA ÇITAKU, du Kosovo, a indiqué que les 30 000 jeunes kosovars qui vont achever, cette année, leurs études secondaires constituent la première génération à ne pas avoir connu « les horreurs de la guerre ».  Elle a dénoncé les tentatives de son « voisin du nord » de falsifier l’Histoire, avant de déplorer que le Kosovo ne figure pas dans le rapport du Secrétaire général sur la violence sexuelle en période de conflit.  Pourtant, 20 000 cas de violence sexuelle et de torture commis par les forces serbes pendant la guerre du Kosovo ont été recensés, a-t-elle affirmé.  Mme Çitaku a en outre affirmé que la Serbie n’avait aucun droit de veto sur l’établissement de forces armées du Kosovo.  « Je veux être très claire sur ce sujet », a-t-elle insisté.

Mme Çitaku a ensuite déploré que les autorités serbes aient refusé l’entrée à la frontière d’une équipe de karaté kosovare afin de participer à un championnat européen de la discipline à Novi Sad, en Serbie.  Cet incident est loin d’être isolé et relève d’un obstructionnisme constant des autorités serbes, a poursuivi Mme Çitaku.  Le Gouvernement serbe semble vouloir encourager les tendances destructrices de la société serbe aux dépens des partisans de la paix et du dialogue, a-t-elle accusé, en mentionnant également le refus de laisser entrer un groupe de parlementaires kosovars pour participer à une conférence à Belgrade.

Mme Çitaku a insisté sur l’attachement du Kosovo à l’état de droit et à l’édification d’une société inclusive et démocratique.  Mon gouvernement s’attache également à mettre pleinement en œuvre l’Accord de stabilisation et d’association avec l’Union européenne, a-t-elle affirmé.  Elle a ensuite dénoncé des « actions intentionnelles » des autorités serbes menées en violation des accords passés entre « nos deux pays », en particulier l’accueil d’un événement public au Kosovo avec la participation de M. Marko Đurić, qui a usé d’une rhétorique incendiaire.  La police kosovare a agi avec professionnalisme, la détention de M. Đurić s’étant faite en conformité avec la loi, a-t-elle justifié.  Le Kosovo ne tolérera aucune provocation et s’abstiendra, lui-même, de toute provocation, a-t-elle affirmé, ajoutant que « les responsables serbes doivent comprendre que toute entrée au Kosovo ne peut se faire qu’avec l’autorisation des autorités kosovares ».

Mme Çitaku a redit l’engagement du Kosovo en faveur de relations normalisées avec la Serbie, avant de mentionner la participation de responsables kosovars sur pied d’égalité avec les responsables serbes au Sommet Balkans occidentaux-Union européenne dans deux jours.  « Il est évident que l’Union européenne ne tolérera aucune ambiguïté dans la région », a-t-elle déclaré, ajoutant que la Serbie devait désormais reconnaître l’indépendance du Kosovo.

Mme Çitaku a affirmé que le groupe de travail pour la création d’une association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo avait été créé, mais a dit regretter qu’en « raison des pressions extraordinaires exercées par Belgrade, la population serbe est réticente à participer à ce processus ».  « Ce que veut Belgrade est très clair, c’est une solution territoriale alors que nous voulons une solution civile parce que nous ne croyons pas à la création de frontières ethniques », a-t-elle poursuivi.

Enfin, Mme Çitaku a rappelé que le Kosovo était libre et indépendant et que cela ne changerait jamais.  « Il est trompeur de voir dans l’indépendance du Kosovo une défaite de la Serbie, la Serbie n’ayant rien perdu puisque le Kosovo n’a jamais été serbe », a-t-elle conclu.

Mme AMY NOEL TACHCO (États-Unis) a déclaré que son pays soutenait le processus de dialogue de Bruxelles et a invité les deux parties à y adhérer.  Elle a donc exhorté les dirigeants de Belgrade et Pristina à faire voir leur volonté d’aller vers la normalisation et de mettre en œuvre leur engagement dans le cadre du dialogue que dirige l’Union européenne.  Les États-Unis saluent en outre la ratification, par le Parlement kosovar, de l’accord sur la démarcation de la frontière avec le Monténégro, estimant que ce vote va faciliter les procédures d’obtention de visa pour ses citoyens qui envisagent d’entrer dans le territoire de l’Union européenne.

Les États-Unis sont en outre inquiets de la montée des tensions entre Pristina et Belgrade et invitent les deux parties à faire preuve de retenue.  Ils demandent une enquête complète sur le meurtre de l’homme politique serbe du Kosovo, Oliver Ivanović, perpétré le 16 janvier à Mitrovica-Nord.  Pour leur part, les autorités serbes doivent enquêter sur les allégations de menaces dont seraient victimes les Serbes qui rejoignent ou envisagent de rejoindre les institutions kosovares, y compris les forces de sécurité.

Pour les États-Unis, le Conseil de sécurité doit prendre des mesures pour la réduction des effectifs de la MINUK et envisager sa fermeture.  « Les millions de dollars dépensés pour cette Mission n’ont pas de sens », a affirmé la représentante, qui a plaidé pour une prolongation du mandat de la Mission de 6 à 12 mois au maximum.  Les États-Unis appuient également la candidature du Kosovo à toutes les organisations internationales, y compris Interpol, dont l’Assemblée de cette fin d’année va examiner la demande.  Mme Tachco conclu en invitant les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à rejoindre les 110 pays qui ont reconnu le Kosovo comme un État indépendant.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a appelé à la mise en œuvre de l’Accord de Bruxelles et a salué les efforts déployés par l’Union européenne pour faciliter le dialogue entre la Serbie et le Kosovo, notamment les déplacements de haut niveau effectués à Belgrade et à Pristina en février et mars 2018.  Il a salué les efforts réalisés pour opérationnaliser le secteur judiciaire au Kosovo mais s’est, en revanche inquiété de la lenteur des progrès à mettre en œuvre l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo.

Le représentant s’est également alarmé de la détérioration des relations depuis l’incident du 26 mars et a appelé Belgrade et Pristina à s’abstenir de toute action susceptible d’attiser les tensions ethniques.  Le représentant a aussi appelé la MINUK à continuer de promouvoir le dialogue politique et à renforcer la réconciliation communautaire.

M. SACHA LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a estimé que toute tentative de transformer la Force de sécurité du kosovo en une armée serait contraire à la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.  Il a ensuite condamné les actes de violence perpétrés contre le Directeur du Bureau du Gouvernement serbe pour le Kosovo-Metohija, M. Marko Đurić, et appelé les parties à la retenue tout en invitant les autorités kosovares à enquêter sur cet incident.  Il a aussi déploré que la lenteur de l’enquête sur le meurtre de l’homme politique serbe du Kosovo, Oliver Ivanović, perpétré le 16 janvier à Mitrovica-Nord.  En outre, il a indiqué que les responsables de crimes de guerre devaient absolument répondre de leurs actes, quelle que soit leur origine.

La Bolivie salue par ailleurs les efforts de médiation de l’Union européenne, notamment de sa Haute-Représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Federica Mogherini.  Le représentant a jugé important que les parties honorent les engagements pris et relancent ainsi le dialogue, qui semble dans l’impasse.  Il a aussi invité les autorités kosovares à faire avancer la mise en place de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo. 

Le représentant a salué le travail de la MINUK avant d’inviter les États Membres à contribuer au fonds d’affectation spéciale créé à l’issue des travaux du Groupe consultatif des droits de l’homme de la Mission afin d’aider les communautés rom, ashkali et égyptienne du Kosovo touchées par le saturnisme. 

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a fait valoir que son pays célébrait 10 ans de relations diplomatiques avec le Kosovo et a salué les étapes importantes franchies récemment par ce dernier, notamment la ratification de l’accord sur les relations de bon voisinage avec le Monténégro.  Il a appelé le Kosovo et la Serbie à progresser pour favoriser le dialogue.  Après avoir dénoncé tout agissement incendiaire, le représentant a estimé que la priorité au Kosovo devait être le renforcement de la primauté du droit et a salué la désignation rapide de Jack Smith, au poste de procureur spécial du Kosovo.  Il a ensuite appelé à accorder l’attention nécessaire aux incidents relatifs à l’expulsion de ressortissants turcs.

Le représentant a ensuite engagé les autorités du Kosovo à mener une enquête approfondie sur le meurtre d’Oliver Ivanović, et a engagé la Servie à s’abstenir de tout acte provocateur et à appuyer le déroulement de l’enquête.

M. Hy a par ailleurs jugé inapproprié et inefficace pour le Conseil de sécurité de passer autant de temps à débattre de la situation au Kosovo et a plaidé en faveur d’une présentation moins fréquente des rapports.  Il a aussi réclamé un examen stratégique de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK).

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale), qui a dit respecter l’indépendance et la souveraineté territoriale de la Serbie, a rappelé que la résolution 1244 (1999) restait la base de la résolution des différends entre Pristina et Belgrade.Il a salué la reprise du dialogue entre les deux parties sous les auspices de l’Union européenne, exhortant au respect des engagements pris, notamment la création de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo.La Guinée équatoriale juge inacceptables l’arrestation et la détention du Directeur du Bureau du Gouvernement serbe pour le Kosovo-Metohija, M. Marko Đurić.Le représentant a appelé à une enquête sur cet incident, tout en insistant sur l’importance de voir conclure l’enquête relative au meurtre de l’homme politique Oliver Ivanović, perpétré le 16 janvier.Pour le représentant, les parties doivent donner la priorité aux actions qui œuvrent à une paix durable et doivent trouver un règlement pacifique et durable à leur différend par la voie du dialogue.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) s’est dit en faveur d’une réduction de la périodicité de l’examen de la situation au Kosovo, avant d’appuyer l’examen stratégique de la MINUK recommandé par la Pologne.Saluant la reprise du dialogue entre Belgrade et Pristina sous les auspices de l’Union européenne, le représentant a appelé les deux parties à dépasser les tensions actuelles et à mettre en œuvre les accords agréés jusqu’à présent.Le Kosovo doit respecter et promouvoir l’état de droit, a poursuivi le représentant, qui a salué les mesures récemment prises pour réformer le secteur judiciaire kosovar, tout en ajoutant que « de nombreuses autres mesures devaient encore être prises ».Enfin, le représentant s’est félicité de la récente ratification de l’accord de démarcation frontalière entre le Kosovo et le Monténégro.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué la reprise du dialogue politique entre Belgrade et Pristina et celle des réunions des équipes techniques de négociation.  Il s’est dit préoccupé des incidents récurrents, comme la détention de Marko Đurić, le 26 mars, et le retard dans la mise en place de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe.

Le représentant a appelé au renfort de l’état de droit et de la confiance.  Il s’est inquiété du manque de progrès de l’enquête sur le meurtre d’Oliver Ivanović et a demandé des enquêtes sur les crimes atroces commis pendant le conflit au Kosovo.  L’adoption d’un nouveau code pénal s’impose aussi, a-t-il estimé.

Le représentant a aussi, enfin, appelé à une plus grande participation des femmes et des jeunes au processus de réconciliation, avant de dénoncer les actes de pillage du patrimoine culturel serbe.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé que son pays avait reconnu l’indépendance du Kosovo en 2013, avant de saluer la reprise du dialogue entre Belgrade et Pristina au niveau technique sous les auspices de l’Union européenne.  Il a invité les parties à mettre en œuvre les engagements pris dans le cadre de ce dialogue, notamment la création de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo, laquelle viendrait renforcer la confiance entre les parties. 

Le Koweït déplore la détérioration des relations entre Belgrade et Pristina, notamment après l’arrestation du Directeur du Bureau du Gouvernement serbe pour le Kosovo-Metohija, M. Marko Đurić.  Il s’est également dit inquiet de la lenteur des progrès accomplis dans l’enquête sur le meurtre de l’homme politique serbe du Kosovo, Oliver Ivanović.  Le représentant a enfin fait valoir que l’échange d’accusations entre les parties ne ferait que saper le dialogue entre elles.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a invité le Conseil à être attentif à la meilleure efficacité possible de la MINUK, afin que les moyens de l’ONU soient pleinement adaptés à la situation sur le terrain.  La stratégie pour les Balkans occidentaux publiée, le 16 février, par la Commission européenne témoigne de l’engagement des pays de l’Union européenne vis-à-vis des Balkans occidentaux, a-t-elle affirmé, et elle a « clairement rappelé la perspective européenne de ceux-ci, tout en insistant sur les efforts attendus pour progresser dans cette voie ».

Mme Gueguen s’est en outre félicitée de la récente ratification de l’accord de démarcation frontalière entre le Kosovo et le Monténégro.  Regrettant les incidents qui ont pesé sur le dialogue entre Belgrade et Pristina depuis janvier, la représentante a exhorté les deux parties à régler les difficultés par la voie du dialogue.  « Nous avons noté avec intérêt la réactivation par les autorités kosovares des structures en vue de la rédaction des statuts de la communauté/association des municipalités à majorité serbe », a-t-elle conclu.

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a souhaité que les parties veilleraient au bien–être de leur population et se garderaient de tout propos incendiaires.  Il a appelé au respect des solutions pertinentes du Conseil de sécurité pour trouver une solution satisfaisante pour l’ensemble des parties.  Il a salué les initiatives prises par Pristina et Belgrade en ce qui concerne la reprise du dialogue.  Pour la Chine, le Conseil doit rester saisi de cette question et inciter les parties à reprendre le dialogue.  Elle souhaite aussi que la mission EULEX joue un rôle constructif.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) s’est dit préoccupé par l’incident impliquant M. Marko Đurić et par le manque de progrès dans l’enquête sur le meurtre d’Oliver Ivanović.  Il a demandé la création de toute urgence de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe avant de souhaiter que les femmes soient associées à la vie politique au Kosovo.  Les jeunes ont également un rôle crucial à jouer pour prévenir les conflits et promouvoir la paix, a déclaré le représentant.  Enfin, il a dit sa conviction qu’une paix durable au Kosovo ne serait possible que si les parties mettent en œuvre les accords qu’ils ont signés et promeuvent le dialogue.

M. ILAHIRI ALCIDE DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire) a salué la ratification par le Parlement du Kosovo, le 21 mars dernier, de l’accord de démarcation de la frontière avec le Monténégro, y voyant une étape importante dans la normalisation des relations entre les deux États.  Il a réaffirmé le soutien de son pays à la poursuite du dialogue politique entre la Serbie et le Kosovo sous les auspices de l’Union européenne.  Il a déploré des signes de tension entre les parties, notamment l’arrestation et l’expulsion, le 26 mars dernier, de M. Marko Đurić, le négociateur en chef et Représentant des Serbes du Kosovo.  Il a invité la Serbie et le Kosovo à privilégier la voie du dialogue et à s’abstenir de toute action unilatérale susceptible de compromettre les perspectives d’un règlement pacifique des différends entre les deux pays.  Il a ensuite invité les autorités politiques du Kosovo à faire preuve de la volonté politique nécessaire afin d’éliminer tous les obstacles à la création de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe du Kosovo. 

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a estimé que la situation au Kosovo se détériorait et nécessitait un engagement politique constructif de la communauté internationale, notamment dans le cadre de la MINUK, d’autant plus que la mission EULEX prévoit de se retirer.  Il a regretté l’absence de progrès dans l’enquête sur le meurtre d’Oliver Ivanović.  On a l’impression que Pristina, ayant échoué à rejeter les faits sur la Serbie, préfère oublier cette question, a-t-il affirmé.

Le représentant a aussi dénoncé l’arrestation « brutale et humiliante », le 26 mars, du Directeur du Bureau pour le Kosovo et Metohija, M. Marko Đurić, y voyant un acte provocateur et mis en scène.  Pour la Fédération de Russie, de tels agissements mettent en péril la paix fragile qui existe dans la région et illustrent la situation lamentable qui prévaut au Kovoso en matière de maintien de l’état de droit.  M. Safronkov a dit ne pas comprendre la « complaisance ouverte » manifestée par la KFOR et l’EULEX qui, a-t-il regretté, se sont contentées de regarder l’incident sans réagir.  Cette politique d’intimidation est très dangereuse et risque de déboucher sur de nouveaux affrontements armés au Kosovo, a averti le représentant, qui a appelé les « protecteurs de Pristina » à faire pression sur leur protégé pour désamorcer les tensions.

Le représentant s’est ensuite inquiété du fait que Pristina cherche à transformer la Force de sécurité en forces armées à part entière, avec l’appui de l’OTAN et en utilisant la base militaire américaine de Bondsteel.  Il a appelé à cesser la création de ce « groupuscule » qui, a–t-il averti, risque d’être utilisé contre la population serbe.  Il s’est aussi inquiété du manque de transparence sur les activités de la base Bondsteel.  Il a dit être alarmé par l’interruption des contacts du commandant de la KFOR avec les représentants russes.  Il a appelé à revenir sur cette « mauvaise décision », plaidant par ailleurs pour la pleine mise en œuvre de la résolution 1244 (1999).

Tournant ensuite son attention sur la question de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe, le représentant a dénoncé la « complaisance flagrante » de l’Union européenne, l’accusant de n’avoir pas incité les autorités du Kosovo à respecter l’accord conclu pourtant sous son égide.  Il s’est aussi inquiété des pressions de plus en plus importantes exercées sur Belgrade pour la contraindre à reconnaître le Kosovo.  Le moment est inopportun pour forcer la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina avec l’imposition de calendriers artificiels, a-t-il mis en garde, avant de souligner une fois de plus que ce qui importe le plus, c’est la création de l’association ou communauté des municipalités à majorité serbe.

M. Safronkov a par ailleurs pointé les tentatives de retarder le début des travaux des Chambres spécialisées, soulignant que les personnes accusées de trafic d’organes humains devaient comparaître en justice.  Il s’est également inquiété de la lenteur des retours de personnes déplacées au Kosovo ainsi que des actes des vandalismes dirigés contre eux, avant d’appeler à accorder une attention toute particulière à la protection des sites orthodoxes au Kosovo.

Au vu de la situation actuelle, le représentant a jugé déplacé d’exiger de modifier le format de l’examen de la situation du Kosovo par le Conseil de sécurité.  Il a aussi appelé à ne pas mettre les pays de la région des Balkans occidentaux devant un faux choix, à savoir « avec nous ou contre nous ».

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) s’est dit en faveur d’une réduction « substantielle » de la périodicité d’examen de la situation au Kosovo, avant de demander un examen stratégique de la MINUK pour l’adapter à la situation sur le terrain.  Le Sommet Union européenne-Balkans occidentaux, cette semaine, sera l’occasion pour les deux parties de réaffirmer leur engagement en faveur d’un rapprochement européen, a-t-il déclaré, avant de saluer la récente ratification de l’accord de démarcation frontalière entre le Kosovo et le Monténégro.

Le représentant s’est ensuite inquiété des récentes expulsions de ressortissants turcs du Kosovo sans respect de la procédure judiciaire habituellement suivie.  Les autorités kosovares doivent respecter l’état de droit, a-t-il affirmé.  Il s’est en outre dit préoccupé par la lenteur de l’enquête sur le meurtre d’Oliver Ivanović.  Enfin, M. Orrenius Skau a exhorté Pristina et Belgrade à redynamiser leur dialogue en vue d’une normalisation de leurs relations.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a estimé que la situation au Kosovo appelle une diminution de la fréquence des rapports sur la MINUK, un avis qu’elle a dit être partagé par les membres du Conseil de sécurité issus de l’Union européenne.  Elle a aussi invité le Conseil à examiner le mandat de la MINUK afin de l’adapter à la réalité du terrain.  Pour la Pologne, un examen stratégique de la Mission serait opportun après presque 20 ans d’existence. 

La représentante a rappelé que la Pologne avait reconnu l’indépendance du Kosovo.  Elle a souligné l’importance de la poursuite du dialogue entre Belgrade et Pristina sous les auspices de l’Union européenne, ce qui devrait selon elle déboucher sur un accord contraignant sur la normalisation générale des relations entre les deux parties.  Les engagements déjà pris dans le cadre de ce dialogue doivent en outre être mises en œuvre car c’est un prérequis pour l’intégration des deux pays dans l’Union européenne, a rappelé Mme Wronecka.

Dans le cadre du renforcement de l’état de droit, la représentante a demandé aux autorités kosovares de s’en tenir à leurs obligations de soutien des travaux des Chambres spécialisées, non sans saluer les efforts faits pour que le système de justice pénale soit au niveau des standards internationaux et européens.  Elle a enfin salué la ratification, par le Parlement kosovar, de l’accord de démarcation de la frontière avec le Monténégro.

M. DAČIĆ, Premier Ministre adjoint et Ministre des affaires étrangères de la Serbie, reprenant la parole, s’est adressé directement aux représentants de plusieurs des États Membres du Conseil.  « Vous dites vous féliciter des 10 années de relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et le Kosovo, mais qu’en est-il des 170 ans de liens entre votre pays et la Serbie? a-t-il lancé au représentant du Royaume-Uni.  Cette année, a-t-il poursuivi, marque aussi 180 ans de relations diplomatiques de la Serbie avec la France, 170 ans avec la Russie, 137 avec les États-Unis, 119 ans avec les Pays-Bas, 101 ans avec la Suède, et 99 ans avec la Pologne.  Vous parlez à un vieil État avec lequel vous entretenez de veilles relations d’amitiés.  En outre, la Serbie a perdu 40% de sa population masculine pendant la Seconde Guerre mondiale et il importe de tenir compte de ces faits lorsque vous parlez de questions douloureuses pour nous, mais aussi de se souvenir de ce qu’a fait la Serbie pour ses alliés pendant les Première et Seconde Guerres mondiales.

Le Premier Ministre adjoint a souligné que la Serbie était prête à faire preuve de compromis, avant de faire observer que certains pays qui avaient reconnu le Kosovo avaient ensuite retiré cette reconnaissance car ils font à présent face à leur propre mouvement séparatiste.  De plus, a-t-il ajouté, les Albanais du Kosovo sont une minorité nationale, et non un peuple.  Le peuple albanais a déjà exercé son droit à l’autodétermination en créant l’Albanie.  Jamais je n’appellerais d’autres pays à violer votre intégrité territoriale, a-t-il déclaré.

M. Dačić a ensuite annoncé qu’un monument à l’honneur du Président Wilson, des États-Unis, devait être érigé prochainement en Serbie, ce dernier ayant défini à l’époque les liens entre son pays et la Serbie qui, a-t-il ajouté, est par ailleurs le seul pays au monde à avoir érigé un monument en l’honneur de la France.  Il a appelé les membres du Conseil de sécurité à ne pas renoncer à leurs vieilles amitiés sous prétexte d’en avoir établi de nouvelles.

Mme ÇITAKU, du Kosovo, reprenant à son tour la parole, a assuré que Pristina ne ménagerait aucun effort pour identifier les auteurs du meurtre d’Oliver Ivanović qui, a-t-elle souligné, s’exprimait ouvertement depuis Pristina contre l’intimidation et en dépit des menaces dont étaient l’objet les Serbes locaux du fait des agissements de Belgrade.

Mme Çitaku a ensuite souligné que l’indépendance du Kosovo n’était pas le fruit d’un mouvement séparatiste, mais celui de la dissolution de l’union non consensuelle de la Yougoslavie, évoquant notamment l’avis rendu par la Cour internationale de Justice à propos de la licéité de la déclaration unilatérale d'indépendance relative au Kosovo en 2008.  Notre État est jeune, mais notre nation est vieille et nous sommes fiers des liens que nous entretenons avec vous tous, et le Kosovo espère pouvoir bientôt signer un accord de relations diplomatiques avec la Serbie, a-t-elle affirmé en conclusion.

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