Soixante-treizième session,
16e séance – matin
AG/SHC/4234

La Troisième Commission débat des moyens de dialoguer avec les peuples autochtones et de promouvoir leur autogouvernance

Renforcer l’autonomie des peuples autochtones par le biais de la gouvernance, tel a été le plaidoyer adressé aujourd’hui devant la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, par la Rapporteuse spéciale sur cette question, Mme Victoria Tauli-Corpuz.

Mme Tauli-Corpuz, qui en avait fait une composante importante de son rapport, a insisté sur la nécessité d’un dialogue entre peuples autochtones, États et tous les autres acteurs concernés, afin de trouver les moyens de renforcer l’autogouvernance des autochtones.  Consciente des difficultés liées à la définition d’un « système d’autogouvernance des autochtones », eu égard à la diversité des nombreuses institutions autochtones, leur histoire respective, le contexte et les luttes menées qui ont permis de les façonner, la Rapporteuse spéciale a toutefois noté de nombreux exemples concluants de systèmes d’autogouvernance établis dans le cadre d’accords formels avec les États.

Ainsi, de nombreux systèmes de gouvernance traditionnelle ont prouvé qu’ils étaient bien plus efficaces pour le bien-être, la paix, la sécurité et le droit des peuples autochtones que l’action d’acteurs externes, a reconnu Mme Tauli-Corpuz.  De tels systèmes de gouvernance sont d’autant plus nécessaires que, comme l’a rappelé la Communauté des Caraïbes, partout dans le monde les personnes issues des peuples autochtones sont souvent plus pauvres que leurs concitoyens non autochtones.  « La réalité est même pire pour les femmes, enfants, jeunes, personnes âgées et personnes handicapées autochtones, plus « privés » que d’autres » a déploré l’organisation régionale.  Au nom des pays nordiques et baltiques, le représentant de la Finlande a fait le même constat et rappelé la nécessité de prendre en compte le besoin de participation des femmes autochtones, des jeunes et des personnes en situation de handicap dans toutes les institutions autochtones.

La Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes promeut la participation des peuples autochtones à la prise de décisions dans les affaires qui affectent leurs droits et insiste sur le devoir qu’ont les États de consulter les peuples concernés par le biais de procédures appropriées.  En son nom, le représentant d’El Salvador a également insisté sur le droit des peuples autochtones à préserver leur propre histoire, leurs idiomes, traditions orales, écritures et littératures.  Un besoin reconnu par l’Assemblée générale qui a fait de 2019 l’Année des langues autochtones, ce dont nombre de pays d’Amérique latine se sont félicités.  La disparition des peuples autochtones, de leurs langues et cultures pourrait représenter une perte encore plus grande que celle de la diversité ou les dommages à l’environnement, a fait observer le délégué du Saint-Siège, alors que le représentant de la Bolivie rappelait que 97% de la population mondiale ne parle que 7% des quelque 7 000 langues répertoriées dans le monde.

Mme Victoria Tauli-Corpuz a d’ailleurs précisé que l’usage de leur langue faisait partie intégrante de la gouvernance des peuples autochtones et a déploré que, lorsque des membres de ces peuples sont confrontés à la justice, ils n’aient pas accès à des services de traduction et ne puissent donc pas se défendre dignement.  Elle a d’ailleurs ajouté que, dans les pays où des systèmes multilingues sont en place, les résultats en matière de justice étaient bien meilleurs.  Plusieurs délégations d’Amérique latine ont mis en avant la pluralité de leurs langues officielles.

Un autre aspect essentiel des droits des peuples autochtones concerne l’accès à la terre et le rapport qu’ils entretiennent avec celle-ci.  « Tous les jours, quelque part dans le monde, les peuples autochtones sont dépossédés de leurs terres ancestrales, territoire et ressources », a déploré la représentante de l’Union européenne. 

Là aussi, les situations sont multiples à travers le monde.  La représentante des Fidji a rappelé que 87% des terres de l’archipel sont des terres autochtones inaliénables alors qu’au Brésil, 12% du territoire national est constitué de terres autochtones.  À cet égard, Cuba s’est inquiétée de voir que l’on continue d’incriminer ces peuples quand ils défendent leur droit à la terre.  Pire, l’Union européenne a rappelé que les personnes autochtones et ceux qui défendent leurs droits sont victimes d’intimidation et d’attaques, et parfois d’assassinats: en 2017, année à ce jour la plus meurtrière pour les défenseurs des droits de l’homme avec 197 assassinats répertoriés, les personnes issues des peuples autochtones étaient très largement surreprésentées.

Pour plusieurs délégations, la solution consiste à associer les peuples autochtones à la gestion des ressources naturelles de leur territoire, pour qu’ils puissent pour le moins, comme l’a dit le Canada, apporter leur consentement en toute connaissance de cause.

Des expériences diverses ont été présentées.  Ainsi, État insulaire confronté aux conséquences des changements climatiques, les Fidji ont dû commencer à évacuer et réinstaller certaines communautés côtières.  Leur représentante a expliqué que la première opération du genre s’est effectuée dans le cadre d’une approche holistique en vue de préserver et maintenir l’identité culturelle de la localité.

Il reste aussi que la définition même de peuple autochtone n’est pas toujours claire.  La représentante du Cameroun a estimé que chacune des 250 ethnies du pays pouvait se considérer comme autochtone dans sa région d’origine, tout en ajoutant que seul le groupe des Pygmées était officiellement considéré comme un peuple autochtone.

Lundi 15 octobre, à 10 heures, la Troisième Commission commencera l’examen de l’ensemble des questions touchant à la protection et la promotion des droits de l’homme et entendra dans ce cadre la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Déclaration liminaire

Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ, Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, a présenté ce qu’elle considère comme l’une des solutions possibles et importantes pour relever les défis auxquels sont confrontés les peuples autochtones à travers le monde: la protection et la promotion du rôle des institutions des peuples autochtones et des moyens de s’autogouverner.  C’est une composante importante de son rapport, qui en traite principalement sous l’angle du développement durable.

Mme Tauli-Corpuz a dit vouloir se concentrer, l’année prochaine, sur la thématique liée aux peuples autochtones et la gouvernance autonome, en « engageant un dialogue avec les peuples autochtones, les États, ainsi que d’autres acteurs pour aboutir à des recommandations sur les moyens de renforcer l’autogouvernance des autochtones ».  Un sujet que d’aucuns jugeront « très compliqué ou même polémique », a-t-elle reconnu.

La Rapporteuse spéciale s’est dite consciente de cette difficulté, ajoutant qu’elle l’avait constatée lors de ses diverses visites de pays, des communications avec les gouvernements ainsi que des études thématiques menées ces cinq dernières années.  Elle a toutefois aussi noté de nombreux exemples concluants de systèmes d’autogouvernance établis dans le cadre d’accords formels avec l’État et reconnus, soit dans la Constitution, la législation et les politiques, soit moins formellement au niveau des hautes sphères de l’État.

Mme Tauli-Corpuz a dit vouloir apprendre davantage de ces exemples car chaque jour apporte un exemple de cette pratique et son impact sur la réalisation d’un développement durable adapté.  Bien plus, ce développement durable est profitable aussi bien aux peuples autochtones qu’à la société au sens large, a plaidé la Rapporteuse spéciale.   

Mme Tauli-Corpuz a également jugé important de comprendre le rôle que les autochtones peuvent jouer dans le développement durable, notamment s’agissant de la bonne gouvernance, la participation et de la nécessité de ne laisser personne de côté, dans le cadre de ce système d’autogouvernance.

La Rapporteuse spéciale a néanmoins reconnu qu’il n’était pas aisé de décrire ou définir un « système d’autogouvernance des autochtones », eu égard à la diversité des nombreuses institutions autochtones, leurs histoires respectives, le contexte et les luttes menées, et qui ont permis de les façonner.  Selon elle, de nombreux systèmes de gouvernance traditionnelle ont prouvé qu’ils étaient bien plus concluants pour le bien-être, la paix, la sécurité et le droit des peuples autochtones que l’action d’acteurs externes.

Enfin, Mme Tauli-Corpuz a fait état des activités qu’elle a menées depuis l’année dernière, notamment ses visites au Guatemala et au Mexique.  Elle a aussi fait part de son inquiétude quant à l’accroissement de la violence et de la criminalisation à l’encontre des peuples autochtones.

Dialogue interactif

Lors du dialogue interactif avec la Rapporteuse spéciale, les Philippines se sont dites d’accord avec ses conclusions sur la résilience des systèmes de gouvernance autochtones et leur cohérence avec leurs cultures, valeurs et traditions.  Un mécanisme d’autogouvernance est d’ailleurs mis en œuvre dans l’archipel par le biais de la Représentation obligatoire des peuples autochtones, au sein de laquelle des communautés autochtones désignent leurs représentants par la sélection et non l’élection.

La Nouvelle-Zélande a rappelé que son Parlement garantissait la représentation des Maoris, tout en reconnaissant que beaucoup restait à faire pour améliorer l’autogestion autochtone.  C’est pourquoi un projet de loi va réintroduire le bien-être au niveau local pour améliorer les conditions de vie des communautés autochtones.  La délégation a demandé à la Rapporteuse spéciale des exemples de bonnes pratiques sur la façon dont les droits des autochtones sont appliqués dans le cadre du Programme 2030.  L’Afrique du Sud a déclaré avoir fait des efforts en matière de reconnaissance des structures traditionnelles des peuples autochtones mais s’est dite confrontée à des défis liées au dialogue avec ces institutions.  Pour y remédier, le Gouvernement a choisi de développer les capacités de ces institutions mais cela ne bénéficie pas nécessairement aux communautés.   En conséquence, elle a souhaité savoir quelles seraient les recommandations de Mme Tauli-Corpuz à cet égard.

Le Canada a mis l’accent sur la nécessité d’associer les peuples autochtones à des processus de prises de décision qui reconnaissent et respectent leurs droits.   Il a par ailleurs demandé à la Rapporteuse spéciale si des obstacles communs au développement de l’autogouvernance autochtone s’étaient fait jour lors de ses échanges avec les États Membres.  Les États-Unis ont affirmé avoir des rapports avec 573 tribus reconnues par le Gouvernement fédéral et tenir compte de leurs spécificités dans l’élaboration de leurs politiques et programmes.  Ils ont en outre organisé des consultations avec les tribus reconnues au niveau fédéral sur le rapatriement d’objets culturels, les violences contre les femmes et les filles, la frontière entre le Canada et les États-Unis et les critères en matière de consultation utiles.   

La Norvège a souhaité en savoir davantage sur le rapport remis au Conseil des droits de l’homme et notamment sur l’approche de tolérance zéro qu’il défend contre les violences visant des défenseurs des droits des peuples autochtones.  Ces derniers, a ajouté la délégation, ont un rôle essentiel à jouer dans la réalisation des objectifs de développement durable, notamment l’objectif 15.  L’Union européenne a dit partager les préoccupations de la Rapporteuse spéciale concernant les violences et la criminalisation dans le domaine des terres, assurant soutenir le travail des défenseurs des droits de l’homme, financer des programmes de renforcement des capacités et promouvoir des mécanismes de dialogue entre les institutions et les peuples autochtones.  À ce sujet, elle a demandé quel devrait être le rôle du secteur privé dans la protection des peuples autochtones et de leurs défenseurs.  

Le Mexique s’est félicité de la visite de la Rapporteuse spéciale et a réaffirmé l’engagement du pays en faveur des droits des peuples autochtones.  Il est disposé à tenir un dialogue constructif dans le domaine des droits de la personne pour les peuples autochtones et entend poursuivre sa collaboration avec le système onusien de protection des droits de l’homme.  Le Mexique souhaiterait en outre connaître les recommandations de Mme Tauli-Corpuz en vue de la célébration des langues autochtones en 2019.

 L’Équateur, qui prépare la visite de la Rapporteuse spéciale en novembre prochain, s’est dit disposé à dialoguer pour mettre en place des mécanismes bénéfiques pour les peuples autochtones.  Il a demandé à la Rapporteuse spéciale comment, dans le cadre de son mandat, elle comptait contribuer à la réussite de l’Année internationale des langues autochtones en 2019.

Le Brésil a jugé l’autogouvernance essentielle à la réalisation des objectifs de développement durable.  C’est un élément fondamental de la politique menée au Brésil, dont 12% du territoire national sont constitués de terres autochtones.  À cet égard, la délégation a souhaité connaître les recommandations de la Rapporteuse spéciale pour adapter au mieux l’autogouvernance aux politiques de santé et d’éducation.   

La Fédération de Russie a déclaré ne pas comprendre les « informations fausses » contenues dans le rapport de Mme Tauli-Corpuz à propos des peuples autochtones sur son territoire.  La Russie est un État fédéral où de nombreux peuples autochtones sont autogérés, a-t-elle fait valoir, ajoutant que la législation russe réglementait l’ensemble des aspects de la vie autochtone et prévoyait des assemblées de représentants des peuples autochtones.  Nous prévoyons aussi la participation de ces groupes dans l’adoption de questions touchant à leurs intérêts, a ajouté la délégation, qui a souhaité qu’à l’occasion de la poursuite de ses travaux, la Rapporteuse spéciale tienne compte de la spécificité des États multinationaux.       

Dans ses réponses, Mme Tauli-Corpuz a expliqué que l’une des principales recommandations de son rapport était d’inviter les gouvernements à travailler de bonne foi dans le cadre d’un dialogue approfondi avec les autochtones pour réaliser les objectifs de développement durable et garantir la mise en œuvre de la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Elle a ajouté que les États qui avaient entrepris ce genre de dialogue avaient rencontré des difficultés, mais qu’en fin de compte l’objectif d’un meilleur partenariat entre l’État et les populations autochtones avait été atteint.

Concernant le secteur privé, Mme Tauli-Corpuz a spécifié que ce dernier devait adhérer à des principes directeurs et mener à bien des processus respectueux dans le cadre des projets et investissements, surtout lorsque ces derniers ont des incidences sur les droits de l’homme ou l’environnement.  Si le respect des droits de l’homme relève en premier lieu de la responsabilité des États, le secteur privé a aussi une responsabilité concernant les droits de l’homme et les droits des peuples autochtones, a-t-elle rappelé.   

La Rapporteuse spéciale a noté qu’en matière de coopération entre États et peuples autochtones, de nombreux exemples existent, notamment dans le cadre de l’éducation, de la santé, des services sociaux fondamentaux et de l’atténuation des risques de catastrophes ou encore de la justice.  Elle a annoncé qu’elle reviendrait sur ces questions dans son prochain rapport car elles ont besoin d’être approfondies et développées.  Mme Tauli-Corpuz a en outre salué les efforts des peuples autochtones auprès des gouvernements pour qu’il y ait des services de santé et culturels et a constaté que les incidences étaient réelles sur les performances des peuples autochtones quand ces derniers étaient pris en compte dans l’élaboration des politiques.   

La Rapporteuse spéciale a remercié l’Assemblée générale d’avoir fait, de 2019, l’Année internationale des langues autochtones.  Elle a mentionné un atelier, tenu en Chine, sur la question et annoncé la publication prochaine d’une déclaration à sa suite.  Elle a également insisté sur le fait que les langues autochtones faisaient partie intégrante de la gouvernance des peuples autochtones et a déploré que, lorsque des membres de ces peuples doivent faire face à la justice, ils n’aient pas accès à des services de traduction et ne puissent donc pas se défendre dignement.  Elle a d’ailleurs ajouté que, dans les pays où des systèmes multilingues sont en place, les résultats en matière de justice étaient bien meilleurs.

Enfin, revenant sur ses recommandations visant à dépasser les obstacles actuels, Mme Tauli-Corpuz a mentionné en priorité le dialogue et l’engagement constructif avec les peuples autochtones.  « C’est la meilleure des approches.  S’il n’y a pas de véritable dialogue établi, les recherches montrent que le coût des projets augmente de 25% parce qu’il faut résoudre une série de conflits. »  La seule solution est que les États mettent en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a-t-elle conclu.

Discussion générale

M. GLENTIS THOMAS (Antigua-et-Barbuda), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a déclaré que, partout dans le monde, les personnes issues des peuples autochtones étaient souvent plus pauvres que leurs concitoyens non autochtones.  La réalité est même pire pour les femmes, enfants, jeunes, personnes âgées et personnes handicapées autochtones, plus « privés » que d’autres.  C’est pourquoi les États membres de la CARICOM continuent de travailler avec les communautés autochtones, afin de s’assurer que les droits de l’homme et le développement positif leur profitent également.  À cette fin, des interventions stratégiques sont réalisées sur les plans régional et national, à travers divers plans visant à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

La CARICOM attache une importance « vitale » au travail du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones, dont les financements permettent aux organisations représentatives des peuples autochtones, notamment le Groupe de travail sur les populations autochtones et le Forum permanent de fonctionner, de délibérer et de participer aux travaux des instances des Nations Unies, y compris au Conseil des droits de l’homme.  La CARICOM appelle les donateurs traditionnels et les nouveaux donateurs à continuer de contribuer au Fonds, dont le rôle a été reconnu, notamment dans le renforcement des capacités et de l’expertise de ceux qui en bénéficient, et dans la promotion de la coopération sur le plan international.

La CARICOM salue en outre les efforts du système des Nations Unies pour mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et les conclusions du document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones.  L’organisation régionale appelle tout le système des Nations Unies, les organisations non gouvernementales, les gouvernements et toute autre partie intéressée à tout mettre en œuvre pour parvenir aux objectifs de ces deux documents.  Elle attend enfin avec intérêt la célébration de l’Année internationale des langues autochtones en 2019. 

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a souligné que celle-ci appuyait la participation des représentants et institutions des peuples autochtones dans les réunions et les organes pertinents des Nations Unies, notamment lorsqu’il s’agit de questions qui les concernent.

Tout en rappelant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le représentant s’est félicité de la décision de l’Assemblée générale de déclarer 2019 Année internationale des langues autochtones et a souligné l’engagement de la CELAC de mettre en œuvre des programmes pour la promotion de ces langues, qui « font partie de nos cultures ». 

La CELAC réaffirme le droit des peuples autochtones à préserver leur propre histoire, leurs idiomes, traditions orales, écritures et littératures.  Elle réaffirme de même le droit des peuples autochtones à participer à la prise de décisions dans les affaires qui affectent leurs droits, ainsi que le devoir des États de consulter les peuples concernés par le biais de procédures appropriées et notamment à travers leurs institutions représentatives. 

Enfin, la CELAC estime que l’autonomisation économique, l’inclusion et le développement des peuples autochtones sont de nature à leur permettre une meilleure intégration sociale, culturelle et politique, et de faciliter ainsi l’édification de communautés durables et résilientes.

M. KAI SAUER (Finlande), au nom des pays nordiques et baltiques, a déclaré, que, pour ces pays, parvenir aux objectifs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones reste une priorité.  Pour ce faire, ils ont pris une série de mesures visant notamment à accroître la représentativité des peuples autochtones dans divers forums et institutions des Nations Unies.  Parmi ces mesures figurent des contributions au travail du conseiller du Président de l’Assemblée générale sur les questions autochtones.  Les pays nordiques et baltiques ont également participé au processus de consultations sur la participation des peuples autochtones aux travaux des Nations Unies.  Depuis l’adoption de la résolution sur ce sujet en septembre 2017, ils n’ont cessé leurs efforts continus en ce sens, a assuré le représentant.

Le représentant a ensuite jugé important de souligner le droit des peuples autochtones à l’autogouvernement, un des thèmes du rapport de la Rapporteuse spéciale.  Mais les États du groupe insistent en outre sur le besoin de participation des femmes autochtones, des jeunes et des personnes en situation de handicap dans toutes les institutions autochtones.  Il faut également se pencher sur la question des défis qui se posent à ces institutions, notamment le manque de ressources.  Car promouvoir les droits des peuples autochtones et reconnaître les défis auxquels ils sont confrontés est essentiel à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a conclu le représentant.

Mme DÖRTHE WACKER, Union européenne, a estimé que le rapport de la Rapporteuse spéciale confirmait les dires de nombre d’organisations non gouvernementales et d’autres titulaires de mandats de procédure spéciale, y compris sur les défenseurs des droits de l’homme, à savoir que les peuples autochtones et les personnes qui défendent leurs droits sont victimes d’attaques.  Rien qu’en 2017, année la plus meurtrière pour les défenseurs des droits de l’homme, pas moins de 197 meurtres ont été documentés, a rappelé la représentante.  Dans ce total, les personnes issues des peuples autochtones sont représentées de manière disproportionnée, a-t-elle dénoncé.

La Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones (EMRIP) et l’Instance permanente sur les questions autochtones n’ont cessé d’alerter sur le phénomène de l’accaparement des terres, a en outre rappelé Mme Wacker.  « Tous les jours, quelque part dans le monde, les peuples autochtones sont dépossédés de leurs terres ancestrales, territoire et ressources », a déclaré la représentante, déplorant que, très souvent aussi, ces phénomènes aient lieu dans les pays où les droits de ces populations sont censés être protégés, y compris dans la Constitution.

Face à ce phénomène, l’Union européenne estime que l’accaparement des terres résulte de l’absence de responsabilisation et de bonne gouvernance.  Là où ces dernières manquent, « il ne peut y avoir de gestion durable des terres, des ressources et de l’environnement », a déclaré Mme Wacker, assurant de la détermination de l’Union européenne à promouvoir le respect de l’état de droit, la bonne gouvernance et le développement.

À cette fin, les États membres de l’Union européenne ont adopté le nouveau Consensus européen sur le développement, qui réaffirme leur engagement en faveur d’une approche basée sur les droits de l’homme en matière de développement.  L’Union européenne soutient également les Directives volontaires pour une gouvernance responsable du foncier, des pêcheries et forêts.  Elle finance, dans ce cadre, différents programmes dans plus de 40 pays, et à hauteur de 240 millions d’euros, a aussi rappelé la représentante, entre autres initiatives de l’Union européenne.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique), qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis des peuples autochtones, a constaté que ces peuples continuent de faire face à d’importantes vulnérabilités partout dans le monde.  Il a souligné à cet égard la nécessité d’accorder une attention particulière aux éléments les plus vulnérables de ces peuples, à savoir les femmes, les filles, les handicapés et les personnes âgées.  Le représentant a par ailleurs jugé fondamentale la participation des peuples autochtones dans la mise en œuvre du Programme 2030.  Tous les États Membres devraient en tenir compte dans leur approche des objectifs de développement durable, a-t-il dit.

M. Sandoval Mendiolea a également encouragé les États, les institutions pertinentes et l’UNESCO à prendre une part active aux célébrations et actions prévues, en 2019, à l’occasion de l’Année internationale des langues autochtones, rappelant que, chaque semaine, une de ces langues disparaît dans le monde.  Le représentant s’est d’autre part félicité de l’engagement des États Membres à réfléchir aux moyens d’améliorer la participation des peuples autochtones aux décisions les concernant.  Il a enfin salué la décision d’étendre le mandat du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones et a appelé les États Membres à l’abonder.

M. AZIZ MOHAMED (Iraq) a affirmé que son pays se réjouissait de la Déclaration finale issue de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, en ce qu’elle réaffirme le respect et le renforcement de leurs droits.  Il a également salué le rôle important des Nations Unies à cet égard.  L’Iraq se félicite en outre du contenu de la Déclaration et renouvèle son engagement à veiller aux droits de ces peuples et à les promouvoir, afin de leur assurer une vie digne en conformité avec le développement durable, lequel forme le cadre idoine pour la consolidation des droits de l’homme.

M. ROMAN G. KASHAEV (Fédération de Russie) a déclaré que son pays avait toujours appuyé et continuerait d’appuyer les peuples autochtones dans la pleine réalisation de leurs droits.  C’est une priorité de la Fédération de Russie au niveau de la coopération internationale comme en politique intérieure, a affirmé le représentant, qui a ajouté que de nombreuses lois existaient dans son pays pour protéger et promouvoir les droits de peuples autochtones.

M. Kashaev a insisté sur l’importance de la relation entre le secteur privé et les peuples autochtones, expliquant qu’il existe dans son pays de nombreux accords triangulaires entre les organes de pouvoir locaux, les entreprises et les gouvernements.  Il a fait état de l’existence de mécanismes chargés de régler les situations conflictuelles, y compris le calcul des pertes causées par ces entreprises aux biens des peuples autochtones.

Le représentant a par ailleurs déploré des tentatives de politisation des discussions concernant les peuples autochtones et la volonté d’en faire une plateforme politique.  « Toute initiative entraînant les peuples autochtones dans des affrontements artificiels pour en faire des monnaies d’échange est inadmissible » a-t-il conclu. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a présenté quelques bonnes pratiques mises en œuvre dans son pays en faveur des peuples autochtones.  Rappelant son engagement en faveur de la mise en œuvre du Programme 2030, le représentant a souligné les mesures de son gouvernement pour intensifier les processus de dialogue et de concertation avec les peuples les plus vulnérables, dont les peuples autochtones.  Le Pérou a ainsi adopté une loi prévoyant la participation de ces peuples aux principales consultations.  Un groupe de travail associant les sept groupes autochtones les plus importants a par ailleurs été créé pour adapter les services publics aux traditions de ces peuples, a précisé le représentant, qui a expliqué que cette approche interculturelle était une obligation au Pérou.  De même, le pays a récemment adopté une législation établissant un régime de contrôle et de sanctions en cas de contact initial avec des peuples autochtones.  Enfin, une politique nationale visant à garantir les droits linguistiques des locuteurs autochtones a été adoptée en 2017.

Mme NICHOLAS-MACKENZIE (Canada) a jugé nécessaire de renouveler les relations entre les gouvernements et les peuples autochtones, notamment en reconnaissant leurs droits et en les réalisant.  Au Canada, cela signifie les droits naturels ou issus de traités, et le Gouvernement doit s’assurer activement qu’ils sont respectés et réalisés.  Cette reconnaissance, a poursuivi la représentante, est essentielle pour reconstruire des nations autochtones fortes, qui se gouvernent par elles-mêmes pour le bénéfice de toutes les communautés.  Elle passe par un dialogue inclusif et une participation significative.

L’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a été un premier pas, a poursuivi la représentante, qui a rappelé que ce texte reconnaît qu’il appartient aux États de décider de mesures à prendre pour en achever les objectifs, « en consultation et en coopération avec les peuples autochtones ».  Conformément à ce texte, le Gouvernement du Canada reconnaît aux peuples autochtones le droit de participer aux processus de prise de décisions qui affectent leurs droits, via des institutions représentatives, et dans le cadre de consultations et d’une coopération de bonne foi, afin d’obtenir leur consentement éclairé.  Le Canada est fier de faire partie des nombreux États Membres qui ont commencé de prendre des mesures difficiles pour mettre en œuvre la Déclaration, a poursuivi la représentante, qui a estimé qu’il fallait trouver avec les peuples autochtones les moyens d’explorer de nouvelles idées et de nouvelles voies pour parvenir à des accords qui reconnaissent leurs droits et promeuvent leur vision d’autodétermination, nécessaire pour parvenir à un monde durable pour tous.

Mme ADALI FRIAS (Mexique) a souligné que la question des peuples autochtones était profondément enracinée dans l’identité du Mexique, État multiculturel du fait des circonstances historiques, sociales et politiques.  Le Mexique s’attache à faire en sorte que les peuples autochtones bénéficient le plus possible du développement durable sur le sol mexicain.  Au niveau international, il défend les peuples autochtones au sein de diverses enceintes régionales et multilatérales.  La représentante a ainsi souligné que son pays avait été l’un des acteurs centraux des négociations qui ont abouti à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007.  Il promeut aussi les travaux de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, de l’Instance permanente de l’ONU sur les questions autochtones et du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones.  Enfin, le Mexique a présenté une initiative, lors de la trente-troisième session du Conseil des droits de l’homme, visant à proroger pour une période, de trois ans, le mandat de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones.

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a dit avoir l’honneur de représenter l’un des 23 pays qui ont ratifié la Convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Mettant en avant ses bonnes pratiques en matière d’association des peuples autochtones aux décisions les concernant, le représentant a souligné que ces peuples avaient vu leur participation politique augmenter ces dernières années.  À cet égard, il a dressé le portrait de deux femmes autochtones devenues les symboles de cette tendance.  Mme Sônia Guajajara a ainsi été la première candidate autochtone au poste de Vice-Président du pays, tandis que Mme Joênia Wapichana est devenue la première autochtone élue à la députation nationale.  Le représentant a assuré en conclusion que le Brésil travaillait activement à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et était conscient de la nécessité d’associer les peuples autochtones pour y parvenir.

M. FRANCISCO ALBERTO GONZALEZ (Colombie), qui a souligné l’importance du respect des législations internes et des institutions nationales qui garantissent les droits des peoples autochtones, a déclaré que la Constitution colombienne avait joué un rôle important dans la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Ces derniers ont bénéficié en Colombie de décrets qui leur permettent de bénéficier de leurs ressources.  La Colombie a également créé des mécanismes pour protéger les territoires possédés depuis longtemps par les peuples autochtones.  L’État colombien veut assurer la bonne gestion politique et administrative de ces terres et, à cette fin, a mis en place des transferts monétaires vers ces territoires, a ajouté le représentant. 

Le concept de bien vivre prévoit le droit des peuples autochtones de choisir leur modèle de développement, a poursuivi M. Gonzalez.  Le Gouvernement colombien veut garantir la diversité des perspectives, a-t-il ajouté.  La Colombie reconnaît la situation vulnérable dans laquelle se trouvent les peuples autochtones et fait des efforts pour garantir leurs droits, notamment en ce qui concerne le trafic de drogue, ou encore les activités minières et les déboisements illégaux, ainsi que la présence de groupes armés dans le territoire.

M. SILVERMAN (États-Unis) a fait part de la préoccupation de son pays face aux violences que subissent les femmes et les filles autochtones en territoire américain.  Il a fait état à ce sujet d’efforts critiques des autorités fédérales, expliquant que les femmes originaires d’Alaska et de tribus amérindiennes étaient plus sujettes que les autres à ce phénomène.  Selon le représentant, des programmes communautaires offrent aux survivantes des services et des appuis, l’aide fédérale visant, quant à elle, à améliorer la capacité des tribus à assurer la sécurité de leurs communautés. 

En outre, a ajouté le représentant, des enquêtes et poursuites sont engagées dans les cas de femmes autochtones ayant fait l’objet de traite des êtres humains et de disparition.  À cette fin, des procureurs spéciaux sont formés à ce type de procédure et les tribus bénéficient d’un accès croissant aux bases de données fédérales, a-t-il souligné, évoquant également la création d’un groupe de travail associant les États-Unis, le Canada et le Mexique sur ces problématiques.  Il a encore précisé que le Département de l’intérieur travaillait avec des groupes autochtones pour protéger leurs droits, notamment à la restitution de leurs biens.

Mme MERYL MICHELLE DIEDRICKS (Afrique du Sud) a expliqué que le pays continuait à prendre des mesures pour remédier aux défis socioéconomiques entre les communautés liés aux pratiques discriminatoires du passé dont la confiscation des terres, surtout sous l’angle du titre à la propriété.  Elle a ajouté que le Gouvernement d’Afrique du Sud se rendait compte qu’il ne pouvait y avoir de développement économique sans que soit réglée la question de la propriété de la terre.

M. JUAN MANUEL MONGELOS GALEANO (Paraguay) a souligné l’importance des peuples autochtones dans la promotion de son pays, à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières.  Il existe 19 groupes autochtones répartis sur notre territoire et tous font partie du patrimoine du pays, a-t-il insisté, notant que la Constitution nationale établit que le Paraguay est un État multiculturel, avec deux langues officielles, l’espagnol et le guarani.  C’est pourquoi le Paraguay se félicite que 2019 ait été proclamée Année internationale des langues autochtones.  Le pays a prouvé qu’il voulait mettre en œuvre les engagements pris dans le document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, a poursuivi M. Mongelos Galeano, ajoutant que cette mise en œuvre se faisait en étroite collaboration entre les peuples autochtones et les institutions gouvernementales compétentes.  Il a cependant reconnu que beaucoup restait à faire en matière de promotion et protection des droits des peuples autochtones et a réaffirmé l’engagement de son pays dans ce sens.

M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a expliqué que les droits des autochtones étaient protégés par la Constitution de son pays.  Il a rappelé qu’entre 2016 et 2018 le Gouvernement avait consacré un montant de 481 132 dollars au renforcement de la gouvernance territoriale des territoires autochtones.  Concernant la sécurité humaine et sociale, le représentant a expliqué que 31,4% du territoire national et 100% des titres fonciers demandés avaient été attribués à des personnes autochtones ou d’ascendance africaine, ce qui démontre « la volonté de l’État de garantir le bien-être » de ces derniers. 

Mme SUDMALIS (Australie) a souligné le rôle pivot de la femme autochtone dans l’autonomisation des communautés pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Souvent, la femme et la fille autochtones ont un parcours différent de celui des femmes non autochtones, notamment au vu des responsabilités qui leur incombent, et ce, depuis le plus jeune âge, a fait valoir la représentante.  Cette situation affecte négativement leur niveau d’éducation et leur accès à l’emploi.  C’est pourquoi le Gouvernement australien a lancé, en collaboration avec le Commissaire à la justice sociale pour les autochtones et insulaires du détroit de Torrès, un dialogue national dans le cadre duquel les femmes et les filles autochtones décrivent leurs forces, défis et aspirations au changement.  L’Australie encourage les idées faisant le parallèle entre l’autonomisation des peuples autochtones et le Programme 2030, a encore déclaré la représentante.

M. DIEGO ALONSO TITUAÑA MATANGO (Équateur) a déclaré que son pays s’était engagé depuis de nombreuses décennies à œuvrer en faveur de la préservation des langues autochtones et de la mise en place de systèmes éducatifs interculturels.  À l’heure actuelle, l’Équateur dispose d’un système d’enseignement interculturel bilingue et d’un cursus national d’éducation bilingue dans toutes les langues autochtones parlées au sein du pays, s’est enorgueilli le représentant, ajoutant qu’en juillet 2018, le pays avait créé un secrétariat du système d’enseignement interculturel bilingue, pour coordonner, gérer et évaluer les politiques publiques dans ce domaine.  De plus, a-t-il dit, l’Équateur a été l’un des pays à soutenir la proclamation de l’an 2019 en tant qu’Année internationale des langues autochtones.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a rappelé que la Constitution de son pays fournissait le cadre de base pour la protection et la promotion des droits des communautés marginalisées.  Bien plus, la Namibie, est partie à de nombreux traités et conventions qui sauvegardent le droit de tous les peuples.  La législation nationale a été promulguée conformément aux obligations stipulées dans les instruments internationaux.

En Namibie, les défis des communautés marginalisées comprennent, entre autres, l’absence d’accès à la terre de manière sécurisée, en plus d’un bas niveau d’éducation et d’un accès limité aux services de santé.  Le pays a lancé une série d’initiatives relatives notamment à la promotion de l’alphabétisation et de l’emploi à destination des peuples marginalisés.  Il s’agit également de programmes de « réinstallation » à travers le rachat par le Gouvernement d’exploitations agricoles de grande taille, à des fins de réinstallation.  Enfin, le représentant a indiqué qu’en application de la Loi sur les autorités traditionnelles, une communauté traditionnelle pouvait demander à l’État la reconnaissance de ses chefs traditionnels, un élément figurant d’ailleurs dans le rapport de la Représentante spéciale sur les droits des peuples autochtones.

Mme DESIRÉE DEL CARMEN CEDEÑO RENGIFO (Panama) a déploré les progrès limités en matière de protection des droits des peuples autochtones dans le monde et a insisté sur l’importance des efforts à fournir afin d’apporter une vie plus digne aux peuples autochtones.  En juin, le pays a signé un contrat de 80 millions de dollars avec la Banque mondiale pour soutenir la mise en œuvre du plan de développement intégral des peuples autochtones.  Elle a également spécifié que cette initiative, qui contribue à un modèle de développement global défini par le Gouvernement, est une première dans l’histoire du pays en ce qu’elle est le résultat d’un consensus national entre les 12 structures autochtones de gouvernance.

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a regretté que plus de 10 ans après l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, il existe toujours un fossé inquiétant entre autochtones et non-autochtones aux plans économique et social.  À ses yeux, il est essentiel que les États concernés intensifient leurs efforts pour protéger les droits des peuples autochtones dans la mise en œuvre de leurs priorités de développement.  De plus, a-t-elle ajouté, certains groupes autochtones continuent de subir des traitements injustes, notamment toutes formes de discrimination.  C’est pourquoi la représentante a appelé à multiplier les efforts pour la promotion et la protection de l’identité, la culture et les traditions des peuples autochtones, y compris le droit à une patrie et à la jouissance des ressources naturelles sur leur territoire, dans le cadre de la mise en œuvre de « nos objectifs communs en matière de développement ».  Enfin, Mme Ershadi a pris note avec satisfaction des recommandations faites par la Représentante spéciale sur l’importance de la reconnaissance du système de gouvernance des peuples autochtones et le rôle de ces systèmes pour que ces peuples ne soient pas les laissés-pour-compte.

Mgr TOMASZ GRYSA, Saint-Siège, a déclaré que, malgré les progrès réalisés, l’environnement ainsi que le patrimoine culturel et spirituel des peuples autochtones restaient menacés.  Aux niveaux local et national, les idéologies économiques et coloniales, sous la bannière d’un « soi-disant progrès » continuent de prospérer, sans aucune considération pour les droits des peuples autochtones.  Nulle part ailleurs dans le monde cela n’est plus vrai que dans le bassin de l’Amazonie, où des industries extractives et leurs intérêts ont conduit à dévaster et à dégrader l’environnement par la déforestation et le déplacement des personnes.  Il faut rompre avec le paradigme qui voit dans l’Amazonie et autres régions des sources inépuisables de richesses destinées à être exploitées, a déclaré le délégué, ajoutant que la disparition des peuples autochtones, de leurs langues et cultures pourrait représenter une perte encore plus grande que celle de la diversité ou les dommages à l’environnement. 

Mme MARÍA MAGDALENA CRUZ YÁBAR (Espagne) s’est enorgueillie du fait que l’Espagne soit l’un des seuls pays au monde à avoir élaboré une stratégie de coopération internationale dédiée aux peuples autochtones.  Le pays s’est de plus doté d’un cadre stratégique spécial en la matière, le Programme autochtone, qui dispose d’un budget propre et appuie des actions visant à promouvoir la participation politique des peuples autochtones dans le monde.  La représentante a ensuite expliqué les actions menées par l’Espagne, dans le cadre du Programme autochtone, en faveur de l’application de la Convention (n° 169) de l’Organisation internationale du Travail (OIT), via la promotion d’espaces de dialogue et la prise de mesures multisectorielles de confiance aux niveaux régional et national.

Par ailleurs, Mme Cruz Yábar a souligné que l’Espagne soutenait activement la cause des peuples autochtones dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, comme en attestent la participation et le rôle actif de l’Espagne à la première réunion des Hautes autorités ibéro-américaines sur les peuples autochtones, qui a eu lieu cette année.

M. RODRIGO ALBERTO CARAZO (Costa Rica) a renvoyé à l’article 1er de la Constitution de son pays, qui consacre le caractère pluriethnique et pluriculturel du pays.  À l’issue de deux années d’un processus participatif intense, le Costa Rica s’est, a affirmé le représentant, « acquitté d’une dette historique envers les peuples autochtones », en créant, en mars dernier, un instrument garantissant le consentement libre, préalable et éclairé avec des règles claires quant à leur participation pleine et effective à la prise de décisions à travers le Mécanisme général de consultations des peuples autochtones.

Ce mécanisme de dialogue et de participation avec les 24 territoires autochtones présents sur tout le territoire national est le premier en Amérique latine à avoir été mis au point sur la base du principe du « consentement libre, préalable et éclairé », à la suite de recommandations de la Rapporteuse spéciale et conformément aux normes énoncées dans la Convention (no 169) de l’Organisation internationale du Travail et dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Le représentant a précisé ensuite que la politique publique pour les peuples autochtones (2019-2024) du Costa Rica cherchait à promouvoir les conditions nécessaires à la garantie des droits individuels et collectifs de ces peuples, avec un accent interculturel, intergénérationnel et d’égalité des sexes.  Pour M. Carazo, il est fondamental d’inclure les peuples autochtones, par le truchement de leurs institutions et représentants, dans les activités de mise en œuvre des objectifs de développement durable, pour n’abandonner aucun autochtone sur le bord du chemin.  Le représentant a enfin expliqué qu’il restait encore à parachever un processus de réconciliation. 

Mme LILIANA STEPHANIE OROPEZA ACOSTA (Bolivie) a noté que, depuis l’adoption de la nouvelle Constitution en 2009, son pays était un État social unitaire de droit plurinational, indépendant, décentralisé et interculturel.  En outre, a-t-elle relevé, nous avons adopté une démocratie participative et communautaire et nous reconnaissons les différentes cultures caractérisées par leurs coutumes.

Onze ans après l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, des progrès importants ont été réalisés dans son application en Bolivie, bien que le chemin soit encore long pour sa mise en œuvre effective, a précisé la représentante, qui a jugé particulièrement important de promouvoir et revitaliser les traditions et les langues des peuples autochtones.  À cet égard, elle s’est félicitée que 2019 ait été déclarée Année internationale des langues autochtones, avant de rappeler que 97% de la population mondiale ne parlait que 7% des quelque 7 000 langues répertoriées dans le monde.  Sans mesures adéquates pour sauver les langues autochtones, nous perdrons la mémoire des peuples qui les parlent et contribuerons à la réduction de la pluralité linguistique, a-t-elle averti.

En Bolivie, a précisé Mme Oropeza Acosta, l’État reconnaît 26 nationalités et permet de suivre les programmes éducatifs dans quatre langues en plus de l’espagnol.  « Toutes les sociétés doivent écouter la sagesse ancestrale des peuples autochtones, qui montre comment respecter les formes de vie offertes par la terre nourricière », a encore déclaré la représentante.

Mme ROSA DALITUICAMA (Fidji) a souligné le lien sacré des peuples autochtones avec leur terre et leur environnement.  C’est pourquoi son gouvernement veille à leur fournir toutes les protections qui sauvegardent leur doit à l’autodétermination.  Aux Fidji, 87% des terres sont des terres autochtones inaliénables et la majorité des populations des Fidji sont des autochtones.  Tout comme les autres États insulaires, les Fidji font face aux menaces des changements climatiques et ont identifié près de 63 communautés côtières qui nécessitent une réinstallation en raison de la montée du niveau de la mer.  La représentante s’est félicitée que la première réinstallation de telles communautés, qui a concerné le village de Vunidogoloa en 2014, ait été menée dans le cadre d’une approche holistique en vue de préserver et maintenir l’identité culturelle de la localité.  Même le cimetière a été déplacé, a-t-elle fait observer.

M. AMIR HAMZAH BIN MOHD NASIR (Malaisie) a expliqué que le pays était riche de multiples ethnies et que les peuples autochtones du pays représentaient presque 13% de la population nationale, ajoutant qu’ils étaient les plus vieux habitants du territoire et contribuaient à la richesse du pays.  Reconnaissant les progrès de la Malaisie sur la voie du développement, le représentant a estimé que les populations autochtones s’adaptaient bien au processus de développement et a insisté sur l’importance de préserver leurs coutumes et croyances. 

En tant que Gouvernement responsable des droits de nos concitoyens, nous continuerons d’aider les peuples autochtones à relever les défis difficiles de la modernisation et de la vie complexe au XXIe siècle, a affirmé le représentant.  Ces droits, a-t-il précisé, sont protégés par la législation de 1954 sur les peuples autochtones.

Mme DARYNA HORBACHOVA (Ukraine) a déclaré que son pays garantissait aux Tatars de Crimée la jouissance de leurs droits dans l’État souverain et indépendant de l’Ukraine.  Leurs organes délibératif et exécutif -le Mejlis et le Kurultai- sont reconnus.  Mais, a fait observer la représentante, depuis le début de l’occupation temporaire de la Crimée en février 2014, les Tatars criméens et autres ethnies ukrainiennes font face à des exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, persécutions à motivation politique, discriminations, harcèlements, tortures, violences, y compris sexuelle, détentions arbitraires et internements psychiatriques.  Le dernier rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme fait même état de problèmes systématiques exigeant des mesures urgentes, a-t-il rappelé.  L’identité tatare semble être un crime dans cette région occupée, a poursuivi Mme Horbachova qui a appelé la Fédération de Russie à respecter la décision de la Cour internationale de Justice et à remplir ses obligations internationales en tant que Puissance occupante. 

Mme BANAKEN (Cameroun) a reconnu que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007 représentait une avancée significative.  Rappelant qu’elle était le résultat de « nombreuses années de négociation », elle y a vu le signe de la difficulté à atteindre un consensus autour du concept d’autochtones.  Pour sa part, le Cameroun compte 250 ethnies et chacune d’elles peut se considérer comme autochtones dans sa région d’origine, a ajouté la représentante, avant de préciser que seul le groupe des Pygmées était considéré comme un peuple autochtone.

M. CASTILLO SANTANO (Cuba) s’est félicité du fait que l’on assiste, depuis le précédent rapport de la Rapporteuse spéciale, à une augmentation des mesures positives prises par les États pour renforcer dans leur législation nationale la protection des peuples autochtones.  Le représentant a toutefois jugé préoccupant que l’on continue d’incriminer ces peuples quand ils défendent leur droit à la terre.  Afin d’harmoniser la législation foncière avec les droits collectifs de ces peuples, il est nécessaire qu’ils participent à la gestion des ressources naturelles sur le territoire où ils vivent, a plaidé le représentant, estimant que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 offrait une opportunité exceptionnelle pour mettre fin à la discrimination de ces peuples et leur permettre de devenir des acteurs du développement. 

Pour Cuba, la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones est un message clair en faveur de la survie de ces peuples.  Elle reconnaît également les relations spéciales de ces peuples avec leur terre, un lien qui est l’essence même de leur existence.  C’est pourquoi, a conclu le représentant, Cuba réitère son soutien aux demandes justes des peuples autochtones et appelle la communauté internationale à prendre des mesures concrètes afin de garantir la pleine jouissance de leurs droits civiques, politiques et socioéconomiques.

M. CERTA, du Fonds de développement pour les peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes (FILAC), a rappelé que cet organisme intergouvernemental, créé en 1992, avait pour but de contribuer aux processus d’auto-développement et de promotion des droits individuels et collectifs des peuples autochtones de la région.  Le FILAC compte aujourd’hui 22 États membres, 19 régions et compte aussi des représentants autochtones venus de chaque État membre.

Malgré les avancées engrangées, beaucoup reste à faire pour les droits de ces peuples, a souligné le représentant.  C’est pourquoi, le FILAC a facilité l’élaboration d’un plan d’action ibéro-américain pour la mise en œuvre effective de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Ce plan, a-t-il ajouté, s’appuie sur les objectifs de développement durable de l’ONU et incorpore la perspective autochtone dans le Programme 2030.  Il établit aussi des mécanismes de participation systématique et de dialogue avec les peuples autochtones et les États, tout en renforçant la participation des femmes autochtones aux politiques publiques destinées à combattre les violences auxquelles elles sont confrontées.  Au niveau international, le FILAC, en tant que coprésident du Groupe interagences pour les droits des peuples autochtones, continue d’appuyer la mise en œuvre du plan d’action des Nations Unies sur ces droits et à travailler à une meilleure coordination.  Le représentant a par ailleurs remercié les États ayant appuyé, en novembre 2017, l’adoption de la résolution 72/128 de l’Assemblée générale qui a accordé à l’organisation le statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale. 

M. EDGAR ANDRÉS MOLINA LINARES (Guatemala) a indiqué que son pays avait toujours été un promoteur de la lutte pour les intérêts des peuples autochtones.  Il a notamment été le premier pays, en 2012, à mettre en œuvre une évaluation de la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones et célèbre, cette année, les 400 ans du calendrier maya.  Soulignant qu’il est de la responsabilité du Gouvernement de consulter les peuples autochtones avant de mettre en place des politiques ou programmes les concernant, le représentant a précisé qu’un guide opérationnel avait été créé en 2017 à cette fin, cet instrument permettant d’orienter les autorités publiques dans leurs échanges avec les peuples autochtones.

M. Molina Linares s’est d’autre part félicité que 2019 ait été proclamée Année internationale des langues autochtones.  Il a rappelé à cet égard que le Guatemala comptait plusieurs langues et que le pays mettait la dernière main à une politique publique pour l’interculturalité.  Il s’agit, a-t-il dit, de garantir la participation de ces peuples aux institutions, au travers de leurs conseils traditionnels et ancestraux.  En conclusion, il a appelé les États Membres qui n’auraient pas encore reconnu leurs peuples autochtones à engager un dialogue avec ces derniers afin que l’on puisse appliquer la Déclaration onusienne de manière universelle.

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