La Troisième Commission ouvre ses travaux par un débat sur les moyens de réduire les inégalités sociales
Mettre en œuvre les recommandations du Sommet mondial sur le développement social, réduire les inégalités entre pays et à l’intérieur des pays, améliorer les dispositifs d’inclusion des personnes âgées ou en situation de handicap: c’est avec ce débat consensuel qu’ont débuté aujourd’hui, sur la base de rapports du Secrétaire général et d’une Experte indépendante des Nations Unies, les travaux de la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles.
En sa qualité de Président de la Troisième Commission, M. Mahmoud Saikal, Représentant permanent de l’Afghanistan auprès de l’ONU, a ouvert ce débat général après avoir présenté l’organisation des travaux et la planification des programmes.
Le Secrétaire général adjoint pour les affaires économiques et sociales, M. Liu Zhenmin, a lié l’objectif de développement social inclusif à la mise en œuvre du Programme 2030. Il a salué à cette occasion les avancées réalisées dans le domaine social ces dernières décennies, citant le chiffre d’un milliard de personnes sorties de la pauvreté depuis 1999.
Mme Daniela Bas, Directrice de la Division des politiques sociales et du développement social du Département des affaires économiques et sociales, lui a emboîté le pas en présentant les rapports du Secrétaire général soumis à la Troisième Commission au titre du développement social. Tous, a-t-elle souligné, mettent l’accent sur la notion d’autonomisation des personnes vulnérables, l’objectif étant de leur permettre de réaliser leur plein potentiel de façon à ce que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 devienne « une réalité pour tous ».
À cet égard, M. Dominic Allen, Chef du Partenariat des Nations Unies et du Bureau de New York des Volontaires des Nations Unies, est revenu sur le plan d’action concernant l’intégration des Volontaires dans le Programme 2030, précisant que 83% de ces derniers viennent de pays du Sud, ce qui, selon lui, a pour conséquences de renforcer la coopération Sud-Sud.
Dans ce débat aux larges ramifications, la question de l’impact du vieillissement sur le développement social a tenu une place importante après l’intervention de Mme Rosa Kornfeld-Matte, Experte indépendante de l’ONU chargée de promouvoir l’exercice par les personnes âgées de tous les droits de l’homme. Celle-ci a rappelé qu’avec 900 millions d’individus, les personnes âgées représentent aujourd’hui le segment de la population mondiale ayant la plus forte croissance. À telle enseigne qu’en 2050, pour la première fois dans l’Histoire, ce groupe dépassera en nombre celui des enfants de moins de 15 ans, a-t-elle souligné.
Mme Kornfeld-Matte a également mis en garde contre les risques d’exclusion des personnes âgées. À ses yeux, les objectifs de développement durable, qui s’adressent aux personnes de « tous âges », ne sont pas suffisamment explicites pour garantir que le troisième âge ne sera pas laissé pour compte. Elle a plaidé en conséquence pour que des mesures soient prises afin de combattre la discrimination à l’égard des anciens et qu’une nouvelle convention réunisse l’ensemble des textes existants. Un projet immédiatement rejeté par les États-Unis, qui ont fait valoir qu’aucun consensus n’existait en faveur d’une telle convention.
En écho à cet appel, la Slovénie a rappelé qu’elle était l’un des pays les plus concernés par le vieillissement parmi les États de l’Union européenne puisqu’au rythme actuel, 25% de sa population aura plus de 65 ans à l’horizon 2030. Or, ces personnes risquent de voir leurs droits humains bafoués. C’est pourquoi la Slovénie estime qu’il est de la responsabilité de chacun de plaider pour le renforcement et la pleine réalisation de tous les droits humains et des libertés fondamentales en faveur des personnes âgées, notamment dans le cadre du Programme 2030.
S’agissant des personnes handicapées, l’Union européenne a dit regretter que ces citoyens vulnérables continuent de rencontrer plus de difficultés sur le marché du travail et dans le système scolaire que les autres. Signataire de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, l’Union s’emploie à réviser sa Stratégie 2010-2020 en faveur de celles-ci, afin d’y intégrer les objectifs de ladite Convention.
Autre question récurrente lors de ce débat de fond, le thème des inégalités a été évoqué par de nombreuses délégations, à commencer par le Maroc qui, au nom du Groupe des États d’Afrique, a signalé que des disparités énormes subsistaient entre pays développés et en développement, et ce, en dépit des progrès ayant permis de sortir des millions d’individus de l’extrême pauvreté ces 15 dernières années. Une analyse partagée par le Groupe des 77 et de la Chine, lequel a estimé que les discussions à venir sur la mise en œuvre du document final du Sommet mondial pour le développement social devaient se centrer sur l’élaboration de stratégies et politiques publiques « concrètes » visant à résorber les inégalités.
La Troisième Commission a par ailleurs adopté la liste provisoire des titulaires de mandats spéciaux appelés à lui présenter leur rapport lors de la présente session, sous réserve d’un avis du Bureau des affaires juridiques concernant la venue du Président de la Commission d’enquête sur le Burundi, créée par le Conseil des droits de l'homme dans sa résolution 33/24 de 2016. Le représentant du Burundi a en effet vigoureusement contesté la base juridique d’une telle présence, faisant valoir que la résolution adoptée la semaine dernière par le Conseil des droits de l'homme lors de sa trente-neuvième session rendait caduque la précédente et qu’en outre, si le Conseil avait demandé à la Troisième Commission de lui communiquer son rapport, cela ne signifiait pas qu’il faille le présenter devant la Commission.
Enfin, la Commission a complété son bureau en élisant par acclamation Mme Lahya Itedhimbwa Shikongo (Namibie) à la fonction de Vice-Présidente, qu’elle partagera avec MM. Martin Kováčik (Slovaquie) et Edgar Andrés Molina Linares (Guatemala). La Rapporteuse est Mme Katharina Konzett-Stoff (Autriche).
La Troisième Commission poursuivra son débat général sur le développement social demain, mercredi 3 octobre, à partir de 10 heures.
DÉVELOPPEMENT SOCIAL
Déclarations liminaires
M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a déclaré qu’assurer un développement social inclusif était essentiel pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et des objectifs universels de développement durable. « Nos efforts collectifs doivent nous maintenir sur la bonne voie pour la réalisation des objectifs centrés sur les personnes et les cibles du développement durable » sur lesquels les dirigeants mondiaux se sont accordés en 2015, a-t-il poursuivi.
Le Secrétaire général adjoint s’est félicité des nombreuses avancées réalisées dans le domaine social ces dernières décennies, citant le chiffre d’un milliard de personnes sorties de la pauvreté depuis 1999. Des progrès ont été également enregistrés en matière de création d’emplois, de l’égalité des genres, de l’éducation et de la santé. Le même constat est valable en matière de mesures de protection sociale et de développement agricole et rural.
Globalement, les gens vivent plus longtemps, sont mieux éduqués et disposent de revenus plus importants, a poursuivi M. Liu. Il a, à cet égard, cité le cas de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie du Sud, où l’espérance de vie a augmenté de 11 années depuis 1990 et où les enfants en âge d’être scolarisés restent à l’école plus longtemps avec une moyenne de 3,4 ans, comparés à ceux de 1990.
Pour le Secrétaire général adjoint, la croissance économique a joué un rôle important dans ces progrès. Après quelques soubresauts, l’économie mondiale a montré une embellie, s’est-il réjoui, en voulant pour preuve le renforcement depuis 2016 des taux de croissance moyens à la fois dans les économies en développement et en transition. La croissance mondiale a atteint 3,1% en 2017 –le taux le plus rapide depuis 2001– dans un environnement favorable pour la promotion et l’amélioration du progrès social. Cependant, a-t-il nuancé, la croissance économique mondiale n’a pas été porteuse de bénéfices sur le plan social pour tout le monde, puisqu’en 2015, quelque 736 millions de personnes vivaient dans l’extrême pauvreté, la moitié d’entre elles en Afrique subsaharienne et près du tiers en Asie du Sud.
Les pays en conflit continuent en outre d’être touchés de plein fouet par la pauvreté et les privations. Fait inquiétant, a ajouté M. Liu, depuis quelques années le nombre de personnes souffrant de la faim a progressé dans le monde, passant de 777 millions en 2015 à 815 millions en 2016. Les personnes dans les situations de conflit sont extrêmement vulnérables à l’insécurité alimentaire, a-t-il fait observer.
Dans ce tableau sombre, les chocs climatiques se révèlent être l’un des principaux facteurs d’insécurité alimentaire: près de 39 millions et plus de 2 milliards de personnes sont affectées par le stress hydrique, a aussi fait observer le Secrétaire général adjoint.
Les avancées technologiques rapides ne sont pas en reste, puisqu’elles posent un véritable défi au développement. En effet, a-t-il expliqué, alors que les institutions de l’emploi et le marché du travail évoluent, les avancées ne sont pas équitables pour tous. M. Liu a dressé un constat amer: « les inégalités croissantes ne cessent de devenir le problème majeur de notre époque! ». Pour faire face aux inégalités et relever les défis de l’inclusion sociale, il a préconisé des politiques fiscales, des salaires et de protection sociale. Ces problématiques constitueront la priorité de la cinquante-septième session de la Commission du développement social prévue en février prochain, a enfin rappelé M. Liu.
Mme DANIELA BAS, Directrice de la Division des politiques sociales et du développement social du Département des affaires économiques et sociales, a présenté plusieurs rapports soumis à la Troisième Commission au titre du développement social. Tous mettent l’accent sur la notion d’autonomisation, qui est le thème du forum de haut niveau sur le développement social qui se tiendra l’an prochain, a-t-elle fait remarquer. L’objectif de l’autonomisation des personnes vulnérables vise à permettre à ces dernières de réaliser leur plein potentiel de façon que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 devienne une réalité pour tous.
Évoquant le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre des textes issus du Sommet mondial pour le développement social et de la vingt-quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale, Mme Bas a relevé qu’il souligne la nécessité de traiter la question de l’inégalité dans ses différentes dimensions pour que toutes les personnes parviennent aux objectifs du Sommet mondial, à commencer par l’éradication de la pauvreté dans le contexte du Programme 2030. Ce rapport fournit également des analyses sur les besoins particuliers de l’Afrique et des pays les moins avancés ainsi que sur les besoins des personnes vulnérables, qu’il s’agisse des femmes, des personnes handicapées ou des autochtones, a-t-elle précisé. Il montre par ailleurs que les inégalités de revenus des pays ont diminué depuis 1990, même si elles restent élevées.
On assiste toutefois à une augmentation importante des inégalités à l’intérieur des pays, a toutefois nuancé Mme Bas. Malgré l’accès à l’éducation, à l’eau potable, à l’assainissement et à la nutrition, il est indispensable d’agir. À cet égard, les progrès enregistrés montrent qu’avec un bon mélange de politique et d’activités, les institutions peuvent aider à surmonter les inégalités, a-t-elle commenté.
Le rapport consacré au vieillissement pose les questions transversales liées à la fourniture de soins aux personnes âgées, a poursuivi Mme Bas, indiquant que seuls 41% des États Membres ont, pour cette population, une politique de soins sur le long terme. Le nombre de personnes âgées ayant besoin de soins et d’un appui augmente en raison de la croissance démographique. Pour que ces soins soient de qualité et abordables, a-t-elle noté, il faut un investissement des États dans des services de soins, ce qui engendre des bénéfices et crée des emplois décents.
S’agissant du rapport du Secrétaire général sur la réalisation des objectifs de l’Année internationale de la famille et des mécanismes mis en œuvre pour y donner suite, il plaide pour la création de cadres nationaux pour concevoir et superviser des politiques de la famille, a poursuivi Mme Bas. Si de nombreux États Membres ont avancé sur cette question, notamment dans le cadre de l’Année internationale de la femme, il demeure indispensable de mettre au point des politiques au niveau national pour réaliser des objectifs de développement durable. Promouvoir la famille signifie que l’on promeut le bien-être des personnes de tous âges, a-t-elle expliqué, rappelant que l’objectif de la protection sociale qui vise la famille doit être universel.
Le rapport du Secrétaire général sur le développement sans exclusion pour les personnes handicapées fait apparaître que 15% des sept milliards d’individus que compte le monde sont handicapés, a encore souligné Mme Bas. Ce nombre augmente sans cesse, notamment en raison des conflits et des catastrophes mais aussi du fait de l’âge, facteur de handicaps ou de situations handicapantes. Dans ce contexte, la communauté internationale doit continuer à œuvrer pour assurer un développement de l’inclusion viable des personnes handicapées.
Comme le montre la Note du Secrétariat sur la réalisation des objectifs de développement durable par, pour et avec les personnes handicapées, la situation de ces personnes demeure grandement invisible, a déclaré Mme Bas. Les renseignements font en effet apparaître que 73% d’entre elles sont confrontées à des difficultés d’évacuation en cas de catastrophe ou de conflit. De même, les transports publics ne sont souvent pas accessibles à ces personnes. Il faut donc assurer un environnement propice pour permettre à ces personnes de participer pleinement à la société.
M. DOMINIC ALLEN, Chef du Partenariat des Nations Unies et du Bureau de New York des Volontaires des Nations Unies, est revenu sur le rapport triennal sur le plan d’action concernant l’intégration des Volontaires dans le Programme 2030. Il a rappelé que les Volontaires étaient administrés par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et que leurs activités visaient deux principaux objectifs: le développement des capacités des États et l’intégration du bénévolat dans le système des Nations Unies.
M. Allen a rappelé que 83% des Volontaires des Nations Unies dans le monde venaient des pays du Sud, ce qui a pour conséquences de renforcer la coopération Sud-Sud ainsi que la réalisation des objectifs de développement durable sur place. Il a également insisté sur le fait que l’Assemblée générale et la Troisième Commission avaient discuté à maintes reprises du rôle du bénévolat dans la société, et ce, à travers plus de 20 résolutions sur la question. M. Allen a également déclaré que le rapport du Secrétaire général était une réponse à la résolution 70/129, et qu’il prenait en compte de nombreuses contributions par les États Membres, la société civile et le milieu universitaire.
« Étant plus d’un milliard dans le monde, les bénévoles sont plus nombreux que les employés de toutes les grandes industries dans le monde », a encore fait observer M. Allen, et a insisté sur le rôle clef des bénévoles, notamment avant et après une catastrophe ainsi que dans le processus de paix.
M. Allen a conclu en revenant sur l’importance des ressources nécessaires au bon fonctionnement du programme des Volontaires des Nations Unies, expliquant que les contributions des États Membres pour l’année 2016-2017 s’étaient élevées à plus de 5 800 000 dollars.
Mme MARGARETE SACHS-ISRAËL, Coordinatrice en chef des Programmes à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), a présenté le rapport du Secrétaire général intitulé « L’alphabétisation, enjeu vital: définir les futurs programmes d’action et l’enseignement de la démocratie ». Elle a dressé un tableau alarmant de la situation de l’analphabétisme dans le monde, rappelant que 750 millions d’adultes, en majorité des femmes, sont touchés par ce phénomène. Davantage encore n’ont pas les prérequis pour les exigences de la vie quotidienne, a-t-elle ajouté, précisant que plus de 617 millions d’enfants et adolescents n’avaient pas le minimum de compétences en matière de lecture et de mathématiques à l’école.
Il est, dès lors, impératif d’envisager des politiques urgentes et d’accorder à cette situation une attention particulière, a insisté Mme Sachs-Israël. L’objectif 4.6 de développement durable reconnaît ce problème et réaffirme l’engagement des États Membres de veiller à ce que tous les jeunes et une proportion importante des adultes, aussi bien femmes qu’hommes, soient capables de lire et d’écrire à l’horizon 2030, a-t-elle rappelé. À cet égard, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 représente un important levier pour les gouvernements et leurs partenaires à même de cibler, en particulier, les membres des groupes marginalisés et vulnérables, quelques soient leur âge, en vue de leur assurer leur droit à l’éducation.
La vision 2030 pour l’alphabétisation est sous-tendue par la compréhension de l’alphabétisation, en tant que continuum des niveaux des compétences, qui peut être développée tout au long d’une vie, a poursuivi Mme Sachs-Israël. L’appel pour une approche d’alphabétisation à vie est fourni à travers une éducation formelle et informelle ainsi qu’à travers l’apprentissage informel, a-t-elle expliqué. Cela exige également une approche intersectorielle qui lie l’apprentissage à d’autres axes du développement durable. Cette notion élargie touche aussi bien les politiques que les programmes. Le rapport souligne les activités de l’UNESCO, visant le développement et la promotion du programme d’alphabétisation, menées depuis la soixante et onzième session de l’Assemblée générale
Mme Sachs-Israël a, en outre, dévoilé les six axes stratégiques de soutien aux États Membres sur cette question: « Intensifier l’alphabétisation pour la femme et la fille », « la qualité des programmes et de l’innovation », « renforcer les capacités et les systèmes d’évaluation et de suivi de l’alphabétisation », la recherche, la promotion des connaissances ainsi que la création de « villes apprenantes ». Elle a tenu à rappeler que l’UNESCO apportait l’assistance technique et renforçait les capacités nationales auprès d’États Membres sélectionnés en vue d’améliorer les politiques d’éducation, les stratégies, et les programmes d’alphabétisation pour les jeunes et les adultes.
Le rapport, a encore déclaré Mme Sachs-Israël, fournit également des informations clefs sur le Comité d’organisation des objectifs de développement durable -Éducation 2030, établi en 2016, et qui est le principal mécanisme de coordination globale pour l’objectif 4 de développement durable (« éducation de qualité »). Son objectif, a-t-elle rappelé, est d’harmoniser et de renforcer le soutien aux pays et partenaires et de mener des actions pour la réalisation des objectifs cibles liés à l’éducation dans le cadre du Programme 2030. Pour finir, la Coordinatrice en chef a préconisé d’investir davantage sur le plan national, et jugé impératif que les initiatives et mécanismes établis à l’échelle internationale pour le financement de l’éducation ciblent également l’alphabétisation des jeunes et des adultes.
Mme ROSA KORNFELD-MATTE, Experte indépendante des Nations Unies, chargée de promouvoir l’exercice par les personnes âgées de tous les droits de l’homme, a rappelé qu’avec actuellement 900 millions d’individus, les personnes âgées représentent le segment de la population mondiale qui a la plus forte croissance, ajoutant qu’en 2050, pour la première fois dans l’Histoire, ce groupe dépassera en nombre celui des enfants de moins de 15 ans. Toutes les régions du monde sont concernées, sans exception, a-t-elle insisté.
L’Experte indépendante a indiqué que le vieillissement de la population allait s’accompagner d’une hausse de la demande en technologies d’assistance aux personnes et en robots capables de veiller sur elles, pour effectuer des tâches que les humaines ne pourront ou ne souhaiteront pas assumer. Or, a-t-elle relevé, en l’état, aucune référence n’est faite à ces technologies d’assistance dans les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées, ni dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ou dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Cette situation est une source d’inquiétude car elle risque d’impacter gravement les droits fondamentaux des personnes âgées, a estimé Mme Kornfeld-Matte. Elle a donc appelé à une révision des normes existantes, en particulier de l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Mme Kornfeld-Matte a par ailleurs évoqué le risque d’exclusion des anciens, faute de ressources, de droits, de biens et de services dont ils seraient privés. Alors que plus de la moitié de la population mondiale vit en zone urbaine et que cette tendance s’accentuera fortement dans les prochaines décennies, l’embourgeoisement des quartiers pourrait contribuer à cette exclusion, la loi du marché se souciant peu du respect des droits, a-t-elle relevé.
Pour l’Experte indépendante, les objectifs de développement durables qui s’adressent aux personnes de « tous âges » ne sont pas suffisamment explicites pour garantir que le troisième âge ne sera pas laissé pour compte. Elle a plaidé en conséquence pour des mesures énergiques afin de combattre la discrimination à l’égard des anciens.
Débat interactif avec l’Experte indépendante
Le Qatar a insisté sur l’impact positif des politiques prises pour protéger les familles contre la violence, la pauvreté ainsi que l’exclusion, phénomènes ayant une incidence négative sur les droits fondamentaux des personnes. La représentante a demandé à l’Experte indépendante des détails sur ses activités et ses recommandations. Le représentant de l’Australie a dressé une liste des dispositions de son pays mises en place afin de permettre une aide médicale concernant aussi bien la santé physique que psychologique des personnes âgées. Il a ajouté être conscient du fait qu’il fallait faire plus pour les populations autochtones qui sont plus vulnérables.
Le Brésil a insisté sur l’exclusion sociale des populations âgées, faisant observer que certains groupes au sein de cette population étaient plus vulnérables aux mauvais traitements, notamment les femmes et les migrants. Le représentant a estimé qu’un instrument juridiquement contraignant sur la pleine jouissance des droits des personnes âgées pourrait établir des principes sur la façon de traiter ce sujet important. Pour sa part, le Brésil a adopté des mesures et des lois régionales dans ce domaine, mais il aimerait aller encore plus loin et, pour ce faire, souhaiterait savoir comment mieux travailler avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’Organisation internationale du Travail (OIT).
Le représentant de l’Union européenne a mis l’accent sur la priorité donnée par les États Membres à la sensibilisation aux droits fondamentaux, notamment sur les discriminations fondées sur l’âge. Il a estimé nécessaire de renforcer le cadre juridique dans d’autres domaines et a demandé à l’Experte indépendante ses suggestions sur la meilleure façon de procéder afin de permettre la participation des personnes âgées à la prise de décisions sur le lieu de résidence, et notamment celles connaissant l’exclusion sociale.
Le représentant de la Slovénie a insisté sur la nécessité de partenariats entre les parties prenantes et est revenu sur la question du logement des personnes âgées. Il a notamment expliqué vouloir trouver de nouvelles possibilités de logements acceptables pour les personnes âgées tel que par exemple la possibilité de cologement des personnes pour assurer une vie indépendante plus longue et a demandé à l’Experte indépendante ses recommandations.
Le Royaume-Uni a rappelé que le rapport présenté par l’Experte indépendante sur le vieillissement, le mois dernier au Conseil des droits de l’homme, posait le problème de l’exclusion sociale de ces personnes. On retrouve cette problématique dans le rapport du Secrétaire général sur le caractère transversal de la fourniture des soins à ces personnes, s’est félicitée la délégation, qui a souhaité savoir comment mieux préparer les personnes âgées aux difficultés de leur vie.
L’Argentine a demandé quelles mesures efficaces pouvaient être prises pour modifier la façon dont les sociétés perçoivent les personnes âgées. Elle a aussi souhaité savoir si les organes conventionnels étaient suffisants pour s’assurer que les traités en faveur des personnes âgées sont bien respectés. À cet égard, les États-Unis se sont dit en désaccord avec l’Experte indépendante quand celle-ci affirme que l’on ne peut assurer le respect des droits des personnes âgées sans une nouvelle convention. Il n’y a pas de consensus sur cette question, a fait valoir la délégation américaine, pour laquelle des instruments existants promeuvent déjà les droits de ces personnes et il n’est donc pas nécessaire d’en créer de nouveaux. Les États-Unis ont par ailleurs demandé à l’Experte indépendante si elle connaissait des directions intéressantes, en recourant aux techniques modernes, pour remédier à l’isolement des personnes âgées.
Le Chili a demandé quelles étaient, selon l’Experte indépendante, les mesures qui devraient être prises pour favoriser les personnes âgées dans le cadre de la réalisation des objectifs de développement durable. La Colombie a souligné le potentiel représenté par la robotique et l’automatisation dans l’aide aux personnes âgées. S’agissant du coût de ces technologies pour les pays à revenu moyen ou faible, elle a demandé comment ce transfert de technologies pourrait être rendu plus accessible dans le cadre de la coopération Nord-Sud.
La Namibie a indiqué que son gouvernement avait tenu compte des recommandations de l’Experte indépendante à la suite sa visite dans le pays. L’Afrique du Sud a estimé que, pour les soins à long terme, il était indispensable de faire participer les personnes âgées aux prises de décision les concernant. A cet égard, elle a souhaité savoir quelles interventions des Etats Membres pourraient faire en sorte que les droits fondamentaux de ces personnes soient préservés en toute circonstance.
Mme Kornfeld-Matte a, à propos du travail conjoint avec l’OIT et l’OMS, expliqué qu’en effet les questions du droit au travail, à la santé et, en particulier, aux soins devaient être perçues de façon globale. C’est pour cette raison qu’un travail conjoint a déjà été mis en place.
Au représentant du Qatar, elle a expliqué que de nombreuses recherches montraient que les personnes âgées voulaient rester vivre chez elles auprès de leurs familles et qu’il fallait donc les aider à être indépendantes tant que cela était possible. Pour ce faire, elle a insisté sur le fait que les États et la société civile doivent apporter leur contribution. Elle a cité en exemple la mise à disposition de logements pour les personnes seules n’ayant nulle part ou résider. Elle a ainsi mentionné le nécessaire accès aux transports en commun des personnes âgées, et notamment celles dans le besoin, pour se rendre par exemple chez le médecin ou encore rendre visite à leurs familles.
Aux États-Unis, elle a répondu en expliquant qu’il fallait garantir le suivi des politiques. Or, avec seulement 0,3% des résolutions de l’ONU mentionnant les personnes âgées, comment faire si ne sont pas indiqués expressément quels sont les droits des personnes âgées?
L’Experte indépendante a conclu en revenant sur le coût des technologies et notamment sur leur accès dans les pays à faible revenu. Toutes ces technologies ne sont pas nécessairement coûteuses, a-t-elle ajouté, et elles n’ont pas toutes à se matérialiser sous la forme de robots. Certaines, a–t-elle cité en exemple, prennent la forme d’un bracelet que les personnes âgées peuvent porter sur elles et qui permettent de faire en sorte qu’un feu de circulation reste plus longtemps au vert, pour leur donner le temps de traverser la rue.
Discussion générale
M. MOHAMED EDREES (Égypte), au nom du Groupe des 77 et la Chine, a estimé que les discussions à venir sur la mise en œuvre du document final du Sommet mondial pour le développement social devaient se centrer sur l’élaboration de stratégies et politiques publiques « concrètes » visant à résorber les inégalités actuelles dans la réalisation des objectifs fixés. « Nous devons prendre en compte les besoins spécifiques de l’Afrique et des pays les moins développés », a-t-il affirmé.
Dans cette perspective, M. Edrees a fait part de sa préoccupation quant aux « progrès inégaux » dans la réalisation des objectifs du Sommet mondial pour le développement social, principalement en raison, selon lui, des conflits, du ralentissement économique global, de la volatilité des marchés financiers, du taux de chômage élevé parmi les jeunes, des pandémies, des urgences humanitaires, de la corruption et des changements climatiques.
M. Edrees a également déploré la lenteur de la mise en œuvre des objectifs de développement durable dans les pays les plus pauvres et vulnérables. Pour le Groupe des 77 et la Chine, la coopération Nord-Sud demeure l’un des principaux facteurs du développement durable. Les pays développés devraient ainsi assumer la responsabilité principale du financement du développement. Partant de ce principe, M. Edrees a souligné que la coopération Sud-Sud devait compléter et non se substituer à la coopération Nord-Sud.
Par ailleurs, le représentant a invité les États Membres, au nom de son Groupe, à investir dans des politiques publiques nationales de promotion de la famille et d’autonomisation des femmes, ainsi que de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, tout en contribuant à l’intégration économique des personnes âgées et handicapées.
Enfin, M. Edrees a indiqué que son Groupe présenterait trois projets de résolutions: la première sur le Sommet mondial pour le développement social, la deuxième sur la seconde Assemblée mondiale sur le vieillissement et la troisième sur l’Année internationale de la famille.
M. OMAR HILALE (Maroc), au nom du Groupe des États d’Afrique, a estimé que s’attaquer aux inégalités, dans toutes leurs dimensions, était essentiel pour éradiquer la pauvreté, promouvoir le progrès social et parvenir au développement durable pour tous. Si certains pays ont enregistré des performances économiques remarquables au cours des 15 dernières années, permettant à des millions d’individus de sortir de l’extrême pauvreté et d’accéder à l’éducation et au système de santé, d’importantes inégalités subsistent entre pays développés et pays en développement, a-t-il constaté.
M. Hilale a ainsi observé que les pays africains restaient en dernière position dans tous les classements mesurant le développement social et l’activité économique, un phénomène qu’il a attribué partiellement aux crises économiques, financières et alimentaires, aux effets des changements climatiques, aux guerres civiles, aux conflits et à la pandémie du VIH-Sida. Dans ce contexte, le Groupe des États d’Afrique préconise un effort de financement des systèmes de santé nationaux et renouvelle son appel au soutien de la communauté internationale en faveur de l’Afrique dans les domaines de l’économie et du développement durable.
S’il n’existe aucune approche universelle pour combattre les inégalités, des stratégies générales peuvent néanmoins être mises en œuvre par la communauté internationale pour prévenir la hausse des inégalités tant au niveau national que mondial, a poursuivi M. Hilale. Cela peut, selon lui, être fait en soutenant une croissance à la fois inclusive et durable, en appuyant l’équité sociale, en permettant l’intégration des personnes vulnérables et en créant un environnement favorable à l’entreprise et à l’entrepreneuriat. Le représentant a aussi insisté sur l’importance pour le développement inclusif et durable de la démarche tenant compte de la problématique femmes-hommes.
Qualifiant le Programme de développement durable à l’horizon 2030 de jalon essentiel dans la recherche de l’égalité et de l’équité pour tous, le représentant a jugé que la mise en œuvre de l’objectif 17 (le partenariat) était d’une importance cruciale pour s’assurer que nul n’est laissé de côté. En renforçant les moyens de mettre en œuvre le partenariat mondial pour le développement durable, cet objectif soutient les autres en rassemblant la communauté internationale, la société civile et le secteur privé, a-t-il affirmé. M. Hilale a conclu en rappelant que l’Agenda 2063, adopté en 2013 par l’Union africaine, souligne la nécessité d’autonomiser toutes les personnes, notamment celles en situation de vulnérabilité, au travers d’une croissance inclusive qui crée des emplois décents, améliore l’accès à la protection sociale et fasse reculer la pauvreté.
M. COSMOS RICHARDSON (Sainte-Lucie), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a rappelé que les petits États insulaires en développement étaient soumis à de nombreuses vulnérabilités menaçantes. En dépit des défis émanant desdites vulnérabilités, ces États sont déterminés à améliorer le bien-être de leurs populations et à leur permettre d’atteindre leur meilleur potentiel, de façon que, de manière collective, elles bâtissent des sociétés résilientes.
Cet objectif est le pivot de la croissance dans les pays de la région, a poursuivi le représentant, indiquant que la CARICOM dispose d’un plan stratégique pour la résilience, couvrant la période 2015-2019. Ce plan est axé sur trois domaines: la promotion des initiatives de santé et de bien-être; la promotion du capital humain et la promotion de la sécurité et de la justice citoyenne.
La CARICOM, qui reconnaît la corrélation entre la bonne santé et le développement économique, salue par ailleurs les conclusions du dernier Sommet de haut niveau sur la tuberculose et les maladies non transmissibles, dans le contexte où ces maladies sont un des défis auxquels la région est confrontée. En réponse à ces défis, les pays de cette région ont lancé une initiative nommée « Caribbean Moves », dont le but est d’adopter une approche régionale dans le cadre de la lutte contre ces maladies. Ce programme vise une coopération entre États afin de minimiser les risques de propagation de ces maladies, a expliqué le représentant.
En plus de cette approche régionale du développement social, la CARICOM a adopté une démarche transversale et multidimensionnelle, a poursuivi M. Richardson. Un des aspects de cette approche vise à la réduction des inégalités. À cette fin, les États membres de l’organisation régionale travaillent assidument à la mise en œuvre de la Stratégie 2030 sur les ressources humaines et le développement. Celle-ci est principalement axée sur la réalisation de l’objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 relatif à l’éducation de qualité pour tous, sur un pied d’égalité, a expliqué M. Richardson.
Mme LINDA SCOTT (Namibie), au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a déclaré que le thème du Sommet des chefs d’État et de gouvernement de la SADC pour 2018-2019, « Promouvoir le développement des infrastructures et l’émancipation des jeunes pour un développement durable », reflétait la volonté de l’organisation régionale de faire des jeunes la pierre angulaire de son programme de développement.
À cette fin, la SADC compte promouvoir l’interconnectivité de la région et assurer l’accès à l’information, notamment par le biais de l’opérationnalisation de l’Université de la transformation, une institution virtuelle destinée à soutenir le programme d’industrialisation de la région. L’Université de la transformation s’inscrit dans la lignée des recommandations du Secrétaire général, qui a préconisé l’exploitation de la science, de la technologie et de l’innovation pour parvenir à un développement inclusif et durable.
La SADC, a poursuivi Mme Scott, demeure préoccupée par les conséquences de la crise économique et des inégalités qui affectent les personnes les plus marginalisées de nos sociétés. Pour en combattre les effets, les États membres de la SADC ont mis en œuvre le Plan stratégique indicatif de développement régional, qui vise à éradiquer la pauvreté et à favoriser le développement économique, notamment par la lutte contre le VIH/Sida et une plus grande égalité entre les sexes. En outre, les membres de la SADC s’attèlent à développer des plans d’urgence pour faire face aux sécheresses et autres phénomènes climatiques. La représentante a salué à cet égard l’aide fournie aux États de la région par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
M. MUHAMMAD SHAHRUL IKRAM YAAKOB (Malaisie), au nom des États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a déclaré qu’au cœur du développement social se trouve l’amélioration du bien-être de tous les individus de façon qu’ils puissent atteindre leur plein potentiel.
Dans le contexte de l’ASEAN, a-t-il ajouté, cela se traduit par la priorité donnée à la réduction de la pauvreté, à la facilitation de l’accès à l’éducation pour tous, à la promotion du bien-être des enfants et leur protection contre toutes formes d’abus ainsi que le renforcement des capacités des groupes marginalisés. Le représentant a ensuite dressé une liste des instruments et mécanismes régionaux mis en place par l’organisation régionale, citant en particulier la Déclaration de Kuala Lumpur sur le vieillissement de 2015 ou encore la Déclaration de Brunei Darussalam sur le renforcement de l’institution de la famille de 2010.
Le représentant a également indiqué que le développement social était vital dans la promotion de la paix et de la prospérité dans la région. À cette fin, l’ASEAN ne se limitera pas aux instruments déjà existants et continuera d’avancer vers la création d’une communauté plus inclusive et promotrice d’une qualité de vie élevée, protectrice des droits humains. Il a conclu en mentionnant que la région poursuivrait sa collaboration avec les agences des Nations Unis et ses partenaires pour soutenir le développement social de la région vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Mme FITZGIBBON de l’Union européenne a déclaré que, consciente de l’importance du développement social dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’Union européenne s’était félicitée de l’organisation, en novembre dernier à Gothenburg en Suède, du premier Sommet social européen de ces 20 dernières années. Par décision conjointe du Parlement européen, du Conseil de l’Europe et de la Commission européenne, les droits sociaux ont à cette occasion été proclamés Pilier européen. Ce nouveau statut sera utilisé à l’avenir comme une boussole pour faire la promotion du développement social en Europe et améliorer les conditions de vie et de travail dans l’Union. Ses 20 principes se divisent en trois grandes orientations: l’égalité des chances et de l’accès au marché du travail, des conditions de travail justes, ainsi qu’un mélange de protection et d’inclusion sociales.
Pour expliquer cette décision, la représentante de l’Union européenne a rappelé les difficultés rencontrées par les systèmes de protection sociaux des pays qui composent l’organisation d’intégration régionale. Aussi bien en termes de dépenses (retraites, santé…) que de rentrées d’argent (diminution de la main-d’œuvre), nos sociétés sont confrontées à la pression démographique a-t-il expliqué, et ce, sans compter « les nouvelles formes de travail qui défient la façon dont nous finançons, organisons et distribuons cette protection sociale ». « Conserver et faire évoluer nos modèles sociaux constituent sans doute le plus grand défi structurel auquel l’Europe aura à faire face dans la décennie à venir », a affirmé Mme Fitzgibbon.
Soulignant l’importance de l’apprentissage pour les adultes afin de répondre à l’évolution des besoins du marché du travail, la représentante a regretté que les moins qualifiés d’entre eux soient pourtant moins susceptibles que les autres à participer à ces formations. L’objectif de la Nouvelle stratégie pour les compétences en Europe est d’offrir le cadre pour faire évoluer cette situation et accompagner les changements. Mme Fitzgibbon s’est ensuite penchée sur la situation des jeunes travailleurs européens, pointant qu’ils sont substantiellement moins payés que leurs pairs plus âgés. C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, l’Union européenne a introduit une garantie qui dispose que toute personne âgée de moins de 25 ans doit se voir proposer une offre d’emploi de qualité, un apprentissage ou une formation dans les quatre mois qui suivent la sortie du système scolaire ou le début d’une période de chômage. « Chaque année depuis 2014, ce mécanisme a offert des opportunités à 3,5 millions de jeunes », s’est félicitée la représentante. « Le chômage des jeunes a atteint son plus bas niveau depuis le début des années 2000. Mais il faut poursuivre les efforts, en particulier à destination de ceux que nous ne parvenons pas encore à atteindre et soutenir », a-t-elle nuancé.
Mme Fitzgibbon s’est ensuite longuement étendue sur la notion d’équilibre famille-travail. Elle a insisté sur la nécessité de trouver des solutions permettant à chacun et chacune de choisir comment il ou elle veut mener sa vie, accompagner ses enfants, s’occuper de ses aînés ou poursuivre sa carrière. Elle a estimé que cela serait bénéfique à tous, et notamment aux femmes car cela leur permettra de participer comme elles le souhaitent au marché du travail, de ramener leur taux d’emploi au même niveau que celui des hommes et d’améliorer l’équité salariale entre les genres. À ce propos, la représentante a rappelé que la Commission européenne avait adopté en 2014 une « Recommandation relative au renforcement du principe de l’égalité des rémunérations des femmes et des hommes grâce à la transparence » ainsi qu’un plan d’action européen sur la question. Autant de raisons pour lesquelles le pilier européen des droits sociaux a été accompagné d’une initiative Équilibre Famille-Travail qui inclut de nouvelles normes minimales en termes de congés parentaux, une orientation politique, un meilleur soutien des hommes qui souhaiteraient prendre plus de congés et une réduction des facteurs économiques qui dissuadent les femmes de travailler.
Se penchant pour finir sur le sort des personnes handicapées, Mme Fitzgibbon a dit regretter que ces citoyens européens continuent de rencontrer plus de difficultés sur le marché du travail et dans le système scolaire que les autres. Signataire de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, l’Union européenne, a-t-elle assuré, est en train de réviser sa Stratégie 2010-2020 en faveur des personnes handicapées afin d’y intégrer les objectifs de ladite Convention.
Concluant sur le Consensus européen pour le développement, Mme Fitzgibbon a dit y voir la preuve de l’implication de l’Union européenne dans la réalisation des 17 objectifs de développement durable définis par les Nations Unies Ce consensus prévoit, a-t-elle rappelé, que les pays membres promeuvent l’égalité des genres et une approche du développement basée sur les droits humains.
M. SKINNER-KLEE (Guatemala), qui s’exprimait au nom du Groupe des amis des personnes âgées, a relevé la tendance à la hausse de sociétés vieillissantes et de personnes âgées, qui affecte de manière significative les structures démographiques des sociétés. Cela impose, selon lui, de nouveaux défis et exige qu’une attention particulière soit accordée à cette problématique. En effet, les personnes âgées peuvent contribuer de manière significative au développement durable dans leur société respective si des mesures adéquates sont mises en place.
Dès lors, il est impératif de veiller à la totale autonomisation pour qu’elles puissent contribuer effectivement, ne pas être uniquement récipiendaires de protection sociale, mais également agents actifs et bénéficiaires des changements. Pour finir, le représentant a souligné que le Groupe insistait sur une approche fondée sur le droit des personnes âgées dans la mise en œuvre des politiques et programmes liés à la dimension sociale du développement durable.
M. JONNE JUNTURA, délégué de la jeunesse de la Finlande, a commencé son intervention par une anecdote personnelle. « Le 13 mars 2014 est le jour qui a changé ma vie », a-t-il expliqué. « C’est ce jour-là que je suis tombé malade. Ce n’était pas une simple grippe, mais une maladie mentale; une anxiété suivie d’une dépression suivie par une anxiété encore plus profonde. (…) Ces troubles ont été suffisamment forts pour que je songe à mettre fin à mes jours.» Chaque année, a-t-il poursuivi, près d’un million de personnes passent à l’acte et commettent un suicide. Rappelant que moins de la moitié des personnes atteintes de troubles mentaux bénéficient du traitement adéquat et qu’une large part d’entre elles sont âgées de moins de 25 ans, il a plaidé pour qu’on prête rapidement attention à la santé mentale des jeunes.
M. Juntura a alors pointé les remparts qui barrent encore trop souvent l’accès aux services de santé mentale, la stigmatisation et les discriminations dont font l’objet ceux qui ont besoin de soins pour être des membres actifs de la société. « Ces remparts sont encore plus hauts pour certains groupes, comme la communauté des personnes lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres ou intersexuées, les femmes enceintes, les handicapés et les migrants », a même estimé le représentant. Selon lui, agir sur ce sujet est crucial si l’on souhaite atteindre les plus hauts standards de santé physique et mentale et construire la cohésion sociale des communautés de demain. « La maladie mentale n’est pas un échec », a-t-il conclu, « en citant l’ancienne Directrice générale de l’Organisation mondiale de la Santé, le Dr Gro Harlem Brundtland. Si échec il y a, il réside dans la façon dont nous accompagnons ceux qui en sont atteints ».
Mme NATALIE DANIELA HAAS (Autriche), s’exprimant au nom de la jeunesse autrichienne, a déclaré que les jeunes avaient peur d’un développement focalisé sur les différences et non les similarités, et étaient aussi préoccupés par la polarisation croissante des sociétés et par la démagogie. Ces peurs découlent des disparités factuelles et ressenties dans les opportunités, a-t-elle expliqué. Les jeunes sont souvent confrontés à des disparités face aux opportunités, en particulier s’ils viennent de groupes marginalisés. En conséquence, ils font souvent face à de multiples formes de discrimination.
Les jeunes ont pourtant la volonté extraordinaire de participer et de contribuer pour relever les défis d’aujourd’hui, a poursuivi Mme Haas. C’est dans ce contexte que l’Autriche est devenue le premier pays à autoriser le vote dès 16 ans à tous les niveaux politiques, offrant ainsi davantage de chances aux jeunes de façonner activement leur environnement. De plus, grandir dans une Union européenne pacifique qui favorise la prospérité, la paix et la liberté et garantit que nous pouvons vivre dans un environnement sûr nous donne la possibilité de prospérer, a ajouté la représentante.
Alors que la terminologie « objectifs de développement durable » semble abstraite à beaucoup de gens, les jeunes sont déjà familiers à des problèmes et des défis que ces objectifs cherchent à atteindre, a encore déclaré Mme Haas. Plus encore, de nombreux jeunes ont déjà trouvé des solutions novatrices pour relever ces défis. Cinquante-trois pour cent des jeunes Autrichiens sont ainsi engagés dans des activités de volontariat, constituant un pilier fiable de la société civile autrichienne, a notamment fait observer la représentante.
M. THOMAS BURRI (Suisse) a observé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 encourageait à concevoir des politiques en ayant les besoins des générations futures à l’esprit. Ceci s’applique aussi à l’engagement global consistant à « ne laisser personne de côté ». Bien que ces besoins soient difficiles à appréhender, nous pouvons dégager les besoins nécessaires, a estimé le représentant. Il est ainsi possible de ménager les caisses publiques en recourant par exemple à l’assurance pour indemniser les chômeurs ou assurer un revenu suffisant aux seniors, a-t-il fait valoir.
De telles mesures ne sont toutefois pas à la portée de tous les États, a reconnu M. Burri. En l’absence de moyens, il faut pouvoir se concentrer sur l’aide aux plus démunis, sans pour autant se détourner des générations futures. « Lutter contre la pauvreté répond à un devoir de justice et la prévenir représente un enjeu pour la postérité », a-t-il plaidé.
Pour le représentant, il y a intrinsèquement une dimension durable dans les politiques sociales. C’est particulièrement vrai dans les mesures d’insertion ou de réinsertion professionnelle. En outillant l’individu pour qu’il subvienne à ses besoins, on s’inscrit dans une perspective durable, a souligné M. Burri, précisant que l’insertion professionnelle des jeunes était une priorité publique en Suisse. Il a d’autre part souhaité que la communauté internationale n’oublie pas de réfléchir aux causes réelles de la pauvreté, l’ONU ayant un rôle essentiel à jouer dans ce cadre, au travers notamment de la Commission du développement social.
M. Burri a ensuite donné la parole à M. TRISTAN ROBERT, délégué de la jeunesse pour la Suisse, lequel a jugé que la cohésion constituait un aspect essentiel de toute société désirant se développer de manière pacifique. Mettre en œuvre cette cohésion nécessite d’être à l’écoute de toutes les composantes de la population, et en particulier des personnes en situation de vulnérabilité, a-t-il fait valoir. Garantir une insertion sur le marché du travail est ainsi primordial pour les jeunes comme pour les travailleurs âgés. Cohésion rime aussi avec tolérance, a-t-il ajouté, appelant à l’inclusion des minorités, notamment des populations migrantes, et à la mixité sociale qui favorise le « vivre ensemble ». Il a enfin plaidé pour une éducation de qualité, ouverte et accessible à toutes et à tous afin de ne laisser personne de côté.
Mme KARUGU (Kenya) a noté qu’aucun pays ou région n’était épargné par les inégalités sociales et économiques. S’agissant de l’Afrique, elles se sont même aggravées, alors que les États du continent s’efforcent à améliorer la situation, a-t-elle constaté, soulignant la difficulté pour ces pays de réaliser les objectifs définis par le Sommet mondial pour le développement social à Copenhague. Cette montée des inégalités, facteur de conflits, favorise la radicalisation et l’extrémisme violent, aux dépens d’une jeunesse vulnérable, a-t-elle déploré.
Dans ce contexte, a précisé la représentante, le Gouvernement du Kenya continue de travailler inlassablement à la réduction des inégalités au sein de sa population en faisant profiter cette dernière du développement social. C’est ainsi que la Constitution de 2010 contient des dispositions garantissant les droits économiques, sociaux et culturels de tous les Kenyans, notamment des citoyens défavorisés et de leurs familles. Au-delà de la sécurité sociale, le Gouvernement fournit également une assistance sociale au travers d’incitations monétaires et entrepreneuriales. Cette aide prend notamment la forme de programmes d’allocation sous conditions, destinés aux personnes en situation de handicap, aux orphelins et aux personnes âgées. Plus d’un million de foyers kenyans en ont déjà bénéficié, a indiqué Mme Karugu.
Le Kenya s’emploie par ailleurs à fournir une couverture santé universelle à tous ses citoyens, a poursuivi la représentante. Le pays prévoit en outre d’accroître la sécurité alimentaire, la disponibilité de logements abordables et le secteur manufacturier. Cet ensemble de mesures vise en particulier à permettre l’inclusion des femmes et des jeunes, catégories figurant parmi les principales victimes des inégalités sociales. Mme Karugu a enfin réaffirmé l’engagement du Kenya en faveur du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de ses objectifs, au nombre desquels figurent le recul des inégalités et l’éradication de la pauvreté.
Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie) s’est concentrée sur les droits des personnes âgées eu égard à l’évolution démographique aussi bien dans les pays en développement que dans ceux développés. La Slovénie est l’un des pays les plus concernés par le vieillissement parmi les États de l’Union européenne, puisque à la cadence actuelle, 25% de la population slovène aura plus de 65 ans à l’horizon 2030.
Or, ces personnes sont susceptibles de voir leurs droits humains bafoués, a estimé la représentante. C’est pourquoi la Slovénie, qui appelle à la pleine mise en œuvre du Programme 2030 pour le développement durable, estime qu’il est de la responsabilité de chacun de plaider pour le renforcement et la pleine réalisation de tous les droits humains et des libertés fondamentales en faveur des personnes âgées.
La représentante a ensuite laissé à sa place à une représentante de la jeunesse slovène, Mme URŠA SVETELJ. Celle-ci a réclamé une augmentation de la participation des jeunes à l’échelle mondiale, estimant que la génération actuelle prend très au sérieux la problématique de l’égalité à l’échelle mondiale. Désormais, « nous ne nous demanderons plus quel pays dispose du PIB le plus élevé, mais nous nous interrogerons plutôt sur le point de savoir quel pays agit le mieux pour le monde », a-t-elle déclaré. Et si « nous arrivons à promouvoir cet esprit au sein de nos sociétés, alors ce serait là, une avancée fabuleuse! », a-t-elle conclu.
Mme JAHKINI BISSELINK (Pays-Bas) a dit vouloir parler au nom des groupes marginalisés, qui n’ont pas eu la chance, comme elle, de fréquenter l’université. Elle a expliqué avoir elle-même été confrontée à cette impression d’exclusion, avec toutes les conséquences qui en découlent: démotivation, sentiment d’être un poids pour la société…. Ce sentiment, de nombreux jeunes aux Pays-Bas y ont été malheureusement confrontés, a ajouté la représentante. Il s’agit en général de groupes vulnérables, marginalisés souvent à cause de leur ethnicité, croyance ou orientation sexuelle. Cette polarisation sociale, ce sentiment de rejet, est, selon elle, un des facteurs de l’extrémisme violent. Mme Bisselink s’est adressée directement aux pays occidentaux pour leur dire que les objectifs de développement durables relatifs aux inégalités, à la jeunesse, à la paix et à la sécurité et à l’éducation ne sont pas uniquement applicables aux pays en développement: « Nous, en tant que pays développés, avons beaucoup à faire » à cet égard, a-t-elle affirmé.
Mme NORAH ABDULAZIZ H. ELGIBREEN (Arabie saoudite) a déclaré que son pays avait mis en place une politique de promotion du volontariat afin d’encourager la population à se porter volontaire. Concernant les handicapés, elle s’est félicitée des conclusions du rapport du Secrétaire général et a mentionné que le pays mettait l’accent sur les besoins des personnes handicapées dans leurs politiques.
Les personnes âgées occupent une place spéciale en Arabie saoudite, a affirmé la représentante, ajoutant que des programmes et des centres spécifiques, comme le Centre social du Roi Salman, leur donnaient la possibilité de contribuer à la société en partageant leurs savoirs et expériences.
Mme Elgibreen a en outre mentionné un décret royal qui met l’accent sur l’alphabétisation des adultes et a conclu en affirmant que le développement social nécessitait la contribution de tous les pays et le partage d’expériences.
Mme ANA SILVIA RODRÍGUEZ ABASCAL (Cuba) a déclaré que, pour que l’espèce humaine survive, il fallait que prévalent la justice sociale, la solidarité, l’égalité et le respect des droits des peuples et de tous les êtres humains. Quant aux mesures mises en place par Cuba à l’attention de la jeunesse, la représentante a mentionné qu’elles donnaient la priorité à la formation et à l’insertion professionnelle, à la participation dans les processus de discussion et l’adoption des décisions ainsi qu’à la représentation dans les principales instances politiques du pays.
En 2030, la population cubaine de plus de 60 ans atteindra 3,3 millions de personnes, a déclaré la représentante. C’est pourquoi Cuba fait des personnes âgées une priorité, afin de garantir la qualité de vie de ce segment de la population.
Malgré l’embargo que subit le pays depuis six décades, embargo qui affecte directement le développement social du pays, Cuba continue de réaliser des progrès notables en direction de la réalisation des objectifs de développement durable, a affirmé Mme Rodríguez Abascal. Cuba contribue même au développement social d’autres pays, a ajouté la représentante, qui a cité l’envoi de plus de 55 000 professionnels de la santé dans plus de 67 pays.
Mme AKANE MIYAZAKI (Japon) a souligné que son pays accordait une grande importance à l’autonomisation holistique de tous les individus, en particulier les femmes, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les jeunes et les personnes lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT). D’un point de vue de la sécurité humaine, le Japon a pris des initiatives d’abord sur le plan national pour édifier une société où chacun peut participer sans discrimination, et ce, à travers une politique de sensibilisation, traitant les disparités économiques et la pauvreté ainsi qu’en promouvant l’environnement du travail.
Au plan international, le Japon veille à ce que personne ne soit laissé de côté, notamment à travers sa contribution en soutenant les personnes handicapées et le développement social en Afrique, a poursuivi la représentante. Elle a, à cet égard, indiqué que son pays saisirait l’opportunité des Jeux paralympiques d’été 2020 à Tokyo pour promouvoir cette catégorie de personnes dans divers domaines, y compris le sport. Elle a rappelé, par ailleurs, que depuis 2014, le Gouvernement japonais abrite « l’Assemblée mondiale pour les femmes » (WAW) pour promouvoir une société où la femme est mise en avant et donne rendez-vous à l’assistance en mars prochain pour un symposium du « WAW ».
Pour M. RONNIE HABICH (Pérou), le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ses objectifs de développement durables offrent de transformer le monde avec une approche axée sur l’individu sans laisser personne sur le bord de la route. Le représentant a, à cet égard, appelé à autonomiser les personnes, notamment les plus vulnérables. Il a fait part en ce sens de l’expérience de son pays, qui a fait du développement social un des axes de son programme de politique générale 2021, année du bicentenaire du Pérou. Il a ainsi évoqué le plan multisectoriel consacré à la lutte contre l’anémie.
Le Pérou, qui préside la Conférence régionale sur la population et le développement de l’Amérique latine et des Caraïbes pour la période 2018-2020, réaffirme son engagement pour faire progresser les sujets abordés dans le cadre du Consensus de Montevideo, a affirmé M. Habich. Au plan national, le Pérou s’est fixé comme objectif de réduire la pauvreté à 15% de la population et à assurer que les populations aient accès aux services de base. Le Pérou veut également axer ses efforts sur la réduction de la vulnérabilité et assurer aux générations futures un avenir sûr et confiant, a ajouté le représentant.
M. FIRAS HASSAN JABBAR AL-KHAQANI (Iraq) s’est félicité de l’intérêt accordé par la communauté internationale à la problématique des personnes âgées, citant à cet égard la résolution de l’Assemblée générale qui a fait du 1er octobre de chaque année Journée internationale des personnes âgées. Une Journée qui permet de mettre la lumière sur cette catégorie de personnes et leur permettre de bénéficier des dividendes du développement. En Iraq, l’accent est mis en faveur des catégories les plus démunies et vulnérables -personnes en situation de handicap, âgées, jeunes, femmes…- en coordination avec la société civile, les partenaires locaux et les médias, a expliqué le représentant.
À l’endroit des jeunes, des projets au plan gouvernemental visent à répondre aux besoins des jeunes et soulignent leur rôle dans le développement, a expliqué le représentant. À cet égard, un fonds d’aide leur a été consacré par le Ministère de la jeunesse pour le développement et le lancement de microprojets. Par ailleurs, M. Al-Khaqani a jugé impératif de poursuivre la lutte contre le fléau persistant de l’analphabétisme dans le monde entier et de garantir un financement suffisant pour atteindre cet objectif. Il a appelé à opter pour des approches efficaces et faire participer tous les secteurs et parties prenantes.
M. CHAUDHARY JAWAD ALI CHATHA (Pakistan) a souligné le lien inextricable entre le développement social et la croissance économique qui sont complémentaires et se renforcent mutuellement. De fait, ce n’est pas une coïncidence si le Programme de développement durable à l’horizon 2030 met les peuples et la prospérité au centre de ses priorités, a jouté le représentant, qui a fait observer que, malgré d’énormes progrès accomplis sur le chemin de la réduction de la pauvreté globale, de grandes disparités demeuraient entre les régions et au sein des États eux-mêmes.
Au Pakistan, a poursuivi M. Ali Chatha, l’éducation est perçue comme un investissement judicieux dans le futur. Mieux, elle constitue une priorité de premier plan pour le nouveau Gouvernement. Pour les seules trois dernières années, 2,5 millions d’élèves ont ainsi rejoint les bancs de l’école, une illustration, pour le représentant, des initiatives innovantes prises par le Gouvernement. Le Pakistan poursuit en outre une politique basée sur « le peuple d’abord », à travers la stratégie de développement durable sur le long terme « Pakistan Vision 2025 », a encore déclaré M. Ali Chatha. Enfin, le représentant a évoqué la mise en œuvre de stratégies visant à permettre aux femmes, aux jeunes et aux personnes handicapées de devenir de véritables partenaires pour le développement.
M. CHERNENKO (Fédération de Russie) a déclaré que les questions d’élimination de la pauvreté, d’élimination de la faim et de garantie d’une éducation de qualité faisaient partie des priorités des Nations Unies, ajoutant que la Fédération de Russie considérait la réalisation des textes du Sommet mondial pour le Développement social comme une partie essentielle de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Le représentant a ensuite exprimé son désaccord avec la conception selon laquelle les questions de développement social devraient se concentrer sur le développement durable et les droits fondamentaux, avant d’insister sur l’importance du rôle de la Commission du développement social.
M. Chernenko a ensuite insisté sur l’engagement sans faille de la Fédération de Russie envers ses concitoyens, notamment à travers le décret présidentiel du 8 mai 2018, et ce, malgré les difficultés qu’impose l’application de sanctions contre son pays. Grâce à la politique économique menée par la Fédération de Russie, le chômage atteint dans le pays le seuil de 5,2% et le salaire minimum touche 72% de la population active, un chiffre que le pays espère mener à 100% en janvier 2019, a-t-il affirmé.
Quant aux personnes âgées, M. Chernenko a expliqué qu’elles étaient une des priorités du pays, ajoutant que la réforme des retraites en cours allait permettre d’améliorer grandement leur situation matérielle. Il a ajouté qu’à partir du 1er janvier 2019 serait facilitée la formation des personnes en âge de préretraite.
M. PHAM ANH THI KIM (Viet Nam) a averti que les inégalités, dans toutes leurs dimensions, peuvent nuire, si elles ne sont pas prises en compte, aux progrès réalisés en matière de développement et même saper la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Face aux inégalités croissantes de revenu, les États Membres et la communauté internationale dans son ensemble se doivent d’intensifier leurs efforts pour apporter des solutions innovantes et efficaces, a-t-il plaidé.
Pour le Viet Nam, l’impact négatif des changements climatiques exacerbe les inégalités. Le pays figurant parmi les plus vulnérables en la matière, le représentant s’est dit particulièrement préoccupé par l’augmentation de la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes, la montée du niveau des eaux, l’érosion terrestre et la survenue de catastrophes naturelles comme le récent typhon Mangkhut aux Philippines et le tsunami couplé à des séismes à Sulawesi en Indonésie.
L’impact de ces catastrophes est tel qu’il faut des générations pour s’en remettre et reconstruire, a insisté le représentant. Cette dure réalité doit inciter les États Membres à intensifier leurs efforts pour répondre aux changements climatiques et offrir une vie plus durable aux générations futures, a-t-il affirmé, appelant par ailleurs la communauté internationale à veiller à l’interrelation existant entre le fossé numérique et les inégalités, laquelle est particulièrement marquée entre les riches et les pauvres, les hommes et les femmes, les populations urbaines et rurales. Le Viet Nam, qui a accueilli le Forum économique mondial de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) en 2018, est très sensible à cette réalité et plaide pour les technologies bénéficiant au plus grand nombre.
M. KHIANE PHANSOURIVONG (République démocratique populaire lao) a rappelé que le développement social était, avec le développement économique et la protection de l’environnement, l’un des trois piliers du plan de développement de son pays. « Le développement social met l’accent sur les ressources humaines, l’éradication de la pauvreté et les soins de santé », a-t-il souligné.
Outre l’amélioration de l’éducation, « priorité majeure », et le soutien aux personnes âgées - une « source d’amour et d’inspiration pour la famille et la société », le représentant s’est plus spécifiquement penché sur le sujet des personnes handicapées. Il a notamment expliqué que son pays avait mis en place un plan d’action pour une stratégie nationale centrée sur les besoins spécifiques de cette population. Cette stratégie est, a-t-il expliqué, destinée à protéger les droits des handicapés, collecter des données, développer des politiques spécifiques, communiquer sur le sujet et encourager le grand public à aider et respecter ces personnes.
M. GIORGIO (Érythrée) a rappelé que la communauté internationale s’était engagée dans la Déclaration de Copenhague à éradiquer la pauvreté, promouvoir l’intégration sociale et réduire les inégalités. Or, a déploré le représentant, aujourd’hui, ces maux sont encore des défis au quotidien. Pour lui, il est inacceptable, à l’ère des progrès scientifiques et technologiques, que des millions de personnes souffrent encore de la pauvreté et meurent de maladies faciles à soigner. Malgré les nombreuses avancées dans le domaine social, les conflits et les inégalités croissantes, le commerce mondial et les systèmes financiers entravent les aspirations de millions de personnes dans les pays en développement à réaliser leur plein potentiel sur la voie d’un développement économique et social.
Le Programme 2030 imprime un nouvel élan pour le partenariat mondial, a ensuite relevé M. Giorgio. L’Érythrée, a-t-il affirmé, a accompli de « modestes progrès » dans le développement social et aspire à devenir un pays à revenu intermédiaire à l’horizon 2030. L’Érythrée, une nation pacifique qui contribue à la paix régionale, se félicite que la réunion de la Troisième Commission de cette année coïncide avec la décision des États de la Corne de l’Afrique de clore un chapitre sombre de leur histoire et de s’embarquer dans une nouvelle ère de paix et d’intégration économique, a également assuré le représentant.
M. TEODORO L. LOCSIN JR. (Philippines) a dit que l’engagement du Gouvernement au Programme de développement durable à l’horizon 2030 avait été traduit dans le programme « Vision 2040 ». Celui-ci, a-t-il expliqué, vise à créer une société prospère et dominée par la classe moyenne dans laquelle plus personne ne sera pauvre et dans laquelle tous les Philippins jouiront d’un style de vie stable et confortable et sauront qu’ils peuvent planifier et préparer leur avenir et celui de leurs enfants dans le cadre d’un gouvernement clair, juste et attentionné. Le Président Rodrigo Roa Duterte veut éradiquer la corruption à tous les niveaux du Gouvernement et traduire les acquis de la bonne gouvernance en avantages directs, immédiats et substantiels qui autonomisent les pauvres et les marginalisés, a affirmé le représentant.
En outre, a poursuivi M. Locsin, le Gouvernement met en œuvre un programme de transfert d’argent qui est le plus grand programme de protection sociale pour les pauvres de 41 620 villages et 1 627 villes et municipalités dans tout le pays. Au 15 août 2018, ce programme a bénéficié à 4,39 millions de personnes, a précisé le représentant.
M. Locsin a ensuite mis l’accent sur le Plan de développement de la jeunesse 2017-2022, centré sur la participation et élaboré en consultations avec diverses parties prenantes. Ce plan encourage la participation des jeunes dans neuf directions, notamment l’éducation, l’autonomisation économique, l’inclusion sociale, la consolidation de la paix et de la sécurité, a détaillé le représentant. Enfin, il a cité un programme de pension pour les personnes âgées qui a commencé en 2011 et a, à ce jour, bénéficié à 2,8 millions de personnes.
Mme MARTHA A. A. POBEE (Ghana) a relevé que le rapport du Secrétaire Général sur la mise en œuvre des textes issus du Sommet mondial pour le développement social insistait sur la nécessité de traiter les inégalités dans toutes leurs dimensions afin d’éradiquer la pauvreté, de faire avancer le progrès social et d’atteindre le développement durable. Elle a également déclaré que le Ghana soutenait les recommandations contenues dans ledit rapport.
Revenant sur les mesures prises par son pays en la matière, la représentante a mentionné la priorité donnée à l’accès à l’éducation pour tous les enfants jusqu’au lycée, une mesure qui a permis à 90 000 jeunes d’accéder à l’enseignement secondaire. Par ailleurs, dans le domaine de la santé et des services de santé, le Ghana a réalisé des progrès constants depuis une décennie, notamment grâce à l’instauration de la couverture médicale universelle.
Mme Pobee a ensuite insisté sur la nécessaire reconnaissance des personnes handicapées et/ou vulnérables, afin d’atteindre un développement inclusif. Et de mentionner que leurs besoins spécifiques étaient pris en compte dans le Code de la construction du Ghana, ainsi que dans celui du transport, en cours de révision.
Mme MASITAH JAAFAR (Brunéi Darussalam) a déclaré que le vieillissement de la population était une des transformations sociales majeures du XXIe siècle, rappelant que la population de plus de 65 ans représente aujourd’hui 6% de la population mondiale, mais que cette proportion doublera d’ici à 2035. Afin de protéger les droits des personnes âgées, le Brunéi Darussalam a mis en place une série de mesures, et notamment une pension de vieillesse et d’incapacité, qui offre aux plus de 60 ans une allocation financière mensuelle, a expliqué la représentante.
Le Brunéi Darussalam continue de s’assurer que le pays offre des services de santé accessibles à tous, a encore déclaré Mme Jaafar. De même, le pays s’assure que ces services soient en lien avec les jeunes, afin de partager avec eux leurs savoirs et expériences, a-t-elle assuré.
Mme HAOKIP (Inde) a souligné que, face aux inégalités persistantes, son pays préconisait un renforcement de la dimension sociale du développement durable. Tout en poursuivant une approche inclusive pour la réalisation des objectifs de développement durable, Mme Haokip a exhorté à relever les défis émergents inhérents à la globalisation et aux innovations technologiques qui accentuent davantage ce fossé.
Pour l’Inde, le développement social inclusif est une priorité, reflétée d’ailleurs dans la devise du Gouvernement: « des efforts collectifs, un développement inclusif ». De fait, a poursuivi la représentante, le développement économique durable a sauvé des millions de la pauvreté. Bien plus, a-t-elle affirmé, l’Inde a d’ores et déjà mis en œuvre des programmes pour la réalisation des objectifs de développement durable. Elle a cité notamment l’intégration financière et la mise en place d’opportunités d’emplois décents pour tous, avec un accent particulier mis sur les femmes, les jeunes et les personnes en situation de handicap. Ces groupes, a-t-elle conclu, sont au « cœur » de notre stratégie de développement.
Mme FATMAALZAHRAA HASSAN ABDELAZIZ ABDELKAWY (Égypte) a mentionné les politiques de ciblage géographique menées par son pays en faveur de zones reculées en matière de développement visant notamment les personnes handicapées et âgées. Elle est revenue sur différents programmes mis en œuvre par le Gouvernement égyptien comme l’assurance maladie universelle ainsi que, entre autres, un programme de planification limitant à deux enfants les familles bénéficiant de cette aide. La représentante a également expliqué qu’un programme de base pour promouvoir l’accès à l’eau potable des familles les plus démunies ainsi qu’un autre visant leur autonomisation économique dans le but de leur assurer un avenir grâce à des emplois dignes.
La Convention relative aux droits des personnes handicapées n’a pas été traduite dans la législation nationale, avant 2017, a expliqué Mme Abdelkawy. À cette date, la première loi protégeant les personnes handicapées a été adoptée au Parlement, leur allouant notamment une aide financière mensuelle. En ce qui concerne les personnes âgées, la Constitution égyptienne garantit leurs droits sociaux, de santé et culturels. Pour les jeunes, plus de 10 milliards de dollars ont déjà été investis à travers la mise en place de microprojets.
En conclusion, la représentante a appelé à un effort coordonné du Gouvernement, de la société civile et du secteur privé afin de mettre un terme aux inégalités et à la pauvreté.
Mme INANC-ORNEKOL (Turquie) a décrit les mesures prises par son pays pour réaliser les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et construire une société plus résiliente. Le Plan de développement 2019-2023 de la Turquie repose sur la croissance économique, l’inclusion sociale et la protection environnementale. La représentante a vanté les progrès réalisés par son pays dans la lutte contre la pauvreté, la création d’emploi et l’accès aux services sociaux de base, dans un cadre inclusif et fondé sur l’état de droit. En outre, le Plan de développement national prévoit des mesures susceptibles de favoriser l’émancipation des femmes, des jeunes et des personnes handicapées, a-t-elle expliqué, notamment par le biais de l’accès à l’éducation et au marché du travail.
Pour Mme Inanc-Ornekol, il est « impératif » de tenir compte des réalités démographiques de la Turquie, et des besoins des personnes âgées. À cette fin, le Gouvernement a mis en place le Plan d’action national sur le vieillissement et la situation des personnes âgées, ainsi que la Commission spéciale d’expertise sur le vieillissement. La Turquie, a continué la représentante, a également adopté une série d’initiatives afin d’assurer la pleine participation des jeunes à la vie publique et politique de leur pays, y compris des programmes de réintégration et de réhabilitation.
En outre, principal pays d’accueil de réfugiés dans le monde, la Turquie a enrôlé des enfants syriens dans son système d’éducation publique et construit 318 centres éducatifs temporaires, a précisé la représentante.
Mme AGNE SZUDA, représentante de la jeunesse de la Hongrie, a raconté son périple de plusieurs mois à l’intérieur de son pays à la rencontre des jeunes pour établir des ponts entre cette catégorie et les Nations Unies et promouvoir les valeurs et l’action de l’Organisation mondiale. Cela a été également, pour elle, un moyen de les écouter et constater leur immense potentiel. Mais, a-t-elle fait observer, ce n’est pas suffisant pour changer le monde. Les jeunes ont besoin d’être autonomisés, de recevoir une éducation de qualité et de participer à la prise de décisions. C’est, à son avis, un outil essentiel pour faire des jeunes un « moteur du changement ».
De même, Mme Szuda a dit avoir discuté avec des jeunes handicapés et ressenti leur frustration devant les barrières qu’ils doivent surmonter, notamment l’accès à des postes de responsabilités. Pour elle, il est indéniable qu’un long chemin reste à parcourir avant d’atteindre l’objectif de dépasser les discriminations face à ce qui n’est, après tout, que de « simples différences si nous le voulons ». La représentante a terminé son discours en langage des signes pour encourager ces jeunes et leur dire « œuvrons ensemble pour bâtir un avenir meilleur ».