Première Commission : les délégations manifestent leurs inquiétudes face à l’augmentation des attaques à l’arme chimique dans le monde
Amenés à débattre de la question des autres armes de destruction massive, notamment chimiques et biologiques, les délégués de la Première Commission (désarmement et sécurité internationale) ont focalisé, ce matin, leur attention sur la situation sécuritaire. De nombreuses délégations ont, en effet, fait part de leurs inquiétudes face à la recrudescence de l’utilisation d’armes chimiques, tout en notant dans le même temps certains signaux positifs relatifs à l’évolution des mécanismes de surveillance et de vérification.
Brossant un tableau général de la situation, la France a ainsi rappelé que, ces dernières années, du gaz moutarde avait été utilisé par Daech, une attaque à l’agent neurologique avait été perpétrée en Malaisie et un empoisonnement avec une substance innervante avait eu lieu en Grande Bretagne. Depuis la réapparition des armes chimiques en Syrie, s’est inquiété le représentant, l’usage d’agents toxiques s’est multiplié à travers le monde.
L’Allemagne l’a elle aussi noté: les normes concernant le non-recours à de telles armes n’ont fait que s’éroder ces derniers temps du fait de violations répétées. Le Canada a même parlé de « tabou brisé » en la matière. Ce dernier a d’ailleurs appelé tous les États à s’acquitter de leurs obligations en vertu de la Convention sur les armes chimiques et du droit international humanitaire. La Suisse -comme beaucoup d’autres pays- a plus particulièrement dénoncé l’usage répété d’armes chimiques par la Syrie tel que constaté par le Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU. « C’est une violation sans précédent des normes régissant les armes chimiques », s’est-elle alarmée.
À cela s’ajoutent les préoccupations soulevées hier par les États-Unis quant au respect de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques par l’Iran. D’après la délégation américaine, ce pays essaierait de se procurer, à des fins offensives, des analgésiques opioïdes. Arguant que ces produits n’ont rien à faire en dehors du circuit médical, elle a considéré que la quatrième session extraordinaire de la Conférence des Parties à la Convention offre l’occasion de traiter de la menace spécifique posée par le fentanyl et autres analgésiques opioïdes.
Les États-Unis ont également proposé au Directeur général de l’OIAC d’ajouter la famille des Novitchok à l’Annexe de la Convention sur les produits chimiques, arguant que ces agents neurotoxiques de fabrication militaire n’ont d’autre utilité que de blesser ou tuer, « comme l’on a vu dans les villes britanniques de Salisbury et d’Amesbury ». Le Canada a d’ailleurs exhorté la Fédération de Russie à déclarer son « programme offensif » auprès de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).
Seule Cuba a fait retentir un autre son de cloche sur cette question, la délégation ayant accusé les Américains et leurs alliés d’avoir lancé des représailles contre le régime syrien sans mandat du Conseil de sécurité et « au nom d’une prétendue utilisation d’armes chimiques » qui n’avait pas encore été vérifiée par l’OIAC.
À ce propos, les délégués ont accueilli favorablement à une quasi-unanimité la décision prise lors de la quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques de doter l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) d’un mandat visant à attribuer la responsabilité des attaques à l’arme chimique.
Comme l’ont très bien expliqué la Suisse, le Canada et la France, étant donné que le Conseil de sécurité n’a pas réussi à renouveler le Mécanisme d’enquête conjoint du fait du veto russe, les États parties à la Convention sur les armes chimiques ont décidé d’instituer un mécanisme permettant d’identifier l’origine de ces armes, ainsi que les acteurs responsables. Pour beaucoup de pays, ces nouvelles prérogatives permettront à l’OIAC d’encore mieux remplir sa mission.
Pour sa part, l’Algérie a insisté sur l’importance d’empêcher l’apparition de nouvelles armes de destruction massive en renforçant le rôle de la Conférence du désarmement, notamment en ce qui concerne les armes radiologiques et au phosphore. Le Kazakhstan a, quant à lui, jugé le moment venu d’entamer les négociations sur une convention internationale pour la répression des actes de terrorisme chimique et biologique.
Le Népal a par ailleurs appelé à promouvoir la coopération internationale pour renforcer les capacités des pays en développement dont certains, a-t-il souligné, manquent encore de ressources techniques et financières pour se conformer aux différents traités de désarmement et de non-prolifération ou pour remplir leurs obligations périodiques d’inspection. Dans une même veine, l’Afrique du Sud a demandé à l’OIAC de désigner les laboratoires référents en Afrique qui pourraient être utilisés en cas d’attaques par des armes de destruction massive ou catastrophes naturelles.
Les délégations ont également parlé de la Convention sur les armes biologiques, le Japon ayant notamment souligné son rôle crucial pour la sécurité internationale. Des préoccupations ont toutefois été soulevées à maintes reprises au sujet de son état financier et de nombreux appels ont été lancés à l’intention des États qui ont des arriérés à payer.
La Première Commission, qui a entamé la question de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique en fin de séance, poursuivra ses travaux demain, mercredi 24 octobre, à partir de 10 heures.
DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR
Déclarations sur les autres armes de destruction massive (suite)
M. ENRIQUE JOSÉ MARÍA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a indiqué que son pays est partie aux Conventions sur les armes chimiques et sur les armes biologiques et a exhorté les États à ne pas mener des actes contraires aux objectifs de ces Traités. Il a également constaté que la mise en œuvre des engagements pris au titre de de ces Traités exige la coopération internationale. À cette fin, il a insisté sur le transfert de technologies et de savoir dans le domaine scientifique pour réduire le fossé entre pays développés et pays en développement.
Le représentant a réitéré sa condamnation du recours à l’arme chimique et s’en est remis à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour ce qui est des efforts de vérification.
Mme SABRINA DALLAFIOR (Suisse) a rappelé que les Conventions sur les armes chimiques et biologiques sont des piliers fondamentaux du droit international et du régime de désarmement et de non-prolifération. Mais, a-t-elle insisté, le respect des règles est encore plus important. À cet effet, elle a dénoncé l’usage répété d’armes chimiques par la République arabe syrienne tel que constaté par le Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU. « C’est une violation sans précédent des normes régissant les armes chimiques », a-t-elle insisté. Elle a aussi qualifié d’« illégal » l’emploi d’un agent innervant au Royaume-Uni, et demandé à la Fédération de Russie de clarifier son origine.
Elle a souhaité que la condamnation de l’emploi de ces armes soit collective, que les violations fassent l’objet d’enquêtes et que les responsables répondent de leurs actes. À ses yeux, les États doivent poursuivre les responsables et il ne peut pas y avoir d’impunité pour ces crimes. Étant donné que le Conseil de sécurité n’a pas réussi à renouveler le Mécanisme conjoint d’enquête, la Suisse a soutenu la décision de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques d’instituer en son sein un mécanisme permettant d’identifier l’origine de ces armes, ainsi que les acteurs responsables. Elle a finalement félicité l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) qui a, selon elle, toujours rempli sa mission de façon impartiale.
Préoccupée par les défis de taille auxquels le monde fait face avec les armes biologiques, Mme Dallafio a appelé à mettre en œuvre au niveau national la Convention sur l’interdiction des armes biologiques (CIAB). La Suisse a aussi estimé que la Convention doit être portée par des mécanismes plus performants, notamment pour rester en phase avec les rapides progrès de la science. Elle s’est enfin dite très inquiète face aux difficultés financières de la CIAB.
Pour Mme ROSEMARY MCCARNEY (Canada) le tabou contre l’utilisation des armes chimiques a été brisé avec l’utilisation de substances toxiques comme armes en Syrie, en Iraq, en Malaisie et au Royaume-Uni. Elle a appelé tous les États à s’acquitter de leurs obligations en vertu de la Convention sur les armes chimiques et du droit international humanitaire. Elle a plus particulièrement exhorté la Syrie à déclarer et à détruire les agents chimiques qu’elle conserve. Elle a exhorté également la Fédération de Russie à déclarer son « programme offensif » auprès de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).
Constatant que de nombreuses attaques chimiques en Syrie demeurent non attribuées en raison du veto opposé par la Russie au renouvellement du Mécanisme d’enquête conjoint au Conseil de sécurité, la représentante a accueilli favorablement la décision prise lors de la quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques qui dote l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) d’un mandat visant à attribuer la responsabilité des attaques à l’arme chimique. Il est inacceptable pour les États parties de mépriser leurs obligations aux termes de la Convention, a-t-elle souligné. Pour sa part, le Canada a déjà fourni une contribution de 41 millions de dollars pour soutenir les efforts de destruction, de surveillance, de vérification et d’enquête sur les armes chimiques en Syrie, en Iraq et en Libye.
M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte) a rappelé que le Moyen-Orient est caractérisé par l’instabilité et des tensions qui découlent de guerres imposées. Il a insisté sur le fait que l’Égypte est partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et respecte ses obligations à ce titre. Toutefois, elle a regretté que la mesure pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient n’ait toujours pas été suivie d’effet. L’Égypte souhaite que cette zone cesse d’être entravée par un pays.
Opposée à toutes les armes de destruction massive partout, en tout temps, l’Égypte a voté en faveur des Conventions sur les armes chimiques et biologiques. Selon son représentant, il y a des contradictions claires dans les positions de certains États qui appellent à respecter les Conventions alors qu’ils n’exigent pas d’Israël qu’elle adhère au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Ces États, a-t-il dénoncé, n’appuient pas non plus des négociations pour que le Moyen-Orient soit exempt d’armes de destruction massive.
M. ANDREJS PILDEGOVICS (Lettonie) a constaté que la Convention sur les armes chimiques a été défiée à de nombreuses occasions au cours de ces dernières années, que ce soit en Iraq, en Syrie, en Malaisie ou au Royaume-Uni. « Cela pose une menace sérieuse sur l’ordre juridique international, notamment sur le régime de désarmement et de non-prolifération que nous nous sommes engagés à protéger et à soutenir », a-t-il déclaré.
Le représentant s’est déclaré consterné par la tentative de cyberattaque dont a été la cible l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) en avril. « Nous soutenons l’intention de l’Organisation de renforcer ses capacités à cet égard », a-t-estimé. La Lettonie a, en outre, regretté profondément qu’il n’ait pas été possible de renouveler le mandat du Mécanisme d’enquête conjoint, en novembre dernier. En revanche, le représentant a salué la décision prise lors de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques. Il a aussi accueilli avec bienveillance l’adoption, par l’Union européenne, d’un nouveau régime de sanctions autonome dont le but est de combattre la prolifération des armes chimiques.
Mme SOCORRO FLORES LIERA (Mexique) s’est inquiétée de la récente décision des États-Unis de se retirer du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (Traité FNI), soulignant que c’est un instrument clef en matière de désarmement qui a créé la stabilité entre les puissances. Sa disparition risque d’avoir des conséquences importantes pour la communauté internationale dans son ensemble en réduisant la confiance et en déclenchant une nouvelle course aux armements, a-t-elle averti. Elle a appelé les États-Unis et la Russie à résoudre leurs différends par la voie diplomatique. Elle a également demandé que tous ceux qui disposent d’armes nucléaires de les détruire conformément aux traités qui constituent le régime de désarmement.
Le nombre de rapports faisant état d’attaques à l’arme chimique était inimaginable, il y a quelques années, a poursuivi la représentante. Elle a déploré que la communauté internationale soit le témoin de tels faits qui violent le droit international. Elle a rappelé que le Mexique avait renoncé de manière irréversible aux armes de destruction massive, soulignant, par ailleurs, que la Convention sur les armes chimiques est le seul instrument qui interdit ces armes. Cet instrument a fonctionné, il a contribué au maintien de la paix et de la sécurité et L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) s’est d’ailleurs vu attribuer le prix Nobel de la paix. Aussi, a-t-elle appelé tous les États à collaborer avec l’OIAC et à veiller à ce qu’il ne subsiste aucun espace d’impunité pour les auteurs de telles attaques.
M. SANDEEP KUMAR BAYYAPU (Inde) a estimé que la Convention sur les armes chimiques est un instrument modèle pour l’élimination d’une catégorie entière d’armes de destruction massive. Il a fermement dénoncé l’utilisation des armes chimiques qui représente à ses yeux un mépris total pour l’humanité et a appelé à tenir pour responsables les auteurs d’actes aussi odieux. L’Inde partage les préoccupations générales concernant les allégations d’utilisation d’armes chimiques dans les différentes parties du monde et estime que les enquêtes sur ces questions doivent être impartiales. Il importe aussi de préserver la crédibilité et l’intégrité de la Convention. L’Inde possède le deuxième plus grand nombre d’installation déclarées et reçoit parmi le plus grand nombre d’inspections par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), a-t-il rappelé. Nous avons aussi le plus grand nombre de vérifications impeccables, s’est-il félicité.
Il s’est par ailleurs félicité de l’adoption du programme intersession 2018-2019 de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes biologiques.
Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a rappelé que son pays est partie aux Conventions sur les armes chimiques et biologiques. Elle a estimé prioritaire de demander aux États-Unis de compléter le processus de destruction de leur arsenal d’armes chimiques. Elle a également demandé une mise en œuvre pleine et entière de l’article 11 de la Convention sur les armes chimiques qui porte sur le développement économique et technologique.
Dénonçant les applications et point de vue partiaux sur ces Conventions, elle a critiqué l’attaque menée par les États-Unis et leurs alliés contre la Syrie « au nom d’une prétendue utilisation d’armes chimiques » par le régime de Damas. Il s’agit, à ses yeux, d’une action unilatérale menée sans l’aval du Conseil de sécurité qui constitue une violation flagrante des normes internationales. Elle a souligné que la seule manière de garantir les Conventions sur les armes chimiques et biologiques est d’appliquer leurs normes et mécanismes. Enfin, elle a insisté sur le fait qu’aucune mesure adoptée par le Conseil de sécurité, ou initiative « sélective et discriminatoire » prise par un groupe de pays en dehors du cadre multilatéral, ne sera jamais au-dessus des décisions de l’Assemblée générale.
Mme NATASHA MALEKANE (Afrique du Sud) a demandé à tous les États parties qui possèdent des armes chimiques d’accélérer la destruction de leurs stocks, constatant toutefois que l’existence de nombreuses armes chimiques abandonnées posent de graves défis. Elle s’est inquiétée du fait que des armes chimiques ont été utilisées à plusieurs reprises ces dernières années. Elle a salué le travail effectué par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), se disant toutefois préoccupée par la polarisation des organismes en son sein. Elle a appelé à veiller à sa neutralité.
La représentant a demandé à l’OIAC de renforcer l’assistance aux pays en développement et de désigner les laboratoires référents en Afrique qui pourraient être utilisés en cas d’attaques par des armes de destruction massive ou catastrophes naturelles. Elle a souligné que l’universalisation des Conventions sur les armes chimiques et les armes biologiques est essentielle à l’élimination de ces engins et a appelé tous les États à les rejoindre.
M. ASSYLBEK TAUASSAROV (Kazakhstan) a souligné que les Conventions sur les armes chimiques et biologiques sont des instruments juridiques essentiels pour orienter les efforts multilatéraux en faveur de l’élimination complète de certains types d’armes de destruction massive sous un contrôle international stricte.
Le Kazakhstan reste déterminé à travailler avec tous les États pertinents, ainsi que les organismes et régimes internationaux pour parvenir aux objectifs fixés par la Convention sur les armes biologiques. Seule la participation de tous les pays, sans aucune distinction, à cette Convention établira un socle solide pour l’interdiction totale des biotechnologies à des fins militaires, a expliqué le représentant. Il a précisé que, conformément à la résolution 1540 du Conseil de sécurité, le Kazakhstan avait mis en place un système efficace de contrôle des exportations et des transferts de biens et de technologies dont les normes correspondent aux exigences les plus strictes, tout en reconnaissant qu’il est impératif d’améliorer ce système en permanence.
Soulignant la menace terroriste dans ce domaine, le représentant a appelé à commencer les négociations sur une convention internationale pour la répression des actes de terrorisme chimique et biologique, qui a été proposée il y a deux ans et dont la pertinence est, selon lui, de plus en plus évidente. En général, il a préconisé que le développement des biosciences et technologies se fasse systématiquement sous supervision des États parties à la Convention. « Il ne faut pas laisser les recherches biologiques franchir la ligne ténue de la morale et devenir une menace pour la sécurité », a-t-il tranché. Dans ce contexte, il a rappelé que le séminaire régional des États parties de l’Asie centrale à la Convention sur les armes biologiques aura lieu les 23 et 24 octobre à Almaty, au Kazakhstan.
S’agissant de la Convention sur les armes chimiques, le Kazakhstan estime que l’utilisation potentielle de ses armes doit être abordée dans le cadre du droit international de manière impartiale et transparente. En attendant, la mise en place d’un mécanisme de renforcement de la Convention devrait uniquement se faire par amendements.
M. FRANK GROOME (Irlande) s’est inquiété du risque que des armes de destruction massive tombent aux mains d’acteurs non étatiques et a jugé impératif de renforcer la coopération internationale. Sa délégation est extrêmement préoccupée par le fait que la communauté internationale ait toujours à faire face à des cas d’utilisation d’armes chimiques alors même qu’elles sont interdites par le droit international. Il en a profité pour réitérer le soutien de sa délégation au travail de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), martelant que l’intégrité et la stricte application de la Convention sur les armes chimiques sont essentielles.
Le représentant a dit demeurer interloqué par le fait que le mandat du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU n’ait pas été renouvelé par le Conseil de sécurité, regrettant que certains pays, en utilisant leur droit de veto, aient empêché qu’il y ait une reddition de comptes pour l’utilisation d’armes chimiques en Syrie. Il les a invités à réfléchir à l’impact négatif de leur décision. « Les violations de la Convention sur les armes chimiques doivent être suivies d’actions », s’est impatienté le représentant, sans quoi on encourage ceux qui osent utiliser ces armes à le faire. C’est dans cet esprit que l’Irlande a rejoint le Partenariat international contre l’impunité dans l’utilisation d’armes chimiques l’année dernière, a expliqué le représentant.
M. NOBUGISHE TAKAMIZAWA (Japon) a souligné que le recours aux armes chimiques est une violation grave du droit international et que la communauté internationale doit condamner unanimement les auteurs de ces actes. Le Japon s’est félicité de la décision de doter l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) d’un mandat et d’outils pour identifier les auteurs d’attaques chimiques. Il a averti que les menaces sont, actuellement, aggravées par la possibilité que des acteurs non étatiques puissent acquérir des armes chimiques. Désireux d’avancer vers l’universalisation de la Convention sur les armes chimiques, il a ensuite encouragé les États non parties à réfléchir à une accession rapide. Il a insisté sur les obligations au titre de la Convention. Prenant l’exemple de son propre pays, le délégué a rappelé que le Japon a déjà détruit 51 000 des 63 000 armes chimiques abandonnées en Chine. « Ces progrès ont été rendus possibles par des efforts conjoints sur le terrain avec la Chine, a-t-il précisé. Sans cette coopération, nous n’aurions pas pu mener à bien ce projet difficile. »
À propos de la Convention sur les armes biologiques, il a souligné son rôle crucial pour la sécurité internationale. Insistant sur l’importance de la coordination, le Japon a d’ailleurs l’intention d’organiser des ateliers et séminaires dans le cadre des Nations Unies. « Les efforts des parties prenantes pour parvenir à une coopération commune est clef pour mettre en œuvre les deux Conventions », a-t-il conclu.
Pour M. PETER BEERWERTH (Allemagne) le rapide développement des connaissances dans le domaine des biotechnologies et des sciences de la vie doit être soigneusement contrôlé étant donné leur double potentiel. Des cas de tentatives d’attaques montrent qu’il faut adopter des mesures sur le plan national, a-t-il indiqué. À cet égard, il a salué le programme de travail intersession et des réunions d’experts organisées l’été dernier mais s’est inquiété de la situation financière de la Convention sur les armes biologiques, appelant les États à verser sans tarder leurs contributions et s’assurer que la Convention dispose de bases financières solides et pérennes.
En ce qui concerne la Convention sur les armes chimiques, la destruction des stocks en Libye, en Allemagne, ainsi que ceux de l’Iraq sont encourageantes. En revanche, les dispositions concernant le non-recours à de telles armes ont été continuellement défiées ces derniers temps. Les États parties doivent rester déterminés à empêcher l’érosion de cette Convention, a-t-il insisté, soulignant que la situation en Syrie, où le régime utilise des armes chimiques contre sa population, reste vivement préoccupante. Le représentant a exhorté la Syrie à déclarer et détruire ses stocks existants de manière complète et vérifiable. Il faut également s’assurer qu’il n’y ait aucune impunité. Mais, a-t-il estimé, il ne suffit pas de poursuive en justice les responsables, il faut aussi renforcer la crédibilité de la Convention.
M. SURENDRA THAPA (Népal) a réaffirmé sa position de principe selon laquelle la paix et la sécurité internationales ne peuvent être assurées que via la destruction générale et complète de toutes les armes de destruction massive. « Leur utilisation par qui que ce soit est déplorable. C’est un crime contre l’humanité et les auteurs devraient être tenus pour responsables », a-t-il déclaré. En tant qu’État partie à la Convention sur les armes chimiques, le Népal a régulé de façon attentive les mouvements transfrontières des biens chimiques, a indiqué le représentant. Il a émis l’espoir que la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques, qui se tiendra le mois prochain, sera une opportunité pour la renforcer.
Le représentant a ensuite fait observer qu’en dépit de leur engagement indéfectible dans le désarmement et la non-prolifération, certains des pays les moins développés manquent encore de ressources techniques et financières pour se conformer aux différents traités de désarmement et de non-prolifération et que d’autres ne peuvent remplir leurs obligations périodiques d’inspections. Il a appelé à promouvoir la coopération internationale pour renforcer les capacités des pays en développement à appuyer le désarmement et la non-prolifération.
M. YANN HWANG (France) a estimé qu’avec la République populaire démocratique de Corée, la communauté internationale fait face à la plus grosse crise de prolifération du XXIe siècle. Même s’il s’est félicité des progrès réalisés quant à cette crise, il a souligné que la RPDC poursuit son programme balistique et nucléaire et demeure donc une menace pour la paix et la sécurité internationales. Il a rappelé que le programme nucléaire nord-coréen est intimement adossé à son programme balistique et que son développement témoigne d’une volonté d’acquérir une arme nucléaire capable d’atteindre l’Asie, l’Océanie et « peut-être même » l’Amérique du Nord et l’Europe. Il a rappelé que la RPDC détenait aussi des armes chimiques et qu’elle avait employé un agent neurologique sur l’un de ses ressortissants. La France lui a demandé de prendre des mesures concrètes et vérifiables pour démanteler ces programmes illégaux, a-t-il indiqué.
Sur l’Iran, le représentant a considéré que l’Accord de Vienne est robuste et renforce la non-prolifération. À ce titre, et puisqu’il n’y a pas d’alternative efficace, il doit continuer à être mis en œuvre. La France reste néanmoins très préoccupée par le programme balistique iranien.
Depuis la réapparition d’armes chimiques en Syrie, la France a aussi noté la multiplication de son utilisation par Daech, en Malaisie, mais aussi en Grande Bretagne avec l’utilisation d’un agent chimique d’origine russe. En l’absence de mesures de sanctions, le représentant a appelé à un renforcement nécessaire des moyens de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC). À ce titre, il s’est réjoui de la décision d’accroître les pouvoirs d’enquêtes de l’organisation, mais aussi de toutes les initiatives parallèles comme le Partenariat international contre l’impunité dans l’utilisation des armes chimiques qui, a-t-il relevé, a publié plusieurs centaines de noms de personnes impliquées dans l’emploi et le transfert d’agents chimiques.
M. MUSTAPHA ABBANI (Algérie) a appelé les pays concernés à se débarrasser de leurs stocks d’armes chimiques, dans le respect des termes de la convention de l’OIAC. Il a exprimé son rejet absolu de ces armes par qui que soit et quelque motif avancé. Il a espéré, en revanche, le renforcement de la coopération internationale pour des activités pacifiques dans le domaine chimique, afin de faciliter le transfert de technologies vers les pays en développement. Il a souhaité la mise en œuvre totale de la Convention sur les armes biologiques et a jugé nécessaire d’établir un mécanisme de contrôle.
Le représentant a insisté sur l’importance d’empêcher l’apparition de nouvelles armes de destruction massive en renforçant le rôle de la Conférence du désarmement, notamment en ce qui concerne les armes radiologiques et au phosphore. L’Algérie appuie, par ailleurs, la mise en place d’une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient, car il s’agirait d’un pas pratique pour renforcer la paix et la sécurité dans le monde entier.
M. JEHANZEB KHAN (Pakistan) a jugé essentielle la contribution des Conventions contre les armes chimiques et biologiques et a appelé à l’universalisation et la mise en œuvre de tous leurs articles. La Convention sur les armes biologiques joue un rôle clef dans la sécurité globale, a-t-il jugé, et fait la promotion d’une coopération internationale dans l’usage pacifique des sciences de la vie. Selon lui, la meilleure manière de renforcer cette Convention, c’est via un cadre multilatéral.
Convaincu qu’il faut continuer de renforcer la crédibilité de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), il a averti que la détourner de son mandat l’exposerait à des instrumentalisations politiques. Il a condamné l’usage des armes chimiques en toutes circonstances, et a considéré que les responsables doivent rendre des comptes. Le rôle de l’OIAC dans ce cadre est clairement défini par la Convention, a-t-il insisté. Et elle doit être renforcée en donnant la priorité à la destruction complète des armes chimiques. Il a dit attacher la plus haute priorité aux dispositions de la convention prévoyant la coopération et l’assistance pour favoriser l’utilisation de la chimie à des fins pacifiques. Il a aussi demandé qu’une série de mesures soit prise pour faire face à la menace que représentent les acteurs non étatiques.
Mme DELL HIGGIE (Nouvelle-Zélande) a réaffirmé l’absolue nécessité de se conformer au droit international humanitaire et de ne pas permettre l’impunité des auteurs de violations. Toute utilisation d’armes chimiques est une violation flagrante de la Convention sur les armes chimiques, a-t-elle insisté. Chaque utilisation, un crime international. Il est donc décevant que la communauté internationale soit témoin de ces violations, 143 utilisations ayant été enregistrées en Syrie entre octobre 2015 et octobre 2018, dont 17 cas rien qu’en 2018, a déploré la représentante. La Nouvelle-Zélande est également perturbée par l’impunité dont les auteurs de ces crimes bénéficient et s’est donc félicitée de la décision d’accorder des capacités d’attribution universelle à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).
Sur les armes biologiques, la Nouvelle-Zélande reconnaît la nécessité de préserver les avancées effectuées depuis 100 ans et espère pouvoir travailler en ce sens le mois prochain lors de la quatrième Conférence des États parties à la Convention sur les armes biologiques.
M. MARCIN KAWALOWSKI (Pologne) a expliqué l’importance primordiale de l’application de la Convention sur les armes chimiques. Le soutien de la communauté internationale à cette Convention est d’autant plus important cette année à la lumière des menaces fondamentales auxquelles elle doit faire face, a-t-il indiqué. À ce titre, il a noté que les utilisations répétées d’armes chimiques, notamment en Syrie, en Iraq, en Malaisie et au Royaume-Uni, mettent à mal le fondement même de la Convention, à savoir l’interdiction complète de ces armes. Cela soulève aussi des questions par rapport à l’intégrité de la Convention et à la crédibilité de l’OIAC, qui, au sens plus large, sont des questions pour l’avenir, a poursuivi le représentant, avant de constater que le consensus à l’OIAC n’existe plus et « que nous sommes toujours loin de le retrouver ».
Cette situation ne doit pas pour autant être une excuse pour l’inaction, a estimé le délégué. Et cette position a d’ailleurs été reflétée par de nombreux pays lorsqu’ils ont demandé la convocation d’une conférence des États parties à la Convention.
C’est dans ce contexte que la Pologne présentera, comme par le passé, le projet de résolution sur l’application de la Convention. Le représentant a évoqué les difficultés de concilier des positions parfois divergentes et mutuellement exclusives, et a assuré que la Pologne, qui est le seul sponsor de ce texte, « a fait son possible » pour présenter un texte à la fois factuel et actuel.
M. FAIZAL CHERY SIDHARTA (Indonésie) a indiqué que son pays est fermement engagé dans la mise en œuvre entière et non discriminatoire des dispositions de la Convention sur les armes chimiques. L’an dernier, le Gouvernement indonésien a établi l’autorité nationale de la Convention sur les armes chimiques, qui évalue notamment l’utilisation des substances chimiques à des fins pacifiques.
Le représentant s’est déclaré satisfait que la réunion de 2017 des États parties à la Convention sur les armes biologiques ait atteint un consensus pour un programme intersession de 2018 à 2020. Il a pris note avec intérêt des résultats de la réunion d’experts qui s’est tenue à Genève en août dernier, car « elle contribue de façon significative à une compréhension plus substantielle de chaque question et permet de renforcer la Convention ». Parmi les autres domaines clefs de la Convention qui nécessitent un renforcement, il a cité la coopération internationale dans le domaine de l’assistance et des échanges de toxine, ainsi que l’utilisation d’agents biologiques à des fins pacifique. À cet égard, les dispositions de l’Article 10 de la Convention doivent être strictement suivies, a-t-il estimé
Enfin, il a fait part de ses préoccupations concernant la situation financière de la Convention et a encouragé toutes les parties à trouver une solution permanente à cette question.
M. TALAL RASHID N. M. AL-KHALIFA (Qatar) a rappelé que la possession d’armes de destruction massive est une violation flagrante des obligations juridiques et morales et de l’engagement pris en faveur de leur élimination au regard de la communauté internationale. À cet égard, il s’est dit extrêmement préoccupé par l’éventuelle utilisation par des terroristes de ces armes. Il faut éviter à tout prix que cela se produise, conformément à la résolution 1540, qui a rappelé la réalité de cette menace et demandé aux États d’éviter d’appuyer des acteurs non étatiques, a-t-il souligné.
Le représentant a ensuite affirmé que les violations des dispositions de la Convention sur les armes chimiques sont inacceptables et doivent être condamnées par la communauté internationale et leurs auteurs tenus pour responsables. L’utilisation de ces armes par quiconque, indépendamment des circonstances, est une violation flagrante des conventions internationales comme cela s’est passé en Syrie à plusieurs reprises, a—t-il dénoncé en outre.
M. GYORGY MOLNAR (Hongrie) a présenté le projet de résolution sur la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction. Il a précisé qu’en plus de mises à jour techniques, le projet de cette année reflète les progrès dans l’universalisation de la Convention sur l’interdiction des armes bactériologiques et des décisions prises lors de la Conférence des États parties de 2017, concernant le processus intersession pour la période avant la prochaine Conférence d’examen. Il reflète aussi la situation financière grave de la Convention, qui nécessite des actions urgentes de la part des États parties. Le représentant a déclaré qu’il souhaitait que la Hongrie reste le seul auteur de cette résolution.
M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a noté que l’utilisation active d’armes chimiques est en hausse, notamment en Syrie. Condamnant l’utilisation des armes chimiques par quiconque, il a jugé que l’incident de Salisbury est un autre exemple de la violation de la Convention sur les armes chimiques. À ses yeux, un acte de ce type ne peut pas rester sans réponse puisqu’il sape la justice et érode les normes de la Convention. Il s’est en outre félicité de la décision qui renforce les pouvoirs d’enquête de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) en lui permettant de mieux identifier les responsables.
Rappelant également le rôle important joué par la Convention sur les armes biologiques, il a jugé qu’il s’agit d’une bonne base multilatérale. Rappelant que son pays octroie la plus grande importance à la biosûreté, il a souligné que l’Ukraine a organisé plusieurs ateliers sur la mise en œuvre de la Convention. La mise en œuvre de la résolution 1540 et d’autres résolutions connexes est une question prioritaire pour l’Ukraine. Selon son délégué, c’est un instrument important pour lutter contre l’obtention de ces armes par des acteurs non étatiques.
Déclarations sur l’espace extra-atmosphérique (aspects du désarmement)
M. FAIZAL CHERY SIDHARTA (Indonésie), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, s’est opposé à tout déploiement d’armes dans l’espace. Il a insisté sur l’importance du respect le plus strict des traités en la matière, y compris les instruments bilatéraux. Il a également jugé nécessaire de commencer des travaux de fond pour prévenir une course aux armements dans l’espace et ainsi que sur la menace de l’emploi, ou l’emploi de la force. Il a noté l’adoption, par l’Assemblée générale, de résolutions sur le déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique et sur des mesures pratiques visant à prévenir une course à l’armement, à commencer par la création d’un groupe d’experts.
Le Mouvement continue d’être préoccupé par le déploiement de système de missiles et de défense antimissiles qui ont contribué à l’érosion accrue du climat sécuritaire international. À cet égard, il a jugé que l’abrogation du Traité concernant la limitation des systèmes de missiles antimissiles balistiques (Traité ABM) a des conséquences négatives sur la sécurité internationale tout comme le déploiement de missiles stratégiques avancés.
M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte) au nom du Groupe des États arabes, a considéré comme essentielle l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique. Selon lui, les conventions qui encadrent cet usage doivent tenir compte des évolutions et des déclarations de certains États qui développent de nouvelles technologies capables d’attaquer des objets spatiaux. « L’espace est le patrimoine commun de l’humanité, a-t-il insisté. Toutes les activités spatiales doivent donc respecter les normes établies par les Nations Unies. »
Il a jugé nécessaire d’adopter un instrument juridiquement contraignant pour se prémunir d’une course aux armements dans l’espace, tout en prenant en compte les intérêts de tous les États. Il ne faut pas restreindre le droit à l’utilisation pacifique de l’espace qui doit être exempt de tous conflits militaires, a-t-il souligné. L’instrument en question devrait donc prévoir l’interdiction du déploiement d’armes offensives ou défensives et de tout essai militaire. Revenant sur l’importance de la coopération dans le domaine de l’espace extra-atmosphérique, il a demandé à inclure les pays en développement pour que ceux-ci bénéficient également des progrès en la matière.
M. MOHD SUHAIMI BIN AHMAD TAJUDDIN (Malaisie) au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) se félicite de la création d’un groupe d’experts gouvernementaux pour examiner la question de la course aux armes dans l’espace et chargé de formuler des recommandations pour établir un accord juridiquement contraignant pour prévenir le déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique. Il a souhaité que le premier groupe de travail intersession, qui doit se réunir en 2019, soit inclusif. Il s’agit de questions complexes et pertinentes étant donné l’évolution rapide de nouvelles techniques spatiales, a noté le délégué, qui a souligné qu’il revient à tous les États de s’assurer de l’utilisation pacifique de l’espace.
Le représentant a suggéré la tenue de réunions ad hoc au sein des Première et Quatrième Commissions, jugeant que les mécanismes des Nations Unies sont les mieux placés pour favoriser les débats et sortir de l’impasse institutionnelle qui existe en la matière. Il a par ailleurs souhaité associer le secteur privé aux travaux car il s’agit d’un acteur clef dans l’espace.
Mme ANNE KEMPPAINEN, déléguée de l’Union européenne, a souligné que l’espace est un bien commun mondial. Selon elle, renforcer la sécurité et la nature pacifique de l’espace n’est possible que via la coopération internationale. « Nous avons développé une industrie spatiale qui nous permet de mener une activité de grande ampleur », a-t-elle rappelé, en précisant que l’Union européenne a le deuxième budget spatial du monde.
À ses yeux, l’espace est autant un bien commun qu’une responsabilité et nécessite donc une gouvernance mondiale. Le Traité de l’espace de 1967 et d’autres instruments des Nations Unies sont, à ce titre, la pierre angulaire de cette coopération. Elle a ensuite souligné l’importance de la transparence et des mesures de renforcement de la confiance qui permettent de pérenniser l’usage pacifique de l’espace. Selon elle, le code de conduite international pour les activités menées dans l’espace extra-atmosphérique est également un instrument pertinent pour préserver l’intégrité de l’environnement spatial.
Déterminés à promouvoir des comportements responsables dans l’espace, les États de l’UE veulent prémunir le monde d’une course aux armements dans l’espace. Préoccupé par le développement d’armes antisatellites, l’Union européenne continue d’avoir des réserves sur le projet de traité relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace et de la menace ou de l’emploi de la force contre des objets spatiaux. Selon elle, un nouvel instrument juridiquement contraignant doit être complet, effectif et vérifiable.
Par ailleurs, elle s’est dite inquiète par rapport au projet de résolution relatif au non-placement en premier d’armes dans l’espace, avertissant que ce texte augmente le risque de conflits dans l’espace car il ne répond pas à des questions complexes comme la définition de ce qu’est une arme dans l’espace.
Enfin, elle a noté les risques posés par l’envoi de constellations de milliers de satellites qui peuvent engendrer des collisions. Elle a indiqué que les nouvelles technologies de surveillance spatiale, le retrait de débris spatiaux ou la mise en orbite de satellite de service pourraient jouer un rôle important pour assurer l’usage durable de l’espace. Elle a donc appelé à renforcer la coopération internationale et à établir les normes d’un comportement responsable. Un instrument juridiquement non contraignant pourrait aider à atteindre ces objectifs, notamment s’il est basé sur les travaux du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et permet d’établir un mécanisme volontaire pour la programmation des manœuvres susceptibles de présenter un risque pour la vie ou la propriété sur Terre. Ce système de notification pourrait également comprendre les rentrées à haut risque d’objets spatiaux, a-t-elle suggéré.
Mme YLEEM D.S. POBLETE (États-Unis) a indiqué que la Russie a déployé récemment un objet dans l’espace qui « ne ressemblait à rien de vu précédemment » et s’est dite préoccupée par ces activités qui ne semblent pas normales. Quel est cet objet spatial? Quelle est sa mission? Les intentions ne sont pas claires, selon elle. Un responsable russe a déclaré qu’il s’agissait d’un « nouveau type d’arme pour les troupes spatiales », s’est inquiétée la représentante, tandis qu’un représentant militaire russe a évoqué un système de combat laser. Par ailleurs, la Russie a revendiqué être en train de développer des systèmes de missiles qui pourront être lancés par des aéronefs pour détruire des satellites américains. Ces activités ne correspondent pas à la rhétorique diplomatique de la Russie, qui est en train de développer des capacités pour attaquer des satellites dans l’espace, a-t-elle relevé.
Pour la représentante, cette situation impose d’adopter des mesures contraignantes. Or le traité proposé, ainsi que le projet de résolution sur le non-déploiement en premier ne sont pas pertinents venant de la part d’un pays qui a violé ses obligations à maintes reprises. Elle a donc appelé à rejeter cette « résolution Potemkine » de la Russie, jugeant que ces initiatives « hypocrites et vides de sens » ne sont pas la réponse adéquate au renforcement de la confiance. « Les États-Unis préfèreraient que l’espace reste exempt de conflit mais ils seront prêts à relever toute forme de défi si nos adversaires transforment l’espace en théâtre de guerre », a-t-elle prévenu.
Depuis le début de l’ère spatiale, il y a 60 ans, a poursuivi la représentante, il était acquis que toutes les nations peuvent utiliser pacifiquement l’espace et les Nations Unies considèrent que ces activités peuvent concerner la sécurité nationale. Les États-Unis souhaitent continuer à œuvrer en faveur de la confiance et de la stabilité dans l’espace mais les projets de traité et de résolution sur le non-déploiement en premier ne sont pas des instruments adéquats pour atteindre ces objectifs, a-t-elle conclu.
Mme SABRINA DALLAFIOR (Suisse) a souligné les risques d’attaques, de conflits armés et de collisions qui animent l’espace extra-atmosphérique. Constatant avec satisfaction les progrès réalisés sur cette question dans de nombreux organes, elle a souligné les travaux de la Conférence du désarmement pendant lesquels la course aux armements dans l’espace a été sérieusement étudiée. Elle a espéré que ceux-ci permettront de préparer le terrain pour de nouveaux instruments.
Au-delà de ces progrès, elle a jugé que beaucoup reste à faire pour établir des normes. La Première Commission doit jouer un rôle fédérateur sur ce sujet, a-t-elle ajouté, et redoubler d’efforts pour travailler de façon plus consensuelle.
Droits de réponse
La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les accusations sans fondement de la France, soulignant que son gouvernement avait pris des mesures en matière de dénucléarisation de la péninsule. Plutôt que de la saluer, le représentant français fait des allégations sans fondement, s’est indigné le représentant. Jugez-vous donc que les armes nucléaires sont sûres entre vos mains et pas dans les nôtres? a lancé le délégué qui, a ensuite conseillé à France de suivre l’exemple de son pays et de se séparer de ses armes nucléaires.
Le représentant de la Syrie a rejeté catégoriquement tout usage d’armes de destruction massive ou chimiques. « C’est un crime contre l’humanité injustifiable », s’est-il exclamé. Il a rappelé que dans le rapport présenté au Conseil de sécurité en juin 2014, il était notifié que la Syrie avait respecté ses obligations en vertu de la Convention sur les armes chimiques et que toutes les matières chimiques que son pays avait en stock avaient été livrées à l’OIAC. Il a, par ailleurs, estimé que le Mécanisme conjoint d’enquête n’avait pas honoré son mandat, raison pour laquelle il n’a pas été reconduit.
Rejetant toutes les allégations hostiles à son pays, il a renvoyé la Suisse, le Canada et l’Allemagne à leurs propres manquements. Il a notamment accusé le Canada d’avoir participé à l’élaboration de la première arme nucléaire au monde, d’avoir fourni des expertises aux groupes terroristes qui sévissent en Syrie et d’avoir accueilli sur son sol les terroristes des Casques blancs. Il a ensuite accusée l’Allemagne d’avoir violé les conventions sur les armes de destruction massive en accueillant des armes nucléaires sur son territoire et en fournissant à Israël des sous-marins capables d’accueillir des têtes nucléaires.
À son tour, la France a salué les efforts diplomatiques en cours qui ont déjà permis de réduire la tension dans la péninsule coréenne, tout en appelant à ne pas ignorer le fait que la RPDC poursuit ses programmes nucléaires et balistiques. Ce que la France attend ce sont des mesures vérifiables, complètes et irréversibles sur les armes nucléaires, balistiques et chimiques.