En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/18505-SC/12805-CD/3702

Le Secrétaire général appelle à rétablir les canaux de communication avec la RPDC pour prévenir tout conflit armé

On trouvera, ci-après, l’allocution du Secrétaire général, M. António Guterres, prononcée, aujourd’hui, à l’occasion du débat thématique du Conseil de sécurité consacré à la non-prolifération/République populaire démocratique de Corée:

Qu’il me soit permis en premier lieu de remercier les États-Unis et vous personnellement, Monsieur le Président, d’avoir convoqué la présente séance.

La situation sur la péninsule coréenne est l’une des questions les plus anciennes et les plus graves dont l’ONU soit saisie.  La première fois que le Conseil de sécurité a adopté une résolution sur la question nucléaire en République populaire démocratique de Corée -la résolution 825 (1993)–, c’était en 1993, pour exhorter la République populaire démocratique de Corée à ne pas se retirer du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Vingt-quatre ans plus tard, et en dépit de nombreux efforts, ce problème est resté sans solution.

Face à l’accélération des activités nucléaires et de missiles balistiques de la République populaire démocratique de Corée, le Conseil de sécurité a adopté deux résolutions imposant des sanctions à ce pays - les résolutions 2270 (2016) et 2321 (2016) - et s’est réuni 11 fois en consultations d’urgence depuis janvier 2016.  Durant cette période, la République populaire démocratique de Corée a procédé à deux essais nucléaires, à plus de 30 tirs recourant à la technologie des missiles balistiques et à diverses autres activités dans le cadre de ses programmes nucléaires et de missiles balistiques.  Au nombre de ses tirs recourant à la technologie des missiles balistiques, il y a eu des essais de missiles balistiques à courte portée, à moyenne portée et à portée intermédiaire, des tirs de missiles balistiques lancés par sous-marin, et le placement d’un satellite en orbite.

Ces essais et tirs constituent des violations manifestes des résolutions du Conseil de sécurité.  L’absence de coordination et de notification préalablement à ces tirs, autres que le lancement spatial du 7 février 2016, est aussi contraire aux règles et normes reconnues à l’échelle internationale adoptées par l’Organisation maritime internationale et l’Organisation de l’aviation civile internationale.  Les avions et les navires n’ont pas pu planifier leurs itinéraires pour s’éloigner de ces activités dangereuses.  Et les États voisins n’ont pas pu déclarer dangereuses, d’accès limité ou interdites d’accès des zones relevant de leur juridiction.

L’Agence internationale de l’énergie atomique ne peut toujours pas avoir accès à la République populaire démocratique de Corée pour vérifier l’état d’avancement de son programme nucléaire.  L’Agence continue de suivre l’évolution de la situation par le biais d’images satellitaires et a observé des « signatures » propres au fonctionnement du réacteur de production de plutonium et de l’installation d’enrichissement par centrifugation signalée.  L’analyse des images prises par des satellites commerciaux a montré aussi que les activités se poursuivent au niveau du site d’essais nucléaires, qui serait maintenu en état de disponibilité opérationnelle pour d’autres explosions nucléaires expérimentales.

La République populaire démocratique de Corée insiste de plus en plus sur l’importance de la dissuasion nucléaire dans sa doctrine militaire.  Au septième congrès du Parti du travail de Corée en mars 2016, le dirigeant du pays, M. Kim Jong Un, a décrit le pays comme un État nucléaire responsable.  Plus récemment, dans une déclaration faite à la Commission du désarmement de l’Organisation des Nations Unies le 3 avril, tout en réaffirmant son appui à un désarmement nucléaire général et complet, la République populaire démocratique de Corée a affirmé que « se doter de l’arme nucléaire est la politique de notre État ».

La République populaire démocratique de Corée est le seul pays à avoir effectué des essais nucléaires au cours de ce siècle.  Nous devons supposer que chaque essai ou tir lui permet d’enregistrer des progrès technologiques dans sa quête d’une capacité nucléaire militaire.

Je condamne dans les termes les plus forts les violations répétées par la République populaire démocratique de Corée des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  La poursuite effrénée par la République populaire démocratique de Corée de son programme d’armes nucléaires et de missiles balistiques, au mépris des demandes répétées du Conseil de sécurité l’engageant à cesser ces activités, menace de déstabiliser la sécurité régionale et internationale et compromet gravement les efforts internationaux de désarmement et de non-prolifération.

Je suis alarmé par le risque d’escalade militaire dans la région, y compris par erreur d’appréciation ou malentendu.  Je suis particulièrement préoccupé par la possibilité que les efforts visant à contrer les activités de déstabilisation de la République populaire démocratique de Corée débouchent aussi sur une course à l’armement et des tensions accrues, entravant encore davantage la capacité de la communauté internationale de rester unie et de trouver un règlement pacifique.  Il incombe à la République populaire démocratique de Corée de respecter ses obligations internationales.  Dans le même temps, la communauté internationale doit aussi redoubler d’efforts pour gérer et réduire les tensions.

L’absence de canaux de communication avec la République populaire démocratique de Corée pourrait s’avérer dangereuse.  Un conflit armé en Asie du Nord-Est, où vit un cinquième de la population mondiale et qui représente le cinquième du produit national brut, aurait des répercussions mondiales.  Il nous faut éviter les erreurs d’appréciation et les malentendus. Il nous faut agir maintenant pour prévenir le conflit et instaurer une paix durable.  Cela signifie qu’il faut que la République populaire démocratique de Corée s’abstienne d’autres essais, se conforme aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et envisage la reprise du dialogue.  Cela signifie aussi rétablir et renforcer les canaux de communication, en particulier entre militaires, pour réduire le risque d’erreurs d’appréciation et de malentendus.  Et cela signifie que tous les États Membres doivent mettre en œuvre les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

J’ai pris note de l’attachement du Conseil de sécurité à un règlement diplomatique et politique de la crise; des efforts faits par les membres du Conseil et d’autres États pour faciliter une solution pacifique globale par le dialogue; et de ce que, pour le Conseil, il importe de s’attacher à réduire les tensions.  Le Conseil a à sa disposition d’importants outils allant des sanctions ciblées aux canaux de communications.  En tant que Secrétaire général, je suis déterminé à de rechercher des solutions pacifiques et politiques.  Je suis disposé à me rendre utile par tous les moyens possibles, mais j’apprécierais à cet égard les orientations et le concours du Conseil de sécurité.  Je me félicite que le Conseil comprenne l’importance des impératifs humanitaires de la situation politique.

Le 21 mars, nous avons rendu public le tout dernier document sur les besoins et les priorités de la République populaire démocratique de Corée.  Pour cette année, 13 organismes des Nations Unies et organisations non gouvernementales internationales opérant en République populaire démocratique de Corée demandent 114 millions de dollars pour répondre aux besoins pressants de 13 millions de personnes particulièrement vulnérables – soit la moitié de la population du pays.  La population de la République populaire démocratique de Corée a besoin de notre générosité et de notre aide.

Je demande aussi aux autorités de la République populaire démocratique de Corée de collaborer avec les mécanismes des Nations Unies chargés des droits de l’homme et avec la communauté internationale pour remédier à la grave situation des droits de l’homme et améliorer les conditions de vie de sa population.  C’est pourquoi je me félicite de la visite que doit effectuer le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées en République populaire démocratique de Corée la semaine prochaine.  Comme nous en avons parlé dans cette salle le 18 avril, l’amélioration des droits de l’homme non seulement préservera les moyens de subsistance et la dignité des Nord-Coréens, mais promouvra aussi la sécurité et la stabilité à long terme dans la région et au-delà.

Je voudrais, pour terminer, souligner que notre priorité collective est la prévention des conflits.  Nous devons rester résolus à suivre la voie pacifique et diplomatique aux fins d’une dénucléarisation pacifique de la péninsule coréenne.

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