Forum politique de haut niveau: « L’humanité est embarquée dans le même bateau », déclare le Président de l’Assemblée générale en invitant à des partenariats
Ne perdons pas de vue que « l’humanité est embarquée dans le même bateau », a déclaré le Président de l’Assemblée générale, M. Peter Thomson, lors de la quatrième journée de la session du Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC). Cette métaphore rappelant le destin commun des hommes a également sonné comme un appel à « agir ensemble » dans le cadre de partenariats, tel que le prévoit l’objectif 17 du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Cette question a occupé les participants dans l’après-midi, après qu’ils ont examiné, le matin, des moyens spécifiques de mise en œuvre du Programme 2030 grâce aux infrastructures résilientes, à l’industrialisation durable et à l’innovation (objectif 9) et à l’exploitation durable des océans et des ressources marines (objectif 14).
Les délégations comme les experts ont appelé de leurs vœux la multiplication de partenariats à la fois innovants, efficaces et multipartites. « Des partenariats véritables, au sens invoqué dans les Orientations de Samoa », a précisé le représentant des Seychelles en faisant référence aux engagements de la troisième Conférence internationale sur les petits États insulaires en développement.
Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Wu Hongbo, qui était aussi le Secrétaire général de la Conférence sur les océans tenue en juin dernier, a rappelé que « l’Appel à l’action », le document final, comptait plus de 1 400 engagements volontaires d’États et de toutes les parties prenantes. Ces engagements sont voués à trouver des solutions à la crise des océans dont la partie visible de l’iceberg est la colonisation des eaux par les déchets en plastique.
Les partenariats devraient aussi s’appuyer sur les conclusions et recommandations issues du Forum de l’ECOSOC sur le suivi du financement du développement de 2017, ont dit les intervenants. Comme autre ligne de conduite à suivre, ils ont mentionné le Programme d’action d’Addis-Abeba, adopté par la troisième Conférence internationale sur le financement du développement en 2015, qui avait identifié les « moyens de mise en œuvre » du programme de développement international.
À propos de financement, de nombreux intervenants ont souligné qu’il était urgent de mobiliser, rediriger et débloquer les milliers de milliards de dollars de ressources privées qui peuvent permettre de réaliser les 17 objectifs de développement durable. L’Union européenne a ainsi promis un plan d’encouragement des investissements privés en Afrique.
Certains ont tenu à rappeler que les moyens de mise en œuvre doivent aussi provenir de l’aide publique au développement (APD), une aide qui a totalisé 142 milliards de dollars en 2016, alors que les transferts de fonds privés ont atteint dans la même année la somme de 429 milliards de dollars. Une autre comparaison a montré l’insuffisance de cette aide pour le continent africain, puisqu’elle est inférieure aux flux financiers illicites quittant l’Afrique.
Tirant les conclusions de cette situation, le représentant de l’Algérie a voulu rappeler aux pays développés qu’ils doivent respecter leurs engagements en matière d’APD, tandis que d’autres ont recommandé de mieux lutter contre les flux financiers illicites partant des pays d’Afrique.
Autre moyen de renforcer la mise en œuvre: l’élargissement de l’assiette fiscale des pays en développement. La délégation des Philippines a ainsi plaidé en faveur de réformes fiscales dans ces pays pour parvenir à une « fiscalité plus stratégique, plus juste et plus progressive » au service du financement du développement. Une remarque que la Ministre des affaires étrangères de la Suède, qui est aussi Ambassadrice pour le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a jugée extrêmement pertinente.
L’importance de construire des infrastructures résilientes a, par ailleurs, été soulignée au cours de la première table ronde. Le délégué de l’Éthiopie a expliqué que des partenariats sont ici encore nécessaires, afin que le monde développé aide les pays en développement à atteindre les objectifs d’infrastructure résiliente, d’industrialisation durable et d’encouragement de l’innovation.
Une autre table ronde, portant sur la science, la technologie et l’innovation aux fins des objectifs de développement durable, a permis de mettre en avant un autre partenariat majeur, le Mécanisme de facilitation des technologies qui, de même que la Banque de technologies pour les pays les moins avancés, est toujours en attente d’être mis en œuvre.
Le Forum politique de haut niveau reprendra ses travaux demain, vendredi 14 juillet, à partir de 9 heures.
FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE, ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL
Éliminer la pauvreté et promouvoir la prospérité dans un monde en mutation (E/2017/31, A/72/75–E/2017/56, E/2017/63, E/2017/66*, E/HLPF/2017/1, E/HLPF/2017/1/Add.1, E/HLPF/2017/1/Add.2, E/HLPF/2017/1//Add.3, E/HLPF/2017/1/Add.4, E/HLPF/2017/1/Add.5, E/HLPF/2017/2, E/HLPF/2017/3, E/HLPF/2017/4 et E/FFDF/2017/3)
Examen de la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 9 (Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation)
Ce débat a été l’occasion pour les intervenants de mettre l’accent sur les opportunités sans précédents qu’offrent l’innovation et les nouvelles technologies pour réaliser l’objectif de développement durable 9, gagner en productivité et en création d’emplois, tout en réduisant les gaspillages.
« L’objectif de développement durable 9 est probablement l’un des meilleurs cadres pour trouver des façons de ne laisser personne de côté et de parvenir à une société plus inclusive », a posé comme principe M. ARNT HOLTE, ancien Président de la World Blind Union (Norvège).
Dans une déclaration liminaire, M. JOHN DANILOVICH, Secrétaire général de la Chambre de commerce internationale, a mis l’accent sur la révolution qu’a permis l’Internet pour démocratiser le commerce international en créant des opportunités économiques sans précédent pour les petites et moyennes entreprises. Les sociétés qui utilisent Internet ont, par exemple, cinq fois plus de chance d’exporter que les sociétés qui utilisent des moyens traditionnels. Mais l’Internet n’est pas tout, a-t-il tempéré en indiquant que les besoins en financements se font cruellement sentir pour 60% des PME dans le monde. Il a par ailleurs appelé à mettre en place des partenariats permettant aux entreprises de créer des emplois. Illustrant l’ampleur du défi, il a rappelé qu’un million de personnes arrivent chaque mois sur le marché de l’emploi en Inde.
« Des infrastructures, des technologies et des investissements »: c’est ce qu’il faut pour atteindre l’objectif de développement durable 9, notamment celui consistant à promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous, a insisté M. PATRICK HO, Vice-Président du Fonds pour l’énergie en Chine et ancien Ministre des services publics de Hong Kong. Il a appelé à promouvoir une industrie propre et équitable, en examinant les conséquences éthiques et sociales de la robotisation. Il a précisé que la valeur des infrastructures qui vont être créées dans les 15 années à venir allait dépasser la valeur de toutes les infrastructures existant à ce jour.
L’importance de construire ces infrastructures a été soulignée par le modérateur de ce débat, le Vice-Ministre aux affaires multilatérales et aux droits de l’homme du Mexique, M. MIGUEL RUIZ CABAÑAS, qui a expliqué combien les infrastructures sont nécessaires pour tirer parti de toutes les opportunités qu’offrent les technologies émergentes, dont l’intelligence artificielle et l’automatisation.
La représentante du Chili n’a pas dit le contraire en appelant à consacrer au moins 3% du PIB aux infrastructures pour viser un développement humaniste. Elle a conseillé de planifier ces projets de façon à tenir compte des vulnérabilités des territoires.
Les infrastructures de transport ont particulièrement intéressé les délégations d’États Membres. Le représentant de la Chine a mentionné le plan de développement chinois 2016-2020 qui vise à développer des réseaux de transports verts, tandis que sa collègue du Kenya a indiqué que son pays avait lancé une campagne visant à améliorer les réseaux de transport ferroviaires et les infrastructures portuaires de Mombassa, port d’entrée et de sortie de l’Afrique de l’Est. « La durée du trajet en train entre Nairobi et Mombassa est aujourd’hui de 4 heures, contre 10 heures auparavant, et nous avons développé les réseaux de chemin de fer vers le Soudan du Sud », s’est félicitée la représentante.
Tous ces efforts exigent bien sûr des investissements conséquents, ont noté les participants. « Nous devons pouvoir contrôler les investissements afin de nous assurer qu’ils permettent véritablement de créer plus d’emploi avec plus de valeur ajoutée, et ce, dans tous les pays », a insisté Mme MARIA KIWANUKA, ancienne Ministre des finances et Conseillère spéciale du Président de l’Ouganda.
Sur le même ton, le délégué de l’Éthiopie a insisté sur le fait que « c’est bien l’absence de financement qui demeure le principal frein au développement des pays les moins avancés ». C’est pourquoi il a appelé à mettre en place des partenariats conséquents, pour que le monde développé aide les pays en développement à atteindre les objectifs d’infrastructure résiliente, d’industrialisation durable et d’encouragement de l’innovation.
De son côté, le représentant du Nigéria a jugé indispensable que la communauté internationale appuie la transformation économique inclusive des pays en développement en soutenant leurs petites et moyennes entreprises.
M. MAGNUS ARILDSSON, Chef de la gestion des produits internet de la société ERICSSON (Suède), a apporté un éclairage sur les moyens qui permettront, selon lui, d’augmenter la production agricole mondiale de 70% d’ici à 2050. Il a conseillé à cette fin à la communauté internationale de s’entendre sur des normes internationales qui régiraient le recours à des technologies de communication pour exploiter toutes les opportunités de productivité et éviter les gaspillages. En effet, a-t-il précisé, « 70% de l’électricité produite est perdue pendant la distribution et 20% des émissions de CO2 proviennent de la production électrique ».
L’expert a cependant voulu mettre l’accent sur les opportunités plutôt que sur les problèmes, en expliquant l’utilité du recours à Internet pour améliorer l’automatisation des outils. Ces efforts permettraient d’augmenter la productivité agricole de 50% tout en réduisant l’utilisation d’eau de 15% et des engrais de 30%, a-t-il indiqué. Il a pris l’exemple d’une vache équipée de capteurs: cela permet d’augmenter la production de lait de 20% tout en réduisant de 10% le recours à des médicaments et de 50% celui aux hormones.
Examen de la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 14 (Exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable)
Nous ne devons pas perdre de vue que « l’humanité est embarquée dans le même bateau ». C’est par cette métaphore que le Président de l’Assemblée générale, M. PETER THOMSON, a lancé le débat du Forum politique de haut niveau portant sur l’objectif de développement durable 14 en rapport à la vie aquatique.
M. Thomson a ainsi invité la communauté internationale à « agir ensemble » pour trouver les moyens innovants d’atteindre les cibles de cet objectif, en faisant fond sur l’élan politique ayant marqué la Conférence des Nations Unies de haut niveau visant à appuyer la réalisation de l’objectif de développement durable 14, qui s’est tenue au Siège de l’ONU, à New York, du 5 au 9 juin 2017.
C’est parce que le présent débat s’inscrit dans la continuité de ladite Conférence que les principaux organisateurs de l’évènement du mois dernier sont venus parler de ses résultats, avant que, en deuxième partie de la table ronde, des experts, représentants d’États Membres et de la société civile ne viennent rappeler la place centrale des océans et des ressources marines dans l’optique du développement durable.
Pour rappeler l’importance de la question de la vie aquatique, Mme YONGYI MIN, de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a prévenu que la surpêche, qui touchait 10% des ressources halieutiques en 1974, affectait 31% des ressources en 2013. En outre, si les océans ont l’avantage d’absorber environ 30% du gaz carbonique émis par l’humanité, contribuant ainsi à la lutte contre l’effet de serre, ce phénomène a un coût indésirable en ce qu’il conduit à l’acidification des océans, mettant ainsi en danger la vie marine. Les niveaux d’acidité ont ainsi augmenté de 26% depuis l’entame de la révolution industrielle, a rappelé Mme Min qui a témoigné de la mort par manque d’oxygène de nombreuses espèces marines.
C’est pour cette raison et d’autres du même ordre qu’il faut renforcer la gouvernance des océans par la mobilisation de ressources adéquates en faveur de l’objectif de développement durable 14, a plaidé le Coprésident de la Conférence sur les océans, M. OLOF SKOOG (Suède). Il s’est également félicité de la réussite de ladite Conférence dont les résultats ont été présentés par M. WU HONGBO, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales et Secrétaire général de la Conférence sur les océans. Il a rappelé que « l’Appel à l’action », le document final, comptait plus de 1 400 engagements volontaires d’États et de toutes les parties prenantes, en vue de trouver des solutions à la crise des océans dont la partie visible de l’iceberg est la colonisation des océans par les déchets en plastique.
« Nous nous félicitons de tous ces engagements; il est maintenant question de les mettre en œuvre », a fait remarquer la déléguée des Maldives qui parlait au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), un groupe de pays dont le développement dépend de l’objectif 14.
Pour expliquer que le respect de ces promesses dépend de l’engagement de tous, l’autre Coprésident de la Conférence sur les océans, M. LUKE DAUNIVALU (Fidji), a rappelé qu’« aucun homme n’est une île ». D’où l’importance de nouer des partenariats et de partager les connaissances afin que les États Membres soient mieux équipés pour réaliser l’objectif 14.
Son homologue du Togo a même parlé de la « mutualisation des initiatives en vue de mieux gérer les ressources marines », tandis que le Représentant permanent des Seychelles auprès des Nations Unies, M. RONALD JUMEAU, a appelé de tous ses vœux la multiplication de partenariats à la fois innovants, efficaces et multipartites. « Des partenariats véritables, au sens invoqué dans les Orientations de Samoa », a-t-il plaidé en faisant référence aux engagements de la troisième Conférence internationale sur les petits États insulaires en développement.
« Aucune personne censée ne peut croire que les objectifs de développement durable pourront être réalisés sans l’exploitation des écosystèmes océaniques », a estimé M. JAKE RICE, scientifique en chef au Département de la pêche et des océans du Canada, avant de donner une piste de partenariats utiles: il a suggéré que les connaissances millénaires acquises par les peuples autochtones soient intégrées aux systèmes modernes de préservation des océans.
Étant donné que ces communautés souffrent de la rareté des ressources marines, elles ne peuvent que s’engager pour leur durabilité, a renchéri Mme MARJO VIERROS, Directrice des politiques côtières et de la recherche en sciences humaines au Forum mondial sur les océans. Elle a aussi souhaité que les savoirs des peuples autochtones soient mis à contribution tout en favorisant l’innovation. « Il faudrait déjà que leurs us et coutumes autochtones soient respectés », a ironisé le Représentant permanent des Seychelles auprès des Nations Unies. Il a également fait observer que la santé des océans est intrinsèquement liée aux changements climatiques.
Mme TUI SHORTLAND, Directrice du Centre de connaissances autochtones et locales du Pacifique en Nouvelle-Zélande, a suivi la même logique en demandant que les peuples autochtones soient reconnus comme des acteurs importants et qu’ils puissent bénéficier de mesures d’autonomisation.
La représentante du grand groupe des femmes, déplorant pour sa part la tendance à la surexploitation des ressources marines, a appelé à reconnaître l’importance du leadership des femmes dans ce domaine, car elles sont à l’avant–garde de la préservation des océans. Elles devraient donc être associées à toutes les initiatives de partenariats y relatifs.
D’autres initiatives ont également été mentionnées en vue de réaliser l’objectif 14. C’est ainsi que le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, M. MIGUEL DE SERPA SOARES, a parlé des activités d’ONU-Océans, qui, si elles étaient renforcées par l’Assemblée générale, permettraient par exemple d’assurer le suivi de la mise en œuvre de l’objectif 14 et de toutes les cibles en rapport avec la vie marine. En effet, ONU-Océans est un mécanisme interinstitutions visant à renforcer la coordination, la cohérence et l’efficacité des organisations compétentes du système des Nations Unies et de l’Autorité internationale des fonds marins.
La représentante de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a pour sa part plaidé pour la réduction de la surpêche, appelant à la reconstitution des stocks halieutiques à travers, là encore, des partenariats. Elle a aussi souligné l’importance de promouvoir la pêche à petite échelle, qui est essentielle à la sécurité alimentaire des petites communautés.
Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, s’exprimant au nom des petits États insulaires du Pacifique, a promis que la région entendait mettre en œuvre des zones marines protégées, dans la droite ligne des 65 engagements volontaires soumis par la région à la Conférence sur les océans. De même que le Togo et le Mexique, le représentant a en outre appelé à l’avènement d’un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. D’autres pays ont également présenté les actions prises au niveau national pour la mise en œuvre de l’objectif 14.
Examen thématique de la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 17 (Renforcer les moyens de mettre en œuvre le partenariat mondial pour le développement durable et le revitaliser)
Thème « Investir et financer les objectifs de développement durable »
Cette première table ronde de l’après-midi a permis au Forum de se pencher sur les moyens de mettre en œuvre l’objectif de développement durable 17 en s’appuyant sur les accords intergouvernementaux et les conclusions et recommandations issues du Forum de l’ECOSOC sur le suivi du financement du développement de 2017.
Présentant les grandes lignes de celui-ci, M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) et M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) ont parlé des mesures plus agressives qui ont été recommandées pour protéger les créanciers minoritaires. La promotion de l’autonomisation des femmes a également été au cœur du Forum de l’ECOSOC qui a souligné le potentiel de la parité entre les sexes en matière de croissance économique et de lutte contre la fuite des capitaux africains. À cet égard, il a été noté que les flux financiers illicites quittant l’Afrique sont supérieurs au montant total de l’aide publique au développement (APD) que le continent reçoit.
Les intervenants ont souligné qu’une action urgente était nécessaire pour débloquer, mobiliser et rediriger les milliers de milliards de dollars de ressources privées qui peuvent permettre de réaliser les objectifs de développement durable. Si on attend trop du secteur public, nous courrons un réel risque, a en effet mis en garde Mme CHEE YOKE LING, Directrice des Programmes du Réseau du Tiers Monde Network (Malaisie), avant d’appeler à résoudre des problèmes non résolus en matière de gouvernance économique pour éviter de tomber dans une nouvelle crise. « Il ne faut pas se contenter de fermer les yeux pour espérer un miracle », a-t-elle prévenu.
Si le représentant de l’Algérie a conseillé de « commencer par rappeler aux pays développés qu’ils doivent respecter leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD) », M. GEBEYEHU GANGA (Éthiopie) a mis en garde que les objectifs de développement durable ne pourraient être atteints d’ici à 2030 « sur la base des engagements actuels ». Il a exhorté les banques de développement multilatérales à financer des initiatives de manière durable et demandé à la communauté internationale de faire face à l’instabilité des prix des matières premières.
« Il y a eu 429 milliards de dollars de transferts privés vers les pays en développement en 2016, contre 142 milliards d’aide publique au développement (APD) », a comparé M. STEFAN SCHWEINFEST, Directeur de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DAES), avant de souligner une baisse de 3,9% en 2016 de l’aide bilatérale en direction des pays les moins avancés (PMA). En outre, alors que les données statistiques sont essentielles pour mesurer les progrès et adapter les réponses, le Directeur de la Division de statistique a noté que seuls 89% des pays avaient mené des recensements de populations et de logements au cours des 10 dernières années (2007-2016), et que seuls 56% des pays avaient su présenter des données complètes sur les naissances et les décès entre 2010-2015.
De manière générale, les intervenants ont donc souligné la nécessité de faire des investissements à long terme dans les pays en développement, notamment dans les énergies durables, les infrastructures, le transport et les technologies de l’information et des communications.
« Il nous faut des capitaux sur le long terme », a insisté M. PETER ADRIAENS, Président-directeur général de Equarius Risk Analytics LLC, cofondateur de KeyStone Compact Group Ltd., et Directeur de Judge of Global CleanTech Cluster Association (GCCA), USA, en précisant qu’il valait mieux investir dans des avoirs diversifiés, car cela génère six fois plus de bénéfices que des investissements dans un avoir unique.
La représentante de la Chine a précisé que les pays en développement devaient être soutenus de manière durable et stratégique « sur la base du principe de la responsabilité commune mais différenciée ». La représentante des syndicats a appelé concrètement à s’attaquer au fardeau de la dette des pays en développement, avant de demander à ces derniers de garantir les droits des travailleurs. La représentante du grand groupe des femmes a renchéri en appelant à mettre fin aux accords commerciaux injustes.
De son côté, Mme KAJSA OLOFSGÅRD, Ambassadrice pour le programme de développement durable à l’horizon 2030, et Ministre des affaires étrangères de la Suède, a mis l’accent sur l’importance de l’engagement multilatéral et de partenariats aussi larges que possible.
Tout en reconnaissant que le service public ne devait pas tout financer, le représentant du secteur privé a insisté pour dire qu’il revenait quand même au secteur public de mettre en place des politiques propices à l’investissement. Le représentant des Philippines a parlé à ce propos de la marge de manœuvre dont disposent les États en procédant à une réforme fiscale, pour parvenir à une fiscalité plus stratégique, plus juste et plus progressive au service du financement des objectifs de développement. Une remarque que la Ministre des affaires étrangères de la Suède a jugée extrêmement pertinente.
Pour compléter les investissements publics, le représentant de l’Union européenne a cité la création d’un plan européen pour encourager les investissements privés en Afrique, là où les investissements ont du mal à arriver.
Thème « Faire progresser la science, la technologie et l’innovation aux fins des objectifs de développement durable »
En introduction à cette discussion, le modérateur, M. SUSIL PREMAJAYANTHA, Ministre de la science, de la technologie et de la recherche de Sri Lanka, a noté que la science, la technologie et l’innovation (STI) présentent à la fois des défis et des opportunités pour la réalisation des objectifs de développement durable. Il a rappelé que le Mécanisme de facilitation des technologies avait été créé pour aider les pays en développement à profiter pleinement des avantages des STI. Pour faire avancer le débat sur ces questions, il a demandé aux participants de partager leurs vision et recommandations pour l’utilisation de ces outils au service d’un bien-être durable.
La parole a tout d’abord été donnée à M. MACHARIA KAMAU (Kenya), Coprésident du Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable, pour qu’il présente les résultats de cet évènement. L’idée principale retenue a été le caractère essentiel et incontournable des STI pour la réalisation du développement durable. Ce Forum a ensuite donné lieu à la sélection de plusieurs innovations et à des recommandations pour leur utilisation par toutes les parties prenantes.
Une autre leçon apprise de ce Forum est qu’il faut accorder une attention particulière aux solutions à faible coût et à celles qui satisfont aux besoins des communautés. Il faut également des investissements intelligents pour libérer le potentiel créatif des jeunes et des femmes. Pour opérer la « révolution technologique » nécessaire, il a été conseillé d’opérationnaliser le Mécanisme de facilitation des technologies. « Je regrette que le Mécanisme n’ait pas reçu les ressources attendues des gouvernements », a dit M. Kamau qui aurait aussi voulu voir ce secteur représenté au débat d’aujourd’hui, d’autant plus qu’il détiendrait un capital de 16 000 milliards de dollars.
L’autre Coprésident du Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable, M. VAUGHAN TUREKIAN, qui est le Conseiller scientifique et technologique du Secrétaire d’État des États-Unis, a rappelé que 2017 marquait le dixième anniversaire de la téléphonie mobile intelligente qui a des conséquences sur tous les secteurs et notamment l’agriculture. Pour que la technologie continue de porter des fruits, il a conseillé de mettre en place des réseaux interconnectés avec les gouvernements, les universités et les citoyens, chacun devant jouer son rôle. Cela implique de continuer le dialogue transversal.
Mme HEIDE HACKMANN, Directrice exécutive du Conseil international pour la science et Coprésidente du Groupe des 10 représentants de haut-niveau en appui au Mécanisme de facilitation des technologies, a vanté les mérites de la science pour appuyer la réalisation des objectifs de développement durable. Pour cela, il faut mettre en place un cadre d’épanouissement et de développement de la science, a-t-elle recommandé en souhaitant que la science soit considérée comme un « bien public mondial », accessible à tous. Elle a, par conséquent, plaidé en faveur d’une éducation scientifique ouverte à tous et d’une collaboration renforcée au sein de la communauté scientifique.
Si les STI s’inscrivent dans un processus cumulatif qui ne requiert pas des ressources particulières, M. NEBOJSA NAKICENOVIC, Directeur général adjoint de l’Institut international d’analyse appliquée des systèmes, a toutefois tempéré cette observation par la mise en garde suivante: « nous courons le risque de réduction des budgets de la recherche car les investissements en STI vont dans la mauvaise direction ». Il a donc appelé à changer de cap pour pouvoir passer à la troisième révolution en STI. Il a souligné cette responsabilité commune qui doit se réaliser par un nouveau contrat social pour atteindre les 17 objectifs de développement durable.
De l’avis de M. DONOVAN GUTTIERES, point focal de la plateforme d’interface science politique du « grand groupe des enfants et des jeunes », les STI ne résoudront pas tous les problèmes du monde. Mais il n’en reste pas moins qu’elles sont utiles pour le Programme 2030. Il a invité à surmonter les barrières qui bloquent l’accès à ces outils, arguant qu’ « Internet est un bien public qui ne doit pas être monopolisé ». La « justice scientifique » fait partie de la « justice du développement », a-t-il ajouté.
Les échanges qui ont suivi avec les délégations ont réaffirmé l’importance des investissements et des partenariats en matière de STI, afin d’en tirer le maximum de bénéfices pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable. Certains ont saisi cette occasion pour mettre en garde contre la mauvaise utilisation des technologies.
La représentante du Viet Nam a regretté le fossé qui sépare les pays en termes d’accès aux STI, ce qui a été l’occasion, pour son homologue de la Chine, de demander aux pays développés d’aider les pays en développement à acquérir ces outils. La Chine souhaite d’ailleurs continuer à renforcer la coopération scientifique internationale, notamment la coopération Sud-Sud sur le plan de la science.
Plaidant dans le même sens, le délégué de l’Union européenne a fait l’éloge du partenariat européen de recherche ouvert aux chercheurs des pays en développement, et de l’initiative d’alignement des initiatives des pays européens et des pays africains.
Les organes des Nations Unies ont aussi été invités, par le représentant de l’Arménie, à aider les pays en développement à utiliser au mieux les STI. D’ailleurs l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a souligné l’appui qu’elle apporte depuis 50 ans aux pays qui veulent acquérir les technologies nécessaires à leur développement.
Revenant sur les avantages des STI, le représentant du grand groupe des personnes handicapées s’est félicité qu’elles promeuvent l’inclusion de ces personnes, tandis que celle du grand groupe des femmes a reconnu qu’elles contribuent à réduire l’écart entre les femmes et les hommes en termes d’accès aux technologies. Les STI sont également utiles dans la collecte de données nécessaires pour la réalisation des objectifs de développement durable, a fait aussi remarquer la représente de la Finlande.
De son côté, la représentante de l’Association mondiale des étudiants en médecine a plaidé pour que les STI ne nuisent pas à l’être humain et à son épanouissement. Pour cela, il faut élaborer un pacte pour évaluer leur impact sur la vie humaine, a-t-elle prôné. Le représentant du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) s’est lui aussi montré prudent en demandant de bien mesurer les risques d’utilisation des STI.