Le Conseil de sécurité renforce son dispositif de lutte contre la traite des personnes, « un crime qui n’a pas sa place au XXIe siècle »
Onze mois après l’adoption d’une résolution « sans précédent » sur le sujet, le Conseil de sécurité a demandé aujourd’hui aux États Membres de s’acquitter des obligations qui leur incombent d’incriminer, de prévenir et de combattre la traite des êtres humains, un appel repris à son compte par le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, pour qui « ce crime n’a pas sa place au XXIe siècle ».
En adoptant, à l’unanimité de ses 15 membres, la résolution 2388 (2017), présentée par l’Italie, le Conseil demande en outre aux États Membres de redoubler d’efforts pour « détecter et désorganiser » la traite, notamment en se dotant de « mécanismes solides d’identification des victimes » et en donnant à ces dernières accès à des services de protection et d’aide, en particulier dans les zones touchées par un conflit armé.
La résolution souligne à cet égard l’importance de la coopération internationale des forces de l’ordre, notamment en ce qui concerne les enquêtes et poursuites relatives aux cas de traite. Dans ce contexte, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) devra continuer d’apporter son appui en fournissant une assistance technique aux États Membres qui le demandent, ce dont son Directeur exécutif, M. Yury Fedotov, a donné ce matin l’assurance.
M. Guterres, et à sa suite la plupart des membres du Conseil et la cinquantaine de délégations à être intervenues au cours de ce débat public, s’est dit « horrifié par les images d’immigrés africains vendus comme des "marchandises" en Libye ». Des affirmations contestées par le représentant libyen, lequel a regretté que le rapport du Secrétaire général, qui fait état de « marchés aux esclaves », prenne le « relais des médias ».
Alors que le Bureau de la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé son intention d’ouvrir une enquête sur ces crimes, le délégué libyen a assuré que son gouvernement avait diligenté une enquête sur ces « allégations ». De son côté, M. Fedotov a rappelé que l’ONUDC est disposée à prêter assistance aux autorités libyennes pour qu’elles renforcent leurs capacités et alignent leur législation sur la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (Convention de Palerme).
Le Commissaire pour la paix et la sécurité de l’Union africaine, M. Smaïl Chergui, a cependant tenu à rappeler qu’en 2011, au moment où a éclaté le conflit libyen, l’Union africaine avait lancé une médiation, dont il n’a malheureusement pas été tenu compte, avec les « répercussions que l’on sait » pour la Libye et la région. Un point de vue auquel a souscrit le Kenya, qui s’est également élevé contre la politique « inhumaine » de l’Union européenne vis-à-vis des migrants en provenance de Libye.
Pour sa part, la représentante de l’Union européenne a cité en exemple le « cadre politique et juridique ambitieux et complet pour combattre efficacement le trafic des êtres humains » mis en place à l’échelle de l’Union, qui encourage par ailleurs ses États membres à développer des mécanismes nationaux d’identification et d’assistance « inconditionnelle » aux victimes.
Pour M. Guterres, qui fut pendant 10 ans le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, il faut se pencher d’urgence sur les causes profondes de la traite humaine –instabilité, pauvreté et exclusion– et créer davantage de possibilités de migrations régulières, « rétablir l’intégrité du régime de protection des réfugiés » et accroître le nombre de réfugiés réinstallés dans le monde développé.
La communauté internationale, a poursuivi le chef de l’Organisation, dispose désormais d’un cadre juridique solide à cet effet, qui se renforcera à mesure que les États Membres qui ne l’ont pas encore fait ratifient la Convention de Palerme et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ce que demande la résolution adoptée aujourd’hui. Le Secrétaire général a également rappelé qu’en adoptant une déclaration politique en septembre dernier, l’Assemblée générale avait réitéré l’engagement de la communauté internationale en faveur du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, un sentiment dont l’Indonésie, l’Ukraine, le Japon ou encore le Venezuela, au nom du Mouvement des pays non alignés, se sont fait l’écho.
La coopération a d’ailleurs été avancée par de très nombreux orateurs comme le meilleur moyen de défaire les réseaux de criminalité transnationale organisée qui tirent profit des populations vulnérables avec le concours des organisations terroristes – « 150 milliards de dollars de revenus annuels », selon le Liechtenstein.
Aux termes de sa résolution, le Conseil engage d’ailleurs les États Membres à redoubler d’efforts pour « recueillir, analyser et partager les données concernant les flux financiers afférents à la traite des personnes » et à fournir, à la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme et à l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, des informations concernant les liens entre traite et financement du terrorisme.
Dans sa résolution, le Conseil de sécurité mentionne Daech, Boko Haram, les Chabab et l’Armée de résistance du Seigneur parmi les organisations terroristes qui se livrent à la vente ou au commerce de personnes, à des fins d’esclavage sexuel, d’exploitation sexuelle et de travail forcé. D’après l’édition 2017 du rapport de l’Organisation internationale du Travail (OIT), Estimations mondiales de l’esclavage moderne, citée par M. Chergui, c’est en Afrique que la prévalence la plus forte de l’esclavage moderne est constatée, avec 7,6 victimes pour 1 000 personnes.
Pour éradiquer le problème sous tous ses aspects, la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, Mme Maria Grazia Giammarinaro, a préconisé des synergies entre les résolutions du Conseil de sécurité et avec le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, qui sera adopté en 2018, et le Programme de développement durable à l’horizon 2030.
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Traite des personnes dans les situations de conflit
Rapport du Secrétaire général sur la traite d’êtres humains en période de conflit armé, établi en application de la résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité (S/2017/939)
Lettre datée du 17 novembre 2017, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de l’Italie (S/2017/972)
Texte du projet de résolution (S/2017/973)
Le Conseil de sécurité,
Rappelant la déclaration 2015/25 de son Président et sa résolution 2331 (2016),
Prenant note du rapport du Secrétaire général publié sous la cote S/2017/939,
Rappelant que la Charte des Nations Unies lui confère la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,
Prenant note de l’action menée par les organismes des Nations Unies et les entités internationales et régionales pour appliquer la résolution 2331 (2016), notamment l’élaboration d’un document thématique sur la traite des êtres humains en situation de conflit, la création, dans le Groupe mondial de la protection, d’une équipe spéciale de lutte contre la traite des êtres humains, la mise en place par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime d’un système structuré de collecte de données sur la traite des êtres humains dans le cadre des conflits armés, y compris à travers l’édition 2016 du Rapport mondial sur la traite des personnes, et l’inclusion par la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, agissant dans le cadre de son mandat, sous la direction générale du Comité et en étroite coopération avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et les autres entités compétentes, des renseignements sur les mesures prises par les États Membres pour s’attaquer au problème de la traite d’êtres humains pratiquée à l’appui du terrorisme, notamment pour ce qui est du financement d’actes de terrorisme ou du recrutement à des fins terroristes, dans ses évaluations de pays, selon qu’il conviendra,
Rappelant la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, dans lequel a été donnée, pour la première fois, une définition arrêtée sur le plan international de l’infraction que constitue la traite d’êtres humains et qui prévoit un cadre permettant de la prévenir et de la combattre efficacement, et rappelant également le Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes,
Conscient que la traite d’êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé ou en situation d’après conflit peut servir à différentes formes d’exploitation, notamment l’exploitation de la prostitution d’autrui ou autres formes d’exploitation sexuelle, le travail forcé, l’esclavage ou pratiques analogues, l’asservissement et le prélèvement d’organes, et conscient également que la traite d’êtres humains dans les situations de conflit armé ou d’après conflit peut également être associée à la violence sexuelle en situation de conflit et que les femmes et les enfants dans les situations de conflit armé et les personnes déplacées de force par les conflits armés, y compris les réfugiés, peuvent être particulièrement exposés à la traite et aux autres formes d’exploitation susvisées,
Rappelant la Déclaration politique sur l’application du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, adoptée par l’Assemblée générale le 27 septembre 2017, et saluant la détermination, que les États Membres ont exprimée dans la Déclaration, de prendre de concert des mesures énergiques pour mettre fin à la traite d’êtres humains, où qu’elle se produise,
Se déclarant à nouveau profondément préoccupé par le fait que, malgré sa condamnation des actes de traite de personnes commis dans les zones touchées par un conflit armé, de tels actes continuent de se produire,
Réaffirmant sa solidarité avec les victimes de la traite des êtres humains dans les situations de conflit armé et d’après conflit et notant qu’il importe de leur fournir les soins, l’aide et les services voulus pour assurer leur rétablissement sur les plans physique, psychologique et social, leur réadaptation et leur réinsertion, dans le plein respect de leurs droits de l’homme et en prenant intégralement en compte les traumatismes extrêmes qu’elles ont endurés et les risques qu’elles soient à nouveau victimisées et stigmatisées,
Réaffirmant que la traite d’êtres humains en situation de conflit armé, notamment celle des femmes et des filles, ne peut et ne doit en aucun cas être associée à une religion, nationalité ou civilisation,
Rappelant ses résolutions 2359 (2017) et 2374 (2017), dans lesquelles il s’est déclaré préoccupé par les graves défis que représentent les différentes formes de criminalité transnationale organisée, notamment la traite d’êtres humains et le trafic de migrants dans la région du Sahel, et rappelant également ses résolutions 2240 (2015) et 2380 (2017), dans lesquelles il a constaté avec préoccupation que la situation en Libye était exacerbée par le trafic de migrants et la traite des êtres humains ayant le territoire libyen comme destination, zone de transit ou point de départ, qui pourraient profiter à d’autres réseaux de criminalité organisée ou à des réseaux terroristes dans le pays,
Réaffirmant qu’il importe au plus haut point que tous les États Membres appliquent intégralement ses résolutions, notamment ses résolutions 2195 (2014), 2253 (2015), 2199 (2015) et 2368 (2017), dans lesquelles il a constaté avec inquiétude que, dans certaines régions, des terroristes tiraient profit de la criminalité transnationale organisée, notamment la traite d’êtres humains, ainsi que sa résolution 2242 (2015), dans laquelle il a constaté avec préoccupation que les actes de violence sexuelle et sexiste s’inscrivaient notoirement parmi les objectifs stratégiques et dans l’idéologie de certains groupes terroristes, qui les utilisaient comme tactique de terrorisme et comme instrument destiné à accroître leurs ressources financières et leur pouvoir par le recrutement de combattants et la destruction des communautés, et soulignant à nouveau le lien qui existe entre la traite des êtres humains, la violence sexuelle et le terrorisme et autres activités criminelles organisées, qui peuvent prolonger et exacerber les conflits et l’instabilité ou en aggraver les conséquences pour les populations civiles,
Conscient qu’il faut continuer de promouvoir l’établissement d’un partenariat mondial contre la traite des êtres humains associant toutes les parties concernées, notamment au moyen d’initiatives et de mécanismes bilatéraux, multilatéraux et régionaux,
Ayant conscience que la traite des êtres humains s’accompagne de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, soulignant que certains actes ou crimes connexes à la traite des êtres humains en situation de conflit armé peuvent constituer des crimes de guerre, et rappelant qu’il incombe aux États de mettre fin à l’impunité et de poursuivre les auteurs de génocides, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et d’autres crimes et qu’il importe que les États prennent, dans leur ordre juridique interne, des mesures appropriées en ce qui concerne les crimes en présence desquels ils sont tenus en droit international d’exercer leur responsabilité d’ouvrir des enquêtes et d’engager des poursuites,
Condamnant avec la plus grande fermeté les atteintes graves, systématiques et répétées aux droits de l’homme et les violations du droit international humanitaire dont l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, connu également sous le nom de Daech) continue d’être l’auteur, ainsi que les enlèvements de femmes et d’enfants commis par l’EIIL, le Front el-Nosra et d’autres personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés, exprimant son indignation face à l’exploitation et aux exactions commises par ces entités, y compris le viol, la violence sexuelle, le mariage forcé et la réduction en esclavage, engageant tous les États et acteurs non étatiques détenant des éléments de preuve à les porter à son attention, de même que toute information indiquant que la traite d’êtres humains et les formes connexes d’exploitation et d’atteintes pourraient être utilisées pour appuyer financièrement les auteurs de tels actes, soulignant que les États sont tenus de veiller à ce que ni leurs nationaux ni les personnes se trouvant sur leur territoire ne mettent des fonds, actifs financiers ou ressources économiques à la disposition de l’EIIL, et notant que toute personne ou entité qui transfère des fonds à l’EIIL, directement ou indirectement en rapport avec cette exploitation et ces exactions, s’expose au risque d’être inscrite sur la liste du Conseil de sécurité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011), 2253 (2015) et 2368 (2017) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés,
Ayant conscience que les personnes touchées par un conflit armé et fuyant un conflit risquent fort d’être victimes de la traite d’êtres humains, et soulignant qu’il faut prévenir la traite d’êtres humains déplacés de force ou autrement touchés par un conflit armé et repérer ces cas lorsqu’ils se produisent,
Se déclarant gravement préoccupé par le nombre élevé de femmes et d’enfants victimes de la traite dans les conflits armés, et considérant que la traite de personnes s’accompagne souvent d’autres violations du droit international applicable ou d’autres exactions, notamment faisant intervenir le recrutement et l’utilisation, l’enlèvement et la violence sexuelle, y compris le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée et la grossesse forcée, et exhortant tous les États Membres à amener les auteurs de tels actes à en répondre et à aider les victimes à se rétablir et se réinsérer,
Se déclarant à nouveau gravement préoccupé par le fait que des enfants sont enlevés dans des situations de conflit armé, en majorité par des acteurs non étatiques armés, sachant que les enlèvements ont lieu dans divers contextes, dont les écoles, conscient que souvent les enlèvements précèdent ou suivent d’autres exactions et violations du droit international applicable commises à l’encontre d’enfants, notamment sous la forme du recrutement, de l’utilisation, du meurtre et des mutilations, ainsi que les viols et autres formes de violence sexuelle, qui pourraient constituer des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité, et engageant tous les États Membres à faire en sorte que les auteurs d’enlèvements répondent de leurs actes,
Exprimant sa profonde préoccupation devant la vulnérabilité accrue des enfants déplacés de force par un conflit armé face à l’exploitation et aux exactions, en particulier lorsqu’ils ont été séparés de leur famille ou de leur entourage, et soulignant qu’il faut protéger tous les enfants non accompagnés qui sont victimes de traite de personnes ou y sont exposés, en les identifiant au plus vite et en leur apportant immédiatement une aide qui tienne compte de leurs besoins particuliers,
Condamnant toutes les violations et exactions commises contre des enfants en situation de conflit armé, y compris la traite, et rappelant toutes ses résolutions sur les enfants et les conflits armés, dans lesquelles il demande la protection des enfants, et en particulier la résolution 1261 (1999), ainsi que la résolution 1612 (2005), dans laquelle il a demandé l’institution du mécanisme de surveillance et de communication de l’information sur les enfants et les conflits armés,
Prenant note des mesures prises par les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales des Nations Unies, conformément à leurs mandats respectifs, pour aider les États hôtes à s’acquitter de leur responsabilité première de prévention et de lutte contre la traite des êtres humains, prenant également note des mesures prises par les États Membres pour dispenser, préalablement au déploiement, une formation sur la traite au personnel appelé à être déployé dans les missions de maintien de la paix des Nations Unies, et encourageant la poursuite de l’action menée dans ce domaine,
Prenant note de l’initiative lancée par le Département des opérations de maintien de la paix, le Département de l’appui aux missions et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime pour mettre au point un module de formation sur la traite des êtres humains et le trafic de migrants destiné à la formation en cours de mission du personnel de police déployé dans certaines missions de maintien de la paix, selon qu’il convient,
Soulignant qu’il faut améliorer la collecte, y compris au moyen des bases de données pertinentes administrées par des organisations internationales, notamment l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et l’Organisation internationale de police criminelle, de données récentes, objectives, exactes et fiables sur la traite des êtres humains en situation de conflit, qui soient ventilées par sexe, âge et autres paramètres pertinents, ainsi que sur les flux financiers associés à la traite des êtres humains,
Réaffirmant que les organismes des Nations Unies doivent veiller à l’organisation et à la cohérence de leur action en matière de lutte contre la traite d’êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé ou en situation d’après conflit, et sachant qu’il faut continuer d’œuvrer à la mise en place d’une approche renforcée, globale et coordonnée pour prévenir et combattre la traite, ce qui peut contribuer à une paix et à une stabilité durables,
1. Condamne à nouveau avec la plus grande fermeté tous les actes de traite d’êtres humains, en particulier de femmes et d’enfants, qui représentent la grande majorité des victimes de la traite dans les zones en proie à un conflit armé, et souligne que la traite nuit à l’état de droit et favorise d’autres formes de criminalité transnationale organisée, ce qui peut exacerber les conflits, alimenter l’insécurité et l’instabilité et compromettre le développement;
2. Exhorte les États Membres à envisager de ratifier à titre prioritaire la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ainsi que tout autre instrument international pertinent, ou d’y adhérer, et exhorte les États qui y sont déjà parties à les appliquer effectivement;
3. Demande aux États Membres de renforcer leur engagement politique et de mieux s’acquitter des obligations qui leur incombent d’incriminer, prévenir et combattre de toute autre manière la traite d’êtres humains, et de redoubler d’efforts pour détecter la traite et y mettre un terme, notamment en mettant en place des mécanismes solides d’identification des victimes et en donnant aux victimes identifiées accès à des services de protection et d’aide, en particulier dans les zones touchées par un conflit armé, souligne à cet égard l’importance de la coopération internationale des forces de l’ordre, notamment en ce qui concerne les enquêtes et les poursuites relatives aux cas de traite, et, à ce propos, demande à l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime de continuer d’apporter son appui en fournissant une assistance technique aux États Membres qui le demandent;
4. Demande également aux États Membres d’examiner leur législation de lutte contre la traite et leur législation connexe, de la modifier le cas échéant, et de l’appliquer, selon qu’il convient, afin de garantir que des mesures soient en place contre toutes les formes de traite d’êtres humains, y compris les actes commis dans des situations de conflit armé ou par des groupes armés ou terroristes, et d’envisager d’établir leur compétence en vue de mettre fin à l’impunité des auteurs, conformément à l’article 15 de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée;
5. Demande en outre aux États Membres de redoubler d’efforts pour ce qui est d’enquêter sur les réseaux qui se livrent à la traite des êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé, de les désorganiser et les démanteler, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour recueillir, conserver et stocker les éléments de preuve relatifs à la traite d’êtres humains;
6. Demande aux États Membres de combattre les crimes qui peuvent être liés à la traite des êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé, tels que le blanchiment d’argent, la corruption, le trafic de migrants et d’autres formes de criminalité organisée, y compris en tirant parti des enquêtes financières en vue de recenser et analyser les renseignements financiers pertinents, ainsi qu’en renforçant la coopération régionale et internationale des forces de l’ordre;
7. Demande également aux États Membres de renforcer leur application des Normes internationales sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de se donner davantage de moyens pour mener, de leur propre initiative, des enquêtes financières visant à détecter la traite d’êtres humains et la désorganiser et à repérer ses liens potentiels avec le financement du terrorisme;
8. Prie instamment les États Membres d’adopter, dans le cadre de leur lutte contre la traite des êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé, une approche multidimensionnelle qui prévoie l’inclusion d’informations sur les facteurs de risque de traite dans les programmes scolaires et les programmes de formation;
9. Engage les États Membres à redoubler d’efforts pour recueillir, analyser et partager, par les voies et arrangements appropriés et dans le respect du droit international et national, les données concernant les flux financiers afférents à la traite des êtres humains et l’étendue et la nature du financement d’activités terroristes par l’intermédiaire de la traite, et, le cas échéant, de fournir, à la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme et à l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, des informations pertinentes concernant les liens entre la traite des êtres humains et le financement du terrorisme;
10. Réitère sa condamnation de tous les actes relevant de la traite, en particulier la vente ou le commerce de personnes, notamment de Yézidis et de membres d’autres minorités religieuses ou ethniques, commis par l’autoproclamé État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, connu également sous le nom de Daech), et de tous les actes de traite d’êtres humains et autres violations et exactions commis par Boko Haram, les Chabab, l’Armée de résistance du Seigneur et d’autres groupes terroristes ou armés à des fins d’esclavage sexuel, d’exploitation sexuelle et de travail forcé, et souligne qu’il importe de recueillir et de conserver les preuves attestant de tels actes afin que leurs auteurs soient amenés à en répondre;
11. Demande à l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, dans le cadre des consultations qu’elle tient avec les États Membres, de continuer d’y traiter de la question de la traite d’êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé et de l’utilisation de la violence sexuelle dans les conflits armés, en ce qui concerne l’EIIL (connu également sous le nom de Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés, et d’en rendre compte au Comité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011), 2253 (2015) et 2368 (2017), selon qu’il conviendra;
12. Demande à la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, agissant dans le cadre de son mandat, sous la direction générale du Comité contre le terrorisme et en étroite collaboration avec l’ONUDC et les autres entités compétentes, de faire figurer dans ses évaluations de pays, selon qu’il conviendra, des renseignements sur les mesures prises par les États Membres pour s’attaquer au problème de la traite d’êtres humains pratiquée à l’appui du terrorisme, notamment pour ce qui est du financement d’actes de terrorisme ou du recrutement à des fins terroristes;
13. Demande aux États Membres de renforcer les capacités des professionnels en contact avec les personnes déplacées de force par des conflits armés et notamment les réfugiés, tels que les policiers, les douaniers, les agents des systèmes de justice pénale et ceux des structures d’accueil des réfugiés et des déplacés, d’identifier les victimes de la traite et les personnes qui y sont vulnérables, d’adopter des mesures d’assistance adaptées à leur sexe et à leur âge, notamment un appui psychosocial et des services de santé, indépendamment du fait qu’ils participent à des procédures ou à des enquêtes pénales;
14. Est conscient qu’il faut renforcer les dispositifs permettant d’identifier, d’enregistrer, de protéger et d’aider les personnes déplacées de force, y compris les réfugiés et les apatrides, qui sont victimes de la traite ou risquent de le devenir;
15. Encourage les États Membres à recourir à des systèmes d’enregistrement des réfugiés pour évaluer leur degré de vulnérabilité, déceler parmi eux les éventuelles victimes de la traite et recenser leurs besoins d’assistance particuliers, et, à cet égard, engage les États Membres à élaborer des documents d’information leur expliquant leurs droits en tant que réfugiés victimes de la traite et les possibilités d’assistance, de sorte qu’ils puissent s’adresser aux autorités compétentes et accéder aux services et à l’appui psychosocial qui leur sont ouverts;
16. Encourage les États Membres, en particulier les États de transit et de destination accueillant des personnes déplacées de force par un conflit armé, à mettre en place et à utiliser des systèmes d’alerte rapide et de détection rapide du risque potentiel ou imminent de traite des êtres humains, afin de déceler le plus tôt possible les victimes de la traite et les personnes qui y sont vulnérables, l’accent étant mis sur les femmes et les enfants, tout particulièrement les enfants non accompagnés;
17. Prie instamment les États Membres d’évaluer avec soin la situation de chaque personne libérée de groupes armés et terroristes afin de pouvoir rapidement déceler les victimes de la traite et les traiter comme des victimes de la criminalité, et d’envisager, conformément à leur législation, de ne pas les poursuivre ni les punir pour des activités illicites qu’ils auraient commises du fait de leur condition de victimes de la traite;
18. Condamne énergiquement les violations du droit international, en particulier celles touchant des enfants dans des situations de conflit armé, notamment les meurtres et mutilations, les violences sexuelles, les enlèvements et les déplacements forcés, le recrutement et l’utilisation d’enfants dans les conflits armés, les attaques contre les écoles et hôpitaux, le déni d’accès humanitaire et la traite des êtres humains;
19. Exhorte les États Membres à recenser les enfants victimes de la traite et ceux qui, parmi eux, sont non accompagnés ou ont été séparés de leur famille ou de leur entourage, afin qu’ils puissent être enregistrés rapidement, selon qu’il conviendra, et à prendre en compte leurs besoins particuliers de protection, notamment, le cas échéant, en les confiant aux autorités de protection de l’enfance, quel que soit leur statut migratoire;
20. Estime qu’il importe de fournir rapidement aux enfants touchés par les conflits armés une aide permettant leur réinsertion et leur réadaptation, en veillant à tenir compte des besoins spécifiques des filles, des garçons et des enfants handicapés, notamment l’accès aux soins de santé, un soutien psychosocial et des programmes d’enseignement contribuant à leur bien-être et à l’instauration durable de la paix et de la sécurité et engage les organisations internationales et les organisations de la société civile concernées à soutenir les États Membres en la matière;
21. Exhorte les États Membres à s’abstenir de recourir à la détention administrative d’enfants, en particulier ceux qui sont victimes de la traite, pour violations des lois et règlements sur l’immigration, à moins qu’il s’agisse d’une mesure prise en dernier recours et que l’enfant soit détenu dans le cadre le moins restrictif possible, pour une période aussi courte que possible, dans des conditions respectueuses de leurs droits fondamentaux et selon des modalités fondées au premier chef sur l’intérêt de l’enfant, et engage les États Membres à s’efforcer de mettre fin à cette pratique;
22. Prie le Secrétaire général d’examiner plus avant, selon qu’il convient, les liens qui existent entre la traite des enfants en temps de conflit et les graves violations commises contre les enfants touchés par un conflit recensées par l’Organisation, en vue de lutter contre l’ensemble des violations et exactions subies par les enfants en période de conflit armé;
23. Attend avec intérêt que les entités et fonctionnaires compétents des Nations Unies, notamment le Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et d’autres organismes régionaux et internationaux comme l’Organisation internationale pour les migrations, lui communiquent, le cas échéant, d’autres informations sur la traite de personnes en temps de conflit armé, et encourage les États Membres à fournir à l’Office des informations sur les victimes de la traite venant d’une zone touchée par un conflit ou arrivant dans une zone de conflit, qu’il fera figurer dans les rapports qu’il doit présenter;
24. Prie le Secrétaire général de veiller à ce que le document thématique sur la traite des êtres humains dans les situations de conflit établi par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime en consultation avec les organismes des Nations Unies concernés et d’autres organismes internationaux soit diffusé au sein du système des Nations Unies, et engage les institutions et entités compétentes des Nations Unies à en faire usage dans les activités qu’elles mènent dans le cadre de leurs mandats et à renforcer leur aptitude à évaluer les situations de traite des êtres humains dans les conflits armés et à y faire face;
25. Fait part de son intention d’étudier plus attentivement, le cas échéant, la manière dont les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales peuvent aider les pays hôtes à s’acquitter de leur responsabilité première de prévention et de lutte contre la traite des êtres humains, et prie le Secrétaire général de faire en sorte que les évaluations de la situation des pays réalisées à la demande du Conseil de sécurité dans le cadre de ces missions comprennent des données et des analyses spécialisées relatives à la lutte contre la traite, le cas échéant;
26. Prie le Secrétaire général, agissant en coopération avec les États Membres, de veiller à ce que toute formation dispensée au personnel concerné des missions politiques spéciales et de maintien de la paix contienne des informations précises, fondées sur une évaluation préliminaire et tenant compte des besoins des victimes de la traite en matière de protection et d’assistance, lui permettant de déceler les situations de traite des êtres humains, de les confirmer, d’y faire face et de les signaler;
27. Réaffirme qu’il entend continuer d’intégrer la question de la traite des êtres humains dans les zones touchées par un conflit armé aux travaux des comités des sanctions concernés, conformément à leur mandat, et déclare qu’il compte inviter tous les représentants spéciaux du Secrétaire général compétents, y compris la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé et la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, à tenir ces comités informés, selon qu’il conviendra, conformément au règlement intérieur applicable, et de leur communiquer les renseignements pertinents, y compris, le cas échéant, le nom des individus impliqués dans la traite d’êtres humains qui satisfont aux critères de désignation de l’un ou l’autre des comités des sanctions;
28. Prie également le Secrétaire général de veiller à ce que les membres des groupes de surveillance, équipes de surveillance et groupes d’experts appuyant les travaux des comités des sanctions compétents se dotent des moyens techniques de mieux déceler et signaler les cas de traite des êtres humains rencontrés dans l’exercice de leurs fonctions et dans le cadre de leurs mandats respectifs, et le prie également de veiller à ce que les mécanismes de suivi et de communication de l’information sur la violence sexuelle dans les zones touchées par un conflit armé recueillent systématiquement des données sur la traite de personnes liée au conflit et commise à des fins de violence ou d’exploitation sexuelle;
29. Invite le Secrétaire général à veiller à ce que l’équipe d’enquête créée par la résolution 2379 (2017) tienne compte, dans ses travaux, des recherches et des études en matière de lutte contre la traite, et qu’en s’employant à recueillir des éléments de preuve sur les cas de traite d’êtres humains, elle soit attentive aux disparités entre les sexes, aux traumatismes qu’ont subis les victimes et aux droits de celles-ci, et ne compromette ni leur sûreté ni leur sécurité;
30. Demande aux États Membres de coopérer avec l’équipe d’enquête créée par la résolution 2379 (2017), notamment dans le cadre d’arrangements mutuels concernant l’aide juridique, selon que de besoin, et notamment de lui communiquer, le cas échéant, tout renseignement en lien avec le mandat qui lui a été confié par cette résolution;
31. Demande aux organismes des Nations Unies d’accroître la transparence de leurs achats et de leurs chaînes d’approvisionnement et de redoubler d’efforts pour renforcer les protections contre la traite des êtres humains dans toutes les activités d’achat de l’Organisation et, à cet effet, d’exiger de leurs principaux fournisseurs qu’ils établissent et mettent en œuvre des politiques de lutte contre la traite et leur communiquent des informations sur les mesures prises pour la combattre dans leurs opérations et dans leurs chaînes d’approvisionnement;
32. Salue les efforts faits pour mettre en place au sein du système des Nations Unies une action coordonnée visant à prévenir et combattre la traite des êtres humains dans les situations de conflit armé et à en protéger les victimes, et prie toutes les entités des Nations Unies intervenant dans la lutte contre la traite de participer activement aux travaux réguliers des mécanismes existants, en particulier du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes, qui vise à promouvoir la coordination entre les entités des Nations Unies et les autres organisations internationales;
33. Invite le Secrétaire général à faire figurer, dans les rapports qu’il présente régulièrement sur les missions politiques spéciales et de maintien de la paix, des informations sur les mesures que prennent ces missions, dans le cadre de leur mandat, pour aider les institutions des pays hôtes à prévenir et combattre la traite des êtres humains et à en aider et protéger les victimes, en particulier les femmes et les enfants;
34. Prie le Secrétaire général de veiller à l’application de la présente résolution et de lui faire rapport, dans les 12 mois, sur les progrès réalisés;
35. Décide de rester activement saisi de la question.
Déclarations
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que criminels et terroristes exploitent et perpétuent le chaos provoqué par les situations de conflit. Pour financer leurs crimes, ceux-ci s’attaquent aux personnes les plus vulnérables avec une brutalité qui ne connaît pas de limites: l’exploitation sexuelle, le travail forcé, les organes amputés et l’esclavage qui alimentent leur trafic sont autant de crimes qui n’ont pas leur place au XXIe siècle, a-t-il dit.
Des organisations terroristes telles que Daech, Boko Haram, les Chabab et l’Armée de résistance du Seigneur contraignent à une servitude déshumanisante femmes, garçons et filles, a déploré M. Guterres. Ces « crimes de l’ombre » constituent de graves violations des droits de l’homme et peuvent être assimilés à des crimes de guerre et à des crimes contre l’humanité.
Ainsi, ces derniers jours, « nous avons tous été horrifiés par les images d’immigrés africains vendus comme des ‘biens’ en Libye », a rappelé le chef de l’Organisation, pour qui « c’est notre responsabilité collective de mettre fin à de tels crimes ». Selon lui, il faut « agir d’urgence » pour protéger les droits et la dignité des populations migrantes, ce qui signifie traduire les auteurs en justice; accroître l’aide humanitaire dans les plus brefs délais; et aider les autorités libyennes à renforcer leur capacité à protéger et à subvenir aux besoins des populations vulnérables.
Mais pour le Secrétaire général, il est également urgent de créer davantage de possibilités de migrations régulières, de « rétablir l’intégrité du régime de protection des réfugiés » et d’accroître le nombre de réfugiés réinstallés dans le monde développé. Selon le Rapport mondial sur la traite des personnes publié par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), un nombre croissant de victimes en Iraq, en Syrie et en Somalie se retrouvent en Asie, en Europe et au Moyen-Orient.
Le Conseil de sécurité, a reconnu M. Guterres, a pris d’importantes mesures contre la traite, notamment en adoptant à l’unanimité la résolution 2331, en décembre 2016, et en mettant aux voix aujourd’hui un nouveau texte qui appelle les États Membres à s’attaquer aux flux financiers dont dépendent les trafiquants. Ces résolutions exhortent en outre chaque nation à adopter et à mettre en œuvre la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes. Et avec la Déclaration politique sur la mise en œuvre du Plan d’action mondial de l’ONU pour la lutte contre la traite des personnes, adoptée par l’Assemblée générale en septembre 2017, « nous avons élaboré un cadre d’action enraciné dans le droit international », s’est félicité le Secrétaire général.
La coopération, l’entraide judiciaire et le partage d’informations sont les piliers de la communauté internationale à cet égard. « Vous avez devant vous mon tout premier rapport sur la mise en œuvre de la résolution 2331 (2016), qui décrit les mesures prises par les États Membres et par plusieurs entités du système des Nations Unies », a indiqué le Secrétaire général. « Ces efforts doivent être intensifiés. Nous devons nous servir pleinement de la collecte de données, de l’analyse, des outils et de l’assistance technique mis à disposition par l’ONUDC et d’autres acteurs onusiens, en particulier ceux qui opèrent dans les zones de conflit et dans les situations d’après-conflit », a-t-il recommandé.
D’après M. Guterres, une meilleure compréhension des marchés et des itinéraires de la traite des êtres humains renforcera l’analyse et la prévention. Et la coordination sera cruciale, notamment par le biais du Groupe de coordination interinstitutions contre la traite des personnes, a-t-il précisé. En outre, alors que la traite est également un problème de développement, il faut se pencher sur ses causes profondes et lutter contre la pauvreté et l’exclusion, conformément au Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Enfin, un soutien doit être apporté aux victimes et aux survivants de la traite, qui devraient être traités comme des victimes et non détenus, poursuivis en justice ou punis pour des activités illégales auxquelles ils ont été contraints de se livrer pour survivre, a souligné le Secrétaire général.
« J’exhorte également les gouvernements, le secteur privé et la société civile à soutenir la campagne Cœur Bleu et le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour les victimes de la traite des personnes, particulièrement des femmes et des enfants », a poursuivi M. Guterres. « L’engagement de la communauté internationale est mis à l’épreuve. Nous devons démontrer notre détermination à mettre fin à la traite des êtres humains, à aider ses nombreuses victimes et à demander des comptes aux responsables de ces crimes. »
M. YURY FEDOTOV, Secrétaire général adjoint et Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a constaté que l’exploitation des réfugiés et migrants déplacés par les conflits se poursuivait. « Nous avons tous été indignés par les images montrant des criminels qui dirigent des marchés aux esclaves en Libye où les personnes sont vendues comme des biens », a-t-il relevé. Pour lui, « notre horreur collective face à ces pratiques épouvantables doit servir à accélérer nos actions et encourager un partenariat mondial contre la traite des êtres humains ».
M. Fedotov a assuré que l’ONUDC se tenait prêt à aider sur plusieurs fronts: renforcer les capacités libyennes de détection et de répression; aligner les lois nationales sur la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (Convention de Palerme) et ses protocoles relatifs à la traite et au trafic illicites de migrants; construire des partenariats contre ce crime entre les États de la région; améliorer les capacités des autorités libyennes pour enquêter sur l’argent généré par ces crimes.
Le Directeur exécutif a encouragé les parties à la Convention de Palerme et à ses protocoles additionnels à renforcer la coopération internationale, à développer une législation complète et à faire en sorte qu’aucun criminel n’échappe à la justice. Les moyens d’alerte et de ciblage rapide doivent être utilisés de façon proactive, a-t-il souhaité en demandant aussi aux États d’offrir aux victimes, en particulier les femmes et les enfants, la protection et l’assistance auxquelles ils ont droit.
Pour sa part, a poursuivi M. Fedotov, l’ONUDC a répondu à la résolution 2331 (2016) avec toute une série de mesures, allant de l’assistance pour briser et démanteler les réseaux de trafiquants à la lutte contre le blanchiment d’argent et la corruption. Il a expliqué avoir ainsi renforcé la collecte de données, formé des officiers de police dans les opérations de maintien de la paix, œuvré dans le cadre du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies en faveur des victimes de la traite des personnes, et aidé les États à appliquer le Protocole relatif à la traite. Saluant la contribution récente de l’Italie aux Fonds, il a incité d’autres pays à suivre cet exemple.
Enfin, le Secrétaire général adjoint a annoncé que l’ONUDC envisageait d’organiser, en 2018, une réunion des principaux responsables du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes, afin de donner un nouvel élan aux efforts conjoints de ce groupe et de ses partenaires.
Mme MARIA GRAZIA GIAMMARINARO, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a plaidé en faveur d’une approche urgente, concertée et efficace pour remédier à la traite des êtres humains qui vivent en temps de conflit et qui fuient un conflit, ainsi que pour protéger les droits des victimes. La vidéo choquante de CNN montrant la vente aux enchères de jeunes migrants montre que la traite de personnes aux fins d’esclavage est bien la tragique réalité, a-t-elle dit. La Rapporteuse a remarqué que les violations des droits de l’homme étaient une composante systématique des conflits, constituant dans certains cas des crimes de guerre et crimes contre l’humanité. La traite est toujours alimentée par l’instabilité politique. Elle a lieu régulièrement dans le contexte de larges flux migratoires, a-t-elle ajouté. Mme Giammarinaro a précisé que la traite et l’esclavage étaient une stratégie des groupes terroristes.
La prévention de la traite a un lien direct avec le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-elle poursuivi. Elle a plaidé pour une perspective articulée autour des droits de l’homme, en rappelant que les violations des droits de l’homme ne sont pas seulement une conséquence des conflits mais bien une cause lorsqu’elles se déroulent à grande échelle. Le programme du Conseil sur la traite doit être lié au Pacte mondial sur les migrants et les réfugiés, au Programme de développement durable à l’horizon 2030 et au programme de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité, a affirmé Mme Giammarinaro.
Évoquant en particulier la situation préoccupante des enfants, elle a exhorté les États à interdire leur détention pour infraction à la législation encadrant les mouvements migratoires. Les États doivent également prendre des mesures efficaces pour protéger les victimes de traite contre une exploitation accrue et pour leur éviter des souffrances supplémentaires y compris lors d’une crise humanitaire et d’un conflit, a-t-elle dit. La Rapporteuse spéciale a également appelé les États à faire en sorte que les groupes armés et criminels rendent compte de leurs actes. En matière de prévention, elle a prôné une approche innovante, basée sur les bonnes pratiques de certaines agences onusiennes, pour identifier, à un stade précoce, les personnes vulnérables à la traite parmi les populations déplacées, les personnes fuyant un conflit et les demandeurs d’asile.
Enfin, Mme Giammarinaro a rappelé que le manque de coopération internationale avait souvent pour conséquence des violations supplémentaires des droits de l’homme, en particulier dans le contexte de migrations. Les États, a-t-elle recommandé, doivent agir rapidement pour intégrer la lutte contre la traite dans toutes leurs interventions humanitaires dans les zones de conflit, accroître les possibilités de migration légale, pleinement respecter le principe de non-refoulement, mettre en œuvre des processus de réinstallations dans le pays de préférence, favoriser la réunification familiale, protéger les enfants efficacement et prévenir la traite des êtres humains.
M. SMAÏL CHERGUI, Commissaire pour la paix et la sécurité de l’Union africaine (UA), s’est dit terrifié par les récits de victimes en provenance de plusieurs théâtres de conflits en Afrique et dans le monde. D’après l’édition 2017 du rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT), Estimations mondiales de l’esclavage moderne, c’est en Afrique que l’on constate la prévalence la plus forte de l’esclavage moderne, avec 7,6 victimes pour 1 000 personnes, a-t-il relevé. « Nous avons ainsi appris avec effroi l’existence de marchés aux esclaves en Libye, qui ont fait l’objet d’une condamnation par le Président de la Commission de l’Union africaine », laquelle est préoccupée par les conditions inhumaines dans lesquelles vivent les migrants en transit par la Libye, a-t-il déclaré. L’UA a en outre prié la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples d’ouvrir une enquête à ce sujet et de présenter ses conclusions dans les plus brefs délais.
Convaincues qu’il faut se pencher sur les causes profondes de la traite, l’UA et l’ONU œuvrent de concert à l’élaboration d’un cadre commun pour mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a expliqué le Commissaire. La réponse de l’UA au problème de la traite porte à la fois sur la prévention et la riposte, a indiqué M. Chergui avant d’expliquer que la Commission appuie les États membres de l’Union afin qu’ils réagissent et répondent aux menaces locales. Ces derniers disposent de plusieurs instruments normatifs qui servent de bases à leurs interventions, sur le plan juridique, lorsqu’ils entreprennent de porter secours et assistance aux victimes. Parallèlement, l’Organisation africaine de coopération policière, AFRIPOL, joue un rôle fondamental pour renforcer les capacités des États membres à répondre au phénomène de la traite.
Le haut fonctionnaire a tenu à rappeler qu’en 2011, au moment où a éclaté le conflit libyen, l’UA avait lancé une médiation et proposé une feuille de route, dont il n’a malheureusement pas tenu compte, avec les « répercussions que l’on sait » pour la Libye et la région. Dans ce pays, les réseaux de traite humaine doivent être démantelés sans retard, a plaidé M. Chergui, en soulignant qu’il en allait de « notre humanité commune ».
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a évoqué la récente vidéo montrant une vente aux enchères d’esclaves en Libye, avant de condamner « ces actes vils, qui n’ont pas leur place dans le monde actuel ». Les responsables devront être traduits en justice, a-t-il affirmé. M. Alemu a par ailleurs souligné la nécessité de bien comprendre ce que les migrants fuient en quittant leur pays. C’est la pauvreté, a-t-il rappelé, en soulignant l’importance du Programme de développement à l’horizon 2030 pour y remédier. Il a ensuite appelé au règlement rapide de la situation en Libye.
Le délégué éthiopien a insisté sur le besoin de palier les vulnérabilités aiguës des femmes et des enfants, appelant les pays d’accueil et de transit à assumer leurs responsabilités à cet égard. Les contributions positives des migrations à l’économie mondiale doivent être reconnues, a poursuivi M. Alemu. Il a lancé un appel aux pays d’origine, de transit et de destination pour qu’ils forgent un cadre permettant de réguler les migrations. Le délégué a aussi évoqué les mesures prises par son pays pour lutter contre la traite, notamment la ratification des instruments internationaux pertinents. Les discussions pour un pacte mondial sur les réfugiés et les migrants devraient déboucher sur des mesures concrètes, a conclu le délégué de l’Éthiopie.
« La traite des personnes est le commerce de la misère humaine », s’est indignée Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) avant de dénoncer ceux qui prennent pour cible les plus vulnérables ou ceux dont les rêves d’une vie meilleure les exposent aux enlèvements, à l’exploitation et aux abus.
Elle a condamné les actes « ignobles » liés au commerce d’esclaves qui aurait eu lieu en Libye. Ces « pires cas d’abus des droits de l’homme » doivent impérativement faire l’objet d’enquêtes des autorités compétentes dans les plus brefs délais, a exigé l’intervenante pour laquelle « l’esclavage n’a pas sa place dans le monde d’aujourd’hui ».
Elle a reconnu les relations complexes qui existent entre les conflits, l’instabilité et les violations des droits de l’homme, ainsi que le terrorisme, les déplacements et la traite des personnes dans le contexte de la région méditerranéenne. Les crises et les conflits humanitaires exacerbent en effet les risques de traite et le lien entre déplacements massifs de migrants et de réfugiés et traite des personnes est prouvé, a rappelé la représentante soulignant que ce phénomène avait également lieu dans les contextes syriens, iraquiens et au Sahel.
Pour sa délégation il faut pouvoir identifier les victimes de la traite et leur apporter un soutien approprié, et, parallèlement traduire les responsables de la traite en justice, ce qui suppose de pouvoir disposer de preuves. Pour cela, l’intervenante a insisté sur le rôle potentiel de l’ONU, lorsqu’elle est présente dans les zones de conflit, pour consolider les capacités locales et soutenir les réformes des institutions nationales tout en améliorant les moyens nationaux pour combattre des crimes sérieux.
Il faut également consolider les institutions chargées du respect de l’état de droit, ce qui suppose notamment que l’on puisse collecter des preuves en situation de conflit, a poursuivi la représentante, qui attend les résultats du travail de l’équipe chargée d’établir les faits sur les crimes commis par Daech en Iraq.
Dans son dernier point, la représentante a mis l’accent sur l’importance de la création de sociétés pacifiques, prospères et inclusives, dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, comme moyen de couper court aux terrains fertiles pour la traite.
M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a déclaré qu’il faut s’appuyer sur l’élan impulsé par les résolutions 2331 (2016) et 2388 (2017) et la Déclaration politique sur la mise en œuvre du Plan d’action mondial de l’ONU pour la lutte contre la traite des personnes, adoptée par l’Assemblée générale en septembre dernier.
Son gouvernement, a-t-il dit, prend des mesures pour lutter contre un phénomène auquel son pays n’est pas étranger, notamment au travers d’un mécanisme national chargé à la fois d’identifier les victimes, de leur prêter assistance et d’assurer leur protection.
En outre, une loi sur la lutte contre la traite humaine a été adoptée, Kiev ayant défini plusieurs priorités en ce domaine: outre l’assistance aux victimes, l’Ukraine considère qu’il faut renforcer la prévention de la traite, poursuivre les trafiquants en justice, et renforcer la coordination et la coopération des institutions et acteurs concernés.
Le représentant a toutefois regretté que ces lois ne puissent être appliquées dans les régions de son pays occupées par la Fédération de Russie, dont l’« agression » aurait provoqué le déplacement de deux millions de personnes, une population particulièrement vulnérable à l’exploitation.
M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) a dénoncé les propos « faux et infondés » du délégué ukrainien. Il a insisté sur l’importance de la coopération internationale pour lutter contre la traite, en soulignant les liens qui existent entre ce phénomène, le défi du développement durable et les activités des groupes terroristes. Le délégué russe a plaidé pour une « approche complexe », conjuguant notamment poursuites pénales contre les responsables de la traite des personnes et protection des victimes. Son pays est partie à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et son Protocole additionnel. Le représentant s’est ensuite félicité de l’adoption par l’Assemblée générale de la déclaration politique sur la mise en œuvre du plan mondial contre la traite, qui constitue à son avis une « base solide pour la coopération dans ce domaine ». Nous ne devons pas modifier ce plan, a-t-il souhaité, voulant également éviter l’élaboration d’instruments concurrents. Enfin, le délégué a souligné la nécessité d’éviter les doublons dans la lutte contre la traite et plaidé pour le strict respect des domaines d’intervention des différents organes onusiens.
La traite des êtres humains continue d’être l’un des trafics les plus rentables et les plus répandus au monde, a déploré Mme ANNE GUEGUEN (France), dénonçant les diverses formes d’exploitation liées à ce phénomène, dont le travail forcé, la servitude sexuelle, les enlèvements à des fins de protection forcée et les viols. Malheureusement, a poursuivi la représentante, le recours à de telles « atrocités » ne constitue plus une exception dans les situations de conflit et de postconflit, au cours desquelles les groupes armés, les terroristes et les criminels n’hésitent pas à recourir à la traite, non seulement comme un moyen de semer la terreur parmi les civils, mais également comme une source de financement, voire un outil de recrutement. Au nombre de ces situations, Mme Gueguen a cité l’Iraq et la Syrie, où les femmes et les enfants subissent les atrocités de Daech, l’Afrique de l’Ouest, où Boko Haram torture, viole et retient prisonniers des centaines de femmes et d’enfants, et la Libye, où les migrants font l’objet de traitements inhumains de la part de groupes criminels et de milices.
Pour la représentante, ces exactions, qui sont constitutives de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, voire de crimes de génocide, ne doivent pas rester impunies. Elle a ainsi salué les efforts de la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), qui continue son enquête sur les crimes présumés commis contre des migrants transitant par la Libye. De son côté, a affirmé Mme Gueguen, la France s’est dotée d’un arsenal juridique solide pour lutter contre ce fléau. En outre, la France mène de nombreuses actions de coopération bilatérale et régionale pour aider les États les plus vulnérables à y faire face, notamment en participant aux programmes de renforcement des capacités de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) en Afrique de l’Ouest et en contribuant au Fonds fiduciaire des Nations Unies pour l’assistance aux victimes de la traite.
La représentante française a appelé l’ensemble des États Membres à en faire de même, en renforçant leur coopération internationale pour combattre la traite. Elle a également insisté sur la responsabilité du Conseil de sécurité, étant donné que le recours à la traite en situation de conflit constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales. Dans ce cadre, Mme Gueguen a salué l’adoption de la résolution d’aujourd’hui, qui permet selon elle de renforcer l’identification des victimes, tout comme la capacité à démanteler les réseaux criminels et terroristes ayant recours à la traite.
Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) s’est dit révulsée par les images de migrants vendus comme du « bétail » en Libye. Elle a rappelé que la lutte contre la traite humaine est une priorité pour les États-Unis, son pays ayant été le premier membre du Conseil de sécurité à demander, en 2015, l’inscription de cette question à l’ordre du jour du Conseil. Elle s’est alarmée des agissements d’organisations terroristes telles que Boko Haram ou Daech, qui ont recours à la traite de personnes, provoquant des déplacements de populations toujours plus nombreux par voie de conséquence.
Pour sa part, Washington fait porter ses efforts sur trois fronts, a indiqué la représentante, en citant la prévention, la répression et les poursuites judiciaires contre les responsables de la traite, tout en soutenant l’action des organisations internationales et régionales qui œuvrent à l’identification des victimes.
Elle s’est félicitée de l’accent mis dans le rapport du Secrétaire général sur l’établissement des responsabilités, affirmant que son gouvernement avait défini une approche globale dans le domaine de la lutte contre la traite humaine à l’échelle du Département d’État.
Mme Haley a appelé en conclusion les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.
M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a jugé urgent d’enquêter sur les informations récentes de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) faisant état de l’existence d’un « marché aux esclaves » en Libye. Après avoir rappelé que le monde faisait face à la pire crise humanitaire depuis la création des Nations Unies, avec 66 millions de personnes déplacées, il a insisté sur le fait que 79 % des victimes de la traite sont des femmes et des enfants.
Compte tenu des principes qui régissent l’activité du Conseil de sécurité, M. Llorentty Solíz a dit qu’il fallait jeter des bases concrètes pour combattre ce fléau qui viole les droits de l’homme, y compris le droit à la vie. La communauté internationale et le Conseil, a-t-il averti, doivent s’abstenir de politiser ce thème. Il a encouragé tous les États à aborder la question à travers la coopération et le dialogue international, régional et bilatéral.
Le représentant a recommandé de lutter contre les asymétries économiques et de s’attaquer aux causes structurelles de la pauvreté qui engendre de vastes flux migratoires, et dont se servent les groupes terroristes. Il a dénoncé en particulier les politiques de changement de régime, l’interventionnisme et l’ingérence dans les affaires intérieures des États, qui aggravent la situation, comme le montre la crise dans la région du Sahel.
« Nous considérons que certains pays, qui ferment leurs frontières, édifient des murs et refusent l’accès aux réfugiés, ont non seulement un impact sur la traite des personnes mais nourrissent aussi la xénophobie, la discrimination et le racisme », a-t-il accusé. En juin dernier, la Bolivie a organisé la Conférence mondiale des peuples intitulée « Pour un monde sans murs, vers la citoyenneté universelle ».
M. FODÉ SECK (Sénégal) a mentionné l’indignation mêlée de colère suscitée, en particulier en Afrique saharienne, par la vidéo montrant une vente aux enchères de migrants en Libye. Une enquête doit être diligentée pour traduire en justice les auteurs d’un tel crime, a-t-il exigé. Rappelant qu’aucun continent n’est épargné par le fléau de la traite des êtres humains, il a jugé impératif de lutter de manière coordonnée et déterminée. Les États doivent prendre des mesures décisives et immédiates, notamment en démantelant les réseaux criminels impliqués dans ladite traite, a-t-il dit.
Le délégué a invité les pays qui ne l’ont pas encore fait à signer et ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ainsi que son protocole. M. Seck a souligné la nécessité d’identifier et de traduire en justice les responsables de la traite d’êtres humains. Lorsque les autorités nationales ne peuvent le faire, la justice internationale devrait se substituer à elles pour lutter contre l’impunité, a-t-il déclaré. Enfin, le représentant sénégalais a mis l’accent sur la nécessité de lutter et de prévenir la traite des personnes en situation de conflit, tout en remédiant à ses causes profondes.
La résolution adoptée aujourd’hui, a souligné M. KORO BESSHO (Japon), vise à promouvoir une méthode complète en vue de l’élimination du crime de la traite des êtres humains. Pour identifier efficacement les victimes potentielles de la traite, la résolution encourage les États Membres à utiliser le mécanisme d’identification des victimes et les cadres d’alerte rapide. L’identification des victimes est une première étape importante pour leur protection et la poursuite des auteurs.
Le représentant a aussi souligné l’importance de collecter, d’analyser et de partager les données entre les États Membres et les organes des Nations Unies, y compris la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT). Des informations précises sont essentielles pour leurs activités d’évaluation et de réponse à la traite dans les situations de conflit. Le Japon, a-t-il ajouté, apprécie le fait que le prochain rapport mondial de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) consacrera un chapitre à cet aspect.
En conclusion, a indiqué M. Bessho, le Japon continuera de mettre en œuvre des mesures pour prévenir la traite, protéger les victimes et traduire en justice les auteurs conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, au Plan d’action mondial et aux objectifs de développement durable.
Alarmé par l’ampleur du problème, M. BARLYBAY SADYKOV (Kazakhstan) a recommandé de prendre des mesures urgentes: harmoniser les lois à travers les pays, promulguer de nouvelles lois plus strictes, traduire les responsables en justice, mettre fin à l’impunité, renforcer les contrôles transfrontaliers et partager les informations. Il est important de geler et de bloquer les avoirs et de travailler étroitement avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL) et leurs antennes régionales. Tout en se conformant aux normes régionales et internationales, a-t-il ajouté, il faut offrir une protection et une assistance appropriées aux personnes touchées par ce crime brutal.
La communauté internationale doit rester vigilante et tout faire pour empêcher la traite dans les situations de conflit, l’esclavage sexuel des femmes et des filles, les mariages forcés et les violations des droits de l’homme les plus effroyables, a poursuivi le délégué. La lutte contre la traite des personnes exige que l’on n’oublie pas ses causes profondes, à savoir la pauvreté, le sous-développement, le chômage et le manque d’opportunités socioéconomiques, a-t-il expliqué, jugeant essentiel de mobiliser des fonds pour aider les pays touchés par les conflits.
M. IHAB MOUSTAFA AWAD (Égypte) a expliqué que la traite humaine est un sujet de préoccupation pour l’Égypte, qui est à la fois un pays de transit et un pays de destination pour les migrants fuyant les foyers de conflit et les agissements d’organisations terroristes. L’Égypte, a-t-il rappelé, figure parmi les tous premiers États à avoir ratifié la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Le représentant a également mentionné une initiative bilatérale lancée par l’Égypte et « un autre pays » dans le cadre du Groupe d’amis unis contre la traite des êtres humains, qui réunit une vingtaine d’États sur cinq continents.
De plus, Le Caire s’est doté d’un cadre juridique et institutionnel pour lui permettre de s’acquitter de ses obligations internationales, a précisé le représentant, qui a aussi mentionné l’existence d’une loi datant de 2010, d’un comité de coordination national, ainsi que d’une section spécialisée des affaires criminelles au sein des tribunaux pour garantir une action rapide contre les réseaux de trafiquants. Au niveau international, l’Égypte, a assuré M. Awad, coopère avec le système de l’ONU, en particulier avec l’ONUDC et l’OIM, et a participé au processus de consultations en vue d’adopter le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières qui doit être achevé en 2018. Pour la délégation, il est important que la communauté internationale redouble d’efforts pour empêcher que les réseaux de trafiquants puissent tirer profit de leurs activités, notamment en s’attaquant à leurs flux financiers.
Les rapports récents faisant état de ventes d’esclaves en Libye n’ont fait que confirmer la persistance de ce fléau, a déploré M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay).
À ses yeux, la traite des êtres humains est devenue une problématique d’ampleur globale, dans la mesure où elle ne concerne plus seulement les pays d’origine des migrants qui en sont le plus souvent les victimes, mais également ceux de transit et d’accueil, ainsi que les pays dans lesquels opèrent les réseaux criminels et ceux où transitent les flux financiers dont profitent ces réseaux. Il faut donc envisager la traite, a estimé M. Bermúdez, comme un problème à régler de concert par l’ensemble de la communauté internationale.
Aux nombres des mesures à prendre par tous les États Membres, y compris ceux qui ne se trouvent pas en situation de conflit, le représentant uruguayen a mentionné l’adoption de politiques nationales de lutte contre la traite, ainsi que de politiques migratoires et de coopération juridique appropriées, en utilisant comme point de repère la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et ses protocoles additionnels.
Dans ce cadre, les efforts des États Membres doivent non seulement se centrer sur la lutte contre la traite, a-t-il précisé, mais également sur le respect des droits fondamentaux des victimes, via l’adoption de mesures et de mécanismes de prévention et de protection. En effet, à la veille de l’entame des négociations d’un pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, M. Bermúdez a insisté sur l’importance du principe de « non criminalisation de la migration irrégulière ».
S’agissant notamment des réfugiés, il a rappelé l’importance de leur octroyer un accès aux services sociaux de base du pays dans lequel ils se trouvent, et ce, en attendant que soient réglées leurs demandes d’asile.
Par ailleurs, les responsables de la traite doivent être tenus pour responsables, a déclaré le représentant. Il a salué la création à cette fin, par le Secrétaire général, d’une équipe d’enquête pour rassembler et conserver des preuves d’actes de terrorisme et d’activités de traite des êtres humains.
M. WU HAITAO (Chine) a demandé une intensification des efforts pour régler les situations de conflit, dans le respect des principes de la Charte des Nations Unies, et remédier à leurs causes profondes. Ce faisant, la communauté internationale créera un cadre propice à la lutte contre la traite des êtres humains et les activités terroristes, a-t-il poursuivi. Il a souligné la nécessité de placer la lutte antiterroriste sous l’égide de l’ONU.
Le délégué chinois a en outre plaidé pour des efforts accrus en vue d’aider les pays d’accueil des réfugiés, de lutter contre la xénophobie et de garantir le développement durable des pays d’origine. Les États en proie à un conflit ont la responsabilité première dans la protection de leur population, a-t-il affirmé.
Enfin, le représentant chinois a indiqué que son pays était engagé à garantir la stabilité dans les pays en proie à un conflit et à y protéger les femmes et les enfants.
M. MATTHEW JOHN RYCROFT (Royaume-Uni) s’est dit lui aussi révolté par les images de migrants vendus sur un marché aux esclaves en Libye diffusés par CNN. Selon sa délégation, la traite des personnes est un problème transversal qui touche à chacun des piliers de l’ONU, puisqu’il s’agit aussi d’un problème de développement.
L’extrémisme violent profite de cette exploitation de la misère que représente la traite, a relevé le représentant, qui a préconisé de renforcer la transparence en ce qui concerne la « chaîne d’approvisionnement ».
Par ailleurs, a-t-il ajouté, il nous faut envisager la façon dont la lutte contre la traite peut être intégrée dans les efforts de pérennisation de la paix, y compris dans les mandats d’opérations de paix. La communauté internationale devrait se montrer unie dans ce combat, a affirmé M. Rycroft.
M. VINCENZO AMENDOLA, Sous-Secrétaire d’État pour les affaires étrangères et la coopération de l’Italie, a indiqué que la résolution de ce jour était un pas dans la bonne direction dans la lutte contre la traite des êtres humains. Il a souligné la nécessité d’apporter une assistance aux victimes de la traite, en particulier les femmes et les enfants non accompagnés.
L’Italie est aux avant-postes de la lutte contre la traite en Méditerranée, a-t-il dit. M. Amendola a mentionné les liens entre la criminalité transnationale organisée et les activités terroristes. Il a appelé à signer et ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ainsi que son Protocole additionnel.
Il a plaidé pour une approche globale contre les facteurs de risque tels que la pauvreté, la marginalisation et les discriminations. Le Conseil doit continuer de faire de cette question sa priorité, a-t-il dit.
Enfin, le Sous-Secrétaire d’État a rappelé la contribution de son pays au Fonds d’affectation spéciale visant à porter une assistance aux victimes de la traite.
M. SAMUEL MONCADA, Vice-Ministre des affaires étrangères du Venezuela, qui s’exprimait au nom du Mouvement des pays non alignés, a rappelé que le Mouvement avait toujours exprimé son inquiétude au sujet de la traite de personnes et estimait que cette question devait faire l’objet d’une réponse concertée aux échelles nationale et internationale. Il s’est de surcroît alarmé des impacts humanitaires de cette traite qui se manifeste dans les conflits armés, la pauvreté, l’inégalité de genre, le nettoyage ethnique.
Demandant à ce que les droits de l’homme soient respectés et les victimes de cette traite prises en charge, le délégué a estimé impératif que « le cycle d’impunité soit brisé » et que les responsables soient inculpés, y compris pour crimes de guerre ou crimes contre l’humanité. Le délégué bolivien a ensuite noté que la traite d’êtres humains était à la fois une cause et une conséquence des conflits, donc seule une approche globale et coordonnée responsabilisant à la fois les pays d’origine, de transit de de destination de cette traite permettra de lutter contre ce fléau.
Après avoir plaidé pour une approche plus préventive que militaire, il a tenu à souligner les liens grandissants de cette activité avec le terrorisme qui s’en sert comme moyen de financement et de recrutement, comme par exemple dans la région sahélo-saharienne.
Face à cette situation, le Mouvement des pays non alignés a appelé à renforcer la coopération et le dialogue entre pays pour éliminer toutes formes de crime organisé, mais a aussi exhorté les pays qui ne l’ont pas encore fait à adhérer au Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants et au Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, mer et air.
Soulignant l’importance de la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, les pays non alignés se sont d’ailleurs réjouis de la Réunion de haut niveau que l’Assemblée générale a organisé à ce sujet les 27 et 28 septembre derniers.
Reliant finalement la traite des personnes au « mouvement sans précédent des réfugiés et des migrants », le délégué a demandé à tous les États de s’attaquer à ces problèmes en dialoguant sur un pied d’égalité, et insisté pour que la communauté internationale veille à ne prendre aucune mesure qui stigmatiserait certains groupes ou individus. Selon lui, comme « il n’y a pas de solution globale pour régler le problème de la traite », il faut déployer des stratégies nationales sur mesure pour s’y attaquer.
Mme MARÍA EMMA MEJÍA VELÉZ (Colombie) a rappelé que l’esclavage n’avait plus sa place dans le monde moderne. Elle s’est félicitée de l’adoption de la Déclaration politique sur la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, adoptée par l’Assemblée générale en septembre 2017. Elle a estimé que le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, qui doit être achevé en 2018, pourrait constituer un cadre additionnel de coopération pour lutter contre la traite humaine. Rappelant que ce fléau était le fait des réseaux de criminalité transnationale organisée, la déléguée a appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Ce cadre juridique a servi de plateforme à la Colombie pour conclure et mettre en œuvre huit mémorandums d’accords et accords bilatéraux avec les pays de la région, a précisé Mme Mejía Velez.
M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a déclaré que la pauvreté, les difficultés économiques et le manque d’opportunités étant des facteurs qui exposent de nombreuses personnes aux trafiquants d’êtres humains, « il faut œuvrer collectivement à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ». Il a également souligné que les conflits armés et les crises humanitaires, « comme l’a rappelé le Secrétaire général », renforcent le risque que des individus tombent entre les mains des trafiquants. Il a ainsi plaidé pour que la communauté internationale lie ses efforts en faveur d’une paix durable, en particulier dans le cadre de l’appui aux initiatives de prévention des conflits, à ceux concernant la lutte contre le trafic d’êtres humains.
Le délégué a attiré l’attention sur le sort des plus vulnérables d’entre les victimes du trafic d’êtres humains, les femmes et les enfants, lesquels, a-t-il dit, « subissent le plus directement et violemment l’effondrement des structures juridiques, politiques et sociales ». Par conséquent, il a recommandé d’orienter les programmes vers la prévention du risque auquel sont exposées plus particulièrement les filles de devenir les principales proies des trafiquants pendant les conflits. M. Flynn a ajouté qu’en tant que pays qui appuie la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, et qui préside la Commission de la condition de la femme, l’Irlande croit fermement que les femmes doivent être promues principaux agents du changement dans la lutte contre le trafic d’êtres humains.
« La traite des personnes représente la commercialisation du corps de l’homme », a affirmé M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne). « C’est la version moderne de l’esclavage. » Le délégué a jugé nécessaire que le Conseil agisse face à ce fléau. La résolution 2331 (2016) a trouvé un prolongement « merveilleux » avec la résolution adoptée ce jour, a-t-il poursuivi. Il a suggéré à l’ONUDC de rédiger un rapport sur les principaux éléments de la stratégie mondiale face à la traite des êtres humains. Les opérations onusiennes doivent être mises à profit pour détecter le phénomène de la traite dans leurs zones de déploiement et en informer le Conseil, a-t-il déclaré. Il a exhorté les États à adopter des mesures contre la traite, avant de plaider, en conclusion, pour la constitution d’un réseau mondial de coordinateurs de cette lutte contre la traite d’êtres humains.
Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) s’est déclarée consternée par les informations faisant état de la vente de migrants comme esclaves en Libye, saluant l’appel lancé par le Secrétaire général de l’ONU aux autorités compétentes pour ouvrir des enquêtes sur ces « enchères » dans les plus brefs délais. Elle a ensuite évoqué les mesures prises par son gouvernement pour lutter contre la traite humaine, mentionnant que l’approche privilégiée met l’accent sur le respect des droits de l’homme et l’assistance auprès des survivants.
La représentante a estimé que la pleine mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité passe par une coopération et des partenariats renforcés. C’est dans cet esprit que son pays a, aux côtés des Pays-Bas et de la Belgique, établi un « mécanisme de renvoi transnational » et un autre mécanisme similaire conjointement avec la Suisse, afin d’identifier les victimes de la traite et de leur prêter assistance. Outre un système de coordination national, la Hongrie a financé, pour la période 2014-2020, une série de projets visant à réduire le trafic d’êtres humains et à soutenir les victimes.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a demandé que la question de la traite des personnes dans le contexte des conflits armés devienne un sujet régulier à l’ordre du jour du Conseil de sécurité et fasse l’objet d’un rapport annuel du Secrétaire général. Il est impératif d’avoir une réponse policière musclée à la traite humaine et aux formes d’esclavage moderne, a-t-il estimé avant d’exhorter tous les États à promouvoir l’acceptation universelle du Protocole de Palerme. Il a aussi plaidé en faveur d’une approche plus globale de la prévention de ce crime.
Soulignant les graves conséquences du manque de routes pour les migrations régulières, M. Wenaweser a cité le cas de la Libye où la réapparition des pires formes d’esclavage moderne « nous fait tous rougir de honte ». Il a applaudi la résolution d’aujourd’hui qui reconnaît que les violations associées à l’esclavage moderne et à la traite représentent des crimes de guerre, et, dans certains cas, des crimes contre l’humanité. Dans ce contexte, il a également souligné le rôle important de la Cour pénale internationale (CPI) dans les cas dont elle est saisie.
Au plan national, a précisé le représentant, les efforts du Liechtenstein portent essentiellement sur l’aspect financier de la traite. Les activités liées à ces crimes représentent 150 milliards de dollars de revenu par an, a-t-il rappelé. Son pays, sur la base de la résolution 2331 (2016), a développé des mesures visant à interrompre les chaînes financières liées à la traite des personnes et l’esclavage moderne. Il a notamment formulé une série de recommandations concrètes à cette fin, une initiative qui a été reflétée dans le rapport du Secrétaire général sur le sujet.
M. GHOLAMALI KHOSHROO (Iran) a plaidé pour une approche globale afin de lutter contre la traite des êtres humains et de remédier à ses causes profondes. Il a rappelé que les interventions étrangères, les conflits, le terrorisme et l’instabilité politique jetaient sur les routes des millions de personnes, qui deviennent dès lors des victimes potentielles de la traite. Évoquant la situation en Libye et les inquiétudes liées à l’asservissement qui y sévit, il s’est demandé à quel moment les États qui ont envahi ce pays seront tenus pour responsables. Soulignant l’importance de disposer de données « impartiales » sur la traite, il a dénoncé ces États qui produisent des rapports politisés et pointent les autres du doigt tout en niant leurs propres responsabilités.
Selon M. Khoshroo, la prévention, la protection des victimes et le partenariat sont les piliers sur lesquels doit reposer la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes. Rappelant combien l’Iran est engagé dans ce combat, il a affirmé que la synergie complexe qui lie la traite au crime organisé requiert un meilleur partage d’informations et une amélioration des capacités des départements de justice et des forces de l’ordre. Il a conclu en plaidant pour une meilleure éducation sur ces questions dans les pays d’origine, de transit et de destination, considérant que les personnes utilisant par inadvertance les services de trafiquants avaient autant besoin d’informations que leurs victimes.
M. ELMAHDI S. ELMAJERBI (Libye) a remercié le Conseil de sécurité de continuer à chercher des moyens de lutter contre ce phénomène de la traite et a recommandé d’anticiper et prévenir le déclenchement de conflits armés et d’utiliser la diplomatie préventive, les meilleurs moyens selon lui d’éviter des tragédies humaines. Il a cependant regretté que ces espoirs aient été trop souvent douchés par des interventions étrangères motivées par des intérêts contradictoires. La Libye partage l’avis du Secrétaire général selon lequel les régions souffrant de conflits armés et d’instabilité sont les plus vulnérables aux réseaux de traite d’êtres humains, qui profitent de la fragile autorité de l’État pour mener à bien leurs desseins immoraux.
Ne faisant pas figure d’exception à cet égard, la Libye s’efforce, selon ses moyens, de lutter contre les violations des droits des migrants clandestins, a indiqué le délégué. Dans ces circonstances, il regrette le paragraphe 7 du rapport du Secrétaire général, qui se fait le relai de médias faisant état de traite d’êtres humains en Libye, où les migrants seraient vendus comme des marchandises sur des marchés aux esclaves. Faisant référence à la déclaration du ministre des Affaires étrangères libyen, il a condamné de tels actes, s’ils sont étayés, et a réaffirmé que les autorités ont lancé une enquête sur ces allégations.
Le représentant a réitéré l’engagement de la Libye envers les accords internationaux qui criminalisent la traite d’êtres humains, ainsi que sa volonté de continuer à coopérer avec l’ONUDC, souhaitant même le retour du Bureau sous-régional pour le Maghreb à Tripoli. La nature des réseaux de traite, qui tirent parti des technologies de la communication et se sont internationalisés, a été l’une des motivations de la Conférence sur la sécurité des frontières organisée à Tripoli en 2013, conférence qui a vu la participation des pays voisins, du Sahel, de l’Union européenne et de l’ONU. Appliquer ses conclusions aurait permis de limiter la criminalité organisée, les migrations illégales, le trafic de drogues et la traite de personnes, a souligné la délégation, qui s’est dite prête à en réactiver la mise en œuvre.
La Libye est un pays de transit pour des flux continus et massifs de migrants clandestins, a poursuivi le délégué en reconnaissant traverser en plus une période difficile. Il a jugé injuste de lui faire porter la responsabilité des conséquences de ces migrations, d’autant que la communauté internationale est d’avis que faire face à ce phénomène dépasse les capacités nationales. Il a donc réitéré que, pour trouver des solutions, il est nécessaire de se préoccuper des véritables raisons qui poussent des individus à quitter leur pays. Tout accord visant à bloquer l’arrivée des migrants dans les pays de destination pour les renvoyer en Libye, que le Haut-Commissaire aux droits de l’homme qualifie d’inhumain, est dans l’intérêt des pays de destination.
Le délégué a également fait remarquer que cela pèse lourd sur le Gouvernement d’entente nationale, qui a souvent exprimé le besoin d’assistance technique afin de pouvoir contrôler ses frontières de manière durable. Il a aussi rejeté toute tendance à vouloir installer les migrants en Libye, en raison des dangers que cela peut faire courir au tissu social et culturel de la société libyenne. Il a appelé la communauté internationale à aider la Libye à faire face aux défis posés par les migrations clandestines et à adopter un remède efficace plutôt que d’exploiter des enquêtes médiatiques non représentatives pour diffamer, ce qui n’aide en rien à réduire les risques et les conséquences des migrations.
Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) s’est dite choquée par les rapports récents sur les migrants exposés à l’indignité de l’esclavage en Lybie. « Les conflits croissants et le fossé grandissant entre les riches et les pauvres offrent un terrain fertile à ceux qui veulent exploiter la souffrance humaine », a-t-elle déclaré. Pour elle, la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (Convention de Palerme), ainsi que le protocole sur le trafic des êtres humains, sont des modèles sur lesquels il faut se concentrer pour prévenir, protéger et poursuivre.
Mme Lodhi a fait part des efforts de son pays pour lutter contre ce « crime horrible ». Le Pakistan est partie à la Convention de Palerme, à la Convention sur la prévention et l’élimination de la traite des femmes et des enfants aux fins de prostitution, ainsi qu’à la Convention sur l’abolition du travail forcé. Il a mis en place un plan national d’action pour lutter contre le trafic d’êtres humains, ainsi qu’un cadre national stratégique pour la période 2016-2022, grâce auquel des victimes se sont vues procurer un abri; les gouvernements provinciaux renforcent leur législation relative au trafic.
Le représentant a espéré que l’adoption du pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières aidera à renforcer le cadre juridique existant. « Améliorer la capacité des États avec des engagements politiques et financiers à long terme est la clef », a-t-elle conclu, en ajoutant que le Conseil de sécurité devait aussi s’occuper des causes profondes des conflits.
M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a considéré que seules des approches multilatérales en matière de paix et de sécurité permettront d’atteindre des solutions à long terme pour mettre fin au trafic d’êtres humains. Ces solutions devront s’attaquer aux causes profondes -sociales et économiques- du phénomène, a-t-il précisé. Pour le délégué, il conviendrait d’accélérer les efforts pour arriver à l’universalisation du Statut de Rome et de la Cour pénale internationale (CPI), ce qui permettrait finalement de faire rendre des comptes aux auteurs des crimes les plus odieux.
Par ailleurs, il a estimé que le terrorisme et la criminalité transnationale organisée étaient des problèmes de nature différente, nécessitant par conséquent des solutions distinctes. Des liens entre les deux phénomènes peuvent exister, mais seulement dans des conditions tout à fait particulières, a-t-il souligné. C’est pourquoi, il a rappelé l’importance de discuter des questions de terrorisme en premier lieu au sein du Conseil de sécurité, car c’est un phénomène qui menace la paix et la sécurité internationales, tandis que le crime organisé reste une question de sécurité nationale, dont les réponses peuvent venir, le cas échéant, d’efforts internationaux de coopération. Le représentant brésilien a aussi recommandé que le Conseil de sécurité, pour combattre plus efficacement la traite d’êtres humains, s’appuie davantage sur l’expertise technique de l’Assemblée générale, du Comité des droits de l’homme, de la Commission de consolidation de la paix et de l’ONUDC.
Mme MINNA-LIINA LIND (Estonie) a déclaré que la prévention était essentielle et centrale dans le Plan d’action mondial de lutte contre la traite des personnes. Associé au Programme 2030, il favorisera le développement durable et inclusif afin de s’attaquer aux causes profondes et aux vulnérabilités.
Il faut également trouver des moyens de lutter activement contre la demande des personnes pour être livrées à la traite à des fins d’exploitation dans les pays de destination et de transit, a ajouté la déléguée estonienne. Aussi longtemps qu’existent la volonté de payer les criminels et la demande pour l’exploitation sexuelle, le travail forcé et l’esclavage, nous ne pouvons pas mettre fin à la traite des êtres humains, a estimé Mme Lind.
Elle a également souligné le rôle central de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) dans la lutte contre la traite d’êtres humains en particulier en fournissant aux États Membres l’assistance technique pour mettre en œuvre la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.
Mme Lind a appelé l’Union européenne à plus de coopération avec l’ONU et a souligné le rôle du Centre international de perfectionnement professionnel et technique pour assurer que les efforts pour lutter contre la traite d’êtres humains dans tout le système des Nations Unies soient cohérents.
Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a déclaré qu’au niveau international, son pays continuera à insister sur l’importance de la cohérence et de la continuité de l’action du système multilatéral et des États Membres face au fléau de la traite d’êtres humains en période de conflit armé. Une action forte est nécessaire à tous les niveaux, a-t-elle ajouté, allant de la prévention du phénomène à l’identification et l’interception effective de réseaux existants, pour aboutir à la poursuite des personnes et organisations qui se rendent coupables de ce crime. La représentante a en outre estimé qu’en temps de paix, de conflit ou de crise humanitaire, différentes agences ou institutions ont une expertise à faire valoir. Pour elle, l’ampleur du phénomène de la traite d’êtres humains justifie que tous les efforts nécessaires soient mis en œuvre pour garantir une collaboration et une coordination sans faille entre ces agences et organisations. Elle a donc plaidé pour faciliter l’accès des parties prenantes au mécanisme du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes. Faisant ensuite référence à l’actualité sur le terrain, la représentante belge a déclaré que, face à la déroute de Daech, « nous devons redoubler de vigilance pour démanteler les réseaux qui continuent à financer cette organisation et d’autres ».
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a jugé que la traite est un phénomène aussi complexe que les horreurs qu’elle engendre, comme on a pu le constater selon lui en Libye. C’est pour cette raison que le Pérou a salué l’adoption à l’unanimité d’une résolution visant à lutter contre ces fléaux. Aux yeux du délégué, trois éléments cruciaux sont à prendre en compte. Premièrement, il faut absolument analyser les liens entre la criminalité organisée et les situations de conflits dans le monde. Il a parlé notamment de « dynamique perverse » en évoquant la façon dont les groupes terroristes utilisent le crime organisé pour tirer de l’argent de la traite des personnes. Ensuite, il a tenu à souligner le lien intrinsèque qui existe entre traite des personnes et trafic des migrants. Si les migrants sont des victimes faciles des réseaux criminels, les crimes qui les touchent ne doivent pas pénaliser les processus migratoires qui sont des mouvements naturels, a-t-il souhaité.
Le représentant du Pérou a enfin estimé qu’il fallait effectuer un distinguo entre la traite des hommes, et celle des femmes et des enfants. Aux yeux du Pérou, il est impératif d’inclure ces trois éléments dans une action coordonnée pour lutter contre cette traite d’êtres humains. En outre, étant donné la portée transnationale de la traite, il a jugé indispensable que la communauté internationale agisse avec fermeté et de manière coordonnée. À ce titre, les Nations Unies, au travers de l’ONUDC, semble être le lieu tout indiqué pour cela.
Mme JOANNE ADAMSON, de l’Union européenne, qui s’est réjouie de l’adoption du projet de résolution et qui a salué la publication du rapport du Secrétaire général, a souligné que le trafic d’êtres humains représente une menace à la sécurité humaine comme à la sécurité des pays, car « il attente à la paix, aux droits de l’homme, à la gouvernance démocratique et à l’état de droit ».
Après avoir ajouté que le trafic d’êtres humains est une violation grave de la dignité humaine qui contrevient à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, elle a réitéré l’appui de l’UE aux recommandations du rapport du Secrétaire général présenté le 27 avril dernier. Ce document, a-t-elle dit, attirait l’attention sur la violence sexuelle liée aux conflits et appelait à appréhender les liens entre ce phénomène et le trafic d’êtres humains commis en particulier par des groupes terroristes.
Pour Mme Adamson, la communauté internationale doit renouveler ses efforts en revitalisant le cadre juridique existant. À ce titre, elle a signalé que l’UE donnait l’exemple en privilégiant une approche basée sur les droits de l’homme et l’aide aux victimes, à commencer par les femmes et les enfants. « Nous avons établi un cadre politique et juridique ambitieux et complet pour combattre efficacement le trafic des êtres humains », a-t-elle ensuite assuré, ajoutant que l’UE encourageait la mise en place, au niveau de ses États membres, de mécanismes nationaux d’identification et d’assistance « inconditionnelle » aux victimes.
Rappelant en outre qu’en septembre dernier, l’UE et l’ONU ont lancé l’initiative « Spotlight » pour éliminer toutes les formes de violence contre les femmes, ce partenariat étant doté d’une enveloppe initiale de 500 millions d’euros, Mme Adamson a de nouveau insisté sur l’aspect multidimensionnel du trafic d’êtres humains.
« Le trafic d’êtres humains est une question de développement, de paix et de sécurité et de droits de l’homme », a-t-elle ainsi déclaré, pour rappeler ensuite la nécessité d’une plus grande cohérence des efforts spécifiques menés conjointement par les agences, fonds et programmes des Nations Unies. Selon elle, le Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes doit être le catalyseur de ces efforts.
Pour conclure, elle a rendu hommage à l’opération Sophia, lancée en 2015 par l’Union européenne, et qui, dotée d’un mandat du Conseil de sécurité, lutte chaque jour contre le trafic de migrants en Méditerranée. L’opération Sophia permet de démanteler les réseaux de trafiquants et de passeurs, d’arrêter et de juger ces derniers tout en portant secours à des milliers de personnes dans la partie sud de la Méditerranée centrale, s’est-elle félicitée.
Mme MADINA JARBUSSYNOVA, Représentante spéciale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour la lutte contre le trafic d’êtres humains, s’est dite convaincue, sur la base des missions d’établissement des faits conduites par l’OSCE dans des pays très touchés par les flux massifs de migrants, de l’utilité de mettre en place une agence de coordination chargée de pérenniser les efforts de lutte contre les réseaux de trafiquants et d’assistance inconditionnelle aux victimes de trafic d’êtres humains.
Elle a ajouté que l’action collective devait dépasser le seul développement de cadres politiques et juridiques, pour concerner également la formation de fonctionnaires internationaux, de juges ou encore d’inspecteurs du travail. « Mon équipe a formé à ce jour 200 agents spécialisés sur les questions de trafic d’êtres humains », a-t-elle indiqué, précisant que ces derniers travaillaient désormais dans quelque 40 pays à travers le monde.
Elle a en outre salué les efforts entrepris par l’ONUDC pour développer des lignes directrices sur le trafic de personnes dans les situations de conflit et postconflit, et elle a assuré M. Fedotov que l’OSCE se tenait prête à faciliter la mise en œuvre et l’évaluation de ces lignes directrices au niveau régional.
L’intervenante a à son tour appelé les États Membres à assurer un financement pérenne du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes. L’OSCE, a-t-elle dit, est fière d’avoir été le premier partenaire du Groupe, qui promeut les synergies et fait avancer la cause de la lutte internationale contre le trafic d’êtres humains.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a égrené les chiffres alarmants de la traite d’êtres humains: 63 000 personnes ont fait l’objet de ce trafic en 2016, pendant qu’environ 21 millions de personnes sont comptabilisées comme victimes du travail forcé et du trafic. Un bilan auquel il a tenu à ajouter les 22,5 millions de réfugiés dans le monde, en tenant compte également des rapports qui indiquent que des migrants africains sont actuellement vendus comme esclaves en Libye. Face à cette situation, le délégué indonésien a considéré qu’il était d’abord fondamental de renforcer les lois et les procédures destinées à lutter contre ce fléau. À ce titre, il a appelé à renforcer la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, exhortant au passage les pays qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la Convention de Palerme et ses protocoles.
Le délégué indonésien a salué l’adoption de la résolution du Conseil de sécurité sur la lutte contre la traite des personnes pendant les conflits armés, qui est centrée sur les victimes. Les efforts prioritaires doivent porter, à son avis, sur une coopération accrue en matière d’enquête et de démantèlement des réseaux de traite. Au niveau régional, il a expliqué comment son pays travaillait avec l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour mettre en œuvre la Convention de l’ASEAN contre la traite des êtres humains et la Déclaration de Bali sur le trafic de migrants, la traite des personnes et la criminalité transnationale qui y est associée. Enfin, il a souhaité un renforcement des activités de sensibilisation et des capacités de réponse des missions de maintien de la paix, pour que ces dernières puissent réagir plus efficacement encore. Il a aussi souligné l’importance de donner aux femmes le rôle qui leur revient dans la lutte contre les violences sexuelles et l’exploitation des femmes et des enfants.
Ce qu’il faut aujourd’hui c’est la volonté politique et la détermination pour traduire les mots en actes concrets, a affirmé M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie). Après avoir ratifié les principaux traités internationaux et mis en œuvre la législation européenne pertinente, la Slovaquie renforce désormais ses lois nationales pour améliorer la protection des victimes de la traite.
Le pays met en œuvre le Plan d’action national 2015-2018 mais estime que presque deux mois après l’adoption de la Déclaration politique sur la mise en œuvre du Plan d’action des Nations Unies contre la traite des personnes, il est temps de se concentrer sur la prévention plutôt que sur la réaction, pour autant que l’on veuille vraiment que la protection des victimes et la poursuite des criminels soient en temps, efficaces et globales.
Les campagnes de sensibilisation et de publicité, les manifestations sur la traite et l’éducation de groupes spécifiques sont autant de moyens de prévention, a souligné le représentant. « Nous devons, a-t-il poursuivi, améliorer la protection des victimes en leur offrant certes une assistance spéciale et une approche professionnelle mais d’abord et surtout en leur ouvrant les yeux sur leur statut de victimes. Notre action contre les criminels doit être déterminée, coordonnée et efficace. Nous devons, a ajouté le représentant, améliorer notre connaissance des procédures, des méthodes et des formes de détection et de poursuite au niveau national, renforcer la coopération internationale et multiplier les enquêtes communes sur les réseaux de la criminalité transnationale organisée et les flux financiers illicites. »
M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a mis l’accent sur l’importance de la collecte de preuves, y compris en dehors des zones de conflit et autres que les témoignages des victimes, dans la lutte contre la traite des personnes. Soulignant son aspect très lucratif et les risques très faibles d’être traduits en justice pour les responsables de ces crimes « haineux », il a estimé que l’un des moyens pour les réduire était de les rendre beaucoup moins profitables, ce qui contribuerait en outre à potentiellement faire tomber le nombre des victimes.
Consciente de la nature sensible de la traque des coupables et du suivi de la piste financière, la délégation allemande a néanmoins averti des dangers liés à l’augmentation de la traite des personnes lorsque l’état de droit n’est pas défendu, ce qui peut aussi contribuer à déstabiliser des sociétés et des États.
Au niveau national, l’Allemagne combat ce phénomène par certaines initiatives, d’autant plus qu’elle est devenue un pays de destination pour les personnes victimes de la traite. Ainsi, elle met l’accent sur la prise en charge de ces victimes par le truchement de services sociaux et psychologiques et sur la base des conseils prodigués par le Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains qui est aussi chargé de la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur cette question, une convention que l’Allemagne encourage à ratifier.
D’autres mesures portent plus spécifiquement sur l’application de la loi et visent les responsables et ceux qui profitent de ce crime. À ce titre, le représentant a mentionné une nouvelle disposition qui pénalise les clients qui ont sciemment recours aux services sexuels de personnes victimes de la traite. Il a également vanté le rôle de la société civile allemande notamment dans le contexte de l’exploitation au travail.
Compte tenu de sa situation géographique, a déclaré M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie), son pays n’est en aucun cas épargné par les tendances croissantes de la traite des personnes. Dans les crises régionales, les réseaux criminels et terroristes recourent à toutes formes d’exploitation, de violence fondée sur le sexe et de recrutements forcés pour financer et préserver leurs opérations. À cet égard, a insisté le représentant, il faut réaliser qu’une organisation terroriste comme le PKK/PYD utilise largement les méthodes d’exploitation, en particulier le recrutement forcé des enfants et des jeunes femmes.
La Turquie, a-t-il affirmé, combat activement les organisations terroristes de la région. Elle a adopté des mesures administratives et juridiques globales contre la traite. Une commission de coordination a été créée pour mettre en œuvre le Plan d’action national et le règlement sur la traite et la protection des victimes est entré en vigueur l’année dernière.
La Turquie est naturellement partie à la Convention de Palerme et à ses Protocoles additionnels et a assuré l’entrée en vigueur, en février 2016, de la Convention du Conseil de l’Europe sur la traite des personnes.
La traite d’êtres humains peut être la conséquence d’une crise sécuritaire ou d’un conflit armé, a reconnu M. OLIVIER MARC ZEHNDER (Suisse). La migration et les déplacements forcés qui s’ensuivent, y compris les déplacements internes, aggravent les risques de traite et d’exploitation. Les problèmes qui en découlent concernent tous les pays situés le long des routes migratoires, a ajouté le représentant. Si l’absence de paix et de sécurité est propice au modèle économique des trafiquants, comme c’est visiblement le cas en Libye, les pays dotés d’un état de droit solide sont loin d’être épargnés pour autant, a-t-il averti.
C’est la raison pour laquelle la Suisse s’efforce de renforcer les mesures d’identification et de protection des personnes dans sa procédure d’asile. Le deuxième Plan d’action national contre la traite des êtres humains de 2017-2020 prévoit un certain nombre d’activités en ce sens, a-t-il fait savoir. L’une d’elle consiste à sensibiliser systématiquement les employés des centres de requérants d’asile, qui sont en première ligne. Le plan d’action accorde également une attention particulière aux mineurs non accompagnés, dans le contexte de la traite d’êtres humains.
Afin de lutter contre l’impunité des trafiquants d’êtres humains, le délégué de la Suisse a souligné l’importance des mécanismes de suivi et d’établissement des faits. Ces mécanismes permettent de constituer une précieuse base de connaissances sur ce phénomène et contribuent à renforcer l’obligation de rendre des comptes. Il est par conséquent judicieux de recourir à des instruments tels que le Mécanisme de surveillance sur le recrutement d’enfants soldats, créé en 2005 par le Conseil de sécurité, afin de disposer d’informations sur les violations graves commises à l’encontre des enfants lors des conflits armés.
M. EPHRAIM LESHALA MMINELE (Afrique du Sud) a vu les informations accablantes de ces derniers jours montrant des migrants africains en Libye qui seraient vendus comme esclaves comme une indication claire du besoin urgent d’éradiquer ce fléau. « Notre objectif ultime devrait être de faire face aux conflits qui font naître ce fléau, y compris ses causes profondes », a estimé le représentant. Cela oblige à relever les défis du développement, a-t-il dit en parlant aussi des dangers des interventions extérieures comme en Libye, en Syrie, en Iraq, qui ont conduit à la prolifération de réfugiés et de personnes déplacées. Le représentant a donc souhaité que tous les organes des Nations Unies travaillent de conserve pour parvenir au développement, et, partant, à la paix durable.
« Nous devons également redoubler d’efforts pour renforcer les capacités des acteurs en première ligne, y compris les responsables du système de justice pénale, les prestataires de services sociaux, le personnel médical, les forces de l’ordre et les autorités frontalières, pour lutter efficacement contre ce fléau », a estimé M. Mminele. Il a aussi appelé à renforcer les capacités à poursuivre ces crimes en fournissant une assistance technique dans des domaines tels que le droit international et le renseignement.
Mgr SIMON KASSAS, du Saint-Siège, a souligné que pour lutter contre la traite des personnes il fallait affronter toutes ses causes économiques, environnementales, politiques et éthiques, mais surtout prévenir et mettre fin aux conflits qui aggravent la vulnérabilité des personnes susceptibles de subir ce trafic. « Aussi longtemps que les guerres feront rage, le trafic et l’exploitation sexuelle, le travail forcé et les autres crimes continueront de fleurir », a-t-il asséné. À ces efforts de paix, il a considéré qu’il fallait associer des mesures pour protéger les populations affectées, en particulier les femmes et les enfants. À ce titre, le Saint-Siège a mis l’emphase sur la « responsabilité de protéger » dans le contexte des crises migratoires et de réfugiés. Quand les États ont échoué à protéger les populations des guerres et des atrocités au point qu’elles doivent fuir leur foyer, il est à son avis de la responsabilité de ces mêmes États de les protéger de menaces supplémentaires comme les trafiquants. Il a aussi prévenu sur le fait que punir pénalement des migrants forcés exacerbe leur vulnérabilité et les rend moins disposés à témoigner contre les trafiquants.
Liant la question de la traite des personnes aux objectifs de développement durable, l’Observateur a estimé qu’aucun État ou organisation n’est en mesure de trouver une solution seul. Mais il a regretté qu’au niveau international ces défis n’aient pas trouvé de réponse à leur hauteur: « Malgré les progrès et efforts, comme la Réunion de haut niveau de l’Assemblée générale qui s’est tenue les 27 et 28 septembre dernier à propos du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, beaucoup plus doit être fait pour parvenir à une meilleure coordination entre les gouvernements, la société civile, le pouvoir judiciaire et les forces de l’ordre. » Il a conclu en exhortant tous les leaders religieux à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour sauver les millions d’enfants, de femmes et d’hommes qui sont obligés de vivre en esclaves.
M. TARIQ ALI FARAJ AL-ANSARI (Qatar) a souligné l’importance que la communauté internationale tienne compte des recommandations du Secrétaire général pour que soit mis fin au crime odieux qu’est le trafic d’êtres humains pendant les périodes de conflit. Il a fustigé le recrutement de jeunes gens par des organisations terroristes afin qu’ils commettent des attentats, ajoutant que son pays concentrait tous ses efforts sur l’appréhension des causes profondes du phénomène du trafic d’êtres humains.
Au niveau national, « nous avons adopté plusieurs lois pénalisant le trafic sous tous ses aspects et assurant que les trafiquants sont poursuivis, mis hors d’état de nuire et juger », a-t-il fait savoir. Il a également indiqué qu’au niveau régional, le Qatar coopérait activement avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et les services juridiques spécialisés de la Ligue arabe dans la lutte contre la traite des personnes.
Récemment, a-t-il rappelé, le Qatar et la Belgique ont facilité les discussions tenues dans le cadre de la discussion de haut niveau tenue par l’Assemblée générale sur l’évaluation de la mise en œuvre du Plan mondial pour la lutte contre la traite des personnes.
Mme SIMA SAMI I. BAHOUS (Jordanie) a exprimé l’inquiétude de son pays face au phénomène de traite des personnes, en particulier depuis que les images révoltantes venues de Libye ont été diffusées dans les médias. Constatant une hausse du nombre de victimes au Moyen-Orient, notamment en République arabe syrienne et en Iraq, mais aussi en Somalie, en Europe ou en Asie, elle a souligné que les conflits que connaît le monde, ainsi que les vagues inédites de réfugiés, participent à l’accentuation de ce problème.
Selon elle, il est du devoir de la communauté internationale d’avoir une vision globale de cette question et de développer une réponse interrégionale. Liant la traite des personnes avec les activités des groupes terroristes, elle a insisté pour que la lutte soit menée conjointement contre ces deux fléaux et que les femmes, les enfants et les jeunes soient spécialement soutenus. « Tout ça doit faire partie d’une stratégie préventive globale, a-t-elle ajouté, c’est pourquoi la Jordanie et la Norvège ont créé le Groupe des amis contre l’extrémisme violent ».
Saluant l’adoption de résolutions sur le sujet au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale, le Royaume de Jordanie a estimé que c’est la preuve de la volonté politique de la communauté internationale de lutter contre ces crimes atroces. La représentante est ensuite revenue sur l’ensemble de l’arsenal juridique jordanien destiné à combattre ces calamités: la criminalisation de la traite des personnes, du travail forcé et de l’esclavagisme moderne; la mise en place d’une stratégie nationale; la création d’une commission nationale pour la lutte contre la traite des personnes; la mise en œuvre d’un mécanisme permettant de renvoyer les cas de traite des personnes vers les personnes compétentes; la création d’une maison de la dignité permettant d’apporter de l’aide aux victimes et l’institution d’un fonds pour la lutte contre la violence faites aux femmes.
« La traite des personnes est un crime de l’humanité envers l’humanité », a affirmé Mme NOA FURMAN (Israël), laquelle a dénoncé cette « industrie de plusieurs milliards de dollars » qui a de multiples facettes, même si récemment, c’est devenu un instrument privilégié de la terreur pour des acteurs non étatiques.
Elle a appelé le monde à se rappeler de l’humanité de ce problème, des noms, des visages et des histoires des victimes de la traite en citant notamment le cas de Adnan Ali qui a eu à choisir entre rejoindre les rangs des rebelles houthistes au Yémen ou vendre ses organes, ou encore de Zara qui a été kidnappée par Boko Haram au Nigéria et forcée de se prostituer.
Trop de personnes meurent des suites de la traite, et celles qui en échappent sont physiquement et émotionnellement marquées à vie, a poursuivi le représentant qui a appelé tous les pays à faire leur part pour mettre fin à cette « barbarie ».
En Israël, un pays qui a été confronté à la traite des personnes dans les années 90 et au début des années 2000, une loi antitraite a été adoptée en 2006 ainsi qu’un plan d’action national. Israël est partie à la Convention de Palerme et à son protocole sur la traite des personnes et réitère son attachement aux quatre « p »: prévention, poursuite, protection et partenariat.
Parmi les actions menées dans ce domaine, l’intervenante a indiqué que des coordonnateurs de la lutte contre la traite des personnes ont été mis en place dans tous les organismes gouvernementaux et des séances de formation sont dispensées aux responsables nationaux chaque année.
Mme ISBETH LISBETH QUIEL MURCIA (Panama) a fait part de son indignation quant à l’existence de « marchés aux esclaves » en Libye. Alors que la communauté internationale progresse vers un pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, elle a souhaité que les efforts portent sur l’ensemble de la problématique de la traite, à commencer par ses causes. Au Panama, la prévention et la répression de la traite font partie intégrante de la « stratégie de sécurité citoyenne ».
Conformément au Plan d’action mondial pour la lutte contre la traite des personnes, a précisé la représentante, son pays a pris une série de mesures pour juger les trafiquants et protéger les victimes. Le Panama dispose ainsi de la plus grande base de données biométriques du monde. En tant que pays de transit et de destination de migrants, il œuvre aussi à harmoniser la juridiction pénale dans les pays d’Amérique centrale pour combattre la criminalité transnationale organisée. De plus, le Panama est membre de la Coalition régionale contre la traite des personnes et Vice-Président du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies en faveur des victimes de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Enfin, il a signé un accord avec l’ONUDC pour établir le premier foyer d’accueil des victimes de la traite de la région.
M. TORE HATTREM (Norvège) a déclaré que « nous devons développer des outils qui vont de la sécurité au développement des communautés pour faire face à la convergence des conflits armés, du terrorisme et de la traite d’êtres humains. » « Nous avons besoin d’une meilleure utilisation des organisations et instruments internationaux tels que la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole de Palerme pour prévenir, réprimer et punir la traite des personnes afin d’assurer une coopération internationale transfrontalière et régionale efficace ainsi qu’entre les forces de l’ordre nationales », a ajouté le représentant.
De plus, a-t-il indiqué, « nous avons besoin d’améliorer les analyses et la prévention des conflits et la coopération dans le partage des données et des surveillances entre les pays et au sein des organismes des Nations Unies. Nous avons également besoin d’améliorer notre capacité à surveiller les réseaux de traite et les flux financiers connexes et donner la priorité au développement de stratégies visant à désorganiser le financement et les agissements des trafiquants ».
Le Programme 2030 donne une importante plateforme pour s’attaquer à la traite d’êtres humains de manière plus holistique et « nous avons aussi besoin de faire participer plus de femmes et de jeunes dans les activités de consolidation de la paix et les actions contre la traite des êtres humains », a estimé M. Hattrem.
M. ELKHADIR (Maroc) a expliqué que cette réunion se tient dans une conjoncture de déplacements de populations sans précédent. Or les migrants, du fait de leur vulnérabilité, sont des victimes potentielles de la traite, a-t-il souligné. Le délégué a ensuite assuré que la lutte contre ce phénomène était l’une des priorités de son pays, le Maroc se positionnant même comme un acteur d’avant-garde dans la lutte contre le trafic des migrants. Pour favoriser une intégration humaine des migrants, qui permet de les préserver des trafiquants, le Maroc a pris des mesures relatives à l’immigration, l’asile et la traite. Le représentant a aussi illustré l’engagement de son pays sur la scène internationale par son adhésion à la Convention de Palerme et la ratification de son protocole additionnel.
Le délégué marocain a poursuivi en expliquant que la pauvreté extrême, l’instabilité et la violation des droits de l’homme créent des situations que les organisations terroristes exploitent à leur avantage. Selon lui, il ne faut pas passer par une approche uniquement sécuritaire, mais adopter une stratégie globale et multisectorielle pour comprendre comment ces personnes deviennent des victimes de la traite. La lutte contre la traite exige aussi une adoption universelle des objectifs de développement durable. Le représentant a ensuite insisté sur le fait qu’une réponse efficace ne passe pas seulement par le pénal, arguant que seule la prévention permettra de diminuer le vivier des victimes potentielles. Enfin, il a plaidé pour l’enregistrement des populations de réfugiés et une meilleure identification des cas de traite.
M. MAFADAL (Soudan) a déclaré que les images « atroces » de migrantes africaines victimes de la traite appellent l’ouverture d’enquêtes judiciaires contre les réseaux de criminalité transnationale organisée qui se livrent à de tels actes. Dans ce contexte, une coopération bilatérale et multilatérale est plus que jamais nécessaire pour mettre en œuvre une approche intégrée qui tienne compte des causes profondes du phénomène, a préconisé le représentant. « Nous aimerions rappeler que certains progrès ont été accomplis au niveau national », a-t-il dit, en faisant observer que la loi soudanaise pertinente, datant de 2014, avait été amendée pour refléter les dispositions les plus récentes du droit international. Il a ensuite exhorté la communauté internationale à honorer ses engagements vis-à-vis du processus de Khartoum, dont l’objectif est de donner un nouvel élan à une coopération interrégionale entre les pays d’origine, de transit et de destination des migrants, visant particulièrement la route entre la Corne de l’Afrique et l’Union européenne. Le délégué soudanais a enfin demandé à la communauté internationale d’apporter un appui technique aux pays en développement et d’élaborer des stratégies qui tiennent compte de tous les aspects des phénomènes de la traite.
Après avoir salué l’adoption de la résolution par le Conseil de sécurité, M. JAN KICKERT (Autriche), a déclaré que les conflits créaient des situations dans lesquelles les civils étaient exposés au trafic humain. Il a souligné que les femmes et les fillettes sont trop souvent victimes de l’exploitation sexuelle, et que les enfants sont particulièrement vulnérables face à la traite d’êtres humains.
Par ailleurs, il a noté que lors des conflits armés, la traite humaine est aussi une stratégie destinée à cibler les minorités ethniques et religieuses. En menant le combat contre la traite des humains, l’Autriche suit une approche centrée sur les victimes, qui respecte l’état de droit.
En conséquence, « nous mettons l’accent sur la prévention du trafic humain en identifiant et en protégeant les victimes », a-t-il déclaré. « Mettre fin au climat d’impunité est de la plus grande importance. » Dans les situations d’après conflit, les mécanismes de lutte contre l’impunité et de justice transitionnelle sont des éléments clefs d’une paix durable, a-t-il déclaré.
Le délégué a noté que l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) reste un partenaire central pour assister les États Membres. Il a en outre salué le débat du jour qui doit favoriser la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales pour éradiquer la traite d’humains.
Enfin, il a appelé les États qui ne l’ont pas fait à ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole de Palerme.
Mme KIRA CHRISTIANNE DANGANAN AZUCENA (Philippines) a exposé l’approche adoptée par son gouvernement pour lutter contre la traite des êtres humains. Par exemple, dans des zones de conflit, un groupe de lutte contre la violence sexiste est opérationnel, composé notamment de forces de maintien de l’ordre, d’agents des affaires sociales spécialisés dans les questions de genre et de représentants de la société civile. Il s’agit de faire face aux besoins de femmes et des enfants en situation de conflit, en réduisant leur vulnérabilité face aux violences sexuelles et à la traite. Le Gouvernement philippin a également ciblé la question de l’utilisation d’enfants soldats. Il prend des mesures pour prévenir le fléau, diligente des enquêtes en cas de recrutement, demande des comptes aux auteurs et forme des officiers pour assister les enfants sauvés des groupes armés.
En outre, pour faire face au problème de la traite comme moyen de financement d’activités terroristes, de groupes armés et de la criminalité transnationale organisée, les Philippines estiment qu’il faut cibler les corridors et les flux de la traite. Cette approche a permis au pays de localiser des victimes et de pouvoir leur porter secours au moment opportun. Mme Azucena a expliqué par ailleurs que le Gouvernement avait tenu compte de l’approche fondée sur le genre lors de son intervention à Marawi. Ainsi, un contingent de police et de l’armée composé entièrement de femmes a été envoyé en août dernier dans la région.
Avec environ quatre millions de Philippins considérés comme des travailleurs migrants, son gouvernement juge prioritaire de leur apporter la protection nécessaire contre la traite et l’exploitation, a conclu la représentante. Cette protection se fait en accord avec les lois nationales, par le biais de la coopération avec les pays de destination et grâce à des initiatives passant par des fora multilatéraux.
M. JORGE SKINNER-KLEÉ ARENALES (Guatemala) a jugé de plus en plus inquiétant le lien entre la traite et les groupes terroristes et la criminalité transnationale organisée et a souligné l’impact positif de la résolution 2331 (2017) qui condamne tous les actes de traite, en particulier la vente ou le commerce des personnes par Daech.
Il a exprimé son écœurement en apprenant qu’en 2016, plus de 24 millions de nouveaux cas de traite de personnes ont été répertoriés à l’échelle mondiale, comme indiqué par la Rapporteuse spéciale. Il a plus particulièrement condamné sans réserve le fait qu’aux niveaux régional et national, les femmes et les enfants migrants en transit soient plus vulnérables à ce fléau et à d’autres formes d’exploitation. Ils sont en effet victimes des réseaux de la criminalité transnationale organisée comme ils sont aussi exposés à la xénophobie, à la discrimination, au mauvais traitement et à la violence indiscriminée.
Il a déploré l’absence de canaux de migration sûrs et organisés ainsi que de mécanismes permanents et accessibles aux enfants et à leurs familles qui leur permettraient d’obtenir un statut migratoire formel ou un permis de résidence. Cette situation pousse les enfants à rechercher des alternatives précaires qui aggravent leur exposition au risque de vente, traite et autres formes d’exploitation et qui font que, souvent, les enfants et les femmes sont détenus aux frontières.
Il a exhorté le Conseil à ne pas rester passif devant l’horreur de certaines formes d’esclavage actuelles et à demeurer saisi de cette thématique complexe qui exige une analyse plus approfondie, tout en prenant en considération la corrélation entre les piliers de la paix, le développement et les droits de l’homme.
Il a jugé opportun de consolider les efforts et de créer des synergies entre les différents instruments internationaux pour aboutir à des mécanismes concertés permettant une consolidation des efforts et d’abolir les pratiques détestables de la traite et de l’esclavage.
Mme GABRIELA MARTINIC (Argentine) a appelé à lutter contre la traite des êtres humains de manière « holistique » et « coordonnée », en gardant bien à l’esprit qu’il s’agit là d’un « problème global ». De son côté, a-t-elle souligné, l’Argentine a créé un Comité exécutif pour la lutte contre la traite et l’exploitation des personnes et pour la protection et l’aide aux victimes, qui coordonne les actions de trois ministères argentins, ainsi qu’un Conseil fédéral chargé de définir la stratégie du pays pour éliminer la traite de son territoire. En outre, a indiqué la représentante, le Centre argentin de formation interarmées aux opérations de maintien de la paix (CAECOPAZ) dispense une formation spécifique sur la traite des personnes.
M. MICHAEL BONSER (Canada) a réitéré que la prévention de toutes violences à l’égard des personnes, tout particulièrement les femmes et les filles, demeurait une priorité pour son pays, comme en témoignent les mesures prises pour la mise en œuvre de la résolution 2331 (2016). Il a aussi indiqué que la nouvelle politique d’aide internationale féministe contribuera à lutter contre la pauvreté, les inégalités, la violence et les conflits qui aggravent la vulnérabilité de ces personnes et « les poussent dans les bras des réseaux ».
Mettant l’accent sur l’action du Canada contre l’État islamique et l’aide humanitaire en Iraq à destination notamment des Yézidis, le représentant a vanté l’utilisation d’outils pour lutter contre les crimes financiers. Par exemple, le projet canadien PROTECT, créé en 2016, est une coopération publique privée « hors du commun » réunissant la cellule canadienne de renseignement financier, les forces de l’ordre et des institutions financières, qui repère en priorité le blanchiment d’argent associé au terrorisme, a-t-il expliqué.
M. Bonser est ensuite revenu sur les violences sexuelles qui constituent selon lui un obstacle au relèvement des collectivités dans les situations postconflit. Il a salué à cet égard l’approche globale adoptée par la précédente Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. En conclusion, il a attiré l’attention du Conseil sur les Principes de Vancouver sur le maintien de la paix et la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants soldats.
Depuis le 25 août dernier, s’est inquiété M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh), son pays a accueilli un « flux sans précédent » de 620 000 personnes, pour la plupart des Rohingya issus de l’État Rakhine, au Myanmar, où ils sont victimes « d’atrocités criminelles généralisées ». Dans ce contexte, le représentant a fait part de sa vive inquiétude face au grand nombre de femmes et d’enfants risquant de tomber dans le piège des trafiquants de migrants qui opèrent au sein de la région.
Étant donné que les voies maritimes sont de moins en moins dangereuses pour les embarcations de fortune en cette saison, le représentant a jugé très probable la possibilité que ces trafiquants en profitent pour exploiter les déplacés de l’État Rakhine, qui continuent d’arriver chaque jour en masse au Bengladesh. « Ceux qui affirment que la situation dans l’État Rakhine s’est stabilisée soit ignorent délibérément la réalité pourtant évidente du terrain, soit ont un intérêt propre à agir de la sorte », a-t-il affirmé.
Quoique les forces de l’ordre et la police des frontières du Bangladesh aient alloué des ressources supplémentaires pour lutter contre les trafiquants, il est à craindre, a indiqué le représentant, qu’elles soient bientôt dépassées par des changements de tactiques des trafiquants.
Dans ce contexte, il a jugé essentiel que les autorités de son pays puissent bénéficier d’une coopération de qualité en matière d’échanges d’informations, de prévention et d’interpellations de la part des autres États de la région, y compris le Myanmar. Or, le sort des Rohingya ne cesse de s’aggraver, au vu des violations systématiques des droits de l’homme et atrocités criminelles dont ils continuent d’être victimes, a-t-il déploré, au bénéfice des trafiquants.
Le représentant a donc appelé le Secrétaire général, lors de son exposé au Conseil de sécurité sur la situation dans l’État Rakhine, ce mois-ci, à formuler des propositions pratiques sur la façon de s’attaquer à la menace de la traite. Il a également appelé le Conseil à faire du Myanmar une « étude de cas » pour attester de l’efficacité de la résolution adoptée aujourd’hui.
M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a détaillé la législation iraquienne sur la lutte contre la traite des personnes. Une assistance est portée aux victimes tandis que les responsables sont traduits en justice, a-t-il affirmé. Il a dénoncé les crimes et traitements dégradants commis contre les Yézidis. Une commission a été créée pour mettre en place les programmes de protection des victimes et des témoins, a-t-il poursuivi. Le délégué a demandé aux pays dans lesquels les victimes de Daech ont trouvé refuge de ne pas les traiter comme des victimes et de ne pas les rapatrier contre leur gré.
La mise en œuvre des lois relatives à la lutte contre la traite requiert une formation des forces de l’ordre et une bonne coopération judiciaire, a affirmé le délégué. Il a souligné la contribution de son pays à l’adoption de la Déclaration politique sur l’application du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes. En conclusion, il a exhorté les pays à honorer leurs engagements dans ce combat. Nous avons besoin de votre aide, a-t-il conclu.
M. ASHRAF EL NOUR, Directeur du Bureau de New York de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a fait remarquer que la traite d’êtres humains est un crime largement négligé dans les situations d’urgence, en dépit des preuves croissantes d’interconnections entre la traite et les conflits armés. L’OIM est inquiète de voir que les droits de nombreux migrants continuent d’être violés au cours de « voyages potentiellement mortels ». Le représentant a ensuite identifié trois domaines qui requièrent à son avis des efforts plus concertés et une plus grande coordination.
En premier lieu, il a constaté que malgré le renforcement des cadres légaux applicables aux victimes de la traite au cours des dernières années, peu de progrès ont pu être réalisés pour prévenir la traite d’êtres humains. Ce phénomène est lié à la demande en marchandises à moindre coût et en services sexuels, a-t-il expliqué en conseillant dès lors d’axer les efforts sur la réduction de la demande de biens de consommation et services produits par les victimes de la traite et les migrants exploités. Cela passe par l’engagement de ceux qui créent la demande, notamment les consommateurs et les entreprises. Parmi les mesures concrètes à prendre, M. El Nour a prôné des efforts pour encourager, assister, ou obliger les entreprises à établir des conditions de travail décentes pour tous les employés dans leurs chaînes d’approvisionnement.
Deuxièmement, l’OIM relève que le nombre de victimes de la traite bénéficiant de mesures de protection reste faible. Il faut donc renforcer les capacités des gouvernements et de la société civile en matière d’identification et d’assistance des migrants en situation vulnérable, y compris les victimes de traite. Ces actions doivent cibler les zones à haut risque telles que les points de passages aux frontières, ainsi que les secteurs et industries où le risque de traite est élevé et où des mesures concrètes sont urgemment requises. Il faudrait aussi que des mesures de lutte contre la traite d’êtres humains soient systématiquement prises au cours de toutes les phases de l’assistance humanitaire.
Le troisième domaine d’action est celui des investissements qui doivent être plus nombreux si l’on veut tirer parti de l’expérience acquise par ceux qui luttent contre la traite. Il faut renforcer la collecte et l’analyse de données sur la traite et contourner les obstacles qui entravent le partage de ces données, « dans un cadre de stricte confidentialité et de protection de la vie privée », a recommandé M. El Nour. Il a précisé qu’il fallait pour cela des plateformes multipartites ouvertes, telle que celle sur les données collaboratives de lutte contre la traite de l’OIM.
M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a dénoncé le fait que les criminels et les groupes terroristes se servent de la traite non seulement comme source de revenus, mais également comme arme pour semer la terreur. Faute de lui accorder l’attention voulue, le nombre croissant de réfugiés et de migrants fera le jeu des criminels, a-t-il mis en garde, en soulignant la nécessité de remédier aux causes profondes de la migration, notamment des déplacés internes. À cet égard, il a renvoyé à la vague de choc provoquée par une vidéo filmée dans des marchés d’esclaves en Libye, arguant que « la criminalité prospère là où l’état de droit est faible ». En conséquence, la communauté internationale doit agir d’urgence et faire beaucoup plus pour aider le Gouvernement libyen à affirmer ses droits en tant que tel et à jeter les bases du développement durable du pays, ce qui éviterait toute forme d’esclavage moderne.
La traite des personnes ne respectant aucune frontière, il faut donc renforcer la coopération en matière d’application des lois, d’enquête et d’échange de renseignements, a préconisé M. Imnadze, avant de présenter les principales priorités de la Géorgie dans la lutte contre ce fléau au cours de la décennie écoulée. Toutefois, a-t-il signalé, l’occupation illégale par la Fédération de Russie des régions géorgiennes de l’Ossétie du Sud/Tskhinvali et d’Abkhazie demeure l’obstacle majeur au plein exercice des mesures du Gouvernement géorgien relatives à la traite. Après avoir expliqué qu’il n’existe pas de mécanisme pour concrètement identifier, enquêter et poursuivre des cas présumés de traite dans les régions occupées, il a appelé la communauté internationale à veiller à accorder un accès sans entrave aux mécanismes internationaux des droits de l’homme dans ces régions.
Il faut renforcer la coopération internationale pour éliminer la traite des personnes à travers une approche globale, multidisciplinaire et transfrontière, a fait valoir M. GEORGI VELIKOV PANAYOTOV (Bulgarie). Il a recommandé une meilleure coopération entre les pays d’origine, de transit et d’accueil en matière d’échange d’informations, d’identification des victimes, d’appui et de réinsertion. À cet égard, la Bulgarie reste attachée à la mise en œuvre de la Convention internationale des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, du Protocole de Palerme, et de la résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité.
M. Panayotov a salué le langage fort de la nouvelle résolution sur la traite des personnes dans les situations de conflit en ce qui concerne les droits de l’enfant, priorité majeure du Gouvernement bulgare. En Europe, la Bulgarie a fait partie des pays pionniers ayant adopté, en 2003, une législation spécialisée sur la traite. La traite y est aujourd’hui sévèrement punie, notamment lorsque les crimes impliquent des enfants. En revanche, certaines dispositions ne pénalisent pas les victimes de la traite pour leur implication dans des activités illégales auxquelles elles auraient participé contre leur gré. Le Gouvernement bulgare a établi, en outre, un mécanisme national de référence pour l’appui aux victimes afin de renforcer le respect de leurs droits de l’homme et de leur apporter un appui et une protection inconditionnels sur la base du principe de non-discrimination. La Stratégie nationale 2017-2021 contre la traite repose quant à elle sur une approche centrée sur les victimes, les droits fondamentaux, le genre et l’enfance.
M. TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria) a affirmé que « Boko Haram a été défait militairement ». Si certains succès ont été obtenus dans la libération d’un nombre considérable de femmes et de filles que cette organisation avait faites otages, « nous ne renoncerons pas jusqu’à ce qu’elles soient toutes remises en liberté et réunies avec leurs proches », a-t-il assuré. Face au phénomène de la traite humaine, il a souhaité que le système des Nations Unies œuvre de concert en jouant des complémentarités des différents fonds, agences et programmes dans le cadre d’une approche coordonnée. Pour sa part, le Nigéria a amendé sa législation de 2015 sur l’interdiction de la traite des personnes en étendant le champ des délits auxquels elle s’applique, a signalé le représentant. Son gouvernement, a-t-il ajouté, a établi en 2013 un mécanisme permanent, l’Agence nationale pour l’interdiction du trafic de personnes (NAPTIP), chargée de prêter assistance aux personnes victimes de ces violences et de déclencher des poursuites judiciaires contre leurs tortionnaires.
M. EDGAR SISA (Botswana) a indiqué que 189 États étaient parties à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, dont son pays. Il a mentionné l’adoption d’une loi, en 2014, contre la traite des êtres humains, ainsi que la mise en place d’un Comité destiné à mener la lutte contre ce fléau et à protéger les victimes. Il a estimé à 11 118 500 dollars le coût de la pleine mise en œuvre du plan national d’action de son pays contre la traite des personnes. À cet égard, il a dit son appréciation quant au soutien apporté par l’ONUDC et autres agences onusiennes, notamment en termes de formation de magistrats. Depuis 2015, chaque 30 juillet, son pays marque la Journée mondiale de la dignité des victimes de la traite d’êtres humains, a-t-il indiqué. Enfin, le délégué a mentionné le plan d’action 2009-2019 adopté dans ce domaine par la Communauté de développement de l’Afrique australe.
M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives) a estimé que la meilleure stratégie pour mettre fin à ce crime haineux qu’est la traite d’êtres humains est de favoriser une culture de respect pour la dignité humaine et de promouvoir les droits de l’homme. Il est aussi absolument indispensable pour les Nations Unies et les autres acteurs pertinents de coopérer avec les gouvernements et de renforcer les capacités des institutions concernées pour mettre en œuvre les normes internationales et nationales et poursuivre en justice les auteurs de tels actes. Le représentant a précisé que son pays accueillait de nombreux travailleurs migrants, qui sont protégés par une législation spéciale adoptée en décembre 2013.
M. SHAHRUL IKRAM YAAKOB (Malaisie) a jugé impératif de renforcer la coopération internationale dans la lutte contre la traite des êtres humains et appelé à signer et ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et ses protocoles additionnels. Il a pleinement appuyé les efforts de l’ONUDC dans l’apport d’un soutien technique aux États Membres. En tant que pays de destination et de transit, la Malaisie sait qu’une bonne coopération avec les pays voisins et la communauté internationale est cruciale pour combattre ce fléau, a-t-il affirmé.
Le délégué a exhorté le Conseil à mieux utiliser les instruments à sa disposition afin d’identifier les responsables de la traite en situation de conflit et les traduire en justice. Enfin, il a rappelé que les femmes et enfants ayant subi les abus et violences des groupes comme Daech et Boko Haram devaient être considérés comme des victimes.
Face à la situation de détresse des migrants et aux informations concernant l’esclavagisme en Lybie, beaucoup reste à faire pour résoudre le fléau de la traite des personnes, a déclaré Mme LOIS MICHELE YOUNG (Belize). Selon elle, la réponse doit s’inscrire dans le cadre des traités pertinents, notamment le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Ces instruments doivent être intégrés dans les législations nationales et portés à l’attention du public, a-t-elle déclaré.
En 2003, le Belize a promulgué la loi d’interdiction du trafic d’êtres humains; en 2013, il a promulgué une loi interdisant l’exploitation sexuelle des enfants, avec le soutien des organisations internationales et régionales, et après avoir conclu des partenariats avec la société civile, a précisé la représentante. « Nous avons ciblé des secteurs en particulier, comme le tourisme et l’agriculture. » De plus, le pays continue d’améliorer sa capacité à aider les victimes de trafic humain. « Nous fournissons les soins médicaux et des conseils de base », a-t-elle ajouté. Elle a toutefois regretté le manque de ressources humaines et financières pour maintenir une assistance à long terme et faciliter la réintégration des victimes sur le marché du travail. Par ailleurs, Mme Young a reconnu l’importance d’analyser les flux financiers et les transactions relatives au trafic des personnes.
« Dans notre monde, aujourd’hui, des individus sont transformés en marchandises et voient leur dignité d’être humain bafouée », s’est indigné M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal). Il a plaidé pour une action collective efficace afin de lutter contre la traite des êtres humains et appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à signer le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Ce Protocole fournit une base robuste pour lutter contre les trafiquants et protéger les victimes, a-t-il affirmé. Il a ensuite mentionné les mesures prises par son pays en application du troisième plan national d’action de lutte contre la traite des êtres humains. La traite est l’un des crimes les plus odieux commis contre la dignité humaine, a conclu le délégué du Portugal.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déclaré que, dans sa résolution 2331 (2016), le Conseil de sécurité avait reconnu la gravité du crime de traite d’êtres humains et les liens que cette activité odieuse entretient avec le terrorisme international et la criminalité transnationale organisée. Il a rappelé que la traite était utilisée comme tactique de guerre, le mariage forcé étant un moyen de récompenser les combattants des organisations terroristes. Pour sa part, le Koweït a adopté la loi de 1991 sur le trafic de migrants et adhéré à différents instruments internationaux pertinents. Le représentant a ensuite rappelé que le Conseil disposait d’un cadre juridique international renforcé dans ce domaine. Il a appelé les États Membres à faire preuve de coopération entre eux et avec le système des Nations Unies pour le mettre en œuvre.
Préoccupé que les populations civiles soient vues par les groupes armés comme des « objets à trafiquer », M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) a noté que la résolution adoptée aujourd’hui souligne que certains actes ou infractions liés à la traite des personnes dans le contexte de conflits armés peuvent constituer des crimes de guerre. Pour sa part, l’Azerbaïdjan a ratifié la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée ainsi que le Protocole de Palerme relatif à la traite des personnes. En outre, depuis 14 ans, trois plans d’action nationaux ont été adoptés et quatre articles de loi définissant la responsabilité dans la traite d’êtres humains ont été insérés dans le Code pénal.
Une unité de police spéciale a également été mise en place au sein du Ministère des affaires internes, tandis qu’un mécanisme national a été établi pour coordonner les activités des ministères concernés, des organisations de la société civile et des partenaires étrangers dans la lutte contre la traite, a poursuivi le représentant, mettant aussi en évidence des échanges d’information par le biais de 90 accords multilatéraux et la signature de protocoles avec 40 pays. L’Azerbaïdjan collabore étroitement avec divers organes tels que l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) ou le Conseil de l’Europe. Enfin, le pays poursuit ses efforts de sensibilisation en proposant une résolution biennale sur la libération des femmes et des enfants pris en otage, dont ceux emprisonnés dans les conflits armés, à la Commission de la condition de la femme.
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a indiqué que son pays, « champion de l’égalité des genres et de l’autonomisation des femmes au niveau international », était très préoccupé par la traite des êtres humains, en particulier les femmes. Les crimes commis contre elles ont des conséquences pour la société entière, a-t-elle dit. Elle a ajouté que son pays œuvrait avec des gouvernements étrangers en vue de ménager des canaux légaux de migration et d’offrir des opportunités d’emplois. Des accords ont été signés avec cinq pays, le plus récemment avec l’Inde, en vue d’améliorer les conditions de vie dans les pays d’origine, a-t-elle poursuivi. En conclusion, la déléguée a souligné la nécessité de remédier aux causes profondes de la traite, en promouvant notamment un développement durable pour tous.
Après avoir dénoncé la situation en Libye, où des Africains sont vendus comme du « bétail » sur des « marchés aux esclaves », M. MACHARIA KAMAU (Kenya) a toutefois rappelé que l’adoption, par le Conseil de sécurité, de la résolution 1973 (2011) a considérablement contribué à l’effondrement de l’état de droit en Libye. « Cette résolution, adoptée contre la volonté de l’Union africaine, demeurera toujours une tache dans l’histoire de l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales », a-t-il estimé.
Ce sont les actions du Conseil de sécurité, a accusé M. Kamau, qui ont conduit à faire du littoral libyen une frontière ouverte pour les trafiquants en tout genre devenus des « marchands de mort » et de souffrances indicibles. C’est la raison pour laquelle cet organe a un rôle prépondérant à jouer dans le rétablissement de la stabilité en Libye, en a-t-il conclu. Le représentant s’est également élevé contre la politique « inhumaine », « discriminatoire », voire « raciste », de l’Union européenne consistant à financer, former et équiper des groupes indéterminés en Libye pour intercepter et incarcérer les migrants qui tentent la traversée de la mer Méditerranée.
M. HAU DO SUAN (Myanmar) a plaidé pour une coopération entre pays de transit, d’origine et de destination afin de lutter contre la traite d’êtres humains, en mettant en garde contre une politisation de cette lutte. « Le 25 août 2017, des attaques terroristes perpétrées contre 30 commissariats et une base militaire au Myanmar ont déclenché une crise humanitaire des plus tragiques dans l’État Rakhine », a-t-il poursuivi, préoccupé par le fait que des personnes fuyant vers le Bangladesh puissent tomber entre les mains de trafiquants. « Dans un esprit de bon voisinage, nous travaillons activement avec le Bangladesh pour le retour dans la dignité et la sécurité des personnes ayant trouvé refuge au Bangladesh », a-t-il assuré. Il a précisé que le processus de rapatriement devrait débuter dans les trois semaines suivant la signature d’un accord bilatéral, souhaitant que cette signature intervienne le plus rapidement possible. Si la situation humanitaire requiert toute l’attention internationale, il a invité à ne pas perdre de vue la poursuite des activités terroristes dans la zone, lesquelles seraient financées depuis l’étranger.
Mettre fin à la traite des personnes en situation de conflits est une responsabilité partagée qui nécessite un effort conjoint, a affirmé M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas). Il a insisté sur l’importance de la prévention, qui doit passer, selon lui, par un renforcement de l’information. Notant que les entités des Nations Unies opérant dans des situations de conflits ou d’après conflit ont un rôle important à jouer à cet égard, il a salué la recommandation du Secrétaire général d’inclure la question de la traite dans les bilans de pays et les formations préalables aux déploiements.
« Nous devons également renforcer notre compréhension des liens entre la traite des êtres humains et le financement du terrorisme, afin de détruire cet horrible commerce », a déclaré le représentant, ajoutant que son pays soutiendra la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme pour identifier ces liens.
M. van Oosterom a également attiré l’attention sur la question de la protection des victimes, qui doit être une priorité pour les États Membres et les Nations Unies. Son pays, a-t-il assuré, fait sa part pour soutenir les opérations de sauvetage de migrants au Sahel et la réintégration des victimes de la traite.
Enfin, le délégué a également mis en évidence la nécessité de détenir et de poursuivre ceux qui se livrent à la traite d’êtres humains, notant qu’ils prospèrent dans un climat d’impunité. « Si pour une quelconque raison, nous ne sommes pas capables de le faire immédiatement, nous devons trouver dans l’intervalle d’autres moyens de sanctionner leur comportement. »
M. van Oosterom a salué le Secrétaire général qui dans son rapport, fait référence à la plateforme multidisciplinaire européenne contre les menaces criminelles et la traite des êtres humains, précisant qu’elle réunit, sous la coordination de son pays et du Royaume-Uni, les États membres de l’Union européenne, INTERPOL ainsi que d’autres pour partager les connaissances et mener des enquêtes conjointes sur les cas de traite.
M. MHER MARGARYAN (Arménie) a mentionné les quatre plans d’action nationaux mis en œuvre avec succès par son pays pour lutter contre la traite des êtres humains au cours de la décennie écoulée. Les efforts de l’Arménie ont été soulignés dans plusieurs rapports réputés sur la traite des êtres humains, a-t-il poursuivi. Le délégué a insisté sur l’engagement de son pays contre la traite en toutes circonstances, avant de souligner la nécessité pour le personnel humanitaire et les Casques bleus d’identifier et de remédier aux risques de traite. Enfin, il a demandé que les membres de Daech responsables des crimes odieux commis en Iraq et en Syrie soient traduits en justice.