Kosovo: l’action doit succéder aux « excuses » dans le dialogue entre Belgrade et Pristina, affirme le Chef de la MINUK
Le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, M. Zahir Tanin, a déclaré, ce matin, devant le Conseil de sécurité, qu’avec la fin du cycle électoral au Kosovo, le temps de l’action devait désormais succéder au « temps des excuses » dans la mise en œuvre, qu’il a jugée sporadique, des accords conclus entre Belgrade et Pristina sous l’égide de l’Union européenne (UE).
Lors de cette séance, certaines délégations ont souhaité que le Conseil examine la situation au Kosovo chaque semestre, et non plus tous les trois mois.
Venu présenter le dernier rapport du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo* (MINUK) dont il est aussi le Chef, le Représentant spécial a insisté sur la bonne tenue des élections municipales qui se sont déroulées dans tout le Kosovo le 19 octobre, concluant le cycle électoral.
« C’est la seconde fois depuis 2013 que les quatre municipalités à majorité serbe du nord du Kosovo ont participé à de telles élections locales », s’est-il félicité.
Autre développement positif, le 24 octobre, 40 nouveaux juges et 13 nouveaux procureurs venant de la communauté serbe ont prêté serment, a affirmé M. Tanin, en louant les parties pour avoir permis cette avancée.
Plus globalement, le Représentant spécial a déclaré que la relation entre Belgrade et Pristina avait le potentiel pour sortir de l’impasse, malgré une mise en œuvre inégale des accords signés entre eux.
M. Tanin a ainsi souligné le manque de progrès concernant la mise en œuvre de l’Association/Communauté des municipalités à majorité serbe. Les « chicaneries » politiques et l’échec à mettre pleinement en œuvre les accords techniques agréés font peser sur la population un fardeau intenable, a affirmé M. Tanin.
Il a également mis en garde contre une « re-politisation » de la question de l’Accord de libre-échange d’Europe centrale, qui a des bénéfices certains pour la population.
Le Représentant spécial a néanmoins salué les positions « éclairées » prises par les dirigeants serbe et kosovar et l’engagement renouvelé des dirigeants de l’UE dans la région. « Toutes les parties doivent prendre leur part », a-t-il dit.
Enfin, M. Tanin a salué les mesures visant à éliminer le fléau des ingérences politiques dans la promotion de l’état de droit et « les initiatives audacieuses » prises pour concrétiser les aspirations européennes des Balkans occidentaux.
S’exprimant à son tour, le Ministre des affaires étrangères de la Serbie, M. Ivica Dačić, a déploré le manque de progrès dans l’établissement de l’Association/Communauté précitée, qui reste « la pierre angulaire de la protection des intérêts des Serbes au Kosovo et à Metohija ». « Pristina doit faire preuve de bonne foi pour faciliter sa mise en place sans plus tarder », a affirmé le Ministre.
À l’instar du délégué de la Fédération de Russie, le Ministre a rejeté le projet de Pristina visant à créer une « force armée du Kosovo », qui pourrait menacer le processus de normalisation, en faveur duquel Belgrade reste engagé. M. Dačić a également dénoncé les tentatives de Pristina pour devenir membre d’organisations internationales et souhaité conserver la périodicité des réunions du Conseil sur le sujet.
« Nous regrettons de faire perdre un temps précieux à ce Conseil, tous les trois mois, pour y rejouer une pièce de théâtre à des fins de pure consommation interne », a, de son côté, déclaré Mme Vlora Çitaku, du Kosovo.
« Le Kosovo est libre et indépendant et cela ne changera jamais », a-t-elle assuré, en rejetant les velléités de responsables serbes de réécrire l’histoire. Appuyé notamment par les délégués des États-Unis et du Royaume-Uni, Mme Çitaku a demandé une réduction de la MINUK.
Une demande catégoriquement rejetée par le représentant de la Fédération de Russie, qui a trouvé « touchant » que Mme Çitaku se préoccupe du temps consacré par le Conseil à la situation au Kosovo.
Le représentant russe, pour sa part, a noté que le dialogue entre Belgrade et Pristina avait, dans les faits, cessé de fonctionner.
« Il est donc prématuré de discuter d’une réduction du personnel de la MINUK », a-t-il affirmé. Estimant au contraire qu’elle avait accompli sa mission, la déléguée des États-Unis a souhaité orienter les ressources onusiennes vers des opérations plus essentielles.
« Le Conseil devrait se concentrer sur des menaces plus graves pour la paix et la sécurité internationales », a affirmé le délégué britannique.
* S/2017/911
RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ
Rapport du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (S/2017/911)
Exposé
M. ZAHIR TANIN, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, a indiqué que des élections municipales s’étaient déroulées dans tout le Kosovo le 19 octobre. C’est la seconde fois depuis 2013 que les quatre municipalités à majorité serbe du nord du Kosovo ont participé à de telles élections locales, a-t-il dit, en insistant sur la forte participation. M. Tanin a reconnu la bonne tenue de ces élections, bien que dans les municipalités précitées des restrictions et intimidations ont été constatées.
Du fait des multiples processus électoraux au Kosovo cette année, un nombre restreint de décisions peuvent être prises avec l’autorité nécessaire à Pristina, a indiqué le Représentant spécial. « J’espère que cela changera bientôt. » M. Tanin a déclaré que tous les acteurs au Kosovo s’accordaient pour dire que la relation entre Belgrade et Pristina est susceptible de sortir de l’impasse dans laquelle elle se trouve depuis longtemps. Le 24 octobre, 40 nouveaux juges et 13 nouveaux procureurs venant de la communauté serbe ont prêté serment, ce qui constitue une étape importante dans la mise en œuvre de l’accord facilité par l’Union européenne (UE), a affirmé M. Tanin, en louant les parties pour avoir permis cette avancée. Il a en effet déclaré que le secteur judiciaire accusait des retards par rapport à l’intégration dans le secteur de la police ou aux mesures techniques prises dans le secteur des télécommunications.
Cependant, il est également important de dire que globalement la mise en œuvre des accords de 2013 continue d’être au mieux sporadique et d’un degré variable, a-t-il dit. « Dans le cadre du dialogue facilité par l’Union européenne, la mise en œuvre technique demande un engagement renforcé des deux parties ». Il a souligné le manque de progrès concernant la mise en œuvre de l’Association/Communauté des municipalités à majorité serbe. Le Représentant spécial a noté que le dialogue facilité par l’UE était essentiel, avant d’insister sur l’avancement du processus de Berlin sur l’élargissement potentiel de l’UE.
« En ce qui concerne le dialogue politique entre Pristina et Belgrade, qui a pâti d’un long hiatus, ce que je puis dire aujourd’hui est que les deux parties sont bien conscientes de son importance pour l’année à venir. » Le Représentant spécial a insisté sur les signes politiques évidents d’une volonté d’aller de l’avant. Avec la fin du cycle électoral, le temps de l’action a succédé au temps des excuses, a déclaré M. Tanin. Il a souligné le fardeau intenable que font peser sur la population l’échec à mettre pleinement en œuvre les accords techniques agréés et les « chicaneries » politiques. Il a évoqué l’Accord de libre-échange d’Europe centrale, signé par la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) au nom du Kosovo en 2016 et que la Mission continue d’appuyer. M. Tanin a déploré que certains acteurs aient cherché à « repolitiser » cette question en dépit des bénéfices pratiques dudit accord. « Je veux être très clair: la participation de la MINUK se poursuit dans la stricte mesure requise par les parties à l’Accord pour assurer sa fonctionnalité. »
Le Représentant spécial a salué les positions éclairées prises par les leaders serbe et kosovar qui vont dans l’intérêt des populations, ainsi que l’engagement renouvelé des dirigeants de l’UE dans la région. « Toutes les parties doivent prendre leur part », a-t-il dit, ajoutant que c’était la base du dialogue entre Belgrade et Pristina. Le Représentant spécial a exhorté Pristina à remédier à la situation économique et à lutter contre la corruption et « peut-être, par-dessus tout » contre la criminalité organisée. Il a déclaré qu’il trouvait « l’énergie » pour s’acquitter de son mandat dans le nouveau Gouvernement kosovar qui œuvre à forger un partenariat multiethnique, dans les mesures régionales visant à éliminer le fléau des ingérences politiques dans la promotion de l’état de droit et dans « les initiatives audacieuses » visant à concrétiser les aspirations européennes des Balkans occidentaux. Enfin, le Représentant spécial a mentionné que l’objectif ultime recherché par la MINUK était « une paix durable ».
Déclarations
Pour M. IVICA DAČIĆ, Ministre des affaires étrangères de la Serbie, la présence de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) au Kosovo et à Metohija, reste, tant que ni sa portée ni son mandat ne sont changés, le garant de la neutralité de la présence internationale sur place. La MINUK est d’une importance capitale pour la sécurité et la stabilité ainsi que pour la consolidation de la confiance entre les communautés du Kosovo et de Metohija. Il lui semble qu’en renforçant les moyens financiers et le personnel de la Mission, la communauté internationale se donnerait les moyens d’évaluer et de répondre aux problèmes et aux défis auxquels font face les populations serbes et non albanaises tous les jours.
La présence « non diminuée » de la MINUK au Kosovo et à Metohija, où la situation politique reste sensible apporte, selon le Ministre, les garanties nécessaires pour que les Serbes et les non-Albanais s’engagent dans les processus initiés par les accords de Bruxelles sans qu’ils aient à craindre pour leur avenir. Le fait qu’aujourd’hui, 18 ans après l’arrivée de la présence internationale dans la Province, 200 000 personnes déplacées, forcées de fuir le Kosovo et Metohija, vivent toujours en Serbie est un argument puissant pour justifier qu’il ne faut pas toucher à la portée de la MINUK, a-t-il poursuivi. Comment permettre un retour durable à ces personnes, dont seulement 1,9% ont pu rentrer chez elles, reste l’une des questions fondamentales sur lesquelles la MINUK devrait mettre l’accent à l’avenir.
M. Dačić est également revenu sur les lacunes soulevées dans le rapport qui sont relatives aux systèmes institutionnel et judicaire au Kosovo et à Metohija et qui ont un impact négatif sur les communautés vulnérables, et en particulier sur la protection des droits des Serbes et des non-Albanais au sud de la Province, y compris pour le processus de réconciliation et le retour des réfugiés. Il a imputé le faible pourcentage de retour des réfugiés au fait que les coupables de l’instigation à la haine raciale, ethnique et religieuse n’ont pas été jugés et qu’il existe toujours une discrimination institutionnelle contre les Serbes. Ainsi le Ministre a-t-il demandé qu’à l’avenir le rapport du Secrétaire général comprenne une section à part sur les violations des droits de l’homme et des libertés des réfugiés. Il a appelé la MINUK à faire davantage d’efforts pour renforcer toutes ses capacités en vue de garantir le niveau de protection requis des droits des réfugiés, et pour mettre en place les conditions optimales pour leur retour durable.
Le Ministre serbe a appelé la communauté internationale à ne ménager aucun effort pour faire prévaloir l’état de droit au Kosovo et à Metohija et pour organiser des procès crédibles et impartiaux pour les responsables de crimes de guerre. Maintenant que le cadre légal prévu pour ces procès par les chambres spécialisées est en place, la Serbie exige que les personnes suspectées d’avoir commis de tels crimes contre les Serbes et les non-Albanais au Kosovo et à Metohija soient mises en examen et jugées.
La Serbie reste fermement engagée en faveur du dialogue entre Belgrade et Pristina, sous les auspices de l’Union européenne, a assuré le Ministre, et cela en dépit des doutes multiples et des défis rencontrés au cours de ce processus. La Serbie a d’ailleurs proposé des solutions de compromis et reste convaincue que seul un dialogue pacifique, dans le cadre défini par l’ONU, permettra de régler les questions en instance et de parvenir à la paix et la stabilité ainsi qu’à l’intégration de la région dans la famille européenne. Cette volonté a été réaffirmée lorsque le représentant de la liste serbe est entré au gouvernement de M. Ramush Haradinaj au lendemain des élections parlementaires.
M. Dačić a regretté que, quatre ans après l’adoption de l’Accord de principe pour la normalisation des relations, il n’y ait toujours pas eu de progrès dans la mise en place de l’Association/Communauté des municipalités à majorité serbe, ce dont le rapport omet de parler. Pourtant, pour la Serbie, l’établissement de cette communauté reste « la pierre angulaire » de la protection des intérêts des Serbes au Kosovo et à Metohija. Le Ministre a saisi cette occasion pour appeler les représentants des institutions provisoires du Gouvernement d’autodétermination de Pristina à faire preuve de bonne foi pour en faciliter la mise en place sans plus tarder.
La Serbie souhaite une solution durable pour le Kosovo et Metohija et demande aux membres du Conseil de sécurité et aux représentants de Pristina de s’y atteler plutôt que de s’attarder sur des questions d’ordre technique comme par exemple le format des réunions du Conseil de sécurité. Le Ministre n’a pas appuyé les appels lancés pour changer la tradition des réunions d’information régulières du Conseil sur la situation sur le terrain, car, selon lui, cela pourrait accentuer les différences entre Belgrade et Pristina et ne contribuerait pas à créer un climat propice à la poursuite du dialogue. Sa délégation n’accepte pas non plus les actions unilatérales de Pristina qui pourraient potentiellement déstabiliser la situation et menacer le processus de normalisation, surtout lorsqu’il est question de créer la « force armée du Kosovo », a poursuivi M. Dačić. Il a également dénoncé les tentatives de Pristina pour devenir membre d’organisations internationales.
Mme VLORA ÇITAKU, du Kosovo, a regretté de faire perdre un temps précieux à ce Conseil tous les trois mois, pour y rejouer une pièce de « théâtre » « à des fins de pure consommation interne ». En effet, celle-ci a pour objectif de démontrer que le statut du Kosovo n’est pas final, que nous sommes au bord d’une guerre, où les minorités seraient persécutées et expulsées, une description qui ne tient tout simplement pas la route, selon l’intervenante. « Le Kosovo est libre et indépendant. Et cela ne changera jamais », a-t-elle tranché, en rappelant qu’un « prix élevé » avait été payé pour cela. « L’horloge de l’Histoire ne tourne pas à l’envers », a-t-elle rappelé, en ne demandant rien d’autre pour le Kosovo qu’un traitement juste. Ainsi a-t-elle estimé qu’il serait juste de réajuster le mandat de la MINUK à la lumière des réalités actuelles de terrain. « La Mission n’est pas une opération de maintien de la paix, le Kosovo est en paix, et il n’y a pas de conflit à résoudre ou de civils à protéger. La MINUK n’est pas une mission administrative, le Kosovo ayant ses propres institutions », a argué Mme Çitaku. Son mandat n’est-il donc pas périmé depuis plus d’une décennie? s’est-elle demandé. Elle a estimé qu’il est temps pour le Conseil de sécurité d’envisager une réduction, puis un retrait, de cette opération.
Au cours des six derniers mois, le Kosovo a organisé des élections, nationales et locales, cependant que le nouveau gouvernement avec M. Ramush Haradinaj comme Premier Ministre a pris ses fonctions le 9 septembre, a poursuivi Mme Çitaku. Selon les observateurs internationaux, les deux scrutins ont été menés dans le respect des normes internationales les plus élevées, « à l’exception de certaines zones à majorité serbe, où la population locale a été soumise à des pressions et des tentatives d’intimidation pour voter d’une certaine façon », a-t-elle soutenu, en accusant Belgrade d’en être responsable. L’intervenante a assuré que les institutions du Kosovo sont allées très loin pour « accommoder » les droits de communautés non majoritaires. « Au sein du gouvernement actuel, la communauté serbe est représentée par le Vice-Premier Ministre, trois ministres et six vice-ministres », a-t-elle ajouté. Entre 2008 et 2017, le Gouvernement du Kosovo a dépensé plus de 51 millions d’euros pour le rapatriement et la réintégration des communautés minoritaires au Kosovo. « Mais je dois le répéter, affirmer que 200 000 Serbes ont été contraints au déplacement après la guerre au Kosovo est faux », a insisté Mme Çitaku. Malheureusement, à ce jour, nous ne connaissons toujours pas le nombre exact de Serbes vivant au Kosovo, a-t-elle affirmé, en considérant que cela est le fruit d’une campagne très agressive visant à décourager la participation de la communauté serbe. « Même si un seul Serbe du Kosovo ne peut prendre le chemin du retour, pour nous, c’est un de trop », a assuré l’intervenante.
« Il est regrettable qu’au moment où nous devrions conclure le dialogue avec la Serbie, ses représentants politiques continuent de se livrer à des déclarations inacceptables, suivies de toutes sortes de tentatives de réécrire l’Histoire, y compris en choisissant des criminels de guerre tels que le général Dukovic », a poursuivi Mme Çitaku. Elle a rappelé que la « victoire » déclarée par la Serbie après l’échec du Kosovo à rejoindre Interpol plus tôt cette année est « irresponsable », à l’aune des défis transfrontaliers qui se posent aujourd’hui dans le monde. L’intervenante a toutefois rassuré les membres du Conseil quant à la détermination du Kosovo à poursuivre le dialogue avec la Serbie et à mettre en œuvre les accords agréés à Bruxelles. Si elle a reconnu les retards accusés, notamment en raison de l’organisation des élections évoquées précédemment, « la volonté est là », a-t-elle souligné. Elle s’est cependant félicitée de l’annonce, faite la semaine dernière par la Banque mondiale, que le Kosovo figure parmi les 10 premières économies dans le monde dans les domaines des réformes visant à développer l’entreprenariat. « Néanmoins, nous savons qu’il nous reste encore beaucoup à faire pour répondre aux attentes du peuple du Kosovo », a conclu la représentante, en mentionnant la qualité de l’éducation, des soins de santé, et la prospérité. Elle a cité en exemple les athlètes kosovars médaillés aux Jeux olympiques.
Estimant que le Conseil de sécurité devait toujours prêter attention aux conditions sur le terrain, M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) a salué la tenue d’élections locales au Kosovo de façon pacifique, notamment dans les régions à majorité serbe. Selon lui, le nouveau Gouvernement du Kosovo doit s’attaquer de façon urgente au développement économique, à la normalisation des relations avec la Serbie et à la délimitation de la frontière avec le Monténégro. Saluant la contribution de la MINUK au développement des institutions démocratiques et à la pacification du Kosovo, il a déclaré qu’elle représente un exemple de réussite du Conseil de sécurité. Cependant, il a invité le Conseil à revoir le mandat de la Mission et à se pencher sur les chevauchements avec les activités des missions de l’Union européenne et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
La réconciliation entre les communautés serbe et albanaise du Kossovo et la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie doivent demeurer des priorités, a poursuivi M. Kawamura, pour qui la récente intégration de juges et de procureurs serbes dans le système judiciaire kosovar représente un pas dans la bonne direction. Enfin, il s’est félicité de la création d’un environnement « propice au dialogue » entre les Présidents Vučić et Thaçi, avec le soutien de l’Union européenne, tout en espérant qu’il conduira à la promotion de la tolérance.
Mme ANNE GUEGUEN (France) s’est félicitée de la nomination d’un nouveau gouvernement, en septembre dernier, au Kosovo. Elle a noté que le premier tour des élections municipales d’octobre dernier s’est globalement bien déroulé mais a déploré le climat d’intimidation contre certains candidats et leurs électeurs dans les municipalités serbes du Kosovo. La France exprime son soutien à la volonté de réforme exprimée par le nouveau Premier Ministre, notamment en matière de développement économique et de création d’emplois. Par ailleurs, elle salue la ratification, le 4 octobre, à l’unanimité, de l’accord signé entre le Kosovo et l’Union européenne sur la mise en œuvre de l’assistance financière de l’Union.
Constatant que les institutions politiques et économiques du Kosovo se sont consolidées au cours des dernières années, Mme Gueguen a estimé que cela justifiait la poursuite du recentrage des actions de la MINUK et de leur coordination avec les autres acteurs internationaux présents au Kosovo.
Pour la France, l’avenir du Kosovo se joue prioritairement dans le cadre du dialogue politique entre Belgrade et Pristina, a expliqué la représentante. Ce dialogue est mené sous l’égide de l’Union européenne qui est très claire à ce sujet: « pour la Serbie comme pour le Kosovo, le rapprochement européen est conditionné par la normalisation de leurs relations ». Il importe que les parties fassent preuve de bonne volonté et d’un engagement volontariste au plus haut niveau. Elle a ainsi considéré que les rencontres entre les Présidents serbe et kosovar autour de la Haute Représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de l’Union européenne, Mme Mogherini, sont des signaux encourageants.
Toutefois, au-delà des déclarations d’intention, la France attend que l’ensemble des accords conclus en 2013 puis en 2015 soient effectivement mis en œuvre dans les meilleurs délais, afin de progresser significativement dans la normalisation pleine et entière de leurs relations, a assuré Mme Gueguen. À cet égard, elle a salué l’intégration du personnel judiciaire serbe dans le système kosovar, le 24 octobre. La poursuite des efforts engagés pour la consolidation de l’état de droit au Kosovo doit demeurer une priorité, a encore souligné la représentante de la France, qu’il s’agisse du renforcement des capacités administratives, de la justice ou de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a insisté sur les défis graves au Kosovo et rejeté l’évaluation positive faite par Mme Çitaku. « Il est touchant que vous vous préoccupiez du temps consacré par le Conseil à la situation au Kosovo », a-t-il dit, avant de noter la stagnation du dialogue entre Belgrade et Pristina. Ce dialogue a, dans les faits, cessé de fonctionner, a-t-il affirmé, en notant le démantèlement par Pristina des organes techniques chargés de ce dialogue.
Le délégué russe a déploré la radicalisation politique croissante au Kosovo, avant de noter l’interprétation différente qu’ont Pristina et Belgrade des accords conclus sous l’égide de l’Union européenne (UE). En jouant la carte des Albanais du Kosovo, les dirigeants de l’UE veulent imputer aux Serbes du Kosovo la mise en œuvre anémique des accords, a-t-il accusé. Avec la fin des élections, Pristina n’a plus de prétexte pour ne pas mettre en œuvre l’Association/Communauté des municipalités à majorité serbe, un projet qu’elle n’a eu de cesse de saboter, a noté le délégué.
M. Nebenzia a critiqué la lenteur des enquêtes sur les crimes commis par l’Armée de libération du Kosovo, avant de dénoncer la tentative de Pristina visant à constituer une armée nationale, en violation de la résolution 1244 (1999) du Conseil. C’est irresponsable, a-t-il dit. Il a en outre déploré les activités croissantes d’éléments terroristes kosovars et souligné la position ambigüe de Pristina à ce sujet. Enfin, il a jugé prématuré de discuter d’une réduction du personnel de la MINUK au regard de son rôle irremplaçable et souhaité conserver la périodicité trimestrielle de l’examen de la situation au Kosovo au Conseil.
Saluant la mise en place d’un nouveau gouvernement au Kosovo, M. OLOF SKOOG (Suède) a encouragé tous les acteurs politiques à engager un dialogue constructif et à poursuivre les réformes nécessaires au renforcement de l’état de droit et à la lutte contre la corruption, mais aussi pour donner un nouvel élan au développement économique et à la création d’emplois dans le pays. Même si le premier tour des élections municipales, en octobre dernier, s’est dans l’ensemble bien passé, il a regretté qu’il y ait eu des cas de menace et d’intimidation dans certaines municipalités à majorité serbe.
Pour la Suède, l’avenir du Kosovo et de la Serbie s’inscrit dans l’Union européenne, et, pour réaliser leurs perspectives européennes, il est impératif que leurs relations se normalisent. La coopération régionale et les bonnes relations entre pays voisins sont essentielles pour la stabilité, la paix et la prospérité dans la région des Balkans occidentaux. Le représentant a insisté sur le fait que la question de son statut ne doit pas entraver la perspective européenne du Kosovo ni son adhésion aux organismes internationaux. Il a salué la reprise du dialogue sous l’égide de l’Union européenne, en vue de la normalisation des relations entre Pristina et Belgrade.
Rappelant la contribution « inestimable » des Nations Unies et de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) aux progrès du Kosovo depuis la fin du conflit, M. Skoog a considéré que le processus d’intégration à l’Union européenne, y compris à travers le soutien à la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX KOSOVO), définit le cadre adéquat pour répondre aux défis.
M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay) a plaidé en faveur de la relance du dialogue politique et des démarches constructives qui pourraient déboucher sur la résolution des différends entre Pristina et Belgrade. Évoquant la situation des droits de l’homme, il a considéré que le respect des cultures et des croyances religieuses, ainsi que des politiques tenant compte des attentes des minorités, est fondamental pour la réconciliation et permettra le retour des personnes déplacées, au nombre de 16 418 selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en septembre 2017. Le représentant a rappelé en conclusion que les familles des personnes disparues ont droit à la vérité et à la justice.
M. GORGUI CISS (Sénégal) a salué les efforts coordonnés des partis politiques du Kosovo qui ont mené à la formation d’un nouveau gouvernement, après des mois d’impasse politique. Il a invité les acteurs politiques kosovars et serbes à renforcer leur engagement envers un dialogue constructif, sous l’égide de l’Union européenne, afin de parvenir à la normalisation de leurs relations. Selon lui, la nomination récente de juges et de procureurs ainsi que la rencontre entre les Présidents de la Serbie et du Kosovo sont de bon augure.
Toutefois, la question des personnes disparues doit demeurer une priorité, a ajouté le représentant. Saluant les efforts déployés par les services de sécurité pour contrer l’extrémisme violent, il a souligné l’importance des activités menées par la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX KOSOVO) et la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) en faveur de l’état de droit, des droits de l’homme et de la lutte contre le terrorisme et le crime organisé.
Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a noté les progrès accomplis dans le dialogue entre Belgrade et Pristina. Des juges venant de la communauté serbe ont prêté serment en octobre, ce qui constitue une avancée, a-t-elle affirmé, avant de saluer l’engagement constructif de l’Union européenne. Déclarant que la MINUK avait accompli sa mission, elle a jugé qu’il était temps d’orienter les ressources onusiennes vers des missions plus essentielles. Elle a en outre demandé une périodicité semestrielle de l’examen par le Conseil de la situation au Kosovo.
La déléguée a appuyé la pleine reconnaissance du Kosovo et invité les États qui ne l’ont pas encore fait à en faire de même. En conclusion, elle a soutenu la pleine participation du Kosovo à toutes les organisations internationales pertinentes, dont l’ONU et INTERPOL.
M. CLAY (Royaume-Uni) s’est félicité de l’organisation d’élections justes et crédibles au Kosovo au cours de la période considérée, avant de se dire préoccupé par les allégations de menaces et d’actes d’intimidation à l’encontre de candidats serbes n’appartenant pas à la Liste serbe. Selon lui, le contexte depuis 2008 a changé et il faut faire évoluer la MINUK en fonction de ces changements.
Le représentant a donc plaidé pour une reconfiguration de la Mission, en regrettant que cela n’ait pas été possible jusqu’à présent. « L’heure est venue pour le Conseil de sécurité de se réunir moins fréquemment que par le passé sur la situation au Kosovo et de faire porter notre attention sur des menaces plus graves pour la paix et la sécurité internationales », a-t-il conclu.
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a souhaité des avancées dans la mise en œuvre des accords conclus sous l’égide de l’Union européenne, en particulier s’agissant de l’Association/Communauté des municipalités à majorité serbe. Il a loué les « efforts remarquables » de la MINUK afin de promouvoir la réconciliation au Kosovo et reconnu le rôle majeur joué par l’Union européenne. En conclusion, le délégué éthiopien a affirmé que la sécurité au Kosovo découlera de l’engagement politique des deux parties. Celles-ci doivent continuer de privilégier la voie du dialogue, a-t-il déclaré.
M. ZHANG DIANBIN (Chine) a considéré que la situation sur le plan sécuritaire au Kosovo a été dans l’ensemble assez calme au cours de la période à l’examen. Il s’est ensuite félicité de la reprise, en août 2015, du dialogue entre Pristina et Belgrade sous les auspices de l’Union européenne en vue d’un règlement pacifique de leurs différends. Dans ce contexte, il a encouragé les deux parties à s’abstenir de toute rhétorique incendiaire susceptible de raviver les tensions.
Le Conseil de sécurité devrait selon le représentant continuer de rester saisi de ce point à l’ordre du jour. Il a, en conclusion, apporté son soutien à la MINUK et à la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX KOSOVO).
M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a appelé à mettre en œuvre la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité s’agissant en particulier du plein respect de l’intégrité territoriale, de la souveraineté et de l’indépendance de la République de Serbie. Il a jugé important que les parties concernées respectent leurs engagements respectifs négociés sous l’égide de l’Union européenne; il les a encouragées à œuvrer en faveur d’une solution pacifique par le biais du dialogue. Dans ce cadre, M. Llorentty Solíz a évoqué les dispositions de l’Accord de Bruxelles, conclu il y a plus de quatre ans, sur la création d’une association des municipalités serbes du Kosovo, aux fins de garantir la sécurité et les droits de l’homme des Serbes au Kosovo et à Metohija, avant de prier le Représentant spécial de fournir des informations sur l’état d’avancement de cet accord.
L’ambassadeur bolivien a également loué l’initiative du Président Vučić, de Serbie, visant à un dialogue interne autour de la question du Kosovo, de même que ses efforts en vue de l’institutionnalisation du processus de dialogue et de la mise sur pied d’un groupe de travail composé de membres du Gouvernement, de l’opposition, de la société civile et des institutions religieuses.
Il a encouragé la MINUK à recourir aux bons offices pour réduire les tensions et à des moyens pacifiques pour arriver à des solutions consensuelles, et à promouvoir le dialogue politique et le respect des droits de l’homme, conformément à la Charte. Il a aussi mis l’accent sur la participation de la MINUK, aux côtés des autorités municipales et des représentants des communautés du Kosovo, à la protection des droits des communautés, la réconciliation intercommunautaire, les mesures de confiance, la facilitation du retour des déplacés internes, ainsi que l’établissement de la Commission vérité et réconciliation. M. Llorentty Solíz a également évoqué la conférence organisée par la MINUK sur les difficultés qu’il y a à identifier les restes humains et sur la production du documentaire Something Still Missing pour commémorer la Journée internationale des victimes de disparition forcée.
Il s’est aussi félicité du travail du Réseau des femmes du Kosovo et de sa collaboration avec l’ONU-femmes pour épauler les victimes de violence sexuelle durant la guerre à travers des microsubventions pour améliorer leur situation économique. Pour conclure, il a exhorté les dirigeants politiques du Kosovo à la prudence lors de leurs déclarations publiques relatives au Tribunal spécial pour le Kosovo et de s’abstenir de tout rhétorique belliqueuse.
M. EDUARD FESKO (Ukraine) a noté les progrès accomplis dans la normalisation des relations entre Pristina et Belgrade, ces derniers étant engagés « dans la bonne direction » malgré les défis qui demeurent. Il a souhaité que le Conseil examine la situation au Kosovo chaque semestre, et non plus tous les trois mois, et s’est dit en faveur d’une réduction de la MINUK. Il a salué la volonté du Président Vučić d’entamer une nouvelle étape dans le dialogue sur les relations entre la Serbie et le Kosovo. S’agissant de l’Association/Communauté des municipalités à majorité serbe, il a plaidé pour la nécessité d’une libre circulation à Mitrovica. Enfin, le délégué de l’Ukraine a insisté sur l’appui de son pays à la normalisation des relations entre Pristina et Belgrade.
M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a salué le rôle de facilitation joué par la MINUK au Kosovo. Il s’est félicité que, conformément à ce qui a été prévu par le dialogue de haut niveau du 31 août 2017, facilité par l’Union européenne, la date butoir du 17 octobre 2017 pour l’intégration des juges, procureurs et personnels judiciaires serbes dans le système kosovar ait été respectée.
Le représentant a ensuite reconnu la persistance de certains problèmes, notamment l’absence de confiance entre communautés et le retard accusé par l’enseignement dans les trois langues officielles. Il est également nécessaire selon lui de trouver une solution au sort des personnes déplacées et de résoudre le problème du chômage des jeunes.
M. IHAB MOUSTAFA AWAD MOUSTAFA (Égypte) a affirmé que l’intégration européenne était un élément clef pour la stabilité de long terme dans les Balkans occidentaux. Le dialogue entre Belgrade et Pristina, facilité par l’Union européenne, demeure un cadre pertinent, a-t-il affirmé. Il a salué les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’accord sur l’autorité judiciaire et demandé une accélération de la mise en œuvre des autres accords signés par Belgrade et Pristina. La large participation des Serbes du Kosovo aux dernières élections municipales nous rend optimistes sur l’évolution de la situation au Kosovo, a conclu le délégué égyptien.
M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a appelé Belgrade et Pristina à avancer sur la voie de la normalisation de leurs relations. Il s’est félicité de l’initiative du Président Vučić de poursuivre son « dialogue interne » sur la question du Kosovo, dont l’objectif sera d’ouvrir un débat en vue de trouver une solution à la question du Kosovo, avec la participation de toutes les parties prenantes. Après avoir salué le travail de la MINUK et de l’EULEX, l’Italie a assuré qu’elle continuerait de soutenir le Kosovo. La délégation a demandé aux deux parties de s’abstenir de toute rhétorique tournée vers le passé.