RDC: inquiet de la situation politique et des risques d’instabilité, le Conseil appelle à accélérer la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre
Le Conseil de sécurité a adopté, ce matin, une déclaration présidentielle dans laquelle il exprime sa préoccupation face à la situation politique actuelle en République démocratique du Congo (RDC), compte tenu des difficultés auxquelles se heurte la mise en œuvre de « l’Accord global et inclusif » de paix signé le 31 décembre dernier, de la dégradation des conditions de sécurité dans la région du Kasaï et de l’augmentation des violations des droits de l’homme à travers le pays.
S’il prend note de la nomination d’un nouveau Premier Ministre congolais, de la mise en place d’un Gouvernement de transition et de la signature, par certains signataires de l’accord du 31 décembre 2016, d’arrangements particuliers » portant sur son application, le Conseil constate toutefois avec inquiétude la lenteur des progrès réalisés.
Craignant que « la République démocratique du Congo et la région ne soient exposées à un risque accru d’insécurité et d’instabilité si les acteurs politiques ne font pas preuve de bonne foi et d’une volonté politique renouvelée » d’honorer leurs engagements, le Conseil appelle ces derniers à mettre en œuvre d’urgence l’accord dans son intégralité, « afin que soient organisées, comme convenu, au plus tard en décembre 2017, des élections crédibles et inclusives qui se déroulent dans le calme ». À cette fin, il demande que le calendrier électoral soit publié rapidement, afin de permettre à l’ONU, dont l’appui technique et financier reste important pour la tenue du scrutin, de mieux définir le type d’assistance à fournir au pays.
En outre, le Conseil réitère sa condamnation des actes de violence observés dans la région du Kasaï ces derniers mois et se déclare vivement préoccupé par les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits commises dans la région.
Le Conseil se dit par ailleurs préoccupé par la « crise humanitaire provoquée par la violence », qui a déplacé plus de 1,4 million de personnes et en a forcé plus de 30 000 à fuir le pays. Il souligne l’urgente nécessité de ménager aux acteurs humanitaires un accès sûr et sans entrave et de mener rapidement des enquêtes transparentes sur les violations commises dans la région du Kasaï.
Le Conseil rappelle enfin que le Gouvernement congolais doit enquêter rapidement et de manière approfondie sur le meurtre des deux membres du Groupe d’experts des Nations Unies assassinés en mars dernier et traduire les auteurs en justice. Il demande au Gouvernement de coopérer avec les enquêtes des entités de l’ONU et celles qui pourraient être menées par les services de police de la Suède et des États-Unis et dit attendre avec intérêt les conclusions de la Commission d’enquête des Nations Unies créée par le Secrétaire général pour enquêter sur la mort des deux experts.
LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
Déclaration du Président du Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité se déclare préoccupé par la situation politique actuelle compte tenu des difficultés auxquelles se heurte la mise en œuvre de l’Accord global et inclusif du 31 décembre 2016, de la dégradation des conditions de sécurité, en particulier dans la région du Kasaï, ainsi que de l’augmentation des violations des droits de l’homme, des atteintes à ces droits et des violations du droit international humanitaire dans le pays.
Le Conseil prend note de la nomination d’un nouveau Premier Ministre, de la mise en place d’un Gouvernement de transition et de la signature, par certains signataires de l’accord du 31 décembre 2016, mais non par tous, des « arrangements particuliers » portant sur l’application dudit accord. Il constate avec inquiétude la lenteur des progrès réalisés dans l’application de l’Accord global et inclusif. Il réaffirme que la mise en œuvre effective, rapide et opportune de l’Accord est essentielle à un processus électoral crédible et à la paix et à la stabilité de la République démocratique du Congo, ainsi que pour appuyer la légitimité des institutions chargées de la transition, puisque cet accord offre une feuille de route réaliste pour la tenue d’élections pacifiques et démocratiques. Le Conseil souligne qu’il est urgent de mettre en œuvre l’Accord, en toute bonne foi et dans son intégralité, afin que soient organisées, comme convenu dans l’Accord, au plus tard en décembre 2017, des élections crédibles et inclusives qui se déroulent dans le calme et en temps voulu et qui conduisent à une passation pacifique du pouvoir, conformément à la Constitution congolaise et à la résolution 2348 (2017) du Conseil, y compris en y faisant participer les femmes pleinement et dans des conditions d’égalité. Il demande à nouveau que soient intégralement appliquées les mesures de confiance convenues au chapitre V de l’accord du 31 décembre 2016, dont certaines n’ont toujours pas été mises en vigueur.
Le Conseil appelle toutes les parties congolaises à œuvrer pour préserver les avancées encore fragiles réalisées sur la voie de la paix et de la stabilité en République démocratique du Congo, souligne les responsabilités qui incombent à tous les acteurs politiques congolais, notamment celles de surmonter leurs divergences pour parvenir à un consensus et de promouvoir les intérêts et le bien-être de la population avant toute autre considération, et engage fermement toutes les parties prenantes à redoubler d’efforts pour garantir la participation de tous les signataires de l’Accord à sa mise en œuvre, y compris au processus devant aboutir à la nomination du Président du Conseil national de suivi de l’Accord. Le Conseil craint que la République démocratique du Congo et la région ne soient exposées à un risque accru d’insécurité et d’instabilité si les acteurs politiques ne font pas preuve de bonne foi et d’une volonté politique renouvelée d’honorer les promesses qu’ils ont faites à la population le 31 décembre 2016. Il demande à tous les partis politiques, à leurs sympathisants et aux autres acteurs politiques de garder leur calme et de s’abstenir de recourir à quelque forme de violence que ce soit. Il réaffirme sa volonté d’agir en conséquence envers tous les acteurs congolais dont les actions et les déclarations entraveraient la mise en œuvre de l’Accord et l’organisation des élections.
Le Conseil se félicite des progrès réalisés, sous la direction de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et avec l’appui de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), dans l’établissement des listes électorales et demande que ces efforts soient poursuivis afin que les électeurs de tout le pays, y compris des provinces du Kasaï, soient dûment inscrits sur les listes électorales. Il demande également que le calendrier électoral soit publié rapidement, comme l’Union africaine l’a demandé à son vingt-neuvième sommet, ce qui clarifierait les délais et les étapes à venir et permettrait aux partenaires, y compris l’Organisation des Nations Unies, dont l’appui technique et financier reste important pour la tenue des élections, de mieux définir le type d’assistance à fournir et de contribuer plus efficacement à la préparation des élections. Le Conseil prend note de ce que les autorités congolaises se sont engagées de façon répétée à financer le prochain cycle électoral et souligne que, malgré les difficultés budgétaires auxquelles le Gouvernement fait face, il est indispensable que les fonds promis soient versés aux dates prévues afin que les opérations électorales se déroulent dans les délais fixés.
Le Conseil réitère sa condamnation des actes de violence observés dans la région du Kasaï ces derniers mois et se déclare vivement préoccupé par les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits commises dans la région, y compris les cas de violences sexuelles commises en période de conflit, et par les informations récentes faisant état de nouveaux charniers présumés. Il prend note des déclarations de représentants de la République démocratique du Congo affirmant que certains de ces charniers seraient en fait des sites d’inhumation. Il se déclare de nouveau gravement préoccupé par les violations graves du droit international humanitaire et les atteintes aux droits de l’homme commises par les milices locales dans cette région, notamment le recrutement et l’utilisation d’enfants dans un conflit armé, les attaques contre des civils et des sites civils et les attaques contre les forces de sécurité de la République démocratique du Congo et les symboles de l’autorité de l’État. Le Conseil se déclare également préoccupé par les attaques visant des écoles et des hôpitaux en violation du droit international applicable et lance un appel pour que soit respecté le caractère civil des écoles conformément au droit international humanitaire. Il réitère sa vive préoccupation face aux informations récentes faisant état d’une augmentation sensible du nombre des violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme commises par des membres des forces de sécurité de la République démocratique du Congo dans la région du Kasaï, notamment l’usage disproportionné de la force et le meurtre de civils. Le Conseil souligne que ces violations sont susceptibles de constituer des crimes de guerre selon le droit international. Il souligne également que c’est au Gouvernement congolais qu’il incombe au premier chef d’assurer la sécurité sur son territoire et de protéger les populations, dans le respect de l’état de droit, des droits de l’homme et du droit international humanitaire, et il engage le Gouvernement congolais à renoncer à l’usage excessif de la force et toutes les autres parties à cesser immédiatement et à rejeter toute forme de violence, à déposer les armes et à chercher une solution pacifique à la crise.
Le Conseil se déclare également préoccupé par la crise humanitaire provoquée par la violence, qui a déplacé plus de 1,4 million de personnes et en a forcé plus de 30 000 à fuir le pays. Il souligne l’urgente nécessité de ménager aux acteurs humanitaires un accès sûr et sans entrave.
Le Conseil réaffirme qu’il est important et urgent de mener rapidement des enquêtes transparentes sur les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits commises dans la région du Kasaï. Il se félicite de l’envoi d’une équipe d’experts internationaux chargés de travailler en coopération avec le Gouvernement congolais. Il réaffirme son intention de suivre de près les progrès réalisés dans les enquêtes sur ces violations et atteintes, y compris les enquêtes que mènent conjointement le Gouvernement congolais, la MONUSCO et le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo en vue de traduire en justice et de faire répondre de leurs actes tous les responsables, et il attend avec intérêt leur rapport. Le Conseil prend note de la mise en examen et de la condamnation récentes de plusieurs soldats des Forces armées de la République démocratique du Congo et d’un agent de la Police nationale congolaise, dans lesquelles il voit un premier pas dans la lutte contre l’impunité.
Le Conseil rappelle que le Gouvernement congolais doit enquêter rapidement et de manière approfondie sur le meurtre des deux membres du Groupe d’experts et traduire ses responsables en justice, et il demande au Gouvernement congolais de coopérer aux fins des enquêtes menées par les entités des Nations Unies et de celles qui pourraient être menées par les services de police de la Suède et des États-Unis, conformément à la législation congolaise. Il attend avec intérêt les conclusions de la Commission d’enquête des Nations Unies créée par le Secrétaire général pour enquêter sur la mort de ces deux experts. Le Conseil rappelle qu’il a décidé, au paragraphe 3 de sa résolution 2360 (2017), que les actes qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité de la République démocratique du Congo comprennent le fait de planifier, diriger ou commanditer des attaques contre des soldats de la paix de la MONUSCO ou des membres du personnel des Nations Unies ou des personnels associés, notamment les membres du Groupe d’experts, ou d’y participer, et se déclare prêt à désigner aux fins de sanctions les individus et les groupes responsables de ces attaques.
Le Conseil note avec inquiétude la poursuite des activités des groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo, et notamment la récente multiplication des actes de violence contre les communautés locales et les Forces armées de la République démocratique du Congo, la recrudescence des tensions ethniques et l’augmentation du nombre des personnes déplacées.
Le Conseil réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo.
Le Conseil réaffirme également son appui aux efforts déployés par le Représentant spécial du Secrétaire général, la MONUSCO, l’Union africaine et les organisations régionales pour garantir la mise en œuvre intégrale de l’accord du 31 décembre 2016, conformément à sa résolution 2348 (2017). Il engage les partenaires de la République démocratique du Congo à continuer d’appuyer les efforts sincères que font les parties prenantes nationales pour mettre intégralement en œuvre l’accord. Il renouvelle son appel aux pays de la région qui ont signé, il y a quatre ans, l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, à honorer rapidement et intégralement les engagements nationaux et régionaux qu’ils ont pris au titre de l’Accord-cadre, lequel demeure essentiel pour la réalisation d’une paix et d’une sécurité durables dans la région des Grands Lacs. Le Conseil demande à l’Organisation des Nations Unies, aux garants de l’Accord-cadre et aux pays membres de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et de la Communauté de développement de l’Afrique australe de fournir tout l’appui nécessaire à cette fin.