7992e séance – matin
CS/12897

Lutte antimines: le Conseil de sécurité exige le respect des obligations internationales des États

Le Conseil de sécurité, pour la première fois, ce matin, s’est déclaré vivement préoccupé par la menace que les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux font peser sur les civils et les réfugiés qui retournent chez eux, ainsi que sur les agents humanitaires, le personnel civil et les forces de l’ordre.

La résolution 2365 (2017), adoptée à l’unanimité, constitue un « précédent important » pour le Conseil de sécurité qui adopte pour la première fois une résolution sur cette question, a fait remarquer le représentant de la Bolivie, corédacteur du texte.  Il a souligné que le Conseil exhorte les États Membres à respecter leurs obligations internationales en matière de lutte antimines.

Le Secrétaire général devra présenter un rapport sur l’application de la présente résolution d’ici un an.

Le Conseil « demande à toutes les parties à des conflits armés de mettre immédiatement et définitivement fin à toute utilisation sans discrimination de dispositifs explosifs en violation du droit international humanitaire ».  Il les exhorte à protéger les populations civiles, notamment les enfants, contre les menaces que constituent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux.

Le Conseil encourage la communauté internationale à promouvoir et à appuyer l’action menée pour détruire ces dispositifs, sensibiliser les populations aux risques qu’ils représentent et mener des activités de réduction des risques, ainsi que pour fournir une aide en vue de soigner les victimes et les personnes handicapées et d’assurer leur réadaptation et leur réinsertion économique et sociale.

Les membres du personnel des opérations de maintien de la paix doivent être « équipés, informés et formés de manière à pouvoir endiguer la menace », précise le texte.

La résolution aborde la question de la destruction des dispositifs explosifs, qui doit être faite, à la demande des États, non seulement par ces derniers, mais aussi par les entités compétentes des Nations Unies, les acteurs internationaux, les organisations de la société civile et les parties prenantes compétentes qui sont en mesure de le faire.

Les activités de lutte antimines sont importantes aux yeux du Conseil car elles sont vues comme une façon de faciliter les efforts de stabilisation et de pérennisation de la paix déployés au lendemain des conflits.  Dans ce contexte, il recommande d’étudier les questions relatives à la lutte antimines « dès le début de la planification et de la programmation des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales », ainsi que, le cas échéant, « des interventions humanitaires d’urgence ».

Dans ce texte, les membres du Conseil ont voulu souligner le rôle important que joue l’ONU dans ce domaine, y compris le rôle de coordination que joue le Service de la lutte antimines de l’ONU au sein du système, tout en saluant les partenariats et la coopération entre les organisations régionales et sous-régionales, en particulier entre l’Union africaine et l’ONU.

Le représentant de la Bolivie a expliqué que l’objectif premier de la résolution est de dénoncer la menace de ces engins pour la vie de la population civile et du personnel de maintien de la paix.  La Bolivie est convaincue que l’atténuation de cette menace est essentielle à la promotion des efforts de consolidation de la paix.  

Son représentant a cité à cet égard les cinq piliers de la lutte antimines qui sont l’éducation aux risques, l’aide aux victimes, la gestion des armes, la destruction des arsenaux et le renforcement des capacités nationales.  Il a aussi salué les activités menées par le Service de la lutte antimines qui est déployé dans les opérations de maintien de la paix quand les États le demandent.

La Bolivie a ratifié la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction (aussi appelée Convention d’Ottawa), et d’autres conventions antimines, a-t-il rappelé en appelant d’autres pays à le suivre.

De même, le représentant de la Suède a considéré que la pleine mise en œuvre de toutes les conventions qui interdisent ou régulent l’utilisation de mines non contrôlées, mines antipersonnel, armes à sous-munitions, ainsi que la gestion de restes explosifs de guerre, est le moyen le plus efficace de réduire les risques liés à l’utilisation de telles armes. 

La Suède est partie à toutes ces conventions, a-t-il rappelé, après avoir aussi souligné les obligations au regard du droit international humanitaire. 

Il reste dans le monde une trentaine de pays qui n’ont pas encore signé la Convention d’Ottawa, notamment des « États particulièrement importants sur la scène internationale, ou encore des pays qui possèdent, produisent ou vendent ce type d’armes », a observé le représentant de l’Uruguay qui regrettait qu’il n’ait pas été possible de mentionner ce traité dans le texte la résolution. 

Cela ne l’a pas empêché de se féliciter non seulement de l’adoption de la résolution mais aussi de la procédure par laquelle elle a été négociée, souhaitant que celle-ci devienne la norme. 

En tant que Présidente du Groupe de soutien à l’action antimines, l’Italie accorde elle aussi une importance particulière à l’universalisation de la Convention d’Ottawa, ainsi que de celle d’Oslo interdisant les armes à sous-munitions, une question que le représentant italien aurait souhaité voir davantage abordée dans la résolution.  Il a demandé que le Conseil de sécurité insiste sur les multiples facettes de la lutte antimines.

Le représentant du Japon a espéré que l’adoption de la résolution inciterait les États Membres à faire des progrès dans le domaine du déminage.  Il a rappelé que son pays jouait un rôle actif en ce domaine et venait notamment de signer avec la Colombie un accord prévoyant l’octroi de 9 millions de dollars d’aide à ce pays pour appuyer les efforts de déminage.

Le représentant du Sénégal a salué l’approche de la résolution qui appelle à la coopération entre les États et traite des aspects humanitaires et du développement durable.  L’un des grands pays fournisseurs de troupes aux opérations de maintien de la paix, le Sénégal se félicite aussi de la prise en compte du danger des mines pour le personnel de maintien de la paix. 

Le Sénégal, qui est partie à la Convention d’Ottawa, a détruit tout son stock de mines et poursuit ses actions de sensibilisation auprès des autres pays.   Le représentant a voulu que ce texte soit l’occasion de susciter « un sursaut de la communauté internationale » pour voir la multiplication de ces armes et explosifs comme « une réelle menace à la paix et la sécurité internationales ».

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Texte du projet de résolution (S/2017/561)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 1590 (2005), 2102 (2013), 2295 (2016), 2299 (2016), 2305 (2016), 2327 (2016), 2338 (2017) et 2339 (2017), dans lesquelles sont prescrites les activités des Nations Unies liées à la lutte antimines dans les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales,

Rappelant les rapports du Comité spécial des opérations de maintien de la paix créé par l’Assemblée générale, qui donne au Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies des directives concernant la menace que représentent les engins explosifs improvisés et l’atténuation de leurs effets,

Prenant note des résolutions 71/72 et 70/80 de l’Assemblée générale, par lesquelles les États Membres ont décidé de continuer d’inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée les questions liées à l’assistance à la lutte contre les mines et la menace que représentent les engins explosifs improvisés,

Rappelant tous les traités et conventions relatifs à la lutte antimines, leur application par chacune des parties et les processus d’examen s’y rapportant,

Se déclarant vivement préoccupé par la menace grave et persistante que les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux font peser sur les civils longtemps après la fin des conflits,

Exprimant sa profonde préoccupation devant le nombre de civils, notamment d’enfants, tués ou mutilés par des mines terrestres, des restes explosifs de guerre et des engins explosifs artisanaux, pendant et après les conflits,

Se déclarant profondément préoccupé par la grave menace humanitaire que fait peser sur les civils, dans les pays touchés, la présence de mines terrestres, de restes explosifs de guerre et d’engins explosifs artisanaux, qui a des conséquences socioéconomiques graves et durables pour les populations de ces pays, ainsi que pour le personnel participant aux programmes et opérations de maintien de l’ordre, de secours humanitaire, de maintien de la paix, de relèvement et de déminage,

Notant avec une vive inquiétude que l’emploi sans discrimination d’engins explosifs artisanaux, notamment par des terroristes, demeure une grave menace pour la population civile, y compris les réfugiés qui retournent chez eux, ainsi que pour la sécurité du personnel de maintien de la paix et l’exécution efficace des mandats des missions,

Demeurant gravement préoccupé par l’insécurité, aggravée par la présence de mines terrestres, de restes explosifs de guerre et d’engins explosifs artisanaux, qui menace la paix, la sécurité et la stabilité des États, entrave l’accès humanitaire et la fourniture d’une assistance, et fait obstacle au développement économique durable,

Considérant que la lutte antimines accroît la mobilité et la sécurité des soldats de la paix et des agents humanitaires et contribue à la protection des civils et aux efforts de stabilisation et de consolidation de la paix,

Considérant que c’est aux États qu’il incombe au premier chef de réduire les dangers que représentent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux pour les civils, et que l’Organisation des Nations Unies a un rôle de soutien à jouer en la matière, notamment par l’intermédiaire du Service de la lutte antimines, qui coordonne l’action des organismes des Nations Unies et d’autres organisations compétentes,

Conscient que les partenariats et la coopération, particulièrement entre les autorités nationales, l’Organisation des Nations Unies, les organisations régionales, la société civile et le secteur privé, sont essentiels au succès de la lutte antimines,

Constatant les constants progrès accomplis pour ce qui est de repérer et de détruire les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux, de sensibiliser les populations touchées aux risques qu’ils représentent et de venir en aide aux victimes,

Rappelant l’action continue menée par les États Membres, ainsi que par les organismes des Nations Unies, les institutions compétentes et d’autres parties prenantes afin de fournir les informations et l’assistance technique, financière et matérielle nécessaires pour localiser, éliminer, baliser, surveiller, détruire ou neutraliser les champs de mines, les mines, les pièges et autres dispositifs, notamment les engins explosifs artisanaux, et les restes explosifs de guerre, et pour enregistrer et conserver les renseignements obtenus en la matière, conformément aux obligations juridiques internationales de chaque État, et soulignant qu’il faut renforcer la coordination et l’échange d’informations avec les parties prenantes compétentes, sur une base volontaire,

Se déclarant gravement préoccupé par les situations où des armes, y compris des mines terrestres et des engins explosifs artisanaux, sont utilisées en violation du droit international humanitaire,

1.    Se déclare vivement préoccupé par la menace que les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux font peser sur les civils et les réfugiés qui retournent chez eux, ainsi que sur les agents humanitaires, le personnel civil et les forces de l’ordre, et souligne qu’il faut prendre des mesures appropriées pour réduire efficacement ce danger;

2.    Demande à toutes les parties à des conflits armés de mettre immédiatement et définitivement fin à toute utilisation sans discrimination de dispositifs explosifs en violation du droit international humanitaire;

3.    Exhorte les parties à des conflits armés à protéger les populations civiles, notamment les enfants, contre les menaces que constituent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux et, à cet égard, encourage la communauté internationale à promouvoir et à appuyer l’action menée pour détruire ces dispositifs, sensibiliser les populations aux risques qu’ils représentent et mener des activités de réduction des risques, ainsi que pour fournir une aide en vue de soigner les victimes et les personnes handicapées et d’assurer leur réadaptation et leur réinsertion économique et sociale;

4.    Souligne qu’il importe de faire en sorte, selon que de besoin, que les membres du personnel des opérations de maintien de la paix soient équipés, informés et formés de manière à pouvoir endiguer la menace que représentent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux;

5.    Demande aux États Membres de respecter leurs obligations internationales respectives en matière de lutte antimines;

6.    Demande aux États Membres, et aux entités compétentes des Nations Unies, conformément à leurs mandats, ainsi qu’aux acteurs internationaux, aux organisations de la société civile et aux parties prenantes compétentes qui sont en mesure de le faire, de concourir à la destruction des mines terrestres, des restes explosifs de guerre et des engins explosifs artisanaux, à la demande des États;

7.    Apprécie, à cet égard, les efforts faits par les donateurs et les États touchés et les encourage à continuer de renforcer les capacités nationales, selon qu’il convient, pour réduire efficacement la menace que représentent les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs artisanaux;

8.    Encourage tous les acteurs à s’efforcer de mener, sur une base volontaire, des activités de lutte antimines conformes aux Normes internationales de la lutte antimines, notamment au niveau national;

9.    Constate que les activités de lutte antimines facilitent les efforts de stabilisation et de pérennisation de la paix déployés au lendemain des conflits et se déclare favorable à ce que ces activités soient mentionnées, selon qu’il convient, dans les accords de cessez-le-feu et de paix pertinents;

10.   Souligne qu’il importe d’étudier les questions relatives à la lutte antimines dès le début de la planification et de la programmation des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, le cas échéant, ainsi que des interventions humanitaires d’urgence, en tenant compte des considérations liées au sexe et à l’âge, en particulier dans les méthodes d’enquête, l’assistance aux victimes et la sensibilisation au danger;

11.   Est conscient du rôle de l’Organisation des Nations Unies, y compris le rôle de coordination que joue le Service de la lutte antimines de l’ONU au sein du système, pour ce qui est d’atténuer les dangers posés par les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés, notamment grâce à des interventions d’urgence et à la coordination des acteurs internationaux, et les encourage à continuer de coopérer, selon qu’il convient, en particulier pour mettre en œuvre les mandats autorisés par le Conseil de sécurité;

12.   Encourage les États et les organisations qui sont en mesure de le faire à continuer de participer activement au renforcement des capacités techniques, consultatives et opérationnelles dans le domaine de la lutte antimines, notamment en aidant les États touchés et les acteurs concernés dans le système des Nations Unies;

13.   Se félicite de la poursuite des partenariats et de la coopération entre les organisations régionales et sous-régionales, en particulier entre l’Union africaine et l’ONU, visant à atténuer la menace que constituent pour les civils les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés, notamment grâce au Cadre commun pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité;

14.   Note que des experts techniques nationaux élaborent actuellement les normes de l’ONU concernant la neutralisation des engins explosifs improvisés, en coordination avec le Service de la lutte antimines, et souligne qu’il importe de poursuivre les consultations avec les parties prenantes concernées;

15.   Prie le Secrétaire général de lui fournir, dans ses rapports sur les opérations de maintien de la paix, les missions politiques spéciales et les interventions humanitaires menées dans les zones où les mines terrestres, les restes explosifs de guerre et les engins explosifs improvisés représentent une menace, des informations sur ces dangers et sur les mesures destinées à les atténuer;

16.   Prie également le Secrétaire général de lui présenter un rapport sur l’application de la présente résolution, selon qu’il conviendra, d’ici un an;

17.   Décide de rester activement saisi de la question.

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