7873 séance – matin
CS/12698

Optimisme au Conseil de sécurité sur l’évolution de la situation en Somalie, malgré les attaques des Chabab

Deux jours après l’attaque meurtrière qui a frappé Mogadiscio, le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie, M. Michael Keating, a dressé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, un tableau encourageant de la situation en Somalie, après la conclusion des élections législatives, véritable « miroir » dans lequel les Somaliens ont pu voir ce qu’ils ont « de bon et de mauvais ».  « Tout est en train de se mettre en place pour que le pays entre dans une nouvelle phase de pérennisation de la paix », a-t-il dit.

Le Représentant spécial, qui présentait le dernier rapport* du Secrétaire général, n’a néanmoins pas fait mystère des graves défis que connaît le pays, tels que la menace posée par les Chabab et la sécheresse.  Ces défis ont été au cœur des interventions du Ministre des affaires étrangères de la Somalie, de la Présidente somalienne du Comité des ambassadeurs de bonne volonté, du Représentant spécial de l’Union africaine et des délégués de la Suède et de l’Uruguay qui se sont également voulus optimistes.

Les élections législatives marquent un jalon important dans l’évolution et la transformation de la Somalie postconflit, a affirmé le Représentant spécial, à l’entame de son intervention.  Le Parlement est le plus légitime depuis les élections de 1969, a-t-il fait remarquer.  Il s’est, en particulier, félicité de l’élection des 54 membres de la chambre haute par les assemblées régionales plutôt que sur une base clanique.  « Cette incarnation du caractère fédéral émergent en Somalie pourrait jouer un rôle central dans l’avancement d’un programme national authentique », a déclaré M. Keating.

Le Représentant spécial a salué comme une « avancée remarquable » le fait qu’un quart des membres du Parlement fédéral, inauguré le 27 décembre dernier, soient désormais des femmes, une proportion qui était de 14% en 2012, comme l’a rappelé le Ministre somalien, M. Abdusalam H. Omer.  La Présidente du Comité des ambassadeurs de bonne volonté, Mme Asha Gelle Dirie, a indiqué que cet accomplissement sans précédent ne rendait pas moins nécessaire « une transformation structurelle à grande échelle » de la société somalienne.

À l’instar du délégué uruguayen, le Représentant spécial a insisté sur la nécessité que l’élection présidentielle se tienne comme prévu le 8 février, notant que, dans l’intervalle, Mogadiscio restera une cible de choix pour les Chabab.  Il a reçu l’assurance du Ministre somalien, qui a indiqué que l’élection des présidents de la chambre haute et de la chambre basse ouvrait la voie à une élection présidentielle.  Quant au processus visant à parvenir au système « un vote, une personne » en 2020, il doit débuter immédiatement, a-t-il assuré.

Les Chabab, malgré leurs attaques odieuses, n’ont pas réussi à faire dérailler le processus électoral, s’est félicité le Représentant spécial.  Il a toutefois précisé qu’ils continuaient de poser une « réelle menace », d’autant qu’ils pourraient exploiter l’incapacité des autorités à répondre à la sécheresse qui touche quelque cinq millions de Somaliens.  Un son de cloche quelque peu différent de celui du Ministre somalien qui a vu dans les « tactiques désespérées » des Chabab, telles que l’attaque de civils, la meilleure preuve « de leurs capacités déclinantes et de leur faillite morale ».

Toujours sur le plan sécuritaire, M. Keating a souligné la nécessité de renforcer les Forces nationales de sécurité somaliennes, estimant que les perspectives de paix en dépendent.  « La Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et les troupes des pays contributeurs ne resteront pas indéfiniment », a-t-il averti.  Un point de vue partagé par le Représentant spécial de l’Union africaine pour la Somalie et Chef de l’AMISOM, M. Francisco Caetano José Madeira, qui a insisté sur la nécessité de s’adapter aux « nouvelles tactiques de l’ennemi ».  Les groupes terroristes ont toujours le contrôle de certaines poches de territoire et bénéficient de renforts venus du Yémen, a-t-il averti.

M. Madeira a lancé un appel à déployer des forces supplémentaires -4 000 soldats- et des capacités de combat et de stabilisation, tandis que le Représentant spécial, préoccupé par la diminution de 20% de l’appui de l’Union européenne à l’AMISOM, a, lui, appelé le Conseil à examiner à apporter un financement prévisible et pérenne à l’AMISOM.  L’Union africaine et la communauté internationale doivent trouver des moyens plus viables pour appuyer l’AMISOM, a, pour sa part, déclaré le délégué de la Suède.

*     S/2017/21

LA SITUATION EN SOMALIE

Rapport du Secrétaire général sur la Somalie (S/2017/21)

Déclarations

M. MICHAEL KEATING, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie, a rappelé que la séance d’aujourd’hui se tenait à l’issue d’élections législatives prolongées et 12 jours avant l’élection du président.  « Les Chabab font tout ce qu’ils peuvent pour discréditer et faire dérailler ce processus électoral, comme nous l’avons vu à Mogadiscio et lors de l’attaque de Kulbiyo aujourd’hui », a-t-il dit.

Il a jugé que la priorité la plus immédiate était de respecter la date de l’élection présidentielle, qui a été arrêtée pour des raisons techniques.  Les pressions politiques pour modifier cette date ne doivent pas l’emporter, a tranché M. Keating.  « Il est également essentiel que la dernière étape du processus soit conduite de manière transparente, conformément aux règles agréées et élaborées en vue de garantir une élection libre et impartiale. »  Le Représentant spécial a appelé tous les candidats à respecter le Code de conduite qu’ils ont signé avant de poser leur candidature.  Cela est d’autant plus important que les élections législatives ont été entachées de corruption, d’achats de vote, de harcèlements, d’intimidations, de manipulations et de délais répétés, a déploré M. Keating.

Le processus électoral a été un miroir dans lequel les Somaliens ont vu du bon et du mauvais s’agissant de la manière dont le pouvoir est exercé et des relations entre les chefs de clan, les responsables politiques, le monde des affaires et les citoyens, a poursuivi le Représentant spécial.  Tirant les leçons de ce processus, il a souligné le travail remarquable accompli des organes électoraux ad hoc, mais aussi leurs difficultés à résister aux pressions politiques et aux menaces.  Le calendrier électoral a été soumis à des délais répétés, le processus électoral ayant souvent été utilisé pour régler de vieux contentieux entre clans, États et autres acteurs, a expliqué M. Keating.

Il a insisté sur la nature politique de ce processus, celui-ci ayant été utilisé pour la réconciliation et des négociations entre et au sein des clans.  Les dispositions électorales ont été essentielles pour ouvrir la voie au suffrage universel, a affirmé M. Keating, rappelant que des élections selon le principe « une personne, une voix » étaient prévues en 2020.  La Commission électorale nationale indépendante doit être renforcée, les listes électorales doivent être établies et un mécanisme robuste doit voir le jour afin de régler les différends et de sanctionner les abus.  Il a souhaité que ces efforts commencent dès la conclusion du processus électoral.

Malgré ces difficultés, M. Keating a estimé que ce processus avait accouché de « résultats très encourageants » et marquait un jalon important dans l’évolution et la transformation de la Somalie postconflit.  Une chambre haute a ainsi vu le jour, ses 54 représentants ayant été élus par les assemblées régionales plutôt que sur une base clanique.  Cette incarnation du caractère fédéral émergent en Somalie pourrait jouer un rôle central dans l’avancement d’un programme national authentique, a déclaré le Représentant spécial.  Il a indiqué que le corps électoral était passé de 135 responsables en 2012 à plus de 13 000 délégués, dont 30% de femmes.  Près d’un quart des membres du Parlement fédéral sont des femmes, a-t-il dit, saluant là « une avancée remarquable ».

M. Keating a souligné la nature véritablement compétitive du processus électoral, le vote s’étant déroulé en six endroits, reflétant l’émergence des structures fédérales.  Le nouveau Parlement, qui est plus jeune et plus diversifié, sera probablement plus réactif aux préoccupations du corps électoral que le précédent, a-t-il poursuivi.  « En résumé, ce Parlement est le plus légitime et le plus représentatif depuis les dernières élections de 1969. »  Le Représentant spécial a déclaré que les Chabab, malgré leurs attaques odieuses, n’avaient pas réussi à faire dérailler le processus électoral.  « Cela est en soi un message important. »  Il a jugé d’autant plus important que le processus s’achève dans les délais prévus que Mogadiscio restera une cible de choix jusqu’à l’élection présidentielle.

L’élection d’un président vu comme légitime par la population et la communauté internationale ouvrira la voie au règlement des graves défis qui attendent le pays, a noté M. Keating.  Il a aussitôt averti que le pays pourrait faire face à une période prolongée d’incertitudes si le vote présidentiel était entaché par la corruption, les intimidations et les ingérences extérieures.  « C’est la dernière chose dont le pays a besoin. »

Le Représentant spécial a énuméré les priorités les plus urgentes pour le prochain président: la réforme du secteur de la sécurité, l’accélération de la réforme constitutionnelle, la réconciliation et la résolution des conflits larvés et le renforcement de la gouvernance.  Il a pointé une autre priorité: remédier à la sécheresse actuelle qui touche cinq millions de personnes dans le pays.  La famine se profile dans le pays si la réponse n’est pas renforcée, a-t-il dit.

M. Keating a insisté sur les conséquences politiques et sécuritaires de la sécheresse, puisque celle-ci exacerbe les rivalités pour le contrôle des ressources et les conflits locaux et conduit à un accroissement des personnes déplacées.  La perception d’une incapacité des gouvernements fédéral et locaux à y remédier pourrait entamer la crédibilité de ces derniers et être exploitée par les Chabab, a-t-il mis en garde.  La sécheresse est citée par le Somaliland comme un facteur clef pour reporter les élections de mars à octobre.  « En un mot, un échec dans la réponse à la sécheresse pourrait stopper et même saper les objectifs d’édification de l’État et de consolidation de la paix. »

M. Keating a souligné la nécessité d’une réforme du secteur de la sécurité, jugeant que les perspectives de paix dépendaient de la capacité des Somaliens à assumer politiquement et financièrement leur propre sécurité.  La Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et les troupes des pays contributeurs ne resteront pas indéfiniment, a-t-il rappelé.  Il a néanmoins estimé qu’elles restaient indispensables pour sécuriser la Somalie, appuyer l’édification de l’État et protéger les élections.  « Elles ne resteront pas si un financement immédiat n’est pas trouvé et qu’un plan n’est pas élaboré pour garantir que les forces somaliennes soient capables de tenir les zones libérées de l’emprise des Chabab. »

Le Représentant spécial s’est dit vivement préoccupé par la diminution de 20% de l’appui de l’Union européenne et a appelé le Conseil à examiner les différentes options, y compris l’apport de contributions, pour apporter un financement prévisible et pérenne à l’AMISOM.  Il a souligné le besoin d’un appui immédiat pour les offensives prévues contre les Chabab.  En admettant que ce problème financier soit réglé, le défi plus large d’une sécurité durable en Somalie demeure, en particulier à la lumière de l’intention de plusieurs pays contributeurs de quitter le pays, a-t-il noté.

M. Keating a jugé que l’élément central, à cet égard, était le renforcement des Forces nationales de sécurité somaliennes, en adéquation avec l’émergence d’un État fédéral, soumises au pouvoir politique, ayant la confiance de tous les Somaliens et qui ne soient pas monopolisées par certains clans.

Des années d’investissement de la communauté internationale n’ont accouché que de résultats limités, a-t-il dit, ajoutant que les Chabab demeuraient une réelle menace pour le pays.  M. Keating a souligné l’importance pour le prochain président et le Gouvernement de parvenir à un consensus, entériné par les Somaliens, autour de l’architecture, de l’appropriation, du financement et des objectifs des forces sécuritaires, jetant ainsi la base d’un appui plus cohérent et plus coordonné de la communauté internationale.  Il a appelé l’ONU et l’Union africaine à œuvrer pour une stratégie sécuritaire globale pour la Somalie, qui tirerait profit des avantages comparatifs des principaux acteurs.

Sur le plan constitutionnel, le Représentant spécial a souhaité une clarification du partage des pouvoirs entre le président et le premier ministre, entre la chambre haute et la chambre basse et, enfin, entre le Gouvernement fédéral et les États membres de la Fédération s’agissant du partage des ressources, du système judiciaire et de la feuille de route vers les élections de 2020.

Le processus électoral a mis en lumière la demi-douzaine de conflits larvés dans le pays, en particulier entre le Somaliland et la Somalie, chacun d’entre eux étant lourd de conséquences, a-t-il poursuivi.  Mes interlocuteurs somaliens veulent que l’ONU, en partenariat avec l’Union africaine, l’Union européenne et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) se concentrent sur le renforcement des capacités somaliennes pour prévenir et régler les conflits et appuyer le processus de réconciliation, a déclaré M. Keating.

Enfin, le Représentant spécial a indiqué que l’examen en cours de la présence de l’ONU dans le pays ne serait pas achevé à la fin de cette année, en raison des retards dans le processus électoral.  « Tout est en train de se mettre en place en Somalie pour que le pays entre dans une nouvelle phase vers la pérennisation de la paix, la prévention et le règlement du conflit et l’édification d’un État fédéral fonctionnel », a conclu M. Keating.

M. FRANCISCO CAETANO JOSÉ MADEIRA, Représentant spécial de l’Union africaine (UA) pour la Somalie et Chef de la Mission de l’UA en Somalie (AMISOM), s’est félicité que, malgré des difficultés considérables, les Somaliens aient réussi à mener à bien les élections parlementaire.  Un nouveau Parlement fédéral bicaméral est donc en place, tandis que l’élection présidentielle est prévue pour le 8 février, a-t-il précisé.  Il a détaillé le soutien apporté au Gouvernement somalien pour la bonne tenue de ces élections et pour en assurer la crédibilité nécessaire, un soutien offert par l’UA et l’AMISOM, en partenariat avec l’IGAD, l’ONU et d’autres partenaires internationaux.  Il a fait part de l’espoir qui prévaut avec l’annonce par le nouveau président de la Chambre des priorités du programme politique national, à savoir la finalisation de l’examen constitutionnel, le dialogue avec le Somaliland, le renforcement des capacités de collecte d’impôts, la consolidation des institutions d’État et une meilleure fourniture de services de base à la population. 

Même si beaucoup de citoyens n’ont pas participé au scrutin, ce Parlement est la preuve de la confiance du peuple, a fait remarquer M. Madeira en comparant la situation avec celle de 2012 où seulement une poignée de sages avaient le pouvoir de décider qui seraient les représentants du peuple.  Aujourd’hui, a-t-il poursuivi, 15% des nouveaux députés sont jeunes -entre 25 et 35 ans- et 24% sont des femmes.  Ces catégories sociales constituent la majorité et la face la plus vive de la population somalienne.

M. Madeira a également souligné que, malgré les efforts des Chabab d’entraver le processus électoral, le scrutin parlementaire avait eu lieu dans les six centres électoraux prévus à cet effet, sans incident qui puisse leur être imputé.  Il a attribué ce succès au professionnalisme et à la coopération des Forces nationales de sécurité somaliennes et de l’AMISOM, à l’efficacité du plan mis en place, ainsi qu’à l’échange de renseignements en temps réel.

Au cours des quatre derniers mois, les partenaires internationaux sont restés engagés à accompagner le processus politique négocié pour que le mandat de quatre ans du gouvernement fédéral s’achève en 2016.  Il a prévenu que les progrès accomplis avec le lancement des États régionaux pouvaient être compromis si on ne s’occupait pas rapidement du malaise politique actuel constaté dans plusieurs de ces États.

L’AMISOM, a-t-il indiqué, travaille main dans la main avec les Forces nationales de sécurité somaliennes pour maintenir un environnement sûr et permettre au processus politique de s’accomplir.  Il a signalé que les Chabab continuaient à commettre des assassinats ciblés, lancer des tirs et organiser des embuscades contre des convois de l’AMISOM avec des engins explosifs improvisés.  De son côté, l’AMISOM continue à soutenir les Forces nationales de sécurité somaliennes, et ce, malgré des difficultés logistiques, financières et opérationnelles.

M. Madeira a ensuite attiré l’attention sur l’évolution du théâtre des opérations, signalant les nouvelles tactiques et la nécessité de s’y adapter de toute urgence pour faire face à l’ennemi.  Les groupes terroristes ont toujours le contrôle de poches de territoire autour du corridor de la vallée de Djouba et le long de la côte nord-est, a-t-il précisé, en s’inquiétant aussi des renforts apportés par les combattants étrangers qui arrivent en majorité par le Yémen.  Il a lancé un appel à déployer des forces supplémentaires (4 000 soldats) et des capacités de combat et de stabilisation, en demandant à l’ONU et à d’autres membres de la communauté internationale de fournir ces troupes de toute urgence, ainsi que des rations, du carburant, des moyens de transport et des médicaments.  Il a aussi insisté sur la nécessité absolue d’avoir des Forces nationales de sécurité somaliennes pleinement opérationnelles et bien formées, ce qui exige un soutien constant et coordonnée de la part de tous les partenaires, ce à quoi l’UA s’engage avec l’ONU.  Il a salué au passage le partenariat avec le Royaume-Uni.

Enfin, il a rappelé que la dernière réunion du Comité de coordination des opérations militaires du 11 novembre 2016 avait recommandé un soutien non létal de la part de l’ONU et des autres partenaires internationaux aux 10 900 membres autorisés de l’Armée nationale somalienne.  Il a dit que le Comité avait aussi demandé d’envisager d’élever le niveau de ce soutien à 20 000 membres afin d’accélérer la stratégie de sortie de l’AMISOM.  Il a aussi indiqué que la Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine avait signé, le 19 janvier 2017, un mémorandum d’accord avec les Ministres burundais des finances et de la défense sur les modalités de paiement des troupes déployées en Somalie. 

Mme ASHA GELLE DIRIE, Présidente du Comité des ambassadeurs de bonne volonté, a indiqué que son comité avait été mis place par le Président fédéral somalien afin de faire en sorte que 30% des sièges au Parlement reviennent à des femmes, un objectif par ailleurs entériné par le Forum des dirigeants nationaux.  Elle a ensuite détaillé l’action de son comité, laquelle a permis l’élection de femmes à près de 25% des sièges du Parlement et de son comité.  « Il s’agit là d’un accomplissement remarquable et sans précédent pour les femmes somaliennes et la société somalienne dans son ensemble. »  Au titre des leçons tirées de ce processus, elle a indiqué qu’une disposition législative était nécessaire pour qu’une proportion de sièges au Parlement échoie à des femmes.  Sans celle-ci, nous n’aurions pu que très difficilement parvenir à cet objectif, a-t-elle convenu.

Elle a également indiqué que la réalisation de cet objectif dépendait dans une large mesure de la volonté des chefs de clan, traditionnellement opposés à la participation politique des femmes.  Une transformation structurelle à grande échelle est nécessaire, a-t-elle dit, avant d’estimer que le front uni présenté par les femmes lors de cette campagne avait été une « source de force ».  Enfin, elle a mentionné les défis rencontrés par les femmes, tels que l’absence d’un appui logistique et financier adéquat et le fait que les femmes aient été affectées de manière disproportionnée par les cas de corruption, fragilisant, ce faisant, ces dernières dans leurs relations avec les chefs de clans et les autorités.

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a condamné l’attentat-suicide lancé mercredi contre un hôtel à Mogadiscio, qui a fait des dizaines de morts.  Il s’est ensuite félicité de l’établissement du nouveau Parlement fédéral et de l’élection des présidents de ses deux chambres, souhaitant que ce processus connaisse son point d’orgue avec le scrutin présidentiel du 8 février.  Il a encouragé la Somalie à entamer son processus de révision constitutionnelle pour achever sa mue démocratique, soulignant que le soutien de la MANUSOM et de la communauté internationale serait indispensable à cette fin.  Si le seuil de 30% de femmes parlementaires n’a pas encore été atteint, a noté le délégué, la hausse témoigne en tout cas d’une transformation dans les modes de représentation et de participation démocratiques. 

Par ailleurs, M. Rosselli s’est dit préoccupé par la hausse des violations des droits de l’homme en Somalie, notamment s’agissant des enfants, en raison de leurs liens présumés avec les Chabab.  Il a rappelé que les enfants doivent être traités comme des victimes, et que leur intérêt supérieur doit être préservé.  Le représentant s’est déclaré également inquiet des informations dont fait état le rapport du Secrétaire général sur les enfants dans les conflits armés, selon lequel entre 2012 et 2016, 40 attaques auraient été commises contre des hôpitaux, ce qui s’apparente à des crimes de guerre.

M. OLOF SKOOG (Suède) a présenté ses condoléances aux victimes de l’attentat perpétré mercredi à Mogadiscio.  Il s’est toutefois félicité de l’amélioration générale des conditions de sécurité en Somalie et a rappelé à quel point il est important qu’il n’y ait plus de retard dans le calendrier électoral et que l’élection présidentielle ait lieu le 8 février comme prévu.  « Il faut que tous les Somaliens y participent, y compris les jeunes et les femmes », a insisté la délégué.  Préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire dans le pays, le représentant a également appelé tous les bailleurs de fonds à prêter assistance à la Somalie pour éviter une « catastrophe ».  Il a enfin appelé l’Union africaine et la communauté internationale à trouver des moyens plus viables pour appuyer l’AMISOM.

M. ABDUSALAM H. OMER, Ministre des affaires étrangères de la Somalie, a reconnu l’importance des défis qu’il reste à relever pour son pays, tout en soulignant les progrès « tangibles, durables et historiques » qu’il a accomplis.  En effet, a-t-il assuré, la Somalie a été une des premières démocraties d’Afrique et elle est en train, aujourd’hui, de finaliser ses premières élections nationales depuis des décennies.  « Jusqu’à présent, tous les représentants des chambres basse et haute ont été élus par des électeurs qu’ils représentent et ils ont en retour élu les présidents de ces deux institutions, ouvrant la voie à une élection présidentielle prévue le 8 février 2017 », s’est félicité le Chef de la diplomatie somalienne. 

Pour la première fois de son histoire, selon lui, la Somalie a vu une véritable mobilisation politique des femmes.  Nous sommes fiers, a-t-il dit, de pouvoir dire que nous avons presque 26% de femmes au Parlement contre 14% en 2012.  De plus, a encore relevé le Ministre, le processus actuel d’élections indirectes a permis à un total de 14 025 délégués, sélectionnés par les chefs de clan et représentant toutes les composantes de la société, de voter pour les candidats en lice.  Contrairement à 2012, le vote ne s’est pas concentré sur la seule Mogadiscio, mais s’est étendu à l’ensemble des régions fédérales, y compris le HirChébéli nouvellement formé.

Par ailleurs, le retard pris par l’élection présidentielle découle de la nécessité pour les régions et les candidats de comprendre et mettre en œuvre le système électoral adopté par le Gouvernement somalien, a justifié M. Omer.  Quant au processus visant à parvenir au système « un vote, une personne » en 2020, il doit débuter immédiatement, notamment par la révision de la Constitution et le renforcement de toutes les institutions nationales, a-t-il ajouté, comparant la démocratisation à une forme de « marathon ».  Réaffirmant que le Mouvement des Chabab avait été défait militairement, le Ministre a attribué l’attaque meurtrière de mercredi dernier à une tactique visant à s’en prendre à des cibles faciles et à des civils innocents.  « La plupart des dirigeants des Chabab ont été tués ou se sont rendus et leurs tactiques désespérées sont la meilleure preuve de leurs capacités déclinantes et de leur faillite morale », a tranché le Ministre, en soulignant la volonté de son gouvernement d’œuvrer avec ses partenaires à la « destruction des poches restantes de terreur sur le sol somalien ».

Dans ce contexte, la réforme du secteur de la sécurité se poursuit, a-t-il dit, avec la formation et l’équipement de l’Armée nationale et des forces de police somaliennes et la mise en place d’une stratégie nationale contre l’extrémisme violent.  En outre, a poursuivi M. Omer, la Somalie s’est dotée d’un Plan de développement national parachevé l’an dernier, conformément au Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a reconnu l’ampleur de la crise humanitaire, avec cinq millions de Somaliens touchés par l’insécurité alimentaire, dont 1,1 million en situation d’urgence.  Il a donc lancé un appel à la générosité des donateurs et des bailleurs de fonds pour répondre aux besoins des plus vulnérables, notamment les femmes, les enfants et les femmes déplacées.

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