L’Assemblée générale se mobilise pour donner un élan « irrésistible » aux synergies entre développement et paix durables
L’Assemblée générale, qui a organisé aujourd’hui un débat sur les synergies entre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le maintien de la paix, a entendu le Secrétaire général de l’ONU constater le « grave échec » du développement dans un monde inégalitaire et asymétrique. M. António Guterres a établi le lien entre économies défaillantes, fragilité des sociétés et des institutions et conflits. Il a donc appelé à une réponse mondiale qui s’attaque aux causes sous-jacentes des conflits pour assurer le développement durable.
Cette réponse, a-t-il dit, doit intégrer la paix, le développement durable et les droits de l’homme de manière holistique, et ce, de la conception à l’exécution. « Notre priorité est la prévention: la prévention des conflits, des pires effets des catastrophes naturelles et autres menaces humaines à la cohésion et au bien-être des sociétés », a insisté le Secrétaire général qui a jugé important de se rappeler que les liens entre le Programme 2030 et la pérennisation de la paix se trouvent non seulement dans l’objectif 16 dudit programme mais dans tous les 17 objectifs dont la réalisation serait une contribution « énorme » à la paix durable.
Dix-sept pays dans le monde sont touchés par des conflits prolongés, tandis que deux milliards de personnes vivent dans des nations en proie à la fragilité, aux conflits et à la violence, et que 95% des réfugiés et des déplacés sont dans des pays secoués par le même conflit depuis 1991, a relevé le Président de l’Assemblée générale, M. Peter Thomson, à l’ouverture du débat plénier qui aura réuni plus de 70 orateurs.
Avec le Programme 2030, « jamais encore la communauté internationale ne s’était donnée un mandat aussi fort pour briser les cloisons entre les trois piliers des Nations Unies, à savoir paix et sécurité, développement durable et respect des droits de l’homme », a résumé la Secrétaire d’État aux affaires étrangères de la Suisse. Cette phase préliminaire de la mise en œuvre du Programme, a renchéri le Président de l’Assemblée générale, doit libérer de « nouvelles réserves » de volonté politique pour s’attaquer aux inégalités, à la transition vers l’économie verte et à la protection de la planète, et investir « financièrement et intellectuellement », dans la paix durable à travers le monde.
Si les deux défis majeurs identifiés par le Secrétaire général sont l’éducation, dont il a souligné le rôle transformateur et pacificateur pour les sociétés, et l’emploi des jeunes, l’ONU, a-t-il estimé, doit aussi être prête à se réformer pour accompagner ce mouvement. M. Guterres a annoncé que sa Conseillère principale en matière de politique s’efforce de recenser les différents moyens de prévention dont dispose le système des Nations Unies pour la conception d’une plateforme unique qui les intégrera. Le Secrétaire général a aussi promis d’ici à juin les grandes lignes de sa vision pour favoriser des dispositifs de financement qui privilégient l’intégration et la cohérence entre les fonds, programmes et agences de l’ONU plutôt que la concurrence. Enfin, nous devons réformer l’administration de l’ONU, a-t-il ajouté, en promettant un dispositif simplifié, décentralisé et souple, ancré dans une culture de transparence et de respect du principe de responsabilité.
« Je pense qu’il y a un espace pour que les organes de l’ONU, dans le respect des mandats respectifs, promeuvent la cohérence et la complémentarité des efforts de paix et de sécurité des Nations Unies et des efforts humanitaires, de défense des droits de l’homme, de justice et de développement », a considéré M. Frederick Musiia Makamure Shava, le Président du Conseil économique et social (ECOSOC). Les activités opérationnelles de l’ONU doivent prendre la direction du cadre « un pays-une ONU » avec des objectifs communs et une planification stratégique, ainsi qu’une claire répartition des responsabilités, a renchéri la Vice-Ministre des affaires étrangères de la Norvège.
De nombreux intervenants se sont félicités du rapprochement entre le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Département des opérations de maintien de la paix, à l’exception peut-être du représentant de la Fédération de Russie qui a estimé que « le développement ne peut pas garantir la paix, et la paix le développement ». Il a appelé à la prudence lorsqu’on parle d’« interconnexion », avant que son homologue du Brésil ne refuse l’idée que le Programme 2030 ne devienne un simple programme de paix.
Ont également eu lieu aujourd’hui une table ronde et des ateliers misant sur les synergies entre trois piliers: l’autonomisation des femmes et des jeunes, la gestion des ressources naturelles, et le renforcement d’institutions « efficaces, transparentes et ouvertes à tous ».
L’Assemblée générale reprendra son Dialogue de haut niveau demain, mercredi 25 janvier, à partir de 11 heures.
DIALOGUE DE HAUT NIVEAU INTITULÉ « CONSTRUIRE UNE PAIX DURABLE POUR TOUS: LES SYNERGIES ENTRE LE PROGRAMME DE DÉVELOPPEMENT DURABLE À L’HORIZON 2030 ET LE MAINTIEN DE LA PAIX »
Déclarations d’ouverture
M. PETER THOMSON (Fidji), Président de l’Assemblée générale, a rappelé que, de la même manière que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 reconnait l’importance de promouvoir des sociétés pacifiques, justes et inclusives pour réaliser chacun de ses 17 objectifs, les résolutions sur la pérennisation de la paix reconnaissent l’importance du développement durable pour le maintien de la paix. Ces résolutions accordent une place particulière à la prévention des conflits, à l’égalité entre les sexes, au traitement des causes profondes des conflits et à la protection des droits de l’homme. Dès lors, leur mise en œuvre doit se faire de concert, et ce Dialogue de haut niveau doit être considéré comme un effort visant au renforcement mutuel de ces visées.
Selon le Président, il faut agir sur deux fronts. Tout d’abord, il est crucial d’impulser un élan « irrésistible » dès à présent, à cette phase préliminaire de la mise en œuvre du Programme 2030, en mobilisant les États Membres, le secteur privé, la société civile et le milieu universitaire. Dans ce cadre, il faut mobiliser les ressources nécessaires pour sortir des centaines de millions de gens de la pauvreté et assurer l’accès universel aux services sociaux de base. Il faut, a insisté le Président, libérer de « nouvelles réserves » de volonté politique pour s’attaquer aux inégalités, à la transition vers l’économie verte et à la protection de la planète.
Le deuxième front, a poursuivi M. Thomson, consiste à reconnaître la paix durable à la fois comme « moyen et fin » du développement durable, et investir, « financièrement et intellectuellement », dans la paix durable à travers le monde: « Sans paix durable, le développement durable est quasiment impossible; nous savons que c’est la vérité. » Dix-sept pays dans le monde sont touchés par des conflits prolongés et deux milliards de personnes vivent dans des nations où sévissent fragilités, conflits et violences, a relevé le Président, soulignant que 95% des réfugiés et des personnes déplacées vivent dans des pays secoués par le même conflit depuis 1991.
Notre propos aujourd’hui, a conclu le Président, est de réfléchir aux moyens de renforcer mutuellement la mise en œuvre du Programme 2030 et les conditions de pérennisation de la paix. M. Thomson s’est félicité de constater que cette manifestation verra la participation du Secrétaire général, des Présidents du Conseil de sécurité, du Conseil économique et social (ECOSOC) et de la Commission de consolidation de la paix. C’est la première fois que les Présidents de ces organes principaux des Nations Unies se réunissent pour voir comment réaliser la paix, assurer la cohérence dans les trois piliers du travail de l’ONU et faire en sorte que nous travaillons sans relâche pour cimenter les fondations nécessaires à la paix durable. Prenons cet exemple de cohérence et de coopération comme point de départ des discussions et imaginons les fruits de cette coopération, à savoir un monde où chacun peut s’épanouir et où « Nous, les peuples » vivons dans la réalité incontestable que nous partageons une seule planète et que pour préserver l’avenir des générations futures, notre planète doit être le lieu d’une paix et d’un développement durables.
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a souligné que ces dernières décennies, la mondialisation et les technologies ont généré des progrès économiques certes mais pas pour tout le monde. Les inégalités restent graves et en hausse: les huit personnes les plus riches du monde ont autant que les 3,6 milliards de personnes les plus pauvres. Les enfants d’Afrique subsaharienne ont 14 fois plus de chance de mourir avant l’âge de 5 ans que les enfants des pays développés. Des statistiques comme celles-ci aggravent le mécontentement et érodent la confiance des gens dans leur gouvernement et dans les organisations internationales, a prévenu le Secrétaire général. La mondialisation est aussi asymétrique: l’argent circule librement, trop librement selon certains, les biens et services aussi mais la liberté de circulation des personnes est toujours réduite. Les employeurs peuvent aller là où les salaires sont les plus bas mais les salariés ne peuvent pas s’installer là où ils sont les plus élevés.
Les effets des changements climatiques, de la croissance démographique, de l’urbanisation rapide et de la dégradation de l’environnement contribuent à une plus grande concurrence dans l’accès aux ressources, ajoutant aux tensions et à l’instabilité. Nous sommes devant un grave échec du développement, a tranché le Secrétaire général, en parlant des communautés, segments de la société voire de pays qui se sentent oubliés et laissés de côté. Le lien entre les économies défaillantes et la fragilité potentielle des sociétés, des institutions et même des États étant établi, nous voyons l’émergence de conflits dévastateurs et la pérennisation d’autres.
C’est la raison pour laquelle, a expliqué le Secrétaire général, je n’ai cessé de souligner la nécessité d’un élan dans la diplomatie, dont la médiation, la négociation et les bons offices. Mais cela ne suffira pas, a-t-il prévenu. Il nous faut une réponse mondiale qui s’attaque aux causes sous-jacentes des conflits et intègre la paix, le développement durable et les droits de l’homme de manière holistique, et ce, de la conception à l’exécution. « Notre priorité est la prévention: la prévention des conflits, des pires effets des catastrophes naturelles et autres menaces humaines à la cohésion et au bien-être des sociétés », a insisté le Secrétaire général.
Les meilleurs outils de la prévention et de la paix durable sont un développement inclusif et durable, a-t-il martelé. Il a jugé important de se rappeler que les liens entre le Programme 2030 et la pérennisation de la paix se trouvent non seulement dans l’objectif 16 dudit Programme mais dans tous les 17 objectifs dont la réalisation serait une contribution « énorme » à la paix durable.
Le Secrétaire général a identifié deux défis majeurs et d’abord, l’éducation qui est la condition préalable à la paix et au développement économique. Un bon système d’éducation peut transformer les sociétés, en particulier celles qui sont affectées par les conflits. L’égalité, le respect et la tolérance enseignés dans une salle de classe ont un impact dans toute la société, l’école étant un symbole puissant de l’investissement dans l’individu.
Le Secrétaire général a ensuite cité l’emploi des jeunes comme l’autre défi majeur, insistant sur un chômage qui prive les jeunes de la chance d’exploiter tout leur potentiel et qui joue un rôle dans l’émergence des conflits et dans la montée du terrorisme international. L’emploi productif et le travail décent sont essentiels à des sociétés stables et sûres, a martelé le Secrétaire général.
Pour accompagner les États Membres, l’ONU doit, elle aussi, être prête à se réformer, a reconnu M. António Guterres qui a identifié trois grands domaines de réforme, citant en premier lieu celui du maintien de la paix. Les opérations de maintien de la paix, qui consomment environ 70% du budget ordinaire de l’ONU, sont pour beaucoup déployées là où il n’y a pas de paix à maintenir, a-t-il observé. Il faut donc, a-t-il préconisé, prioriser la prévention des conflits violents et la pérennisation de la paix. Le Secrétaire général a annoncé que sa Conseillère principale en matière de politique est en train de recenser les différents moyens de prévention dont dispose le système des Nations Unies pour la conception d’une plateforme qui les intégrera.
Il faut ensuite, a-t-il poursuivi, réformer le système des Nations Unies pour le développement et ce faisant, améliorer la coordination et la responsabilisation des actions menées. Il faut mettre l’accent sur la poursuite de résultats collectifs et favoriser des dispositifs de financement qui privilégient l’intégration et la cohérence plutôt que la concurrence entre agences. M. Guterres a promis de présenter les grandes lignes de sa vision d’ici à juin. Enfin, nous devons réformer l’administration de l’ONU, a-t-il dit. Nous butons trop souvent contre nos propres règles et nous n’avons pas mis au point les mécanismes et les procédures dont nous avons besoin. Le Secrétaire général a défendu un dispositif simplifié, décentralisé et souple, ancré dans une culture de transparence et de respect du principe de responsabilité.
Avec ces réformes, il est essentiel de créer une nouvelle génération de partenariats avec les gouvernements, la société civile, les organisations régionales, les institutions financières internationales, les universités et le monde des affaires. L’alignement frappant des objectifs de l’entreprise avec les visées stratégiques de la communauté internationale est déjà apparent dans l’explosion de l’économie verte, s’est réjoui le Secrétaire général qui a cité des estimations qui montrent que les économies et les revenus que l’on tirerait de la mise en œuvre du Programme 2030 se chiffrent à des dizaines de milliers de milliards de dollars.
La dernière partie de l’équation est, a reconnu le Secrétaire général, le financement. Il faut mettre en œuvre le Programme d’action d’Addis-Abeba et aller au-delà. Les pays en développement, s’est-il expliqué, doivent avoir accès aux technologies et aux marchés et ils ont besoin que les pays développés honorent leurs engagements en faveur de l’aide. Les efforts mondiaux doivent aussi appuyer les mécanismes nationaux de financement, y compris la réforme des systèmes fiscaux et la lutte contre les flux financiers illicites. Les institutions financières internationales devraient aider les pays à accéder aux marchés financiers et aux investissements étrangers directs. L’aide publique au développement (APD), comme l’aide humanitaire, doit être allouée stratégiquement conformément à des risques et des besoins clairement identifiés.
Le Programme 2030 et les résolutions sur la paix durable sont notre feuille de route pour un monde plus sûr, plus résilient et plus durable, a conclu le Secrétaire général.
S’exprimant en sa qualité de Présidente du Conseil de sécurité, Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a dressé un bilan particulièrement pessimiste des conséquences des changements climatiques, qui font fondre la calotte glaciaire de manière accélérée. Mais elle a repris à son compte le message d’espoir adressé par les scientifiques qu’elle a rencontrés lors d’une récente réunion en Norvège, admirant leur détermination à trouver des solutions au lieu de se lamenter sur l’aggravation de la situation. C’est d’autant plus nécessaire selon elle, que « l’opportunisme et le populisme sont des forces puissantes aujourd’hui ». « Ensemble, nous pouvons faire une différence », a-t-elle assuré, en affirmant que la première étape, c’est de se doter d’institutions de gouvernance « vigoureuses, participatives et inclusives ».
En tant que représentante d’un important pays donateur, Mme Wallström a souligné l’importance de la coopération au développement. Il faut également s’attaquer, a-t-elle dit, aux causes profondes des conflits en y impliquant des femmes médiatrices. En outre, des partenariats vigoureux permettront de renforcer l’efficacité de l’action des Nations Unies sur le terrain. Enfin, a souligné la Présidente, la prévention est source d’économie. À cet égard, elle s’est félicitée du dénouement pacifique de la situation en Gambie, un exemple du succès que les organisations sous-régionales peuvent assurer. La Suède, est un des plus importants bailleurs de fonds aux fonds, agences et programmes des Nations Unies, a rappelé Mme Wallström, en encourageant l’Organisation à aider les États même si, a-t-elle souligné, la responsabilité première de la mise en œuvre du Programme 2030 incombe aux gouvernements.
« Nous savons que les progrès dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable seront plus difficiles à engranger dans les pays affectés par un conflit », a reconnu M. FREDERICK MUSIIA MAKAMURE SHAVA (Zimbabwe), Président du Conseil économique et social (ECOSOC). Il a estimé que la pérennisation de la paix exigeait une approche intégrée pour remédier aux causes profondes des conflits, telles qu’une gouvernance défaillante, les inégalités économiques ou bien encore une mauvaise gestion des ressources naturelles. Le renforcement des institutions en vue de les rendre plus transparentes, efficaces et responsables est une priorité, a-t-il dit.
Soulignant la nécessité d’une participation accrue des jeunes, le Président a indiqué que le Forum des jeunes de l’ECOSOC qui doit se tenir la semaine prochaine sera l’occasion d’entendre leurs voix s’agissant de la mise en œuvre du Programme 2030. La diversification des économies, par le biais d’un appui au secteur privé et la promotion de l’esprit d’entreprise et une industrialisation durable sont essentielles pour créer les emplois dont le monde a besoin, a poursuivi M. Makamure Shava.
La pérennisation de la paix est cruciale pour parvenir à tous les objectifs de développement durable, tandis que le Programme 2030 représente une occasion unique pour remédier aux causes profondes des conflits et de leur résurgence, a-t-il déclaré. Le Président a rappelé que l’examen de l’architecture de consolidation de la paix a montré l’importance d’une coopération accrue entre l’ECOSOC et la Commission de consolidation de la paix et la centralité du développement au service de la paix. Il a salué la mise en place par le Secrétaire général d’un Comité exécutif visant à augmenter la capacité de l’ONU dans l’intégration des piliers de son mandat.
« Je pense qu’il y a un espace pour que les organes de l’ONU, dans le respect des mandats existants, promeuvent la cohérence et la complémentarité des efforts de paix et de sécurité de l’ONU et des efforts humanitaires, de défense des droits de l’homme, de justice et de développement », a-t-il affirmé. M. Makamure Shava a insisté sur le rôle précieux que pourrait jouer l’ECOSOC dans l’intégration des dimensions politique et opérationnelle de la pérennisation de la paix et du développement durable. « L’ECOSOC pourrait fournir une plateforme de partage des enseignements et des idées en vue d’une meilleure intégration de la consolidation de la paix, de la promotion de la résilience et du développement durable », a-t-il conclu.
Mme JULIENNE LUSENGE, SOFEPADI/Fonds pour les femmes congolaises, a regretté que « la paix durable reste un rêve en République démocratique du Congo, ainsi que dans plusieurs États Membres des Nations Unies », qualifiant d’« atrophiés » les espoirs des communautés aspirant au développement. Pour faire avancer le Programme 2030, elle a jugé primordial de résoudre les causes des conflits telles que l’exploitation illicite des ressources naturelles, l’expropriation des terres, la répartition inéquitable des ressources naturelles, l’impunité et la mauvaise gouvernance. Il faut également respecter les accords de paix et mettre en application les traités et les résolutions sur l’exploitation des minerais. Elle a donné l’exemple de son pays, la République démocratique du Congo, où le peuple ne bénéficie pas des profits exorbitants du coltan qui, au contraire, « nourrit les enfants du voisin ». Elle a proposé de réunir les entreprises de technologie qui exploitent les ressources naturelles sous forme de coalition et de trouver des réponses concrètes pour apporter un réel changement tout en respectant l’écologie. Grâce à ces richesses, a-t-elle avancé, nous avons la possibilité de construire des écoles, des routes, des hôpitaux, et d’apporter de l’eau potable aux populations.
Mme Lusenge a rappelé que des femmes meurent encore chaque jour en donnant la vie par manque de structures et de services. Elle a proposé de mettre en place un mécanisme pour investir dans l’accès à l’eau et aux terres agricoles. Elle a prôné une économie verte fondée sur l’innovation et l’inclusion, sachant que les femmes du monde accomplissent 90% des travaux agricoles alors qu’elles ne possèdent que 2% des terres. « Comment expliquez-vous cela? » a-t-elle lancé, en appelant à aider les femmes, même analphabètes, à se former pour fournir un éclairage solaire à leurs villages, ou pour exploiter l’énergie des rivières et du vent pour éclairer les écoles, les hôpitaux et les maisons, et pour réduire le temps de cuisson sans attraper de maladie pulmonaire. Aidez-nous à former les femmes ingénieurs, a-t-elle aussi demandé, pour qu’elles construisent des infrastructures durables, pas seulement des autoroutes mais aussi des passerelles pour que les femmes puissent apporter leurs marchandises sur le marché. Construisons des villages inclusifs avec des chemins éclairés afin de sécuriser les femmes et les filles. Protégeons nos filles sur le chemin de l’école en leur évitant d’être victimes de violences sexuelles.
Nous avons besoin de femmes pour concevoir l’infrastructure du XXIe siècle, a-t-elle poursuivi en demandant de les considérer comme des partenaires égaux qui apportent des idées et des connaissances précieuses pour l’avancement de tous. « Les ressources les plus inestimables de l’Afrique sont les femmes, toujours actives et innovatrices », a-t-elle estimé en faisant le lien entre la promotion des droits de la femme et l’égalité des sexes avec la prévention des conflits. Les femmes, a-t-elle conclu, doivent pouvoir participer de manière significative aux processus de paix, aux décisions politiques, aux efforts de prévention des conflits et aux stratégies économiques et de développement.
Déclarations
M. MIROSLAV LAJČÁK, Ministre des affaires étrangères et européennes de la Slovaquie, a voulu mettre l’accent sur six éléments et d’abord l’ingrédient essentiel du développement que sont les partenariats efficaces entre tous les États Membres. Il a ensuite, à son tour, prévenu que le développement durable est « impossible » sans une paix durable, avant de prôner une transition « de la culture de la réaction à celle de la prévention ». Il a, à cet égard, félicité le Secrétaire général pour l’accent qu’il place sur les moyens d’anticiper, de prévenir et de répondre plus efficacement aux conflits. Il a aussi défendu une participation accrue des femmes aux processus de paix, et de maintien et de consolidation de la paix. Là où les femmes sont émancipées, il y a moins de chance de connaître la guerre, a affirmé le Ministre, en citant les chiffres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) selon lesquels 14 des 17 derniers pays de l’index de la discrimination sexuelle ont connu un conflit ces deux dernières décennies.
Le Ministre a énuméré comme quatrième élément la nécessité pour les stratégies de prévention des conflits de s’attaquer aux défis du développement. Il a poursuivi sur la nécessité d’un financement et de ressources humaines adéquats, avant d’en venir au sixième élément qui est le lien intrinsèque entre sécurité, développement et état de droit. Le Ministre a ainsi rappelé que son pays est actif depuis longtemps dans les questions liées à la réforme du secteur de la sécurité, par le biais, entre autres, du Groupe d’amis pour cette réforme.
M. SAMURA MATHEW WILSON KAMARA, Ministre des affaires étrangères de la Sierra Leone, a rappelé lui aussi qu’« il n’y a pas de paix sans développement, ni de développement sans paix ». « C’est la raison pour laquelle, alors que nous débutons la mise en œuvre du Programme 2030 sur fond de tensions géopolitiques, nous devons envisager de renforcer mutuellement paix et développement. » Les leçons apprises sont particulièrement importantes, a déclaré le chef de la diplomatie sierra-léonaise, qui a rappelé que son pays avait réussi à surmonter un conflit prolongé et l’épidémie d’Ebola. L’une d’entre elles, c’est qu’il faut impliquer la population dans la reconstruction, car c’est elle qui est le « moteur » du développement, a plaidé le Ministre, avant de défendre des sociétés participatives. M. Kamara a lancé, en conclusion, un appel à la mobilisation de tous les partenaires dans le cadre du « programme commun » visant à éradiquer la pauvreté.
M. AGIO PEREIRA, Ministre d’État et Président du Conseil des ministres du Timor-Leste, a focalisé son intervention sur trois sujets: la consolidation de la paix après un long conflit, la création d’un système de gouvernance démocratique et la sécurisation de la souveraineté territoriale, et l’équité en vertu du droit international.
« Comment construire un pays après 400 ans de domination portugaise suivie d’un quart de siècle d’occupation indonésienne et une vague de violence après l’indépendance en 1975? », a demandé M. Pereira. En commençant par réparer les esprits et panser les blessures. Nos dirigeants, a-t-il expliqué, ont reconnu qu’il était nécessaire de suivre la voie du pardon et de la réconciliation entre les pro-indépendantistes et les pro-intégrationnistes à l’Indonésie, entre les victimes et les auteurs de la violence politique, et entre le Timor-Leste et notre voisin et ancienne puissance occupante, l’Indonésie.
Le Président Xanana Gusmão avait voyagé dans tout le pays pour prêcher le pardon et la réconciliation, expliqué que dans notre lutte pour l’autodétermination, nous sommes les héros et non les victimes et exhorté les Timorais en exile à rentrer à la maison et aider à construire ensemble notre pays.
Nous avons également tendu la main à l’Indonésie qui venait aussi d’émerger de plusieurs décennies de dictature et qui était une jeune démocratie comme le Timor-Leste. Les deux pays doivent se soutenir l’un et l’autre et faire vivre leur démocratie. Aujourd’hui, l’Indonésie et le Timor-Leste sont des amis et des alliés. Les deux pays ont, d’ailleurs, été critiqués par les observateurs étrangers pour avoir privilégié le pardon et la réconciliation au détriment de la justice punitive. Ensemble, ces deux pays illustrent du pouvoir, du respect mutuel pour réaliser la paix. Notre victoire est aussi grande que notre capacité à embrasser nos adversaires.
Cette philosophie de l’unité et de l’inclusion s’étend au gouvernement. Le sixième gouvernement constitutionnel actuel est composé de dirigeants de tous les partis politiques. En outre, un tiers de l’Assemblée est composé de femmes.
Pour articuler notre vision d’un Timor-Leste fort et durable, un plan stratégique de développement a été lancé en 2011 et fait office de feuille de route pour le développement jusqu’en 2030. Ce plan a déjà porté des fruits, le Timor-Leste étant classé septième pays sur 160 pays pour avoir fait le plus de progrès dans la conversion de la croissance économique en bien-être.
La paix et la stabilité sont primordiales, a insisté le Ministre. Les États qui ont été touchés par les conflits ont besoin du soutien et de la compréhension de leurs voisins et amis. Le Timor-Leste fait partie des membres fondateurs du Groupe « g7+ » réunissant quelque 20 pays totalisant environ 300 millions de personnes affectées par les conflits.
« Nous plaidons en faveur d’un nouveau paradigme dans lequel les États fragiles sortant d’un conflit et s’approprient et gèrent le développement et l’aide au développement, a indiqué M. Pereira.
S’agissant de l’objectif de développement 16 sur la paix, la justice et les institutions efficaces, il a déclaré que s’ils ne se concentrent pas sur le renforcement des fondements de la paix, les États fragiles risquent à nouveau d’être menacés et d’être laissés de côté. C’est la raison pour laquelle le Timor-Leste avait milité pour l’objectif de développement durable 16, « le moteur qui alimente en énergie toutes les autres actions ». Le Timor-Leste est un des pays-phares de l’initiative sur l’objectif 16 du Centre de la coopération internationale de l’Université de New York et espère que le partage de bonnes pratiques et le développement d’un corpus de connaissances peuvent contribuer à la mise en œuvre du Programme 2030. Le Ministre a insisté sur la volonté politique et l’engagement.
M. RAFAEL PARDO, Haut-Conseiller pour l’après-conflit, les droits de l’homme et la sécurité de la Colombie, a rappelé que le Président colombien et les FARC ont signé, il y a deux mois, un accord de paix définitif visant à mettre fin à un conflit vieux de 50 ans. C’est un accord global, qui va bien au-delà du désarmement et de la réintégration des combattants et vise une transformation des régions rurales et une reconnaissance des droits des victimes, a-t-il dit. Il a affirmé que cet accord très complet, dont la mise en œuvre exigera cinq amendements à la Constitution et 87 lois, illustre la pertinence du concept de pérennisation de la paix. Les programmes économiques de cet accord seront mis en œuvre tout au long des 15 prochaines années et l’État colombien entend renforcer sa présence dans les zones rurales dès ces 100 prochains jours, a précisé M. Pardo. Enfin, le Haut-Conseiller a salué l’appui important de l’ONU s’agissant du suivi de l’accord, puisque 450 hommes et femmes venant de toute l’Amérique latine en seront chargés.
M. JESUS DERUZA, Conseiller du Président pour le processus de paix aux Philippines, a déclaré que la paix et la sécurité seront toujours en danger tant qu’il n’y aura pas de développement durable. Il a rappelé qu’encore aujourd’hui, certaines régions du sud des Philippines sont en conflit, à cause d’une rébellion née il y a près de 50 ans. Mais, avec l’arrivée au pouvoir du Président Duterte, nous avons entamé de nouvelles négociations avec les rebelles, que le Congrès n’a malheureusement pas entérinées, après avoir échoué à adopter la législation qui aurait permis de mettre en œuvre l’accord « auquel nous sommes parvenus », a-t-il dit. Fort heureusement, grâce au soutien de la Malaisie et des pays donateurs, les rebelles n’ont pas quitté la table des négociations, lesquelles sont entrées dans un nouveau cycle, s’est félicité M. Deruza. Il a ajouté que son pays souhaitait promouvoir la paix et le développement dans le cadre de la stratégie des Nations Unies pour réaliser le Programme 2030
Mme SIMA SAMI BAHOUS (Jordanie) a plaidé, en Syrie, pour un processus politique mené par les Syriens eux-mêmes visant à préserver la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale du pays, à mettre fin aux souffrances et à ramener l’espoir. En Iraq, elle s’est dite encouragée par les gains enregistrés par l’armée iraquienne et les forces de la coalition internationale et a appuyé les efforts de réconciliation. « Pour parvenir à la paix et au développement, nous devons remédier aux causes profondes des conflits », a-t-elle poursuivi, ajoutant que le conflit israélo-palestinien demeurait la question centrale dans la région. La déléguée a estimé que la solution des deux États était la seule solution au conflit et dénoncé toute tentative d’altérer « l’identité historique musulmane, chrétienne et arabe » de Jérusalem. « Le manque de progrès du processus de paix est un cadeau aux radicaux et aux extrémistes », a-t-elle prévenu.
La déléguée a déclaré que le Moyen-Orient avait besoin d’une coopération régionale et internationale renforcée afin de remédier aux défis socioéconomiques qui menacent la paix. Présidente du prochain Sommet de la Ligue arabe, la Jordanie n’épargnera aucun effort pour veiller aux progrès, a-t-elle dit. Elle a souligné l’importance du rôle des femmes et des jeunes dans la lutte contre l’extrémisme violent, les femmes jouant un rôle de premier plan dans le développement des sociétés. Mme Bahous a indiqué que son pays avait joué un rôle de pionnier dans le développement des initiatives visant au dialogue entre les religions, avant de saluer le dernier forum de l’ONU consacré à la lutte contre les discriminations perpétrées contre les musulmans.
Enfin, rappelant que 1,3 million de réfugiés syriens vivent aujourd’hui en Jordanie, elle a indiqué que son pays ne pouvait pas porter ce fardeau seul. « La communauté internationale doit assumer ses responsabilités et aider activement la Jordanie », a conclu la représentante.
M. VALENTIN RYBAKOV, Vice-Ministre des affaires étrangères du Bélarus, a rappelé les mots de son Président, M. Alexander Lukashenko, il y a un an et demi, lors du Sommet des Nations Unies: « le développement durable est impossible sans la paix et la sécurité ». Il a ainsi souligné l’importance du lien entre la paix et le développement durable dont la compréhension gagne du terrain aux Nations Unies, rappelant qu’hier, le Bélarus, le Kazakhstan, le Suriname et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ont organisé une discussion informelle sur les moyens de renforcer l’efficacité du développement durable par une gouvernance responsable, le désarmement et la non-prolifération.
Il convient, selon le Vice-Ministre, d’élaborer des mesures pratiques pour surmonter l’« aliénation mondiale » dans les sphères de la politique et de la sécurité, le Président du Bélarus ayant, à cet égard, proposé l’idée d’un nouveau processus similaire à celui d’Helsinki, il y a plus de 40 ans. De même, est-il nécessaire de créer les conditions d’une coopération économique et commerciale non seulement pour les pays individuellement, mais aussi pour les entités d’intégration régionale. Il a ainsi rappelé le rôle du Bélarus à la tête, cette année, de l’Initiative pour l’Europe centrale dans le domaine de la promotion de la connectivité.
Enfin, M. Rybakov a insisté sur la nécessité d’une approche intégrée du désarmement et de la non-prolifération, ainsi que sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable par l’implication de l’ensemble de la société, des plus hauts responsables aux communautés économiques et scientifiques, en passant par le peuple.
M. YERZHAN ASHIKBAYEV, Vice-Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan, a reconnu lui aussi les liens entre sécurité et développement. Il incombe, selon lui, aux gouvernements de garantir les conditions favorables à la mise en œuvre des objectifs de développement durable au niveau national, en s’efforçant de mettre fin aux situations de conflit. C’est la raison pour laquelle la communauté internationale doit se mobiliser en ce sens sur la base de partenariats. Cependant, le manque de ressources constitue une menace à la réalisation des objectifs, a noté le Vice-Ministre, qui a donc exhorté les États Membres à consacrer 1% du budget de la défense au financement de la feuille de route du Programme 2030. Le Kazakhstan, a-t-il dit, réaffirme pour sa part son engagement en faveur de la bonne gouvernance et de l’état de droit, comme en témoigne la Déclaration du Parlement en faveur du Programme 2030.
M. JEAN-MARIE LE GUEN, Secrétaire d’État chargé du développement et de la coopération de la France, a appelé le système onusien à rechercher de plus grandes synergies dans son action. Chacun sent bien le besoin d’une nouvelle approche, a-t-il dit. « Alors qu’il est de bon ton de critiquer l’ONU », il a loué la détermination de l’Organisation à parvenir aux accords majeurs qui ont été récemment signés, tels que le Programme 2030 ou l’Accord de Paris sur les changements climatiques. « La France croit en l’ONU », a-t-il souligné, estimant que, malgré certains échecs, le Conseil de sécurité avait réussi à régler de nombreux conflits.
« Plus d’unité dans l’action est nécessaire », a poursuivi M. Le Guen, en précisant que le système de l’ONU, certes très compétent, demeurait cloisonné. Il a approuvé les efforts de réforme et salué la mise en place d’un Comité exécutif visant à améliorer l’efficacité de l’action de l’ONU. M. Le Guen a demandé une coopération plus étroite entre agences de l’ONU, ainsi qu’un meilleur suivi de l’action de l’ONU. De notre côté, nous devons garantir un financement plus prévisible, a-t-il reconnu.
Nous devons être plus à l’écoute des acteurs sur le terrain, a poursuivi le Secrétaire d’État qui a défendu, à cette fin, un rôle accru des bureaux régionaux de l’ONU, des configurations des pays de la Commission de consolidation de la paix et des coordonnateurs. Enfin, nous devons disposer d’une information plus pertinente, a affirmé M. Le Guen. Nous sommes soit surinformés, soit sous-informés, alors qu’il nous faut aller à l’essentiel et évaluer nos efforts, a-t-il conclu.
Mme PASCALE BAERISWYL, Secrétaire d’État aux affaires étrangères de la Suisse, a estimé que, pour assurer une mise en œuvre efficace du Programme 2030 et des résolutions sur la pérennisation de la paix, l’accent doit être mis sur la prévention. Selon elle, la communauté internationale dispose d’excellents instruments à cet égard, comme le Programme commun du Programme des Nations Unies pour le développement et du Département des affaires politiques (PNUD-DAP) sur le renforcement des capacités nationales de prévention des conflits, le Fonds pour la consolidation de la paix, le Fonds d’affectation spéciale ONU-Banque mondiale, l’initiative « Les droits de l’homme avant tout », et les entités du Département des affaires politiques actives dans le domaine de la médiation et des bons offices. De même, a fait observer Mme Baeriswyl, le travail effectué dans le cadre du Plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent revêt une importance particulière.
En outre, la promotion et la protection des droits humains sont un moyen de prévention très efficace et la garantie d’un développement pacifique, équitable et inclusif. Pour cette raison, la Suisse a lancé l’appel du 13 juin pour que les droits de l’homme figurent au cœur de la prévention des conflits, notamment au sein du système onusien. Enfin, la Secrétaire d’État s’est dite convaincue que, pour progresser, l’engagement inclusif et transparent de la société civile est crucial. Faute d’une mobilisation large et d’une approche allant de la base au sommet, nos efforts en faveur du développement durable et de la pérennisation de la paix ne connaîtront pas le succès, a prévenu Mme Baeriswyl. C’est la raison pour laquelle nous devons soutenir les ONG engagées dans les domaines de la paix, des droits humains et du développement durable, a-t-elle ajouté.
Mme TONE SKOGEN, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a d’abord mis l’accent sur l’appropriation nationale du développement durable et donc la volonté politique. Là où il y a de la volonté, les leaders politiques peuvent accomplir de grandes choses mais l’appropriation nationale ne s’arrête pas seulement aux gouvernements. Pour être durables, la paix et le développement doivent être inclusifs et l’inclusion veut dire genre, âge, culture, ethnicité, langue et religion. L’inclusion c’est reconnaître l’égalité des droits de tous les êtres humains. L’inclusion, élargit la base, élimine les angles morts et fortifie les fondations de l’avenir que nous voulons. La Vice-Ministre a cité comme exemple l’accord conclu entre le Gouvernement de la Colombie et les FARC, avec l’aide de son pays et de Cuba, lequel tient compte de la population et ouvre la voie au développement durable des zones rurales qui ont le plus souffert du conflit.
Mme Skogen a souligné la grande responsabilité qui incombe à la communauté internationale, souhaitant que l’ONU soit mieux armée pour travailler sur ses piliers. S’attaquer dès les prémices aux violations des droits de l’homme peut éviter l’escalade de la violence et créer un environnement propice au développement durable et pacifique, ce qui requiert la mise en place de partenariats solides avec d’autres acteurs internationaux et régionaux. Elle a voulu que les activités opérationnelles du système de l’ONU dans les pays touchés par les crises prennent la direction du cadre « un pays– une ONU » avec des objectifs communs et une planification stratégique ainsi qu’une claire répartition des responsabilités.
M. PAUL TEESALU (Estonie) a déclaré que les Nations Unies doivent s’acquitter de leurs « fonctions de base » de manière plus efficace et plus cohérente. Aussi s’est-il félicité des projets de réformes annoncés par le Secrétaire général de l’ONU. Paix, sécurité, développement et droits de l’homme se renforcent mutuellement, a-t-il rappelé à la suite de nombreux orateurs. Le représentant a ensuite plaidé en faveur d’un état de droit vigoureux, qui garantisse la liberté d’opinion et d’expression. Pour sa délégation, il incombe à chaque pays de redoubler d’efforts pour garantir la réalisation du Programme 2030. Mais, face à une pénurie toujours plus grande des ressources, une gestion efficace doit être privilégiée, a insisté l’Estonie, en donnant l’assurance qu’elle mettrait tout en œuvre pour réaliser les objectifs de développement durable. Elle a salué en conclusion le rôle joué par le Fonds pour la consolidation de la paix
Mme SUJATA MEHTA (Inde) a indiqué que le monde était désormais « un village global », caractérisé tant par l’interdépendance des économies que par la montée du terrorisme. Il n’y a pas de paix durable sans développement, a-t-elle souligné à son tour, en ajoutant que cette conception avait présidé à l’élaboration du Programme 2030 et de l’Accord de Paris sur les changements climatiques. Elle a mis en garde contre toute tentative de revenir sur ces accords. Mme Mehta a ensuite déploré l’insuffisance des ressources consacrées à la consolidation de la paix et les lacunes dans les mécanismes de financement internationaux. « Nous avons besoin d’une gouvernance plus équitable », a-t-elle conclu.
Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. HORACIO SEVILLA BORJA (Équateur) a déclaré que si l’année 2016 fut la première année de la mise en œuvre du Programme 2030, l’année 2017 est celle du cinquantième anniversaire de la Déclaration d’Alger sur le développement socioéconomique adoptée par le Groupe des 77 et la Chine. Cet anniversaire offre l’occasion de demander aux États membres du Groupe de renouveler leurs engagements économiques et sociaux. Il offre également l’occasion de réaffirmer le principe de la responsabilité commune et différenciée et l’objectif central qu’est l’éradication de la pauvreté, à savoir la condition préalable de la réalisation du Programme 2030.
La communauté internationale, a poursuivi le représentant, doit dûment tenir compte de la situation des pays les moins avancés(PMA), des petits États insulaires en développement (PEID), des pays à revenu intermédiaire, des pays sortant d’un conflit et de ceux qui vivent sous domination coloniale. La mise en œuvre du Programme 2030 exige en effet une alliance mondiale renouvelée autour des 17 objectifs de développement durable et un système international juste et crédible.
Au nom du Réseau Sécurité humaine, M. ANDREJ LOGAR (Slovénie) a rappelé que ce Réseau promeut une approche holistique centrée sur la personne, complétant la notion plus traditionnelle de la sécurité. Cette approche est le meilleur moyen de créer des synergies entre les trois piliers de l’ONU, a-t-il estimé, se félicitant que le Programme 2030 intègre la paix, le développement et les droits de l’homme dans une relation de renforcement mutuel. Pour atteindre le développement et la paix durables, le monde a besoin de partenariats inclusifs, a-t-il souligné, expliquant que cela permet d’éliminer les barrières et de travailler ensemble, seul moyen de répondre de façon complète aux défis globaux. Il a lancé un appel en faveur de l’approche fondée sur la sécurité humaine pour relever les défis.
M. ADAM ZOLTAN KOVACS, Sous-Secrétaire d’État à la coopération internationale de la Hongrie, a dit vouloir contribuer à la concrétisation de la feuille de route ambitieuse que constitue le Programme 2030. Il a mentionné le deuxième Sommet de l’eau qui vient de se tenir à Budapest. La Hongrie est également comodératrice du dialogue visant à améliorer la coordination au sein des Nations Unies s’agissant des questions liées à l’eau. Nous sommes impatients de faire avancer la discussion sur ces questions, a dit le Sous-Secrétaire d’État qui n’a pas manqué de rappeler que le Forum de Budapest pour les droits de l’homme s’est dûment tenu l’an dernier. La Hongrie entend bien intégrer ces questions dans toutes ses politiques, a-t-il assuré.
M. PLAMEN BONCHEV (Bulgarie) a voulu que l’on accorde plus d’attention à la prévention et au développement, en cherchant une plus grande synergie entre le Programme 2030 et le concept de paix durable. À cet égard, la médiation et les bons offices des Nations Unies sont essentiels et la Bulgarie participe, d’ailleurs, au Groupe des amis de la médiation. Les liens entre les conflits, la pauvreté, les inégalités, les droits de l’homme et la destruction de l’environnement ne peuvent être ignorés, a insisté le représentant. La pression sur l’environnement, l’impact négatif des changements climatiques et la surexploitation des ressources naturelles aggravent et prolongent les conflits. La pression démographique et l’urbanisation, l’accès inégal, voire l’absence d’accès, aux ressources naturelles, y compris la terre, ont et continueront d’avoir des effets profonds. La gestion durable des ressources naturelles peut être un atout et contribuer à la consolidation de sociétés pacifiques et résilientes. À cet égard, la mise en œuvre du Programme 2030 pourrait être un outil puissant de prévention, a conclu le représentant, sans oublier de s’attarder sur les efforts de son gouvernement.
M. WERNER BAUWENS (Belgique) a déclaré que les synergies entre le Programme 2030 et le cadre de « pérennisation de la paix » sont manifestes. Chacun reconnaît la nécessité de s’attaquer aux causes profondes des conflits. Chacun rejette la fragmentation du système onusien. Chacun prône une approche décloisonnée qui intègre les trois piliers de l’action. À cela s’ajoute, de manière plus fondamentale encore, que la réalisation des objectifs de développement durable offre le plus puissant des instruments de prévention des conflits.
Le représentant a souligné quelques aspects particuliers, notamment l’importance de la justice qui est validée dans l’objectif 16, en tant que facteur de prévention des conflits. À cet égard, la Belgique accorde une attention particulière à la lutte contre l’impunité et c’est pourquoi, elle a salué la résolution créant un mécanisme d’enquête impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011.
Un autre point est l’usage de la médiation pour favoriser l’émergence de « sociétés pacifiques ». Le recours à la médiation en tant qu’instrument de prévention et de résolution des conflits doit devenir plus systématique. La Belgique soutient pleinement l’action du nouveau Secrétaire général et plaide pour l’accroissement des capacités des organisations régionales dans ce domaine. Il faut impliquer davantage de femmes dans les processus de médiation et de résolutions des conflits, a insisté le représentant, en soulignant que la loi belge conditionne l’aide financière publique aux processus de médiation à la présence d’au moins 50% de femmes dans les structures de médiation. La Belgique organisera le 14 février prochain, à Bruxelles, une conférence internationale consacrée à la médiation, mettant l’accent sur l’échange d’expériences entre les praticiens de la médiation.
Avant de terminer, il a indiqué que les pays les moins avancés (PMA) méritent une attention particulière car ce sont les plus vulnérables ou les plus fragiles. Il a aussi souligné l’importance capitale de la jeunesse car elle joue un rôle pivot pour le succès du Programme 2030 et pour pérenniser la paix. Elle a droit à l’éducation et à un travail décent. Le représentant a réservé son dernier mot à la nécessité pour l’ONU de trouver un forum pour traiter de la question de l’environnement.
La représentante de l’Italie a rappelé que son pays avait, le mois dernier, plaidé auprès du Conseil de sécurité pour la réforme de l’architecture du maintien de la paix de l’ONU. Le Programme 2030 est une occasion unique de lutter sur le plan global contre les causes de l’instabilité, a-t-elle estimé. L’Italie, a-t-elle indiqué, s’est jointe à ses partenaires de la Méditerranée et de l’Afrique pour promouvoir l’accès à la justice, la redevabilité et la transparence, et l’aide aux secteurs agricole et industriel. La représentante a ainsi parlé de la première Conférence Italie-Afrique, qui s’est tenue à Rome l’an dernier. Elle a conclu en appelant au renforcement de la lutte contre les changements climatiques.
Le représentant de l’Égypte a prôné des politiques plus cohérentes pour parvenir à un développement et à une paix durables et recommandé une approche novatrice pour faire face aux différents défis rencontrés sur la voie de la paix et du développement. Il a insisté sur la primauté du droit et des bases institutionnelles solides. Il a aussi insisté sur l’appropriation nationale du développement durable, pour tenir compte de la réalité de chaque pays dont la priorité doit être l’éradication de la pauvreté. Le représentant s’est dit particulièrement attaché à l’objectif 17 du Programme 2030 sur les partenariats, élément crucial du succès qui dépend aussi du degré d’implication des femmes et des jeunes.
M. BUHRAN GAFOOR (Singapour) a souligné la nécessité de « maximiser » les synergies entre le Programme 2030 et la pérennisation de la paix au niveau national. Les gouvernements ont le devoir de protéger leurs peuples, tandis que la mise en œuvre du Programme peut renforcer l’inclusion sociale et la résilience, a-t-il dit. Mentionnant l’objectif 16 relatif à l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes, il a souligné que des institutions publiques fortes sont des éléments essentiels à une société pacifique. Le délégué a insisté sur le rôle des organisations régionales, en particulier l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est(ASEAN) qui a veillé à ce que la région se concentre sur la coopération et le développement plutôt que sur des « relations de voisinage basées sur la mendicité ». M. Gafoor a appelé l’ONU à appuyer les initiatives des organisations régionales et prévenu que la pérennisation de la paix et le développement durable exigent un système international robuste, basé sur des normes « plutôt que sur la loi du plus fort ». « Nous avons besoin d’un système international basé sur le principe de souveraineté et non pas un système où les grands pays imposent leur volonté aux petits. »
Le représentant a insisté sur le rôle critique de l’ONU dans la défense d’un tel système multilatéral et appelé l’Organisation à travailler de manière plus coordonnée. M. Gafoor a salué, à cet égard, la mise en place d’un comité exécutif pour la recherche de synergies au sein du système onusien, ainsi que les mesures prises par le Président de l’Assemblée générale pour une convergence des intérêts entre les Présidents de l’ECOSOC et du Conseil de sécurité
Mme GILIAN BIRD (Australie) a déclaré qu’il faut d’abord améliorer la coordination et la cohérence sur les trois piliers. Une planification intégrée des piliers paix et sécurité, droits de l’homme et développement est essentielle pour réaliser une paix durable. La représentante s’est, par exemple, réjouie des efforts du Secrétaire général contre la fragmentation et pour rapprocher les Départements des affaires politiques et des opérations de maintien de la paix. Elle a estimé que ce dernier et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) devraient renforcer leur cohérence et mettre en place des programmes communs.
La représentante a aussi insisté sur de nouvelles approches de financement, s’agissant en particulier de la prévention des conflits et de la consolidation de la paix. Il faut rétablir l’équilibre entre le financement de la prévention, qui est tout à fait rentable, et celui du maintien de la paix, qui est on ne peut plus onéreux. La représentante a dit attendre avec intérêt le rapport du Secrétaire général sur la question. Elle a conclu sur la nécessité d’évaluer les succès et les échecs. Nous devons veiller à ce que la mise en œuvre de l’agenda de la paix soit évaluée comme le sont les objectifs de développement durable ou les activités opérationnelles du système de l’ONU.
M. NAWAF SALAM (Liban) a dit que pour atténuer les risques et la récurrence des conflits, il faudrait des efforts de tous et à tous les niveaux pour éradiquer la pauvreté, réduire les inégalités, autonomiser les femmes et les filles, respecter les droits de l’homme, lutter contre le chômage, faciliter l’accès universel à l’éducation et aux soins de santé et assurer une répartition équitable et universelle des revenus tirés de l’exploitation des ressources naturelles. À cet égard, le représentant a souligné la nécessité de renforcer la coordination et la cohérence entre les activités de développement, de consolidation de la paix et humanitaires menées par dans les pays par les entités des Nations Unies. Le Gouvernement du Liban et le système des Nations Unies ont signé le cadre stratégique 2017-2020 qui reconnaît que l’ONU a besoin de suivre l’approche « Tout le Liban » intégrant l’expertise, les capacités et les ressources des Nations Unies pour aider le Gouvernement à répondre à ses priorités et à gérer les défis sécuritaire, politique, de gouvernance et socioéconomique, y compris l’impact du conflit en Syrie et l’arrivée massive des réfugiés.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a prôné l’édification de sociétés pacifiques et inclusives pour le développement durable, conformément à l’objectif 16 que le Pérou a eu l’honneur de faciliter, a-t-il précisé. Il a demandé un engagement fort contre les facteurs de la violence que sont la corruption et les inégalités, et pour la redevabilité. S’agissant de la gestion durable de l’eau pour tous, couverte par l’objectif 6, le représentant a tenu à souligner la complexité de la question et son caractère « très actuel ». Il a appelé le système de l’ONU à plus de cohérence et à une bonne prise en compte des priorités nationales lesquelles nécessitent des approches intégrées.
Le représentant de l’Irlande a fait appel à la volonté politique, à la vision et au courage des États pour mettre en œuvre le Programme 2030. Se félicitant de ce que le Secrétaire général a déjà accompli dès son entrée en fonctions, le représentant a dit avoir surtout retenu les propos sur la prévention des conflits, laquelle doit se fonder sur une approche globale s’appuyant sur tous les piliers « paix et sécurité, droits de l’homme et développement durable ». Le concept de paix durable est déjà contenu dans le Programme 2030, a rappelé le représentant, et sa synergie avec les objectifs de développement pourrait faire l’objet des discussions au prochain Forum politique de haut niveau. En attendant, le représentant a prévenu que ni le Programme 2030, ni la paix durable ne pourra être mise en œuvre par des structures qui perpétuent la pratique des silos comme les fonds et programmes des Nations Unies. Il faut s’inspirer du travail des équipes de pays, de l’examen quadriennal des activités opérationnelles de développement, des conseillers du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du Département des affaires politiques, des acteurs de la société civile, des femmes et des jeunes, a-t-il préconisé. S’agissant du financement, le représentant a dit privilégier le Fond pour la consolidation de la paix ou l’Instrument mondial d’accélération de l’action en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité, et de l’aide humanitaire, qui évitent les écueils du financement en silos.
Le représentant du Costa Rica a dit qu’il était nécessaire, pour la mise en œuvre du Programme 2030, que l’humanité soit consciente des valeurs de la paix et à cet égard, le représentant a souligné l’importance du financement pour réaliser tous les objectifs de développement durable. Les pays doivent réduire leurs budgets militaires et investir dans l’éducation, la santé et le développement durable. Pour construire une paix durable, le Conseil de sécurité peut être un outil important, a aussi estimé le représentant.
M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a souhaité que les outils existants soient pleinement utilisés afin de véritablement pérenniser la consolidation de la paix et la prévention des conflits. Les objectifs de développement durable, centrés sur l’être humain, reconnaissent les causes des conflits, ainsi que les ingrédients nécessaires à l’instauration de la paix, a-t-il déclaré. Il a souligné le rôle essentiel de systèmes politiques représentatifs, inclusifs et comptables de leurs actes. Les sociétés les plus inclusives politiquement sont les plus pacifiques, a noté M. Rycroft. Il a estimé que la réalisation des objectifs de développement durable exigeait une approche inclusive et devait concerner non seulement les gouvernements, mais aussi les citoyens que ces gouvernements servent. Le délégué a souhaité, à cet égard, que davantage d’efforts soient faits au sein du système des Nations Unies, y compris le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix. Les gouvernements doivent prendre leur part dans le règlement des défis les plus urgents, a conclu le représentant.
Alors que nous continuons à être les témoins d’attaques terroristes à Alep, Berlin, Paris, Istanbul et Tel-Aviv, il devient douloureusement évident que les nobles objectifs du Programme 2030 resteront hors d’atteinte, tant que les défis de la paix et de la sécurité, nationaux comme internationaux, ne seront pas réglés, a affirmé M. DAVID ROET (Israël). Il a estimé que les groupes islamistes radicaux tels que le Hamas, le Hezbollah, Al-Qaida, Daech et Boko Haram représentaient les plus graves menaces à la paix et à la sécurité. La bataille qui est menée contre ces groupes est une bataille entre la tyrannie et la liberté, a-t-il insisté.
Parmi les fondations de sociétés stables et pacifiques, M. Roet a identifié des parlements forts, des juges indépendants, une presse libre et une société civile dynamique. Les préoccupations de certains, qui pensent que la redevabilité est synonyme d’ingérence, doivent être dûment prises en compte, sans saper néanmoins nos efforts visant à promouvoir des sociétés pacifiques, a déclaré le délégué. M. Roet a ensuite affirmé que l’égale participation des femmes à la prévention et à la résolution des conflits était cruciale pour un avenir plus sûr et prospère. L’autonomisation des femmes est un élément central de la politique d’aide d’Israël, a-t-il affirmé, mentionnant les ateliers organisés en Afrique par l’Agence israélienne de la coopération internationale et ONU-Femmes. En conclusion, M. Roet a fait siens ces mots de Martin Luther King: le changement n’arrive pas de manière inévitable mais résulte d’une lutte continue.
Le représentant la République de Moldova a rappelé qu’il y a 10 jours, lors du Dialogue ministériel du Conseil de sécurité sur la prévention des conflits, sa délégation avait mentionné un conflit gelé, en Transnistrie, qui entrave le développement de son pays. Il a expliqué que, dans cette région, son gouvernement conjugue des initiatives de développement et de paix. Il a cité notamment un programme d’appui aux mesures de confiance, mis en place en partenariat avec l’Union européenne et le PNUD pour assurer l’intégration économique des communautés des deux rives et améliorer les infrastructures. Il a confirmé l’idée qu’il n’y a pas de développement sans paix et sécurité et inversement. C’est à nous, États Membres, et au système des Nations Unies qu’il incombe de mettre en œuvre les documents qui visent ces objectifs.
M. ION JINGA (Roumanie) a voulu que soient rétablies la confiance et la solidarité dans l’ordre mondial. Il a remarqué que l’ONU a de nombreux outils à sa disposition pour la pérennisation de la paix et souligné l’importance de l’appropriation nationale en la matière. La Roumanie, a-t-il dit, apporte son aide à certains pays, dans le domaine de l’éducation par exemple, sans oublier les contingents qu’elle a déployés dans 10 opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales. Le représentant s’est prononcé en faveur de synergies entre le Secrétaire général et l’Assemblée générale pour mettre en œuvre les objectifs de paix
La représentante du Panama a rappelé que le développement doit être participatif et inclusif pour assurer une paix durable. Il faut ce faisant harmoniser les objectifs socioéconomiques et environnementaux et s’attaquer au chômage et aux inégalités. La représentante a insisté sur une bonne collaboration entre l’ECOSOC et la Commission de la consolidation de la paix. Nous avons aussi besoin d’un Conseil de sécurité moderne et représentatif qui travaille étroitement avec le Conseil des droits de l’homme », a ajouté le représentant qui n’a pas oublié l’importance d’investir dans les jeunes et les filles pour pérenniser la paix.
Le représentant de la Chine a insisté sur le fait que pour mettre en œuvre le Programme 2030, il faut une forte coopération internationale, le respect du droit international et le renoncement aux politiques de deux poids, deux mesures. Un développement équilibré est la priorité de la Chine, a assuré le représentant pour lequel la mise en œuvre du Programme 2030 implique l’éradication de la pauvreté et la lutte contre les autres causes profondes des conflits dont les changements climatiques.
M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) a rappelé l’importance de la résolution 2282(2016) du Conseil de sécurité, de la résolution 70/262 de l’Assemblée générale, du rapport sur les opérations de maintien de la paix, de l’étude globale de la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité et de la réunion conjointe entre l’ECOSOC et la Commission de consolidation de la paix (CCP) pour stimuler une réflexion féconde sur les liens entre le Programme 2030 et le concept de paix durable. Il s’est félicité de ce que le Programme reconnaisse dans son objectif 16 la nécessité de promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes. Le représentant a rappelé qu’en 2015 l’ensemble des conflits dans le monde a couté 14 300 milliards de dollars, soit l’équivalent de 13,4% du PNB mondial.
La représentante des États-Unis a regretté le caractère compartimenté du travail des fonds et programmes des Nations Unies même si, à bien des égards, leurs personnels collaborent. Il faut faire tomber les barrières pour assurer une meilleure collaboration, a-t-elle insisté, en appelant à une refonte du système qui puiserait dans les talents et les ressources existantes. Elle a dit apprécier, à cet égard, le regroupement des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales. L’ONU devrait privilégier les stratégies communes. Le Libéria, a fait observer la représentante, sera bientôt un exemple concret du développement et de paix durables. La Mission en Sierra Leone est un autre exemple, a-t-elle dit en expliquant qu’on était passé d’une mission de maintien de la paix à une équipe de pays des Nations Unies. Elle a insisté sur cette collaboration au sein du système de l’ONU qui permet de relever, ensemble, tous les défis.
Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a voulu voir une culture de tolérance et de paix. Les efforts de paix et de développement durables resteront entravés si on continue d’appliquer des politiques de deux poids deux mesures et des mesures unilatérales, a-t-elle prévenu. Elle a souhaité que l’ONU accompagne les efforts des gouvernements, en vue d’un ordre international qui profite à tous. Elle a réaffirmé la volonté de Cuba d’instaurer une paix durable et demandé que l’on soutienne davantage la Commission de consolidation de la paix.
M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a déclaré que l’édification de sociétés pacifiques était au cœur de la politique de réconciliation de la Géorgie vis-à-vis de la population des régions occupées d’Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud. Il a indiqué que son gouvernement n’épargnait aucun effort pour que les services fournis par les institutions publiques, tels que les soins de santé, l’éducation et l’inscription au registre d’état civil, soient accessibles pour les personnes vivant de l’autre côté de la ligne d’occupation. « Toutefois, cela est largement entravé par les forces occupantes russes qui imposent de sévères restrictions à la liberté de mouvement. » Le représentant s’est dit vivement préoccupé par les discriminations continues frappant la population ethniquement géorgienne et a souligné la nécessité d’assurer un suivi international indépendant de la situation des droits de l’homme. Mon gouvernement est attaché à une plus grande inclusion des femmes dans les négociations internationales et à la nomination d’un plus grand nombre d’entre elles à des postes de haut niveau, a affirmé le représentant. Il a fait remarquer que, pour la première fois, le poste de Ministre d’État à la réconciliation et à l’égalité civique était occupé par une femme. Enfin, M. Imnadze a insisté sur les efforts de son pays, reconnus au sein de diverses instances internationales, pour promouvoir l’administration en ligne.
M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a déclaré que la notion de paix durable est fondée sur une attention accrue à la prévention des conflits par des processus participatifs nationaux. L’éradication de la pauvreté, des inégalités, des discriminations et autres facteurs de conflit reste fondamentale pour la construction de sociétés pacifiques, justes et inclusives. Ces efforts au niveau national mettent du temps à porter leurs fruits, et sont souvent influencés par les grandes tendances mondiales comme le terrorisme et les changements climatiques. La communauté internationale doit faire preuve de patience et d’engagement pour permettre à de tels efforts de donner les résultats attendus.
Sur cette toile de fond, le représentant a identifié trois priorités: poursuivre les trois réformes de l’Organisation identifiées par le Secrétaire général, ainsi que la réforme du Conseil de sécurité, qui est très attendue, pour que les Nations Unies soient adaptées à leurs objectifs et réduisent les cloisonnements. Il faut aussi assurer un flux de ressources amélioré, souple et prévisible pour permettre à l’ONU de s’acquitter de ses mandats en améliorant la coordination, la cohérence et la hiérarchisation, et renforcer la redevabilité et la transparence du travail des Nations Unies au niveau des pays. Il faut enfin assurer l’harmonisation et l’alignement des efforts de l’ONU avec les priorités nationales, sans oublier l’aide au renforcement des institutions.
Le représentant de l’Union européenne, a souligné que le meilleur outil de prévention des conflits est le respect de l’état de droit, de la démocratie et des droits de l’homme. À ce jour, les pays fragiles ou qui sortent d’un conflit bénéficient de plus de la moitié de l’aide de l’Union européenne, a précisé le délégué. L’Union européenne, a-t-il rappelé, travaille sur le renforcement des institutions publiques, comme en atteste sa coopération avec l’Union africaine. Le représentant a conclu la nécessité d’une meilleure coordination entre les responsables de développement et ceux de l’action humanitaire au sein du système de l’ONU. Il faut également redoubler d’efforts dans le domaine de la diplomatie préventive.
Le représentant du Nicaragua a souhaité voir de nouvelles relations basées sur l’entente, la paix, la souveraineté, le renoncement à l’ingérence et le respect de la Charte des Nations Unies. La paix et le développement durables se renforcent mutuellement, a-t-il affirmé en demandant de préserver les grands programmes internationaux comme RIO+20 et le Programme 2030. Il a demandé aux pays développés de respecter leur engagement à consacrer 0,7% de leur PNB à l’aide publique au développement (APD) et à mobiliser des ressources nouvelles et prévisibles. Il aussi demandé un effort dans l’allègement et la restructuration de la dette et dans la lutte contre les paradis fiscaux. Le représentant a conclu en plaidant pour que les femmes se voient doter de davantage de pouvoirs.
Le représentant de la Fédération de Russie s’est félicité du nombre de participants à ce débat, preuve de la mobilisation générale pour relever les défis actuels. Il a cependant prévenu qu’une harmonisation à outrance des différentes questions représente un écueil. Il faut bien comprendre tant les interdépendances entre les questions que leurs différences. La notion de pérennisation de la paix émane d’une résolution adoptée en avril 2016, a-t-il rappelé. Le développement ne peut pas garantir la paix, et la paix ne peut pas garantir le développement. Il faut parler de l’interconnexion « avec prudence » et obtenir des organes principaux des Nations Unies qu’ils jouent leurs rôles, en tenant compte de leurs compétences différentes.
M. ROHAN PERERA (Sri Lanka) a indiqué que dans son pays l’année 2017 a été proclamée « Année de la réduction de la pauvreté », et que le 2 janvier dernier, la Président a lancé la « Vision pour l’ère durable » ou le programme pour la construction d’un pays aligné avec le Programme 2030. Premier pays de la région d’Asie Pacifique à s’être doté d’un Ministère du développement durable, le Sri Lanka est un endroit unique pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable et transformer le monde. La loi sur le développement durable vient d’être déposée au Parlement. Le pays reconnaît que le succès dépendra de la consolidation de la paix. Le représentant a conclu en énumérant les mesures prises par son gouvernement.
La représentante du Kirghizistan a dit que pour prévenir les conflits, il est important de discuter des liens entre le Programme 2030 et la consolidation de la paix. Plus particulièrement, a ajouté la représentante, il faut investir dans l’éducation pour rendre chaque personne capable de contribuer au développement du pays et de développer son potentiel spirituel. Au Kirghizistan, l’éducation primaire est obligatoire et accessible à tous. Des mesures spécifiques pour améliorer la qualité de l’éducation et l’alphabétisation des adultes ont été prises et pour ce qui est de l’aspect spirituel, la culture et la morale ont été érigées au rang de priorités. Le Président du Kirghizistan a d’ailleurs proposé l’organisation de championnats du monde des peuples nomades pour favoriser la diversité et la culture de paix.
Le représentant de l’Afghanistan a espéré que ce dialogue marquerait le début d’une nouvelle phase dans les travaux des Nations Unies. Il s’est dit convaincu de la nécessité de lier la pérennisation de la paix aux objectifs de développement durable. Il y a deux semaines, a-t-il rappelé, les Taliban ont lancé de multiples attaques, provoquant des victimes et des dégâts en nombre. Ce genre de situations montre que pérenniser la paix est une entreprise complexe qui exige des efforts sur plusieurs fronts, a dit le représentant. Soulignant les progrès accomplis par son pays au cours des 16 dernières années, il a indiqué que l’Afghanistan se soumettrait à l’examen volontaire cette année. Le pays reste résilient face au terrorisme mais il paye un lourd tribut, a expliqué le représentant. L’adoption de l’objectif 16 de développement durable et celle d’une résolution conjointe du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale sur la pérennisation de la paix, ont été importantes pour le pays, a-t-il témoigné.
Le représentant du Maroc a exprimé sa conviction que la paix, le développement et les droits de l’homme sont liés. La réalisation des objectifs de développement durable ne peut se faire que dans des pays qui respectent les droits de l’homme, a-t-il estimé. Mais il faut aussi reconnaître qu’une gouvernance nationale qui favorise le développement durable et la pérennisation de la paix ne peut réussir que si elle est appuyée par une gouvernance internationale respectueuse des choix politiques et économiques des pays. Le représentant a considéré que la coopération et l’entente entre les pays au niveau régional est un outil puissant pour relever les défis. Le Maroc a mis en place un modèle de coopération Sud-Sud avec des pays africains, a-t-il dit en parlant notamment de l’aide technique et de la lutte contre l’extrémisme.
M. MAX HUFANEN RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a fait remarquer que les fondements solides pour une paix et un développement durables ont déjà été posés par la Charte des Nations Unies et par de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale. Il nous faut maintenant, de toute urgence, faire preuve d’une volonté politique forte pour voir un changement de paradigme, en suivant une approche complète permettant d’atteindre la paix et la sécurité, le développement durable et la protection des droits de l’homme. Il faut, a-t-il précisé, mettre en œuvre des réformes pour adapter les structures, pratiques et politiques qui sont dépassées. Il faut également améliorer la cohérence et les synergies entre les travaux menés aux Nations Unies en faveur de la paix, des droits de l’homme et du développement durable.
La Papouasie-Nouvelle-Guinée est favorable à une réforme du système des Nations Unies et en particulier du Conseil de sécurité, a-t-il rappelé en plaidant en faveur d’une représentation juste et équitable afin de mieux gérer les défis. Il a aussi vanté les mérites de l’appropriation nationale pour traiter des causes profondes des conflits et faire avancer les droits de l’homme et le développement durable. Inquiet, par ailleurs, des effets des changements climatiques, le représentant a appelé à les combattre et à protéger les océans et les mers pour les futures générations.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a insisté sur l’importance des objectifs 5 et 16 du Programme 2030 relatifs, respectivement, à l’égalité entre les sexes et à la promotion de sociétés inclusives. Les femmes sont des agents puissants du changement, a-t-il déclaré. « Les statistiques montrent que la participation des femmes prolonge la durée de vie d’un accord de paix. » Le représentant a, en conséquence, salué l’engagement du Secrétaire général d’augmenter le nombre de femmes envoyées et représentantes spéciales. L’accès à la justice est crucial pour réaliser l’objectif 16, a-t-il dit, avant d’insister sur la relation difficile entre paix et justice. Il a indiqué que la volonté d’aboutir à des résultats rapides préjudiciait à l’inclusion d’éléments relatifs à la justice qui peuvent garantir le caractère durable d’un accord de paix. Il a insisté sur la pertinence d’instruments comme la Commissions vérité et réconciliation pour aider une société à surmonter un passé douloureux. Enfin, le délégué a déploré que l’état d’esprit collectif consiste toujours à traiter les conflits armés comme regrettables plutôt qu’illégaux. « Ériger en infractions les formes les plus graves de l’utilisation illégale de la force serait un pas essentiel dans le processus de pérennisation de la paix », a-t-il conclu, en appelant à la ratification des amendements de Kampala sur le crime d’agression.
Le représentant du Pays-Bas s’est félicité de ce que le plus récent examen quadriennal complet des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies ait offert au Secrétaire général le mandat de « secouer » le piler développement des Nations Unies. Il a aussi recommandé de transformer le Cabinet du Secrétaire général pour en faire un centre d’analyse des conflits et de planification stratégique. En outre, il a fait trois recommandations pour améliorer l’efficacité des Nations Unies en matière de développement durable et de paix durable. La première consiste à renforcer les partenariats multipartites, notamment ceux qui impliquent les gouvernements, la société civile et le secteur privé. La seconde consiste à promouvoir une présence des Nations Unies plus intégrée sur le terrain et le troisième à renforcer l’intégration en promouvant les initiatives de nature à briser les silos.
« La paix est un préalable au développement et le développement n’est pas possible sans un environnement pacifique et stable », a déclaré Le représentant de la Malaisie. Il a estimé que l’ONU était bien placée pour jouer un rôle pivot dans les efforts visant la réalisation du Programme 2030. La volonté politique est nécessaire, a-t-il prévenu, pour avoir une approche plus stratégique et plus holistique au service d’une paix pérenne pour tous. Il a insisté sur le rôle des femmes dans la paix et le développement et indiqué que son gouvernement a mis en place des programmes à long terme pour veiller à ce que les femmes et les jeunes retirent une juste part des bénéfices du développement. Les valeurs de tolérance et de modération, enracinées dans la vie quotidienne des Malaisiens, ont permis au pays de jouir d’une paix et d’une stabilité relatives depuis son indépendance.
Le représentant de l’Arménie a souhaité qu’on apporte une réponse collective à l’échelle internationale pour relever les défis actuels dans le monde, s’inquiétant en particulier de la crise des réfugiés. L’Arménie est le troisième pays qui accueille le plus de réfugiés syriens par rapport au nombre d’habitants, a-t-il indiqué. Il a reconnu le rôle précieux des organisations internationales, des ONG et de la diaspora qui appuient les programmes destinés aux réfugiés. Militant pour la prévention des conflits, il a recommandé l’adoption de mesures précoces pour éviter que les crises ne dégénèrent en conflit. Les mécanismes régionaux sont également importants, selon lui, car ils permettent de mieux aborder les réalités locales. Il a, par ailleurs, dit apprécier l’aide internationale apportée à son pays pour régler le conflit du Haut-Karabakh, laquelle permet de prévenir l’escalade du conflit. Il a aussi attiré l’attention sur la situation particulière des pays à revenu intermédiaire.
Le représentant de l’Afrique du Sud a affirmé qu’il était essentiel, pour construire une paix durable, de renforcer les processus politiques, y compris par un usage plus important de la diplomatie préventive, ainsi que de la gestion et de la prévention des conflits. L’architecture de paix et de sécurité des Nations Unies devrait être en mesure d’utiliser tous les outils à sa disposition, y compris la médiation et la consolidation de la paix.
Selon l’Afrique du Sud, a dit son délégué, les États Membres, au sein du système des Nations Unies, devraient poursuivre l’objectif commun de faire de la prévention une réalité et pas seulement une rhétorique et, à cet égard, se concentrer sur l’élaboration d’un plan de mise en œuvre. Une paix durable, a-t-il ajouté, ne peut être réalisée que par la construction d’un monde juste et d’un ordre international fondé sur des règles, lequel serait ouvert et traiterait des causes profondes des conflits, telles que l’injustice et les discriminations.
Le représentant a rappelé que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale avaient tous deux, dans leurs résolutions respectives, considéré que la paix durable relevait de la responsabilité des États Membres, appuyée par la communauté internationale. L’interdépendance entre la sécurité et le développement exige que les différents organes principaux des Nations Unies œuvrent, de manière complémentaire, et dans le respect strict de leur mandat respectif défini par la Charte, à garantir une approche intégrée et holistique de la paix durable. Ceci nécessiterait, a-t-il souligné, un renforcement de tous les organes des Nations Unies afin de faire en sorte qu’ils appliquent efficacement leur mandat.
L’Afrique du Sud estime, a-t-il conclu, que les Nations Unies devraient travailler plus étroitement avec les organisations régionales, en particulier l’Union africaine, dont elle appuie totalement l’Agenda 2063.
La représentante du Qatar a dit qu’il faut renforcer les moyens de s’attaquer aux différentes crises et se doter de moyens efficaces pour les prévenir. La paix est indispensable au développement, et réciproquement. Tous les membres de la société doivent être associés aux efforts, y compris les femmes et les filles. Si la communauté internationale veut la paix, il faut qu’elle lutte contre la marginalisation et inclue tout le monde dans l’œuvre du développement. Le Qatar a été à l’avant-garde de la réalisation de l’objectif 16. Sa politique de développement en est à sa deuxième phase qui va de 2016 à 2022. Il fait de la médiation et du règlement pacifique des différends un élément essentiel de la politique étrangère. Le Centre d’études de politiques étrangères du Qatar a d’ailleurs été mis sur pied pour offrir aux dirigeants du Moyen-Orient des outils alternatifs.
Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a relevé que si les résultats atteints par l’ONU en termes de consolidation des nations ont été mitigés, ils ont quand même été plus efficaces que les mesures unilatérales prises par quelques grandes puissances. Les efforts déployés par les Nations Unies pour parvenir à une paix durable doivent respecter les principes fondamentaux de la Charte, notamment l’égalité souveraine entre États. La paix durable, a-t-elle ajouté, ne peut être atteinte que si on traite des causes profondes des conflits comme la pauvreté. Elle a recommandé aux acteurs des domaines politique, de la sécurité et du développement de s’aider mutuellement. Elle a tenu à préciser que seuls les acteurs nationaux doivent mener le processus de mise en œuvre des objectifs de développement et de paix durables, en prenant des décisions inclusives et transparentes. Elle a assigné à l’ONU la tâche de fournir un financement suffisant et un soutien politique fort pour parvenir à un monde pacifique et prospère.
M. KIM IN RYONG (République populaire démocratique de Corée (RPDC)) a expliqué que la péninsule coréenne était devenue l’une des régions les plus dangereuses du monde, où la menace d’une guerre nucléaire est très présente. Assurer la paix et un environnement pacifique dans la péninsule est essentiel pour la RPDC, qui, a-t-il dit, s’est lancée dans la mise en œuvre de sa Stratégie quinquennale pour le développement économique national. Le représentant a dénoncé l’attitude et les manœuvres militaires agressives des États-Unis, principal soutien de la République de Corée voisine, ainsi que sa politique hostile à l’égard de son pays. Il a souligné que le Programme 2030 appelait au respect de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de tous les pays, ainsi qu’à leur pleine et permanente souveraineté sur leurs possessions, ressources naturelles et activités économiques. De même, a-t-il ajouté, il exhorte fermement et solennellement à interdire toutes les mesures économiques, financières ou commerciales qui violeraient les législations internationales et la Charte des Nations Unies. Le représentant a appelé instamment les États-Unis à retirer immédiatement leurs menaces nucléaires et leurs sanctions et à abandonner leur politique hostile et anachronique à l’encontre de la RPDC.
Le représentant du Japon a dit que, dès la naissance de l’ONU, des efforts ont été déployés pour générer des synergies entre paix et développement. Les pays d’Asie ont connu les conflits dans les années 60-70 mais aujourd’hui ils jouissent d’une stabilité démocratique remarquable. Ils sont dotés d’institutions fortes qui renforcent la confiance de la population et aussi la paix et le développement. Le Japon attache une importance particulière à la résilience des institutions dans son aide au développement notamment en Afrique. Pourquoi la paix n’est pas durable dans certains pays? Parce que, a-t-il estimé, des institutions solides ne sont pas là pour la consolider
Le représentant du Brésil a relevé les synergies entre le Programme 2030 et l’Agenda pour la paix. La notion de pérennisation de la paix est très vaste et on ne peut pas la limiter à un seul objectif, comme l’objectif 16, a-t-il estimé, souhaitant que le Programme 2030 ne devienne pas un simple programme de paix permettant de montrer du doigt les pays les moins avancés, fichés comme les plus vulnérables aux conflits. Attaquons-nous plutôt aux causes profondes des conflits, a encouragé le représentant.
Au nom du Mouvement des non-alignés, M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a indiqué que, lors du dix-septième Sommet du Mouvement en septembre 2016, les chefs d’État et de gouvernement avaient réitéré leur intention d’œuvrer en faveur de la mise en œuvre du Programme 2030. Les défis actuels, a-t-il relevé, doivent être abordés par le multilatéralisme et dans le cadre du droit international. C’est pour cela que le Mouvement reconnaît l’importance des synergies qui existent entre le Programme 2030 et la pérennisation de la paix. « Soyons clairs », a-t-il dit: « il ne peut y avoir de développement sans paix, ni de paix sans développement ».
Prévenir un conflit relève de la responsabilité collective, a-t-il souligné en estimant cependant que c’est avant tout une responsabilité nationale qui nécessite une aide impartiale de la part des Nations Unies, et ce, en partenariat avec les organisations régionales et sous-régionales. Il a demandé à l’ONU d’utiliser de bonne foi les outils à sa disposition, comme la diplomatie préventive, sans ingérence dans les affaires intérieures. Engagés en faveur du règlement pacifique des différends, les pays membres du Mouvement sont d’avis qu’il faut adopter une approche holistique pour traiter les causes sous-jacentes des conflits, en abordant de manière cohérente les questions relevant des trois piliers des Nations Unies.
Le représentant du Canada a estimé que des investissements devraient être réalisés dans la paix durable, se disant satisfait de constater que le concept de paix durable est désormais accepté. S’il a salué l’adoption de l’examen quadriennal complet des activités opérationnelles de développement, il a toutefois regretté que la consolidation de la paix n’y ait pas une place plus importante. Partisan des approches transversales, le Canada a mis en place des politiques et des « mécanismes de déploiement » pour pouvoir englober tous les aspects d’un conflit et savoir y répondre. Dans un tel contexte, l’autonomisation des femmes et des jeunes est une condition sine qua non, a prévenu le représentant, en rappelant qu’un taux élevé de chômage des jeunes est un facteur d’instabilité.
Le représentant de l’Argentine a dit l’importance de l’objectif 16 et la nécessité de mieux prévenir les conflits et de renforcer la diplomatie préventive. Il a jugé indispensable de pouvoir compter sur un financement fiable du développement durable pour réduire les vulnérabilités qui favorisent les conflits. Il a jugé essentiel de promouvoir une action mieux coordonnée et donc plus cohérente entre les institutions pertinentes des Nations Unies concernées par le développement durable et le maintien de la paix.
La représentante du Portugal a estimé qu’un long chemin avait été parcouru pour reconnaître les liens entre développement et paix durables et qu’il fallait désormais redoubler d’efforts pour réaliser ce double objectif. Elle s’est félicitée que la réalisation de la paix ait été identifiée comme la priorité du nouveau Secrétaire général de l’ONU. Elle a constaté que la montée des inégalités se fait indifféremment entre pays et au sein des pays eux-mêmes, nécessitant une approche globale et intégrée, mais tenant compte des spécificités nationales. Pour le Portugal, le Programme 2030 est aussi un outil décisif en matière de paix et de sécurité. Si la représentante a salué le Secrétaire général et son engagement en faveur d’une réforme du système des Nations Unies, elle a estimé que l’Organisation doit garder les moyens de s’acquitter de son mandat et jugé indispensable de nouer des partenariats.
M. NONTAWAT CHANDRTRI (Thaïlande) a déclaré que la consolidation de la paix et le développement ne devaient plus être vus comme des activités d’après-conflit mais comme des éléments à part entière d’un processus de paix. Remédier à la pauvreté, aux inégalités, au manque d’accès aux services publics et promouvoir une éducation de qualité et des emplois décents sont les meilleurs moyens de prévenir les conflits et de parvenir à une paix pérenne, a-t-il noté. Le représentant a indiqué que la politique économique d’autosuffisance guidait les efforts de développement au plan national, en complément des objectifs de développement durable. Cette politique vise notamment le renforcement de la résilience face à des chocs extérieurs et intérieurs, a-t-il précisé. Le délégué a demandé un meilleur financement des activités de consolidation de la paix et de prévention. Les États Membres pourraient appuyer le Fonds pour la consolidation de la paix, a-t-il dit, avant de souligner la nécessité de renforcer la coopération entre l’ONU et les organisations régionales.
M. COURTENAY RATTRAY (Jamaïque) a particulièrement mis l’accent sur l’objectif 16.4 qui vise à réduire nettement les flux financiers illicites et le trafic d’armes, à renforcer les activités de récupération et de restitution des biens volés et à lutter contre toutes les formes de criminalité organisée. Il a expliqué que, selon une étude du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) d’octobre 2016, la Jamaïque était alignée totalement ou partiellement avec 91% des 115 cibles de développement durable qui la concerne. Il a aussi cité une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui porte sur la fragilité des États et qui constate que des conflits peuvent annuler 20 années de gains économiques.
Mme INA KRISNAMURTHI (Indonésie) a dit que la réalisation des objectifs de développement durable renforcera des objectifs de paix durable. Pour ce faire, elle a jugé indispensable d’améliorer la collaboration entre l’ONU et ses partenaires régionaux. L’Indonésie a toujours promu la médiation et intégré les objectifs de développement durable dans le programme de développement à moyen terme », a-t-elle précisé. Elle a estimé que la capacité des États de concilier le développement durable et la paix durable dépend de la qualité de leurs institutions nationales. Elle a aussi dit la nécessité d’institutionnaliser la prévention.
Table ronde interactive sur la voie vers une approche globale du développement et de la paix durables
« La paix est menacée là où se perpétuent des inégalités, où les minorités ne sont pas respectées et où les jeunes n’ont pas d’opportunités », a prévenu, ce matin, M. Ján Kubiš, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq, lors d’une table ronde sur les moyens de promouvoir de concert développement et paix durables. L’ancien Ministre des affaires étrangères de la Slovaquie a donc jugé que la bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme sont « le préalable incontournable » à tout objectif de paix et de développement. « Il ne suffit pas de former des juges, si ces juges ne sont pas capables de remettre en cause une société corrompue », a ajouté celui qui a aussi été Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).
« Les sociétés les plus stables sont celles qui respectent les droits de l’homme, en particulier ceux des minorités », a dit en écho, M. Peter Wallensteen, Professeur et spécialiste des questions de paix aux Universités de Uppsala et Notre-Dame. Le chercheur à la Fondation Dag Hammarskjöld a parlé des expériences des années 90 qui ne laissent aucun doute: le meilleur moyen de promouvoir une paix durable est de respecter la dignité humaine, notamment celle des femmes et des minorités. Nous ne pourrons pas avancer si nous ne mettons pas l’accent sur la société civile et les droits de l’homme, a acquiescé M. Andrew Gilmour, Chef de la liaison newyorkaise du Bureau du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. Dans le triptyque « paix et sécurité, développement, et droits de l’homme », c’est le pilier « droit de l’homme » qui fait le lien entre les deux autres. Ce sont toujours les violations des droits de l’homme qui précèdent les crises et les conflits, a-t-il fait observer.
Animée par Mme Elizabeth Cousens, de la Fondation des Nations Unies, cette table ronde a aussi entendu des interventions de M. Macharia Kamau, Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP); Mme Joy Onyesoh, de l’ONG nigériane Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (LIFPL); de M Juan José Gómez Camacho, Représentant permanent du Mexique et Président du Groupe des amis de la paix durable; et de M. Mahmoud Mohieldin de la Banque mondiale.
« Si la question des synergies entre le développement durable et le maintien de la paix » n’est pas nouvelle, ce qui est nouveau c’est que nous vivons une époque nouvelle caractérisée par des conflits de plus en plus complexes, a déclaré Mme Elizabeth Cousens, de la Fondation des Nations Unies. L’ancienne diplomate américaine qui a participé aux négociations de plusieurs processus de paix et des objectifs de développement durable a insisté sur le fait que le Programme 2030 et le concept de paix durable se renforcent mutuellement. Les intervenants ont tous adhéré à l’idée que la paix durable est à la fois la source et le résultat du développement durable mais cela ne les a pas empêchés de faire valoir des approches différenciées.
Par où commencer? La paix ou le développement? Avec qui? La société civile, le secteur privé, les parlements, les femmes? Quel est le mécanisme qui nous permettra de parvenir à la paix universelle? s’est demandé le Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP). Comment faire de la place aux jeunes? s’est interrogé à son tour le représentant de la société civile. Nous ne parviendrons pas à nos objectifs de paix et de développement durables sans le secteur privé, a prévenu le Président du Groupe des amis de la paix durable. Plutôt que d’imposer des schémas et des cadres, l’ONU devrait mieux étudier les contextes et les besoins locaux, a estimé le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq. Le financement approprié des organisations de la société civile est le meilleur moyen de pouvoir s’adapter aux réalités et dynamiques locales, a renchéri la représentante de l’ONG nigériane Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (LIFPL). Car en attendant, a indiqué le représentant de la Banque mondiale, les conflits coûtent chaque année 14 300 milliards de dollars. Le Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP) s’est donc dit déçu des malheureux 150 millions de dollars du Fonds pour la consolidation de la paix alors que l’Assemblée générale a adopté en mai dernier un budget annuel de 7,87 milliards de dollars pour les opérations de maintien de la paix.
Quant au renforcement de la collaboration entre l’ONU et les parlements des pays dans lesquels elle est présente, comme l’a suggéré le représentant de l’Union interparlementaire (IUP), le Président du Groupe des amis de la paix durable et celui de la Commission de consolidation de la paix (CCP) n’ont pas caché la difficulté, dans certains pays, de passer outre l’exécutif pour parler au législatif. Dans d’autres pays, « même si la confrontation avec le parlement peut être un champ de mines », cette confrontation est indispensable, a estimé le Représentant spécial pour l’Iraq « On ne peut pas toujours vouloir tout dépolitiser alors que, de toute façon, tout est politique » et d’ailleurs, a ajouté le Professeur Wallensteen, la crédibilité de l’accord de paix colombien a été renforcée par le fait qu’il a été adopté par le Parlement. Le chercheur a, par ailleurs, rappelé que l’accord de paix « historique » est le fruit de quatre ans de négociations à laquelle ont dûment participé les universités. Il a exhorté l’ONU à s’appuyer sur les connaissances universitaires en matière de négociations et de consolidation de paix. Sur le même ton, la représentante de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (LIFPL) a souhaité que les acteurs de la société civile soient considérés comme des acteurs de la résolution des conflits et pas seulement comme des « alerteurs ».
Après avoir fustigé les chefs de programme onusien qui refusent de coopérer avec leurs homologues, le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq s’est félicité de ce que la majorité des intervenants aient insisté sur l’objectif de développement durable 16. Le Président du Groupe des amis de la paix durable a tout de même voulu que l’on s’entende une fois pour toutes sur le concept de responsabilité de protéger. « Même avec les meilleures intentions, les concepts flous peuvent être dangereux » a-t-il prévenu.
Ateliers misant sur les synergies entre trois secteurs
Avant de laisser la parole aux modérateurs des ateliers, Mme Sarah Cliffe, Directrice du Centre sur la coopération internationale de l’Université de New York, s’est dite frappée par la force de certains messages adressés ce matin par le Secrétaire général de l’ONU. Comme beaucoup d’États Membres, M. Guterres a attiré l’attention sur le fait que les inégalités peuvent être sources de conflit. Les ateliers organisés ont misé sur les synergies entre trois secteurs, à savoir l’autonomisation des femmes et des jeunes, la gestion des ressources naturelles, et le renforcement d’institutions « efficaces, transparentes et ouvertes à tous ».
Le premier atelier a fait référence aux résolutions du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. Le deuxième a porté sur la gestion des ressources naturelles, la question étant de savoir si les changements climatiques ne contribuent pas aux conflits. Nombreux ont été les exemples donnés à mentionner les bénéfices d’une exploitation participative et inclusive des ressources.
Il faut pour cela des institutions responsables et transparentes et comment s’en doter? Le troisième atelier a reconnu que la gouvernance revêt des réalités complexes et multiples. De tous les ateliers, il est ressorti que le développement durable est étroitement lié à la pérennisation de la paix et qu’une démarche intégrée doit être mise au point, fondée sur des partenariats respectueux de l’appropriation nationale. Enfin, a rappelé Mme Cliffe, il faut se doter des mécanismes de financement adéquats.