Commission de la population: « les données démographiques sont des histoires de femmes et d’hommes dont la vie change avec chaque statistique »
Si la Commission de la population et du développement avait besoin qu’on lui donne raison d’avoir choisi pour thème de sa session annuelle l’enrichissement des données démographiques à l’appui du programme de développement pour l’après-2015, « International Planned Parenthohood Federation » l’a fait. « Les données ne sont pas que des chiffres, ce sont des histoires de filles et de femmes, de garçons et d’hommes, dont la vie change avec chaque statistique », a déclaré l’ONG, après que la Commission eut adopté un projet de résolution sur ses méthodes de travail.
Pour chaque indicateur sur la planification familiale, il y a une femme qui, pour la première fois, peut planifier son avenir sans crainte d’une grossesse non désirée. Pour chaque augmentation du nombre de femmes capables de prendre leurs propres décisions sur leur santé sexuelle et reproductive, il y a une jeune qui comprend qu’elle a le droit à des relations sexuelles consenties et à se protéger. « Les données ne sont pas que des chiffres, ce sont des histoires de femmes et de filles, de garçons et d’hommes dont la vie change avec chaque statistique », a déclaré la représentante d’« International Planned Parenthohood Federation ».
Des données détaillées racontent des histoires détaillées sur les gens et si l’on ne braque pas les projecteurs sur la vie et l’histoire des gens, on ne saura jamais si les mesures prises les aident ou si elles laissent certains d’entre eux sur le côté, contrairement aux visées du Programme de développement durable à l’horizon 2030, de ses 17 objectifs, 169 cibles et 230 indicateurs mondiaux.
Pour planifier les bons programmes, il faut pouvoir connaître, analyser et comprendre les inégalités entre les groupes de populations en fonction du revenu, du sexe, de l’âge, de la race, de l’ethnie, du statut migratoire, du handicap, de la localisation géographique et autres, a commenté ce matin le Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC).
Le représentant des Maldives, qui n’a pas dit autre chose, a dénoncé le fait que compte tenu de leur petite population, les petits États insulaires soient bien souvent sous-évalués voire ignorés dans les statistiques internationales établies à partir des agrégats nationaux. Nos systèmes, a-t-il expliqué, ne sont pas capables de répondre à la demande de statistiques « pertinentes, fiables et opportunes ». Il faut donc leur apporter une assistance technique dont la formation du personnel et l’apport de ressources financières additionnelles.
Ce matin, la Commission a adopté par consensus un projet de proposition sur ses méthodes de travail*. Elle a ainsi recommandé à l’ECOSOC de l’autoriser à maintenir la pratique consistant à choisir un thème spécial pour chaque session annuelle basé sur le Programme d’action sur la population et le développement, adopté au Caire en 1994, tout en tenant compte du Programme 2030. Ce faisant, la Commission contribuerait au travail de l’ECOSOC et de son Forum de haut niveau. Le débat général aurait deux sous-points, l’un sur le thème spécial et l’autre sur les actions à prendre pour accélérer la mise en œuvre du Programme d’action du Caire. L’ECOSOC devrait aussi permettre à la Commission de consolider les points à l’ordre du jour ainsi que les rapports et de continuer à offrir aux ONG et autres organisations de la société civile l’occasion de participer à ses travaux.
La Commission de la population et du développement devrait achever sa session demain, vendredi 15 avril. Elle a prévu une réunion à 10 heures.
*La version française du projet de résolution n’est pas encore parue
DÉBAT GÉNÉRAL CONSACRÉ À L’EXPÉRIENCE DES PAYS EN MATIÈRE DE POPULATION: ENRICHIR LES DONNÉES DÉMOGRAPHIQUES À L’APPUI DU PROGRAMME DE DÉVELOPPEMENT POUR L’APRÈS-2015
Déclarations
Parlant de la contribution des questions de population et de développement au thème de la session 2016 du Conseil économique et social (ECOSOC), « mettre en œuvre le programme de développement pour l’après-2015: passer des engagements aux résultats », M. FREDERICK MUSIIWA MAKAMURE SHAVA (Zimbabwe), Vice-Président de l’ECOSOC a tout simplement souligné que les tendances démographiques sont reflétées, directement ou indirectement, dans plusieurs des objectifs de développement durable, dont ceux liés à la pauvreté, à la faim, à la santé, à l’éducation, au genre, à l’emploi, aux inégalités et aux villes. Il est tout à fait justifié, a-t-il poursuivi, que la Commission parle, cette année, d’« Enrichir les données démographiques à l’appui du programme de développement pour l’après-2015 ». Ce sera un élément central pour « passer des engagements aux résultats ».
Le Vice-Président s’est félicité que durant cette session, la Commission ait fait des progrès dans le réexamen de ses méthodes de travail, ce qui était une demande de l’ECOSOC pressée par l’Assemblée générale de demander à ses Commissions techniques de renforcer leur impact et leur contribution au travail du Conseil, en choisissant un thème annuel lié à celui de ce dernier.
Le Vice-Président a voulu souligner un domaine où la contribution de la Commission peut être « très importante ». Il y a deux semaines, a-t-il expliqué, l’ECOSOC a tenu une réunion spéciale sur la manière de traiter « de manière systématique » des inégalités dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Pour planifier les bons programmes, les inégalités entre les groupes de populations en fonction du revenu, du sexe, de l’âge, de la race, de l’ethnie, du statut migratoire, du handicap, de la localisation géographique et autres, doivent être connues, analysées et comprises. C’est là qu’entrent en jeu les données démographiques sur lesquelles la Commission travaille cette année.
M. FERNANDO BOLAÑOS, Vice-Ministre des populations vulnérables du Pérou, a fait part des progrès accomplis par son pays dans la mise en œuvre du Programme d’action du Caire, notamment sur le plan de la croissance économique et de l’intégration sociale. La pauvreté s’est ainsi trouvée réduite depuis 2011 et le budget public en faveur de l’enfance a augmenté de 10% depuis 2013, passant de 8,15 à 3,3% entre 2011 et 2014. Actuellement, 100% des enfants de moins de 5 ans bénéficient d’une couverture santé, a-t-il aussi indiqué avant de mentionner d’autres progrès comme la diminution de la mortalité maternelle et l’augmentation du nombre de femmes qui ont eu un suivi de leur grossesse. Il a aussi fait valoir la gratuité des services de santé sexuelle et reproductive, ce qui a permis d’améliorer l’accès aux méthodes modernes de contraception et aux soins pour les maladies sexuellement transmissibles dont le VIH/sida.
Le Vice-Ministre a aussi mentionné les améliorations en matière d’égalité des sexes et de lutte contre les discriminations, comme le préconise le cinquième des objectifs de développement durable, grâce à des lois adoptées à cet effet. En outre, il a assuré que son pays œuvrait en faveur des personnes handicapées notamment avec la création d’un programme de pension non contributive pour les personnes atteintes d’un handicap grave ou en situation de pauvreté. En ce qui concerne la migration internationale, le Pérou soutient la protection des droits des migrants. M. Bolaños a également fait part de l’action de son pays en faveur de l’environnement, visant une réduction de 30% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, avant de mentionner la loi nationale en faveur des droits des peuples autochtones. Le Pérou a adopté une stratégie de santé pour ces derniers et un programme d’éducation interculturelle et bilingue.
Mme SURYA CHANDRA SURAPATY, Présidente du Conseil d’administration de la planification familiale et de la population de l’Indonésie, a encouragé les États à recourir à une base de données démographiques pour planifier et suivre la mise en œuvre du Programme 2030. Elle a aussi encouragé le renforcement des instituts nationaux de collecte de données et à cet égard, elle a appelé l’ONU et les partenaires au développement à appuyer davantage le renforcement des capacités des pays en développement, grâce, entre autres, à la coopération triangulaire et Sud-Sud. Les buts, les cibles et les indicateurs des objectifs de développement durable doivent être clairs, quantifiables et réalisables, tout en tenant compte du fait que chaque pays a ses propres spécificités, a souligné la représentante. Notant le travail de la Commission des statistiques et prévenant qu’il n’y a pas d’approche à taille unique des 230 indicateurs proposés, l’Indonésie, a conclu sa représentante, insiste sur la nature volontaire du processus mondial d’examen et de suivi de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.
M. AHMED SAREER (Maldives) a indiqué qu’en 2014, son pays a effectué un recensement de la population qui a montré les progrès faits depuis 2006. Ce recensement, qui s’inscrit dans la longue tradition des Maldives de baser ses politiques sur des statistiques, a été le plus complet jamais effectué jusqu’ici, parce qu’il a, pour la première fois, pris en compte les expatriés et désagrégé les données. Mais, a admis le représentant, ce qui manque aux Maldives, ce sont des ressources pour mener des enquêtes sur les ménages et faire le suivi de la santé et des changements démographiques. D’après une étude nationale, le nœud du problème réside dans le manque de capacités humaines, compte tenu du taux élevé de « rotations » au sein du Gouvernement. La mémoire institutionnelle et la connaissance des cas spécifiques est tout aussi essentielles que la connaissance des concepts et des théories. Dans un pays, il y a toujours beaucoup de problèmes et beaucoup de décisions qui ne peuvent être résolues et prises que par des fonctionnaires expérimentés, a insisté le représentant qui a réclamé l’accès aux nouvelles technologies pour un pays où 341 256 personnes vivent dans près de 200 îles éloignées les uns des autres. La collecte des données est donc un exercice onéreux et d’autant plus onéreux que le Programme 2030 insiste sur des données désagrégées.
Le représentant a soulevé une autre préoccupation: les données et les moyennes mondiales se fondent sur les agrégats nationaux. Or, compte tenu de leur petite population, les petits États insulaires sont souvent sous-évalués voire ignorés. Nos systèmes, a-t-il expliqué, ne sont pas capables de répondre à la demande de statistiques « pertinentes, fiables et opportunes ». Il faut donc leur apporter une assistance technique dont la formation du personnel et l’apport de ressources financières additionnelles.
M. HE ZHAOHUA, Commission nationale de la santé et de la planification familiale de la Chine, a déclaré que, pour mettre en œuvre le Programme 2030 en fonction de son stade de développement et de ses caractéristiques propres, la Chine s’est fixée trois priorités: l’élimination de la pauvreté et de la faim, et la promotion de la croissance économique; le progrès social et la répartition équitable des fruits de la croissance; et la protection de l’environnement. En 2015, le Produit national brut s’est hissé à 6,9% et le revenu par habitant par 7,4% soit plus haut que le taux de croissance. Le représentant a parlé d’une nouvelle loi sur la protection de l’environnement qui inclut des mesures ambitieuses de conservation de l’énergie et de réduction des émissions qui vont au-delà des cibles obligatoires. Nous nous sommes imposé nos propres réductions, contribuant de manière significative aux négociations internationales sur les changements climatiques, s’est enorgueilli le représentant. La reforestation de 6,32 millions d’hectares est achevée ainsi que la mise sur pied de 2 740 réserves naturelles. La consommation annuelle de charbon a baissé à 3,7% et celle de l’énergie hydraulique, éolienne, nucléaire, gazeuse et autres énergies propres représente désormais 17,9% de la consommation énergétique totale en Chine.
M. JUAN CARLOS ALFONSO FRAGA (Cuba) a voulu qu’un accent particulier soit placé sur les inégalités dont sont victimes les femmes, la croissance démographique et la migration. Les pays en développement, a-t-il souligné, n’ont pas les ressources financières et techniques suffisantes pour renforcer leurs capacités statistiques. Il a appelé les donateurs à respecter leur engagement en faveur de l’aide publique au développement (APD), en soulignant que la dynamique démographique relève de la responsabilité collective.
M. MARTIN GARCIA MORITAN (Argentine) a insisté sur les groupes vulnérables, l’égalité des sexes et le respect des droits de l’homme dans la collecte des données. Cette session doit nous faire passer de la parole aux actes, a-t-il dit, soulignant l’importance de données démographiques fiables et exploitables, en particulier sur les plus vulnérables. Le représentant a dit espérer que la Commission pourra adopter des documents consensuels qui raffermiront le multilatéralisme.
M. NEIL MCFARLANE, Chef de la section new yorkaise du Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes, a rappelé que de l’adoption du Programme d’action du Caire, en 1994 à 2013, quelque 1,35 million de vies ont été perdues du fait des catastrophes, ce qui fait près de 68 000 morts par an. Au cours de la même période, 218 millions de personnes ont été affectées par les catastrophes chaque année. Ce sont les plus pauvres et les femmes qui sont les plus affectés. Tant que les catastrophes mineront les progrès vers un développement inclusif, elles continueront d’influer négativement sur nos efforts de mise en œuvre des objectifs de développement durable. Nos choix de développement peuvent jouer un rôle crucial pour la prévention des risques de catastrophes. Dans de nombreux pays, l’urbanisation incontrôlée entrave la faculté des autorités municipales à gérer la croissance. Une population urbaine dense expose plus de gens aux dangers. La surconsommation des ressources naturelles et la dégradation de l’environnement explosent plus encore aux dangers, et les changements climatiques, dans de nombreuses régions, multiplient la fréquence et l’intensité des phénomènes climatiques extrêmes.
Vu sous l’angle de la réduction des risques de catastrophe, le Programme 2030, a dit M. McFarlane, peut faire beaucoup contre ces facteurs et peut réduire l’impact des catastrophes sur les populations et, sauvegarder les acquis du développement. Le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 offre des directives et pour parvenir au niveau de résilience, il faut améliorer notre compréhension des risques de catastrophe et de la manière dont les populations sont différemment affectées, mais aussi des différentes perspectives et capacités que l’on peut utiliser pour réduire ces risques.
M. ASHRAF EL NOUR, Organisation internationale pour les migrations (OIM), a salué le fait que l’on ait reconnu l’importance des données démographiques désagrégées par statut migratoire. L’OIM, a-t-il indiqué, a participé à l’élaboration des indicateurs de mise en œuvre des objectifs de développement durable. Pour améliorer les données actuelles, elle a créé un Centre mondial d’analyse des données sur les migrations à Berlin. Elle a aussi mis en place en 2006 une matrice de suivi des déplacements et développé un index de la gouvernance de la migration, en partenariat avec le magazine britannique « The Economist ». Avec l’Institut de sondage « Gallup », l’OIM entend développer un système pour évaluer la situation des migrants en fonction des variables essentiels des objectifs de développement durable.
Le représentant a indiqué que l’OIM a trois recommandations: la collecte des données sur les populations mobiles qui sont particulièrement vulnérables à la violence, aux abus et à l’exploitation sexuels, doit se faire soigneusement et servir de base à la protection des droits de l’homme pour faciliter l’accès de ces populations aux services sociaux de base, et non pour s’en servir contre eux. La Commission, a poursuivi M. Ashraf, doit examiner de manière plus équilibrée les questions soulevées par le Programme d’action du Caire dont celles de la migration et de l’urbanisation parce qu’elles sont véritablement universelles et reprises comme telles dans le Programme 2030. Enfin, toutes les parties prenantes doivent avoir l’opportunité de contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable, surtout dans le domaine de la migration où de nombreux acteurs à l’intérieur et à l’extérieur du système de l’ONU, y compris les migrants eux-mêmes, font des contributions importantes à la promotion d’une migration sûre, organisée et légale.
M. SAAD, Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CELAC), a déclaré que le Consensus de Montevideo sur la population et le développement, adopté en 2013 est un document qui résume l’engagement de la région en faveur du Programme d’action du Caire. Ce Consensus reconnaît les spécificités de la région en matière démographique et prescrit des voies pour améliorer les conditions de vie des populations. Un guide opérationnel du Consensus a été élaboré en 2014 en vue d’établir des synergies entre les instruments régionaux et internationaux. Un groupe de travail régional a été mis sur pied pour vérifier la mise en œuvre des recommandations du Consensus à l’aune des objectifs de développement durable.
La représentante d’Asia Pacific Resource and Research Centre for Women a demandé aux États d’honorer les engagements politiques et financiers en faveur de la pleine mise en œuvre du Programme d’action du Caire; d’intégrer dans cette mise en œuvre leurs obligations liées aux droits de l’homme; d’améliorer la base des données démographiques pour appuyer le Programme d’action et le Programme 2030; de fonder la collecte des données sur les droits de l’homme; d’assurer « clairement » des niveaux de désagrégation des données; de promouvoir l’accès universel à la santé sexuelle et reproductive; et de traiter efficacement des questions intersectorielles de la pauvreté, de l’insécurité alimentaire et nutritionnelle, de la migration, des conflits, des catastrophes naturelles, des changements climatiques et de l’extrémisme religieux.
Le représentant d’International Federation for family development a demandé à la Commission de prendre en considération les recommandations de son organisation concernant la stabilité des familles, leur interdépendance économique, le partenariat avec elle, leur diversité des familles et l’appui que les familles vulnérables méritent.
La représentante du Forum interparlementaire européen a plaidé pour que les femmes puissent exercer leur droit de prendre les décisions sur leur vie sexuelle et reproductive. Les droits sexuels et reproductifs des femmes sont des droits « fondamentaux » pour la santé publique. Elle a insisté sur le fait qu’avec le libre exercice de ces droits, les avortements peuvent être évités.
Comment peut-on aider les adolescents si l’on n’a pas de données sur eux? s’est impatientée la représentante de Stichting Rutgers WPF, soulignant que le Programme d’action du Caire demande la sensibilisation des jeunes à leur santé sexuelle et reproductive. Tous les individus, y compris les jeunes et les adolescents, ont le droit de prendre des décisions sur leur corps, de manière libre et informée. Elle a plaidé pour des services de santé appropriés et soucieux des jeunes et demandé à la Commission d’écouter leurs idées sur l’amélioration des méthodes de travail.
La représentante de Minnesota Citizens Concerned for Life a estimé qu’outre l’amélioration des données pour combattre la mortalité maternelle et évaluer précisément les progrès, la communauté internationale doit mieux hiérarchiser les mesures qu’elle sait nécessaires pour sauver la vie des femmes. La santé maternelle dépend de la qualité des soins et non de la légalité ou de l’illégalité de l’avortement. Certaines régions, a-t-elle affirmé, ont utilisé l’avortement pour contrôler la croissance démographique. Mais il faut savoir que des politiques aussi rigides causent surtout des abus énormes des droits de l’homme. Non, a poursuivi la représentante, les États devraient s’entendre sur des objectifs de développement, sans pour autant encourager ou légaliser l’avortement. Aucun instrument des Nations Unies ni du droit international ne peut être interprété comme consacrant le droit à l’avortement. Aucun État ne devrait non plus répondre aux changements économiques et démographiques en légalisant ou en promouvant l’euthanasie ou le suicide assisté. Aucun droit à l’euthanasie ou droit à mourir n’a jamais été consacré par le droit international. Les données démographiques devraient être utilisées pour protéger et améliorer la vie humaine et pas pour la détruire.
Parlant des données sur la santé reproductive, la représentante de Catholic Family and Human Rights a d’emblée douté des 225 millions de femmes qui auraient des « besoins non satisfaits » en matière de contraception et des 9,4 milliards de dollars qu’il faudrait pour la planification familiale. Mais les « besoins non satisfaits » sont un concept fallacieux et manipulé conduisant à détourner les ressources des interventions qui pourraient sauver la vie des femmes et des enfants. Les « besoins non satisfaits » oublient qu’il y a des femmes qui choisissent librement de ne pas utiliser de contraceptifs. En conséquence, les indicateurs de la planification familiale devraient se limiter à la prévalence actuelle des contraceptifs et aux demandes individuelles de tel ou tel service et produits spécifiques.
La représentante de Global Helping to Advance Women and Children a appelé l’ONU à placer les familles au centre de ses actions. Elle a expliqué qu’une démarche axée sur les familles apporterait des résultats plus probants. Elle a salué la mise en place d’un Groupe des Amis de la famille au Siège de l’ONU et a souhaité l’amélioration de la collecte des données sur les familles pour une bonne mise en œuvre des objectifs de développement durable.
La représentante de Poverty Elimination and Community Education Foundation a regretté que les indicateurs des objectifs de développement durable ne portent sur toutes les 169 cibles. Compte tenu de ce manquement, notre Fondation entend contribuer à l’élaboration d’indicateurs complémentaires au niveau des pays. La représentante a aussi appelé la communauté internationale à améliorer la collecte et l’utilisation des données sur les migrations. Elle a appelé la Commission à mettre davantage l’accent sur les questions de migration.
La représentante de World Young Women’s Christian association a déclaré qu’à cause des lacunes dans la collecte des données, les femmes, les jeunes femmes et les filles sont bien souvent ignorées tout comme les questions qui affectent leur vie. Pour ne « laisser personne sur le côté », elle a demandé des données spécifiques aux jeunes et l’implication de femmes chercheurs, de statisticiennes et d’épidémiologistes pour que les jeunes ne soient pas seulement bénéficiaires des programmes mais qu’ils puissent aussi offrir leur leadership et leurs conseils. Il faut se concentrer sur la santé et les droits sexuels et reproductifs. Il faut aussi continuer à prôner le respect de la confidentialité et de la vie privée dans la collecte, l’analyse et la diffusion des données désagrégées. Les droits de l’homme doivent être au centre de la collecte et du partage des données, a insisté la représentante.
Pour un indicateur sur « la planification familiale », il y a une femme qui, pour la première fois, peut planifier son avenir sans crainte d’une grossesse non désirée, a déclaré la représentante d’International Planned Parenthohood Federation. Pour chaque donnée sur le mariage précoce et forcé, il y a une jeune fille qui peut rester à l’école sans crainte de se voir mariée à 15 ans ou moins. Pour chaque augmentation du nombre de femmes capables de prendre leurs propres décisions sur leur santé sexuelle et reproductive, il y a une jeune qui comprend qu’elle a le droit à des relations sexuelles consenties et à se protéger. Les données ne sont pas que des chiffres, ce sont des histoires de femmes et de filles, de garçons et d’hommes dont la vie change avec chaque donnée.
Sans de bonnes données, il est impossible de savoir quel programme marche et lequel se traine. Sans des données bien désagrégées, on ne saura jamais si les filles ont les mêmes chances que les garçons à l’école ou si les femmes autochtones sont moins bien traitées dans les hôpitaux. Des données détaillées racontent des histoires détaillées sur les gens. Sans des investissements dans les données et sans braquer les projecteurs sur la vie et l’histoire des gens, on ne saura jamais si les mesures prises les aident ou si elles laissent certains d’entre eux sur le côté.
La représentante de Franciscans International a déclaré qu’il faut porter une attention particulière sur les registres d’état civil, notamment sur la nécessité d’enregistrer toutes les naissances. Elle a expliqué qu’en Côte d’Ivoire, son organisation a lancé un partenariat avec les autorités nationales en vue d’améliorer l’enregistrement des naissances. Elle a invité les Nations Unies à agir davantage dans ce domaine, expliquant que l’absence d’acte de naissance est un obstacle à la jouissance des droits les plus fondamentaux.
La représentante de Women’s Global Network for Reproductive Rights a dit que son organisation regroupe plus de 1 000 associations d’Amérique latine et des Caraïbes. Elle a souhaité que la Commission joue pleinement son rôle en collaborant étroitement avec le Forum politique de haut niveau pour veiller à ce que les questions de population soient prises en compte dans le suivi de la mise en œuvre des objectifs de développement durable. La déléguée a dénoncé le fait que de nombreuses adolescentes n’aient pas accès aux soins de santé reproductifs et sexuels, estimant que cette réalité est l’une des plus grandes discriminations entre le Nord et le Sud. Elle a aussi dénoncé la persécution des femmes activistes des droits de l’homme, notamment dans certains pays en développement.
Ce qui compte plus que les statistiques, ce sont les gens que les chiffres représentent, a déclaré le représentant de World Youth Alliance. Il a appelé la Commission a examiné les multiples aspects de chaque individu comme base fondamentale pour répondre à ses besoins. Il faut évaluer les objectifs de développement durable sous l’angle de leur impact sur le sentiment de protection et de dignité de chaque personne. La dignité humaine doit être la base des données démographiques et en conséquence, les indicateurs sur la mortalité maternelle doivent se fonder sur les causes naturelles des décès plutôt que sur des procédures comme l’avortement. La santé sexuelle et reproductive doit être évaluée en fonction de la dignité humaine et d’une approche fondée sur l’être humain. Il faut dès lors compter le nombre d’étudiants qui comprennent vraiment leur santé et leur corps plutôt que ceux qui ont un accès à un tel produit ou à tel service. Enfin, rien ne doit être considéré comme autorisant la promotion de politiques controversées.
La représentante de FEMM Foundation a appelé la Commission à reconnaître que pour qu’elles puissent prendre leurs propres décisions sur leur santé reproductive, les femmes et les filles doivent d’abord comprendre leur propre corps, en particulier son lien avec le cycle hormonal. FEMM s’attache à éduquer les médecins qui soignent les symptômes dits « normaux » comme la prise de poids, la dépression, les migraines, les douleurs, les saignements ou l’acné liés au cycle hormonal. Les chercheurs du FEMM ont utilisé les données pour améliorer la compréhension des différents niveaux hormonaux. Avec ces données, les médecins peuvent diagnostiquer et soigner les maladies hormonales sous-jacentes. Une décision informée mène à une santé meilleure.
Les femmes et les filles représentent environ la moitié de la population mondiale mais elles sont plus vulnérables aux problèmes de santé, qu’il s’agisse de l’accouchement ou d’autres causes biologiques et sociales, a dénoncé la représentante de « Global Foundation for Democracy and Development (GFDD). C’est la raison pour laquelle GFDD demande la mise en œuvre de politiques pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes grâce à l’accès à l’éducation, à la santé sexuelle et reproductive et à la planification familiale. La mortalité, la migration et la fertilité sont souvent considérées comme des éléments clefs des composantes démographiques. Les changements démographiques ont un impact important sur la réalisation des objectifs de développement durable. Si l’on veut vraiment éradiquer la pauvreté et les inégalités sociales, il est essentiel que ces droits à la santé soient intégrés dans la mise en œuvre du Programme 2030.
La représentante de l’International Federation of Medical Student’s Association a estimé qu’en tant que futurs prestataires de soins de santé, les étudiants en médecine estiment qu’il est de leur devoir de veiller à ce que les soins de santé sexuels et reproductifs soient disponibles pour tous et partout. Elle a souligné que la santé reproductive est un droit fondamental, et que tous les jeunes doivent pouvoir l’exercer.
EXAMEN DE L’EFFICACITÉ DES MÉTHODES DE TRAVAIL DE LA COMMISSION (E/CN.9/2016/8)
Déclarations
M. BELA HOVY, Division de population du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a parlé de la « Note du Secrétariat sur l’organisation et les méthodes de travail future de la Commission de la population et du développement » parue sous la cote E/CN.9/2016/8, laquelle a été préparée pour faciliter les discussions de la Commission. « On dit souvent que seul le résultat compte, mais en nous penchant sur les méthodes de travail de la Commission, nous avons appris beaucoup », a révélé Mme Hovy.
D’abord, la Note confirme la centralité du Programme d’action de la Conférence sur la population et le développement pour le choix du thème annuel de la Commission. Deuxièmement, la Note estime qu’un ordre du jour distinct sur la contribution des questions de population et de développement au thème annuel du Conseil économique et social (ECOSOC) devait être « envisagé pour avoir un examen intégré du thème annuel du Conseil dans le travail de la Commission ».
Troisièmement, la Note insiste sur le rôle et la contribution critiques de la société civile au travail de la Commission et enfin quatrièmement, elle rappelle que l’Assemblée générale n’a pas encore pris de décision sur les méthodes de travail de l’ECOSOC et du Forum politique de haut niveau, dans le contexte du Programme de développement durable à l’horizon 2030, en particulier sur le choix des thèmes annuels et l’établissement d’un cycle pluriannuel pour les examens thématiques des objectifs de développement durable. La Note conseille donc à la Commission d’attendre la décision de l’Assemblée générale.
Au nom de l’Union européenne, M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas), a insisté sur la nécessité d’aligner le plus largement possible le thème annuel de la Commission de la population et du développement avec celui de l’ECOSOC et du Forum politique de haut niveau pour promouvoir la cohérence et la coordination. À cet égard, il a estimé que la proposition du Secrétariat d’introduire un cycle thématique de quatre ans mérite d’être explorée. Le représentant a aussi estimé que la Commission devrait désormais se concentrer sur la manière dont les progrès dans la mise en œuvre du Programme d’action du Caire peuvent contribuer au succès du Programme 2030. Les thèmes annuels de la Commission devraient tourner du Programme d’action, des mesures à prendre pour aller de l’avant et des résultats des conférences d’examen.
L’Union européenne appuie la rationalisation de l’ordre du jour de la Commission et juge donc qu’il n’est pas nécessaire de tenir deux débats généraux distincts sur la mise en œuvre du Programme d’action et les expériences nationales en matière de population et de développement. L’Union européenne pense aussi qu’on pourrait rationaliser les choses en luttant contre la multiplication des rapports lesquels pourraient être consolidés. Prenant note de l’idée d’un résumé des délibérations de la Commission, le représentant s’est tout de même interrogé sur la différence entre ce résumé et le rapport de session qui contient déjà des informations sur le travail de la Commission et ses résultats. En revanche, l’Union européenne est favorable à la poursuite des négociations annuelles sur le document final d’une session. Le représentant a, avant de conclure, souligné l’importance de la participation et de la contribution de la société civile, en particulier les organisations de jeunes et de femmes, aux travaux de la Commission.