La première Conférence mondiale sur le transport durable s’ouvre avec des appels en faveur de systèmes de transport conciliant progrès humain et protection de la Terre
ACHGABAT, TURKMÉNISTAN, 26 novembre -- La toute première Conférence mondiale sur le transport durable de l’ONU s’est ouverte, aujourd’hui à Achgabat, la capitale de marbre blanc du Turkménistan, au cœur de l’Asie centrale, avec les appels du Secrétaire général de l’ONU, du Président turkmène et de plusieurs chefs d’État ou de gouvernement pour que le transport durable soit un moteur de croissance inclusive, ouvre les marchés et réponde aux besoins des plus démunis tout en préservant l’environnement et en luttant contre le réchauffement climatique.
« Je suis confiant que nous avons la détermination, l'engagement, l'imagination et la créativité pour transformer nos systèmes de transport d'une manière durable qui améliorera le bien-être humain et le progrès social et protégera notre planète Terre », a déclaré M. Ban Ki-moon, qui s’est voulu résolument optimiste pour la dernière conférence convoquée en tant que Secrétaire général de l’ONU. Il a notamment encouragé la marche à pied et le déplacement à bicyclette, en rappelant qu’il avait utilisé, il y a trois ans, une bicyclette en bambou fabriquée par des femmes au Ghana.
« La communauté internationale est prête à s’engager dans la nouvelle voie du transport durable », a affirmé le Président du Turkménistan, M. Gurbanguly Berdimuhamedov, qui s’est félicité du haut niveau de participation à cette Conférence. Le Président de l’Afghanistan et le Premier Ministre du Pakistan se sont exprimés lors du segment plénier, aux côtés des représentants de 17 autres pays et de plusieurs organisations internationales, tandis que quatre tables rondes se sont tenues en parallèle.
Les orateurs, à commencer par le Secrétaire général, ont souligné la centralité de la question du transport durable dans la réalisation des deux grandes « avancées majeures » que sont le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques, récemment entré en vigueur. Le transport durable peut nous permettre de parvenir à la mise en œuvre de ces deux instruments, a assuré le Secrétaire général. Les enjeux sont de taille puisque, d’ici à 2030, le nombre de voitures sur les routes devrait par exemple doubler pour atteindre 2 milliards.
Aujourd’hui, le secteur des transports est responsable de 23% des émissions de gaz à effet de serre, tandis que plus d’un milliard de personnes n’ont pas accès aux services de transport. Les accidents de la route sont par ailleurs responsables de la mort d’1,25 million de personnes dans le monde.
Pour y remédier, le Secrétaire général a souligné la nécessité de créer un cadre politique intégré favorisant les interactions entre les différents modes de transport, de prendre en compte des besoins des pays les plus vulnérables ou bien encore d’adopter des mesures audacieuses et novatrices « pour repenser les systèmes de transport ». « Il y a tant d'autres idées comme celles-ci qui attendent d'être réalisées », a-t-il dit, en citant l’avion propulsé à l’énergie renouvelable de Bertrand Piccard.
Lors de la première table ronde intitulée « Le transport durable au cœur des objectifs de développement durable », les intervenants ont réfléchi aux moyens pour que le transport durable œuvre à la réduction de la pauvreté, à la promotion du développement durable et à la lutte contre les changements climatiques.
Des systèmes de transport sûrs, accessibles, pratiques et écologiques ont été au cœur de la table ronde sur « Les transports publics au XXIe siècle: durabilité du déplacement des passagers et du fret ». Enfin, les deux autres discussions de l’après-midi ont porté sur les « défis et opportunités du transport rural » qui doivent être relevés pour atteindre les plus isolés et « les solutions du transport durable à la crise du climat ».
La Conférence poursuivra ses travaux demain, dimanche 27 novembre 2016, à 10 heures.
CONFÉRENCE MONDIALE SUR LE TRANSPORT DURABLE
Déclarations d’ouverture
M. GURBANGULY BERDIMUHAMEDOV, Président du Turkménistan, s’est félicité du haut niveau de participation à cette toute première Conférence mondiale sur le transport durable. « Nous avons des objectifs communs dans le domaine du transport durable pour favoriser, a-t-il dit, la paix, le progrès et l’entente entre les peuples. » La communauté internationale, consciente de l’importance des questions liées au transport, est prête à s’engager dans la nouvelle voie du transport durable, a-t-il estimé.
Le Président du Turkménistan a souligné que de nombreux États et organisations, qui participent aujourd’hui à la Conférence, sont conscients de l’importance de la coopération dans ce domaine. Il s’est dit convaincu que les négociations de fond relatives au transport durable permettront une convergence des points de vue et jetteront les bases d’instruments novateurs. Le Turkménistan, a-t-il assuré, est toujours ouvert à de nouvelles idées et prêt à coopérer avec l’ONU et les autres États pour identifier les domaines d’intérêt mutuels, a-t-il dit.
Deux projets de résolution relatifs au transport durable avaient été présentés par le Turkménistan à l’Assemblée générale à New York, a rappelé M. Berdimuhamedov, en précisant que ces deux textes avaient été adoptés par acclamation. Le Président du Turkménistan a ensuite détaillé la politique de transport de son pays, en mettant l’accent sur l’importance du port de Turkmenbachy, en cours de construction, au bord de la mer Caspienne. Il a également indiqué que la première partie de la voie ferroviaire reliant son pays, le Tadjikistan et l’Afghanistan sera bientôt inaugurée. « Notre stratégie à long terme, a-t-il dit, est de créer de grands nœuds de transport qui permettent une intensification des échanges régionaux et internationaux. »
Rappelant que le transport durable était au cœur des objectifs de développement durable, M. Berdimuhamedov a déclaré que la mise en place de d’infrastructures durables était l’un des plus grands défis auxquels doit faire face la communauté internationale pour préserver les ressources de la planète. « Notre objectif commun est de conjuguer partenariats économiques et préservation de l’environnement », a insisté le Président, avant d’ajouter qu’il faudrait prendre en compte les intérêts des pays de toutes les régions. Avant de conclure, le Président turkmène a exprimé l’espoir que cette Conférence renforcera la coopération dans le domaine du transport durable et contribuera à l’entente entre les peuples.
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a insisté sur les deux avancées majeures que constituent le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques, tout en soulignant que l’enjeu était désormais leur mise en œuvre. « Le transport durable peut nous permettre d’y parvenir », a-t-il estimé. Il est nécessaire, a-t-il souligné, de mettre un terme aux vieilles habitudes, sous peine de continuer à payer un lourd tribut, humain et économique, qu’il s’agisse des accidents de la route, de la pollution ou des émissions des gaz à effet de serre. « Nous devons donner le feu vert aux investissements avisés dans des technologies innovantes qui réduisent la consommation en énergie fossile et renforce l’optimisation énergétique. »
Le transport durable, a assuré M. Ban, peut être un moteur de croissance inclusive, réduire la pauvreté, ouvrir les marchés, autonomiser les femmes et favoriser le bien-être d’autres groupes vulnérables. Il a pris l’exemple du Chili qui a amélioré l’accès aux transports dans les zones rurales et fournit des transports gratuits aux enfants handicapés. De nombreux projets intéressants sont menés au Turkménistan et dans le monde, a déclaré M. Ban. « Le transport durable est crucial pour réaliser la vision d’un monde sûr et sain pour protéger notre seule demeure: la Terre. ».
Le Secrétaire général a insisté sur les enjeux humains du transport, rappelant qu’un transport durable est hors de portée pour de nombreuses communautés rurales et que des millions de personnes handicapées n’ont pas accès aux transports publics. « Le transport durable doit répondre aux besoins des personnes les plus démunies », a-t-il insisté.
Le Secrétaire général a indiqué que le secteur du transport était responsable de près d’un quart des émissions de gaz à effet de serre liées à l’énergie, une proportion qui devrait augmenter dans les années à venir. « Sans une action dans ce domaine, nous ne serons pas capables de limiter le réchauffement climatique mondial en dessous de 2 oC et aussi proche que possible d’1,5 oC. » Il a ensuite insisté sur les conséquences du transport pour la santé publique, en rappelant que les accidents de la route étaient responsables de la mort d’1,25 million de personnes dans le monde. La pollution de l’air, à laquelle le transport contribue, cause la mort de plus de 3 millions de personnes chaque année, a-t-il noté. « La réponse à ces défis ne vise pas à réduire les transports mais, au contraire, à assurer un transport durable », a-t-il déclaré, avant de formuler des recommandations à cet égard.
Tout d’abord, le Secrétaire général a plaidé, en vue de résoudre les difficultés d’encombrement dans les transports, pour un cadre politique intégré, conforme aux objectifs de développement durable et qui prenne en compte les interactions entre les différents modes de transport. « Ensuite, nous devons répondre aux besoins des pays vulnérables, y compris les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement », a-t-il recommandé, en insistant sur la nécessité d’établir des normes régionales harmonisées.
Il faudrait également promouvoir de meilleurs systèmes de transport dans les villes, « ce qui signifie, a-t-il dit, la nécessité d’améliorer les transports publics tout en encourageant la marche à pied et le déplacement à bicyclette ». Il a indiqué que la nouvelle économie du partage montrait la voie à suivre, permettant ainsi aux usagers d’emprunter un vélo d’un côté de la ville et de le laisser dans un autre point de la ville, de louer une voiture en utilisant une application ou de pratiquer le covoiturage.
« Nous devons aussi rendre tous les systèmes de transport sûrs pour atteindre l’objectif ambitieux fixé dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui appelle à l’accès à des systèmes de transport sûrs, abordables, accessibles et durables pour tous. »
En vue de remédier aux conséquences environnementales des transports, le Secrétaire général a demandé que des mesures audacieuses et novatrices soient prises pour repenser les systèmes de transport, dans le droit fil des nombreuses initiatives lancées au cours de son mandat.
« Il y a trois ans, j’ai utilisé une bicyclette en bambou fabriquée par des femmes au Ghana et, l’année dernière, j’ai pris un taxi solaire pour me rendre au travail, a-t-il fait remarquer, avant de mentionner l’avion propulsé à l’énergie renouvelable de Bertrand Piccard. « Il y a tant d’autres idées comme celles-ci qui attendent d’être réalisées. »
« Nous avons en outre besoin de financement », a continué M. Ban, en soulignant qu’il était nécessaire de mobiliser des fonds provenant de sources diverses et de favoriser la coopération Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire.
Enfin, il a appelé à la mobilisation de tous les partenaires, en se disant convaincu qu’avec une large coalition de gouvernements, d’organisations internationales, d’entreprises, d’organisations de la société civile et de communautés, le transport durable pourrait devenir réalité.
Citant le message clef contenu dans le rapport final présenté par le Groupe consultatif de haut niveau sur les transports, le Secrétaire général a déclaré qu’il était essentiel d’investir davantage dans des systèmes de transport plus verts et plus durables pour atteindre les objectifs de développement durable.
M. Ban s’est félicité que cette dernière conférence internationale, qu’il a convoquée en sa qualité de Secrétaire général des Nations Unies, soit consacrée au transport durable.
« Je suis confiant que nous avons la détermination, l’engagement, l’imagination et la créativité pour transformer nos systèmes de transport d’une manière durable qui améliorera le bien-être humain, améliorera le progrès social et protégera notre planète Terre », a-t-il assuré avant de conclure.
Table ronde: « Le transport durable au cœur des objectifs de développement durable »
En approuvant les objectifs de développement durable, la communauté internationale s’est engagée en faveur d’une action ambitieuse et audacieuse, dont le transport durable sera un élément clef. Comment faire en sorte que le transport durable œuvre à la réduction de la pauvreté et à la promotion du développement durable aux niveaux local, régional et international? Quelles sont les actions prioritaires pour parvenir à un transport durable au cours des 15 prochaines années? Ce sont quelques-unes des questions auxquelles les intervenants de cette table ronde, animée par M. MAHMOUD MOHIELDIN, Vice-Président pour le Programme de développement durable à l’horizon 2030, les relations avec l’ONU et les partenariats du Groupe de la Banque mondiale, ont essayé de répondre.
M. GYAN ACHARYA, Secrétaire général adjoint et Haut-Représentant pour les pays les moins avancés (PMA), les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, a déclaré que le transport, s’il ne fait pas l’objet d’un objectif distinct, se retrouvait dans tous les objectifs de développement durable. Si, dans le monde, il y a 1,5 milliard de véhicules, a-t-il fait remarquer, 1,5 milliard de personnes n’ont pas accès aux systèmes de transport. Il a mis en exergue le fossé considérable qui existe entre le milieu urbain et le milieu rural, en précisant que les femmes vivant en milieu rural étaient les premières à pâtir d’un accès inadéquat aux systèmes de transport. Les pays sans littoral, a-t-il dit, paient le double de que ce paient les pays côtiers pour importer et exporter des marchandises.
C’est pourquoi, il a plaidé pour des solutions visant à améliorer les infrastructures de transport et les dispositions juridiques encadrant l’acheminement de marchandises, ainsi que pour des systèmes de transport intermodaux. Il a insisté sur les défis spécifiques que les petits États insulaires en développement doivent relever dans le domaine du transport durable, en ajoutant que ces défis étaient aggravés par les changements climatiques.
Pour M. Acharya, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ne sera couronné de succès que si une attention spéciale est accordée aux pays vulnérables. Les investissements supplémentaires à consentir dans les infrastructures pour assurer des systèmes de transport durable, atteindre les cibles de l’Accord de Paris sur les changements climatiques et faire face à la croissance de la population sont élevés, a averti le Secrétaire général adjoint. Il a mis en exergue les difficultés éprouvées par les pays précités pour obtenir les investissements nécessaires en appui de leurs efforts dans le domaine du transport durable. La nécessité d’éviter de laisser de côté des individus et d’assurer un changement transformateur est au cœur des objectifs de développement durable, a-t-il rappelé, en soulignant que ces objectifs devraient devenir réalité pour les pays les plus vulnérables.
Mme LIU FANG, Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), a abordé la question du transport durable au prisme, tout d’abord, de l’objectif 8 qui concerne la promotion d’une croissance soutenue et du plein emploi. Le transport aérien est un facteur essentiel pour le développement, tout en générant des emplois de qualité, a-t-elle dit. Soixante-trois millions d’emplois, a-t-elle estimé, sont liés au secteur aérien. Le volume des passagers double tous les 15 ans. Le volume de trafic, a-t-elle précisé, aura ainsi doublé en 2030. L’objectif 9 relatif à une industrialisation durable est une priorité pour notre secteur, a-t-elle souligné. La représentante de l’OACI a néanmoins averti que les financements publics ne suffiront pas pour moderniser les infrastructures de transport aérien. L’OACI travaille à établir des partenariats avec des acteurs privés pour obtenir les fonds nécessaires. Elle a insisté sur les efforts de l’OACI pour atténuer les nuisances sonores dans les aéroports. Combattre les changements climatiques, a-t-elle dit, est une priorité absolue. Elle a indiqué que 66 États représentant 86% du trafic aérien étaient associés à l’initiative de l’OACI visant à diminuer les émissions de gaz à effet de serre par le biais notamment de la construction d’aéronefs à faible empreinte carbone.
M. WALID ABDELWAHAB, Directeur des infrastructures de la Banque islamique de développement, a indiqué que les 57 États membres de l’Organisation de la coopération islamique siégeaient au sein de la Banque islamique de développement. Il a précisé que la Banque s’était associée à d’autres banques de développement pour s’acquitter de l’engagement pris lors de la Conférence RIO+20 visant à mobiliser 175 milliards de dollars sur 10 ans pour atténuer les conséquences des changements climatiques. Le transport doit occuper la place qui lui revient dans l’ordre du jour international, a-t-il recommandé. Il a ainsi soutenu que la question du transport était souvent reléguée au second plan. Le fait qu’un milliard de personnes n’ont pas accès à l’électricité attire plus l’attention que le milliard de personnes qui n’ont pas accès à un mode de transport durable, a-t-il déclaré. M. Abdelwahab a, enfin, insisté sur la nécessité de passer des paroles aux actes en mobilisant les ressources nécessaires au renforcement des infrastructures, dans le cadre notamment du Forum mondial sur les infrastructures qui vise à combler les lacunes dans ce domaine.
M. KAMEL BEN NACEUR, Directeur des politiques et technologies d’énergie durable à l’Agence internationale de l’énergie, a déclaré que le transport avait besoin de l’énergie et qu’inversement, l’énergie avait besoin du transport. « Il faut décarboniser le secteur des transports pour parvenir aux cibles de l’Accord de Paris », a-t-il préconisé, en soulignant la nécessité, pour ce faire, de disposer de données plus fiables. Il a indiqué que l’Agence disposait d’un réseau de 6 000 experts dans le monde entier pour remédier aux défis technologiques dans le domaine de l’énergie. L’Agence a établi une carte technologique qui nous permet de prévoir les besoins en vue de pérenniser l’emploi de l’énergie propre dans les transports, a-t-il expliqué. M. Ben Naceur a recommandé la mise en place d’incitations financières en vue de la mise en place de flottes de véhicules à faible émission de carbone et l’arrêt des subventions aux industries consommatrices d’énergie fossile. Avant de conclure, il a estimé qu’il faudrait mettre en place des systèmes de transport à faible empreinte de carbone et à coût réduit.
M. GARRY NEU, Cargolux Airlines International, a affirmé que le secteur aérien avait fait de la durabilité l’un des axes de sa stratégie de développement. « Nous voulons diminuer en 2050 par deux les émissions de gaz à effet de serre liées au secteur aérien par rapport à leur niveau de 2005 », a-t-il assuré. L’aviation est en pointe des efforts dans ce domaine, bien que ce secteur, a-t-il fait remarquer, ne représente que 15% des émissions de gaz à effet de serre liées au secteur des transports. La question des biocarburants durables est essentielle pour garantir des modes de transport durable, a-t-il assuré. Les émissions de gaz à effet de serre causées par les avions, aujourd’hui, représentent 70% de plus qu’en 1960 et les nuisances sonores ont été réduites de 30%, a-t-il indiqué.
Mme LIZ JONES, experte du Gouvernement du Royaume-Uni, a expliqué que son pays était engagé dans 20 programmes liés à la promotion du transport durable dans le monde, notamment en Afrique. Nous avons un programme de couloir économique avec le Pakistan, a-t-elle affirmé, en précisant que ces programmes représentaient 260 millions de livres sterling. Elle a estimé que le secteur du transport apprenait beaucoup du secteur de l’énergie, notamment à travers des partenariats étroits établis avec les acteurs du secteur privé. Le premier chantier d’un transport durable est la sécurité routière, a-t-elle dit.
M. ARKHOM TERMPITTAYAPAISITH, Ministre des transports de la Thaïlande, a affirmé que son pays avait réalisé la quasi-totalité des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Les grands axes du plan stratégique national pour les transports pour les 20 prochaines années portent sur la connectivité entre les villes, la maximisation des investissements dans les routes et la promotion de « villes vertes », a assuré le Ministre thaïlandais des transports. Il a mentionné le plan de construction de 10 nouvelles lignes de métro à Bangkok, qui devrait être approuvé l’année prochaine. Enfin, il a évoqué le lancement d’un ticket commun valable pour tous les types de transport à Bangkok, que ce soit le train, le métro ou bien encore le bateau.
Les délégués de la Chine et du Népal, ainsi que le Directeur de l’Institut de la planification stratégique du Turkménistan ont brièvement pris la parole pour évoquer les projets de leur pays relatifs au transport durable.
Table ronde: « Atteindre les plus isolés: défis et opportunités du transport rural »
Le transport est un élément clef du développement rural, permettant aux agriculteurs, y compris les femmes et les petits agriculteurs, d’accéder aux marchés, à l’emploi, aux services de santé, aux interactions sociales et au monde en dehors de leurs villages ou des communautés locales, ont estimé les experts qui se sont exprimés lors de cette table ronde portant sur les zones rurales isolées privées des transports de base.
Cependant, les priorités en matière de transport durable pour les zones rurales doivent aller au-delà de la simple construction de routes plus durables. La réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en milieu rural nécessitera une approche holistique du transport fondée sur l’amélioration des infrastructures, le transfert de technologie et les innovations, des priorités en matière de santé et de sécurité.
M. SHANTANU MUKHERJEE, Chef du Service de l’analyse des politiques et de la recherche à la Division du développement durable du Département des affaires sociales et économiques des Nations Unies, qui animait cette discussion, a affirmé que l’un des exemples les plus frappants des laissés-pour-compte étaient les habitants des zones rurales, lesquels ne bénéficient pas des services essentiels de transport.
M. ABAYOMI BABALOLA, responsable du Secteur des transports au sein de la Banque africaine de développement, a fait état des différents programmes de la Banque consistant à garantir l’électricité, l’alimentation et l’industrialisation, à intégrer le continent et à améliorer les conditions de vie des Africains, le transport durable étant ainsi au cœur des objectifs et occupera tous les débats. Parmi les défis qu’il faut relever, il a fait état de la priorité faible accordée au transport durable sur le continent, l’accès des services demeurant un problème, notamment en termes de coûts.
De même, a-t-il souligné l’absence de sécurité dans les services, et surtout, d’infrastructures. Il faut adopter une approche rurale intégrée, a-t-il recommandé. Il a ensuite appelé à mobiliser davantage de ressources pour venir en aide aux communautés rurales et améliorer le processus de participation avec des organisations non gouvernementales, la société civile et identifier les besoins en matière de transport dans les zones rurales. M. Babalola a, enfin, mis l’accent sur l’efficacité de partenariats, en particulier public-privé, pour renforcer le transport rural sur le continent.
Mme LAURA CAPOBIANCO, d’ONU-Femmes, responsable de l’initiative de l’ONU « Des villes sûres et accueillantes pour tous », a mis l’accent sur l’importance des zones rurales dans les différents programmes d’ONU-Femmes. Les femmes et les filles doivent être autonomisées socialement et économiquement dans les espaces publics où elles peuvent faire l’objet de harcèlement ou de violence sexuels.
Le nouveau programme visant à des villes sûres et sécurisées doit permettre à tous et à toutes de travailler sans craindre des violences et des intimidations, a-t-elle dit. Les études montrent en effet que les transports publics sont les espaces principaux dans lesquels les femmes sont susceptibles d’être victimes de violences et de harcèlement. Mme Capobianco a insisté sur la nécessité d’avoir une volonté politique forte pour garantir une bonne planification urbaine et obtenir des résultats.
M. STEPHEN CAHILLL, du Module mondial de la logistique du Programme alimentaire mondial (PAM), a constaté que travailler dans des régions isolées était complexe dans des pays comme l’Iraq, la Syrie ou le Soudan du Sud. Au-delà de l’aménagement routier, des projets hydroélectriques et hydrologiques, tels qu’il en existe au Soudan du Sud, devraient contribuer à améliorer l’accès aux communautés éloignées. Le PAM, pour sa part, déploie des efforts pour acheter aux agriculteurs des régions isolées.
L’ouverture du transport en milieu rural, cependant, a comporté des risques, y compris dans la propagation du VIH/sida. Il a également expliqué que si l’on considère le transport rural en conjonction avec les réseaux internationaux, il faut une coopération étroite entre les secteurs public et privé.
Mme CHIKAKO TAKASE, Directrice du Centre des Nations Unies pour le développement régional, a fait état des forums régionaux en Asie au cours des 10 dernières années. Elle a souligné l’importance de la planification participative d’un développement régional intégré. Selon Mme Takase, l’amélioration du transport rural contribue à favoriser le développement et l’accès aux services de base, comme l’eau potable, l’éducation, la santé et les marchés, ainsi que la transformation économique et sociale et l’éradication de la pauvreté.
Lors de la brève discussion qui a suivi les exposés des experts, le délégué de la Zambie a soulevé le défi de la sécurité et du mauvais état, en particulier lors de la saison des pluies, qui entravent l’accès des transporteurs.
Le représentant du Pakistan a souligné l’importance de connecter les zones rurales aux zones urbaines, tout en regrettant que l’on n’ait pu aborder la question de la participation des acteurs non étatiques qui pourraient réaliser le transport durable.
Table ronde: « Les solutions du transport durable à la crise du climat »
Les experts qui participaient à cette table ronde, animée par M. KAVEH ZAHEDI, de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), se sont penchés sur le défi des liens étroits entre le transport et les changements climatiques. Le secteur du transport est en effet responsable de 23% des émissions de gaz à effet de serre, tandis que de nombreuses infrastructures de transport devraient subir les conséquences des changements climatiques, à commencer par les ports, confrontés à la montée des eaux. C’est pourquoi, il est essentiel de réduire la consommation en énergie fossile dans les différents modes de transport et de renforcer leur résilience face aux changements climatiques.
M. LI XIAOPENG, Ministre des transports de la Chine, a détaillé les efforts de son pays pour remédier au défi des changements climatiques, en œuvrant notamment à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à la promotion d’une économie à faible empreinte carbone. La Chine a adopté une série de mesures à cette fin, dans le cadre de son dernier plan, a-t-il indiqué, avant de souligner l’engagement indéfectible de son pays en faveur de la lutte contre les changements climatiques. Le Ministre a enfin souligné la nécessité de mettre en place des systèmes intégrés libérant le potentiel économique tout en préservant l’environnement.
Mme LIU FANG, Secrétaire général de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), a rappelé que le volume des passagers doublait tous les 15 ans. Le volume de trafic aérien, a-t-elle précisé, aura ainsi doublé en 2030. Elle a précisé que les émissions de gaz à effet de serre causées par les avions aujourd’hui étaient de 70% inférieures à leur niveau en 1960. Elle a indiqué plusieurs des axes suivis actuellement par le secteur aérien pour réduire davantage ces émissions de gaz à effet de serre, notamment le développement de nouvelles technologies visant à rendre les appareils plus efficients d’un point de vue énergétique et l’élaboration de procédures de navigation conduisant à des économies en énergie. En conclusion, elle a insisté sur le robuste engagement des pays, sous l’égide de l’OACI, en vue de parvenir à un secteur aérien durable.
M. JESPER LOLDRUP, de l’Organisation maritime internationale (OMI), a indiqué que l’OMI, qui est une organisation de régulation dans le domaine maritime, a adopté plusieurs mesures afin de parvenir à des navires énergétiquement efficients. En juillet 2011, un index d’efficience énergétique a été créé qui s’applique à tous les navires. Il a déclaré que d’ici à 2025 tous les navires devront être 25% plus efficients énergétiquement qu’ils ne le sont maintenant. À la suite de l’adoption de l’Accord de Paris, les États membres de l’OMI ont insisté sur la nécessité d’une meilleurs collecte de données et adopté une feuille de route une réduction des gaz à effet de serre qui débouchera sur une stratégie finale en 2023. Enfin, il a insisté sur l’appui de son organisation pour aider les pays visant à mettre en œuvre les normes de l’OMI sur l’efficience énergétique.
Mme REGINA ASARIOTIS, de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a déclaré que les pays les plus vulnérables étaient au cœur des efforts de la CNUCED, y compris pour la promotion d’un transport durable. Elle a insisté sur les conséquences négatives des changements climatiques pour des infrastructures de transport clefs comme les ports qui font face à la montée des eaux. La CNUCED, a assuré Mme Asariotis, apporte son expertise et une assistance technique pour renforcer la résilience de ces infrastructures, notamment dans les pays en développement des Caraïbes. Une évaluation des risques fine est nécessaire pour prendre des mesures d’atténuation efficaces, a-t-elle estimé.
M. SERGEY ANDREEV, du Ministère des transports de la Fédération de Russie, s’est également exprimé, mais un problème d’ordre technique lié au système d’interprétation n’a pas permis d’assurer la couverture de son intervention.
Table ronde: « Les transports publics au XXIe siècle: durabilité du déplacement des passagers et du fret »
Des systèmes de transport sûrs, accessibles, pratiques et écologiques seront essentiels à la réalisation du développement durable. L’amélioration et l’expansion des systèmes de transports publics durables, y compris le transport rapide en autobus, le métro, les trains légers et les ferries devraient figurer au premier plan.
Les solutions de mobilité à court et à long termes qui exploitent le potentiel des technologies de l’information et de la communication et intègrent la mobilité active, ainsi que les nouvelles options issues de l’économie partagée permettront aux passagers de satisfaire leurs besoins de déplacement et aux marchandises d’être transportées de manière plus durable tout en minimisant le rôle des véhicules privés et en réduisant la consommation d’énergie et les effets sur le climat.
M. BAMBANG SUSANTONO, Vice-Président de gestion du savoir et du développement durable de la Banque asiatique de développement, qui animait cette discussion, a rappelé que le transport durable était un élément clef pour atteindre les objectifs de développement durable, en particulier les objectifs 9 et 11 relatifs, respectivement, à la construction d’infrastructures résilientes et à la promotion de villes durables et résilientes. D’ici à 2050, deux tiers de la population mondiale devrait vivre dans des villes, a-t-il indiqué.
M. LEONARDO CASTRO, Secrétaire, Belo Horizonte (Brésil), rappelant que Belo Horizonte était la troisième ville plus importante du Brésil, a insisté sur la complexité des défis liés aux modes de transport. En 2014, à l’occasion de la Coupe du monde de football, un système de transports avait été mis en place afin de connecter la partie haute et la partie basse de la ville. La concrétisation de ce projet, a-t-il cependant précisé, s’est heurtée au lobby résolu des propriétaires terriens. Les efforts d’obstruction des propriétaires terriens ont pu être surmontés grâce à la mobilisation des acteurs de la société civile encouragée par la municipalité de Belo Horizonte. La société civile, a-t-il soutenu, doit exercer des pressions quotidiennes pour avoir son mot à dire sur la manière dont la ville se développe et sur la durabilité des transports.
M. IRAKLI LEKVINADZE, Maire adjoint de Tbilissi (Géorgie), a indiqué que Tbilissi avait adopté un plan visant à faire de la ville une ville intelligente d’ici à 2030, dont l’un des axes essentiels est le développement et la durabilité des transports publics pour faire face à la forte augmentation du nombre d’usagers. La ville de Tbilissi souhaite progressivement augmenter le nombre d’autobus propres dont elle dispose, en précisant qu’ils assuraient les services depuis, en moyenne, 12 ans. Il a aussi mentionné l’inauguration, l’année prochaine, d’une nouvelle station de métro dans une zone ayant connu une forte poussée démocratique. Cette station viendra s’ajouter aux 30 autres que compte le métro à Tbilissi. Enfin, il a indiqué que le dernier axe de ce plan était de limiter le nombre d’automobiles dans la ville, au profit des transports publics.
M. PAUL APTHORP, Vice-Président de Directeur fondateur de Greater Meakong Subregion, de la Freight Transport Association, a insisté sur l’enjeu que constitue la revente dans les pays en développement de camions anciens et polluants fabriqués dans les pays développés. Les pays en développement, a-t-il indiqué, préfèrent ces camions plutôt que les camions de fabrication moderne qui sont plus chers et parfois complexes à entretenir. La durée d’utilisation moyenne d’un camion au Myanmar, a-t-il dit, est de 30 ans. Dans ce pays, a-t-il fait remarquer, certains camions datent de la Seconde Guerre mondiale. Il a précisé que très peu de pays en développement, dont la Thaïlande, construisaient des camions. « Les pays en développement ne doivent pas devenir la décharge des camions provenant des pays occidentaux », a-t-il prévenu. M. Arthorp a encouragé ces pays à augmenter les différentes taxes sur les camions les plus anciens afin de favoriser leur retrait de la circulation. Il est nécessaire, a-t-il estimé, que les petites et moyennes entreprises de transport aient accès aux mécanismes de financement afin qu’elles puissent renouveler leur flotte avec des camions plus propres.
M. PHILIP TURNER, de l’Association internationale des transports publics, a souligné l’importance d’étendre les transports publics pour mettre en œuvre l’Accord de Paris sur les changements climatiques. « Nous devons passer à des solutions de transport plus multimodales grâce au renforcement des transports publics », a-t-il préconisé. La bonne gouvernance est essentielle pour la mise en place de transport durable, a-t-il dit, avant de souligner l’acuité de la question du financement. Il ne faut pas dépenser plus mais, au contraire, canaliser les fonds vers les projets les plus porteurs, a-t-il estimé, citant ainsi l’amélioration de la flotte d’autobus de la ville de Londres afin de la rendre plus propre. L’Association peut apporter une aide précieuse en vue du renforcement des capacités des réseaux de transport public.
La déléguée du Bureau régional pour l’Asie centrale de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime a insisté sur le rôle clef que peut jouer le secteur du transport pour combattre la criminalité organisée. Il faut éviter que les transports soient utilisés à des fins criminelles, a-t-elle prévenu. Contrairement aux idées reçues, il ne s’agit pas d’une criminalité invisible puisque des valises contenant 9 millions de dollars ont récemment été saisies à l’aéroport d’Istanbul.
Pour le représentant de la Thaïlande, il faudrait uniformiser les coûts en matière des transports de marchandise. Les représentants de l’Ukraine et de l’entreprise Alsthom ont également pris la parole.