7814e séance – après-midi  
CS/12591

De hauts responsables de l’ONU demandent un embargo sur les armes au Soudan du Sud afin de prévenir le risque de génocide

Le Conseiller spécial du Secrétaire général pour la prévention du génocide, M. Adama Dieng, a exhorté, cet après-midi, le Conseil de sécurité à imposer un embargo sur les armes au Soudan du Sud, ainsi que le gel des avoirs et des interdictions de voyager contre « les plus hauts dirigeants sud-soudanais », afin de prévenir le risque de génocide dans le pays.  « L’heure est grave au Soudan du Sud et il est urgent d’agir », a affirmé M. Dieng.

Le Président du Comité créé par la résolution 2206 (2015) concernant ce pays, M. Fodé Seck, a appuyé cette demande, tandis que la Représentante spéciale, Mme Ellen Margrethe Løj, qui s’exprimait pour la dernière fois devant le Conseil,  a mis en garde contre un risque de « guerre civile » à grande échelle dans le pays.  Plusieurs délégations, dont celles des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et de la Nouvelle-Zélande, se sont dites en faveur d’un tel embargo.  Le délégué de la Fédération de la Russie l’a en revanche rejeté.

Mme Løj, qui présentait le dernier rapport* du Secrétaire général sur le Soudan du Sud, a dressé un tableau alarmant de la situation dans ce pays.  Elle a décrit une situation sécuritaire volatile dans l’ensemble, une exacerbation des tensions ethniques, ainsi que des affrontements sporadiques entre l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) et d’autres groupes armés dans l’État de l’Équatoria.  Elle a exhorté le Gouvernement provisoire d’union nationale à en faire plus pour remédier au climat d’instabilité et de violence.  « Les canons doivent être réduits au silence, sous peine de voir la souffrance de la population devenir plus terrible encore », a déclaré Mme Løj.

Ce ton grave a été partagé par le Conseiller spécial du Secrétaire général pour la prévention du génocide, qui a fait un compte-rendu de la mission qu’il a effectuée au Soudan du Sud la semaine dernière.  M. Dieng a identifié de nombreux facteurs qui pourraient conduire à des atrocités de masse, comme par exemple des besoins humanitaires aigus, la multiplication des incidents ou bien encore la profonde méfiance entre la population civile et l’armée.  « La semaine dernière, j’ai vu tous les signes indiquant que la haine ethnique et la prise pour cible de civils pourraient évoluer en génocide si rien n’est fait pour y mettre fin », a-t-il averti.

Outre la demande d’un embargo sur les armes, le Conseiller spécial a encouragé le Conseil de sécurité à demander à la MINUSS d’enquêter sur les incidents relatifs à des crimes haineux et à l’incitation à la violence.  Le Conseil, a-t-il recommandé, devrait établir un mécanisme d’enquête de collecte des éléments de preuve des atrocités, lesquels pourraient être présentés devant des juridictions nationales et internationales.  

Présentant le rapport du Groupe d’experts** créé en application de la résolution précitée, M. Seck a indiqué que la guerre était marquée par des affrontements « sans réel vainqueur » entre les tribus Dinka et les tribus n’appartenant pas à cette ethnie.  Face à cette situation, il a rappelé les recommandations du Groupe, telles que l’embargo et la désignation des décideurs de haut niveau responsables des activités menaçant la paix et la stabilité du pays.

La recommandation d’un embargo a été vigoureusement appuyée par les délégations de la Nouvelle-Zélande, de la France, de l’Espagne ou encore par celle du Royaume-Uni.  Devançant les objections qui seront formulées contre cette idée, la déléguée des États-Unis a indiqué que cet embargo aura un impact important sur le terrain.  « Ceux qui s’opposeront à ces propositions ont eu des mois pour montrer qu’une démarche alternative pouvait  fonctionner », a-t-elle déclaré, en précisant que son pays allait présenter un projet de résolution allant en ce sens.

« Les arguments selon lesquels de telles mesures entraveraient le processus politique seraient pertinents s’il y avait un tel processus dans le pays, ce qui n’est pas le cas », a soutenu le délégué de la Nouvelle-Zélande.  Ces arguments ont été rejetés par leur homologue de la Fédération de Russie, convaincu qu’il était prématuré, à ce stade, de recourir à des sanctions.  « Il semble que certains souhaitent que le Président Kiir connaisse le sort du colonel Qadhafi », a-t-il ironisé, tandis que le représentant du Soudan du Sud a jugé un tel embargo « totalement inacceptable ».  Le représentant de la Chine a, quant à lui, invité  le Conseil à se montrer prudent en envisageant des sanctions.

 

*     S/2016/950
**    S/2016/963

 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Rapport du Secrétaire général sur le Soudan du Sud (période allant du 12 août au 25 octobre 2016) (S/2016/950)

Rapport spécial du Secrétaire général sur l’examen du mandat de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (S/2016/951)

Lettre datée du 15 novembre 2016 adressée au Président du Conseil de sécurité par le Groupe d’experts sur le Soudan du Sud créé par la résolution 2206 (2015) du Conseil de sécurité (S/2016/963)

Déclarations

Mme ELLEN MARGRETHE LØJ, Représentante spéciale du Secrétaire général, a indiqué qu’en dépit des mesures prises par le gouvernement provisoire d’union nationale reconstitué après la crise de juillet, la situation globale sécuritaire demeurait volatile au Soudan du Sud.

Dans l’État de Équatoria, les attaques récurrentes contre les véhicules de tourisme circulant le long des routes principales reliant Djouba aux frontières méridionales du pays ont provoqué des pertes de civils et perturbé l’acheminement des produits et fournitures tant nécessaires, a-t-elle dit.  « Ces attaques ont également exacerbé les tensions ethniques en Équatoria, lesquelles se sont répandues dans d’autres régions du pays ».  Elle a indiqué que ces attaques ciblées, ainsi que les affrontements sporadiques entre l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) et d’autres groupes armés en Équatoria, ont infligé de nouvelles souffrances à la population civile, de nombreuses personnes ayant fui en Ouganda et en République démocratique du Congo.

Dans l’État d’Unité, nous assistons actuellement à des affrontements violents entre les forces de l’opposition alliées à Riek Machar et les éléments affiliés au premier Vice-Président Taban Deng, lesquels se sont alliés à l’APLS, a relevé Mme Løj.  Les combats entre l’APLS et les forces d’opposition pro-Machar, à la fin octobre, ont entraîné l’afflux de centaines de déplacés internes vers la base temporaire de la MINUSS à Leer, a-t-elle rappelé.

Le pays court le risque de sombrer dans une guerre civile à grande échelle qui pourrait rendre presque infructueux tout effort de cohésion nationale, a averti la Représentante spéciale.  Elle a estimé que le Gouvernement provisoire d’union nationale avait encore beaucoup à faire pour mettre un terme à ces incidents qui contribuent à l’instauration d’un climat d’instabilité et de violence, provoquent des déplacements et exacerbent une situation humanitaire déjà grave.  « Les canons doivent être réduits au silence, sous peine de voir la souffrance de la population devenir plus terrible encore », a déclaré Mme Løj.

Elle a souligné qu’il était nécessaire de renforcer les efforts en vue de remédier à la rhétorique incendiaire et aux incitations à la violence constatées au Soudan du Sud.  Depuis la visite du Conseil de sécurité au début du mois de septembre, la Mission a engagé le Gouvernement provisoire d’union nationale en vue de la mise en œuvre des engagements contenus dans le communiqué conjoint publié au terme de ladite visite, a-t-elle assuré.

En ce qui concerne la force de protection régionale, la Représentante spéciale a indiqué que, le 16 novembre, le Gouvernement provisoire d’union nationale a fait circuler un document auprès des membres du Conseil de sécurité donnant l’impression qu’un accord avait été conclu entre le Gouvernement provisoire d’union nationale, le Conseil de sécurité et l’ONU sur les dispositions de la résolution 2304 (2016) et du communiqué conjoint du 4 septembre.

« Je voudrais simplement préciser que, le 16 novembre, nous avons eu une réunion avec le Gouvernement provisoire d’union nationale au sujet de cette Force et de la mise en œuvre du communiqué conjoint.  Mais nous n’avons reçu une copie de ce document qu’après cette réunion et le jour même où elle a été soumise au Conseil de sécurité ».  Elle a indiqué que le contenu de ce document était en train d’être examiné, avant qu’une réponse formelle ne soit communiquée au Gouvernement sud-soudanais.

La Représentante spéciale a précisé que le mandat de la MINUSS continuera d’être encadré par la résolution 2304 (2016).  En ce qui concerne la liberté de circulation, le Gouvernement a convenu que la MINUSS l’informera de ses patrouilles et mouvements, sans néanmoins attendre son approbation formelle, a-t-elle noté.  Malgré les défis qui subsistent dans la mise en œuvre de cette pratique, elle a indiqué que la Mission a réussi à conduire deux patrouilles dans la zone d’Yei au cours du dernier mois, permettant à la MINUSS d’avoir une connaissance directe de la situation désastreuse dans la région.

La Représentante spéciale a ensuite déclaré que la situation humanitaire, déjà extrêmement précaire, empirait de jour en jour.  4,8 millions de personnes souffriraient d’insécurité alimentaire, a-t-elle affirmé, avant d’ajouter que l’insécurité alimentaire s’était étendue aux régions d’Équatoria et de Bahr el-Ghazal.

Alors qu’elle s’apprête à quitter le Soudan du Sud, la Représentante spéciale a estimé que la différence entre le succès ou l’échec de l’Accord de paix  résidera dans l’engagement des parties à poursuivre la mise en œuvre approfondie et inclusive dudit Accord, avec le ferme appui des partenaires régionaux et internationaux du pays.  « J’exhorte tous les acteurs concernés, en particulier les dirigeants sud-soudanais, à ne jamais perdre de vue l’objectif ultime qui est d’offrir un avenir pacifique et prospère pour la population du Soudan du Sud. »

En conclusion, Mme Løj a demandé au Conseil de sécurité de ne pas abandonner le Soudan du Sud pour se consacrer à d’autres défis mondiaux pressants.  « Les victimes de ce conflit ont encore de l’espoir et nourrissent de grandes attentes vis-à-vis de la communauté internationale. »

M. ADAMA DIENG, Conseiller spécial du Secrétaire général pour la prévention du génocide, a fait un compte-rendu de la mission qu’il a effectuée au Soudan du Sud la semaine dernière, en affirmant que les auteurs de violences incluent l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS), l’APLS dans l’opposition, des groupes armés, des milices, et des criminels.  Le Conseiller spécial s’est dit atterré par ce qu’il a observé dans ce pays, où l’escalade de la violence interethnique est réelle, de même que le risque de génocide.  Il a identifié de nombreux facteurs de risques sous-jacents à la commission d’atrocités de masse.  La moitié des ressources de l’État sont englouties par le financement des questions de sécurité dans un contexte de besoins humanitaires aigus, a expliqué  M. Dieng, qui a fait part d’une économie en berne et d’une inflation en hausse, au grand désespoir de la population.  En outre, des éléments en provenance du terrain indiquent que les incidents se multiplient.  Les violations commises par un certain nombre d’acteurs continuent d’être perpétrées contre des civils dans la plus grande impunité et l’absence de reddition de comptes, des ONG, des journalistes et des militants des droits de l’homme étant aussi pris pour cible.

« Dans mes conversations avec les gens sur place, j’ai ressenti une profonde méfiance entre la population civile et l’armée », qui est souvent décrite comme « amorphe » et « indisciplinée » et formée à partir de deux « forces » antagonistes, a poursuivi le Conseiller spécial.  « La population ne considère plus l’armée comme le garant de sa sécurité, mais davantage comme une entité dont il faut se méfier, à moins de rejoindre ses rangs, puisqu’elle est l’un des rares employeurs » du pays, a-t-il relevé.  « Un homme âgé que j’ai rencontré sur place a résumé la situation en disant qu’il pouvait voir la peur dans les yeux de certains, et l’enthousiasme dans ceux des autres. »  En outre, en dépit de la crise humanitaire et des déplacements prolongés de populations, le Gouvernement et les groupes armés non étatiques continuent d’entraver l’acheminement de l’aide humanitaire aux nécessiteux.  L’amenuisement des ressources contribue aux divisions et à la « polarisation extrême » de certains groupes ethniques.  Certains d’entre eux ont confié au Conseiller spécial leur sentiment de « trahison », alors que l’APLS est majoritairement formée de Dinka, et qu’ils ont le sentiment que cette homogénéisation s’inscrit dans le cadre plus large d’une stratégie d’attaques systématiques contre les Nuer.  M. Dieng a toutefois précisé que des incidents le mois dernier avaient pris pour cible des Dinka.

Dans ce contexte, M. Dieng a encouragé le Conseil de sécurité à envisager plusieurs options, notamment demander à la MINUSS de surveiller, enquêter et faire rapport sur tous les incidents relatifs à des crimes haineux et à l’incitation à la violence.  Le Groupe d’experts sur le Soudan du Sud pourrait également enquêter et faire rapport sur les individus qui incitent à commettre des violences et sont responsables des meurtres motivés par des considérations ethniques et de discours haineux.  « Compte tenu du scénario actuel, il est urgent que le Conseil de sécurité impose un embargo sur les armes », a tranché M. Dieng, pour qui ce régime de sanctions ne devrait pas se limiter à quelques individus.  Pour lui, le gel des avoirs et les interdictions de voyager devraient être plus largement appliqués, évoquant « les plus hauts dirigeants sud-soudanais ».  « Il existe un système de banques internationales, de marchands d’armes et d’intermédiaires qui a contribué à perpétuer le conflit et le Conseil de sécurité a le pouvoir de l’infléchir. »  Le Conseiller spécial a également plaidé pour que le Conseil de sécurité établisse un mécanisme d’enquête qui collecterait et préserverait les éléments de preuve des atrocités qui pourraient ensuite être présentés devant des juridictions nationales et internationales.  « La semaine dernière, j’ai vu tous les signes indiquant que la haine ethnique et que la prise pour cible de civils pourrait évoluer en génocide si rien n’est fait pour y mettre fin. »  J’exhorte le Conseil de sécurité et les États membres de la région à faire preuve d’unité et à agir, a déclaré le Conseiller spécial avant de conclure.

En tant que Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2206 (2015) concernant le Soudan du Sud, M. FODÉ SECK (Sénégal) a indiqué que, dans son rapport d’activités, le Groupe d’experts constatait une « grave détérioration » de la situation politique et des conditions de sécurité, estimant qu’il faudrait s’attendre à une escalade de la violence au début de la saison sèche, en novembre et décembre.  Dans ce même rapport, a-t-il dit, le Groupe d’experts a noté que le « principal facteur d’extension et d’aggravation de la guerre au Soudan du Sud » était l’attitude belligérante du Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan (M/APLS) dans le Gouvernement, d’une part, et du M/APLS dans l’opposition, d’autre part.

Le Groupe d’experts a également souligné que la guerre était « de plus en plus marquée par des actes visant les civils en fonction de leur appartenance tribale », se transformant en affrontements « sans réel vainqueur » entre les tribus Dinka et les tribus n’appartenant pas à cette ethnie, a poursuivi M. Seck.  Pour lui, le rapport d’activités fait état d’une extension des conflits dans la région de l’Équatoria, où le Groupe d’experts a recensé de nombreux cas de violences sexuelles, de destruction de villages, de pillages et de meurtres de civils.  Pour le Groupe d’experts, a-t-il souligné, des atrocités et des violations flagrantes des droits de l’homme et du droit international humanitaire sont en train d’y être commises.

S’agissant de la situation politique, le Groupe d’experts a constaté qu’elle s’était nettement dégradée, le cessez-le-feu permanent prévu par l’Accord sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud n’ayant pas été respecté par les parties après les affrontements de juillet dernier.  M. Seck a observé que le Groupe n’avait recensé que deux cas dans lesquels des progrès semblaient avoir été enregistrés sur le plan institutionnel: la création de l’Assemblée législative nationale provisoire et l’approbation de sites de cantonnement dans les régions de l’Équatoria et du Bahr el-Ghazal, mesures qui ont toutes deux été contestées.

M. Seck a aussi affirmé que le Groupe d’experts avait noté une réduction du champ d’action de la société civile, en raison de restrictions bureaucratiques croissantes et de mesures d’intimidation.  Relevant que les lois et règlements adoptés en 2016 contiennent des dispositions non conformes aux meilleures pratiques internationales, le Groupe en conclut que ces mesures ont provoqué un blocage du processus de réconciliation et du processus politique dans le pays.

Sur le plan humanitaire, le Groupe d’experts constate une accélération des déplacements massifs de population.  Le 16 septembre dernier, lorsque le Coordonnateur a présenté ce rapport au Comité, le Soudan du Sud avait atteint un million de réfugiés fuyant le pays, a précisé le Président du Comité.  En s’adressant au Comité le 11 novembre, le Coordonnateur a indiqué qu’en l’espace de deux mois,  le nombre de réfugiés s’était accru de 250 000 personnes.  De surcroît, a souligné M. Seck, 4,8 millions de personnes, soit le tiers de la population demeurant au Soudan du Sud, se trouvent en situation d’insécurité alimentaire grave.

Le Groupe a par ailleurs signalé ce qu’il considère être de l’obstruction systématique vis-à-vis des Nations Unies et des missions humanitaires, faisant état d’attaques à leur encontre.  Indiquant que le M/APLS dans le Gouvernement « diabolise » l’ONU de manière incessante, le rapport relève 19 violations en septembre.  Il décrit également une situation particulièrement grave pour les travailleurs humanitaires, précisant que 67 ont été tués depuis le début du conflit en décembre 2013, dont trois en une seule semaine en octobre dernier. Concernant l’accès de l’aide humanitaire, 640 incidents ont été recensés au cours des neuf premiers mois de 2016, dont 81 en septembre, a encore précisé M. Seck en citant le rapport du Groupe d’experts.

Face à cette situation, le Groupe a formulé trois recommandations.  Tout d’abord, il réitère sa demande de désignation par le Comité des décideurs de haut niveau qui sont responsables des activités et des politiques menaçant la paix, la sécurité et la stabilité du pays, et qui ont les moyens de changer le cours de la guerre.  D’autre part, il invite à nouveau le Conseil de sécurité à imposer au Soudan du Sud un embargo général sur les armes.  Dans sa troisième recommandation, il appelle à ce que les organismes de contrôle bancaire de plusieurs États de la région soient contactés et qu’un communiqué de presse soit publié pour engager les banques d’État et les banques commerciales à procéder au gel des avoirs des six personnes désignées par le Comité en juillet 2015.

Évoquant les travaux du Comité depuis son précédent exposé, le 19 février dernier, M. Seck a notamment indiqué que l’instance avait entendu le 14 mars Mme Leila Zerrougui, Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé, puis le 16 septembre, Mme Zainab Hawa Bangura, Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.  Avant de conclure son exposé, il a rappelé qu’il avait l’intention de se rendre au Soudan du Sud, en Éthiopie et au Soudan entre le 10 et le 19 décembre.  Ce voyage, a-t-il précisé, a pour objet de donner suite au paragraphe 11 de la résolution 2290, dans lequel le Conseil de sécurité préconise la tenue de consultations régulières avec les États Membres concernés ainsi qu’avec les organisations internationales, régionales et sous-régionales.

Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a déclaré que le Soudan du Sud était au bord du gouffre.  Il est temps de réagir, a-t-elle dit.  Tous les « ingrédients » sont en place pour une dramatique escalade de la violence dans le pays, a-t-elle fait remarquer, en précisant que le premier était l’aggravation des tensions ethniques.  Le second ingrédient est que l’ONU ne pourra pas endiguer une recrudescence des violences et la commission d’atrocités de masse, a-t-elle averti, en ajoutant que la MINUSS n’en avait pas les capacités.  Mme Power a noté que cette incapacité de la Mission était aggravée par l’opposition du Gouvernement sud-soudanais au déploiement de la force de protection régionale, constituée d’un effectif de 4 000 hommes, autorisé pourtant par le Conseil il y a trois mois.  Au titre du troisième ingrédient, Mme Power a mentionné les intimidations des dirigeants sud-soudanais vis-à-vis des journalistes et de la société civile.  La situation au Soudan du Sud rappelle les signes avant-coureurs au Rwanda et à Srebrenica que l’ONU a préféré ignorer, a-t-elle averti.

La déléguée a déclaré qu’il fallait considérer les dirigeants sud-soudanais pour ce qu’ils sont: « des acteurs cyniques » qui ont donné la priorité à leurs intérêts personnels.  Elle a, en outre, affirmé que le principe de souveraineté, essentiel dans les relations internationales, ne devrait pas revenir à conférer à un gouvernement le droit de commettre des atrocités de masse.  Les États-Unis sont en faveur d’un embargo sur les armes, afin d’endiguer la violence du Gouvernement sud-soudanais, a-t-elle soutenu.  Devançant les objections qui seront formulées contre cette proposition d’embargo, Mme Power a prévenu que cet embargo visant à empêcher l’acquisition d’armes lourdes et d’aéronefs aura un impact important sur le terrain.  Elle s’est également prononcée en faveur d’interdictions de déplacements frappant certains responsables.  Ceux qui s’opposeront à ces propositions ont eu des mois pour montrer qu’une démarche alternative pouvait  fonctionner, a-t-elle déclaré.  En conclusion, Mme Power a souligné qu’il était temps que le Conseil fasse preuve de « sérieux » et assume ses responsabilités au Soudan du Sud.

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) s’est inquiété de la recrudescence de la  violence au Soudan du Sud et, notamment, des violations généralisées des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  Il a fait remarquer que certaines violations des droits de l’homme avaient un aspect ethnique et que le discours haineux continuait de se répandre.  La crise humanitaire continue à s’aggraver, a-t-il aussi constaté en citant les chiffres alarmants publiés par les Nations Unies.  À ce jour, a-t-il précisé, plus d’1 million de réfugiés, plus de 1,6 million de personnes déplacées et près de 5 millions de personnes souffrant d’insécurité alimentaire aiguë.  La délégation uruguayenne est également préoccupée par la prolifération d’armes, a indiqué le représentant avant de rappeler au Gouvernement sud-soudanais qu’il porte la responsabilité principale de protéger ses propres citoyens, indépendamment de leur origine ethnique et de leur affiliation politique.

Il faudrait adopter des mesures pour réformer le processus politique et arriver à une solution pacifique du conflit, a recommandé M. Rosselli en plaidant pour la cessation des hostilités, la reprise du dialogue et des mesures urgentes pour mettre fin à l’impunité.  Il s’est montré favorable à la mise en place d’un tribunal hybride tel que proposé par l’Union africaine.  Par ailleurs, le représentant a indiqué que sa délégation n’avait pas été informée d’un accord que le Soudan du Sud aurait soumis à certains membres du Conseil de sécurité pour examen.  En ce qui concerne la MINUSS, il a jugé essentiel qu’elle puisse fonctionner conformément à son mandat et il a donc demandé que le Gouvernement du Soudan du Sud lève toute restriction qui pourrait entraver son fonctionnement.  Enfin, il s’est félicité que les conclusions de l’enquête indépendante menée sur les incidents violents de juillet dernier soient prises en compte par le Secrétariat pour prendre les mesures adéquates.  Pour éviter à l’avenir des failles dans la protection des civils, il a conseillé de revoir les processus de sélection des cadres, ainsi que le modus operandi de la Mission, tout en veillant à ne pas laisser impunis les auteurs d’abus sexuels.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a regretté que la situation au Soudan du Sud se détériore et que les pourparlers politiques soient dans l’impasse alors que nous sommes face à une « tragédie ».  Nous devons admettre qu’il ne s’agit pas d’une situation ordinaire, a-t-il dit, affirmant à la suite du Conseiller spécial Adama Dieng que les signes précurseurs d’un génocide sont réunis.  Depuis que la résolution portant création du Soudan du Sud en 2011 a été adoptée, le Conseil a été saisi 70 fois de la situation dans ce pays, s’est alarmé le représentant, qui a appelé la communauté internationale à se mobiliser. 

Nous savons les mesures qu’il faut prendre, a affirmé le délégué britannique, qui a demandé la fin immédiate des hostilités, la libre circulation des personnels humanitaires et la relance des efforts en faveur d’une solution politique inclusive.  « Le tableau est sombre et pourrait s’assombrir encore », a-t-il prévenu.  C’est pourquoi, il a plaidé pour l’imposition d’un régime de sanctions à l’encontre du Soudan du Sud.  Nous savons qu’un embargo peut porter ses fruits à court et à long terme pour plusieurs raisons et, notamment, parce que le pays dispose d’infrastructures développées pour acheminer des armes, a souligné M. Rycroft.

M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) s’est dit préoccupé par les violations des droits de l’homme, du recrutement d’enfants et des appels à la haine et à la violence entre groupes ethniques.  Face à la situation dramatique au Soudan du Sud, le représentant s’est dit convaincu du rôle fondamental joué par la MINUSS, en particulier pour assurer la protection des civils.  Il l’a encouragée à prendre toutes les mesures nécessaires afin d’éviter que les conditions de sécurité et de protection à l’intérieur du camp de civils de Bentiu ne débouchent sur une situation similaire à celles enregistrées dans les camps de Malakal ou Djouba.

Le représentant du Venezuela a estimé que le conflit ne pouvait trouver d’issue militaire et que les efforts devraient être portés sur la revitalisation du processus politique.  À cet égard, la stratégie politique évoquée par le Secrétaire général doit intégrer, a précisé M. Ramírez Carreño, des aspects tels que la mise en place effective du cessez-le-feu, la démilitarisation des principales villes du pays et des initiatives de rapprochement entre les parties en conflit.  Il est également essentiel que l’Accord de paix soit mis en œuvre, car il est le seul en mesure de mettre un terme à la crise et de parvenir à une paix durable au Soudan du Sud, a-t-il estimé.  La force de protection régionale doit, au préalable, obtenir le consentement du pays hôte.  Pour le Venezuela, le Gouvernement provisoire d’union nationale avance dans cette direction et que le Conseil de Sécurité doit agir avec prudence et détermination, a indiqué son représentant.

M. KORO BESSHO (Japon) a dit reconnaître que si Djouba était relativement calme ces temps-ci, la situation sécuritaire dans le reste du pays est caractérisée par de fréquentes attaques armées et des meurtres de civils.  On ne peut pas être optimiste à voir ces faits et le Conseil de sécurité devrait continuer de surveiller ce pays, a-t-il dit, soulignant que la question est maintenant de savoir comment le Conseil peut améliorer la situation.  Pour la délégation, peu importe l’action entreprise, le but ultime doit être l’avancement du processus politique.  En cela, si la volonté des parties est primordiale, l’engagement des pays voisin est lui aussi crucial. 

Dans ce contexte, la décision malheureuse du Kenya de retirer ses troupes du pays ne peut que souligner ce point, a encore déclaré le représentant, en ajoutant qu’il était d’une extrême importance que les Nations Unies, l’Union africaine et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) se coordonnent afin de faciliter le développement et le processus politique.  Le Japon apprécie à cet égard les efforts du Secrétaire général, en consultation avec l’IGAD et l’Union africaine  pour dessiner une stratégie politique visant la cessation des hostilités et le retour des parties au dialogue, a encore déclaré M. Bessho, en exprimant par ailleurs sa reconnaissance pour le rôle et l’engagement de Haut-Représentant de l’Union africaine, M. Alpha Oumar Konaré.

En tant que pays contributeur de troupes à la MINUSS, le Japon est en faveur d’une coopération accrue avec les acteurs humanitaires et avec les communautés et les autorités locales, a assuré son représentant.  Il est dans le même temps préoccupé par le nombre croissant de tensions ethniques dans le pays.  À cet égard, sa délégation se dit intéressée par la proposition de l’Union africaine d’établir une force capable de répondre aux possibles atrocités de masse.  Le représentant a souhaité des consultations plus poussées sur le sujet, en particulier concernant le mandat d’une telle force, et en quoi il sera différent de celui de l’actuelle force de protection régionale de la MINUSS.  

M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) a déclaré que la situation au Soudan du Sud était consternante, l’Accord de paix étant au point mort.  Il y a un risque réel de guerre et de génocide, a-t-il affirmé, en ajoutant que la MINUSS ne pourra pas s’opposer à la catastrophe qui s’annonce.  Le délégué a fait remarquer que la Mission ne s’était pas acquittée de son mandat de manière satisfaisante chaque fois que les pressions s’étaient accrues.  « Nous ne pouvons pas abandonner le Soudan du Sud » a-t-il soutenu, avant de plaider pour une action ciblée et réaliste.  Il a jugé crucial que les appels de M. Dieng soient entendus.

Le représentant a souhaité que les efforts des composantes civile et militaire de la Mission s’appuient mutuellement et invité le Conseil de sécurité à tenir des « discussions franches » dans les cas où les contingents ne répondent pas aux ordres.  Il s’est dit en faveur d’un embargo sur les armes et des sanctions ciblées afin de modifier les calculs du Gouvernement sud-soudanais.  Les arguments selon lesquels de telles mesures entraveraient le processus politique seraient pertinents s’il y avait un tel processus dans le pays, ce qui n’est pas le cas, a conclu le délégué de la Nouvelle-Zélande.

M. FRANCISCO JAVIER GASSO MATOSES (Espagne) a souligné qu’en 2005, les dirigeants du monde avaient consacré la responsabilité de protéger, en rappelant, à l’instar du Conseiller spécial, que le génocide ne se produit pas du jour au lendemain car, a-t-il dit, « c’est un processus ».  Il a salué les efforts déployés par l’ONU pour étudier, avec l’Union africaine, les moyens de promouvoir les différentes solutions, en gardant à l’esprit que la protection des civils constitue la priorité « absolue ».  Le délégué a plaidé pour la levée des restrictions « inacceptables » imposées à la MINUSS par les autorités sud-soudanaises, qu’il a encouragées à agir de bonne foi. 

Il s’est ensuite félicité des propositions par le Secrétaire général dans son rapport, qui permettraient à la Mission de mieux répondre aux difficultés auxquelles elle est confrontée pour s’acquitter de son mandat.  Le Conseil, a ajouté le délégué, pourrait envisager d’autres moyens à sa disposition, notamment l’embargo sur les armes que l’Espagne soutient « depuis plus de deux ans ».  Un tel régime de sanctions ne serait pas un « levier politique », mais un outil de réduction des violences sur le terrain, notamment celles commisses à l’arme lourde.

M. WU HAITAO (Chine) a déclaré que le Président Kiir avait accepté le déploiement de la force de protection régionale et s’attelait à la mise en œuvre du communiqué adopté à l’issue de la visite du Conseil en septembre.  La situation reste néanmoins sombre, a-t-il admis.  Il a souligné la nécessité d’encourager le processus politique dans le pays en vue de la mise en œuvre de l’Accord de paix.  En faveur d’une solution africaine à une situation africaine, il a appelé le Gouvernement sud-soudanais à mettre en œuvre les résolutions du Conseil et à faciliter les efforts humanitaires.  Le Gouvernement sud-soudanais a accepté que l’Éthiopie et le Rwanda envoient leurs contingents au sein de la force de protection régionale, a-t-il déclaré.  Le délégué de la Chine a estimé, en conclusion, que le Conseil devait envoyer un signal positif à toutes les parties sud-soudanaises et se montrer prudent s’agissant de l’adoption des sanctions.

M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a estimé que certains progrès avaient été accomplis dans la mise en œuvre de la résolution 2304 (2016), ce qui est révélateur du caractère constructif des négociations entreprises dans la région.  Tout en se disant préoccupé par la rhétorique incendiaire dénoncée par le Conseiller spécial, le représentant a attribué cette responsabilité à des groupes armés et criminels.  « Aussi devons-nous nous abstenir de conclure que c’est une stratégie délibérée et systématique », a poursuivi le délégué russe, en affirmant qu’il faut se réfréner d’appliquer des sanctions au Soudan du Sud.  De nouvelles sanctions pourraient compliquer les relations entre la MINUSS et le pays hôte. 

« Il semble que certains souhaitent que le Président Kiir connaisse le sort du colonel Qadhafi », a poursuivi M. Iliichev.  Même si l’on suivait la « logique formelle » de la résolution 2304, il serait prématuré d’imposer des sanctions, a-t-il estimé en rappelant qu’en République centrafricaine, l’embargo sur les armes « ne fonctionne absolument pas ».  « L’embargo imposé par l’Union européenne est inefficace: pourquoi un embargo imposé par le Conseil de sécurité le serait moins? » s’est-il demandé.  Enfin, le représentant russe s’est étonné de l’insistance avec laquelle certains des membres du Conseil veulent imposer un embargo au Soudan du Sud, alors que leurs gouvernements fournissent en armes les parties prenantes à d’autres conflits.

M. RAMLAN BIN IBRAHIM (Malaisie) a indiqué qu’il y avait un risque de génocide au Soudan du Sud et que le pays glissait vers le chaos.  Soulignant la nécessité d’assurer la sécurité de tous les Sud-Soudanais, il a exhorté les dirigeants du pays à s’élever au-dessus de leurs intérêts personnels.  Le Conseil doit appuyer les efforts de médiation de l’Union africaine et de l’IGAD, a-t-il déclaré.  Réitérant le plein appui de sa délégation à la MINUSS, il a appelé les autorités sud-soudanaises à renforcer leur coopération avec la MINUSS.  Il faudrait en faire davantage pour renforcer la confiance entre la Mission et les autorités sud-soudanaises, a-t-il insisté.  Enfin, le délégué de la Malaisie a invité l’équipe spéciale au sein de la Mission à intensifier ses efforts afin de restaurer la crédibilité de la MINUSS.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a déclaré que le Soudan du Sud risquait aujourd’hui « de s’abîmer à nouveau dans une nouvelle spirale de la violence ».  Elle a estimé que le Conseil de sécurité ne pouvait rester inerte face aux risques de violences massives et abandonner les populations à leur sort.  Mme Gueguen a proposé qu’un embargo sur les armes soit mis d’urgence, en précisant que l’afflux continu au Soudan du Sud d’armes légères alimentait le conflit et les violences contre des civils.  La délégation de la France, a-t-elle dit, appelle de nouveau les membres du Conseil à ne plus tergiverser sur ce point. 

La représentante a ensuite souligné que le règlement du conflit ne pouvait être que politique.  À cet égard, elle a exhorté les parties à cesser les hostilités avant de s’engager dans un dialogue inclusif pour avancer vers une sortie de crise.  Mme Gueguen a salué le rôle de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et de l’Union africaine pour favoriser une solution politique.  Elle a également réaffirmé le plein soutien de la France à la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) qui, a-t-elle assuré, met en œuvre son mandat de protection des civils dans un contexte particulièrement difficile.

M. YURIY VITRENKO (Ukraine) s’est déclaré très préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire au Soudan du Sud, en particulier dans le centre de l’Équatoria, l’ouest de Bahr el-Ghazal et la partie haute du Nil supérieur où, a-t-il dénoncé, des éléments armés de toutes les parties prennent systématiquement pour cibles des civils, commettent des abus sexuels et se livrent à d’autres violations flagrantes des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Pour lui, une nouvelle escalade de la violence est à craindre une fois qu’aura pris fin la saison des pluies.

Affirmant que sa délégation prenait très au sérieux les informations faisant état d’une montée des tensions ethniques et d’une propagation dans le pays des discours de haine et des incitations à la violence, le représentant a jugé opportune la visite au Soudan du Sud du Conseiller spécial Adama Dieng, qu’il a invité à tenir informé le Conseil de sécurité de la situation sur le terrain.

S’agissant du processus politique, le délégué a dit craindre que la poursuite des combats n’indique que les belligérants espèrent encore atteindre leurs objectifs par la voie militaire.  Face à cette impasse, il a réaffirmé que le processus politique était le seul moyen réaliste de parvenir à la paix et a exhorté les parties à reprendre, sans conditions préalables, la mise en œuvre de l’accord de paix.  Il a aussi jugé crucial que les entités de l’ONU, à commencer par la MINUSS, poursuivent leur mission d’assistance au peuple du Soudan du Sud. Notant une baisse du nombre des cas d’obstruction contre l’exercice du mandat de la MINUSS, il a cependant précisé que des restrictions subsistaient, notamment en matière de liberté de mouvement et d’accès humanitaire, et a appelé le Gouvernement de transition à respecter ses engagements. 

Le représentant a par ailleurs estimé que le déploiement de la Force régionale de protection prévue par la résolution 2304 contribuerait à la stabilisation de la situation sécuritaire.  Il s’est félicité, à cet égard, qu’un accord ait été trouvé entre le Gouvernement provisoire et le Secrétariat de l’ONU sur les pays contributeurs de contingents et a déclaré attendre avec impatience l’arrivée effective des troupes.  Enfin, constatant les manquements signalés par l’Enquête indépendante spéciale sur les violences survenues à Djouba en juillet dernier, il a appelé à une révision radicale du mode de fonctionnement de la MINUSS.  

M. JOÃO IAMBENO GIMOLIECA (Angola) a rappelé que, quatre ans après la proclamation de son indépendance, les parties au conflit sud-soudanais avaient signé un accord de paix sous l’égide de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), malheureusement mis à mal par les violences commises en juillet dernier à Djouba.  La communauté internationale doit faire comprendre qu’elle ne tolérera pas de génocide au Soudan du Sud, a déclaré le représentant.  Il s’est toutefois prononcé contre un embargo sur les armes, en estimant qu’il ne s’agit pas de la solution au conflit.  Le représentant s’est ensuite tourné vers le Conseiller spécial pour la prévention du génocide, en lui demandant s’il pensait que le déploiement des 4 000 soldats de la force de protection régionale ferait une différence au Soudan du Sud.  Le délégué  a par ailleurs regretté que le Groupe d’experts qui appuie le Comité du Conseil de sécurité concernant ce pays produise des rapports qu’il a jugés « partiaux », « déséquilibrés » et « polémiques », et qui seraient « contredits » par d’autres sources.  Il a regretté que le Groupe considère par exemple que l’accord s’est déjà « effondré ».

Reprenant la parole, le Conseiller spécial du Secrétaire général pour le génocide a expliqué que pour réduire les tensions au Soudan du Sud, il avait insisté sur un dialogue inclusif, y compris avec les dirigeants religieux.  Il a ajouté qu’il avait suggéré d’élaborer un « plan de communication pour sensibiliser aux atrocités commises », destiné à être mis en œuvre aux niveaux local et régional, y compris dans les langues locales.  Le Conseiller spécial a assuré qu’il avait également plaidé pour davantage de contacts avec l’Union africaine. 

Il a saisi l’occasion pour demander au Président Riik Machar d’assumer ses responsabilités, dans la mesure où son gouvernement doit garantir la sécurité de tous, et « pas seulement celle de la minorité Dinka ».  Il faut qu’il rassure la population et qu’il appelle à la fin des combats dans l’État de l’Équatoria, a insisté le Conseiller spécial.  Le déploiement de la force de protection régionale, a-t-il ensuite indiqué, sera une bonne chose, même si sa présence ne règlera pas le problème sur le terrain.  Il est nécessaire d’engager un processus véritablement  participatif, qui inclut aussi la société civile, a recommandé le Conseiller spécial avant de dire que « l’heure est grave et il est maintenant urgent d’agir ».

M. JOSEPH MOUM MAJAK N. MALOK (Soudan du Sud) a déclaré que son pays est incontestablement divisé et qu’il incombait au Gouvernement, avec le soutien de la communauté internationale, de restaurer l’unité des dirigeants et de leur peuple. « Cependant, nulle part dans le monde, un État souverain ne peut accepter une rébellion armée », a-t-il poursuivi, en jugeant qu’il était de la responsabilité de la communauté internationale d’appuyer de tels États souverains.

Il a affirmé que l’inclusion de tous les groupes ethniques et politiques était l’objectif à atteindre « pour autant que ces groupes adhèrent à l’état de droit ».  Le délégué a déploré que la réponse internationale apportée jusqu’à présent ne fasse pas de distinction entre le Gouvernement élu et une rébellion armée.  Il a rappelé que les Nuer et autres groupes ethniques avaient toujours été bien représentés à tous les niveaux du Gouvernement et de l’armée.  Il a insisté sur l’engagement du Président Kiir en vue de résoudre la crise et de promouvoir l’unité du pays en incorporant les milices Nuer au sein de l’APLS.  La nomination du général Taban Deng Gai a permis de faire en sorte que le processus de paix ne soit pas otage de l’absence de Riek Machar du pays, a-t-il affirmé.  Le délégué a affirmé qu’il n’y avait aucune raison de soutenir la rébellion armée de Riek Machar, en précisant que celui-ci ne bénéficiait plus d’un large soutien au sein des Nuer.

Le délégué a assuré que la force de protection régionale avait été agréée par le Gouvernement sud-soudanais.  Cette force, a-t-il estimé, doit être considérée à l’aune de l’engagement actif du Gouvernement et d’une manière qui renforce le contrôle de nos forces armées.  Il a précisé qu’un appui international devrait renforcer les efforts déployés par le Gouvernement et non pas s’y substituer.  La proposition d’un embargo sur les armes, a-t-il fait remarquer, est un autre exemple de cette équivalence morale précitée.  « Refuser au Gouvernement du Soudan du Sud les moyens nécessaires à la protection de sa population et de ses frontières revient à saper sa souveraineté, ce qui est totalement inacceptable. »

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.