Le Coordonnateur des secours d’urgence appelle les parties syriennes, et celles qui ont de l’influence, à instaurer à Alep une « trêve humanitaire » hebdomadaire de 48 heures
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Stephen O’Brien, a exhorté, ce matin, devant le Conseil de sécurité, les parties syriennes, ainsi que celles qui ont de l’influence sur ces dernières, à établir une « trêve hebdomadaire » de 48 heures chaque semaine dans la moitié est de la ville d’Alep afin que les agences humanitaires de l’ONU puissent venir en aide au quart de millions de personnes qui sont prises au piège. « Cet appel ne peut venir que de vous », a lancé M. O’Brien en s’adressant aux membres du Conseil. La situation est devenue extrêmement critique pour la population civile dans l’est de la ville depuis la fermeture début juillet de la dernière route d’accès en raison des affrontements, a-t-il précisé.
Cet appel a été relayé par plusieurs délégations, dont celle des États-Unis, qui a exhorté la Fédération de Russie à œuvrer pour que cette route soit rouverte. Le représentant russe, appuyé en ce sens par son homologue syrien, a affirmé que cette route était en réalité utilisée pour fournir une aide aux groupes terroristes. Les États-Unis et la Fédération de Russie se sont accusés mutuellement, par le biais de leur représentant respectif, d’être responsables des victimes civiles résultant de leurs frappes aériennes en Syrie. Malgré ces échanges vifs, M. O’Brien s’est félicité du ralliement progressif des membres du Conseil autour de sa proposition.
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, qui présentait le dernier rapport* du Secrétaire général en application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015), a centré son intervention sur les développements « perturbants » dans et autour de la ville d’Alep. Des centaines de mortiers, de missiles et de projectiles ont été lancés dans l’est et l’ouest de la ville ces dernières semaines, faisant de nombreux morts et des centaines de blessés, a-t-il expliqué.
Estimant à entre 250 000 et 275 000 le nombre de personnes prises au piège, M. O’Brien a indiqué qu’il ne devrait plus y avoir de nourriture disponible dans la partie est d’Alep à la mi-août et s’est dit très préoccupé par la poursuite des attaques contre les centres médicaux. En Syrie, près de 5,5 millions de personnes sont dans le besoin dans des zones assiégées et difficiles d’accès, a-t-il signalé, en s’indignant que 590 000 personnes étaient complètement prises au piège dans ces zones.
Soulignant la nécessité de retrouver un élan pour un meilleur accès humanitaire, le Secrétaire général adjoint a demandé la restauration et la consolidation de la cessation des hostilités et la cessation des attaques indiscriminées contre les civils. « Il est du pouvoir de toutes les parties, et de celles qui les soutiennent, de réduire au maximum les pertes civiles », a-t-il affirmé. Ce point de vue a été partagé par le représentant du Royaume-Uni, qui a averti « qu’une autre catastrophe humanitaire nous attend à Alep si nous n’agissons pas immédiatement ».
Il a également demandé à la Fédération de Russie d’œuvrer pour que l’accord de cessation des hostilités soit respecté, en précisant qu’il ne s’agissait pas « d’une requête déraisonnable ». Quelque 300 000 personnes, privées de tout, sont à la merci du régime à Alep, a rappelé le délégué de la France, avant de faire observer qu’en cautionnant cette attitude du régime, la Fédération de Russie engageait « sa responsabilité et sa crédibilité ».
« Vingt ans après la fin du siège de Sarajevo », a-t-il dit, la France en appelle solennellement à un allié du régime, membres du Conseil de sécurité et Groupe international de soutien pour la Syrie, à prendre ses responsabilités pour que le régime syrien et ses alliés cessent immédiatement l’offensive sur Alep. « La surenchère du Conseil sur la situation humanitaire en Syrie, l’exigence des demandes faites à Damas et les ultimatums adressés à la Fédération de Russie sont contreproductifs », leur a répondu le délégué de la Fédération de Russie.
Les acteurs qui appuient l’opposition syrienne, a-t-il estimé, n’assument pas leurs responsabilités vis à vis de l’aide humanitaire, en soulignant l’importance du principe de neutralité de l’aide. « Nous avons l’impression que l’accent est seulement mis sur les zones où le Gouvernement syrien combat le terrorisme », a-t-il affirmé, avant de se dire préoccupé par les pertes civiles occasionnées par les frappes de la coalition.
« La Fédération de Russie, qui n’a jamais reconnu son rôle dans des frappes qui ont fait des victimes civiles, est en mauvaise posture pour mettre en cause les États-Unis au sein de ce Conseil », a réagi la déléguée des États-Unis. Son pays fait son possible pour que ses frappes aériennes épargnent la population civile, a-t-elle assuré. Un autre point d’achoppement a été l’attitude adoptée vis-à-vis de certains acteurs présents sur le terrain en Syrie.
« Si les États-Unis avaient respecté leurs promesses d’interrompre les contacts entre les groupes modérés et el-Nosra, nous n’en serions pas là », a ainsi affirmé le délégué russe, ce à quoi son homologue américaine a répondu que « si l’on confond les civils avec Daech, les parties au cessez-le feu et les terroristes, on ne fera que créer un terreau fertile pour plus de terrorisme ». Certaines délégations, comme celles de l’Égypte de la Malaisie, ont souligné que les groupes supposés modérés avaient de plus en plus tendance à se comporter comme Daech.
Elles ont ainsi condamné la décapitation d’un enfant de 11 ans par des membres d’un groupe longtemps présenté comme étant modéré. Cela marque un tournant, a déclaré le délégué de la Malaisie, qui a estimé que la lutte contre les éléments terroristes ne devrait pas être menée au détriment de la population syrienne. « Il n’y a pas de « terrorisme hallal », de terrorisme légitime », a renchéri le représentant de la Syrie, en dénonçant vigoureusement les nombreuses atrocités commises par les « groupes terroristes ».
Il s’est également interrogé sur les raisons qui poussent certains des membres du Conseil de sécurité à continuer de refuser de considérer certains groupes terroristes comme tels. Les citoyens des pays désormais touchés par le terrorisme mondial auront le droit de se demander pourquoi les autorités de leurs pays se comportent comme elles le font en Syrie, a-t-il affirmé. Les récentes frappes aériennes lancées par la France contre un village pris en otage par Daech avaient causé la mort de 164 civils. « Or, Daech avait évacué le village et le bombardement français a causé deux fois plus de victimes que celles de l’attentat de Nice », s’est-il indigné.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT
Rapport du Secrétaire général sur l’application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité (S/2016/631)
Déclarations
« La communauté internationale ne peut pas se permettre de laisser la ville d’Alep devenir une autre, et la plus large, de ces zones assiégées en Syrie », a affirmé le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. STEPHEN O’BRIEN, en qualifiant cette situation de « médiévale et honteuse ».
En conséquence, il a appelé les parties, et celles qui ont de l’influence sur ces dernières, à œuvrer pour instaurer une pause hebdomadaire de 48 heures dans la partie est de la ville d’Alep afin que les agences de l’ONU et leurs partenaires puissent avoir un accès sûr, régulier et soutenu au quart de millions de personnes qui y sont prises au piège. « Cet appel doit être lancé par l’ensemble des Nations Unies, non seulement par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, et il ne peut venir que de vous », a estimé M. O’Brien.
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, qui présentait le dernier rapport du Secrétaire général en application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015), a centré son intervention sur les développements « perturbants » dans et autour de la ville d’Alep. Des centaines de mortiers, de missiles et de projectiles ont été lancés contre l’est et l’ouest de la ville ces dernières semaines, faisant de nombreux morts et des centaines de blessés. Il a précisé que, depuis le 7 juillet, les mouvements de civils, commerciaux et humanitaires avaient cessé dans cette partie est de la ville et que la seule voie d’accès qui demeurait, la route Castello, avait été coupée en raison des combats.
Estimant à entre 250 000 et 275 000 le nombre de personnes prises au piège, M. O’Brien a indiqué qu’il ne devrait plus y avoir de nourriture disponible dans la partie est d’Alep à la mi-août et s’est dit très préoccupé par la poursuite des attaques contre les centres médicaux. « Je ne pourrais pas suffisamment souligner combien la situation de ceux qui sont pris au piège est critique dans la moitié est de la ville d’Alep », a-t-il dit, en estimant que le temps jouait contre la communauté internationale.
Il s’est ensuite dit préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire à Madaya, Foah, Zabadani et Kefraya, où 62 000 personnes continuent d’être assiégées, en précisant que l’ONU n’avait pu accéder à ces villes. Les images terribles d’enfants mourant de faim à Madaya plus tôt cette année vont se reproduire si les parties ne permettent pas un acheminement humanitaire inconditionnel et immédiat dans ces quatre villes, a-t-il averti. M. O’Brien a indiqué que les évacuations médicales devraient être possibles immédiatement, y voyant là non pas une question politique mais humanitaire.
En Syrie, près de 5,5 millions de personnes sont dans le besoin dans des zones assiégées et difficiles d’accès, a-t-il dit, en soulignant que 590 000 personnes étaient complètement prises au piège dans ces zones. Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a ensuite rappelé les progrès qui avaient été accomplis cette année. Nous avons réussi à atteindre chaque zone assiégée au moins une fois cette année, y compris 400 000 parmi les 590 000 personnes qui y vivent, a-t-il affirmé, en insistant sur ce qu’il est possible d’accomplir avec suffisamment de volonté politique. M. O’Brien a ensuite indiqué que les opérations transfrontalières de l’ONU menées depuis la Turquie et la Jordanie avaient été affectées par l’insécurité autour des zones frontalières et des routes d’approvisionnement clefs.
Soulignant la nécessité de retrouver un élan pour un meilleur accès humanitaire, le Secrétaire général adjoint a demandé la restauration et la consolidation de la cessation des hostilités et la cessation des attaques indiscriminées contre les civils. « Il est du pouvoir de toutes les parties, et de celles qui les soutiennent, de minimiser les pertes civiles », a-t-il affirmé. Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a appelé ces acteurs à permettre un accès humanitaire sûr, continu, sans entrave et inconditionnel. Cela doit inclure des trêves humanitaires afin que les civils pris au piège puissent être secourus, a-t-il poursuivi, avant de demander la levée des sièges. « Ne vous méprenez pas sur la situation humanitaire ne Syrie, les conditions se détériorent et le désespoir ne fait que s’accroître », a conclu M. O’Brien.
M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a affirmé que le Conseil ne pouvait pas rester silencieux face à la situation à Alep. Une autre catastrophe humanitaire nous attend à Alep si nous ne faisons rien, a-t-il dit, en estimant « que temps joue contre nous». Le Conseil doit faire pression pour que l’aide humanitaire soit acheminée et qu’une pause humanitaire soit instaurée, a-t-il poursuivi. Il a demandé à la Fédération de Russie d’œuvrer pour que l’accord de cessation des hostilités soit respecté, en précisant qu’il ne s’agissait pas « d’une requête déraisonnable ». Au cours de ce mois, seulement deux zones assiégées ont pu être atteintes par l’ONU, a-t-il précisé. Le représentant a également indiqué que six hôpitaux ou centres de soins à Alep avaient été attaqués en 48 heures et que le seul établissement pédiatrique de la ville venait d’être bombardé. Le délégué a donc plaidé pour une pause humanitaire, sous peine que, comme l’a prévenu un pédiatre d’Alep, « tout le monde ne finisse par mourir».
M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a estimé que l’accord sur la cessation des hostilités en Syrie, signé en février dernier, n’avait en fait été qu’un rideau de fumée servant à masquer avec cynisme une stratégie d’encerclement, puis de réduction de toutes les zones tenues par l’opposition. Ce que le régime ne peut plus contrôler, il s’ingénie à le détruire, a poursuivi M. Delattre, qui a rappelé que, depuis février, le régime syrien n’avait cessé de violer les résolutions du Conseil de sécurité, le droit international humanitaire et les principes d’humanité les plus élémentaires. La brutalité n’a cessé de se renforcer sur la ville d’Alep, où hier encore des hôpitaux ont été pris pour cibles, et dont la dernière route d’approvisionnement en eau, en vivres et en médicaments, a été coupée. Quelque 300 000 personnes, privées de tout, sont à la merci du régime, a-t-il rappelé, avant de faire observer qu’en cautionnant cette attitude du régime, la Russie, Coprésidente du Groupe international de soutien pour la Syrie (GISS), engage sa responsabilité et sa crédibilité.
Aux termes de la résolution 2254, a rappelé le représentant, c’est le 1er août que devrait être mise en place une autorité de transition dotée des pleins pouvoirs exécutifs. À l’heure actuelle, a-t-il constaté, aucune reprise crédible des négociations n’est envisageable. Alep est devenue une ville martyre. La France, qui ne peut fermer les yeux sur le drame d’Alep, fait trois propositions: elle en appelle ainsi solennellement aux alliés du régime, membre du Conseil de sécurité et Groupe international de soutien pour la Syrie, à prendre leurs responsabilités pour que le régime syrien et ses alliés cessent immédiatement l’offensive sur Alep. Afin d’alléger les souffrances des populations, elle demande la mise en place immédiate d’une trêve humanitaire. Elle demande, enfin, la levée immédiate de tous les sièges et l’accès rapide, sécurisé et sans entrave à l’ensemble des populations de Syrie.
Pour la France, la mécanisme du GISS, les équipes spéciales de Genève, l’action de l’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU, M. Staffan de Mistura, les appels à réunir l’opposition, tout cela est réduit à néant par le siège d’Alep. À ceux qui se rendent coupables de ce crime, il doit être dit clairement qu’il n’y a pas de coopération possible tant que ce crime est commis et que les responsables en portent une lourde responsabilité devant l’histoire, a conclu le représentant.
M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay) a jugé utile que les membres du Conseil de sécurité s’expriment publiquement plutôt qu’à huis clos sur la situation humanitaire en Syrie. La faim est utilisée comme tactique de guerre, a-t-il déploré. Le représentant uruguayen a ensuite insisté sur les conséquences dévastatrices pour les civils des sièges des villes syriennes et s’est dit préoccupé par la situation qui prévaut actuellement à Alep, où les attaques contre des centres de soin se poursuivent. Les civils vivent une situation de vulnérabilité extrême, a-t-il dit, en ajoutant que huit millions d’enfants syriens, en Syrie et hors de Syrie, avaient besoin d’une aide humanitaire. Le délégué a jugé nécessaire de redoubler d’efforts pour que les enfants syriens ne deviennent pas une génération perdue, avant de souscrire à l’appel lancé aujourd’hui par le Coordonnateur des Nations Unies pour des secours d’urgence, M. Stepehn O’Brien. Seule une solution politique, a-t-il estimé, permettra de mettre un terme aux souffrances du peuple syrien.
M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a jugé très préoccupante la situation en Syrie en général et, en particulier, à Alep où elle est catastrophique. L’Ukraine partage les préoccupations exprimées concernant le sort des civils. L’Ukraine a déjà soulevé la question de la route de Castello lors de séances précédentes. Aujourd’hui, nos craintes sont devenues des réalités, a déploré le représentant, qui a prévenu que les ressources alimentaires dans l’est de la ville seront épuisées à la fin du mois. Cette catastrophe humanitaire menace 300 000 personnes. L’accès humanitaire à Alep doit être restauré sans délai et sans conditions préalable, a insisté le représentant ukrainien. Il a en particulier mis l’accent sur le principe de non-conditionnalité dans la fourniture de l’assistance et condamne le fait que, dans près de la moitié des zones où de l’aide a été envoyée, les autorités syriennes ont autorisé un nombre de bénéficiaires plus limité que les estimations des Nations Unies.
L’Ukraine demande à toutes les parties s’assurer immédiatement et sans condition un accès humanitaires sécurisé à toutes les populations encerclées ou difficiles à atteindre dans le pays. On ne pourra améliorer la situation humanitaire en Syrie que par un règlement politique du conflit. Alors que nous sommes à moins d’une semaine de l’échéance du 1er août, il est malheureusement impossible de constater le moindre progrès qui pourrait mener à une reprise des négociations. À défaut, a-t-il dit, le mieux que le peuple syrien pourra espérer est de dépendre d’une assistance humanitaire irrégulière de la part des Nations Unies et d’autres acteurs. Ceci est consternant après tous les efforts fournis pour essayer de soulager ses souffrances, a estimé le représentant avant de conclure.
M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a déploré que la Syrie soit devenue un terreau fertile pour le chaos et le terrorisme. Chaque jour est marqué par de nouvelles victimes innocentes, a-t-il affirmé. Le représentant a appelé la communauté internationale à apporter un appui humanitaire, loin de toute politisation de l’aide humanitaire. Seule une solution politique permettra d’alléger les souffrances des Syriens, a-t-il estimé, en avertissait que le temps est compté. Il a réaffirmé que le consensus international actuel sur la Syrie était basé sur la cessation des hostilités, la recherche d’une solution basée sur le Communiqué de Genève, la lutte contre les groupes terroristes et un acheminement sans entrave de l’aide humanitaire. L’Égypte s’engage à coopérer avec les États-Unis et la Fédération de Russie afin de faire respecter la cessation des hostilités, a-t-il assuré. Le délégué égyptien a ensuite critiqué les liens que certaines parties entretiennent avec des groupes tels qu’El-Nosra. Ces liens ne doivent pas être passés sous silence, a-t-il rappelé. Affirmant que les groupes supposés modérés avaient de plus en plus tendance à se comporter comme Daech, le délégué de l’Égypte a souhaité un élargissement de la liste des groupes faisant l’objet de sanctions en Syrie.
M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) a estimé que la catastrophe humanitaire qui prévaut actuellement en Syrie n’était pas due à la simple indifférence des parties et de leurs parrains, mais elle était, dans de nombreux cas, délibérée. L’accès humanitaire est manipulé pour obtenir des avantages militaires et les hôpitaux sont pris pour cibles de manière routinière, a déploré le représentant, qui a jugé inacceptable que le siège soit imposé dans les villes et qu’on utilise la faim comme méthode de guerre contre la population civile. Outre les 300 000 personnes d’Alep, le représentant s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire à la frontière syro-jordanienne où 100 000 personnes ont désormais besoin de l’assistance en cours.
M. Van Bohemen a jugé la situation d’autant plus « lugubre » que chaque bombardement éloigne les chances d’une solution politique. Le représentant a toutefois reconnu quelques progrès, notamment dans la réponse de la Syrie aux plans proposés en juin et juillet par les Nations Unies. Il a aussi salué les efforts de la Fédération de Russie et des États-Unis, qui coprésident le GISS, pour faire parvenir l’assistance humanitaire à ceux qui en ont le plus besoin. Malgré les progrès, a-t-il cependant fait remarquer, le niveau d’autorisations accordé par la Syrie en juillet ne permet d’atteindre qu’un peu plus de la moitié des Syriens dans le besoin, et cela, quand toute l’aide parvient à destination, ce qui n’est pas souvent le cas.
Le représentant a reproché au Gouvernement syrien de multiplier les obstacles administratifs à l’accès de l’aide humanitaire. La Nouvelle-Zélande est d’avis avec le Secrétaire général que l’assistance humanitaire ne peut pas prendre la forme d’un événement unique, ni être limitée à des segments particuliers de la population. Ce n’est pas un élément de la négociation, c’est une obligation découlant du droit international humanitaire. Il est donc inacceptable que les autorités syriennes retirent régulièrement des fournitures des convois, en particulier des fournitures médicales. Quelles justifications peut-il y avoir à retirer des convois humanitaires des kits pédiatriques ou de lutte contre la diarrhée? a demandé M. van Bohemen.
Le représentant de la Nouvelle-Zélande a conclu en appelant toutes les parties à prendre toutes les mesures possibles pour protéger les civils et pour mettre fin aux souffrances de la population, ce qui suppose la cessation des hostilités et notamment des bombardements cyniques contre les civils et les hôpitaux, et permettre l’accès sans entrave de l’aide humanitaire.
M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) a affirmé que « l’enfer de la guerre en Syrie n’avait plus aucune limite ». Les espoirs que nous avions pu nourrir en début d’année sont en voie d’être balayés, a-t-il dit. Le représentant a fermement condamné les attaques menées contre les centres de soin, dont la dernière a eu lieu à Alep. Cela est inacceptable, a-t-il martelé, avant de se dire indigné par la décapitation barbare d’un enfant de 11 ans dans cette ville. Le délégué de l’Espagne a demandé la cessation des hostilités et plaidé pour une pause humanitaire afin d’assurer un accès humanitaire aux civils assiégés. La proposition de M. Stephen O’Brien est très judicieuse, a-t-il affirmé. Avant de conclure, il a souhaité un éclaircissement des conditions qui ont conduit à la fermeture de la route de Castello.
M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a indiqué que l’accès humanitaire avait été amélioré en Syrie et que les autorités de Damas mettaient tout en œuvre pour garantir des conditions de vie décentes pour les civils syriens. Le nombre de villes et de villages ayant bénéficié du cessez-le-feu est de 209, a-t-il précisé. Tout en soulignant que l’acheminement de l’aide humanitaire était une priorité, il a précisé qu’il devait se faire avec l’accord du Gouvernement syrien. Il a également insisté sur l’utilité de parachutages de l’aide humanitaire, comme cela a été récemment le cas à Deir el-Zor. Le délégué a indiqué que l’acheminement de l’aide en Syrie était entravé par le blocage par la Turquie de sa frontière, avant d’inviter les autorités à Ankara à revoir leur position. Il a également appelé les États-Unis et les alliés de l’OTAN à faire pression sur la Turquie.
Rappelant qu’il était contraire au droit international d’utiliser des civils comme bouclier, M. Churkin a indiqué que les groupes d’opposition syriens avaient recours à une telle tactique. Les mesures militaires prises par les autorités syriennes visent à garantir l’ordre et la sécurité, a-t-il affirmé, avant de se dire préoccupé par les pertes civiles occasionnées par les frappes de la coalition. Les délégués de la France et du Royaume-Uni n’en ont pas parlé, s’est-il étonné, avant de préciser que les États-Unis étaient conscients de la situation.
Le représentant russe a ensuite affirmé que le groupe qui est responsable de la décapitation d’un enfant de 11 ans avait longtemps été présenté comme « modéré ». Il est temps d’élargir la liste des groupes faisant l’objet de sanctions, a-t-il estimé. M. Churkin a tenu à rappeler que la route du Castillo n’était pas utilisée pour acheminer de l’aide humanitaire mais pour fournir, au contraire, de l’aide aux terroristes. La situation à Alep nous préoccupe et il fait éviter une catastrophe, a-t-il insisté, avant de souligner que les sanctions imposées contre Damas n’étaient pas nécessaires.
La surenchère du Conseil sur la situation humanitaire en Syrie, l’exigence des demandes faites à Damas et les ultimatums adressés à la Fédération de Russie sont contreproductifs, a affirmé M. Churkin. Les acteurs qui appuient l’opposition syrienne n’assument pas leurs responsabilités concernant l’aide humanitaire, a soutenu le représentant russe en mettant l’accent sur l’importance du principe de neutralité de l’aide. « Nous avons l’impression que l’accent est seulement mis sur les zones où le Gouvernement syrien combat le terrorisme », a-t-il dit, en demandant que cette approche « de deux poids, deux mesures » soit abandonnée. En conclusion, il a appelé à la reprise de négociations entre Syriens, tout en soulignant l’importance de se fixer des objectifs réalistes.
Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a rappelé que son pays avait appelé depuis des années à fournir une assistance humanitaire aux populations frappées par la guerre. Dans certaines régions, cette assistance n’a pu être fournie pendant trois ou deux ans. Depuis le début de l’année, on a pu fournir une aide, mais très limitée, et non sans que les troupes de Bashar Al-Assad ne prélèvent une partie de l’assistance et, en particulier, des biens médicaux, ce que Mme Power a qualifié d’« obscène ». La situation à l’est d’Alep est bien pire encore car il s’agit ici de 300 000 personnes. Mme Power a dénoncé les violations des accords conclus par le régime de Bashar Al-Assad, ainsi que sa politique d’encerclement et de pilonnage d’Alep, y compris des hôpitaux. La Fédération de Russie, en tant que cosignataire des accords, doit veiller à leur respect et imposer la réouverture de la route de Castello, a ajouté la représentante des États-Unis, qui a fait une longue et terrible description des pénuries et des bombardements auxquels sont soumis les habitants de la ville. La représentante a fermement condamné la décapitation d’un enfant et rappelé que l’opposition avait condamné ce geste.
Mme Power a accusé la Fédération de Russie de n’avoir jamais reconnu sa possible implication dans des frappes qui ont fait des victimes civiles. La Fédération de Russie est en mauvaise posture pour mettre en cause les États-Unis au sein de ce Conseil, a-t-elle fait remarquer. La délégation des États-Unis attend que la Fédération de Russie engage une enquête sur les accusations concernant ses forces et ses frappes. Les États-Unis, quant à eux, font tout leur possible pour éviter les victimes civiles lors des frappes et, s’il y en a, ils les reconnaîtront.
M. WU HAITAO (Chine) a appelé la communauté internationale à venir en aide aux civils syriens, dans et hors de la Syrie. Une solution politique est la seule possible pour mettre un terme à leurs souffrances, a-t-il dit, avant de souligner la nécessité d’un nouvel élan dans le processus de négociation de Genève. Le délégué de la Chine a résolument appuyé, à cet égard, les efforts de l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura. Enfin, il a précisé que son pays avait envoyé une aide humanitaire en Syrie et continuerait de le faire.
M. JULIO HELDER MOURA LUCAS (Angola) a estimé que les parties au conflit en Syrie méprisaient leurs obligations au regard du droit international humanitaire, de même que les résolutions du Conseil de sécurité. Il a noté qu’avec la fermeture d’une des dernières routes d’accès à Alep, ce sont des dizaines de milliers de personnes qui sont privées d’assistance. Le représentant a fait observer que les parties régionales et internationales n’étaient pas tenues responsables des blocages de l’assistance humanitaire. Il a exhorté les différentes parties à reprendre les négociations pour trouver une solution politique et a apporté son soutien à la proposition de trêves humanitaires présentée par le Coordonnateur des affaires humanitaires.
M. FODÉ SECK (Sénégal) a dénoncé les attaques perpétrées contre la ville d’Alep et rappelé que les bombardements croisés risquaient de prendre au piège plus de 250 »000 »personnes dans cette ville. Il a exhorté les parties syriennes, ainsi que les États-Unis et la Fédération de Russie, à œuvrer pour mettre en place des pauses humanitaires hebdomadaires de 48 heures à Alep. Il a ensuite déploré les difficultés de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) à se déployer dans le camp de Yarmouk. Il a réitéré son conviction, « partagée par tous », que seule une solution politique, sur la base du Communiqué de Genève et sous l’égide de l’ONU, permettra de mettre un terme à la crise syrienne. Après six débats publics sur la dimension humanitaire de cette crise, le Conseil se doit de redoubler d’efforts, a-t-il estimé en conclusion.
M. HENRY ALFREDO SUAREZ MORENO (Venezuela) s’est félicité des progrès réalisés en Syrie au premier semestre 2016, en précisant que ces progrès avaient été reconnus par le Secrétaire général. Certes, la situation est loin d’être idéale mais il est un fait que des convois d’aide humanitaire ont pu parvenir dans plusieurs endroits du pays où elle était nécessaire. Les réels progrès humanitaires ont toutefois été limités du fait de la situation que connaît le pays et, notamment, du fait des activités de groupes tels que l’État islamique ou El-Nosra, ainsi que de groupe d’opposition parfois présentée comme « modérée » mais qui combats parfois aux côtés du front el-Nosra. Les groupes terroristes sont exclus des accords de cessations des hostilités et doivent être combattus, a-t-il insisté. Le Venezuela appuie les propositions du Coordonnateur des secours d’urgence pour une trêve humanitaire de deux jours chaque semaine, a assuré son représentant.
Le Venezuela condamne la pratique consistant à faire entrave à l’aide humanitaire et met en avant la coopération entre les autorités syriennes et le Programme alimentaire mondial (PAM), a-t-il ensuite indiqué. Les acteurs humanitaires ne sauraient être des objectifs militaires. En même temps, les agences humanitaires doivent œuvrer en coordination avec l’État concerné. Les groupes extrémistes comme El-Nosra ou l’État islamique doivent être combattus. Le Venezuela condamne également l’assassinat par décapitation d’un enfant de 11 ans à Alep par des membres d’un groupe de la prétendue « opposition modérée », soutenue par certains membres de la communauté internationale, a souligné le délégué. Son pays, a-t-il ajouté, soutient les efforts de paix de l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, et en appelle aux États qui ont une influence sur les différentes parties au conflit pour qu’ils obtiennent la reprise des négociations en vue d’une solution politique, la seule possible.
M. RAMLAN BIN IBRAHIM (Malaisie) a affirmé que la fermeture de la route du Castello avait pris au piège les civils dans la ville d’Alep. S’il a pris note de l’importance de lutter contre les éléments terroristes en Syrie, il a estimé que cette lutte ne devrait pas être menée au détriment de la population syrienne. La décapitation d’un enfant par un groupe modéré marque un tournant, a-t-il dit. Le représentant a ensuite indiqué que la libération de la ville de Fallujah, en Iraq, pourrait servir de modèle, dans la mesure où les autorités iraquiennes avaient observé une pause d’une semaine dans leurs opérations permettant aux civils de s’enfuir. La même chose pourrait être faite à Alep, a conclu le délégué de la Malaisie.
M. KORO BESSHO (Japon) s’est dit préoccupé par la situation de plus en plus déplorable qui prévaut en Syrie. Il est intolérable qu’Alep et d’autres villes doivent bientôt être ajoutées à la liste des zones assiégées et que l’assistance humanitaire ne puisse parvenir partout et dans des conditions de sécurité. Le Conseil de sécurité doit assurer la mise en œuvre de ses propres résolutions et, notamment, de la 2139 (2014) relative à la protection des travailleurs humanitaires, même si cette résolution ne concerne pas précisément la Syrie ou une partie de celle-ci. Même un cessez-le-feu temporaire permet d’apporter une assistance humanitaire à la population, a estimé le représentant du Japon, en assurant que son pays appuie pleinement la proposition du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires d’une trêve humanitaire de 48 heures chaque semaine.
Reprenant la parole, le délégué de la Fédération de Russie s’est dit étonné devant les propos de la représentante des États-Unis, qui a indiqué qu’une enquête serait conduite sur les pertes civiles occasionnées par les frappes de la coalition avec le concours de la société civile. Cette coopération avec la société civile nous laisse croire que l’on va encore ignorer les faits, a-t-il affirmé. « Mme Power, chaque fois que des insinuations ont été brandies contre mon pays, il y a répondu », a-t-il poursuivi, en espérant que les membres de la coalition feront preuve de la même ouverture. Il a regretté que le Conseil de sécurité s’éloigne de détails concrets. « On peut parler d’Alep, on peut en discuter mais on s’éloigne de l’élément essentiel, qui est la dynamique en Syrie. » Il a affirmé qu’une erreur majeure avait été commise en Syrie « dès lors qu’on a commencé à parler de groupes modérés en Syrie », en ajoutant que ces groupes avaient en fait rejoint les groupes terroristes. « Si les États-Unis avaient respecté leurs promesses d’interrompre les contacts entre les groupes modérés et el-Nosra, nous n’en serions pas là », a-t-il affirmé, tout en ajoutant que son pays continuerait d’œuvrer avec les États-Unis au sein du Groupe de soutien international.
Reprenant à son tour la parole, la représentante des États-Unis a déclaré qu’il serait très utile que la Fédération de Russie fasse part au Conseil de sécurité des résultats de ses enquêtes. Elle aimerait aussi savoir si, à l’issue de telles enquêtes, la Fédération de Russie a reconnu, ne serait-ce qu’une fois, que des civils ont perdu la vie du fait de ses frappes aériennes. Si l’on confond les civils avec l’EIIL, les parties au cessez-le feu et les terroristes, on ne fera que créer un terreau fertile pour plus de terrorisme, a-t-elle fait remarquer. Les États-Unis, a-t-elle assuré, se sont réellement investis avec la Fédération de Russie, pour obtenir la paix en Syrie. Ainsi, on a vu dès le début de la cessation des hostilités des progrès, une amélioration de l’accès humanitaire et une baisse des violences qui a réellement soulagé la population civile syrienne. Mais soyons honnêtes, a ajouté Mme Power: la situation décrite par le représentant de la Fédération de Russie n’est pas celle qui prévaut sur le terrain. À Alep, 300 000 personnes sont assiégées. Il faut que le siège d’Alep soit levé et faire également une distinction claire entre les parties modérées au conflit et celles qui prennent délibérément pour cibles les civils.
Comme son homologue des États-Unis, le délégué de la Fédération de Russie a insisté sur l’importance de la distinction entre l’opposition modérée et El-Nosra.
Intervenant une nouvelle fois, le représentant de la République arabe syrienne a déploré que les terroristes utilisent la région assiégée de la vallée de Barada proche de Damas, en affirmant qu’ils s’étaient emparés de la seule source d’eau potable de Damas, ce qui signifie que les sept millions d’habitants de Damas sont privés d’eau potable par des groupes désignés comme appartenant à l’« opposition modérée ». Il a déploré aussi que le Secrétaire général adjoint n’ait pas mentionné la famille brûlée vive par l’État islamique parce qu’elle tentait de fuir Raqqa, ni n’ait nommé ceux qui bombardent l’est et l’ouest d’Alep, alors que ce sont des terroristes qui commettent ces actes. Il faut désigner nommément les auteurs des différentes frappes, a insisté le représentant syrien.
Répondant aux commentaires et questions des délégations, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a tenu à préciser que la route du Castillo était cruciale. Une pause est nécessaire car cette route est endommagée et seuls des petits camions peuvent l’emprunter, a-t-il indiqué. L’assentiment du Gouvernement syrien et des conditions de sécurité garanties sont une condition sine qua non pour tout parachutage de l’aide, a-t-il rappelé, en faisant remarquer qu’il faut six mois pour un hélicoptère pour larguer une livraison qui pourrait être transportée par un seul convoi. Il a ensuite vigoureusement défendu l’impartialité de l’action humanitaire de l’ONU. « Nous sommes neutres, impartiaux et indépendants ». Il s’est enfin félicité de l’appui croissant qu’il a observé au sein du Conseil de sécurité à son appel en faveur de trêves humanitaires hebdomadaires de 48 heures. « Il y a un feu orange et un feu vert du Conseil, a-t-il dit, en précisant qu’il faut 72 heures d’avance à l’ONU pour planifier l’acheminement de l’aide pendant cette trêve de 48 heures.
M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a fait observer que le Conseil de sécurité examine aujourd’hui le vingt-huitième rapport du Secrétaire général sur la situation dans son pays et qu’à ce jour, quatre résolutions avaient déjà été adoptées par la Conseil de sécurité sur la situation humanitaire en Syrie. Il a estimé que le représentant de l’Angola avait raison de demander pourquoi on ne demande pas de comptes à la communauté internationale pour les souffrances du peuple syrien qui se poursuivent depuis cinq ans. Mettre un terme à cette souffrance ne saurait se faire par la présentation de dizaines de rapports, la tenue de conférences spectaculaires ou la fourniture d’une aide humanitaire, a fait remarquer le représentant, qui a accusé les avions de la coalition internationale de détruire des silos à céréales, des installations électriques et les États qui forment cette coalition de fomenter des alliances douteuses.
M. Ja’afari a appelé que la Fédération de Russie était intervenue à la demande officielle du Gouvernement syrien et que cette intervention avait contribué à améliorer la situation, y compris humanitaire, dans le pays. Il a accusé un certain nombre de pays d’ignorer les causes véritables de la situation actuelle, qui est le terrorisme. Alep n’avait, durant les 18 premiers mois du conflit, connu aucune opération militaire. La Syrie avait exhorté la communauté internationale à faire pression sur la Turquie pour qu’elle empêche l’arrivée de terroristes dans cette région. Or, ces groupes, a fait observer le représentant, ont pu déferler sur Alep sous la pancarte d’« opposition modérée ». La route de Castello a été coupée du fait de terroristes, a-t-il accusé.
M. Ja’afari a rappelé que, si le terrorisme était la cause profonde de la crise en Syrie, les mesures unilatérales imposées à l’encontre du pays contribuaient largement aux pénuries dont souffre la population. C’est un groupe terroriste qui a décapité un enfant palestinien de 11 ans et non pas des « rebelles » comme l’a dit la représentante des États-Unis, a-t-il tenu à préciser. Le délégué syrien a ensuite demandé que la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar cessent de soutenir les troupes terroristes, dont il faut cesser de légitimiser les pratiques en les affublant de noms tels que « opposition armée modérée » ou « groupes armés non étatiques ». Il faut nommer le terrorisme, sans quoi on envoie un message erroné des groupes terroristes selon lequel leur terrorisme serait légitime dès lors qu’il s’en prend aux autorités syriennes. Le représentant a déclaré que les avions français avaient récemment bombardé un village pris en otage par Daech, causant ainsi la mort de 164 civils. Or, Daech avait évacué le village et le bombardement français a causé le double des victimes de celles de l’attentat de Nice, a-t-il affirmé.
Il n’y a pas de « terrorisme hallal », de terrorisme légitime, a poursuivi M. Ja’afari, qui a dénoncé de nombreuses atrocités commises par les « groupes terroristes » en s’interrogeant sur ce qui pousse certains des membres du Conseil de sécurité à continuer de refuser de les considérer comme tels. Le Gouvernement syrien fait sa part dans la lutte contre le terrorisme, a assuré le représentant, qui a estimé que les citoyens des pays désormais touchés par le terrorisme mondial auraient le droit de se demander pourquoi les autorités de leurs pays se comportent comme il le font en Syrie, avant de s’en prendre plus spécifiquement à la France.
Le Gouvernement syrien est disposé à poursuivre le dialogue inter-syrien sans conditions préalables, a encore affirmé le représentant, qui a toutefois ajouté que cette coopération ne pouvait être à sens unique. Les Nations Unies doivent coopérer avec le Gouvernement syrien dans le domaine humanitaire. Les acteurs humanitaires n’auraient d’ailleurs jamais pu agir aussi efficacement en Syrie depuis cinq ans sans l’accord et la coopération du Gouvernement syrien, a-t-il soutenu avant de conclure.