M. Mohamed Ibn Chambas annonce, devant le Conseil de sécurité, la création d’une équipe spéciale pour prévenir l’extrémisme violent en Afrique de l’Ouest et au Sahel
Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), M. Mohamed Ibn Chambas, a annoncé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, qu’il entendait créer une équipe spéciale régionale des Nations Unies sur la prévention de l’extrémisme violent, afin qu’elle facilite la coordination des efforts de l’ONU dans la région de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.
Présentant le tout premier rapport du Secrétaire général sur les activités du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel pour la période du 1er janvier au 30 juin 2016, M. Chambas a expliqué que ce nouveau Bureau était issu de la fusion récente du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et du Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel.
En écho au plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent, a-t-il précisé, l’UNOWAS a organisé, les 27 et 28 juin dernier, une conférence régionale à Dakar afin de prévenir l’extrémisme violent en Afrique de l’Ouest et au Sahel. C’est à la suite de cette conférence que la mise sur pied d’une équipe spéciale a été envisagée. Les participants à la conférence avaient insisté sur le renforcement du dialogue avec les femmes et les jeunes, et sur la nécessité d’adopter des approches intégrées pour faire face aux défis liés à la sécurité, au développement et aux droits de l’homme dans la région.
Le Chef du Bureau pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel a également indiqué que Boko Haram avait continué de changer de tactique et avait lancé, à deux reprises, une attaque contre la ville nigérienne de Bosso les 3 et 16 juin dernier, tuant des dizaines de soldats. Les personnes qui s’y étaient réfugiées, après avoir fui les violences au Nigéria, ont été de nouveau contraintes à chercher un abri ailleurs, abandonnant ainsi la ville.
Il a en outre rappelé les diverses attaques terroristes ayant frappé l’Afrique de l’Ouest, notamment Ouagadougou, au Burkina Faso, le 15 janvier et Grand Bassam, en Côte d’Ivoire, le 13 mars dernier. Il a appelé le Conseil de sécurité à empêcher que les réseaux de criminalité organisée et autres groupes ne s’étendent dans la région.
Pour y remédier, a-t-il proposé, il faudrait renforcer la Force multinationale mixte, notamment en matière de collecte d’informations. M. Chambas a également plaidé pour que des efforts supplémentaires soient consentis afin de subvenir aux besoins de base des populations prises au piège de cette tragédie. Il a déploré que l’appel aux contributions de l’ONU pour 2016 n’ait recueilli, à ce jour, que 11% des 1,98 milliard de dollars requis.. Il est également important de renforcer la gouvernance qui est essentielle pour la prévention des conflits, a-t-il ajouté.
Dans le Sahel, près de 4,5 millions de personnes sont déplacées, et 6 autres millions ont un besoin urgent d’aide humanitaire. Des millions de personnes ne peuvent pas cultiver les terres et des millions d’enfants ne sont pas scolarisés, a signalé le Représentant spécial.
C’est pourquoi, il est essentiel d’axer les efforts sur la prévention des conflits. C’est, a-t-il dit, une dette que la communauté internationale a envers les populations d’Afrique de l’Ouest et du Sahel qui ont démontré une résilience à toute épreuve face à des défis persistants de plusieurs ordres.
Sur le plan politique, M. Chambas s’est félicité du bon déroulement des récentes élections au Niger, au Bénin et au Cabo Verde. Au cours des six prochains mois, des élections auront également lieu en Côte d’Ivoire, au Ghana et en Gambie, a-t-il indiqué. Le Représentant spécial s’est dit cependant préoccupé par la répression qui a suivi les protestations pacifiques d’avril dernier appelant à une réforme du système électoral.
Dans le même temps, a-t-il fait remarquer, des pays de la région ont engagé des revues de leur constitution afin de les adapter aux besoins de nations modernes. Il a dit espérer que les pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel sortiront de ces processus de réformes en étant plus unis, mieux gouvernés et en faisant participer plus activement les femmes dans les processus de prise de décisions. Cela permettra, a-t-il assuré, de renforcer leur résilience face aux chocs internes et externes comme la récente épidémie causée par le virus Ebola.
Il a ensuite souligné que la Commission mixte Cameroun-Nigéria avait poursuivi les activités de démarcation de la frontière commune aux deux pays et tenu des consultations à Yaoundé et Abuja.
Au sujet du Nigéria justement, il a indiqué que le pays était confronté à des tensions communautaires et des litiges concernant le partage des ressources, provoqués par des mouvements populaires qui sont actifs dans le nord-est, dans la région du Biafra et dans celle du Delta du Niger. Il a invité les acteurs nationaux à renforcer les consultations et les réformes économiques alors que la relance de la plus vaste économie du continent est envisagée. La situation en Côte d’Ivoire, au Sénégal et dans d’autres pays montre que des politiques vigoureuses sont en vigueur pour assurer une économie nationale plus équilibrée et résiliente.
Dans le même temps, l’avancée du désert et la diminution des ressources en eau en appellent à la mobilisation de la communauté internationale, notamment avec l’appui à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, a plaidé M. Chambas.
Le Représentant spécial a par ailleurs salué le caractère historique de la décision judiciaire du 30 mai dernier condamnant l’ancien Président du Tchad, M. Hissène Habré. C’est la toute première fois qu’une juridiction africaine juge un ancien chef d’État en Afrique pour des crimes commis au cours de son mandat. Cette condamnation envoie un message fort contre l’impunité, a-t-il souligné, en saluant le Sénégal qui a permis le déroulement du procès sur son territoire.