En cours au Siège de l'ONU

Conseil de sécurité,
7678e séance – matin
CS/12339

Hervé Ladsous prévient le Conseil de sécurité des conditions à mettre en place pour le succès du processus de paix au Soudan du Sud

La prestation de serment du Premier Vice-Président devrait être suivie par la formation du gouvernement de transition d’unité nationale

La situation au Soudan du Sud est « extrêmement préoccupante », a constaté, ce matin, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Hervé Ladsous, au moment où M. Riek Machar, qui doit être investi Premier Vice-Président aujourd’hui, vient d’arriver à Juba.  M. Ladsous a prévenu le Conseil de sécurité que, malgré les développements positifs de ces dernières 48 heures et le retour de M. Machar à Juba, il est impératif que les dynamiques politiques et sécuritaires actuellement en cours dans le pays changent rapidement si l’on veut que le processus de paix ait une réelle chance de succès.

Le retour du Premier Vice-Président à Juba devrait ouvrir un nouveau chapitre pour le pays et permettre de commencer véritablement la transition.  M. Machar est arrivé aujourd’hui à Juba à bord d’un avion de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), après l’arrivée du Chef d’état-major de l’APLS en opposition, hier, qui était accompagné de 195 membres du personnel de sécurité.  Il est essentiel, a dit M. Ladsous, que les parties saisissent cette opportunité pour véritablement marquer leur détermination à faire avancer le processus de paix.

Il a loué, à cet égard, les efforts du Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation (JMEC), M. Festus Mogae, du Haut Représentant de l’Union africaine, M. Alpha Omar Konaré, des partenaires régionaux et internationaux, ainsi que de la Représentante spéciale du Secrétaire général, Mme Ellen Margrethe Løj, qui ont permis de trouver les compromis nécessaires à la réalisation de cette étape décisive du processus de paix.

M. Ladsous a ensuite identifié deux étapes supplémentaires qui sont primordiales pour le début de la transition: la création du gouvernement de transition et d’union nationale, ainsi que la mise en œuvre complète des arrangements sécuritaires transitoires.  Il a espéré que la formation de ce gouvernement aurait lieu rapidement après l’investiture de M. Machar. 

C’est aussi le vœu qu’a formé le représentant du Soudan du Sud, M. Joseph Moum Malok, en annonçant que la prestation de serment de M. Machar serait suivie par la formation du gouvernement de transition d’unité nationale, « un jour ou deux après des consultations entre les différentes parties dans le pays ».

M. Malok a en effet reconnu la nécessité et l’urgence pour les parties à l’Accord de paix dans son pays de former ce gouvernement.  Malgré les retards, a-t-il assuré, le Gouvernement du Soudan du Sud reste fermement déterminé à mettre pleinement en œuvre l’Accord.  L’investiture de M. Riek Machar en tant que Premier Vice-Président ouvre un nouveau chapitre dans la mise en œuvre de l’Accord.

Alors que nous approchons de la première étape dans la mise en œuvre du processus de l’Accord de paix, nous appelons le Conseil de sécurité à rester saisi de la question, a déclaré M. Malok en saluant l’appui de la communauté internationale.

M. Ladsous a expliqué que la deuxième phase du retour à Juba des membres du personnel de sécurité de l’opposition serait ensuite finalisée et permettrait la mise en route rapide du Centre conjoint des opérations, chargé de coordonner les déplacements de personnel de sécurité dans la capitale et de la police mixte intégrée (JIP), avec le soutien de la MINUSS et des autres partenaires internationaux.

Le Secrétaire général adjoint a averti que le Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité (CTSAMM), même s’il a vérifié le nombre et l’arsenal des forces militaires du gouvernement sur les six positions autorisées par l’Accord à Juba, n’a toujours pas pu inspecter les sites se trouvant à 25 km de la capitale, ni vérifier le redéploiement effectif des personnels militaires et armements de la SPLA.  

Il a donc estimé que la situation en matière de sécurité restait précaire au Soudan du Sud.  Il s’est inquiété, en particulier, des incidents récents entre l’APLS et les groupes armés dans le comté de Wau, dans l’ouest de Bahar El Ghazal, qui ont causé des morts et des déplacements de civils, ainsi que d’autres affrontements au cours des dernières semaines dans les États du Haut-Nil et de l’Unité et dans les régions de l’Équatoria. 

Le Gouvernement, a aussi noté M. Ladsous, a continué d’imposer des restrictions aux déplacements des membres de la MINUSS et du personnel humanitaire, violant ainsi l’Accord sur le statut des forces et empêchant la Mission de protéger au mieux les civils et ses propres locaux.  Il a demandé au Conseil de sécurité d’adresser un message fort tant au Gouvernement qu’à l’opposition pour remédier à cette situation.

M. Ladsous a fait part des résultats de l’enquête préliminaire sur les violences qui ont éclaté, les 17 et 18 février, dans le site de protection des civils de la MINUSS à Malakal: 25 personnes déplacées ont été tuées et 140 autres blessées.  Compte tenu de la gravité de cette crise, le Secrétariat de l’ONU a constitué un Conseil indépendant d’enquête pour élaborer la réponse de la MINUSS.  Le Secrétaire général a également décidé de lancer une enquête spéciale pour examiner tous les facteurs qui ont contribué à la violence et déterminer les responsabilités de chacun, M. Abiodun Oluremi Bashua étant chargé de diriger l’enquête.

Passant à la situation humanitaire, il a regretté sa détérioration importante en termes d’échelle et d’urgence.  Après plus de deux années de conflit et de déclin économique, plus de la moitié de la population sud-soudanaise a besoin d’aide humanitaire, a-t-il souligné avant de s’inquiéter de l’aggravation prévue avec le début de la saison des pluies.  Le Conseil de sécurité doit exiger des parties et de tous les intervenants qu’ils respectent leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme.

La situation relative aux droits de l’homme demeure aussi gravement préoccupante, a mis en garde M. Ladsous.  Il a dénoncé la pratique systématique qui consiste à viser les civils sur la base de leur appartenance ethnique, tout en détruisant leurs logements et moyens de subsistance.  Pour sa part, a-t-il rappelé, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme dénonce le niveau d’atrocités commises.  M. Ladsous a également dénoncé les poursuites pénales qui vont à l’encontre de la liberté d’expression.

Le gouvernement de transition, a-t-il ensuite recommandé, devra s’atteler sans délai aux problèmes relatifs à la gouvernance, au détournement de fonds et à l’état de droit.  Il a averti que le risque d’effondrement de l’économie, lié à la chute des prix du pétrole, ne sera pas écarté tant que le pays ne mènera pas des réformes importantes, ni sans aide internationale.

M. Ladsous a aussi exhorté le Conseil de sécurité, en coordination avec l’Union africaine, à inviter le Président du Soudan du Sud, M. Salva Kiir, à suspendre la mise en œuvre de la décision de créer 28 nouveau États, en estimant que de tels facteurs de conflit devraient être traités conformément à la décision du Sommet de l’ Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et à la position de la Commission mixte de suivi et d’évaluation.

Enfin, il a appelé les parties à se mettre d’accord sur la question de la justice transitionnelle et de la réconciliation nationale, notamment en créant un tribunal hybride dans les délais prévus et en réhabilitant le système national de justice.

Il a conclu en avertissant que le processus de paix au Soudan du Sud était extrêmement fragile, en préconisant des efforts concertés et soutenus, aux plans national, régional et international.  Le Conseil de sécurité, a-t-il dit, doit travailler en lien étroit avec l’IGAD et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine pour mobiliser le soutien nécessaire à MM. Mogae et Konaré.

Le Conseil était saisi du rapport du Secrétaire général sur l’assistance technique* fournie à la Commission de l’Union africaine et au Gouvernement provisoire d’union nationale en vue de l’application du chapitre V de l’Accord pour le règlement du conflit en République du Soudan du Sud, ainsi que du dernier rapport** en date du Secrétaire général sur le Soudan du Sud.

* S/2016/328

** S/2016/341

 

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