Les exactions multiples des acteurs non étatiques dans le collimateur des titulaires de mandats des droits de l’homme
La prolifération d’acteurs non étatiques dans les conflits actuels s’est accompagnée de nouvelles formes alarmantes de violations de droits de l’homme que les États ont l’obligation de prévenir ou, à défaut, de veiller à pénaliser, a—t-il été souligné aujourd’hui, devant la Troisième Commission, par plusieurs titulaires de mandats du Conseil des droits de l’homme.
La Commission sociale, culturelle et humanitaire a aussi entendu l’exposé final du Conseiller spécial du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, M. Vijay Nambiar, qui achève sa fonction dans le cadre de la mission de bons offices du Secrétaire général en vue de la démocratisation et la réconciliation au Myanmar.
La Troisième Commission a dialogué avec les rapporteurs spéciaux sur la liberté de religion ou de conviction; la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants; les minorités, et sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran.
Certains gouvernements apportent un « appui idéologique, logistique et financier » sans lequel les groupes terroristes n’auraient pas obtenu autant de succès, a déclaré le Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, M. Heiner Bielefeldt, rappelant par la même aux gouvernements leur obligation de prendre des mesures concrètes pour prévenir les atteintes à la liberté de religion ou de conviction, notamment celles commises par des acteurs non étatiques.
« Les gouvernements portent une part de responsabilité en refusant d’apporter une protection concrète aux individus et aux groupes dont les droits sont bafoués », a-t-il déclaré, faisant valoir que l’émergence de tels groupes avait souvent pour origine « la mauvaise gouvernance politique, la corruption endémique, l’ethnocentrisme ou encore la désaffection, voire le désespoir, d’une bonne partie de la population ».
La conséquence en est que les mafias, les milices autoproclamées et les organisations terroristes viennent combler le vide, certaines commettant des atrocités « au nom de Dieu ».
En Iraq, où elle s’est rendue en juin dernier, la Rapporteuse spéciale sur les questions relatives aux minorités, Mme Rita Izsak-Ndiaye, qui s’est penchée sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques dans des situations de crise humanitaire, a témoigné du fait que les minorités iraquiennes se sentaient visées, marginalisées et dépourvues de protection.
Dès lors, Mme Izsak-Ndiaye a requis une enquête approfondie sur les crimes commis par Daech et toutes les autres parties impliquées dans le conflit, et que les auteurs soient tenus de répondre de l’ensemble des crimes et des violations des droits de l’homme qu’ils ont perpétrés, y compris les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le génocide.
L’ONU, la société civile et d’autres acteurs, ont été encouragés par une autre titulaire de mandat à entreprendre des recherches sur les méthodes de recrutement des enfants par les groupes extrémistes pour s’en servir comme combattants, esclaves sexuels, boucliers humains ou encore pour commettre des attentats-suicides.
La Rapporteuse spéciale sur la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants, Mme Maria Grazia Giammarinaro, dont le dernier rapport porte sur ce trafic dans les situations de conflits modernes, a en outre demandé la levée de l’immunité des Casques bleus par les États contributeurs de troupes, dont les personnels sont impliqués dans des situations d’exploitation, et que les coupables soient traduits en justice.
« Dans l’ensemble, au regard du nombre des jalons établis dans les résolutions successives de l’Assemblée générale sur le Myanmar pendant plus de 20 ans, le bilan actuel du pays est positif », en particulier suite à la victoire écrasante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) aux élections nationales du 8 novembre 2015, qui ont marqué « un tournant important dans l’histoire du Myanmar », a commenté pour sa part le Conseiller spécial du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, M. Vijay Nambiar.
M. Nambiar a toutefois appelé à la vigilance, compte tenu du fait qu’une douzaine de groupes armés n’ont pas voulu signer l’accord de cessez-le-feu parce qu’ils souhaitent un processus de paix plus inclusif, que la loi sur la citoyenneté qui a exclu plus d’un million de Rohingya n’a toujours pas été abrogée, et de la persistance des violences dans les États de Kachin et Rakhine.
Au chapitre des changements positifs, le Rapporteur sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, M. Ahmed Shaeed, a évoqué la publication d’un projet de charte des droits civils; l’émergence d’un débat public de portée limitée sur certaines questions relatives aux droits de l’homme, y compris le recours à la peine de mort pour les infractions sans violence liées aux stupéfiants; la mise en œuvre du Plan d’action global commun; ainsi que plusieurs mesures législatives prises par le Parlement afin de renforcer la protection de certains droits.
« L’engagement de l’Iran avec le monde offre une occasion en or pour les leaders mondiaux mais également pour les entreprises qui cherchent à investir en Iran pour qu’elles jouent leur rôle en matière de respect des droits de l’homme dans le pays », a encouragé le Rapporteur spécial.
En début de matinée, la Commission avait tenu un dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, M. Michael Lynk qui, la veille, avait introduit son rapport sur les violations commises par Israël et leurs incidences sur le développement socioéconomique en Palestine.
Elle a également entendu, la présentation de quatre projets de résolution sur le développement social et sur la protection des enfants et poursuivi son débat général sur la protection et promotion des droits de l’homme.
La Troisième Commission reprendra ses travaux le lundi 31 octobre à 10 heures du matin.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME (A/71/40 et A/C.3/71/4 (à paraître))
Dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, M. Michael Lynk
L’observatrice de l’État de Palestine a réitéré son appui sans faille au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967. Dans son rapport, M. Lynk a étudié les violations commises par Israël et leurs incidences sur le développement socioéconomique en Palestine.
Tant que la colonisation se poursuivra, a-t-elle affirmé, le droit au développement ainsi que tous les droits fondamentaux des Palestiniens continueront d’être niés. Israël doit mettre un terme à près de 50 ans d’occupation illégale. Comment la communauté internationale pourrait-elle agir de façon plus efficace et pour que le mandat du Rapporteur spécial soit respecté?
Le représentant de la Jordanie a rappelé que le conflit palestinien était « le principal conflit dans la région ». Selon lui, il est important de documenter toutes les violations. Comment la communauté internationale peut-elle forcer Israël à rendre des comptes?
La représentante du Sénégal a rappelé la nécessité d’assurer au peuple palestinien la pleine jouissance de ses droits inaliénables. Il faut un horizon politique clair prévoyant une solution politique de deux États. Quelles sont les priorités du Rapporteur spécial pour les années à venir?
Préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire dans les territoires occupés, le représentant de l’Indonésie a dit qu’il ne fallait pas attendre 50 ans de plus pour que le peuple palestinien retrouve sa dignité.
Le représentant de la République islamique d’Iran a dénoncé la persistance de l’occupation brutale de la Palestine par Israël et le blocus contre Gaza, « la plus grande prison à ciel ouvert au monde ». Quelles mesures pratiques prendre pour faire cesser l’impunité?
La représentante de Cuba a exprimé sa préoccupation quant à l’utilisation de la violence par Israël à l’encontre du peuple palestinien. Seule la fin de la colonisation et la reconnaissance des droits de ce peuple permettra de mettre en marche un mécanisme qui assurera la paix.
La représentante du Qatar a appelé la communauté internationale à assumer « sa responsabilité juridique et éthique de mettre un terme au blocus de Gaza ».
Il importe que les règles du droit international humanitaire soient respectées, a rappelé le représentant de la Norvège. Les pratiques qui sapent les droits fondamentaux des Palestiniens, notamment des enfants, sont inacceptables.
Le représentant de l’Union européenne s’est dit préoccupé par les tendances négatives sur le terrain qui menacent la viabilité d’une solution de deux États. Les deux parties doivent respecter le cessez-le-feu. Il faut mettre un terme aux attaques indiscriminées et aux stocks illicites d’armes du Hamas.
Israël doit cesser le blocage et l’isolement géographique des territoires palestiniens et les parties doivent travailler à une désescalade de la tension. Le représentant a encouragé la mise en place rapide de nouvelles dates pour des élections locales palestiniennes.
La communauté internationale n’a pas la volonté de faire cesser les violations dans les territoires occupés, a déploré la représentante de l’Afrique du Sud. Le droit au développement est un droit universel et inaliénable. Quelles sont les tendances à cet égard étant donné le climat actuel?
La représentante du Maroc, évoquant la détérioration de la situation dans les territoires palestiniens, a estimé que les autres préoccupations de la communauté internationale ne devraient pas l’empêcher de regarder ce qui s’y passe. « Il faut résoudre la question de la Palestine qui est au cœur de tous les problèmes de la région. »
Le Roi préside le Comité de Jérusalem, a-t-elle rappelé, et les attaques à l’encontre de ses sites sains ne font qu’accroître la haine et la radicalisation dans la région.
Les Palestiniens se voient niés leur accès aux droits les plus fondamentaux, a insisté le représentant de l’Arabie saoudite, or la communauté internationale n’arrive pas à trouver des solutions. Il a appelé Israël à sortir des territoires palestiniens occupés et la communauté internationale à trouver des solutions au problème des réfugiés.
La représentante d’Israël a jugé le mandat du Rapporteur spécial « biaisé » à l’encontre de son pays. D’après elle, le Conseil des droits de l’homme est « contrôlé par les pires violateurs des droits de l’homme » et il « poursuit sa fixation à l’encontre de la seule démocratie au Moyen-Orient, l’État d’Israël ».
Elle a aussi reproché au Rapporteur spécial d’avoir ignoré le terrorisme à l’encontre d’Israël. Depuis sa création, en 1993, ce mandat « illégitime » oublie les violations des droits de l’homme des Palestiniens par les Palestiniens.
La représentante des Maldives a mis l’accent sur la reddition de comptes et l’indemnisation des victimes et la réalisation d’enquêtes indépendantes quand il y a eu une utilisation excessive de la force.
Le représentant de la Turquie a regretté que le peuple palestinien soit toujours privé de ses droits fondamentaux. Son pays, a-t-il assuré, poursuivra ses efforts pour trouver une solution pacifique et durable de la question palestinienne.
Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 a noté que l’occupation israélienne était de plus en plus ancrée. « Nous ne sommes pas vers la voie de l’indépendance palestinienne », a-t-il déclaré.
D’après lui, il est impossible de séparer les violations des droits de l’homme des 50 années d’occupation et des projets de colonies israéliennes. « Est-ce que la Puissance occupante doit réaliser que son statut au sein de la communauté internationale dépend du fait de permettre au peuple palestinien d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination? »
M. Lynk a relevé qu’un État Membre des Nations Unies avait récemment parlé d’« occupation perpétuelle ». En conclusion, il s’est demandé s’il fallait une résolution au sein des Nations Unies ou une opinion consultative de la part de la Cour internationale de Justice (CIJ) « pour savoir si l’occupation n’est pas devenue illégale ».
Dialogue avec le Conseiller spécial du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme au Myanmar
M. VIJAY NAMBIAR, Conseiller spécial du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, qui achève sa fonction, a déclaré, en présentant le rapport (A/71/308) sur la mission de bons offices du Secrétaire général, que ce document avait été préparé au regard de changements significatifs, avec, comme toile de fond, la tenue des élections historiques de novembre 2015. Il a salué ce tournant majeur tout en estimant précoce de dire que cette situation était irréversible.
Il a rappelé que la communauté internationale avait effectué une traversée du désert aux côtés du Myanmar depuis que le refus, en mai 1990, de la junte militaire de reconnaître la victoire de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) avait entraîné, en 1991, la première résolution de l’Assemblée générale, devenue annuelle, invitant le Gouvernement à prendre des mesures fermes pour établir un État démocratique.
L’Assemblée générale y exprimait sa préoccupation concernant la situation grave des droits de l’homme dans le pays et appelait à la libération des prisonniers politiques et à la protection des personnes appartenant à des minorités ethniques et religieuses. En 1993, le Secrétaire général avait aussi été prié d’offrir ses bons offices pour assister à la mise en œuvre de ladite résolution.
La victoire écrasante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), longtemps parti d’opposition, et son accession au pouvoir à la place d’une équipe essentiellement composée d’anciens militaires, montre que le processus de réforme évolue dans la bonne direction. Le 15 mars 2016, le nouveau Parlement a élu à la présidence Htin Kyaw, qui est le premier Chef d’État du Myanmar sans antécédents militaires depuis plus de 50 ans. La dirigeante du parti au pouvoir, Mme Daw Aung San Suu Kyi, a été nommée Conseillère d’État et Ministre des affaires étrangères.
Traitant des négociations pour tourner la page de la guerre avec les groupes armés, M. Nambiar a estimé que ce conflit ne saurait être résolu militairement, se félicitant de l’accord de cessez-le-feu grâce à une équipe de négociation qui a œuvré de conserve avec le Gouvernement et l’armée. Il a dressé un historique des diverses formes d’assistance offertes par l’ONU dans le contexte du processus de réconciliation pour rapprocher les points de vue et persuader chacun de réexaminer sa position.
Le processus de réconciliation nationale a progressé grâce à la signature de l’accord de cessez-le-feu par les huit groupes ethniques armés le 15 octobre 2015, préparant le terrain à la cessation des conflits ethniques qui caractérisent l’histoire du pays depuis son accession à l’indépendance.
Une douzaine de groupes n’ont toutefois pas voulu signer cet accord parce qu’ils souhaitent un processus de paix plus ouvert. Il a aussi fait état de la Conférence nationale sur la paix en janvier 2016. Le Secrétaire général a été invité, en août 2016, à la Conférence de paix de Panglong du XXIe siècle à l’initiative de Mme Daw Aung San Suu Kyi.
L’ONU continuera de discuter avec toutes les parties pour mettre fin à la méfiance entre les différents groupes, dont certains ont encore peur.
Il a fait état des manifestations massives dans l’État de Kachin en réaction à la forte présence militaire. La Chine a promis de verser 3 millions de dollars sur trois ans et d’autres pays lui emboîteront le pas en vue de la mise en place d’un mécanisme de mise en confiance, a encore annoncé M. Nambiar.
Le Gouvernement précédent s’est engagé à garantir un quota de 30% de femmes dans les négociations de paix. Le Conseiller spécial a espéré que cette mesure et d’autres, dans une large gamme de domaines, contribueront à ancrer une culture de respect de l’égalité, avec la participation de tous.
Le Conseil spécial a en outre fait état de l’intérêt manifesté par le Myanmar de participer dans les opérations de maintien de la paix.
S’agissant de la situation dans l’État de Rakhine, le Secrétaire général n’a cessé de plaider en faveur de l’établissement d’un bureau des Nations Unies, a affirmé M. Nambiar, avant de souligner que cela était nécessaire pour régler les questions prioritaires afférentes aux violations des droits de l’homme, en particulier des Rohingya, minorité musulmane.
Par ailleurs, l’ONU encourage une mobilisation publique pour faire cesser les discours haineux et les confrontations entre communautés bouddhiste et musulmane. Il a fait état en particulier de la mise sur pied d’un comité central pour la paix, la stabilité et le développement à Rakhine.
Du reste, la Commission Kofi Annan examine actuellement la situation entre les communautés, identifie les facteurs ayant suscité les violences et le déplacement et étudie les problèmes liés à la citoyenneté et aux besoins humanitaires, qui sont parmi les questions les plus épineuses.
En dépit de l’optimisme général, certaines violations, comme la violence armée dans l’État de Rakhine, demeurent très préoccupantes. À cet égard, M. Nambiar a déploré les attaques contre les forces de police et des postes frontaliers. Il a reçu des informations faisant état d’incendies et de violences dans des villages.
M. Nambiar a dit avoir été saisi également d’allégations de violence et de représailles par les forces de sécurité. Le Secrétaire général appelle donc à la retenue pour ne pas mettre en péril les acquis.
Dans ses déclarations publiques et réunions avec le Secrétaire général à New York, Mme Daw Aung San Suu Kyi a dénoncé toutes les formes de préjugés et d’intolérance, de même que les discours haineux. Elle a toutefois voulu obtenir une plus grande marge de manœuvre politique et a déclaré que la question de la citoyenneté exigeait du temps. Elle a aussi alerté sur la situation actuelle dans l’État de Rakhine, a ajouté le Conseiller spécial.
Le Sommet humanitaire mondial à Istanbul et celui sur les réfugiés et les migrants à New York ont traité des déplacements de longue durée et encouragé à la protection et à l’inclusion des réfugiés, des migrants et des personnes déplacés à l’intérieur des communautés. Il a encouragé à se pencher sur cette dimension au Myanmar mais également en prenant en compte les enjeux géopolitiques de la région, au niveau de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN).
Dans l’ensemble, au regard de nombre des jalons établis dans les résolutions successives de l’Assemblée générale sur le Myanmar pendant plus de 20 ans, le bilan actuel du pays est positif, a-t-il apprécié, annonçant en conclusion que Mme Daw Aung San Suu Kyi avait demandé à ce que le projet de résolution ne soit plus présenté.
Le représentant du Myanmar a remercié l’Union européenne pour sa décision de ne pas présenter le projet de résolution annuel sur le Myanmar. Cela fait un quart de siècle, depuis 1991, que cette question est inscrite à l’ordre du jour de la Troisième Commission, a-t-il rappelé. « Le Myanmar a tourné la page », a-t-il assuré.
Les élections générales de novembre 2015 ont donné au peuple un gouvernement démocratiquement élu. Le peuple jouit de davantage de liberté politique; l’espace s’est élargi pour la société civile et les médias; et l’économie s’est ouverte avec des politiques centrées sur la réduction de la pauvreté.
Toutefois, a averti le représentant, il reste des défis à surmonter. Après six décennies de conflit, la paix et la réconciliation nationale sont la priorité du Gouvernement. Le Secrétaire général de l’ONU a participé à la Conférence « historique » de Panglong pour le XXIe siècle, qui s’est tenue le 31 août dernier, et à la suite de laquelle des dialogues politiques nationaux devraient s’engager en novembre.
Par ailleurs, a poursuivi le représentant, le Gouvernement ne ménage pas ses efforts pour trouver une solution juste et durable au problème complexe et de longue date dans l’État de Rakhine, à travers les tâches entreprises par le Comité central pour la mise en œuvre de la paix, de la stabilité et du développement à Rakhine, présidé par la Conseillère d’État, Mme Daw Aung San Suu Kyi, et appuyées par la Commission consultative sur l’État de Rakhine, présidée par M. Kofi Annan.
S’agissant de certaines informations des médias faisant état de violations des droits de l’homme commises à la suite de l’attaque armée du 9 octobre dernier contre trois postes de police dans l’État de Rakhine, il a souligné que, par le passé, il avait vu des informations erronées. Il a donc appelé les interlocuteurs à ne pas tirer de conclusions hâtives. Le Gouvernement, a-t-il répété, souhaite lutter contre toute violation ou atrocité commise.
Le représentant de Singapour a appuyé les efforts des Nations Unies, pour appuyer la transition démocratique au Myanmar, qui comptent parmi des efforts diplomatiques les plus longs dans l’histoire de l’Organisation. Il a salué les priorités du nouveau Gouvernement en matière de réconciliation et de développement.
Le fait que la résolution sur le Myanmar ne soit pas présentée à la Troisième Commission, cette année, est « la reconnaissance par la communauté internationale des nouvelles avancées », s’est félicité le représentant de la Norvège. Comment la communauté internationale peut-elle aider à améliorer la situation dans l’État de Rakhine?
Au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), le représentant de l’Égypte a dénoncé les graves violations des droits de l’homme qui continuent de se produire sur le terrain. Ainsi, plus de 120 000 personnes de la communauté Rohingya se trouvent dans des camps de personnes déplacées. L’Organisation, a-t-il prévenu, va suivre attentivement l’évolution de la situation.
En tant que voisin amical, le représentant de la Chine a appuyé les efforts proactifs du nouveau Gouvernement du Myanmar pour le développement et l’harmonie. La question du nord a des incidences sur la stabilité de la région et de la Chine, a-t-il toutefois relevé, en espérant que le pays parviendra à un cessez-le-feu national le plus tôt possible. En outre, la communauté internationale doit aider le pays en pleine consultation avec le Gouvernement du Myanmar.
À son tour, le représentant de l’Union européenne a reconnu les progrès réalisés depuis les élections au Myanmar. Malgré les avancées, le rapport rappelle qu’il y a des défis à relever, notamment en ce qui concerne les minorités et l’inclusion des femmes dans le processus de paix. Quel rôle le Conseiller spécial voit-il pour les bons offices du Secrétaire général et les Nations Unies dans la transition démocratique? Quelles seraient les meilleures mesures appliquées par la Commission consultative dans l’État de Rakhine?
La représentante du Royaume-Uni a estimé que les gains sont fragiles et qu’« il pourrait y avoir un retour en arrière ». Pour avancer vers une paix durable, elle a demandé à toutes les parties de reprendre les pourparlers de bonne foi dans le nord du pays. Elle s’est aussi dite alarmée par les violations rapportées du fait de la réponse militaire et a souhaité que soit restauré rapidement l’accès humanitaire. Quelles sont les effets des attaques sur le processus de paix?
Le Conseiller spécial du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme au Myanmar a jugé important que la communauté internationale prête attention aux besoins de la population civile et qu’elle demande au Gouvernement du Myanmar de traiter de la question sécuritaire dans le nord.
À cet égard, M. Nambiar a dit avoir reçu l’assurance de la Conseillère d’État qu’il y avait une pleine conscience du respect dû aux normes internationales.
En ce qui concerne les derniers évènements dans l’État de Rakhine, la communauté internationale doit rappeler qu’il faut un accès humanitaire. À ce sujet, l’implication du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) est très utile. Il faut éviter l’utilisation excessive de la force et les discours d’incitation à la haine entre les communautés, et mener des enquêtes crédibles, a insisté le Conseiller spécial.
Quant à la Commission Kofi Annan, « elle sera impliquée sur ces questions au fur et à mesure qu’il y aura normalisation », a assuré M. Nambiar. Selon lui, les Nations Unies auront toujours une présence forte au Myanmar, via peut-être de nouvelles modalités, comme une présence politique du Bureau des droits de l’homme, tandis que se poursuivra le mandat du Rapporteur spécial.
Pour ce qui est de l’escalade de la violence dans l’État de Kachin, le Gouvernement doit prendre des actions pour parler bilatéralement et en utilisant le processus politique de la Conférence pour la paix du mois d’août dernier, a-t-il ajouté.
M. HEINER BIELEFELDT, Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, a souligné que, dans son dernier rapport A/71/269, il dressait un panorama des violations relatives à cette liberté fondamentale auxquelles on n’accorde pas une attention internationale suffisante. Il a souligné que la question étant complexe et délicate à la fois, il avait choisi de jeter la lumière sur la portée normative et les contours de ce sujet en vertu de l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du même article du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et d’autres instruments.
M. Bielefeldt a rappelé aux gouvernements qu’ils étaient tenus de prendre des mesures concrètes pour prévenir les atteintes à la liberté de religion ou de conviction, notamment celles commises par des acteurs non étatiques. En effet, a-t-il argué, les gouvernements portent une part de responsabilité en refusant d’apporter une protection concrète aux individus et aux groupes dont les droits sont bafoués.
Le Rapporteur spécial a aussi noté que les groupes terroristes avaient reçu, de la part de certains gouvernements, un « appui idéologique, logistique et financier » sans lequel ils n’auraient pas obtenu autant de succès. S’ils stigmatisent les membres des minorités religieuses, considérés comme des « incroyants » ou des « hérétiques », il est fréquent que les groupes terroristes attaquent aussi des personnes pratiquant la même religion qu’eux, créant ainsi un climat de peur dans lequel nul ne peut jouir de sa liberté de religion ou de conviction.
Cette situation a souvent pour origine la mauvaise gouvernance politique, la corruption endémique, l’ethnocentrisme ou encore la désaffection, voire le désespoir, d’une bonne partie de la population, ce qui a pour conséquence que les mafias, les milices autoproclamées et les organisations terroristes viennent combler le vide, certains commettant des atrocités « au nom de Dieu ».
Il a en outre souligné que, comme les formes, les motivations et les causes profondes des atteintes variaient énormément, il n’était pas possible d’établir une « carte mondiale ». À l’issue de six années de recherche et de visites sur le terrain, il a constaté que certains gouvernements se contentaient de ne tenir compte que des dimensions individuelles et privées de la liberté de religion ou de conviction, négligeant ainsi les aspects de la vie religieuse qui ont trait à la communauté, aux institutions et aux infrastructures.
D’autres gouvernements ne s’attachent, au contraire, qu’à reconnaître les identités religieuses collectives et, de ce fait, omettent l’élément essentiel qu’est la liberté individuelle, qui figure pourtant dans l’intitulé même de la liberté de religion ou de conviction.
D’autres gouvernements privilégient, quant à eux, une religion ou une conviction en particulier, voire une catégorie particulière de religion, en la favorisant au titre de son appartenance au patrimoine national.
De l’avis du Rapporteur spécial, « on ne saurait assez insister sur le fait que l’intolérance religieuse ne provient pas directement des religions elles-mêmes, mais qu’elle suppose toujours l’intervention d’êtres humains », ce qui fait que l’idée selon laquelle un texte ne peut être compris sans interprétation humaine vaut également pour les sources, qu’elles soient écrites ou orales, de différentes traditions liées à des religions ou à des convictions.
Il a noté dans ce contexte que, dans un certain nombre de pays, le Gouvernement soutenait et encourageait activement les interprétations intolérantes d’une religion. Il a estimé que la « guerre contre le terrorisme » s’était avérée un prétexte bien pratique pour un certain nombre de gouvernements souhaitant imposer des mesures de contrôle radicales qui portent atteinte à la liberté de religion ou de conviction et à d’autres droits de l’homme.
Il a aussi signalé qu’un certain nombre d’États disposaient encore de mesures de lutte contre l’apostasie dans leur droit pénal, ou sanctionnaient la conversion religieuse et le blasphème.
Estimant que beaucoup restait à faire en matière de protection de la liberté de religion ou de conviction, le titulaire de mandat a signifié que le prétexte selon lequel l’accueil de certains réfugiés modifierait la composition religieuse traditionnelle d’un pays revenait à « territorialiser » les religions et les convictions, ce qui est contraire à l’esprit et à la lettre du droit universel à la liberté de religion ou de conviction.
La Pologne a recommandé aux États l’instauration d’un environnement propice au respect de la liberté religieuse et à la protection des libertés d’expression et de rassemblement. Elle a trouvé très alarmant le fait que les minorités religieuses subissent des actes de violence de certains groupes, une situation due aux interprétations « étroites » de la religion. Elle s’est interrogée sur les moyens de résoudre la crise migratoire.
Le Danemark a condamné toute forme de violence et d’intolérance contre des personnes en raison de leur religion ou de leur conviction. La représentante a sollicité des exemples de bonnes pratiques aidant les gouvernements à contrer les facteurs qui conduisent à ces violations.
La République islamique d’Iran a répliqué que le fait de rejeter toute la responsabilité sur les États ne règlerait pas le problème car il faut prendre en compte les causes sous-jacentes à ces violations. Elle a partagé le point de vue du Rapporteur spécial quant à la montée en puissance de groupes terroristes comme l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL), qui ont terni l’image de l’Islam dans le monde.
Les États-Unis ont dénoncé les mauvais traitements infligés aux communautés religieuses par des services étatiques. La violation de l’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques est une réalité quotidienne, ont ajouté les États-Unis, qui ont appelé à la libération immédiate de tous les détenus pour motifs religieux au Bahreïn et au Yémen.
L’Allemagne a aussi évoqué la discrimination à l’encontre de certaines minorités religieuses sur le marché de l’emploi et dans d’autres domaines de la vie socioéconomique. Ce pays a également noté que les enfants souffraient de discrimination religieuse dans le milieu scolaire. Dans certains pays, ils peuvent même être enlevés ou convertis de force.
La Norvège a appuyé l’appel du Rapporteur spécial visant à la protection des croyants et non de la croyance car les droits de l’homme concernent des êtres humains et non une religion.
Le Royaume-Uni a appuyé le mandat et la nomination de M. Ahmed Shaeed comme nouveau titulaire. La représentante a indiqué que son pays avait mis à jour ses instruments relatifs à la protection de la liberté de religion ou de conviction. Il est dans l’intérêt des sociétés de favoriser la pratique religieuse car les gens qui exercent leur culte sans crainte se sentent libres.
L’Irlande a regretté le harcèlement à l’encontre des minorités religieuses. Comment les États pourraient être amenés à rendre compte pour ce type d’exactions?
L’Union européenne a demandé quelle mesure pourrait être prise pour lutter contre les causes des violations mentionnées dans le rapport.
Le Canada a proposé de prendre en compte le lien entre la liberté de religion et d’autres droits. La problématique hommes-femmes dans ce domaine est fondamentale. La représentante a regretté que certains pays prétextent que les réfugiés n’ont pas la même religion que la leur pour leur refuser l’accueil.
Le Yémen a mis l’accent sur la culture de tolérance qui le caractérise. Tous les cultes, y compris juifs et chrétiens, peuvent être librement pratiqués. Le représentant a regretté que, compte tenu de la situation qui prévaut avec le conflit, beaucoup de juifs et chrétiens ont fui le pays.
Le Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction a déclaré que le traitement des minorités était souvent indicatif de la manière dont les minorités religieuses sont traitées. Il a signalé que la religion majoritaire avait pour obligation de protéger les minorités, sans compter que c’est aussi dans son intérêt même.
La tolérance et le droit à la liberté de religion ou de conviction auraient besoin d’avoir plus d’écho auprès de l’opinion publique, a-t-il insisté. M. Bielefeldt a toutefois averti que la haine à caractère religieux « n’est pas une loi naturelle ». La haine n’est pas religieuse, a insisté le Rapporteur spécial.
En outre, la liberté de religion est un droit pour tous les êtres humains, indépendamment de leur sexe ou de leur identité et orientation sexuelles. Ce serait absolument catastrophique de clamer que la religion n’est pas un droit pour les homosexuels, a-t-il affirmé avec fermeté. Il a exhorté à reconnaître le travail de nombreuses personnes qui œuvrent sur le terrain pour faire avancer les bonnes causes en matière de liberté religieuse.
Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants
La Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, Mme MARIA GRAZIA GIAMMARINARO, qui présentait aujourd’hui son rapport (A/71/303), a identifié le lien entre la traite des êtres humains et les conflits. Elle a mis l’accent sur la traite des personnes fuyant un conflit, estimant que les déplacements forcés accroissaient leur vulnérabilité aux violences physiques, aux agressions sexuelles, ainsi qu’aux détentions.
Mme Giammarinaro a mis en avant la traite des enfants à des fins d’enrôlement dans les forces armées, généralement les garçons, souvent kidnappés pour être utilisés par des milices armées, dans le cadre de conflits en cours. Ces enfants, a-t-elle dit, étaient également utilisés comme kamikazes et boucliers humains, citant l’exemple de l’Iraq avec Daech.
En outre, elle a fait état de la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle, y compris l’esclavage sexuel, les mariages forcés, ainsi que la prostitution et la grossesse forcées qui, a-t-elle dit, s’inscrit dans un cadre plus général d’actes de violence sexuelle commis contre la population civile pendant et après les conflits.
Récemment, l’on avait vu apparaître dans les pays touchés par les conflits une nouvelle forme particulièrement grave de traite, à savoir l’enlèvement des femmes et des filles, notamment à l’école et à la maison, lesquelles sont ensuite forcées à se marier ou à servir d’esclaves sexuelles.
La Rapporteuse spéciale a également noté que la traite à des fins d’exploitation sexuelle n’était pas seulement le fait de groupes criminels organisés, expliquant qu’il se pouvait que des femmes et des filles syriennes réfugiées fussent soumises à la traite dans le cadre de mariages temporaires, de mariages d’enfants ou de mariages forcés.
Par ailleurs, elle s’est intéressée à la traite des travailleurs migrants dans les zones de conflits qui, selon elle, est une question complètement ignorée. Elle a signalé des cas où de grands groupes privés employés par les États et leurs forces armées engagent des migrants pour accomplir des tâches notamment dans le domaine du nettoyage, de la construction, de la restauration ou de la coiffure.
Dans les situations postconflit, il n’est pas rare d’observer une montée de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, de même que des autres formes de violence sexiste, tels que le viol et la violence domestique, a déclaré l’experte.
Mme Giammarinaro s’est aussi dite déçue du fait que les opérations de maintien de la paix continuaient d’enregistrer des cas honteux de violence sexuelle, d’abus et d’exploitation, mettant à mal leur rôle crucial en matière de protection des communautés, y compris des femmes et des enfants.
Elle a recommandé que des mesures contre la traite soient intégrées dans les interventions humanitaires dans les zones de conflit comme faisant partie des activités de protection des vies des personnes, dès l’éclatement des conflits.
Elle a demandé que soient appliquées des procédures appropriées dans les centres d’accueil et de détention des migrants.
Il faut prendre des mesures proactives pour protéger les enfants dans les zones de conflit dans leur intérêt, et dans le strict respect du droit international humanitaire, a-t-elle affirmé.
Par ailleurs, elle a souhaité que l’immunité des Casques bleus soit levée par les États contributeurs de troupes, dont les personnels sont impliqués dans des situations d’exploitation, et que ceux-ci soient traduits en justice.
La représentante des États-Unis a jugé important de traiter cette question dès le départ et de façon systématique. La Rapporteuse spéciale a-t-elle des précisions sur ses recommandations et sur la façon d’assurer la reddition de comptes lorsque des Casques bleus sont impliqués?
Le représentant de l’Allemagne a reconnu, par exemple, que le conflit en Syrie ne faisait qu’accroître le nombre de victimes de la traite. Comment, dans les cas de flux massifs de réfugiés, identifier rapidement les victimes, et ce, sans mettre à mal l’indépendance de la presse?
La représentante du Royaume-Uni a dit qu’il fallait promouvoir les efforts pour en finir avec l’esclavage moderne. Au Royaume-Uni, une loi permet aux forces de l’ordre britannique de traiter ces crimes et 33,5 millions de livres sterling ont été allouées au combat contre le trafic des êtres humains.
La Directive de l’Union européenne de lutte contre la traite a permis d’accroître la prise de conscience sur ce phénomène, s’est félicité le représentant de l’Union européenne. Mme Giammarinaro a-t-elle des exemples de bonnes pratiques en la matière, en particulier en ce qui concerne les femmes et les enfants?
La représentante du Liechtenstein a indiqué que ce pays concentrera ses efforts nationaux et avec ses partenaires dans le domaine de l’impunité.
La représentante de l’Afrique du Sud a indiqué que son pays avait adopté une loi qui pénalise la traite, qui est le résultat de plusieurs facteurs incluant la pauvreté, l’inégalité raciale ou la division des familles. Comment traiter la traite comme un résultat systématique des conflits?
La représentante du Maroc a souligné le caractère transnational du problème. La Rapporteuse spéciale a-t-elle des idées sur la façon dont la communauté internationale pourrait aider à fournir des recours aux victimes de la traite et quel est le rôle des chefs religieux dans la réhabilitation de celles-ci?
La représentante de l’Érythrée a noté que son pays avait demandé au Secrétaire général d’ouvrir une enquête indépendante sur la traite dans la région de la Corne de l’Afrique. D’après elle, l’impact des migrations sur la traite ne devrait pas être sous-estimé. Mme Giammarinaro a-t-elle des donnés sur les liens entre les migrations ordonnées et la traite?
Quels sont les principaux défis relatifs à la traite des êtres humains qui devraient être abordés dans le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières? a demandé la représentante de la Suisse.
La Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a souligné qu’il fallait lutter contre ce fléau dans le cadre des conflits.
D’après elle, à la suite de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, la lutte contre la traite devrait être pleinement intégrée dans le cadre des deux pactes en cours d’élaboration.
En cas de déplacements massifs que faut-il faire? Jusqu’à présent, a-t-elle ajouté, les mesures de lutte contre la traite ont surtout été conçues sur la base de mesures policières. Aujourd’hui, il faudrait mettre en place des procédures en coopération avec les organisations non gouvernementales et les institutions qui ont du personnel formé, et déceler les signes ou les risques de traite qui apparaissent au cours du périple des réfugiés et des migrants.
Les États Membres devraient envisager d’étendre certaines mesures comme l’aide pour décrocher un emploi. Enfin, a-t-elle noté, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Organisation internationale du Travail (OIT) ont lancé une alliance pour lutter contre le travail forcé.
Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur les questions relatives aux minorités
Mme RITA IZSÁK-NDIAYE, Rapporteuse spéciale sur les questions relatives aux minorités, a présenté son rapport (A/71/254) dans lequel elle a jugé alarmant le contexte humanitaire actuel, avec des conflits en cours ou prolongés entraînant des déplacements massifs de populations à travers le monde. Selon l’experte, le nombre de réfugiés et de déplacés n’avait jamais été aussi élevé dans le monde, en raison des tensions et heurts interethniques et interraciaux.
Selon la Rapporteuse spéciale, toutes les tendances semblaient indiquer une corrélation entre l’impact des crises et le statut des minorités. À titre d’exemple, elle a évoqué la situation des Yazidis, des chrétiens, et d’autres minorités ethniques en Iraq, pris pour cibles par Daech sur la base de leur identité.
Mme Izsák-Ndiaye a estimé que les minorités étaient plus vulnérables lors des crises et catastrophes humanitaires, relevant la difficulté de collecter des données ventilées par appartenance ethnique pour évaluer l’ampleur de la situation.
Elle a déclaré que cette rareté de chiffres en la matière pouvait s’expliquer par le fait que les minorités déplacées ou affectées par ces crises étaient réticentes à se faire identifier en tant que minorité ethnique, religieuse, nationale ou linguistique, par peur de discrimination ou de violence.
Une responsabilité partagée par les États, a soutenu la Rapporteuse spéciale, précisant leur manque de volonté de collecter de telles données, puisqu’ils ne reconnaissaient pas les membres des groupes de minorités comme des citoyens, mais également parce qu’ils ne souhaitaient pas attirer l’attention sur les difficultés rencontrées par des membres de leur société.
À cet égard, Mme Izsák-Ndiaye a insisté sur le caractère indispensable de la collecte de données ventilées par appartenance ethnique, de religion et de langue pour cerner de manière adéquate les groupes touchés dans les situations de crise et de catastrophe naturelle.
L’experte est convaincue que les minorités pouvaient être spécifiquement prises pour cibles et être plus à risque en ce qui concerne leur sécurité physique, pendant et après les crises. Ces défis auxquels elles faisaient face étaient, entre autres, la violence et les attaques xénophobes, qu’elles soient physiques ou verbales, a lancé Mme Izsák-Ndiaye.
Ces personnes se heurtent également à une restriction de leur liberté de mouvement pendant les conflits et les crises humanitaires, a déclaré Mme Izsák-Ndiaye. En outre, elle a souligné qu’elles étaient stoppées plus fréquemment, voire bloquées, en raison de leur identité aux frontières et aux points de contrôle lorsqu’elles tentaient de fuir les conflits, et étaient soumises à des actes d’intimidation, de discrimination ou de violence.
Elle a indiqué que les minorités se heurtaient aussi à des difficultés supplémentaires, y compris l’accès à l’eau, aux services d’assainissement, à une alimentation adéquate, ainsi qu’aux soins de santé et à l’éducation. De plus, leur situation est aggravée par le fait qu’elles ne disposent pas de papiers d’identité, ce qui entrave leur accès à l’aide humanitaire en situation de crise.
S’agissant des retours forcés auxquels sont soumis les minorités lorsqu’une crise se prolonge, elle a insisté sur le fait qu’ils devaient toujours être volontaires et s’effectuer dans la dignité et en toute sécurité, tout en faisant participer et en consultant les minorités.
La Rapporteuse spéciale sur les questions relatives aux minorités a recommandé que la communauté internationale tienne mieux compte de la vulnérabilité des minorités dans les situations de crise, en mettant au point des stratégies plus ciblées et en investissant davantage pour y remédier.
Les mécanismes de protection, notamment des programmes d’aide humanitaire, devraient être conçus afin de répondre à leurs besoins, a conclu Mme Izsák-Ndiaye.
Le représentant de l’Autriche a demandé à la Rapporteuse spéciale de quelle manière les États pouvaient mettre en œuvre les recommandations du Forum sur les questions relatives aux minorités. En outre, il a voulu qu’elle partage son expérience en termes de synergie avec les organes conventionnels, notamment l’Examen périodique universel.
Le représentant de l’Union européenne est revenu sur la question de la difficulté à procéder à la collecte et à la ventilation de données, interrogeant l’experte sur la façon dont les États pourraient s’y prendre.
Quant au délégué de la Norvège, il s’est intéressé au mode opératoire pour réussir dans les efforts de collecte et de ventilation de données des minorités touchées par les crises.
La Rapporteuse spéciale sur les questions relatives aux minorités a déclaré qu’en matière de recommandations son rapport était complet, et soulignait que les acteurs étatiques et non étatiques devaient accroître les efforts, de même que les autres acteurs impliqués dans les actions d’aide aux minorités.
S’agissant du Forum sur les questions relatives aux minorités, Mme Izsák-Ndiaye a déclaré qu’avant la célébration du dixième anniversaire de cette instance, l’année prochaine, il était crucial de mettre en œuvre ses recommandations, tout en veillant à leur appropriation au niveau national. À cet égard, elle a exhorté les États Membres à contribuer au fonds volontaire en faveur des minorités pour leur permettre de participer aux débats.
Par ailleurs, elle s’est félicitée de la compréhension générale sur la nécessité de mettre en place un système de collecte et de ventilation de données. À cet égard, Mme Izsák-Ndiaye a précisé l’importance de sensibiliser sur l’objectif de cette démarche, en faisant comprendre aux personnes concernées le bien-fondé de cette opération qui participe de leur intégration.
Mme Izsák-Ndiaye a souligné que les conflits dans le monde ont des dimensions ethniques très claires, et qu’il fallait comprendre à quel point l’identité est importante. « Toute menace à l’identité est un empiètement sur le respect des droits de l’homme », a-t-elle dit.
Dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran
Mme ELIZABETH DA COSTA, Représentante spéciale du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a fait lecture de l’allocution de M. AHMED SHAHEED, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, qui a déclaré que son dernier rapport (A/71/418) contenait notamment une réflexion sur l’évolution de ce mandat depuis sa création en 2011.
Ce dernier indique qu’au début de ses fonctions il y a cinq ans, le pays était encore en proie à des difficultés résultant des élections présidentielles de 2009, ce qui a conduit à des milliers d’arrestations et d’inculpations à l’issue de procès inéquitables et à la mort de manifestants pacifiques aux mains des forces de sécurité.
D’autre part, les procédures spéciales n’ont pas eu accès au pays pendant six années, le Gouvernement se distinguant alors par l’un des taux les plus faibles de réponse aux mécanismes des droits de l’homme au sujet d’un éventail alarmant de violations de ces droits.
Cinq ans plus tard, poursuit-il, on peut relever des progrès en matière de coopération du Gouvernement avec les organes de l’ONU, celui-ci ayant invité deux titulaires de mandat dans les prochains mois. Il a aussi reçu et accepté des centaines de recommandations formulées lors des deux cycles de l’Examen périodique universel, soumis des rapports périodiques à trois organes de traités et s’apprête à le faire pour un quatrième. Les réponses aux communications ont également connu un mieux.
Sous le mandat du Président Hassan Rouhani, depuis 2013, le Rapporteur spécial note des changements substantiels de bon augure, plus particulièrement le projet de Charte des droits du citoyen; l’émergence d’un dialogue public lequel, bien qu’encore limité, tourne autour de questions relatives aux droits de l’homme; la possibilité d’abolir ou de réduire de manière significative la peine de mort pour des délits non violents liés à la drogue; ainsi que des mesures d’ordre exécutif et législatif pour améliorer les protections des droits, notamment celui des accusés.
En dépit de cela, le Rapporteur spécial considère qu’il n’y a pas eu des améliorations soutenues de la situation des droits de l’homme à cause, surtout, de l’écart entre la législation et les pratiques étatiques qui violent les droits fondamentaux et d’un système de justice qui obstrue systématiquement les droits des accusés à un procès équitable et aurait sérieusement besoin d’une réforme.
M. Shaheed regrette, en revanche, qu’alors que son mandat touche à sa fin, il n’ait jamais eu accès à la République islamique d’Iran, et juge troublant que des individus ayant coopéré avec lui soient l’objet de représailles de la part du Gouvernement en place.
Cela est d’autant plus regrettable, déclare-t-il, qu’il continue à recevoir des allégations alarmantes sur le recours à l’isolement solitaire sans possibilité d’avoir accès à un avocat et à la torture pour soustraire des confessions.
Les droits d’assemblée pacifique, d’association et d’expression sont toujours sévèrement restreints et au moins 14 journalistes et 15 blogueurs et militants des médias sociaux ont été soit détenus soit condamnés pour des activités pacifiques entre janvier et juillet 2016.
En outre, le droit à la vie est également lourdement menacé en Iran, pays qui continue d’exécuter plus d’individus per capita que tout autre au monde. Les organisations des droits de l’homme estiment qu’il y a eu entre 966 et 1 054 exécutions en 2015, soit le taux le plus élevé en 20 ans; et il y aurait eu pas moins de 420 exécutions entre janvier et octobre 2016. Malgré cette baisse, le nombre n’en demeure pas moins alarmant.
M. Shaheed fait aussi état de deux cas de flagellation à l’encontre de deux femmes pour adultère et de la réponse du Gouvernement iranien, lequel bien que défendant cette pratique, a assuré que les sentences seront converties en une autre peine, probablement la pendaison.
Il signale que, selon un site électronique gouvernemental, 37 000 mariages impliquant des individus de moins de 15 ans ont été enregistrés l’année dernière. Il note que beaucoup d’autres mariages ne sont jamais enregistrés dans le pays, en particulier dans les régions reculées.
S’agissant des minorités, il affirme que les chrétiens d’origine musulmane, les minorités musulmanes telle la Nematollahi Gonabadi, figurent parmi les groupes les plus ciblés par les autorités, et que 72 Baha’is ont été détenus le 8 juin dernier en raison de leur exercice pacifique de leur foi.
L’intérêt constant de la communauté internationale et l’investissement dans ce mandat, a-t-il conclu, ont créé un potentiel positif manifeste dans les mesures prises par le Gouvernement en vue de répondre aux attentes internationales, conjugué aux dialogues bilatéraux avec certains États Membres sur les droits de l’homme depuis la conclusion de l’accord nucléaire.
« L’engagement de l’Iran avec le monde offre une occasion en or pour les leaders mondiaux mais également pour les entreprises qui cherchent à investir en Iran pour qu’elles jouent leur rôle en matière de respect des droits de l’homme dans le pays », affirme-t-il.
Le représentant du Venezuela, au nom du Mouvement des pays non alignés, a réitéré sa position, à savoir que le mécanisme adéquat est l’Examen périodique universel (EPU) et les droits de l’homme ne peuvent pas être exploités à des fins politiques au sein de la Troisième Commission.
Le représentant de la République islamique d’Iran a vu dans la présentation de ce rapport biaisé « une routine futile qui n’a rien à voir avec la promotion et la protection des droits de l’homme ». Il n’y a aucune preuve crédible des allégations contenues dans ces rapports qui sont des copies conformes d’une année sur l’autre. Ils ne parlent pas de l’environnement démocratique qui existe en Iran. Les Iraniens iront de nouveau voter en mai 2017.
Par exemple, a critiqué le représentant, les rapports parlent de prisonniers politiques alors qu’il s’agit de terroristes ou insistent sur des incidents très isolés. Aucun pays n’est parfait, a-t-il dit. L’Iran saisit des tonnes de stupéfiants, malgré un faible soutien de la communauté internationale.
En outre, c’est historiquement un pays de minorités ethniques et religieuses, alors pourquoi parler de problème des minorités? Les types de lois qui existent en Iran sont partagés par la plupart des pays musulmans de la région. L’Iran a souhaité mener un dialogue respectueux avec tous les partenaires sérieux sans se voir pointé du doigt.
La représentante des États-Unis s’est dite préoccupée par la sombre situation des droits de l’homme en Iran, par la torture ou la détention, y compris de mineurs, pour des opinions politiques ou religieuses, et par les limites à la liberté d’expression des journalistes et des militants.
Le représentant de la République arabe syrienne a rejeté toute la teneur du rapport sur la situation en Iran. L’Iran accueille deux millions de réfugiés, a-t-il rappelé.
Alarmé par le rythme des exécutions, le représentant de l’Allemagne a demandé à l’Iran de chercher des châtiments alternatifs pour les mineurs. Dans quels domaines des avancées sont-elles les plus probables?
À son tour, la représentante du Royaume-Uni a appuyé la recommandation tendant à dire que l’Iran doit interdire immédiatement l’exécution des délinquants mineurs et permettre la liberté d’expression de ses citoyens. Elle s’est inquiétée de la détention de ressortissants britanniques-iraniens. Quelles mesures prendre pour lutter contre le trafic de stupéfiants?
Consciente qu’un débat de fond a actuellement lieu en Iran sur l’abolition de la peine de mort pour certaines catégories de crimes, la représentante de la Suisse a demandé au Rapporteur spécial quelles sont les mesures concrètes envisagées par les autorités iraniennes et comment la communauté internationale pourrait-elle les soutenir dans cet effort. Elle lui a également demandé quelles voies d’action il suggérait pour promouvoir les droits des femmes en Iran et accélérer leur autonomisation politique et économique?
Toute considération des droits de l’homme doit être abordée de façon impartiale, a fait valoir le représentant du Zimbabwe.
Son pays rejette la peine de mort dans toutes les circonstances, a affirmé la représentante de la Norvège,,en s’inquiétant de l’exécution de mineurs en Iran. La situation des femmes et la censure de la presse, la détention de défenseurs des droits de l’homme et de juristes, l’ont aussi inquiétée.
Si elle a salué les efforts récents de l’Iran, la représentante du Canada a jugé la situation grave. Elle a exhorté l’Iran à établir un moratoire sur la peine capitale.
La représentante de la Fédération de Russie a estimé que les faits et les recommandations qui figurent dans le rapport ne montrent pas l’impartialité et l’objectivité du Rapporteur spécial. Elle a souligné la volonté constructive de l’Iran de dialoguer avec le Conseil des droits de l’homme. Dans la foulée, la représentante du Bélarus a réitéré qu’elle avait toujours rejeté l’examen sélectif de certain pays. Le dialogue avec ce pays doit se faire sans pression extérieure, a-t-elle estimé.
La représentante de la République tchèque a salué ses travaux et demandé au Rapporteur spécial quelles étaient ses recommandations pour améliorer le dialogue public avec l’Iran.
Le représentant du Japon a dit que son pays continuerait sa coopération bilatérale avec l’Iran en matière de droits de l’homme et il a espéré que le prochain rapporteur spécial pourra effectuer une visite en Iran. Peut-il décrire les principales avancées depuis le début de son mandat?
Les représentants de la République démocratique populaire de Corée (RPDC) et de Cuba ont repris à leur compte la déclaration du Venezuela au nom des pays non alignés.
Le représentant de l’Union européenne a exhorté l’Iran à prendre des mesures « pour joindre le geste à la parole », notamment en ce qui concerne la peine capitale, qui est essentiellement imposée pour des infractions liées aux drogues. Il a encouragé le Rapporteur spécial à voir comment l’Iran pourrait respecter le Pacte relatif aux droits civils et politiques pour les crimes commis par des mineurs et à permettre plus de liberté d’expression.
Le représentant de la Chine a réitéré que les pays devraient coopérer sur la base du dialogue, de façon objective, en évitant de mettre en place des mandats sans l’appui du pays concerné.
La représentante de l’Érythrée a considéré que les droits de l’homme de tous les pays devraient être traités de la même façon et que le Conseil des droits de l’homme était l’organe approprié pour traiter de ces questions.
Les États ont la responsabilité première de la protection des droits de l’homme de leurs citoyens, sans interférence internationale, a indiqué le représentant du Pakistan. Il s’est dit encouragé par la participation de l’Iran au processus de l’Examen périodique universel.
Le représentant du Venezuela a refusé l’adoption de toute résolution politisée.
Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran a pris lui-même la parole pour répondre. Il a précisé qu’il avait envoyé plus de 165 lettres à des fonctionnaires en Iran. Dans certains cas, s’est-il félicité, le pays n’a pas fait marche arrière et a donné des réponses positives.
M. Shaheed n’a pas rencontré un seul Iranien qui ne lui ait pas dit qu’il se sentait un peu protégé quand son cas était mentionné dans un rapport de l’ONU. « Mon mandat n’est pas une opportunité de condamner l’Iran », a-t-il assuré, en précisant qu’il avait toujours essayé de trouver les éléments positifs.
Si le Rapporteur spécial a été le premier à ne pas s’être rendu dans le pays, grâce aux technologies modernes il a pu dialoguer avec beaucoup d’Iraniens. Il a reconnu que la coopération avec le mandat s’était améliorée, avec « entre 40 et 50% de réponses aujourd’hui ».
De plus, le pays explore l’idée qu’il peut réexaminer la loi pour réduire le nombre de cas où il applique la peine de mort, ce qui serait « un gain très positif », a estimé M. Shaheed. Ceci n’aurait pas été possible sans un mandat au sein des Nations Unies. À son avis, l’élection du Président Rohani a aussi contribué à une nouvelle approche.
Dans la mesure où il y a des éléments démocratiques dans la Constitution iranienne, il pourrait y avoir des améliorations rapides, a-t-il estimé. « Il faut juste que les réformes soient mises en œuvre. » La société civile doit être partie prenante de ce processus. Quant aux investissements en Iran, ils sont bons pour tout le monde à condition de ne pas accentuer certaines pratiques asymétriques dans le pays.
L’Iran dispose d’une Commission des droits de l’homme qui devrait satisfaire aux Principes de Paris en matière d’objectifs. Si son successeur est invité, de même que les équipes pays, il y aura encore plus de progrès, a-t-il conclu.
Le représentant de la République islamique d’Iran a relevé que le mandat du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans son pays était contreproductif et desservait les évolutions en matière de droits de l’homme dans son pays.
Il a estimé que les mandats de rapporteurs détruisaient les progrès dans les pays. Il a réaffirmé la sensibilité de l’Iran aux ingérences étrangères, précisant que le rapport présenté devant la Troisième Commission sur la situation dans son pays, en était une preuve.
Il a souligné que le dialogue et la coopération étaient les conditions pour promouvoir les droits de l’homme. Le représentant s’est élevé contre « La philosophie de ce soi-disant Rapporteur du Secrétaire général ».
Débat général
Mme MILDRED GUZMÁN MADERA (République dominicaine), parlant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a estimé qu’il était nécessaire de mettre en place un meilleur schéma de compréhension des flux de migratoires. Cette approche passe obligatoirement par l’instauration d’une réglementation qui pourrait protéger les droits de l’homme et la dignité de migrants, ainsi que leurs familles.
Elle a dit qu’il était nécessaire que les États travaillent ensemble pour tirer parti des bénéfices de la migration. La déléguée a indiqué qu’il fallait promouvoir les droits de l’homme et les libertés fondamentales des migrants indépendamment de leur statut. Elle a souligné l’importance de prendre en compte le dialogue et la coopération pour permettre de faire face à tous les défis qui se présentent en la matière.
Cependant, la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes a prévenu qu’il ne fallait pas appliquer des mesures qui pourraient en ajouter à la vulnérabilité des migrants. En outre, elle a demandé aux États de traiter la problématique de l’immigration illégale en mettant l’accent sur la dimension humanitaire, laquelle devrait profiter aux familles, ainsi que les enfants.
Elle a rappelé la nécessité de mettre un terme aux politiques qui traitaient de manière sélective toutes les questions liées à la migration.
La représentante s’est également dite préoccupée par l’exploitation des migrants, lançant un appel à leur protection contre des activités criminelles. À cet égard, elle a expliqué que la CELAC s’engageait en faveur de l’intensification des mesures visant à lutter contre la traite de migrants.
La déléguée a déclaré qu’il était urgent de mettre en place des politiques qui se concentrent sur l’égalité de sexes afin de protéger notamment les travailleurs migrants, et leur assurer des conditions justes pour un travail décent.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie), parlant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a déclaré que l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030 avait permis de démontrer l’engagement des pays de la région pour venir à bout de toutes les formes de pauvreté, ainsi que des changements climatiques afin que personne ne soit laissé pour compte.
Le représentant a insisté sur le fait que l’Association avait marqué un grand coup en matière de coopération entre les États, y compris en matière de droits de l’homme avec l’adoption de la vision 2025 d’une communauté plus intégrée, pacifique, stable et prospère.
M. Djani a fait état de progrès dans le domaine des droits de l’homme avec un encouragement à la participation des jeunes de la région aux débats sur cette question pour une meilleure prise de conscience. Dans la même veine, une Commission intergouvernementale sur les droits de l’homme a été créée et fut le cadre de délibérations sur les défis rencontrés sur le terrain pour promouvoir et mieux protéger les droits de l’homme, a-t-il expliqué.
Par ailleurs une autre commission chargée de l’élimination de la violence contre les femmes a vu le jour, permettant de se concentrer sur des priorités telles que la prévention et la protection des victimes et survivantes, avec la mise en place des cadres juridiques, a dit le délégué.
M. KAI SAUER (Finlande), qui s’exprimait également au nom de la Suède, a estimé que les droits de l’homme et les libertés fondamentales étaient une condition préalable à l’instauration d’une société ouverte, démocratique et pluraliste ainsi que du développement durable.
Les libertés fondamentales sont des moyens de sensibilisation aux problèmes auprès des autorités et de tenir les gouvernements redevables pour leurs politiques. Ils constituent en outre le socle pour la tenue d’élections libres, justes et démocratiques. Il a fait remarquer qu’Internet et les médias sociaux jouent un rôle chaque fois plus significatif dans la promotion de la démocratie, la croissance économique et le développement.
En conséquence, les technologies de l’information et la communication font partie des moyens clefs d’intensification de la participation civique et l’accès à l’information détenue par les autorités est un élément fondamental des sociétés qui se veulent transparentes et démocratiques.
M. Sauer a indiqué que la Finlande et la Suède, en coopération avec leurs voisins nordiques et baltes, s’emploient à la formation des journalistes dans le journalisme d’enquête et à appuyer des médias libres et indépendants dans des domaines spécifiquement affectés par la désinformation et la propagande.
M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a exhorté à redoubler d’efforts pour combattre toutes les manifestations de la violence et de la discrimination, notamment celles ciblant les plus vulnérables et marginalisés. Il a plaidé, en priorité, pour l’application de tous les instruments non contraignants déjà existants sur les personnes âgées, tout en déplorant la persistance d’abus contre ce groupe. Le représentant a jugé indispensable l’adoption d’un instrument de droit international universel et juridiquement contraignant pour pallier aux lacunes qui subsistent dans la protection des droits des personnes âgées.
Il a en outre réitéré l’appel de son pays en vue de la pleine réalisation et de la reconnaissance des droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) dans l’objectif urgent d’éliminer tout type de violence à leur encontre. Dans ce contexte, il a salué la nomination en septembre du premier rapporteur spécial sur les droits des LGBT par le Conseil des droits de l’homme.
Face à l’ampleur des urgences humanitaires actuelles, et des situations dramatiques des déplacés, réfugiés et demandeurs d’asile, le représentant argentin a estimé qu’il était impératif que les États intensifient la lutte contre la xénophobie, la haine et la discrimination, et assument une plus grande responsabilité dans la protection des migrants et des réfugiés.
Mme LAISSUE (Suisse) s’est dite préoccupée par le fait que des violations sont souvent commises « sous le prétexte d’impératifs présentés comme supérieurs aux obligations en matière de droits de l’homme », comme par exemple la sécurité ou la souveraineté nationale ainsi que la lutte contre le terrorisme ou la criminalité.
Elle a déploré la réduction de l’espace de la société civile dans de nombreux pays. Elle a constaté que les réactions des États face à la montée de l’extrémisme violent engendraient elles-mêmes trop souvent des violations des droits de l’homme, notamment la torture, les exécutions sommaires, les discriminations contre les minorités, les violations du droit à la liberté de religion ou des droits sociaux, économiques et culturels.
Afin de promouvoir le respect des droits de l’homme, la Suisse préconise un renforcement des mécanismes et instruments de monitoring et de suivi comme les organes de traité, les procédures spéciales ou l’Examen périodique universel (EPU), a expliqué la représentante. Elle s’est également dite convaincue que la prise en compte des droits de l’homme dans le domaine de la paix et de la sécurité représentait un grand potentiel pour une meilleure prévention des conflits.