Trentième Anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl: Plusieurs États demandent l’achèvement de la construction du sarcophage du réacteur numéro 4
« Tchernobyl n’est pas une histoire du passé, car il est impossible d’anéantir l’impact d’un accident nucléaire », témoigne un survivant
L’Assemblée générale a commémoré ce matin le trentième anniversaire de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, l’occasion pour la douzaine de délégations qui ont pris la parole de rappeler la gravité de ses conséquences et la nécessité d’achever la construction du sarcophage du quatrième réacteur nucléaire de la centrale.
Après avoir fait observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la catastrophe de Tchernobyl, le 26 avril 1986, le Président de la soixante-dixième session de l’Assemblée générale, M. Mogens Lykketoft, a rappelé que ce fut l’accident le plus grave dans l’histoire de l’énergie nucléaire. Une énorme quantité d’éléments radioactifs a été déversée sur une grande partie du Bélarus, de la Fédération de Russie et de l’Ukraine, détruisant l’économie essentiellement rurale de la région et entraînant le déplacement de plus de 300 000 personnes, a précisé le Président de l’Assemblée générale.
Le Secrétaire général adjoint et Chef de cabinet du Secrétaire général, M. Edmond Mulet, qui s’exprimait au nom de M. Ban Ki-moon, a affirmé que ce drame eut de graves conséquences humaines, environnementales et sanitaires pour les pays de la région.
Mais c’est le témoignage de Mme Adi Roche, une ressortissante du Bélarus, qui a travaillé pendant 30 ans dans les régions touchées, qui a ému l’Assemblée générale. « Il y a trente ans exactement, un nouveau terme, Tchernobyl, est entré dans l’histoire de notre langue, dans l’histoire des catastrophes qui ont marqué le monde », a-t-elle déclaré. « Tchernobyl n’est pas une histoire du passé, Tchernobyl reste malheureusement pour toujours parce qu’il est impossible d’anéantir l’impact d’un accident nucléaire », a-t-elle dit.
Elle a souligné que l’empreinte radioactive de la catastrophe resterait ancrée à jamais dans le monde et que des millions de personnes en seraient affectées sans compter qu’il est quasiment impossible de prendre toute la mesure de la contamination. Rendant un vibrant hommage aux secouristes et aux « liquidateurs » qui ont travaillé sur le site dès le lendemain de la catastrophe pour contenir le feu radioactif et la contamination et pour assurer l’évacuation des villes et des villages aux alentours, Mme Roche a comparé le site de Tchernobyl au « Ground Zero » de New York.
C’est ainsi qu’elle a demandé aux Nations Unies de consacrer le 26 avril « Journée de Tchernobyl », pour « renouveler chaque année la volonté commune de trouver de nouvelles façons et de nouvelles initiatives pour alléger les souffrances des personnes et des terres affectées par la catastrophe ». Elle a aussi insisté sur la nécessité pour l’ONU « d’exercer sa pression pour terminer au plus vite le sarcophage du quatrième réacteur de la centrale et éviter ainsi un autre « Tchernobyl ».
Le représentant de l’Ukraine a également souligné l’importance de convertir l’installation actuelle du réacteur numéro 4 en un système respectueux de l’environnement et d’achever la construction du sarcophage. La coopération internationale est essentielle à cet effet, a-t-il estimé.
La représentante des États-Unis a assuré son homologue que son pays appuierait l’achèvement de la construction du nouveau confinement tout en rappelant que le Gouvernement américain avait déjà consacré, depuis 1986, 400 millions de dollars au relèvement après la catastrophe.
Pour M. Mulet, la catastrophe a provoqué une nouvelle prise de conscience des dangers nucléaires au niveau mondial et, depuis, la communauté internationale s’est unie par des efforts de coopération pour sécuriser les installations nucléaires, comme en témoigne la nouvelle structure qui entoure le site de Tchernobyl, susceptible de le rendre plus sûr du point de vue écologique et sanitaire.
Depuis 1986, a poursuivi M. Mulet, l’ONU a fourni des informations essentielles sur la persistance des effets de la radiation sur les communautés locales, et les connaissances tirées de cette tragédie ont pu bénéficier à d’autres communautés exposées aux risques nucléaires, comme à Fukushima, au Japon.
Le délégué de la Fédération de Russie a appelé la communauté internationale à trouver collectivement des moyens pour prévenir d’éventuelles autres catastrophes nucléaires. En Russie, l’amélioration des soins médicaux et de la situation sociale du million de personnes affectées par Tchernobyl, ainsi que la réhabilitation des terres contaminées, reste la priorité.
Selon le représentant du Bélarus, qui s’exprimait au nom du Groupe des États d'Europe orientale, c’est à cause de la catastrophe de Tchernobyl que la sécurité et la sûreté des installations nucléaires ne cessent d’être améliorées, et que les normes internationales dans ce domaine ont évolué. Cette catastrophe a encouragé les pays à souscrire à la Convention sur la sûreté nucléaire, puis, après l’accident de Fukushima, à adopter la Déclaration de Vienne, a-t-il rappelé.
Son homologue de l’Ukraine s’est réjoui du fait que la communauté internationale se concentre désormais sur la protection physique des matériels nucléaires et l’entrée en vigueur de l’Accord sur la sécurité nucléaire le 8 mai 2016. Cet Accord aidera à réduire les risques d’attaques terroristes contre les centrales nucléaires, a estimé le représentant.
Les représentants de la République islamique d’Iran, de Malte et de l’Ouganda, qui ont parlé respectivement aux noms du Groupe régional de l’Asie-Pacifique, du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États et du Groupe des États africains, ont mis l’accent sur l’importance de la Décennie du relèvement et du développement durable des régions touchées pour la période 2006-2016 et les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Plan d’action des Nations Unies sur Tchernobyl de 2008.
Pour le représentant du Bélarus, « la commémoration du trentième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl doit être orientée vers le futur en renforçant les partenariats et la coopération, et en assurant collectivement un monde plus sûr et moins exposé aux risques d’une catastrophe nucléaire. « En rendant hommage au passé, nous devons regarder vers l’avenir », a-t-il lancé.
À la demande du Secrétaire général, l’Assemblée générale a aussi décidé, ce matin, d’inscrire à l’ordre du jour de sa soixante-dixième session une question additionnelle intitulée « Coopération entre l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation internationale pour la migration ».