États parties à la Convention sur le droit de la mer: l’Ukraine et les Philippines accusent la Fédération de Russie et la Chine de violer la Convention
L’Ukraine, au sujet de la Crimée, et les Philippines, au sujet des îles Nansha, ont accusé aujourd’hui la Fédération de Russie et la Chine de violer la Convention sur le droit de la mer alors que la Réunion des États parties à ladite Convention achevait sa session annuelle entamée le 8 juin*. La « Réunion » a reporté sa décision finale sur la couverture médicale et l’espace de travail des membres de la Commission des limites du plateau continental.
Dès 1992, a tenu à souligner le représentant de l’Ukraine, nous avons identifié les coordonnées géographiques des frontières maritimes aux larges des côtes de Crimée et celle de la zone économique exclusive en mer Noire. Mais l’Ukraine a dû fermer ses ports, en attendant de pouvoir rétablir le régime juridique en Crimée et dans tous les territoires occupés. Le représentant de la Fédération de Russie a rétorqué que la « Réunion » n’a pas pour mandat d’examiner les questions de fond ou les différends entre États, ni sur la question de la Crimée ni sur les territoires connexes.
Cette remarque n’a pas empêché la représentante des Philippines de fustiger « la politique expansionniste d’un État partie », laquelle sape la Convention sur le droit de la mer. En 2012, cet État a refusé d’appliquer l’accord mutuel qui l’obligeait à retirer sa présence navale du haut-fond de Scarborough, située à 124 milles marins à l’ouest de Luzon aux Philippines et à environ 800 milles marins à l’est dudit État partie. Malgré la crise écologique qui frappe aujourd’hui la mer de Chine méridionale, l’État partie a, ces deux dernières années, lancé une vaste entreprise de réaménagement qui a multiplié par 11 l’espace originel, et ce, en violation de la Convention et de la Déclaration de 2002 sur la conduite des États parties dans la mer de Chine méridionale, sans compter les Conventions sur la diversité biologique et le commerce international des espèces en danger, et l’objectif 14 relatif aux océans du futur programme de développement durable pour l’après-2015.
On ne saurait, a poursuivi la représentante, tolérer les revendications territoriales ou maritimes servies par l’intimidation, la coercition ou la force. L’arbitrage consacré par la Convention est une façon pacifique et juridique de régler les différends. La Chine, a prévenu son représentant, n’acceptera ni ne participera à un arbitrage initié « unilatéralement » par les Philippines. Les constructions sur les îles et les récifs tombent entièrement sous la souveraineté de la Chine. Elles sont « légales, justifiées et raisonnables » et conformes aux normes les plus élevées de la protection de l’environnement. Elles ne compromettent en rien la liberté légitime des pays de naviguer en mer de Chine méridionale.
Le représentant a aussi prévenu que la détermination de la Chine à protéger sa souveraineté et son intégrité territoriale est « ferme » et pour elle, la manière la plus efficace de régler pacifiquement les différends maritimes consiste à ce que les parties directement concernées entament des négociations et des consultations sur la base du « respect des faits historiques » et du droit international.
La représentante de la Somalie ayant, l’année dernière, exhorté un État à cesser ses revendications sur des zones maritimes appartenant à son pays, son homologue du Kenya a tenu à préciser aujourd’hui que les efforts de son pays pour lutter contre la piraterie au large de la Somalie n’ont pas pour but de s’ingérer dans les affaires intérieures somaliennes.
Le représentant de l’Inde a appelé au respect de la Convention sur le droit de la mer dans l’intérêt du développement durable et de la croissance économique mondiale. Celui du Japon a rappelé la tenue, en février dernier, à Tokyo d’un Symposium international sur l’état de droit dans les mers d’Asie. Tout en reconnaissant la nécessité d’aider les pays en développement à lutter contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN), l’observatrice des États-Unis a estimé que le Tribunal international du droit de la mer était allé trop loin dans l’affaire du pétrolier Virginia G pour laquelle il a adopté son arrêt, réglant ainsi le différend entre le Panama et la Guinée-Bissau après la saisie du pétrolier battant pavillon panaméen.
Par une décision adoptée sans vote, la « Réunion » souligne la nécessité pour les membres de la Commission des limites du plateau continental de disposer d’un lieu de travail plus confortable. Ayant besoin de plus d’informations sur les coûts et les options possibles, la « Réunion » décide que son Groupe de travail continuera à examiner ces questions, y compris celles liées à la couverture médicale des membres de la Commission. Le Président de la Commission est revenu aujourd’hui sur les conditions de travail « très difficiles et stressantes », demandant un espace conforme au caractère « confidentiel » des travaux.
Dans sa décision, la « Réunion » s’inquiète aussi de l’état du Fonds de contributions volontaires qui finance la participation des pays en développement aux travaux de la Commission. La Directrice de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer a décrit l’état des différents fonds d’affectation spéciale gérés par sa Division.
Le Président de l’Organisation hydrographique internationale (OHI), fondée en 1921 et comptant 85 États membres, a attiré l’attention sur la cinquième édition du Manuel sur les aspects techniques de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Il a précisé que cette nouvelle édition comprend un chapitre révisé sur la « Géodésie » pour mieux tenir compte des pratiques actuelles dans l’examen des images satellitaires et le positionnement des satellites. Le représentant de l’Argentine a regretté que les délégations n’aient pas pu débattre de cette publication.
Dans ses remarques de clôture, le Président de la Réunion a salué la participation très constructive à ces travaux du Président du Tribunal international du droit de la mer, qui juge les différends auxquels pourraient donner lieu l’interprétation et l’application de la Convention; du Secrétaire général de l’Autorité internationale des fonds marins qui contrôle toutes les activités relatives aux ressources minérales de ces fonds; et du Président de la Commission des limites du plateau continental qui examine les demandes d’extension sous-marine du territoire d’un État.
Ces trois organes sont les piliers de la mise en œuvre de la Convention sur le droit de la mer qui, entrée en vigueur en 1992, compte désormais 167 États parties, dont l’Union européenne, depuis la récente adhésion de l’État de Palestine.
* Voir communiqué de presse MER/2016