7564e séance – matin
CS/12130

Le Secrétaire général expose devant le Conseil de sécurité son initiative sur les opérations de paix

Le Secrétaire général de l’ONU a présenté, ce matin, devant le Conseil de sécurité une série de recommandations visant à améliorer les opérations de paix.  Dans son rapport* sur « L’avenir des opérations de maintien de la paix des Nations Unies: application des recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix », il recense les 10 domaines**, dans lesquels les mesures du Conseil de sécurité pourront jouer un rôle clef pour adapter ces opérations à la nature évolutive des conflits, dont le coût humain, politique et financier continue de s’alourdir.

La plupart des membres du Conseil ont appuyé deux propositions en particulier, la première ayant trait à l’adoption de mandats ordonnancés qui permettent de définir le rang de priorité des opérations, la seconde relative à la façon dont le Conseil pourrait mettre à profit son influence politique pour promouvoir des solutions politiques.  La nécessité de renforcer les partenariats de l’ONU avec les organisations régionales, en particulier l’Union africaine, « partenaire régional le plus important de l’ONU », a également été évoquée par de nombreuses délégations.

Le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, a commencé son intervention en expliquant que la prévention était le moyen le plus efficace d’enrayer l’inflation du coût des conflits.  « C’est également le meilleur moyen de soutenir les partenaires nationaux et régionaux qui se trouvent aux avant-postes de la prévention », a-t-il estimé.  L’unité des membres du Conseil autour d’une stratégie politique commune, a-t-il dit, peut se traduire par un « effet puissant ».  

« Vos déclarations publiques et vos concertations privées avec les parties peuvent façonner les perceptions et les actions sur le terrain », a assuré M. Ban, en soulignant qu’un engagement précoce était d’autant plus efficace lorsqu’il est collectif.  Il a en outre estimé que l’engagement du Conseil auprès du pays hôte était déterminant pour veiller à ce que ce dernier s’acquitte de ses obligations concernant les Casques bleus et le personnel civil.

Les mandats des missions de maintien de la paix devraient être mieux adaptés à la situation du pays concerné et à l’évolution du conflit, tout en étant « réalistes » et « réalisables », a recommandé le Secrétaire général.  Partisan d’une « approche par étape », il a estimé que des mandats élaborés de la sorte devraient permettre une meilleure interaction avec les parties.  Il a ainsi annoncé son intention d’adopter une série de mesures en vue de renforcer l’analyse et la planification au Secrétariat, sur le terrain et à travers tout le système des Nations Unies.

De son côté, a-t-il souligné, le Conseil a la responsabilité de veiller à ce que les Casques bleus reçoivent les équipements et moyens nécessaires pour s’acquitter de leurs mandats dans des théâtres d’opérations toujours plus complexes et dangereux.  Cela suppose aussi de recourir, au besoin à la force, même si, pour M. Ban, cela ne peut se substituer à la recherche de solutions politiques.  Pour le Secrétaire général, il faudrait institutionnaliser le dialogue avec les organisations régionales, en particulier l’Union africaine, qui est le « partenaire régional le plus important de l’ONU », notamment pour la planification et la conduite des opérations de paix.

La majorité des États membres ont souhaité que les processus de médiation et de règlement politique soient placés au centre de l’architecture de paix de l’ONU.  Le Conseil a, dans ce contexte, « un rôle crucial à jouer », a ainsi estimé la représentante de la Jordanie.  Les priorités du pays hôte doivent dans le même temps être dûment prises en compte, a estimé le représentant du Tchad.  Le Conseil et tout le système de l’ONU, a estimé, pour sa part, le délégué de la Nouvelle-Zélande, devraient s’investir davantage dans la prévention des conflits, en utilisant au mieux leur « potentiel politique collectif » pour arriver à des règlements politiques.

Les délégations ont été nombreuses à souhaiter des mandats ordonnancés, en vue de parvenir, comme l’a affirmé le représentant des États-Unis, à des opérations de paix plus efficaces, et ce, « à toutes les étapes ».  « Au moment où le Conseil établit une opération de paix, il ne fait que commencer son travail », a-t-il noté.  La représentante de la Malaisie a toutefois indiqué que certaines conditions devraient être remplies, telles que l’appui logistique et les coûts financiers, tandis que son homologue de l’Espagne a souhaité que ces mandats ne remettent pas en cause des activités aussi fondamentales que la protection des civils.

Apportant une nuance à ce point de vue, le représentant de la Fédération de Russie a rappelé qu’il s’agissait d’un des éléments des opérations de paix et non pas d’« une fin en soi ».  La protection des civils, a-t-il insisté, incombe en premier lieu au pays hôte.  Le représentant russe a par ailleurs souhaité une réforme équilibrée et rationnelle de l’architecture de paix, à rebours de l’approche du Secrétariat, « où tout le monde s’occupe de tout et où personne n’est responsable de rien ».  « Les acteurs sur le terrain doivent être responsabilisés et autonomisés, grâce à une décentralisation du Siège vers le terrain », a proposé, quant à lui, le représentant de la France.

Enfin, de nombreuses délégations, dont celles de la Chine, du Nigéria et du Tchad, ont souhaité une interaction accrue avec l’Union africaine car, ont-ils fait remarquer, l’écrasante majorité des opérations de paix sont déployées en Afrique.  Les avantages comparatifs de l’Union africaine tels que la proximité, la légitimité, la capacité d’intervention rapide, ne sont plus à démontrer, a affirmé le délégué du Tchad.  Ce dernier, à l’instar d’autres membres du Conseil, a tenu à rendre hommage aux victimes de la prise d’otages qui se déroulait à Bamako, la capitale du Mali, au moment même où le Conseil tenait sa réunion.  Le représentant du Royaume-Uni a assuré que le Conseil de sécurité restera engagé en faveur de la stabilisation du Mali.

 

*     A/70/357-S/2015/682
**    S/2015/846*

 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Lettre datée du 5 novembre 2015, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2015/846)

Déclarations

M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que le Conseil de sécurité examinait, aujourd’hui, pour la première fois, les conclusions du Groupe indépendant de haut niveau chargé d'étudier les opérations de paix et son rapport de mise en œuvre.  « J’ai lancé ce processus à la suite de mes profondes préoccupations sur l’ampleur et l’intensité des conflits auxquels nous sommes actuellement confrontés.  Leur coût humain, politique et financier continue de s’alourdir.  Les échecs politiques aboutissent à l’insécurité, à l’injustice et à la privation pour des milliers de personnes aujourd’hui et alimentent les conflits de demain. »  Ces conflits pèsent d’un poids énorme sur les épaules des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales des Nations Unies, a fait observer le Secrétaire général, qui a expliqué que l’objectif de cette réunion est de réfléchir au rôle que le Conseil de sécurité peut jouer dans le renforcement des opérations de paix sur la base des recommandations faites par le Groupe de haut niveau et qui portent sur trois domaines spécifiques: l’engagement politique; la conception et le déploiement des opérations; et la revitalisation des partenariats.

Les opérations de paix des Nations Unies sont en effet des outils politiques, a relevé le Secrétaire général, en expliquant qu’une des conclusions de l’examen, c’est que la prévention est le moyen le plus efficace d’enrayer l’inflation du coût des conflits.  « C’est également le meilleur moyen de soutenir les partenaires nationaux et régionaux qui se trouvent aux avant-postes de la prévention », a-t-il dit.  À cet égard, l’unité des membres du Conseil autour d’une stratégie politique commune peut se traduire par un « effet puissant ».  « Vos déclarations publiques et vos concertations privées avec les parties peuvent façonner les perceptions et les actions sur le terrain », a assuré M. Ban, en soulignant qu’un engagement précoce était d’autant plus efficace lorsqu’il est collectif.  En outre, l’engagement du Conseil auprès du pays hôte est également déterminant pour veiller à ce qu’il remplisse ses obligations vis-à-vis des Casques bleus et du personnel civil.  Le Secrétaire général a rappelé qu’il s’était engagé à fournir dès que possible au Conseil des exposés sur les situations à risques, notamment concernant la population civile.  Ses représentants spéciaux sont par ailleurs encouragés à mettre l’accent sur l’état des efforts politiques en cours et à identifier « risques, défis et opportunités », a-t-il dit.  Les membres du Conseil pourraient ainsi inviter leurs propres représentants dans les pays hôtes à relayer auprès des parties la détermination collective du Conseil, a préconisé M. Ban.

Les mandats des missions de maintien de la paix devraient être mieux adaptés à un environnement spécifique et à l’évolution du conflit, tout en étant « réalistes » et « réalisables », a recommandé le Secrétaire général.  Partisan d’une « approche par étapes », il a estimé que les mandats élaborés de la sorte devraient permettre une meilleure interaction avec les parties.  Il a ainsi annoncé son intention d’adopter une série de mesures en vue de renforcer l’analyse et la planification au Secrétariat, sur le terrain et à travers tout le système des Nations Unies.  « J’ai demandé à mon propre cabinet de prendre la responsabilité d’aider à améliorer la manière dont nous pouvons formuler et fournir, en temps opportun, une analyse de qualité supérieure, les différentes options et les moyens d’agir.  De son côté, a-t-il souligné, le Conseil a la responsabilité de veiller à ce que les Casques bleus reçoivent les équipements et moyens nécessaires pour s’acquitter de leurs mandats dans des théâtres d’opérations toujours plus complexes et dangereux.  Cela suppose aussi de recourir, au besoin à la force, même si, pour M. Ban, cela ne peut se substituer à la recherche de solutions politiques. « En cas d’impuissance à agir face à des menaces contre des civils, j’en informerai le Conseil de sécurité, et je demande en retour que vous vous engagiez, politiquement et opérationnellement, pour remédier à des telles situations », a-t-il indiqué, en précisant qu’une telle démarche s’appliquerait à toutes les allégations d’abus et d’exploitations sexuels.  Les procédures administratives de l’ONU doivent en outre être simplifiées et harmonisées, a ajouté M. Ban.

S’agissant du troisième et dernier point, le Secrétaire général a indiqué qu’une coopération plus étroite avec les partenaires régionaux.  « Nous devons institutionnaliser les consultations et le dialogue et, lorsque c’est nécessaire, collaborer à la planification et la conduite des opérations de paix, et cela commence avec l’Union africaine, notre partenaire régional le plus important à ce jour », a déclaré le Secrétaire général.  Avant de conclure, il a insisté sur la relation entre le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes qu’il a qualifiée de fondamentale et qui, selon lui, doit être renforcée, notamment dans le cadre de consultations triangulaires. 

M. CRISTIÁN BARROS MELET (Chili) a affirmé que cette réunion aurait dû se tenir avec tous les États Membres de l’ONU, en particulier les pays contributeurs de troupes. « Nous souscrivons au terme ‘opération de paix’ qui souligne le spectre large des activités de l’ONU en faveur de la paix », a-t-il dit.  Le délégué a invité le Conseil de sécurité à exercer son influence politique dans le but de parvenir à des solutions politiques à un stade précoce.  Le Conseil a la responsabilité de détecter les signes de conflit, a-t-il dit.  Le représentant du Chili a ensuite déclaré que les opérations de paix devraient faire partie d’une stratégie plus large en appui au processus politique.  Il a ainsi appuyé l’idée de mandats ordonnancés et souhaité que les objectifs de ces mandats soient élaborés avec les pays concertés et le Secrétariat.  Le Conseil devrait renforcer son interaction avec le Groupe de travail sur les opérations de paix, a-t-il recommandé.  Enfin, le représentant a demandé que des conseillers en matière de protection de groupes vulnérables, en particulier les femmes, soient prévus dès la planification des opérations de paix.

M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) s’est félicité de l’accent que le rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix met sur les mandats ordonnancés, tout en suggérant les trois étapes suivantes: déterminer si les conditions sont remplies pour déployer une opération de maintien de la paix des Nations Unies; déployer une telle opération avec un mandat limité aux domaines politique, à la protection et la sécurité; étendre le mandat à d’autres questions multidimensionnelles.  La première étape, a-t-il précisé, doit être basée sur une analyse profonde du contexte et des priorités des parties et d’autres acteurs.  Il a partagé les préoccupations du Groupe quant à l’envoi de Casques bleus dans des situations où il n’y a pas de paix à préserver ou de processus politique en cours.  Les opérations de maintien de la paix n’ont pas été conçues pour lancer ou raviver des processus politiques, ni pour gérer des conflits tant qu’il n’y a pas de paix, ni encore pour participer aux opérations militaires contre des groupes terroristes, a-t-il souligné. 

Concernant la deuxième étape, M. Suárez a souhaité que le Secrétaire général tienne dûment informé le Conseil de sécurité sur les progrès accomplis sur le terrain.  Pour ce qui est de la troisième étape, il a mentionné les autres domaines que pourrait recouvrir le mandat des opérations, comme la promotion des droits de l’homme et de l’égalité entre les sexes, le contrôle du trafic d’armes de petit calibre et la coordination des efforts de développement des capacités des institutions locales.  S’agissant de l’emploi d’éléments non coercitifs, le Venezuela est d’avis, a-t-il dit, que le Conseil de sécurité puisse le faire en parallèle avec les outils à sa disposition comme les déclarations à la presse et les déclarations présidentielles, les débats publics ou les consultations informelles.  Il s’est cependant dit préoccupé par la fréquence avec laquelle le Conseil de sécurité recourt à des solutions coercitives et militaires et lui a demandé de privilégier, au contraire, des moyens pacifiques.  Les sanctions, a-t-il rappelé, ne devraient être imposées qu’en dernier ressort.

M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a souligné la nécessité de revoir l’architecture de paix en privilégiant les processus de médiation politique.  Seuls ces processus permettent de s’attaquer aux causes et d’instaurer une stabilité durable, a-t-il assuré.  Il est important de bien penser le niveau d’intervention de l’ONU, qui doit être adapté à chaque pays et répondre aux besoins des populations, a insisté le délégué.  L’ONU doit prendre en compte les priorités du pays hôte et nouer avec ce dernier des relations constructives, a-t-il affirmé, en ajoutant que les capacités de ce pays devraient également être renforcées.

Le représentant a rejeté l’idée d’une interprétation extensive de la notion de protection des civils, en rappelant qu’il s’agissait d’un des éléments des opérations de paix et non pas « une fin en soi ».  La protection des civils incombe en premier lieu au pays hôte, a-t-il rappelé, en précisant que le rôle d’une opération de paix ne vise qu’à l’assister dans cette tâche.  Il a prôné une approche équilibrée s’agissant de la réforme de l’architecture de paix, tout en émettant des doutes sur l’équilibre que pourrait établir l’initiative « les droits avant tout » du Secrétaire général.  Notre approche doit également être rationnelle si l’on ne veut pas affaiblir l’efficacité des opérations de paix, a-t-il rappelé.  Le représentant russe a ainsi critiqué l’approche du Secrétariat, « où tout le monde s’occupe de tout et où personne n’est responsable de rien ».  Il ne faut pas créer des mécanismes supplémentaires pour mener cette révision de l’architecture de paix, a-t-il insisté, en appelant à faire preuve de prudence lorsque des pouvoirs supplémentaires sont conférés au Secrétariat.  En conclusion, il a estimé que les questions des changements structurels à apporter au Secrétariat et de la redistribution des ressources devraient être discutées au sein du Comité spécial des opérations de maintien de la paix et de la Cinquième Commission.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a partagé le cadre conceptuel proposé par le Secrétaire général dans son rapport sur l’avenir des opérations de paix, plaidant ainsi pour un maintien de la paix en appui aux processus politiques nationaux qui soit dynamique, engagé et parfois, lorsque cela est nécessaire, robuste.  Il a souhaité une « ligne d’équilibre tracée sur ces points ».  Le Secrétaire général a le pouvoir et le devoir de faire en sorte que les Nations Unies soient plus efficaces, réactives et exemplaires sur le terrain, a estimé le représentant de la France.  À cette fin, il a préconisé des mesures simples et peu coûteuses pour la réorganisation et la réforme des procédures.  En termes d’efficacité, a-t-il recommandé, les acteurs sur le terrain doivent être responsabilisés et autonomisés, grâce à une décentralisation du Siège vers le terrain.  En outre, certaines règles régissant la logistique opérationnelle devraient pouvoir être améliorées afin d’être plus réactives et adaptées aux besoins sur le théâtre des opérations, a-t-il ajouté.  M. Delattre a aussi plaidé en faveur de l’optimisation de la qualité des soins médicaux dans les opérations de maintien de la paix, en appliquant les principes élémentaires de transparence, de reddition de comptes et d’évaluation. 

S’exprimant aussi en tant que membre du Conseil de sécurité « teneur de plume » sur plusieurs résolutions, le représentant de la France a assuré que sa délégation appuyait les initiatives de concertations renforcées avec les acteurs régionaux et les pays voisins.  De même, a-t-il dit, avec les pays contributeurs en troupes et en personnels.  La France, a-t-il précisé, a l’intention de réunir les principaux pays contributeurs, de façon régulière, pour entendre leurs vues sur la mise en œuvre des mandats.  Le représentant a aussi précisé que ces consultations seront menées en plus des travaux qui précèdent les renouvellements de mandats afin de mieux cibler ces mandats.  Enfin, il a plaidé en faveur de la négociation de « compacts » avec les États hôtes pour favoriser un engagement réciproque et une vision commune sur les actions à entreprendre.

M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) a souhaité que le Conseil de sécurité et tout le système de l’ONU s’investissent davantage dans la prévention des conflits, en utilisant au mieux leur « potentiel politique collectif » pour arriver à des règlements politiques.  Il s’est dit favorable au déploiement rapide de missions sur le terrain, y compris des mini-missions travaillant en partenariat avec les organisations régionales concernées, sans peser financièrement sur les opérations sur le terrain.  Pour la délégation néozélandaise, il faudrait également que le Conseil de sécurité prévoie des mandats clairs, bien ciblés et réalistes.  M. van Bohemen s’est rallié à l’avis du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix qui recommande l’établissement de mandats à deux niveaux pour les missions créées ou reconfigurées, afin de laisser aux opérations une latitude pour augmenter ou réduire leurs activités. 

Le représentant a également suggéré au Conseil de sécurité de modifier la façon dont il conçoit les mandats, afin de privilégier la cohérence avec ce que font les pays contributeurs de troupes et les pays concernés, et ce, par le biais de discussions informelles sur les éléments concrets.  Il faudrait en outre, a-t-il ajouté, que les Nations Unies renforcent leur capacité à garantir la sécurité du personnel des opérations de maintien de la paix.  Par ailleurs, il a souhaité que les mandats soient adaptés au contexte du monde réel, ce qui exige de renforcer l’accès du Conseil aux informations.  La Nouvelle-Zélande, a indiqué M. van Bohemen, a proposé de tenir régulièrement des réunions d’information sur des missions particulières, à commencer par la Mission de l’ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Il a aussi appelé à améliorer la réponse aux allégations d’exploitation et d’abus sexuels par les Casques bleus.

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) a estimé que la protection des civils devrait continuer de figurer au cœur des mandats des opérations de maintien de la paix.  Il a également souligné l’importance d’une meilleure formation des Casques bleus, en rappelant que les mandats élaborés par le Conseil de sécurité doivent être réalistes et plus efficaces, orientés vers des résultats concrets, et ne pas remettre en cause des activités aussi fondamentales que la protection des droits de l’homme et, plus généralement, la protection des civils.  Il serait en outre bon de s’appuyer plus fréquemment sur les examens périodiques des mandats « pour aller plus loin encore », a estimé le représentant.  S’agissant des missions politiques spéciales, sa délégation s’est ralliée à la proposition du Secrétaire général de créer de nouveaux bureaux régionaux des Nations Unies.  

M. DAVID PRESSMAN (États-Unis), citant l’attaque de ce matin contre un hôtel à Bamako, au Mali, a affirmé que la communauté internationale ne cédera pas aux terroristes.  La Mission de l’ONU au Mali, a-t-il reconnu, opère dans un contexte très dangereux.  Il a déclaré que les défis actuels exigeaient que les soldats de la paix disposent d’une formation appropriée et des ressources adéquates afin de les relever.  Le représentant a souligné qu’il était nécessaire d’appuyer les efforts de paix d’une manière qui soit claire.  « Nous ne devons pas répéter les mêmes choses mais prendre des décisions et trouver les ressources », a insisté le délégué.  Faire en sorte que les Casques bleus s’acquittent de leurs tâches avec efficacité était un défi pour chaque gouvernement, a-t-il fait remarquer.

Le représentant des États-Unis a appuyé l’idée de mandats ordonnancées en vue de parvenir à des opérations de paix plus efficaces, et ce, « à toutes les étapes ».  Il a souhaité une interaction accrue avec les pays fournisseurs de troupes afin que les troupes déployées sur le terrain soient bien formées.  Dès que le Conseil établit une opération de paix, il ne fait que commencer son travail, a-t-il fait remarquer.  C’est pourquoi, il est nécessaire d’apporter des réponses rapides dès lors qu’un problème de formation du personnel des Nations Unies est identifié ou dès lors qu’un Casque bleu refuse de suivre un ordre émanant de la structure de commandement de l’ONU.

Le délégué a ensuite exhorté l’ONU à remédier rapidement au défi des violences sexuelles commises par le personnel des Nations Unies dans le cadre des opérations de paix et prôné une politique de tolérance zéro dans ce domaine.  Enfin, il a appuyé les efforts du Secrétariat en vue d’une sélection plus rigoureuse des personnes appelées à prendre la tête des opérations de la paix et demandé un renforcement du partenariat avec les organisations régionales, en particulier l’Union africaine.

M. ANTHONY BOSAH (Nigéria) a estimé lui aussi qu’il faudrait tenir compte des défis qui se posent dans le domaine du maintien de la paix et mettre l’accent sur la coopération triangulaire entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat de l’ONU et les pays contributeurs de troupes.  Saluant les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau, il a relevé celles relatives aux partenariats avec les partenaires régionaux, et tout particulièrement avec l’Union africaine.  Il a repris à son compte l’initiative du Secrétaire général qui souhaite donner la priorité à des partenariats avec les acteurs régionaux au travers de mécanismes de coopération.  Le représentant s’est ainsi réjoui des « cadres communs » établis avec l’Union africaine en vue de renforcer la sécurité et la paix.  Les opérations des Nations Unies, a ajouté le représentant, font partie intégrante du système de sécurité collective et exigent un engagement accru de la part des États Membres alors que nous cherchons à aller de l’avant. 

M. LIU JIEYI (Chine) a rappelé que les opérations de maintien de la paix devraient respecter la souveraineté des pays hôtes.  Le Conseil devrait renforcer la microgestion des opérations de maintien de la paix pour veiller à des mandats réalistes et bien définis, les réajuster en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain et réfléchir à des stratégies de sortie.  Par ailleurs, a poursuivi le représentant, les Nations Unies devraient améliorer leur coordination avec les opérations de maintien de la paix et forger des synergies avec les organisations régionales, comme l’Union africaine.  En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la Chine, a assuré le délégué, a toujours appuyé ces opérations, auxquelles elle a fourni des contingents en nombre considérable au cours de leur histoire.  Il a annoncé la mise à disposition prochaine d’un « escadron de police spéciale » de 1 000 personnes, d’unités de génie supplémentaires dans les cinq ans à venir, ainsi qu’une donation de 100 millions de dollars et le déploiement du tout premier « escadron d’hélicoptères » pour les missions déployées en Afrique.

Mme DINA KAWAR (Jordanie) a souligné que les conflits prenaient de plus en plus d’ampleur et se jouaient des frontières.  Elle a appuyé l’approche consistant à privilégier les processus de médiation et de règlement politique, en estimant que ceux-ci étaient capitaux.  Le Conseil a, à ce titre, un rôle crucial à jouer, a-t-elle souligné.  L’idée de mandats ordonnancés, qu’elle a appuyée, devrait concerner les opérations de  la paix qui existent déjà.  Ces mandats devraient permettre au Conseil de gagner du temps, a-t-elle dit.  Mme Kawar a plaidé, toujours dans le cadre de ces mandats ordonnancés, pour l’élaboration de stratégies de retrait qui permettent d’éviter un vide sécuritaire.  Le Secrétariat et le Conseil devraient prévoir l’augmentation du nombre de conseillers spécialisés lors de l’élaboration de futurs mandats, a-t-elle estimé.  La déléguée de la Jordanie a souhaité qu’il y ait une interaction accrue entre le Conseil et la Ligue des États arabes afin de faire face aux crises au Moyen-Orient.  Enfin, Mme Kawar a demandé que les auteurs de violences sexuelles commises dans le cadre d’opérations de paix soient traduits en justice et a invité le Conseil à tirer davantage profit de l’expérience des pays contributeurs de troupes.

M. ALI MAHAMAT ZENE (Tchad) a partagé l’approche consistant à privilégier les processus de médiation et de règlement politique et demandé au Conseil d’user de son influence politique afin que ces processus aboutissent.  Les priorités du pays hôte, a-t-il dit, doivent dans le même temps être dûment être prises en compte.  Le représentant a indiqué que l’usage de la force pour protéger les civils ne pouvait être écarté dans certains cas, citant ainsi l’exemple de la Brigade d’intervention de la MONUSCO, qui est « un succès ».  Les organisations régionales doivent recevoir un appui de l’ONU dans le cadre d’opérations de paix, a-t-il souhaité, en invitant l’ONU à s’écarter d’une conception trop rigide de ces opérations.

Le délégué a appuyé l’idée de mandats ordonnancés et invité le Conseil à renforcer sa coopération avec les pays hôtes dans le cadre de ces mandats.  La protection des Casques bleus est une question hautement stratégique, a-t-il souligné.  Rappelant que l’écrasante majorité des opérations de paix étaient déployées en Afrique, il a demandé que l’Union africaine soit associée à toutes les initiatives de paix de l’ONU en Afrique.  Les avantages comparatifs de l’Afrique, tels que la proximité, la légitimité, la capacité d’intervention rapide, ne sont plus à démontrer, a conclu le délégué. 

Mme SITI HAJJAR ADNIN (Malaisie) a rappelé que son pays était un pays fournisseur de contingents depuis 1960, profondément attaché au multilatéralisme. Après avoir noté que les opérations de maintien de la paix avaient évolué de manière considérable au fil des décennies, la représentante a estimé que le Conseil de sécurité pourrait en faire davantage pour convaincre les parties de promouvoir le processus politique dans des situations comme celles qui prévalent au Liban, au Soudan du Sud et au Sahara occidental.  La représentante a fait remarquer que le Conseil de sécurité disposait d’une panoplie d’instruments, notamment les réunions privées dans le cadre desquelles il peut tenir compte des réserves émises par les pays contributeurs de troupes.  Par ailleurs, nous ne sommes pas par principe opposés aux « mandats ordonnancés », sous réserve toutefois de remplir certaines conditions, a indiqué la déléguée, qui a cité l’appui logistique et les coûts financiers.  Pour la Malaisie, l’élaboration des mandats doit être « ciblée » et « taillée sur mesure », a-t-elle ajouté en conclusion.

M. JULIO HELDER MOURA LUCAS (Angola) a rappelé que lors du débat du Conseil de sécurité sur les causes profondes des conflits mardi dernier, les États Membres s’étaient arrêtés longuement sur les menaces multiples qui pèsent aujourd’hui sur la sécurité des civils.  Après un conflit, un règlement politique est souvent vu comme le meilleur garant de la paix.  Pourtant, la plupart des opérations actuellement déployées le sont dans un environnement où les violences sont fréquentes, un scénario qui contredit l’objectif d’une opération de maintien de la paix.  Il s’est déclaré par ailleurs d’accord avec le Secrétaire général lorsqu’il suggère que le Conseil de sécurité s’engage en temps opportun auprès des parties au conflit afin de prévenir l’escalade.  Des mécanismes de financement prévisibles et davantage de ressources doivent en outre être mobilisées à l’appui des missions, y compris par les partenaires régionaux, dont l’Union africaine.  La planification des opérations de maintien de la paix constitue un autre aspect important, qui devrait également faire l’objet d’une coopération élargie avec l’ensemble des acteurs concernés.  Les priorités devraient être identifiées plus clairement et un appui opérationnel envisagé dans les cas de violences à l’égard des civils, a estimé le représentant de l’Angola.

M. DOVYDAS ŠPOKAUSKAS (Lituanie) a estimé que le Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix avait vu juste en comparant l’engagement de l’ONU à l’envoi d’une ambulance au pied de la falaise, au lieu de prévoir et d’éviter la chute avant tout.  Il y a beaucoup de mesures préventives, a-t-il souligné, en citant notamment la capacité d’alerte rapide, la médiation, les bons offices et les partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales.  Il a souhaité que le Conseil de sécurité reste proactif et souple pour pouvoir discuter rapidement de nouvelles questions, que ce soit en revenant à une forme de « scanner horizontal » ou en invitant le Département des affaires politiques à faire des exposés dans le cadre de consultations ou encore en engageant des discussions sur « toute autre question ».  Nous devons dépasser notre réticence à saisir le Conseil de questions nouvelles, a-t-il recommandé.

M. Špokauskas a ensuite recommandé de créer des missions qui soient adaptées à chaque cas, au lieu d’utiliser des modèles préétablis, et de définir des mandats clairs et forts, avec des ressources financières et matérielles suffisantes.  Les Casques bleus doivent remplir certains critères en termes de formation, ce qui implique une plus grande coopération entre le Département des opérations de maintien de la paix, le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes, a-t-il estimé.  Le représentant a ensuite confronté à la pratique les propositions relatives à des mandats ordonnancés, en se référant à ce qui avait été fait dans le cadre de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA).  Il a attiré l’attention sur les incidences négatives de ce genre de mandat sur la capacité des missions à soutenir les efforts de réforme de la sécurité et de la sûreté.  Le délégué a cependant noté les efforts du Conseil de sécurité pour revoir les mandats des missions déployées au Soudan du Sud et au Mali en fonction des besoins en termes de protection et de sécurité.  Enfin, il a envisagé d’appliquer le concept de mandats ordonnancés à la phase de retrait des missions, comme pour le cas de la Côte d’Ivoire. 

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) s’est dit choqué par la prise d’otages à Bamako, la capitale du Mali.  Le Conseil de sécurité restera engagé dans la stabilisation du Mali à travers la MINUSMA, a-t-il assuré.  Le représentant britannique a ainsi demandé à l’ONU de revoir la manière dont elle travaille dans des pays fragiles.  Toutes les opérations de paix ne sont pas de la même qualité, a-t-il fait remarquer, avant d’appuyer les recommandations du Secrétaire général visant à les améliorer. Il faudrait des mandats bien ordonnancés, comme l’a fait le Conseil en République centrafricaine, a souligné M. Rycroft.  Il a notamment souhaité que la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) se voie assigner un rôle et des priorités claires.  « Nous devons utiliser tous les outils dont le Conseil dispose lorsqu’il est confronté à des signes avant-coureurs de conflit », a-t-il insisté.  S’agissant du retrait progressif des missions, le délégué a préconisé que le Secrétariat de l’ONU planifie une opération de paix à un stade très précoce, avant de rappeler que les populations doivent être au cœur de nos efforts.

 

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