Moyen-Orient: le Coordonnateur spécial de l’ONU en appelle au leadership d’Israël et de la Palestine pour parvenir à la solution à deux États
Les attaques terroristes commises ces derniers jours à Paris, Beyrouth et « dans le Sinaï » illustrent à quel point l’extrémisme et le terrorisme ayant « infecté » de vastes secteurs du Moyen-Orient ne connaissent désormais plus de frontières, a estimé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Nickolay Mladenov.
« Le conflit israélo-palestinien ne peut être examiné indépendamment de cette menace globale », a-t-il déclaré, en s’adressant en visioconférence depuis Beyrouth. La création d’un État palestinien, parallèlement aux garanties de sécurité demandées par Israël, profiterait non seulement à ces deux peuples, « mais à la région tout entière », a-t-il souligné.
« Je refuse de me laisser convaincre qu’Israéliens et Palestiniens ne veulent vivre que ‘par l’épée’ et maintenir un état de violence perpétuel », a poursuivi M. Mladenov, en affirmant que le leadership, « cruellement absent jusqu’à présent », était plus que jamais nécessaire pour parvenir à la solution à deux États.
Certes, les conditions actuelles sur le terrain rendent difficilement envisageable un retour immédiat aux négociations, a reconnu le Coordonnateur spécial, tout en se disant conscient que « le temps n’est pas notre allié ».
Mais les parties et leurs partenaires internationaux, en particulier le Quatuor pour le Moyen-Orient, doivent réfléchir à des mesures de nature à améliorer les conditions de vie des Palestiniens, en renforçant leurs institutions et en élargissant leurs perspectives sur les plans économique et sécuritaire. Cela supposera, a-t-il dit, un changement politique significatif sur le terrain de la part d’Israël.
Au cours du mois écoulé, a indiqué le Coordonnateur spécial, 35 attaques ou tentatives d’attaques par des Palestiniens ont été perpétrées contre des Israéliens en Israël et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, à l’arme blanche, à main armée ou encore à la « voiture-bélier ». L’attaque commise aujourd’hui même à Tel-Aviv a coûté la vie à six Israéliens et fait 36 blessés.
Les deux attaques de snipers à Hébron le 10 novembre, « les premières de la sorte depuis le début de l’escalade », de même que les coups de feu tirés le 13 novembre d'une voiture en marche et qui ont provoqué la mort d’un père et de son fils, confirment de manière inquiétante que les armes blanches sont délaissées au profit des armes à feu.
Parmi les suspects palestiniens, a précisé M. Mladenov, 24 ont été tués et 11 ont trouvé la mort au cours d’affrontements en Cisjordanie et à Gaza. Plus de 3 500 autres Palestiniens ont été blessés, sept à la suite d’incidents violents liés aux colons israéliens.
« L’épicentre de la violence s’est déplacé à Hébron qui, comme Jérusalem, abrite des lieux saints à la fois pour les musulmans et pour les juifs, qui génèrent des frictions depuis des décennies », a-t-il expliqué.
Ville la plus peuplée de Cisjordanie avec 170 000 habitants, Hébron est aussi le poumon de l’économie palestinienne, et son développement continu fait partie intégrante de la viabilité d’un futur État palestinien, a précisé le haut fonctionnaire.
« En traversant le centre-ville, on constate un spectacle de désolation: des rues barricadées et coupées, des logements désertés et l’absence d’activités, ou encore des gens retranchés derrière des barrières métalliques et des tourniquets. » C’est pourquoi, il envisage, a-t-il dit, de se rendre à nouveau très prochainement sur place pour discuter avec le gouverneur et le maire des programmes à mettre en place pour appuyer le redressement d’Hébron et y relancer le dialogue intercommunautaire.
En effet, les mesures de sécurité seront insuffisantes à elles seules pour parvenir à une désescalade, que ce soit à Hébron, Jérusalem ou ailleurs, a insisté le Coordonnateur spécial, pour qui toutes les parties doivent redoubler d’efforts pour mettre fin à la rhétorique incendiaire « qui glorifie le meurtre des juifs » et celle qui présente « tous les Palestiniens comme des terroristes ». « J’appelle les dirigeants politiques, communautaires et religieux de tout bord à s’opposer à la terreur et à toutes les formes de violence », a-t-il dit.
Parmi les autres mesures à prendre, M. Mladenov a souligné qu’il était important de donner effet aux accords conclus sur le maintien du statu quo sur l’esplanade des Mosquées et le mont du Temple. Il faudrait lutter contre l’impunité apparente qui entoure les violences perpétrées par des colons contre des Palestiniens.
À cet égard, il s’est dit préoccupé par l’émergence d’une « colonisation » en Cisjordanie occupée, en dénonçant la décision, rendue publique hier, d’accorder des permis de construire pour 436 logements supplémentaires dans la colonie de Ramat Shlomo, « la première annonce de ce type depuis plus d’un an ».
Le Coordonnateur spécial a, enfin, demandé à Israël et la Palestine de prendre des mesures pour renforcer leur coordination en matière de sécurité. Il a également plaidé pour que les Forces de défense israéliennes fassent preuve de retenue en recourant à des armes létales.
Au cours du mois écoulé, la situation à Gaza est restée relativement calme, a relevé M. Mladenov, qui a toutefois fait état de trois pertes civiles et de sept tirs de roquettes en direction du territoire israélien. Il a appelé toutes les factions présentes à Gaza à ne pas se livrer à des activités qui risquent de compromettre la stabilité et le redressement, alors que le Mécanisme de reconstruction continue de fonctionner efficacement.
Évoquant ensuite la situation en Syrie, le Coordonnateur spécial a déploré l’impact dévastateur du conflit dans ce pays sur sa population civile. Il s’est néanmoins déclaré encouragé de constater que la communauté internationale avait réaffirmé son engagement à Vienne en faveur d’une solution politique qui serait basée sur le Communiqué de Genève de 2012.
Au Golan syrien, la situation reste émaillée d’affrontements entre forces gouvernementales et groupes armés, auxquels s’ajoutent parfois des ripostes des Forces de défense israéliennes, a indiqué M. Mladenov. Ces incidents risquent de remettre en question le cessez-le-feu entre Israël et la Syrie, a prévenu le Coordonnateur spécial.