République centrafricaine: devant la recrudescence des violences, le Conseil de sécurité menace les responsables de sanctions
Profondément préoccupé par la recrudescence de la violence et de l’instabilité en République centrafricaine, le Conseil de sécurité a condamné, ce matin, avec fermeté toutes les attaques contre des civils et les soldats de la paix des Nations Unies, les violences intercommunautaires et celles visant les femmes et les enfants, ainsi que les pillages des locaux des organisations humanitaires.
Dans une déclaration lue par le Président du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre, l’Ambassadeur Román Oyarzun Marchesi, de l’Espagne, le Conseil souligne que ces attaques peuvent constituer des « crimes de guerre » et « qu’il importe d’amener à répondre de leurs actes les responsables de toutes les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire ».
En outre, le texte souligne que ceux qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité en République centrafricaine, « mettent en péril ou entravent la transition politique » et dirigent des attaques contre des civils ou des soldats de la paix, pourraient être visés par les sanctions prévues par sa résolution 2196 (2015).
Le Conseil réaffirme également son intention d’élargir la liste de personnes et d’entités maintenue par le Comité des sanctions établi en application de sa résolution 2127 (2013) aux responsables de la récente explosion de violence.
Après avoir réaffirmé que certains de ces actes pouvaient constituer des crimes au regard du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel la République centrafricaine est partie, le Conseil souligne aussi le rôle que la Cour pénale spéciale centrafricaine pourrait jouer pour identifier les responsables et les traduire en justice.
Dès lors, ajoute le Conseil, il y a « urgence » à ce qu’elle assume ses fonctions et prie, ainsi, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) d’apporter un appui technique en ce sens et de renforcer les capacités des autorités centrafricaines.
Le Conseil réaffirme aussi « l’importance critique et l’urgence » de tenir, avant la fin 2015, le référendum constitutionnel ainsi que le premier tour des élections présidentielle et législatives, conformément à la Charte constitutionnelle de transition. À cet égard, les autorités de transition sont invitées « à adopter et publier sans plus tarder un calendrier révisé pour la tenue d’élections le plus tôt possible ».
* S/RES/2196 (2015)
** S/RES/2127 (2013)
LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
Déclaration présidentielle
Le Conseil de sécurité s’est dit profondément préoccupé par la recrudescence récente de la violence et de l’instabilité en République centrafricaine visant à déstabiliser le pays et à compromettre le processus de transition. Il condamne avec fermeté cette violence, y compris toutes les attaques contre des civils, les violences intercommunautaires, celles visant les femmes et les enfants, les pillages des locaux des organisations humanitaires et les attaques contre les soldats de la paix des Nations Unies.
Le Conseil souligne que ces attaques peuvent constituer des crimes de guerre et qu’il importe d’amener à répondre de leurs actes les responsables de toutes les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire et des atteintes à ces droits.
Le Conseil souligne également que ceux qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité en République centrafricaine, mettent en péril ou entravent la transition politique et dirigent des attaques contre des civils ou des soldats de la paix pourraient répondre aux critères de désignation en vertu des sanctions énoncées dans sa résolution 2196 (2015).
Le Conseil renouvelle sa ferme condamnation de toutes les violations du droit international applicable et exige que toutes les parties concernées respectent strictement les obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme et appliquent ses décisions.
Le Conseil réaffirme son soutien aux autorités de transition sous la direction de Mme Catherine Samba-Panza, Chef de l’État de transition, et demande à toutes les parties prenantes centrafricaines de s’engager en faveur de la paix et de la réconciliation en mettant en œuvre les accords adoptés en mai 2015 lors du Forum de Bangui.
Le Conseil renouvelle sa décision d’appliquer les mesures de gel des avoirs et d’interdiction de voyager énoncées aux paragraphes 4 et 7 de sa résolution 2196 (2015) aux personnes et entités se livrant ou apportant un appui à des actes qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité de la République centrafricaine conformément aux paragraphes 11 et 12 de la résolution 2196 (2015). Il réaffirme également son intention d’élargir la liste de personnes et d’entités maintenue par le Comité des sanctions établi en application de sa résolution 2127 (2013) aux responsables de la récente explosion de violence, en particulier ceux qui ont fourni un appui à des personnes ou entités déjà sanctionnées par le Comité ou agi pour leur compte, en leur nom ou sur leurs instructions.
Le Conseil réaffirme que les responsables des récentes violences, qu’ils en soient les auteurs ou y aient participé, devront répondre de leurs actes et que certains de ces récents actes de violence peuvent constituer des crimes au regard du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel la République centrafricaine est État partie. Il accueille avec satisfaction à cet égard la déclaration du 30 septembre 2015 du Procureur de la Cour concernant la flambée récente de violences en République centrafricaine, dans laquelle il a rappelé qu’une année auparavant, sur saisine des autorités centrafricaines, il avait ouvert une enquête sur les infractions pénales commises dans le pays depuis le 1er août 2012.
Le Conseil demande aux autorités de transition de lancer, avec l’assistance technique de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), des enquêtes pour identifier les responsables et les traduire en justice.
Le Conseil souligne le rôle que la Cour pénale spéciale du pays pourrait jouer à cet égard ainsi que l’urgence qu’il y a à ce qu’elle assume ses fonctions et insiste sur la nécessité pour la MINUSCA d’apporter un appui technique et de renforcer les capacités des autorités centrafricaines conformément à l’alinéa g) du paragraphe 32 de la résolution 2217 (2015) définissant le mandat de la Cour.
Le Conseil exprime sa préoccupation devant les évasions de prison qui se multiplient en République centrafricaine et ont des retombées sur la lutte contre l’impunité et les efforts visant à stabiliser le pays, demande aux autorités de transition de redoubler d’efforts, avec l’appui de la MINUSCA, selon que de besoin et conformément à son mandat, pour mener des enquêtes, lancer des poursuites et détenir les prisonniers de manière sûre et humaine. Il se dit également préoccupé par les informations selon lesquelles certains éléments des Forces armées centrafricaines (FACA) auraient participé aux récents incidents à Bangui, ce qui souligne la nécessité d’organiser des formations et d’effectuer rapidement la réforme du secteur de la sécurité, et notamment de mener à bien le processus d’agrément solide et d’appliquer le principe de responsabilité au sein des forces de défense et de sécurité, avant le retour des FACA à des tâches opérationnelles.
Le Conseil exige que tous ceux qui cherchent à affaiblir le gouvernement de transition de l’intérieur et de l’extérieur du pays, y compris les milices et les groupes armés non étatiques, cessent immédiatement toute forme de violence et toute activité de déstabilisation, déposent leurs armes et appliquent intégralement l’Accord de cessation des hostilités en République centrafricaine, signé le 23 juillet 2014 à Brazzaville (Congo), et l’accord de principe sur le désarmement, la démobilisation et la réintégration et la réforme du secteur de la sécurité adopté lors du Forum de Bangui de mai 2015.
Le Conseil prend note des importants progrès accomplis en République centrafricaine dans le processus d’inscription des électeurs sur les listes électorales, dont le nombre à ce jour est plus élevé que jamais auparavant, demande que ce processus soit mené rapidement à son terme et souligne l’importance d’enregistrer l’ensemble de la population centrafricaine, y compris les réfugiés se trouvant dans les États voisins.
Le Conseil réaffirme l’importance critique et l’urgence de tenir avant la fin de 2015 le référendum constitutionnel ainsi que le premier tour des élections présidentielle et législatives ouvertes à tous, de manière libre, régulière et transparente, conformément à la Charte constitutionnelle de transition. À cet égard, il souligne que les dispositions de la Charte constitutionnelle doivent être strictement et intégralement appliquées et invite les autorités de transition, y compris l’Autorité nationale des élections (ANE) et le Conseil national de transition, à adopter et publier sans plus tarder un calendrier révisé pour la tenue d’élections le plus tôt possible. Il demande également à l’ANE de poursuivre sans délai les préparatifs du référendum et des élections.
Le Conseil souligne qu’il convient de n’épargner aucun effort pour assurer la paix et la réconciliation en République centrafricaine, salue à cet égard l’action conjointe des chefs religieux du pays en faveur de la paix intercommunautaire et demande aux autorités de prendre toutes les mesures nécessaires pour créer les conditions d’une réconciliation durable, notamment en protégeant les civils de toute violence à motivation religieuse ou ethnique.
Le Conseil souligne qu’il est essentiel, pour promouvoir une paix et une stabilité durables en République centrafricaine, que la région, y compris le Médiateur international, le Président de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et les pays de la sous-région ainsi que l’Union africaine et le système des Nations Unies, en tant que parties prenantes à la médiation, continuent de jouer leur rôle. Il encourage les pays de la région à continuer de faire usage de leur influence et de tenir des réunions régionales pour encourager les progrès de la transition en direction d’élections et à empêcher les fauteurs de troubles, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, de chercher à compromettre ces processus.
Le Conseil demande aux pays qui fournissent des contingents ou du personnel de police à la MINUSCA d’accroître leurs capacités et invite les autres États Membres à fournir l’appui nécessaire pour leur permettre sans autre retard de parvenir aux normes des Nations Unies.
Le Conseil demande par ailleurs à la communauté internationale de continuer de soutenir la République centrafricaine en répondant à ses priorités essentielles des 12 à 18 prochains mois, telles qu’elles ont été exprimées lors du Forum de Bangui, ces priorités couvrant le désarmement, la démobilisation, la réintégration et le rapatriement, la réforme du secteur de la sécurité, la justice et la réconciliation, y compris la mise en place de la Cour pénale spéciale nationale, le renforcement des capacités des tribunaux locaux et l’établissement de la Commission justice, vérité et réconciliation, la restauration et l’élargissement de l’autorité de l’État en soutien de la gouvernance démocratique et économique et le développement économique et social. Le Conseil se félicite de la manifestation de haut niveau tenue en marge de l’Assemblée générale et encourage les États Membres qui ont annoncé des contributions à ces programmes à décaisser les fonds rapidement et à susciter un appui supplémentaire dans les domaines prioritaires où le financement est insuffisant.
Le Conseil renouvelle son soutien à la MINUSCA dans ses activités visant, conformément au mandat qu’il lui a confié dans sa résolution 2217 (2015), à aider les autorités de transition et le peuple centrafricain dans leurs efforts pour amener une paix et une stabilité durables dans le pays, protéger les civils, en particulier contre les violences à motivation ethnique ou religieuse, et restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire.
Le Conseil se dit préoccupé par les informations qui lui parviennent selon lesquelles deux personnes visées par les sanctions voyageraient dans la région et souligne que ceux qui facilitent délibérément le voyage de personnes inscrites sur la Liste en violation de l’interdiction de voyager peuvent être considérés par le Comité comme remplissant les critères de désignation pour figurer sur la liste.