En cours au Siège de l'ONU

Conseil de sécurité,
7498e séance – après-midi
CS/11990

Le Conseil de sécurité échoue à créer un tribunal spécial pour poursuivre les responsables de la destruction du vol MH17 en Ukraine

La Fédération de Russie a exercé son droit de veto, tandis que l’Angola, la Chine et le Venezuela se sont abstenus

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, en raison du droit de veto exercé par un de ses membres permanents, la Fédération de Russie, rejeté un projet de résolution visant à créer un tribunal international pour juger les responsables de la destruction du vol MH17 de la compagnie Malaysia Airlines, abattu en juillet 2014, dans l’est de l’Ukraine.

Outre la Fédération de Russie, qui a voté contre le projet de résolution, l’Angola, la Chine et le Venezuela se sont abstenus.  Le texte avait recueilli les votes favorables de 11 délégations.

Après le vote, le Ministre des transports de la Malaisie, M. Liow Tiong Lai, qui avait présenté le texte de résolution, s’est dit très déçu de cet échec qu’il a qualifié de « pas en arrière et de message confus aux familles des 298 victimes par rapport à la résolution 2166 (2014) ».

Par cette résolution du 21 juillet 2014, a-t-il rappelé, le Conseil de sécurité demandait à ce que les responsables de la tragédie répondent de leurs actes.  Plusieurs délégations ont estimé que ce veto russe envoyait un message dangereux d’impunité et constituait une menace à la sûreté de l’aviation civile.

La Ministre des affaires étrangères de l’Australie, Mme Julie Bishop, qui a perdu 39 de ses compatriotes dans la catastrophe, a prévenu que « les responsables ne pourront se cacher derrière le veto russe et ne pourront pas échapper à la justice ».  À l’instar des représentants des États-Unis et du Royaume-Uni, elle a estimé que ce veto représentait un affront à la mémoire de l’ensemble des 298 victimes et à leurs familles.

Le Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, M. Bert Koenders, a également exprimé sa profonde déception par le recours au droit de veto en expliquant que son pays ne cesserait jamais de rechercher la justice pour les 196 victimes néerlandaises de cette catastrophe.

« Lorsque l’on a peur de la vérité, on se retrouve isolé, y compris au sein de ce Conseil », a, lui, lancé à la Fédération de Russie, son homologue ukrainien, M. Pavlo Klimkin.

Expliquant son vote, le représentant russe a estimé que ce projet de tribunal était « prématuré, mal pensé et non fondé sur le plan juridique » alors que toutes les opportunités de la résolution 2166 n’ont pas été exploitées.  Il s’est, par ailleurs, demandé comment un tel tribunal résisterait aux pressions de ceux qui semblent avoir désigné par avance les coupables.

Le délégué de la Fédération de Russie a regretté que la proposition de son pays de créer un poste de représentant spécial du Secrétaire général, qui, selon lui, aurait pu contribuer à une véritable enquête internationale transparente, n’eût pas été entendue, qualifiant par ailleurs d’« indignes d’un diplomate » les propos tenus par le Ministre ukrainien.

« Si nous comprenons les sentiments des coauteurs de ce projet de résolution et sommes conscients de la douleur des familles des victimes, nous regrettons que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure de s’entendre sur un projet de consensus qui aurait permis d’avancer de la manière la plus opportune pour rechercher la vérité », a expliqué, pour sa part, le représentant de la Chine pour expliquer l’abstention de sa délégation.

Le texte du projet de résolution soumis au Conseil de sécurité constatait que « cet acte de violence et ses conséquences pour la sécurité de l’aviation civile constituent une menace pour la paix et la sécurité internationales », et suggérait que le fonctionnement et la compétence du tribunal pénal international ainsi créé agirait au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.

À cet égard, les représentants de l’Angola et du Venezuela ont expliqué leurs abstentions par la référence inappropriée, à leurs yeux, au Chapitre VII.  « La qualification de menace à la paix et la sécurité internationales rend politique le traitement du dossier alors que nous sommes encore à une phase technique », a regretté le délégué vénézuélien, avant de rappeler que les responsables de l’attentat de 1976 contre le vol 455 de la compagnie Cubana Airlines, qui avait fait 73 morts, n’avaient jamais été poursuivis. 

Tout en notant que le vote d’aujourd’hui marquait un grave échec pour ce Conseil, le représentant de la France a estimé que le rejet de ce projet de résolution n’abrogeait pas la résolution 2166 (2014) qui appelle à l’élucidation du drame, à l’établissement des responsabilités et à l’exigence de justice. 

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/136)

Déclaration avant le vote

M. LIOW TIONG LAI, Ministre des transports de la Malaisie, a dit que la communauté internationale avait été « choquée » par l’accident du MH17.  Le Conseil a réagi avec une rapidité exemplaire en adoptant la résolution 2166 (2014) et en demandant que les responsables soient jugés.  L’enquête mixte a été appuyée par de nombreux pays, y compris par la Fédération de Russie, l’Ukraine et les Pays-Bas, a-t-il dit.

Il est temps que le Conseil prenne les mesures qui s’imposent contre les responsables de l’accident du MH17 et envoie un signal clair aux groupes non étatiques que les attaques contre les aéronefs sont inadmissibles, a-t-il dit.  Il a affirmé qu’un tribunal spécial serait le mieux placé pour rendre justice aux familles des victimes.  Le statut du tribunal permettra de veiller sur l’indépendance des juges, a-t-il affirmé.  Les familles des victimes n’attendent pas moins de nous, a-t-il conclu.

Déclarations après le vote

M. LIOW TIONG LAI, Ministre des transports de la Malaisie, après le vote et le rejet du texte, a repris la parole pour regretter le manque d’unité du Conseil autour de la création de ce tribunal spécial malgré les efforts de son pays pour rapprocher les positions.  Le Conseil a fait un pas en arrière aujourd’hui en envoyant un signal négatif aux familles, a-t-il dit, précisant que le Conseil n’était pas parvenu à appliquer la résolution 2166 (2104) qu’il avait adoptée il y a un an.  

La Malaisie ne sera pas intimidée par l’événement regrettable de ce jour et cherchera à identifier les responsables de cet accident, a-t-il affirmé, précisant que son pays allait étudier d’autres mécanismes, « compte tenu du revers d’aujourd’hui ».  « Nous ne renoncerons jamais », a promis le Ministre.

M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a dit que son pays avait toujours été en faveur d’une enquête pour déterminer au plus vite les causes de la catastrophe et poursuivre les coupables.  « C’est pourquoi nous avons appuyé l’adoption de la résolution 2166 (2014) et la nécessité de procéder à une enquête internationale », a-t-il insisté.  Le représentant russe a regretté que des délégations aient souhaité agir sur la base d’accords bilatéraux avec l’Ukraine plutôt que dans le cadre d’un consensus avec toutes les parties concernées. 

Il a indiqué que son pays avait transmis à la partie néerlandaise en charge de l’enquête toutes les données sollicitées à cet égard et que le Ministère de la défense russe avait organisé très tôt une séance d’information au cours de laquelle avaient été présentées des données satellites.

Il a souligné que l’avion avait été abattu par des missiles de type « Buk ».  Il a dit qu’un an après l’adoption de la résolution 2166 (2014), les experts russes n’avaient toujours pas eu un accès égal aux données de cette enquête, notamment aux études métallurgiques qui permettraient d’établir qui a abattu l’avion.  Il a dit que son pays s’opposait à la création d’un tribunal dont on se demande comment il résisterait aux pressions de ceux qui semblent avoir décidé par avance qui étaient les coupables. 

Il a regretté que la proposition russe de créer un poste de représentant spécial du Secrétaire général qui aurait pu contribuer à une véritable enquête internationale transparente n’eût pas été entendue.  Il a estimé que ce projet de tribunal était prématuré, mal pensé et non fondé sur le plan juridique alors que toutes les opportunités de la résolution 2166 n’ont pas été exploitées. 

L’expérience et l’exemple des tribunaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda ne sont guère encourageants, a-t-il dit, en notant la lourdeur de ces juridictions.  Il a rappelé que la Fédération de Russie avait proposé en 2010 la création d’un tribunal international pour lutter contre la piraterie au larges des côtes somaliennes et que cette proposition n’avait pas été adoptée parce que certaines délégations invoquaient la lourdeur d’un tel mécanisme. 

Il a regretté que certaines délégations aient souhaité soumettre au Conseil de sécurité ce projet de résolution tout en sachant qu’il ne pourrait pas être adopté.  Il a estimé que cette démarche démontrait que les délégations concernées privilégiaient des objectifs de propagande aux objectifs pratiques.

Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a livré des éléments biographiques de certains passagers disparus dans l’accident du MH17.  Les pertes sont incommensurables, a-t-elle dit, ajoutant que ce qui s’était passé il y a un an aurait pu arriver à n’importe qui.  Les victimes font partie de nos familles, a-t-elle poursuivi.  

Mme Power a souligné que les efforts visant à empêcher que justice fût rendue aux familles des victimes ne faisaient qu’aggraver leur douleur.  En opposant son veto, la Russie fait fi de l’appel des familles des victimes et des opinions publiques dans de nombreux pays en vue de poursuivre les responsables de cette tragédie, a-t-elle affirmé.  Elle a déclaré que le veto, qui est un privilège ayant été indûment utilisé aujourd’hui, n’empêchera pas ces familles de chercher à identifier les responsables de l’accident du MH17.  Nous sommes scandalisés aujourd’hui, a conclu Mme Power.

M. DAINIUS BAUBLYS (Lituanie) a plaidé pour que le Conseil de sécurité apporte une réponse face à un crime odieux.  Il faut, a-t-il dit, que tous les États coopèrent pleinement à la reddition de comptes, ce que la résolution 2166 (2014) avait précisément demandé.  Le veto russe n’a pas permis, pour l’instant, d’ouvrir « une avenue » pour rendre justice aux familles des victimes, a-t-il regretté, tout en soulignant qu’elle n’était pas surprise.

Il a en effet estimé que la Russie s’était comportée depuis le début comme si elle avait quelque chose à cacher.  Le représentant a dit que des groupes armés illicites soutenus par la Russie avaient manipulé les preuves sur le lieu du crash et restreint l’accès aux experts internationaux et aux inspecteurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), alors qu’au contraire l’équipe d’enquête indépendante internationale menée par les Pays-Bas jouissait de toute la confiance des pays concernés et de la communauté internationale.

En tant que pays qui a parrainé le projet de résolution proposé par la Malaisie, la Lituanie a voulu que soit envoyé un message clair: les actes de violences contre les civils ne restent pas impunis.  Il a estimé que la constitution d’un tribunal international aurait été le meilleur moyen de garantir l’impartialité et l’indépendance du processus.  « Nous soutiendrons tous les efforts à venir qui viseront à rendre justice, avec ou sans la coopération de la Russie », a-t-il annoncé.

À son avis, le flux d’armes, de mercenaires et de soldats russes qui entraient sur le territoire souverain de l’Ukraine avait créé les conditions propices à cette tragédie.  Il en a voulu pour preuve que, plusieurs semaines avant le crash de l’appareil du vol MH17, des séparatistes s’étaient vantés d’avoir acquis un système de missile SA-11 « Buk » et de l’avoir utilisé pour abattre le cargo An-26 à haute altitude.  De telles armes ne peuvent pas être achetées sur le marché du centre-ville de Louhansk, ni être manipulées par des mineurs de fonds du Donbass, a-t-il remarqué.

Le représentant a ensuite dénoncé la poursuite du conflit orchestré par l’étranger dans l’est de l’Ukraine et le fait que la Russie continue de nier son implication.  Il a rapporté des éléments, comme les mouvements de troupes russes et la concentration d’armes lourdes dans les zones aux mains des rebelles, qui démontrent selon lui le contraire.

Regrettant que des civils meurent chaque jour dans le Donbass et soulignant qu’il y a 1,4 million de personnes déplacées qui ont besoin d’aide humanitaire, il a dénoncé les obstacles que placent les militants pour empêcher la fourniture de l’aide internationale.  Il a lancé un appel pour que le plan de réponse humanitaire pour l’Ukraine soit financé et pour que les Accords de Minsk soient mis en œuvre.

M. CHERIF MAHAMAT ZENE (Tchad) a rappelé que 85 enfants avaient trouvé la mort dans l’accident du vol MH17.  Il a rappelé que la résolution 2166 (2014), adoptée par le Conseil quelques jours après la tragédie, demandait que les responsables soient jugés.  La création d’un tribunal spécial aurait permis d’honorer la mémoire des victimes de cette catastrophe, de mettre en œuvre la résolution précitée et d’envoyer un signal fort à tous ceux qui, dans les zones de conflit, voudraient attenter à un aéronef civil.

C’est pourquoi nous avons voté pour, a-t-il dit, avant de profondément regretter le rejet du texte.  Enfin, le représentant du Tchad a appelé les membres du Conseil à tout mettre en œuvre pour que justice fût rendue aux familles des victimes.

M. JUAN MANUEL GONZÁLEZ DE LINARES PALOU (Espagne) a exhorté le Conseil de sécurité à veiller à ce que les responsables de l’accident de l’appareil du vol MH17 de la compagnie Malaysia Airlines rendent compte à la justice conformément à la résolution 2166 (2014).  Il a salué le rôle du système des Nations Unies et en particulier via l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) pour le soutien à l’Équipe d’enquête mixte.

Il a estimé que la création d’un tribunal international enverrait un message ferme pour lutter contre l’impunité et rendre justice aux victimes.  Il permettrait aussi de montrer combien des actes exécrables de ce type sont inadmissibles et constituerait une démarche en faveur de la défense de la paix et de la sécurité internationales et renforcerait la sécurité de l’aviation civile internationale.   

M. LIU JIEYI (Chine) a dit l’importance d’une enquête internationale transparente pour tirer au clair ce qui s’est passé et pour définir les culpabilités.  « Si nous comprenons les sentiments des coauteurs de ce projet de résolution et sommes conscients de la douleur des familles des victimes, nous regrettons que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure de s’entendre sur un projet de consensus qui aurait permis d’avancer de la manière la plus opportune pour rechercher la vérité », a-t-il dit. 

Il a exhorté le Conseil de sécurité à éviter les affrontements politiques sur cette question et à rechercher un consensus.  Il a regretté que plusieurs membres du Conseil de sécurité aient demandé un vote, lequel, a-t-il estimé, représente une source de division néfaste au processus de recherche de vérité. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a regretté le rejet du projet de résolution instaurant un tribunal international pour juger les responsables de l’accident du vol MH17 de la Malaysia Airlines.  Pour autant, les dispositions de cette résolution ne sont nullement abrogées par ce rejet.  L’appel à ce que toute la vérité soit faite sur les circonstances du drame, que les responsables soient poursuivis et que justice soit rendue ne disparaîtra pas.  L’enquête menée par l’Équipe d’enquête mixte, à laquelle les Nations Unies ont été associées via l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), doit se poursuivre. 

Il est profondément choquant qu’un an après la catastrophe, ce Conseil se montre divisé sur l’action à mener pour répondre à la douleur et à la préoccupation de nations entières, comme en témoigne la présence parmi nous aujourd’hui de plusieurs membres de gouvernement des pays concernés.  « Nous regrettons le veto de la Russie », a encore ajouté le représentant, qui a estimé que « la Russie a un rôle essentiel à jouer au sein de ce Conseil, autant pour maintenir la crédibilité des décisions qui y sont prises, que pour le règlement de la crise en Ukraine ».

M. Delattre a ajouté que les problèmes restaient entiers et la discussion demeurait ouverte.  « Nous serons bientôt amenés à poursuivre la réflexion sur les suites à donner à l’enquête internationale qui rendra prochainement ses conclusions », a-t-il conclu.

M. CARLOS OLGUÍN CIGARROA (Chili) a affirmé que son pays aurait souhaité que le Conseil envoyât un signal uni aux familles des victimes.  Le Chili était en faveur de la création d’un tribunal spécial qui aurait permis de mettre en œuvre la résolution 2166 (2014), a-t-il dit, ajoutant qu’il avait voté en faveur du projet de résolution.  Enfin, il a espéré que les pays surmonteraient leurs différences pour que justice soit rendue aux familles des victimes.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) s’est dit très déçu par le veto de la Fédération de Russie.  Ce veto insulte les familles des victimes, a-t-il poursuivi, en déplorant que le Conseil n’ait pas saisi l’occasion de mettre en œuvre un mécanisme pénal qui aurait permis de rendre justice aux familles des victimes.  Il a ensuite affirmé qu’il y avait des précédents à l’établissement d’un tel mécanisme pénal, tels que le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), mais aussi à la suite de l’attaque d’un avion au-dessus de Lockerbie.

Un an après cette tragédie, il était temps de mettre en œuvre ce tribunal spécial, a-t-il dit, avant de rejeter les allégations de la Russie selon lesquelles le Conseil aurait dû attendre la fin de l’enquête.  Mettre en place un tribunal prend du temps, a-t-il déclaré.  Il a également indiqué que ce tribunal aurait précisément permis de donner suite aux résultats de l’enquête sitôt ceux-ci connus.  Les auteurs répondront de leurs actes et la communauté internationale doit s’unir afin d’y parvenir, a-t-il conclu.

M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a dit que la justice devait prévaloir.  Il a expliqué son abstention lors du vote de ce projet car celui-ci contenait, selon lui, des éléments de friction politique qui risquaient de miner la collaboration et le déroulement positif de l’enquête en cours.  Par ailleurs, il a considéré que la référence au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies dépassait le cadre politique et juridique tracé par la résolution 2166 (2014) qui, à ses yeux, « prévoit des options et variantes suffisantes ». 

« La qualification de menace à la paix et la sécurité internationales rend politique le traitement du dossier alors que nous sommes encore à une phase technique », a aussi regretté le représentant du Venezuela.  « Nous souhaiterions éviter que les souffrances des populations soient exploitées à des fins politiques », a-t-il ajouté, en rappelant que les responsables de l’attentat de 1976 contre le vol de Cubana Airlines, qui avait fait plus de 70 morts, n’avaient jamais été poursuivis.  Le représentant du Venezuela a souhaité que l’on évitât de politiser ce dossier et que l’on laissât se poursuivre les enquêtes en cours afin qu’elles puissent déterminer les responsabilités. 

M. JOÃO IAMBENO GIMOLIECA (Angola) a condamné dans les termes les plus forts la destruction de l’appareil du vol MH17.  Il a dit la nécessité d’exiger la justice pour les familles des victimes afin de montrer que ces actes ne peuvent rester impunis et que l’aviation civile doit être protégée.

Néanmoins, il a expliqué son abstention en estimant que la résolution 2166 (2014) restait le cadre juridique applicable pour ce qui est de la coopération internationale à obtenir pour la conduite de l’enquête internationale en cours.  La création d’un tribunal internationale est prématurée et il convient d’attendre les conclusions de l’enquête en cours, a-t-il insisté.

Mme U. JOY OGWU (Nigéria) a regretté le rejet de ce texte qui aurait permis de rendre justice aux familles des victimes et d’avoir un effet dissuasif à l’égard de ceux qui projettent des attaques contre des avions commerciaux.  Le rejet du projet de résolution démontre la nécessité que le Conseil présente un front uni sur les questions qui requièrent son leadership, a-t-elle conclu.

Mme DINA KAWAR (Jordanie) a indiqué que son pays avait voté en faveur du projet de résolution en vue de traduire en justice les responsables de la destruction du vol MH17.  Il est également nécessaire de dissuader toute velléité d’attaque contre des aéronefs civils, a-t-elle affirmé, ajoutant que la communauté internationale ne devait pas tolérer que des civils soient pris pour cible.  Enfin, Mme Kawar a souligné la nécessité d’une coopération internationale robuste afin de rendre, à l’avenir, justice aux familles.  

M. MURRAY MCCULLY (Nouvelle-Zélande) a rappelé que les événements tragiques du 17 juillet 2014 avaient causé la mort d’un citoyen et d’un résident de son pays.  Il a ensuite exprimé sa déception face à l’absence d’unanimité au sein du Conseil de sécurité aujourd’hui, qui n’a pas permis d’adopter un projet de résolution visant à créer un mécanisme pour rendre justice.

En agissant ainsi, « le Conseil a abandonné les familles et les amis des passagers du vol MH17 qui sont décédés.  Et il s’est abandonné lui-même.  C’est une question sur laquelle le Conseil aurait dû pouvoir s’entendre », a-t-il ajouté, en soulignant qu’il s’agissait d’un tir sur un appareil d’une ligne aérienne commerciale ayant fait 298 morts.  Il ne peut pas y avoir de zone grise en la matière, a-t-il dit, en expliquant qu’il fallait soit demander des comptes soit laisser l’impunité prévaloir. 

« Je regrette vraiment que le Conseil ait choisi cette dernière option aujourd’hui », a-t-il dit, en assurant que, en tant que Président du Conseil de sécurité, il avait fait son possible pour tenter d’obtenir un consensus.  Il a regretté en particulier que la décision eût été rejetée du fait de l’utilisation du droit de veto, un droit auquel la Nouvelle-Zélande est fermement opposée, et ce, depuis 1945.  Il a aussi rappelé que les pays qui ont connu le plus de pertes humaines étaient l’Australie, la Malaisie et les Pays-Bas, des pays amis du sien.

M. BERT KOENDERS, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, a dit que les familles des 196 ressortissants néerlandais tués lors de la destruction de l’appareil du vol MH17 attendaient que les responsables fussent traduits en justice.  Il a affirmé que l’enquête technique était presque terminée et que l’enquête pénale conduite par l’Équipe mixte était très avancée.  Ceci nous amène à l’objectif ultime de traduire en justice les responsables, a-t-il expliqué.

Il a rappelé que ce projet de résolution demandait à tous les États de coopérer pour favoriser la recherche de la vérité et afin que les responsables pussent être traduits en justice.  « Notre objectif est de créer un mécanisme opportun dépolitisé et crédible pour poursuivre et condamner les responsables de cet acte », a insisté M. Koenders.  Il s’est dit extrêmement déçu par le recours au veto par la Fédération de Russie pour empêcher le Conseil de sécurité de rechercher activement à ce que justice fût rendue.  Il a dit la nécessité de parvenir à une procédure indépendante et dépolitisée avant la conclusion de l’enquête et la désignation des responsables.

Mme JULIE BISHOP, Ministre des affaires étrangères de l’Australie, a rappelé que 39 Australiens, dont 6 enfants, se trouvaient parmi les victimes de la destruction de l’appareil du vol MH17.  Elle a expliqué que ce projet de résolution ne visait rien de plus que de traduire en actes les exigences de la résolution 2166 (2014).  Il est de notre souci de dissuader ceux qui menacent l’aviation civile internationale, a-t-elle dit.

Elle a estimé que le veto russe d’aujourd’hui ne faisait qu’aggraver cette tragédie, aucun veto ne pouvant, selon elle, s’opposer à la justice.  Elle a affirmé que ce veto représentait un affront à la mémoire des 298 victimes de la catastrophe et aux familles des victimes.  Répondant à ceux qui ont jugé prématurée la création d’un tribunal international, Mme Bishop a estimé que l’instauration d’un mécanisme de poursuite avant la conclusion de l’enquête était totalement conforme aux pratiques du Conseil de sécurité.

« Les responsables ne pourront se cacher derrière le veto russe et ne pourront pas échapper à la justice », a dit la Ministre avant d’assurer que la détermination de l’Australie ne cesserait pas.  « Mettons au défi le veto d’aujourd’hui et veillons à ce que la résolution 2166 (2014) soit mise en œuvre totalement », a-t-elle insisté.

M. PAVLO KLIMKIN, Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a affirmé que l’accident du vol MH17 était une tragédie nationale qui sera toujours au cœur du peuple ukrainien.  Il faut maintenant rendre justice aux familles des victimes et faire en sorte que la vérité soit établie, a-t-il dit.  Il n’y a aucune raison de s’opposer à ce que les auteurs de la destruction de ce vol soient jugés, « à moins que l’on ne soit une entité impliquée », a-t-il dit. 

Il a ensuite déclaré que l’utilisation d’une arme contre un aéronef civil constituait une menace à la paix et à la sécurité internationales.  La seule manière d’empêcher que cela ne se reproduise est de condamner, en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, les auteurs de l’attaque contre le vol MH17, a-t-il dit.

Il a ensuite déploré que la Russie fasse l’amalgame entre son soutien aux activités terroristes menées sur le territoire ukrainien et la responsabilité individuelle des auteurs de la destruction du vol MH17.  Le Ministre a déclaré que la Russie ne pouvait pas cacher le rôle qu’elle jouait en Ukraine, puisque des milliers de chars et de soldats continuaient de traverser la frontière depuis la Russie.

La Russie déçoit les victimes des familles, a-t-il dit, qualifiant son attitude de « pitoyable ».  L’abus du droit de veto ne fera que renforcer notre détermination à mettre en œuvre les mécanismes crédibles pour que justice soit faite, a-t-il assuré.  Enfin, le Ministre a affirmé que « lorsque l’on a peur de la vérité, on se retrouve isolé, y compris au sein de ce Conseil ».

Mme BÉNÉDICTE FRANKINET (Belgique) a regretté que malgré des bases juridiques solides et le large soutien dont le projet de résolution jouissait, il n’eût pas été possible de dégager un accord sur celui-ci au sein du Conseil.  « Mais nous devons restés engagés pour que la justice soit rendue car c’est une responsabilité que nous portons à l’égard des victimes et de leurs proches », a expliqué la représentante.  Celle-ci a indiqué que « nous sommes prêts à aller de l’avant et à intensifier nos contacts et démarches afin que ce que nous demande la résolution 2166 (2014) devienne réalité: tous les États s’associent pleinement aux efforts déployés pour établir les responsabilités ». 

Ceci doit se faire dans le respect du droit et sans tomber dans le piège d’une politisation quelconque, a-t-elle averti.  L’Équipe d’enquête mixte dont font partie les autorités judiciaires belges, poursuit son travail de manière totalement indépendante et objective, et en coopération avec toutes les parties intéressées.  « Nous devons faire en sorte que ce travail essentiel connaisse une suite judiciaire à la hauteur des attentes des familles et des proches des victimes et ceci dans les meilleurs délais, pour que l’impunité ne prenne pas le pas sur le respect du droit et de la dignité humaine », a déclaré la représentante.

M. GUILLERMO E. RISHCHYNSKI (Canada) a dit que son pays continuait de pleurer la perte terrible de vies à bord de l’appareil de la Malaysia Airlines MH17 qui a été abattu le 17 juillet 2014 alors qu’il survolait une région sous contrôle des forces pro-Russes dans l’est de l’Ukraine.  Il est important pour le Conseil de sécurité de prendre des mesures décisives pour veiller à ce que les responsables de l’attentat contre le MH17 répondent de leurs actes et pour envoyer un message clair que les attaques perpétrées contre des avions civils ne seront pas tolérées.  Le Canada exhorte tous les États à coopérer afin de faire en sorte que ceux qui ont commis ce crime odieux répondent de leurs actes, a insisté le représentant.

Il a ajouté qu’il était primordial que les auteurs du crime soient poursuivis sans délai de façon indépendante et impartiale.  Il convient donc d’adopter dès maintenant des mesures pour établir un tribunal international à cette fin.  Le Canada presse tous les acteurs concernés à prêter leur entière collaboration à l’Équipe d’enquête mixte.  « Toute action visant à entraver l’enquête ou la poursuite des responsables est inacceptable », a averti le représentant qui a déclaré que le Canada exprimait sa profonde déception quant au résultat du vote d’aujourd’hui au Conseil de sécurité sur la mise sur pied d’un tribunal pénal international visant à poursuivre les responsables de la destruction du vol MH17. 

« Le Canada déplore que l’obstruction d’aujourd’hui prive les proches des 283 passagers et des 15 membres de l’équipage qui ont perdu la vie de l’occasion de voir les responsables de ce terrible crime traduits en justice par un tribunal international », a conclu le délégué.   

M. HARALD BRAUN (Allemagne) a regretté qu’un veto eût été opposé à un engagement non équivoque du Conseil de sécurité en faveur de la responsabilisation et de la justice.  Rappelant que le Conseil s’était engagé, en adoptant il y a un an la résolution 2166(2014), à traduire en justice les auteurs du crime odieux qui a causé la tragédie du vol MH17, il a estimé que celui-ci avait aujourd’hui échoué dans cette tâche.  Il a indiqué que son pays avait coparrainé le projet de résolution qui a été rejeté car la création d’un tribunal international aurait permis d’avancer dans le sens de la reddition de comptes.

Le représentant a ensuite dénoncé la poursuite du conflit dans l’est de l’Ukraine où, chaque jour, des personnes sont tuées, blessées, ou perdent leurs maisons à cause du conflit.  Il faut que cela cesse, a-t-il dit, en demandant de tout mettre en œuvre pour faire retomber les tensions et pour mettre en œuvre les accords de Minsk. 

Il a rappelé que l’Allemagne, avec la France, l’Ukraine, la Russie, dans le cadre du « format Normandie », ainsi que d’autres partenaires, travaillaient dur pour mettre un terme à ce conflit.  Il s’est appuyé sur les résultats atteints sur la question du programme nucléaire iranien pour prouver qu’il est possible de trouver des solutions quand les parties adoptent une attitude constructive. 

Mme LOURDES ORTIZ YPARRAGUIRRE (Philippines) a déclaré que 12 mois après l’incident et l’adoption de la résolution 2166 (2014), le monde cherchait encore des réponses.  Les auteurs de cette tragédie restent libres de toute responsabilité, a-t-il déploré. 

« Nous regrettons profondément que le Conseil ne fut pas capable d’adopter ce projet de résolution à cause d’un simple veto, ce qui représente un immense mauvais service à ceux qui ont péri, à leurs familles, à leurs pays et au monde », a ajouté le représentant, pour qui la recherche des réponses et de la justice continuera.  Les Philippines sont prêtes à soutenir et à collaborer avec d’autres pays pour veiller à ce que les responsables soient enfin traduits en justice et que ce genre de tragédie ne se reproduise jamais, a conclu le délégué.

M. TIM MAWE (Irlande) a rappelé qu’il y avait un citoyen irlandais à bord du vol MH17.  Après la résolution 2166 (2014) adoptée il y a un an qui visait à enquêter sur ce crash et à traduire en justice ses auteurs, il a apprécié les progrès accomplis depuis pour identifier et rapatrier les victimes et pour créer un mécanisme d’enquête professionnel et indépendant mené par des experts internationaux.  La seule tâche qui reste à accomplir est de mettre en place un mécanisme de reddition de comptes indépendant et impartial, a-t-il souligné. 

Il s’est rappelé que la résolution 2166 (2014) cherchait à s’assurer que le mépris affiché par les auteurs de cet acte pour les vies humaines ne resterait pas sans conséquences.  Il a estimé que le texte proposé aujourd’hui aurait permis à la communauté internationale de prouver son engagement en faveur de la création d’un mécanisme de responsabilisation transparent et efficace.  Cela aurait évité toute politisation des rapports d’enquête, a-t-il ajouté.  De l’avis du représentant, les tribunaux créés par le Conseil de sécurité ont fait leurs preuves et il ne serait pas anormal d’en créer un avant la fin de l’enquête, car c’est exactement ce qui s’est passé pour les tribunaux créés au lendemain des conflits dans l’ex-Yougoslavie, au Rwanda et au Liban.

Enfin, soulignant l’importance de l’aviation civile pour un pays insulaire comme le sien, il a regretté que la sécurité du ciel fût compromise par le manque de justice pour le vol MH17.

M. RON PROSOR (Israël) a affirmé que l’appareil du vol MH17 avait été détruit à la suite d’une attaque délibérée.  Cette attaque est une tentative d’instaurer la peur dans le cœur de ceux qui utilisent les moyens aériens, a-t-il affirmé, estimant que le Conseil devait envoyer un signal clair et fort afin que de telles attaques ne se reproduisent pas.  Il a ensuite indiqué que parmi les victimes se trouvait un citoyen israélien de 27 ans Itamar Avnon, qui étudiait en Australie et venait de rendre visite à sa famille aux Pays-Bas.  « Itamar vivait la vie pleinement et apportait l’amour et le rire à tous ceux qui le connaissaient », a-t-il dit.  En conclusion, il a salué les progrès effectués jusqu’à présent dans l’enquête sur les causes de cette tragédie.

Mme NGUYEN PHUONG NGA (Viet Nam) a réitéré l’appui de son pays en faveur d’une enquête sur l’accident du vol MH17 qui soit « indépendante, transparente et objective », dans le droit fil de la résolution 2166 (2014).  Les responsables de la destruction du vol MH17 doivent être jugés par le biais de mécanismes appropriés conformément au droit international et à la Charte des Nations Unies, a-t-elle affirmé.

M. DESRA PESCAYA (Indonésie) a regretté le rejet du texte et demandé que des mesures soient prises pour juger les responsables de la destruction du vol MH17.  Des mesures claires doivent également être adoptées pour empêcher que des incidents similaires ne se reproduisent, a-t-il affirmé.  M. Pescaya a apporté son soutien à la résolution 2166 (2014) du Conseil et souligné l’importance d’une enquête qui soit approfondie et mette l’accent sur la transparence et l’impartialité, en vue d’établir les responsabilités dans ce drame.

Reprenant la parole afin de réagir aux interventions de certaines délégations, le représentant de la Fédération de Russie a jugé insultante celle du représentant de l’Ukraine qu’il a qualifiée de déclaration indigne d’un diplomate.  « Nous ne comprenons pas pourquoi et comment l’absence d’un accord sur ce projet de résolution se traduit par des propos sur l’impunité », a dit le représentant russe.  

Il a regretté que le représentant de l’Ukraine ait adopté une position quasi religieuse en jugeant indispensable de demander pourquoi l’aviation civile avait laissé des avions civils survoler une zone touchée par un conflit.  Il a mis l’accent sur la nécessité de déterminer les responsabilités de ceux qui ont abattu l’avion mais aussi de ceux qui ont permis que l’avion survole une zone de conflit.  « Nous sommes prêts à coopérer et nous vous proposons de reprendre ce travail de coopération dès demain », a-t-il déclaré.

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