En cours au Siège de l'ONU

7487e séance – matin
CS/11972

Au cours d’un exposé devant le Conseil, M. Edmond Mulet estime qu’à ce stade, le déploiement d’une opération de maintien de la paix en Somalie serait à haut risque

Il invite le Conseil de sécurité à améliorer les libellés des critères de mesure des progrès de terrain pour les adapter à l’évolution de la situation dans le pays

 

« Le Secrétaire général considère que malgré les progrès réalisés en Somalie, une mission de maintien de la paix des Nations Unies serait, à ce stade, une entreprise à très haut risque », a déclaré ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, M. Edmond Mulet. 

Présentant les recommandations formulées par la « Mission conjointe d’examen Union africaine-ONU », déployée conformément à la résolution 2182 (2014), M. Mulet a indiqué que le Secrétaire général exhortait aussi le Conseil de sécurité à adopter de nouveaux libellés des critères visant à mesurer la situation en Somalie pour mieux les adapter à la situation évolutive dans ce pays, sans toutefois altérer la substance de la résolution 2124 du Conseil de sécurité. 

Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a rappelé que cette Mission avait pour mandat d’examiner les progrès effectués par rapport aux critères de déploiement d’une opération de maintien de la paix en Somalie, d’évaluer l’impact du renforcement temporaire des troupes de l’AMISOM à 22 126 autorisés par la résolution 2124 (2013) et de formuler des recommandations sur les étapes suivantes de la campagne militaire.  M. Mulet a rappelé que les critères couvrent des questions ayant trait au processus politique et à l’extension de l’autorité de l’État, le niveau de la menace, le développement des institutions sécuritaires de la Somalie, ainsi que l’appui des Somaliens pour le développement d’une opération de maintien de la paix. 

Tout en soulignant les importants progrès accomplis par son pays et l’AMISOM, M. Elmi Ahmed Duale, Représentant permanent de la Somalie auprès des Nations Unies, a déclaré que la situation de la Somalie ne pourra être stabilisée à long terme et procéder au retrait des troupes internationales que lorsque un secteur de la sécurité solide sera mis en place dans le pays.  La communauté internationale, a-t-il ajouté, doit appuyer davantage le secteur de la sécurité et les institutions somaliennes.

M. Mulet a indiqué que l’augmentation des effectifs de l’AMISOM et le paquet d’appui logistique accordé à l’armée nationale somalienne tel qu’autorisé par la résolution 2124 (2013) avaient permis à l’AMISOM de réaliser des gains significatifs contre Al-Chabab qui n’auraient pas pu être possibles sans les sacrifices continus des troupes de l’AMISON et de l’armée somalienne. 

Cependant, à l’instar du représentant somalien, M. Mulet s’est inquiété de ce qu’en dépit des progrès réalisés, le groupe Al-Chabab continue de s’adapter en lançant des attaques asymétriques et en bloquant l’accès aux zones récemment conquises par l’armée somalienne.  « De plus, ce groupe a étendu sa présence au Puntland et est devenu une menace plus significative au sein de la sous-région », a-t-il aussi noté.  Le Sous-Secrétaire général a rappelé que la nouvelle stratégie sécuritaire avait pour but de favoriser un environnement propice à la mise en œuvre d’un processus politique à Mogadiscio et dans les régions dans un délai de 18 mois.  Il a précisé que cette stratégie serait guidée par trois objectifs interconnectés, à savoir permettre le processus politique aux niveaux fédéral, régional et local (district); relancer aussi vite que possible les opérations offensives contre les bastions d’Al-Chabab en maintenant des capacités offensives flexibles; et permettre des efforts de consolidation.

Ces objectifs sont ambitieux et nécessiteront des engagements forts de toutes les parties en Somalie, a insisté M. Mulet avant d’appeler le Gouvernement somalien et les partenaires clefs à mettre en œuvre ces stratégies de manière concertée.  M. Mulet a aussi souligné la nécessité de confirmer l’augmentation graduelle des effectifs de l’AMISOM jusqu’à l’été 2016, y compris le renforcement de la composante police.  La stratégie en matière de sécurité ne réussira que si les institutions somaliennes chargées de la sécurité seront renforcées et capables d’assumer progressivement ce rôle.  Dans ce contexte, M. Mulet s’est félicité de l’adoption, le 23 avril 2015, du « plan de Guulwade » de renforcement de l’armée somalienne, que les deux intervenants ont qualifié d’étape essentielle. 

M. Mulet a jugé essentielle la finalisation d’un plan de police réaliste pour assurer le développement de forces de police efficaces et éviter la militarisation des fonctions de maintien de la paix.  Il a aussi indiqué que le Secrétaire général recommandait la fourniture d’un paquet d’appui logistique non létal aux forces de police somalienne pour leur permettre de développer ses opérations dans toutes les régions, y compris au Puntland. 

Particulièrement préoccupé par la situation sécuritaire au Puntland, il a estimé qu’il était nécessaire de mettre l’accent sur un appui particulier à l’armée somalienne dans cette province, pour y déployer un contingent de 3 000 soldats, conformément à la résolution 2124 (2013). 

Passant en revue les progrès réalisés par son pays, le représentant de la Somalie a souligné en particulier l’élection, la semaine dernière, d’un président pour l’Assemblée régionale intérimaire Galmuduug et la confirmation par le Parlement des membres de la Commission électorale nationale indépendante et de la Commission des frontières et de la Fédération.  Il a expliqué que les progrès accomplis, en particulier sur la question du fédéralisme, n’auraient pas été possibles sans les succès militaires de 2013 et 2014 qui avaient permis une ouverture politique.  À cet égard, il a salué les sacrifices de l’armée nationale somalienne et de l’AMISOM, tout en prévenant que celles-ci n’étaient pas à l’abri de nouvelles attaques par le groupe Al-Chabab.  « Nos efforts sur le plan militaire, a-t-il dit, ne sont pas encore terminés. »

Le représentant s’est inquiété de la dégradation de la situation pendant la période du Ramadan, avec une dernière attaque du groupe Al-Chabab à Mogadiscio, vendredi dernier, qui démontre la capacité de ce groupe à poursuivre ses attaques.  M. Duale a ainsi jugé important de continuer à soutenir l’AMISOM et de maintenir son niveau actuel de troupes en Somalie, en lui fournissant également les moyens suffisants pour l’accomplissement de son mandat.

Il est temps, a-t-il estimé, de s’atteler au développement du secteur de la police et de se concentrer sur les questions de sécurité.  L’objectif ultime est en effet de confier la sécurité du pays à la police, a-t-il expliqué en demandant un plus grand soutien à ce secteur, en particulier en dehors de la capitale où les services de police doivent être rétablis.

Le représentant de la Somalie s’est également félicité des recommandations du Secrétaire général visant à ce que toute la communauté internationale commence à passer la main aux institutions somaliennes chargées de la sécurité, tout en reconnaissant que cela prendrait du temps.  Il a enfin prévenu qu’il faudrait coupler les efforts en matière de sécurité afin de renforcer les capacités des institutions somaliennes à Mogadiscio et dans les administrations régionales intérimaires.  Enfin, le représentant a émis l’espoir que son pays sera en mesure d’offrir des opportunités aux jeunes et, avec le développement des infrastructures, à parvenir à éliminer les sources de la violence.

 

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