En cours au Siège de l'ONU

7484e séance – matin
CS/11969

M. Martin Kobler souligne l’importance de la coopération entre la MONUSCO et les Forces armées de la RDC pour confronter les groupes armés

Les résultats d’un partenariat entre la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et les forces gouvernementales doivent renforcer notre engagement et notre volonté de combattre la menace que posent les groupes armés, a déclaré, ce matin devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général pour ce pays, M. Martin Kobler, en faisant le point sur la situation sécuritaire dans l’est de la RDC, le processus électoral, et le dialogue stratégique entre les Nations Unies et le Gouvernement congolais.

Le Conseil de sécurité a également entendu un exposé de l’Ambassadeur Dina Kawar, de la Jordanie, après sa visite en RDC, au Rwanda et en Ouganda, en mai dernier, en tant que Présidente du Comité des sanctions concernant la RDC.  Le représentant de la RDC, M. Ignace Gata Mavita, a assuré que son pays était déterminé à aller de l’avant dans le respect de ses engagements au titre de l’Accord-cadre.

M. Kobler, qui est également le Chef de la MONUSCO, a rappelé que la protection des civils était au cœur du mandat de la Mission.  « Je viens de voir ‘un rayon d’espoir’ sur une de nos lignes de front », a-t-il dit à ce propos, en signalant la mise en place d’un cordon militaire et d’opérations de recherche par les Forces armées de la RDC (FARDC), soutenues par les forces de la MONUSCO, afin de s’opposer aux Forces de résistance patriotiques de l’Ituri (FRPI).  Ce sont les opérations les plus efficaces jamais menées depuis celles contre le M23, a-t-il fait remarquer.  Il a expliqué que cette fois, il n’avait pas été possible d’éviter l’usage de la force, après trois occasions manquées des FRPI de se rendre.

Depuis le 3 juin, a poursuivi M. Kobler, les efforts conjoints de la MONUSCO et des forces congolaises ont permis de neutraliser environ un quart des FRPI.  Il a cependant insisté sur ce qu’il reste à faire pour restituer l’autorité de l’État et créer des opportunités d’emploi, en particulier pour les jeunes, ainsi que pour trouver des solutions pour les anciens combattants afin qu’ils ne soient pas attirés par de meilleures opportunités chez les FRPI.  Les opérations en cours prouvent qu’en agissant ensemble, nous pouvons protéger plus efficacement les populations, consolider la paix et restaurer l’espoir, a assuré le Représentant spécial avant de rappeler des situations tragiques qu’il a lui-même constatées sur le terrain.

« Les opérations contre les FRPI démontrent clairement ce que nous pouvons réaliser quand les Forces de la RDC et la MONUSCO travaillent ensemble, a-t-il encore exprimé, en français cette fois, en saluant le Gouvernement de la RDC pour sa coopération avec les forces de la MONUSCO et les FARDC dans ces opérations.  « Le résultat de ce partenariat renforce notre engagement et notre volonté à combattre la menace que représentent les groupes armés », a-t-il ajouté en s’adressant à l’Ambassadeur Gata Mativa, de la RDC.

Les opérations menées conjointement contre les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) dans le Nord-Kivu, le Sud-Kivu et au Katanga sont dans l’impasse depuis cinq mois, a cependant fait remarquer M. Kobler.

Il a souligné à nouveau les progrès importants accomplis par le Gouvernement congolais au cours des 10 dernières années pour rétablir la sécurité, tout en regrettant que la population soit toujours à la merci de groupes armés dans de nombreuses parties de l’est du pays.  Le Gouvernement de la RDC a choisi de mener ses opérations de manière unilatérale dans cette région, a-t-il dit, en indiquant que, pour sa part, la MONUSCO réfléchissait aux moyens de reprendre une collaboration avec le Gouvernement dans le cadre des engagements en matière de droits de l’homme.

« Les FARDC poursuivent seules la lutte contre les rebelles rwandais des FDLR », a confirmé le représentant de la RDC, en faisant part de résultats « encourageants ».  Il a aussi souligné la détermination de son gouvernement à mettre un terme au dossier de l’ex-rébellion du M23, lors de la réunion du 7 juillet qui visait à accélérer le rapatriement des ex-combattants.

Pourtant, M. Kobler a prévenu que, malgré certains succès des FARDC pour déloger les FDLR de leurs bastions, l’armée congolaise ne parvient pas à consolider sa position dans les zones libérées où la population continue de subir des violences.  Dans les territoires de Rutshuru et Nyiragongo, qui sont le théâtre d’opérations anti-FDLR, l’insécurité est de nouveau en hausse, a-t-il indiqué, en déplorant que le personnel des Nations Unies et le personnel humanitaire soient aussi la cible de violences.

Signalant le nombre de violations des droits de l’homme qui ont affecté 416 personnes au cours des six derniers mois, M. Kobler a noté une forte hausse par rapport aux 75 victimes du semestre précédent.  Il a dénoncé, en particulier, les actions des Forces démocratiques alliées (ADF) à Beni, en soulignant leur nature islamiste.  Le représentant de la RDC a assuré, à cet égard, que les FARDC, appuyées par la MONUSCO, font de leur mieux pour sécuriser Béni et ses environs.

Après avoir rappelé que 156 soldats de la MONUSCO avait contribué à la formation de près de 900 policiers congolais, M. Kobler a demandé au Gouvernement de la RDC de travailler en étroite coopération avec la Mission pour garantir le droit à la sécurité pour la population congolaise.  « Attendre n’est tout simplement pas une option », a-t-il prévenu en énumérant les souffrances de la population, notamment celle des femmes qui ont peur de se faire violer.

Passant au processus électoral en cours à Kinshasa, le Représentant spécial a prévenu que l’on risquait l’instabilité en l’absence d’élections crédibles.  Il a plaidé en faveur d’un processus électoral crédible et transparent, en demandant de surmonter quatre obstacles majeurs: un budget, un calendrier réaliste, des listes électorales mises à jour, un espace suffisant pour l’opposition et la société civile.  Il a émis l’espoir que les consultations organisées par le Gouvernement de la RDC n’entraîneraient pas un report des élections présidentielle et législatives prévues en novembre 2016.

À cet égard, le représentant de la RDC a souligné l’importance du dialogue politique voulu par le Chef de l’État: « c’est une affaire des Congolais qui doivent, a-t-il dit, apprendre à se parler entre eux, sans ingérence étrangère ».  Pour illustrer la volonté de son gouvernement d’organiser des élections transparentes et crédibles, il a assuré que le calendrier électoral pour les prochaines élections était établi et que le budget nécessaire avait été présenté.  Il a néanmoins énuméré les différents obstacles sur cette voie, comme la sécurisation du processus électoral.

En ce qui concerne le dialogue lancé en mars 2015 entre le Gouvernement et la MONUSCO, M. Kobler a indiqué que son objectif était de mettre en route une stratégie de sortie consensuelle et de relancer une collaboration sincère sur les questions de la sécurité, les élections, les droits de l’homme et la communication.  Il s’est félicité de l’esprit de confiance mutuelle qui a présidé au cours de de ces négociations, permettant ainsi de réaliser des progrès.

« Nous sommes convaincus que mon gouvernement arrivera à un terrain d’entente avec les Nations Unies et qu’un accord interviendra sur les points qui font l’objet de discussions », a assuré l’Ambassadeur Gata Mavita.

M. Kobler a précisé que des équipes mixtes -MONUSCO et forces de la RDC- avaient mené, au mois de mai, des missions conjointes dans 29 territoires des 4 provinces affectées par le conflit.  Les discussions sont en cours pour évaluer les résultats de ces missions, a-t-il dit en soulignant quelques divergences de vues sur le retrait des troupes de la Mission.  Le Gouvernement de la RDC souhaite, en effet, une nouvelle réduction, tandis que la Mission préfère adopter une approche plus structurée pour cette phase de retrait, qui soit conforme à la résolution 2211.

« Nous sommes d’accord sur le fait que la MONUSCO doit quitter progressivement le Congo », a affirmé le Représentant spécial en faisant remarquer que ce retrait avait déjà commencé.  Il a précisé que 1 420 des 2 000 Casques bleus devant être rapatriés ont déjà quitté le pays.  Ces soldats ne reviendront pas en RDC, a-t-il assuré.  « Le plus vite, le Gouvernement et la MONUSCO joindront leurs forces, le plus vite les groupes armés seront éradiqués », a-t-il estimé.  « Le plus vite les groupes armés seront éradiqués et l’autorité de l’État restaurée, a-t-il estimé, le plus vite, les troupes de la MONUSCO seront réduites. »

M. Kobler a ensuite abordé la question de la violence sexuelle contre les femmes et les filles en RDC, en souhaitant que les victimes aient accès à la justice.  Il a aussi fait observer combien les perspectives économiques étaient essentielles pour la consolidation de la paix.  Or, malgré des ressources abondantes et un taux de croissance enviable en RDC, les Congolais restent une des populations les plus pauvres au monde, s’est-il indigné.

À cet égard, il s’est félicité de l’initiative de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs, M. Said Djinnit, d’organiser une conférence d’investisseurs à Kinshasa en février 2016.  Il a aussi invité les partenaires nationaux et internationaux à investir dans la jeunesse qui est sérieusement touchée par le chômage.  Dans ce contexte, il a salué la visite de la Présidente du Comité des sanctions sur le terrain en mai dernier. 

Au cours de ses réunions avec la société civile et les représentants onusiens, Mme Dina Kawar a dit avoir touché du doigt le « paradoxe » qui existe entre les ressources importantes de la RDC et le chemin difficile qui doit conduire à la bonne gouvernance.  Elle a fait remarquer que le pays était incapable de s’appuyer sur ses ressources pour créer des richesses et offrir plus de chances à sa population.  Elle a aussi été alertée par le Gouvernement congolais sur la complicité de pays voisins dans les réseaux de contrebande en ce qui concerne le trafic de ressources naturelles.  La Présidente du Comité a ainsi encouragé ses interlocuteurs à présenter les noms des contrevenants principaux afin de donner l’exemple à ceux qui agissent aux niveaux inférieurs dans ce trafic.

C’était la première visite que le Comité effectue sur le terrain depuis sa création il y a 11 ans, a indiqué Mme Kawar, en expliquant que l’objectif était d’examiner les moyens d’améliorer l’efficacité des sanctions, de recueillir des informations de première main sur la situation en RDC et dans les pays voisins, y compris des noms pour la Liste, de renforcer le dialogue entre les parties prenantes et le Comité, et de recevoir des propositions concrètes sur les moyens envisagés par les États pour renforcer la mise en œuvre du régime de sanctions.

En ce qui concerne l’embargo sur les armes, Mme Kawar a rappelé qu’il ne s’appliquait plus au Gouvernement de la RDC depuis 2008 et que la procédure de notification sur le transfert d’équipement militaire n’était qu’informative.  Elle a aussi souligné l’appel du Conseil de sécurité en faveur d’une plus grande sécurité autour du stock d’armes du Gouvernement.  Pour ce qui est de la gestion des munitions, elle a appelé les membres du Comité à mieux cibler l’utilisation des fonds versés au Fonds d’affectation spéciale afin de permettre la construction de dépôts d’armes dans l’est de la RDC.

S’exprimant aussi sur la question des sanctions, le représentant de la RDC a demandé de ne pas faire d’amalgame entre le Gouvernement et les groupes armés illégaux.  Il doit être clairement établi que l’embargo sur les armes concerne uniquement les groupes armés, a-t-il insisté.

Mme Kawar a également parlé de sa visite au Rwanda où, dans l’ensemble, les rencontres étaient positives, malgré les plaintes de ce pays qui estime être le bouc émissaire de la RDC.  En Ouganda, elle a pu s’entretenir avec les autorités des allégations selon lesquelles le groupe armé des ADF aurait des liens avec des groupes terroristes comme Al-Chabab, ce que le Groupe d’experts n’a pas pu démontrer à ce jour.  Enfin, elle a indiqué que le Comité avait demandé aux États de la région de mener des enquêtes conformément aux recommandations du Groupe d’experts.

S’agissant du Burundi, le Représentant spécial a assuré qu’il avait suivi de près la situation dans ce pays qui est en proie à la violence depuis deux derniers mois.  Il a souligné que 140 000 personnes avaient fui vers les pays voisins, dont 12 800 en RDC.

« Nous sommes à un moment charnière dans l’histoire de la RDC », a indiqué M. Kobler, en assurant, avant de conclure, que « la graine d’un Congo stable, sûr et résilient avait déjà été plantée ». 

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