En cours au Siège de l'ONU

7478e séance – après-midi
CS/11954

Conseil de sécurité: habitée par « une détermination inchangée » s’agissant du Darfour, la Procureure de la CPI réaffirme la validité du mandat d’arrêt contre le Président soudanais

Le départ précipité du Président Omar Al-Bachir d’Afrique du Sud montre bien que le mandat d’arrêt contre lui est aussi valable aujourd’hui qu’il ne l’était, il y a six ans, a tranché aujourd’hui devant le Conseil de sécurité, la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI).  Mme Fatou Bensouda, qui présentait son vingt et unième rapport sur la situation au Darfour, s’est voulue claire: la détermination de mon Bureau à rendre une justice indépendante et impartiale au peuple du Soudan reste inchangée.  Le représentant soudanais a pris note de la « plaisanterie incroyable » d’une « ennemie ouverte du Soudan ».

La Procureure s’est attardée sur le fait que le 15 juin dernier, le Président soudanais a quitté l’Afrique du Sud avant la fin du Sommet de l’Union africaine.  Ce départ précipité démontre que le mandat d’arrêt est toujours aussi valable, et la décision rapide des tribunaux sud-africains, s’est-elle réjouie, est un précédent « frappant » que les autres États devraient imiter.  La décision de la Cour suprême sud-africaine a souligné la reconnaissance grandissante par les tribunaux nationaux des obligations que les États doivent honorer en vertu du Statut de Rome, a insisté la Procureure. 

Le Président Al-Bachir, a rétorqué le représentant du Soudan, a quitté l’Afrique du Sud comme prévu à la fin de sa mission.  Le représentant a peu goûté la « plaisanterie incroyable » de la Procureure de la CPI qui est devenue une « ennemie ouverte du Soudan ».  Il s’est interrogé sur l’impartialité d’une Cour qui n’a jusqu’ici exercé sa compétence qu’en Afrique.

Les critiques de certains États africains sont très mauvaises pour le Conseil de sécurité, la CPI, la paix et la justice, a estimé le représentant de la Nouvelle-Zélande qui a pris la parole avec ses 14 autres homologues du Conseil de sécurité.  Le Conseil de sécurité, a-t-il dit, doit mesurer à quel point le renvoi à la CPI de la situation au Darfour a conduit à une chaîne d’événements qui a réduit l’autorité de la Cour en Afrique et ailleurs.  Le Conseil doit réfléchir soigneusement avant d’user de son pouvoir de saisine et s’il ne s’engage pas véritablement à appuyer la mise en œuvre de ses saisines, il doit savoir que les conséquences à long terme pourraient être négatives.

Le Conseil, a conseillé le représentant, doit penser à la manière de changer le paradigme avec Khartoum et ce dernier doit réfléchir à la relation qu’il veut avec la communauté internationale, en commençant par le Conseil.  Arrêter les personnes les plus responsables des atrocités et qui sont déjà celles contre lesquelles des mandats d’arrêt ont été délivrés est la seule manière de stopper les crimes, a insisté la Procureure de la CPI.  Mme Bensouda a affirmé que les enquêtes de son Bureau sur les crimes commis au Darfour se poursuivent, certes pas au même rythme et avec la même intensité, mais elles se poursuivent. 

Une équipe d’avocats et d’enquêteurs continue son travail mais à cause des contraintes financières, du manque d’accès au Soudan et d’un appui inadéquat du Conseil de sécurité, elle se contente de suivre et de documenter les incidents, et d’interroger les témoins quand c’est nécessaire et possible.  La Procureure a demandé une nouvelle fois au Conseil d’assurer le respect par le Soudan de la résolution 1593 du Conseil de sécurité.  Elle a invité les parties au Statut de Rome à évaluer la meilleure façon d’arrêter les personnes incriminées et de les transférer à la Cour.  Ce dialogue aurait dû avoir lieu depuis longtemps et mon Bureau souhaite qu’on lui accorde la priorité, a insisté la Procureure.

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Déclarations

Mme FATOU BENSOUDA, Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), a commencé par rappeler que le premier mandat d’arrêt à l’encontre du Président soudanais Omar Al-Bachir avait été délivré il y a 6 ans.  À ceux qui choisissent délibérément d’oublier les faits ou de les tordre en prétendant que la CPI s’est imposée au Soudan, la Procureure a répondu que l’Union africaine avait, le 29 octobre 2009, endossé le rapport et les recommandations de son Groupe de haut niveau sur le Darfour, dirigé par l’ancien Président sud-africain, M. Thabo Mbeki.  La Procureure a aussi rappelé que lors de sa dernière intervention sur le Darfour, elle avait dit que, compte tenu de l’échec du Conseil à agir, de manière décisive, contre un certain mépris du Gouvernement du Soudan à l’égard de ses résolutions, et compte tenu des ressources limitées, elle n’avait d’autre choix que de réduire les enquêtes « actives ».  Le but, s’est-elle expliquée, était d’encourager le Conseil à exercer son pouvoir de rendre justice aux victimes des atrocités commises au Soudan.  Mais comme d’habitude, a poursuivi la Procureure, les détracteurs de la Cour et leurs communicants ont délibérément déformé cet appel pour en faire la victoire de M. Al-Bachir et des autres suspects.  Je serai claire, a martelé la Procureure: la détermination de mon Bureau à rendre une justice indépendante et impartiale au peuple du Soudan reste inchangée.

Le départ précipité de M. Al-Bachir d’Afrique du Sud démontre que les mandats d’arrêt contre lui sont toujours aussi valables qu’ils ne l’étaient quand ils ont été émis, a-t-elle poursuivi.  La décision rapide des tribunaux sud-africains est un précédent « frappant » que les autres États devraient imiter, a-t-elle ajouté.  La décision de la Cour suprême sud-africaine a souligné la reconnaissance grandissante par les tribunaux nationaux des obligations que les États doivent honorer en vertu du Statut de Rome. 

Le projet de justice pénale internationale, qui a en son cœur la CPI, exige un appui ferme et constant pour réussir et contribuer à l’édification d’un monde plus juste et plus pacifique, a prévenu la Procureure.  Ne laissons pas, a-t-elle dit, cette entreprise vertueuse se faire éroder voire sacrifier sur l’autel de la politique.  Il est plus que temps que le Conseil et les États joignent leurs forces à celles de la CPI et de la société civile pour forger des stratégies efficaces et concrètes pour l’arrestation des personnes poursuivies.

La détérioration de la situation au Darfour est toujours un sujet de grave préoccupation, a dit la Procureure, pas seulement pour mon Bureau mais aussi pour la communauté internationale, et en tout état de cause, pour le Conseil de sécurité.  Arrêter les personnes les plus responsables des atrocités et qui sont déjà celles contre lesquelles des mandats d’arrêt ont été délivrés est la seule manière de stopper les crimes, a insisté la Procureure. 

Elle a affirmé que les enquêtes de son Bureau sur les crimes commis au Darfour se poursuivent, certes pas au même rythme et avec la même intensité, mais elles se poursuivent.  Le fait est, a-t-elle alerté, que le Bureau a des ressources limitées et une lourde charge de travail.  Mais que l’on ne déforme pas la réalité et que l’on ne conclut surtout pas que les enquêtes ont été arrêtées ou que la Cour a abandonné les victimes des atrocités.  Loin de là, a assuré la Procureure: une équipe d’avocats et d’enquêteurs continue son travail mais à cause des contraintes financières, du manque d’accès au Soudan et d’un appui inadéquat du Conseil de sécurité, elle se contente de suivre et de documenter les incidents, et d’interroger les témoins quand c’est nécessaire et possible.

Le 26 juin 2015, la chambre préliminaire de la Cour a constaté que le Gouvernement du Soudan ne coopérait pas à l’arrestation de M. Adbel Raheem Mohammed Hussein, a poursuivi Mme Bensouda, indiquant que la même décision avait été rendue le 9 mars 2015 en ce qui concerne M. Al-Bachir.  Ces dernières décisions judiciaires ont porté à 10 le nombre de communications au Conseil de sécurité, a rappelé la Procureure.  Elle a donc demandé encore une fois au Conseil d’assurer le respect par le Soudan de sa résolution 1593 et a invité les parties au Statut de Rome à coopérer avec la Cour et à arrêter les individus concernés.  Ces États doivent jouer un rôle de chef de file pour évaluer la meilleure façon d’arrêter ces personnes et de les transférer à la Cour.  Ce dialogue aurait dû avoir lieu depuis longtemps et mon Bureau souhaite qu’on lui accorde la priorité, a encore dit la Procureure.

M. CARLOS OLGUÍN CIGARROA (Chili) a déclaré que le Conseil de sécurité devrait se montrer plus actif s’agissant de la situation au Darfour.  Le Conseil doit renforcer le dialogue avec le Bureau de la Procureure, a ajouté le représentant qui a appelé tous les États à faire de même.  Il a insisté sur l’importance du travail de la CPI qui est de mettre fin à l’impunité au Darfour.  

M. TANGUY STEHELIN (France) s’est dit vivement préoccupé par l’intensification des combats entre les Forces armées soudanaises et les groupes rebelles dans le Djebel Marra et le Nord-Darfour, en particulier la campagne de bombardements aériens qui frappe de manière indiscriminée les civils.  Les populations civiles continuent d’être les premières victimes d’une forme de punition collective, comme le montrent les quelque 121 000 personnes déplacées dans le Djebel Marra depuis janvier 2015, a-t-il souligné.

Il a également fait remarquer que les formes de violence continuaient de se diversifier et que les violences sexuelles se poursuivaient en toute impunité, tandis que cinq individus inculpés de crime de guerre, de crimes contre l’humanité et, pour l’un d’eux de génocide, continuent de se soustraire à la juridiction de la Cour pénale internationale et à occuper les plus hautes fonctions au sein de l’appareil d’État soudanais.  « Comment ne pas constater que cette impunité encourage la poursuite et le regain des exactions? » a lancé le représentant. 

Dans ce contexte, et alors que l’année 2015 pourrait atteindre un seuil de gravité supérieur à 2014 sur le plan humanitaire, il a reconnu que la MINUAD s’efforce d’accomplir son mandat dans des conditions difficiles.  L’Opération doit toutefois développer une planification à long terme qui lui permette d’avoir une vision stratégique de son action, a-t-il souligné, en ajoutant que « l’amélioration de la situation des populations civiles doit rester sa boussole ».

Après avoir rappelé les faits nombreux qui pourraient tomber sous le coup du Statut de Rome, Mme NIDA JAKUBONĖ (Lituanie) a exhorté la Procureure à continuer de suivre étroitement la situation au Darfour.  Il s’agit d’une situation complexe et multiforme, mais une chose est sûre: les attaques contre les civils sont facilitées par le climat d’impunité et le fait que la violence entraîne la violence.  Cela ne peut continuer et tous les auteurs des violations du droit international et du droit international humanitaire doivent être traduits en justice, s’est impatientée la représentante.  Le Gouvernement du Soudan, a-t-elle dit, devrait faire plus pour mettre fin aux attaques contre les civils, veiller à l’établissement des responsabilités et rendre justice aux victimes.  Il est important que le Gouvernement du Soudan et les autres parties respectent les obligations qui sont les leurs en vertu de la résolution 1593 (2005), dont celle de coopérer avec la Cour, y compris d’exécuter les mandats d’arrêt.  La représentante a ajouté que la dernière décision de la Cour sur la non-coopération du Soudan rappelle au Conseil qu’il doit assurer le suivi de ses saisines.  Le Conseil a un engagement particulier en ce qui concerne la situation au Darfour et il doit agir vigoureusement pour faire en sorte que ses propres résolutions soient pleinement mises en œuvre.     

M. DAVID PRESSMAN (États-Unis) a rappelé que la discussion était plus large et qu’il fallait mettre l’accent sur la situation des femmes et des enfants victimes de la violence au Darfour.  Il a exprimé sa préoccupation face au défaut de coopération du Soudan.  Les mandats d’arrêt restent pourtant d’actualité, a-t-il fait remarquer estimant que leur non-exécution était un affront fait aux victimes.  Il vaut mieux, a-t-il estimé, mettre l’accent sur une situation qui ne cesse de se détériorer plutôt que de parler du futur retrait de la MINUAD.  Le représentant a parlé des viols collectifs sur lesquels l’enquête reste au point mort.  Des communautés ont été détruites, a-t-il déploré, signalant que 573 000 personnes ont quitté leurs villages depuis 2014.  La MINUAD doit pouvoir exercer son mandat de protection des civils et de facilitation de l’acheminement de l’aide humanitaire, tout en continuant de rassembler les preuves des abus commis, a-t-il souhaité.

Notant que les membres de la communauté internationale ne sont pas toujours d’accord sur les questions relatives au Darfour, il a cependant relevé que ceux du Conseil de sécurité sont d’accord pour appliquer les décisions qu’ils ont adoptées et dont le Gouvernement du Soudan fait fi.  Le Conseil, a poursuivi le représentant, doit aussi continuer de se concentrer sur le soutien et la protection dus aux Casques bleus et à cet égard, exiger que le Gouvernement du Soudan rende compte de ses actes.  Le représentant s’est en effet attardé sur le refus du Gouvernement d’autoriser un vol, lequel refus a empêché l’évacuation d’un soldat blessé.  Il a, une nouvelle fois, dénoncé les invitations et les déplacements des personnes sous le coup d’un mandat d’arrêt.

M. XU ZHONGSHENG (Chine) a estimé que la lenteur du processus politique est le principal problème au Darfour.  Il a salué les efforts du Gouvernement soudanais pour mettre en œuvre le Document de Doha, insistant sur le règlement politique de la situation.  La communauté internationale devrait aussi réunir les conditions favorables à un tel règlement, a-t-il dit. 

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) s’est dit déçu du contenu du rapport de la Procureure, en expliquant qu’après 21 rapports, 9 mandats d’arrêt et 10 années d’efforts constants, la situation empire et la moitié des victimes continue d’être des civils.  Le climat d’impunité est d’autant plus inacceptable qu’il se développe alors que le monde dispose d’un instrument créé précisément pour lutter contre l’impunité.  Le Conseil de sécurité doit apporter son appui à la Cour, s’agissant en particulier de l’exécution des mandats d’arrêt.  Le Conseil de sécurité doit répondre à cette situation, a insisté le représentant qui a souligné l’importance de la coopération des États avec la CPI.

M. JULIO HELDER MOURA LUCAS (Angola) a demandé à la communauté internationale de prendre position sur les crimes commis et a invité les parties à mettre un terme aux hostilités par des négociations politiques.  Il faut panser les plaies et œuvrer à la réconciliation, a-t-il recommandé, afin d’établir une paix durable au Darfour.  Le représentant a demandé à la CPI de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale du Soudan, tout en s’alignant sur la position de l’Union africaine (UA).  Il a lancé un appel au Conseil de sécurité pour qu’il examine la demande de l’Union européenne de voir s’instaurer des relations plus constructives entre l’Union africaine et la CPI.  Il a lui-même demandé un dialogue et des négociations pour régler le différend sur le Darfour.  Aux parties soudanaises, il a demandé de faire des concessions et de négocier un accord de paix.

M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) a déclaré que le débat d’aujourd’hui montre à quel point l’une des décisions du Conseil, à savoir le renvoi à la CPI de la situation au Darfour, est bafouée par les principaux inculpés et par des États qui ont des engagements vis-à-vis du Statut de Rome.  Le représentant a noté les critiques de certains États africains, une situation qui est très mauvaise pour le Conseil de sécurité, la CPI, la paix et la justice, a-t-il dit.  Le Conseil de sécurité, mais aussi la CPI et l’Union africaine doivent réfléchir aux implications à long terme de cette division entre la Cour et des États africains qui étaient pourtant les premiers et les plus fervents partisans de la CPI.

La question est tout aussi importante pour l’Assemblée des États parties qui doit analyser, au-delà du Darfour, l’état de ces relations.  Le Conseil de sécurité doit mesurer à quel point sa saisine a conduit à une chaîne d’événements qui a réduit l’autorité de la Cour en Afrique mais aussi ailleurs.  C’est une situation très troublante, a confié le représentant qui a conseillé au Conseil de réfléchir soigneusement avant d’user de son pouvoir de saisine.  S’il ne s’engage pas véritablement à appuyer la mise en œuvre de son renvoi, le Conseil doit savoir que les conséquences à long terme pourraient  être négatives.

Le non-respect par le Soudan de la décision de renvoi n’est pas un acte isolé, a martelé le représentant, en pointant l’éventail des interventions du Conseil au Darfour, et même au Soudan, où le non-respect de Khartoum ou, au mieux, son approbation sporadique, a été un défi systémique. S’il a espéré que la prorogation faite ce matin du mandat de l’Opération au Darfour ouvrira une nouvelle ère dans les relations entre ladite Opération et le Gouvernement du Soudan, le représentant s’est rendu à l’évidence: les dix dernières années ont raconté la triste histoire de la non-coopération, une histoire qui se raconte aussi, et de manière plus vivace encore, dans le livre des sanctions imposées au Soudan.  Après tous ces échecs, c’est la relation avec Khartoum qui doit passer au-devant de la scène.  Le Conseil doit penser à la manière de changer le paradigme avec Khartoum et ce dernier doit réfléchir à la relation qu’il veut avec la communauté internationale, en commençant par le Conseil, a conclu le représentant.    

Mme DINA KAWAR (Jordanie) a souligné l’importance de la CPI qui joue un rôle central pour rendre la justice pénale et éviter l’impunité.  Préoccupée par la dégradation de la situation humanitaire au Darfour et par la poursuite des attaques, elle a réitéré l’importance de la coopération avec la CPI et de l’application des résolutions du Conseil de sécurité.  La situation au Darfour ne peut être traitée sans un programme de développement durable, a-t-elle aussi remarqué, plaidant pour le retour des réfugiés.  Elle a enfin souhaité l’établissement d’une paix durable, grâce à la coopération et la coordination de toutes les parties concernées.

M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a déploré le refus de l’opposition armée de participer au processus de Doha et a expliqué qu’il fallait appliquer la décision de 2013 sur l’octroi d’une aide financière au Darfour, plaidant aussi en faveur de la levée de l’embargo américain.  Favorable à la participation des rebelles du Darfour au processus de paix, il a souhaité que l’on mette fin à l’appui extérieur.  Le représentant a demandé à la CPI de jeter un regard impartial sur les parties.  Il a dénoncé « une guerre de l’information dont les histoires de violence sexuelle à grande échelle » qui, selon lui, sont terminées.  Rappelant le pouvoir de la rumeur, il a attiré l’attention sur les résultats de l’enquête détaillée qui a été entreprise.

M. TCHOULI GOMBO (Tchad) a condamné toutes les formes de violences contre les civils, en particulier contre les femmes et les enfants au Darfour.  Les attaques contre les agents humanitaires et la MINUAD sont intolérables et leurs auteurs doivent être traduits en justice, a ajouté le représentant qui a réitéré l’appel de l’Union africaine à la communauté internationale pour qu’elle travaille au rétablissement de la paix et de la justice au Darfour.  Il a parlé de la nécessité de soutenir le dialogue et la réconciliation et souligné qu’il n’y a pas de solution militaire au Darfour.  La communauté internationale doit tout mettre en œuvre pour barrer la route à l’impunité, a aussi déclaré le représentant.

Mme HELEN MULVEIN (Royaume-Uni) a appelé à un accès humanitaire immédiat et sans entrave aux populations et a souligné la nécessité d’une réaction non ambiguë de la communauté internationale.  Il faut mettre un terme aux abus contre les droits de l’homme et au droit international humanitaire et traduire en justice les auteurs des violations.  La représentante a regretté que la Procureure de la CPI ne puisse pas mener des enquêtes au Darfour en raison de la non-coopération du Soudan.   Elle a dénoncé le fait que le Président Al-Bachir continue de voyager, soulignant que l’obligation faite aux États parties est claire.  L’appui des États africains à la CPI est « essentiel » pour l’exécution des mandats d’arrêt, a insisté la représentante en demandant au Conseil de sécurité de prendre les mesures contre les États qui ne coopèrent pas avec la Cour.

M. MARTIN S. ADAMU (Nigéria) s’est dit préoccupé par la montée de la violence au Darfour, souhaitant que les troupes fassent tampon pour éviter les attaques.  Il a appuyé les suggestions faites en faveur d’une paix durable et dénoncé les crimes commis contre les femmes et les agents humanitaires.  Il a appelé le Soudan à garantir un accès sans entrave à l’aide humanitaire et prôné un dialogue entre la CPI et l’Union africaine pour dissiper les différends.  Il a souligné que, comme l’expérience le démontre, il n’y a pas de solution militaire au conflit et a prévenu que le développement ne peut se faire sans paix.

M. WILMER MÉNDEZ (Venezuela) s’est dit préoccupé par la politisation des travaux de la CPI qu’il a imputée à certains membres du Conseil de sécurité.  Cette politisation affaiblit le caractère institutionnel de la Cour, a-t-il prévenu.  Il a d’ailleurs estimé que le mandat d’arrêt contre le Président Al-Bachir constitue une violation du droit international car son immunité est garantie par la Constitution.  En l’occurrence, le Conseil de sécurité et la CPI ont outrepassé leur droit, a déclaré le représentant pour qui les mandats d’arrêt sont « nuls et non avenus ».  En revanche, il a exhorté les autorités nationales à arrêter les personnes qui ne jouissent pas de l’immunité et qui font l’objet d’un mandat d’arrêt de la Cour.  La coopération, a-t-il insisté, doit se fonder sur le respect mutuel et le droit international.  Il s’est dit favorable à une solution négociée, dont un dialogue sans condition préalable.  Il faut promouvoir une atmosphère favorable au dialogue, a-t-il dit en lançant aux parties un appel à mettre en œuvre l’Accord de cessation des hostilités qui pourrait constituer la base du dialogue.

Mme SITI HAJJAR ADNIN (Malaisie) s’est dite profondément préoccupée par la situation sécuritaire au Darfour, en particulier l’escalade de la violence, les conflits intercommunautaires, les actes de banditisme et la criminalité.  La prolifération des armes légères et de petit calibre contribue grandement à la déstabilisation dans la région, a-t-elle constaté.  Elle a appelé les parties à mettre fin sans plus tarder aux attaques contre les civils, le personnel humanitaire et du maintien de la paix.

Se disant convaincue qu’aucune solution militaire ne résoudra le conflit, la représentante a exhorté les parties à rester animés par les principes du Document de Doha et a encouragé le Gouvernement du Soudan à reprendre des négociations directes avec les parties.  Elle a également estimé que le déploiement, par le Gouvernement du Soudan, d’efforts visant à respecter les résolutions du Conseil de sécurité, ainsi qu’un engagement à traduire en justice les responsables des violations des droits de l’homme et des violations internationales, permettraient de rétablir la confiance.   

M. HASSAN HAMID HASSAN (Soudan) a qualifié de « plaisanterie incroyable » les propos de la Procureure sur le Président Al-Bachir qui, a-t-il expliqué, n’a quitté l’Afrique du Sud que lorsqu’il a eu terminé sa mission comme que prévue.  La Procureure parle du Président élu d’un État, a-t-il rappelé, considérant que ces propos étaient une attaque contre son pays.  La Procureure est devenue une « ennemie ouverte du Soudan », a-t-il tranché.

Pour éviter tout doute sur sa participation à la réunion du Conseil de sécurité aujourd’hui, le représentant a souligné qu’il est venu dire le rapport de la Procureure pêche par manque d’objectivité.  Le Soudan n’est pas partie au Statut de Rome et n’est donc pas concerné par ses processus.  La Cour n’a aucune compétence au Soudan, a-t-il insisté.  Il a accusé la Procureure d’un « parti pris » qui ne fait que confirmer la politisation de la Cour.  Il a dénoncé une présentation des faits fallacieuse basée sur des sources inconnues.  Nous parlons de choses qui relèvent du mandat d’autres organisations internationales comme celles chargées des questions de droits de l’homme et de droit humanitaire.  Est-ce que la Cour veut désormais assumer des compétences qui sont du ressort d’autres organes?

Le rapport, a encore accusé le représentant, se fonde sur des éléments erronés, alors que nous avons la preuve qu’il n’y a pas eu de génocide ou d’autres crimes graves qui tombent sous la Cour.  L’État soudanais, a-t-il expliqué, a élargi son autorité sur le plan de la sécurité afin de faire face à toutes les difficultés que connait son pays.  Le Gouvernement soudanais est soucieux de la justice et le représentant a voulu pour preuve le Document de Doha qui contient un paragraphe sur la justice et la réconciliation.  En vertu de ce Document, un tribunal spécial a été créé, prononçant même dans certains cas la peine capitale.  Personne, a martelé le représentant, ne peut remettre en cause la compétence du pouvoir judiciaire soudanais. 

Les affaires africaines doivent être traitées par les organes africains, a-t-il aussi affirmé.  La tentative du Bureau de la Procureure de critiquer les États est, selon lui, une ingérence dans les affaires des organisations régionales qui rejettent d’ailleurs la compétence de la CPI au Darfour.  Ce sont là des décisions prises par des États qui représentent les deux tiers de la communauté internationale, a-t-il souligné.  Tous les États épris de paix, a-t-il prédit, continueront à recevoir le Président soudanais, un président que l’on retiendra dans l’histoire comme celui qui a réussi à signer le Document de Doha pour la paix au Darfour.  Toutes les enceintes internationales devraient le recevoir, a-t-il estimé.

En ce qui concerne les déclarations de la France, des États-Unis et du Royaume-Uni sur la situation qui aurait empiré au Darfour en 2014, le représentant s’est demandé s’ils parlaient bien de la même région.  80% du Document de Doha a été appliqué, a-t-il avancé, avant de rappeler que l’ancien Président Bush était lui-même opposé à la CPI au motif qu’elle empiète sur la souveraineté nationale et que de nombreuses réserves avaient été exprimées quant aux compétences du Procureur depuis 1998.  Il s’est interrogé sur l’impartialité d’une Cour qui n’a jusqu’ici exercé sa compétence qu’en Afrique, et à ce propos, pourquoi la Procureure ne mentionne pas les mouvements rebelles dans son rapport?

 

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